ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards

Informe en el que el Comité pide que se le mantenga informado de la evolución de la situación - Informe núm. 342, Junio 2006

Caso núm. 2447 (Malta) - Fecha de presentación de la queja:: 20-SEP-05 - Cerrado

Visualizar en: Inglés - Español

  1. 722. La plainte figure dans une communication du Syndicat général des travailleurs (GWU) datée du 20 septembre 2005.
  2. 723. Le gouvernement a répondu dans une communication datée du 5 décembre 2005.
  3. 724. Malte a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations du plaignant

A. Allégations du plaignant
  1. 725. Dans sa communication du 20 septembre 2005, le GWU allègue que le gouvernement maltais a violé les conventions nos 87 et 98 en décidant unilatéralement de modifier la loi sur les jours fériés de manière à supprimer le droit des travailleurs de récupérer des jours fériés tombant les week-ends, ignorant ainsi le processus de négociation collective, entraînant la nullité des règles en la matière énoncées dans les conventions collectives conclues antérieurement et limitant le droit des parties d’adopter de telles règles dans de futures conventions collectives.
  2. 726. L’organisation plaignante ajoute que l’article 17 de la loi sur l’emploi et les relations industrielles (chap. 452 des lois de Malte) stipule que: «dans le cas d’un employé à plein temps, lorsqu’un jour férié autre que le dimanche tombe un jour de repos en semaine auquel cet employé a droit, ce dernier aura droit à un jour de congé supplémentaire au cours de l’année civile pendant laquelle ce jour férié tombe un jour de congé en semaine ou un dimanche, pour chaque jour férié de ce type». Pour l’essentiel, cette disposition accordait aux travailleurs le droit de récupérer des jours fériés tombant un week-end. Les conventions collectives tenaient généralement compte de cette disposition en l’incluant souvent expressément dans la convention elle-même. Ce principe établi avait également des répercussions sur le droit des travailleurs par postes à un congé supplémentaire et à des suppléments de salaire pour le travail effectué pendant ces jours.
  3. 727. Selon l’organisation plaignante, des négociations tripartites entre les syndicats d’employeurs et le gouvernement ont échoué au début de 2005. Une série de questions y avaient été abordées, notamment celle de savoir si le droit à des jours de congé supplémentaires devrait être réexaminé. Un jour après l’échec des négociations, le gouvernement a unilatéralement décidé de modifier la loi sur les jours fériés, supprimant ainsi le droit de récupérer des jours fériés tombant les week-ends. Le gouvernement n’a ni abrogé, ni modifié l’article 17 susmentionné, mais a plutôt modifié le paragraphe 6 de la loi sur les fêtes nationales et les autres jours fériés (chap. 252 des lois de Malte) qui dit ce qui suit:
  4. Nonobstant toute disposition figurant dans toute loi, tout contrat ou tout instrument quelconque:
  5. a) lorsqu’en vertu des conditions de service qui lui sont applicables, une personne a droit, ou n’eussent été les dispositions de la présente loi, une personne aurait eu droit à un congé un quelconque jour qui cesse d’être un jour férié en vertu de la présente loi, cette personne n’aura plus droit à un congé ou à un quelconque jour susdit, mais aura droit à un congé avant cette date;
  6. b) à compter du 1er janvier 2005, lorsqu’un jour de fête nationale ou un jour férié figurant dans la liste tombera un samedi ou un dimanche, il ne sera pas réputé être un jour férié aux fins de l’octroi d’un jour de congé supplémentaire à une personne, et toute autre loi, tout autre contrat ou tout autre instrument prévoyant un tel jour de congé sera mis en œuvre en conséquence.
  7. 728. Le plaignant a soutenu que l’amendement: i) violait les principes fondamentaux de l’OIT concernant le droit des partenaires sociaux à agir en tant qu’organisations indépendantes et autonomes libres de réglementer leurs accords par voie de négociation collective; ii) restreignait la liberté de négociation des partenaires sociaux et leur interdisait de conclure des conventions collectives sur la question du droit des travailleurs de récupérer des jours fériés tombant un jour de repos en semaine; et iii) entraînait la nullité des règles existantes en matière de jours de congé compensatoires énoncées dans les conventions collectives dont la validité expirait après l’entrée en vigueur de la modification.
