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Informe provisional - Informe núm. 338, Noviembre 2005

Caso núm. 2392 (Chile) - Fecha de presentación de la queja:: 14-OCT-04 - Cerrado

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  1. 645. La plainte figure dans une communication conjointe, du 14 octobre 2004, de la Fédération des syndicats de chaînes et de sociétés de production de télévision chiliennes (FETRA-TV) et du Syndicat des travailleurs de la société de télévision de l’Université pontificale catholique du Chili (Syndicat de Canal 13 TV). Dans une communication du 30 mars 2005, la FETRAV-TV a adressé un complément d’information.
  2. 646. Le gouvernement a adressé ses observations dans des communications des 21 février, 8 mars, 6, 14, 18 avril et 2 août 2005.
  3. 647. Le Chili a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 648. Dans sa communication du 14 octobre 2004, la Fédération des syndicats de chaînes et de sociétés de production de télévision chiliennes (FETRA-TV) et le Syndicat des travailleurs de la société de télévision de l’Université pontificale catholique du Chili (Syndicat de Canal 13 TV) font état de pratiques, à Canal 13 TV, qui vont à l’encontre des droits syndicaux. Ces pratiques visent à affaiblir et, en définitive, à éliminer le Syndicat de Canal 13 TV. Les plaignants font état de licenciements collectifs, depuis 2001, de travailleurs qui avaient des contrats à durée indéterminée, de l’engagement et de l’utilisation d’entreprises qui fournissent, sous le régime de la sous-traitance, des travailleurs pour les activités principales – cameramen, éclairagistes, techniciens audio et vidéo, machinistes, etc. Les plaignants indiquent que l’inspection du travail compétente a constaté cette situation, établi un rapport et appliqué des amendes pour cette infraction au Code du travail. Les plaignants ajoutent que, en réalité, dans les cas susmentionnés, il existe une relation de subordination ou de dépendance entre ces travailleurs et la société de télévision de l’Université pontificale catholique du Chili, et que les prétendus contrats individuels qui lient les travailleurs aux entreprises extérieures ne correspondent pas à la réalité professionnelle. En fait, ces entreprises sont des «employeurs apparents». Il s’agit donc d’une «simulation», situation à laquelle se réfère l’article 478 du Code du travail. Ce système constitue pour les plaignants une pratique antisyndicale contraire aux conventions nos 87 et 98 et au Code du travail car elle a affaibli l’organisation syndicale et empêché l’exercice du droit de négociation collective, ces personnes n’ayant pas de contrat de travail avec Canal 13 TV. De fait, le nombre des membres du syndicat a baissé (de 723 en 2000 à 491 en 2004), alors que 1 000 personnes en tout travaillent à Canal 13 TV.
  2. 649. Par ailleurs, les plaignants affirment que Canal 13 TV a pour pratique de recourir à de fausses prestations de services rémunérées par des honoraires (contrats de prestations de services). Dans les faits, les personnes qui fournissent ces services le font comme des travailleurs dépendants, travailleurs dont la situation est régie par le Code du travail. Cette pratique nuit à ces personnes puisqu’on ne reconnaît pas leurs droits syndicaux, lesquels sont consacrés dans le Code du travail, par exemple celui de s’affilier à un syndicat et de négocier collectivement.
  3. 650. De plus, à l’occasion de la négociation collective entamée le 20 mai 2004 dans la société de télévision de l’Université pontificale catholique du Chili, les travailleurs qui y participaient ont exercé le droit de grève qu’établit l’article 374 du Code du travail. La grève a commencé le 13 juillet 2004. Toutefois, alors qu’elle avait commencé, Canal 13 TV a enfreint l’article 381 du Code du travail en remplaçant illicitement de nombreux grévistes. Ces remplacements ont mis brusquement un terme à la grève licite, ce qui a obligé les travailleurs qui participaient à la négociation collective à accepter la prorogation de la convention collective en vigueur. Dans ce cas, l’article 369 du Code du travail dispose que les rémunérations et avantages des travailleurs que prévoit la convention collective en vigueur ne peuvent pas être réajustés. Les inspecteurs du travail ont constaté ces pratiques antisyndicales de l’entreprise, lesquelles auraient été dénoncées aux tribunaux compétents.