  8. 729. L’organisation plaignante ne conteste pas le droit du gouvernement d’abroger ou de décider des jours fériés, mais soutient que, dès lors qu’il n’existait pas de circonstances exceptionnelles (situation de crise grave constituant une menace manifeste pour l’économie nationale, la sécurité nationale ou la démocratie), le processus était inacceptable. Aucun accord n’ayant été trouvé, le gouvernement a pris des mesures législatives, au lieu de poursuivre des négociations qui auraient permis de parvenir à un consensus national.
  9. 730. L’organisation plaignante trouve révélateur que la nouvelle modification stipule que les jours fériés tombant les week-ends ne sont pas considérés comme tels uniquement en ce qui concerne le droit à des jours de congé supplémentaires. Les nouvelles dispositions visent directement les conventions collectives, rendant nulles et non avenues de telles règles, tant en droit que dans les conventions collectives existantes. Par conséquent, le plaignant y voit une violation manifeste des règles existantes convenues par le biais de négociations collectives libres, et demande que le gouvernement de Malte soit invité à remédier à cette situation.
  10. 731. En outre, le fait que les syndicats et les employeurs n’aient plus le droit d’accorder des jours de congé supplémentaires pour les jours fériés tombant un week-end, s’ils choisissent de le faire de leur propre chef ou en accord avec les employés et les syndicats, est particulièrement problématique. Non seulement la loi rend nulles et non avenues les règles existantes énoncées dans les conventions collectives, mais elle interdit explicitement l’adoption de telles règles dans une convention collective, violant ainsi le droit à la négociation collective libre. Le plaignant estime donc qu’il devait être recommandé au gouvernement de retirer toute restriction de ce type et lui être conseillé de ne plus intervenir dans les négociations collectives libres.
  11. B. Réponse du gouvernement
  12. 732. Dans une communication datée du 5 décembre 2005, le gouvernement réaffirme son engagement envers le dialogue social et la libre négociation collective. Les droits de liberté syndicale et de négociation collective sont prévus par la loi sur l’emploi et les relations industrielles, adoptée en 2002 au terme d’un long et fructueux processus de consultation avec les partenaires sociaux. Cette loi remplaçait une législation contenant des dispositions similaires, qui était en vigueur depuis 1945.
  13. 733. Le gouvernement réfute comme inexacte l’allégation selon laquelle il a unilatéralement pris des mesures législatives après un échec de négociations tripartites en 2005. Le gouvernement a entrepris de mener une politique de consultation à grande échelle des partenaires sociaux en vue de préparer son budget annuel pour un certain nombre d’années, et c’est également ce qui s’est produit l’année précédente. Un processus de consultation a été lancé par le gouvernement pendant la période précédant le vote du budget, dans le but d’informer les partenaires sociaux de la situation générale du pays et de connaître leur avis concernant les mesures nécessaires projetées. Si l’idéal était de parvenir à un accord unanime, un tel processus de consultation n’impliquait pas que l’on doive nécessairement s’accorder sur les questions soumises à discussion.
  14. 734. Il n’y a donc pas eu d’échec de négociations tripartites comme il est allégué. Il n’y a pas eu de négociations, étant donné qu’il s’agissait du processus de consultation prébudgétaire habituel et non d’un processus de négociation collective. Il y a par contre eu échec de la tentative des syndicats et des employeurs de présenter un document conjoint au gouvernement sur la situation économique et les mesures envisagées dans le budget. Suite à cela, le gouvernement a estimé qu’il était de sa responsabilité de prendre les mesures qu’il jugeait appropriées dans l’intérêt national.
  15. 735. Le gouvernement explique que la loi accordait aux employés un minimum de quatre semaines et quatre jours ouvrables de congé annuel, en plus de 14 autres jours fériés et de fête. Le plaignant ne conteste pas le droit du gouvernement d’abroger ou de décider des jours fériés. Mais il conteste la méthode employée pour ce faire, soutenant que le processus suivi était inacceptable. A cet égard, il est important de noter que les jours fériés à Malte sont accordés en vertu de la loi sur les fêtes nationales et les autres jours fériés. Il s’ensuit nécessairement que toute abrogation ou modification de cette loi ne pouvait être effectuée que par le biais de la disposition administrative appropriée, après approbation du Parlement. C’est précisément ce qui a été fait au moyen des modifications mentionnées et citées par le plaignant. Le processus de négociation collective n’a pas été ignoré comme il est allégué, tout simplement parce que les dispositions statutaires adoptées par le Parlement pour fixer les fêtes nationales et les jours fériés n’ont jamais relevé du processus de négociation collective, mais essentiellement de la politique nationale publique.