  4. 651. Dans sa communication du 30 mars 2005, la FETRA-TV indique que, à Canal 13 TV, il y a à ce jour environ 300 personnes qui ont été engagées par le biais de tiers. Il s’agit en fait d’effectifs qui sont devenus permanents. De plus, ce que l’entreprise appelle «externalisation des tâches» ou «sous-traitance» consiste en fait à recourir à des intermédiaires, à des pseudo-employeurs qui ne sont rien d’autre que des fournisseurs de personnel. Cette situation n’est pas prévue dans le Code du travail. Par conséquent, la pratique susmentionnée est illicite et a privé des centaines de travailleurs du droit d’appartenir au syndicat et de négocier collectivement avec Canal 13 TV. La baisse des rémunérations et la perte de tous les avantages collectifs a été la conséquence directe et vérifiable de la situation susmentionnée, d’où une discrimination entre les travailleurs engagés directement par Canal 13 TV, qui sont syndiqués et bénéficient d’avantages collectifs, et ceux qui, pour le même travail, sont moins rémunérés, ne bénéficient pas d’avantages collectifs et ne peuvent pas s’affilier au syndicat. De plus, ce système est un moyen de chantage ou de pression illicite sur les travailleurs syndiqués étant donné que, souvent, on préfère pour des activités d’une plus grande valeur professionnelle et/ou économique des travailleurs meilleur marché qui sont privés de droits collectifs – entre autres, indemnités de séjour, logement, pauses-repas et droits prévus par la réglementation –, ce qui constitue une menace tacite constante de licenciement pour des raisons de coût.
  5. 652. Les faits susmentionnés ont coïncidé avec une baisse manifeste de l’affiliation syndicale. Parmi l’ensemble des travailleurs engagés par le biais de tiers, on en compte une quarantaine qui, parce qu’ils ne sont plus membres du syndicat, ne peuvent plus négocier collectivement avec l’administration de Canal 13 TV. Ils ont perdu tous les avantages collectifs mais, alors qu’ils remplissent les mêmes fonctions qu’auparavant, ils sont moins rémunérés. Les 260 autres travailleurs engagés par le biais de tiers n’ont jamais pu se syndiquer ou négocier collectivement, soit parce que pendant des années ils n’ont pu conclure que des contrats temporaires (étant donné qu’ils fournissaient leurs services depuis longtemps, ils n’auraient pas dû être dans cette situation) et qu’ensuite ils ont été engagés par le biais de tiers, soit parce qu’ils ont été embauchés d’emblée par le biais de tiers. Dans tous les cas, il s’agit de personnes qui travaillent en permanence pour Canal 13 TV mais dont les droits liés à cette situation ne sont pas reconnus.
  6. 653. Le nombre des membres du syndicat a baissé et, en mars 2005, on en comptait 450. Cette baisse est due dans certains cas à ce que les travailleurs n’exercent pas leur droit de se syndiquer parce qu’ils craignent de perdre leur emploi (le fait est que, en raison des maigres résultats, voire des résultats nuls, des procès nombreux et longs qui ont été intentés, le sentiment d’impunité et de vulnérabilité crée un climat de crainte). En mars 2005, on comptait environ 1 000 personnes qui travaillaient pour Canal 13 TV, soit en vertu d’un contrat de travail direct, soit au moyen de la sous-traitance.
  7. 654. A propos des faux contrats de prestations de services rémunérés par des honoraires, l’administration de la chaîne continue d’y recourir, malgré les plaintes qui ont été portées devant l’inspection du travail. Il convient de mentionner la dernière négociation collective et le fait que du personnel de remplacement a été engagé pendant la grève (environ 300 personnes) sans que n’aient été respectées les conditions requises par la loi.
  8. 655. Canal 13 TV a été chargé, pour la sixième année consécutive, de retransmettre le festival international de la chanson de Viña del Mar, l’un des plus importants de ce type en Amérique latine. A cette occasion, les opérations de contrôle du son interne dans la Quinta Vergara, lieu où le festival se déroule, ont été confiées à un sous-traitant. Quatre opérateurs du son de Canal 13 TV, qui avaient fait ce travail les années précédentes, en ont été exclus, dont M. Iván Mezzano, secrétaire du syndicat en place dans la société, ce qui a entraîné pour lui un préjudice financier et professionnel direct. De plus, l’immunité syndicale dont il bénéficie en vertu du Code du travail a été enfreinte.
  9. 656. A l’occasion de la dernière négociation collective en juin 2004, des travailleurs ont été exclus du groupe de négociation en vertu d’une clause annexe de leur contrat individuel de travail que l’entreprise leur a imposée et par laquelle ils ont renoncé à négocier collectivement. Ils avaient accepté cette clause de crainte de perdre leur emploi. Sont aussi exclus de la négociation collective les travailleurs engagés pour accomplir une tâche déterminée. Ainsi, toutes ces personnes n’ont pas la possibilité d’accéder aux avantages qui ont été négociés collectivement. A ce jour, le syndicat ne sait pas exactement combien de personnes ont subi des pressions visant à leur faire accepter ces clauses annexes, étant donné que l’entreprise effectue ces manœuvres à l’insu de la direction du syndicat.
  10. 657. Autre forme de pratique antisyndicale de l’entreprise: aussitôt après la fin de la grève, les travailleurs qui n’avaient pas fait partie du groupe de négociation ont tous reçu un bon de 180 000 pesos, le 30 juillet 2004, tandis que le salaire de ceux qui avaient participé à la négociation a été diminué de 20 pour cent pour compenser les jours pendant lesquels ils ont exercé leur droit de grève, ce qui constitue une discrimination ouverte à l’encontre des travailleurs qui ont négocié collectivement.
  11. 658. A la suite des graves atteintes à la convention collective qui ont eu lieu immédiatement après la grève licite de juillet 2004, force a été au syndicat de porter plusieurs plaintes (quatre à ce jour) devant les tribunaux de justice. Trois de ces plaintes ont trait au non-paiement, ou au paiement partiel, de certaines prestations collectives. Une autre porte sur le fait que, en vertu d’une décision unilatérale de l’administration de la chaîne, 50 travailleurs qui participaient pour la première fois à une négociation collective, à savoir la dernière en date, ont été exclus après cette négociation de certains ou de l’ensemble des avantages collectifs dont bénéficient d’autres travailleurs qui ne sont pas membres du syndicat. Pourtant, la chaîne garantit ces avantages à d’autres travailleurs qui ne sont pas membres du syndicat. A la suite des plaintes susmentionnées, récemment, la sous-direction du personnel de Canal 13 TV a harcelé directement les membres du syndicat en adressant à chacun d’eux des communications écrites pour leur indiquer expressément que, dans le cadre de l’un des procès en cours, l’entreprise n’a pas pu respecter la confidentialité des données relatives à chacun des travailleurs qui ont reçu la communication, au motif qu’à la demande du syndicat le tribunal a ordonné de joindre copie de l’état de paiement des rémunérations et des contrats de chaque plaignant. Dans cette communication, la sous-direction fait état des «désagréments» que l’action du syndicat entraîne pour l’entreprise. Cette initiative n’avait d’autre but que d’intimider les travailleurs syndiqués. Au moment où Canal 13 TV adressait la communication, trois travailleurs syndiqués qui étaient liés par un contrat à durée indéterminée ont été licenciés. Cette politique de la chaîne a entraîné la désaffiliation de plusieurs travailleurs. Elle met en évidence le harcèlement dont le syndicat est l’objet. De la sorte, la chaîne est parvenue à inquiéter fortement certains des plus de 400 travailleurs dont les droits sont menacés. La justice a été saisie pour faire respecter ces droits.
  12. B. Réponse du gouvernement
  13. 659. Dans ses communications des 21 février, 8 mars et 6, 14 et 18 avril 2005, le gouvernement déclare que la législation chilienne recueille les principes des conventions nos 87 et 98. Elle prévoit aussi des mécanismes d’inspection et de sanctions administratives, lesquels démontrent un degré appréciable d’efficacité. Ainsi, l’inspection du travail peut imposer des amendes en cas d’infraction à la législation du travail, porter ces infractions à la connaissance de l’autorité judiciaire et garantir le respect des principes contenus dans les conventions no 87 et 98.
  14. 660. Dans ce sens, le livre IV du Code du travail de la République du Chili établit et réglemente de façon complète et précise la procédure de négociation collective, à laquelle ont accès non seulement les organisations syndicales en place mais aussi les travailleurs qui se regroupent exclusivement à cette fin, dans le cas où ils ne seraient pas membres d’un syndicat.