  16. 736. En 2004, l’article 17 de la loi sur l’emploi et les relations industrielles accordait aux travailleurs le droit de bénéficier d’un jour de congé supplémentaire lorsqu’une fête nationale ou un jour férié tombait un jour de repos. La modification apportée à la loi sur les fêtes nationales et les autres jours fériés ne modifie pas la loi sur l’emploi et les relations industrielles, et ne porte atteinte à aucun droit à la liberté syndicale ou à la négociation collective. Elle redéfinit les concepts de fête nationale et de jour férié. En vertu de cette modification, tout jour qui est une fête nationale ou un jour férié, qui tombe un samedi ou un dimanche, et qui se trouve également être le jour de repos d’un travailleur, n’est plus considéré comme une fête nationale ou un jour férié aux fins de l’octroi d’un jour de congé additionnel. Ce libellé a été choisi précisément pour s’assurer que cela n’aurait pas de répercussion négative sur la rémunération des travailleurs (en général, le fait de travailler un jour de fête nationale ou un jour férié donne lieu à une rémunération supplémentaire). Avec cette modification, les employés qui travaillent un jour de fête nationale ou un jour férié tombant un samedi ou un dimanche ne subissent aucune perte salariale, étant donné que, pour toute fin autre que l’octroi d’un jour de congé supplémentaire, ce jour reste un jour de fête nationale ou férié, donnant par conséquent toujours lieu à un taux de rémunération plus élevé. Le libellé de la modification apportée à la législation s’explique par cette seule raison.
  17. 737. Dans les conventions collectives, la clause pertinente y relative tenait compte des dispositions minimales de la loi et, dans la plupart des cas, les reprenait mot pour mot. Il est important de souligner que c’est la définition de ce qui constituait une fête nationale ou un jour férié en droit, et s’agissant en particulier du droit à un jour de congé supplémentaire lorsque le jour férié en question tombe un samedi ou un dimanche et qui se trouve être le jour de repos d’un travailleur, qui a changé. Ces règles des conventions collectives ne sont pas devenues nulles et non avenues comme il est allégué. Mais il s’ensuit que les expressions «fêtes nationales» ou «jours fériés» dans toute loi, tout instrument ou contrat doivent être interprétées à la lumière de cette définition. Cela n’a rien à voir avec l’annulation des règles existantes en la matière énoncées dans les conventions collectives conclues antérieurement, ni la limitation du droit des parties à la négociation d’adopter de telles règles dans de futures conventions collectives, ni l’abrogation des règles existantes en matière de jours de congé compensatoires figurant dans les conventions collectives, comme l’allègue l’organisation plaignante.
  18. 738. Selon le gouvernement, le paradoxe est que, alors que l’organisation plaignante ne conteste pas le droit du gouvernement de décider des fêtes nationales et des jours fériés, elle interprète l’exercice de ce droit comme une violation des conventions fondamentales sur la liberté syndicale. Cela signifie que, si le gouvernement avait décidé de supprimer quatre jours fériés du calendrier, le plaignant aurait accepté cette mesure en tant que prérogative gouvernementale. Mais, lorsque le gouvernement légifère en définissant le concept de fête nationale et de jour férié de manière à s’assurer que les travailleurs qui travaillent les jours en question conservent le droit d’être rémunérés aux taux plus élevés fixés, non seulement le plaignant s’insurge contre cette mesure, comme il en a le droit, mais il la perçoit comme une atteinte à la liberté syndicale et à la négociation collective. Le gouvernement réfute fermement cette allégation.
  19. 739. Il est important de souligner qu’en aucune façon cette modification ne vise le processus de négociation collective prévu par la convention no 98, ni un quelconque aspect de la liberté syndicale prévu par la convention no 87, ni ne porte atteinte à ceux-ci. Contrairement aux allégations formulées, les syndicats et les associations d’employeurs sont et demeurent libres d’agir en tant qu’organisations indépendantes et autonomes libres de réglementer leurs accords par voie de conventions collectives. Aucune limite n’est apportée à la liberté de négociation des partenaires sociaux. Les syndicats étaient et demeurent libres de négocier avec les employeurs sur n’importe quelle condition d’emploi, y compris l’octroi de jours de congé supplémentaires ou de tout autre type de congé d’ailleurs. En fait, différentes conventions collectives actuellement en vigueur prévoient le droit à des congés annuels, à des congés maladie et d’autres droits qui vont au-delà du minimum requis par la loi, ou qui ne sont pas prescrits par la loi. Il existe par exemple des conventions collectives qui comportent des clauses octroyant un jour de congé supplémentaire pour célébrer l’Union Day (Jour de l’Union). Ces arrangements sont le fruit d’une longue tradition de libre négociation collective. Non seulement le gouvernement s’abstient de toute intervention dans le processus et la teneur des conventions collectives, mais il encourage cette liberté de négociation. En fait, le gouvernement lui-même, en tant qu’employeur, a conclu le 26 octobre 2005 une convention collective pour l’ensemble des fonctionnaires publics, qui régit leurs conditions d’emploi pour une durée de six ans, suite à des négociations intenses et compliquées avec six syndicats représentant les différentes catégories de travailleurs. L’un de ceux-ci est en fait l’organisation plaignante, qui n’a pas jugé nécessaire de soulever ni d’insister sur la question soulevée plus tôt devant l’OIT.