  15. 661. Ainsi, la législation du travail garantit clairement l’une des principales fins de la liberté syndicale, à savoir permettre aux employeurs et aux salariés de former des organisations indépendantes des pouvoirs publics et ayant la capacité de déterminer, au moyen de conventions collectives librement conclues, les salaires et autres conditions d’emploi.
  16. 662. Sans préjudice de ce qui précède, et prenant en compte les graves problèmes de légitimité qu’ont les organisations syndicales en place dans une entreprise face à leur partenaire direct, ainsi que la procédure de négociation collective, le gouvernement a favorisé toute une série d’initiatives à l’échelle nationale, avec divers ministères, destinées à promouvoir et à légitimer le dialogue dans l’entreprise.
  17. 663. Comme le reconnaît la Fédération des syndicats de chaînes et de sociétés de production de télévision chiliennes (FETRA-TV) dans la communication qu’elle a adressée au Bureau, les mécanismes d’inspection et de sanctions administratives que prévoit la législation chilienne ont démontré un degré appréciable d’efficacité. Ainsi, l’inspection communale du travail compétente (inspection nord-est du travail) s’est rendue dans les locaux de la société de télévision de l’Université pontificale catholique du Chili (Canal 13 TV) et, après avoir réalisé l’inspection opportune, a appliqué des sanctions pour divers motifs que prévoit la loi sur le travail. Elle a porté ces infractions à la connaissance des tribunaux ordinaires du travail. L’entreprise a intenté un recours judiciaire contre ces sanctions administratives.
  18. 664. Par ailleurs, le gouvernement, qui a rencontré les parties à ce conflit collectif, ne peut ignorer l’état déplorable de détérioration des relations professionnelles entre la société de télévision de l’Université pontificale catholique du Chili (Canal 13 TV) et le syndicat des travailleurs de cette entreprise. A ce sujet, il faut garder à l’esprit que, très souvent, la grève est le symptôme de problèmes plus amples et plus diffus, et que la réclamation en question des travailleurs a pour cause immédiate un conflit collectif que les parties ont mal résolu. Ainsi, tant l’entreprise que les travailleurs reconnaissent qu’ils sont pris dans un processus de décomposition de leurs relations, lesquelles ont été harmonieuses pendant des années. Il convient de signaler que près de 90 pour cent des travailleurs de l’entreprise étaient membres du syndicat, y compris les cadres supérieurs de la chaîne, lesquels, le plus souvent, ont été les promoteurs de nombreuses initiatives syndicales.
  19. 665. Cette coexistence s’est détériorée en même temps que la situation économique de la société de télévision de l’Université pontificale catholique du Chili (Canal 13 TV). En raison de cette crise économique, l’entreprise a décidé d’externaliser certains services que les travailleurs considèrent comme fondamentaux. Le syndicat estime que cette politique de l’entreprise va à l’encontre de la liberté syndicale, étant donné qu’elle a fait baisser progressivement le nombre des membres du syndicat.
  20. 666. Le gouvernement a été extrêmement préoccupé par cette politique. En effet, la prestation de services par le biais de tiers s’inscrit dans un cadre juridique fragile qui permet aux entreprises, sans enfreindre la loi de façon flagrante, de mener à bien leurs activités productives sans assumer le degré de direction et de supervision indispensable et sans reconnaître le degré de subordination et de dépendance qui est obligatoire pour constituer la relation de travail. Aussi le gouvernement a-t-il soumis au parlement un projet de loi qui vise à réglementer la pratique susmentionnée et, de la sorte, à protéger les travailleurs, lesquels sont la partie la plus faible de la relation de travail.
  21. 667. A propos du remplacement de travailleurs ayant participé à la grève générale qui a eu lieu pendant la négociation collective, le gouvernement indique qu’après avoir examiné les faits l’inspection du travail nord-est a constaté ce qui suit: 1) ont participé à la négociation collective 509 travailleurs de l’entreprise qui ont voté la grève et l’ont menée pendant quatre jours, au terme desquels la commission de négociation, le 17 juillet 2004, s’est prévalue des dispositions du deuxième paragraphe de l’article 369 du Code du travail; et 2) l’inspection du travail nord-est a constaté que 120 travailleurs avaient été remplacés, et appliqué à l’entreprise des amendes d’un montant de 5 580 unités fiscales mensuelles. L’entreprise a intenté un recours contre ces sanctions devant la quatrième chambre du tribunal du travail de Santiago. La chambre, dans sa sentence de première instance du 4 novembre 2004, n’a pas donné suite à la plainte pour pratiques antisyndicales qui avait été portée contre la société de télévision de l’Université pontificale catholique du Chili. De son côté, la direction du travail, en vertu des pouvoirs que lui confèrent la loi et la procédure, a intenté un recours contre cette sentence. Le syndicat des travailleurs de la chaîne a recouru au même droit. Etant donné que la justice n’a pas encore tranché, il est impossible d’affirmer si, effectivement, l’entreprise a commis ou non ces pratiques antisyndicales.
  22. 668. Au sujet du licenciement de 100 travailleurs membres du syndicat avant le commencement de la négociation collective, le gouvernement indique que, selon les travailleurs de l’entreprise, ces licenciements constituent des pratiques qui portent atteinte à la liberté syndicale. Le gouvernement ajoute que, à la suite de l’enquête de l’inspection du travail nord-est, l’infraction à la législation du travail a fait l’objet d’une plainte (enregistrée sous le no L-2561-2004) devant la quatrième chambre du tribunal du travail de Santiago. Dans une sentence de première instance prononcée le 26 août 2004, la juge titulaire s’est prononcée contre les conclusions de l’organe d’inspection et en faveur de la société de télévision de l’Université pontificale catholique du Chili.
  23. 669. Toutefois, dans le cadre de l’affaire susmentionnée, tant la direction du travail, par le biais de l’inspection nord-est, que le syndicat des travailleurs de l’entreprise ont interjeté des recours en cassation et en appel. La présentation de ces recours fait que la procédure n’est pas arrivée à son terme. Il est donc difficile d’affirmer à ce stade que l’entreprise n’a pas observé les dispositions qui garantissent la liberté syndicale.
  24. 670. Quant à la simulation de l’engagement de travailleurs, c’est-à-dire par le biais de tiers, que l’article 478 du Code du travail sanctionne par des amendes, le gouvernement indique que l’inspection communale du travail de Santiago nord-est, après avoir procédé au contrôle correspondant, a appliqué à la société de télévision une sanction administrative en vertu de résolutions en date du 21 juillet 2003. Concrètement, l’entreprise a fait l’objet d’une sanction administrative pour infraction aux dispositions de l’article 478 du Code du travail, à savoir la simulation de l’engagement de travailleurs par le biais de tiers, et d’autres sanctions administratives pour les infractions suivantes: ne pas avoir fait enregistrer les contrats des travailleurs qui ont été mentionnés dans la résolution respective de sanction; ne pas avoir établi un registre de présence aux fins du contrôle des heures de travail normales et supplémentaires de ces travailleurs; et ne pas avoir remis, au moment du paiement du salaire, un bulletin indiquant le montant versé et les modalités appliquées pour déterminer les déductions effectuées. L’Université pontificale catholique du Chili a intenté devant la sixième chambre du tribunal de Santiago un recours judiciaire contre la sanction administrative. La période d’examen et de corroboration des faits qui font l’objet de la plainte est arrivée à son terme mais le tribunal n’a pas encore tranché.
  25. 671. Dans sa communication du 2 août 2005, le gouvernement se réfère à la communication de FETRA-TV datée du 30 mars 2005 et déclare que le Syndicat de Canal 13 TV a présenté, en 2005, une requête devant la troisième chambre du tribunal de Santiago. A ce sujet, le tribunal a demandé des informations à la Direction du travail et de la prévoyance sociale qui a répondu à travers un rapport de contrôle. Le gouvernement indique que, d’une manière générale, les allégations de FETRA-TV sont les mêmes que celles de la requête en justice susmentionnée.
  26. 672. Enfin, le gouvernement adresse les commentaires de la société de télévision de l’Université pontificale catholique du Chili (Canal 13 TV) à propos de la plainte. Selon l’entreprise, elle n’a pas soumis les travailleurs des entreprises extérieures à des mesures susceptibles de les empêcher d’exercer leurs droits syndicaux. Il est donc difficile, selon Canal 13 TV, de l’accuser de porter atteinte à la liberté syndicale. En 2002 et 2003, l’entreprise a commencé à externaliser, d’une façon légitime et conforme au droit, des activités inhérentes à son fonctionnement normal ou des activités complémentaires. Cette externalisation (décentralisation productive) a eu lieu à la suite de plusieurs initiatives destinées à rationaliser et à restructurer les différentes administrations et organismes de l’entreprise, c’est-à-dire à la suite d’un processus naturel qui vise à s’adapter à l’évolution du secteur de la télévision, tant à l’échelle nationale qu’internationale.