  20. 740. Le gouvernement ajoute qu’il a pris, de manière responsable, différentes décisions lors de ses prévisions financières présentées fin 2004, pour des raisons impérieuses d’intérêt économique national. Malte connaissait de graves problèmes économiques engendrés par divers facteurs tels que la mondialisation, la restructuration économique, le déficit fiscal et des prix du carburant constamment à la hausse. Le gouvernement a adopté des mesures pour tenter de répondre au besoin urgent de maintenir la compétitivité et la productivité économiques. Comme indiqué précédemment, le gouvernement aurait pu supprimer un certain nombre de jours fériés du calendrier comme il en avait le droit et comme le reconnaît le plaignant. Mais il a choisi une approche plus souple. La mesure adoptée par le gouvernement était très prudente et formulée de manière à en minimiser l’impact sur les revenus et les niveaux de vie des travailleurs. Malheureusement, le choix par le gouvernement d’une approche plus souple pour traiter cette question a été mal compris et a donné lieu à une interprétation erronée et à une déclaration inexacte.
  21. 741. En conclusion, le gouvernement souligne: i) qu’il n’ y a pas de rapport entre la question examinée et la convention no 87; ii) qu’aucune loi maltaise, y compris celle à laquelle le plaignant fait référence, ne viole un quelconque article de la convention no 98; et iii) que la loi sur les fêtes nationales et les autres jours fériés a été modifiée dans le but de sauvegarder les intérêts nationaux, en vue de trouver des solutions à la perte de compétitivité économique dans un environnement mondialisé, et constituait une mesure modérée et nécessaire allant dans ce sens, qui visait aussi à maintenir les niveaux de vie des travailleurs.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 742. Le comité note que la présente plainte concerne des allégations selon lesquelles le gouvernement a violé les conventions nos 87 et 98 en modifiant la loi sur les jours fériés, entraînant ainsi la nullité des règles existantes en la matière énoncées dans les conventions collectives conclues antérieurement, ne tenant pas compte ce faisant du processus de négociation collective et limitant ainsi le droit des parties d’adopter de telles règles dans de futures conventions.
  2. 743. Le comité note en particulier que selon les allégations de l’organisation plaignante, pour l’essentiel, l’article 17 de la loi sur l’emploi et les relations industrielles accordait aux travailleurs le droit de récupérer des jours fériés tombant un week-end et que les conventions collectives tenaient généralement compte de cette disposition, en l’incluant souvent expressément dans la convention elle-même. Mais, suite à l’échec de négociations tripartites sur cette question en 2005, le gouvernement a unilatéralement décidé de modifier la loi sur les jours fériés, supprimant ainsi le droit de récupérer des jours fériés tombant les week-ends. Pour ce faire, le gouvernement n’a pas modifié l’article 17 susmentionné, mais a plutôt modifié l’article 6 de la loi sur les fêtes nationales et les autres jours fériés, qui dit ce qui suit:
  3. Nonobstant toute disposition figurant dans toute loi, tout contrat ou tout instrument quelconque:
  4. a) lorsqu’en vertu des conditions de service qui lui sont applicables, une personne a droit, ou n’eussent été les dispositions de la présente loi, une personne aurait eu droit à un congé un quelconque jour qui cesse d’être un jour férié en vertu de la présente loi, cette personne n’aura plus droit à un congé ou à un quelconque jour susdit, mais aura droit à un congé avant cette date;
  5. b) à compter du 1er janvier 2005, lorsqu’un jour de fête nationale ou un jour férié figurant dans la liste tombera un samedi ou un dimanche, il ne sera pas réputé être un jour férié aux fins de l’octroi d’un jour de congé supplémentaire à une personne, et toute autre loi, tout autre contrat ou tout autre instrument prévoyant un tel jour de congé sera mis en œuvre en conséquence.