  27. 673. Selon l’entreprise, la direction du travail, par le biais de ses inspecteurs, a appliqué pour ce type d’externalisation un critère différent, lequel s’est traduit par des sanctions pour «avoir simulé l’engagement de personnel par le biais de tiers appelés entreprises extérieures». Selon Canal 13 TV, cette sanction, outre le fait qu’elle est arbitraire et illicite, ne correspond pas à la réalité des faits. L’entreprise n’a jamais essayé de recourir à des subterfuges visant à ne pas observer des normes impératives et, assurément, elle n’a jamais commis d’actes permettant de supposer l’existence d’une simulation illicite. Se fondant sur les arguments susmentionnés, Canal 13 TV a intenté un recours judiciaire contre ces sanctions devant la sixième chambre du tribunal du travail de Santiago, recours enregistré sous le no 3855-2003. Actuellement, il fait l’objet d’une procédure de première instance et l’organe juridictionnel n’a pas encore tranché.
  28. 674. A propos de l’allégation selon laquelle des pratiques antisyndicales auraient été commises à l’occasion de la négociation collective, l’entreprise affirme qu’il n’y a pas eu dans les faits d’engagement de nouveaux travailleurs, pas plus qu’il n’y a eu de réattribution des fonctions susceptible de porter atteinte à l’exercice légitime du droit de grève. Documents à l’appui, on a précisé aux inspecteurs que la dernière offre qui a été faite à l’organisation syndicale était conforme à chacune des conditions requises par l’article 381 du Code du travail, et qu’aucun nouveau travailleur n’avait été embauché. De plus, il a été signalé aux inspecteurs que les travailleurs qui se trouvaient dans les locaux de la chaîne étaient des travailleurs non syndiqués qui fournissaient des services depuis un certain temps dans l’entreprise, qui remplissaient les fonctions normales prévues dans leurs contrats de travail respectifs et qui, en aucune façon, ne pouvaient être qualifiés de remplaçants. Mais aucun de ces arguments n’a empêché l’application de la sanction respective. L’autorité judiciaire a donné raison à l’entreprise en première instance et le recours que la direction du travail a interjeté n’a pas encore été tranché. A propos de la prétendue existence de contrats de travail établis sous la forme de contrats prévoyant le versement d’honoraires, l’entreprise indique qu’elle veille à un degré élevé de formalisation des relations professionnelles, quelles qu’en soient les modalités (entre autres, contrats à durée indéterminée, contrats à durée déterminée, contrats à la tâche). L’engagement de personnes en vertu de contrats de services rémunérés par des honoraires constitue une exception dans l’entreprise et ces personnes représentent un pourcentage extrêmement faible des effectifs. Canal 13 TV n’a fait l’objet de plaintes pour ces motifs que dans quelques situations très ponctuelles et, dans plusieurs de ces cas, elle a obtenu des sentences favorables qui confirment expressément que ces contrats étaient conformes à la loi.
  29. 675. Au sujet de l’allégation selon laquelle des travailleurs auraient été licenciés illicitement dans le but de nuire au fonctionnement normal de l’organisation syndicale, selon l’entreprise, l’inspection du travail a intenté une action pour pratiques antisyndicales devant l’autorité judiciaire à la suite d’une plainte du syndicat. L’autorité judiciaire a estimé qu’il n’y avait pas de fondement pour sanctionner Canal 13 TV au motif de prétendues pratiques antisyndicales, et que tous les licenciements faisant l’objet de la plainte avaient répondu à des critères strictement économiques et/ou de réorganisation interne; selon l’entreprise, la plupart des travailleurs qui ont quitté l’entreprise (retraite anticipée, démission volontaire) l’ont fait conformément aux conventions que l’organisation syndicale avait ratifiées. L’inspection du travail et le syndicat ont interposé contre cette sentence de première instance des recours en appel et en cassation. Le recours en cassation que l’inspection du travail a interjeté n’a pas été jugé recevable. Le recours en appel n’a pas encore été tranché.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 676. Le comité note que, dans le présent cas, les organisations plaignantes formulent les allégations suivantes: remplacement de travailleurs ayant participé à une grève licite, en 2004, dans la société de télévision de l’Université pontificale catholique du Chili; utilisation, à des fins antisyndicales, d’entreprises qui fournissent du personnel et recours à de faux contrats de prestations de services au lieu de contrats de travail, d’où une baisse de la syndicalisation; licenciements collectifs depuis 2001 et autres pratiques antisyndicales; discrimination à l’encontre du secrétaire général du syndicat en confiant certaines activités qui lui revenaient à une entreprise sous-traitante; pressions de l’entreprise pour que les travailleurs renoncent à la négociation collective en avantageant d’un point de vue économique les personnes qui n’ont pas fait partie du groupe de négociation, tout en désavantageant celles qui en ont fait partie; inobservation des dispositions de la convention collective; licenciement récent de trois membres du syndicat; impossibilité pour le syndicat en place dans l’entreprise d’affilier des travailleurs fournis par des entreprises extérieures et souscription par les travailleurs de contrats individuels, imposés par l’entreprise, qui les excluent de la négociation collective.
  2. 677. Le comité prend note des informations communiquées par l’entreprise selon lesquelles l’externalisation (c’est-à-dire le recours à des entreprises extérieures) a été conforme au droit et qu’il n’y a pas eu d’actes permettant de supposer la simulation illicite de l’engagement de travailleurs. L’externalisation visait à rationaliser et à restructurer les différentes administrations de l’entreprise, afin de s’adapter à l’évolution du secteur de la télévision; l’entreprise a donc intenté un recours devant l’autorité judiciaire contre les sanctions que l’inspection du travail lui avait imposées au motif de la «simulation de l’engagement de travailleurs par le biais de tiers appelés entreprises extérieures», recours qui n’a pas encore été tranché. Selon l’entreprise, elle n’a pas engagé de nouveaux travailleurs pendant la grève; les travailleurs qui se trouvaient dans les locaux de l’entreprise étaient des travailleurs non syndiqués qui avaient été engagés il y a un certain temps. L’autorité judiciaire (qui n’a pas donné suite à la plainte de l’autorité administrative pour de prétendues pratiques déloyales) a donné raison à l’entreprise en première instance (le recours en appel que la direction du travail a interjeté n’a pas encore été tranché). Quant à l’utilisation de contrats prévoyant le versement d’honoraires (contrats de prestations de services), elle représente dans l’entreprise une proportion extrêmement faible des contrats de travail; dans quelques situations très ponctuelles, Canal 13 TV a fait l’objet d’actions en justice et, dans plusieurs cas, il a obtenu des sentences favorables qui ont confirmé le caractère licite de ces contrats. A propos du prétendu licenciement illicite de travailleurs dans le but de nuire au fonctionnement normal de l’organisation syndicale, l’inspection du travail a intenté devant l’autorité judiciaire une action pour pratiques antisyndicales à la suite d’une plainte du syndicat. Selon l’entreprise, l’autorité judiciaire a estimé qu’il n’y avait pas de fondement pour sanctionner Canal 13 TV au motif de prétendues pratiques antisyndicales, et que tous les licenciements faisant l’objet de la plainte répondaient à des critères strictement économiques et/ou de réorganisation interne; selon l’entreprise, la plupart des travailleurs qui ont quitté l’entreprise (retraite anticipée, démission volontaire) l’ont fait en vertu de conventions que l’organisation syndicale avait ratifiées. L’inspection du travail et le syndicat ont interposé contre cette sentence de première instance des recours en appel et en cassation. Le recours en cassation que l’inspection du travail a interjeté n’a pas été jugé recevable. Le recours en appel n’a pas encore été tranché.
  3. 678. Le comité prend note des déclarations suivantes du gouvernement: 1) il constate l’état déplorable de détérioration des relations professionnelles entre les parties, en raison d’une crise économique que l’entreprise constate et qui l’a conduite à décider d’externaliser certains services que les travailleurs jugent fondamentaux; le syndicat considère cette politique comme attentatoire à la liberté syndicale, étant donné qu’elle a fait baisser progressivement le nombre des membres de l’organisation; 2) le gouvernement a soumis au parlement un projet de loi qui vise à réglementer la pratique susmentionnée et, de la sorte, à protéger la partie la plus faible de la relation de travail; 3) pendant la grève de quatre jours à laquelle le syndicat avait appelé, l’inspection du travail a constaté le remplacement de 120 travailleurs, et appliqué à l’entreprise une amende d’un montant de 5 580 unités fiscales mensuelles. L’entreprise a intenté un recours contre cette amende devant l’autorité judiciaire, laquelle en première instance n’a pas donné suite à la plainte pour pratiques déloyales contre l’entreprise; la direction du travail a formé un recours contre cette sentence, de même que le syndicat; la procédure judiciaire est en cours; 4) l’inspection du travail a dénoncé devant l’autorité judiciaire le licenciement de 100 travailleurs et porté plainte pour ces pratiques qu’elle estime contraires à la liberté syndicale; après avoir enquêté, l’inspection du travail a porté plainte devant l’autorité judiciaire, laquelle s’est prononcée en première instance en faveur de l’entreprise; l’inspection du travail et le syndicat ont intenté des recours en cassation et en appel qui n’ont pas encore été tranchés; 5) au sujet de la simulation de l’engagement de travailleurs par le biais de tiers, l’inspection du travail a imposé une sanction administrative à l’entreprise. Celle-ci a intenté un recours judiciaire contre cette sanction, recours qui n’a pas encore été tranché.
  4. 679. Tout en prenant note des conclusions des inspections administratives et de deux sentences de première instance qui ont été favorables à l’entreprise, le comité demande au gouvernement d’adresser le texte des sentences de première instance ou des sentences qui seront prononcées en appel à propos des allégations présentées par les organisations plaignantes le 14 octobre 2004, afin qu’il puisse se prononcer après avoir pris connaissance de tous les éléments d’information.
  5. 680. Par ailleurs, le comité prend note des déclarations du gouvernement à propos des informations complémentaire fournies le 30 mars 2005 par l’organisation plaignante FETRA-TV. A cet égard, le comité note que, selon le gouvernement, le Syndicat de Canal 13 TV a présenté en 2005 une requête en justice et que le ministère du Travail a fourni à l’autorité judiciaire le rapport de contrôle correspondant. Selon le gouvernement, les allégations de FETRA-TV sont en général les mêmes que celles de la requête en justice. Le comité demande néanmoins au gouvernement de lui faire parvenir des observations complémentaires sur les allégations suivantes: discrimination exercée à l’encontre du secrétaire général du syndicat – des opérations qui lui revenaient ont été confiées à une entreprise sous-traitante; pressions pour que les travailleurs renoncent à la négociation collective; avantages économiques pour ceux qui n’ont pas fait partie du groupe de négociation, au détriment de ceux qui en ont fait partie; inobservation des dispositions de la convention collective; licenciement récent de trois membres du syndicat; impossibilité pour le syndicat en place dans l’entreprise d’affilier des travailleurs fournis par des entreprises extérieures; et souscription par les travailleurs de contrats individuels imposés par l’entreprise qui les excluent de la négociation collective. Le comité prie le gouvernement de lui faire parvenir le jugement rendu relatif à la récente requête formée sur ces questions.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 681. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Notant le jugement de première instance – actuellement frappé d’appel – affirmant que les employés de canal 13 TV avaient été licenciés pour des motifs strictement économiques et/ou pour des motifs de restructuration interne, le comité demande au gouvernement d’adresser le texte des sentences de première instance ou des sentences qui seront prononcées en appel à propos des allégations présentées par les organisations plaignantes dans leur communication du 14 octobre 2004, afin qu’il puisse se prononcer à ce sujet après avoir pris connaissance de tous les éléments d’information.
    • b) Le comité demande au gouvernement de faire parvenir ses observations à propos des informations complémentaires fournies le 30 mars 2005 par FETRA-TV qui font état des allégations suivantes: discrimination exercée à l’encontre du secrétaire général du syndicat – des opérations qui lui revenaient ont été confiées à une entreprise sous-traitante; pressions de l’entreprise pour que les travailleurs renoncent à la négociation collective; avantages économiques pour ceux qui n’ont pas fait partie du groupe de négociation, au détriment de ceux qui en ont fait partie; inobservation des dispositions de la convention collective; licenciement récent de trois membres du syndicat; impossibilité pour le syndicat en place dans l’entreprise d’affilier des travailleurs fournis par des entreprises extérieures; et souscription par les travailleurs de contrats individuels imposés par l’entreprise qui les excluent de la négociation collective. Le comité prie également le gouvernement de lui faire parvenir le jugement rendu relatif à la récente requête formée sur ces questions.
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