  6. 744. Le comité note que, si le plaignant ne conteste pas le fait que le gouvernement a le droit de décider des jours fériés, il soutient que la modification: i) viole les principes fondamentaux de l’OIT concernant le droit des partenaires sociaux à agir en tant qu’organisations indépendantes et autonomes libres de réglementer leurs accords par voie de négociation collective; ii) restreint la liberté de négociation des partenaires sociaux, car elle leur interdit de conclure des conventions collectives en matière d’octroi aux travailleurs du droit de récupérer des jours fériés tombant un jour de repos en semaine; et iii) entraîne la nullité des règles existantes en matière de jours de congé compensatoires énoncées dans les conventions collectives dont la validité expire après l’entrée en vigueur de la modification. Il note en outre que, selon le plaignant, aucune circonstance exceptionnelle (crise grave ou économie nationale manifestement menacée) ne justifie la mesure en question.
  7. 745. Le comité note que, selon le gouvernement, il n’ y a pas eu d’échec de négociations tripartites en 2005, mais plutôt un échec de la tentative des syndicats et des employeurs de présenter un document conjoint au gouvernement sur la situation économique et les mesures envisagées dans le budget, dans le cadre des consultations annuelles approfondies des partenaires sociaux en vue de la préparation du budget annuel. Suite à cet échec, le gouvernement a estimé qu’il était de sa responsabilité de prendre les mesures qu’il jugeait appropriées dans l’intérêt national, en vue de remédier à la perte de la compétitivité et de la productivité économiques dans un environnement mondialisé. Le processus de négociation collective n’a pas été ignoré comme il est allégué, tout simplement parce que les dispositions statutaires adoptées par le Parlement pour fixer les fêtes nationales et les jours fériés n’ont jamais relevé du processus de négociation collective, mais essentiellement de la politique nationale publique. Le gouvernement aurait pu supprimer un certain nombre de fêtes nationales et de jours fériés du calendrier comme il en avait le droit et comme le reconnaît le plaignant. Mais il a choisi une approche plus souple et prudente, dictée par des raisons impérieuses d’intérêt économique national et formulée de manière à en minimiser l’impact sur les revenus et les niveaux de vie des travailleurs.
  8. 746. Le comité note également que, selon le gouvernement, la modification apportée à la loi sur les fêtes nationales et les autres jours fériés ne fait que redéfinir les concepts de fête nationale et de jour férié et ne porte atteinte à aucun droit à la liberté syndicale ou à la négociation collective. C’est la définition de ce qui constitue une fête nationale ou un jour férié en droit qui a changé; aucune clause de ce type figurant dans des conventions collectives n’est devenue nulle et non avenue comme il est allégué, bien que les expressions «fêtes nationales» ou «jours fériés» dans toute loi, tout instrument ou contrat doivent maintenant être interprétées à la lumière de la nouvelle définition. Mais, selon le gouvernement, cela n’a rien à voir avec l’annulation de règles existantes en la matière dans des conventions collectives conclues antérieurement, ni la limitation du droit des parties à la négociation d’adopter de telles règles dans de futures conventions collectives, comme l’allègue l’organisation plaignante. Les syndicats et les organisations d’employeurs sont libres d’agir en tant qu’organisations indépendantes et autonomes et peuvent négocier les conditions d’emploi, y compris l’octroi de jours de congé supplémentaires, comme le prévoient déjà différentes conventions collectives.
  9. 747. Le comité observe que ni le plaignant, ni le gouvernement ne contestent la prérogative du gouvernement de décider, en tant que question relevant de la politique publique, quels jours seront des fêtes nationales ou des jours fériés. Le comité observe néanmoins aussi que le libellé de l’article 6 susmentionné de la loi sur les fêtes nationales et les autres jours fériés rend automatiquement nulle et non avenue toute disposition qui déroge à ce paragraphe dans toute autre loi, tout autre contrat ou tout autre instrument, y compris les conventions collectives en vigueur. L’article 6 (en particulier la phrase introductive et l’alinéa b)) a donc pour effet non seulement de modifier la définition des concepts de fête nationale et de jour férié, comme il est indiqué par le gouvernement, mais aussi de rendre nulles et non avenues toutes les autres dispositions juridiques de tout instrument, y compris les conventions collectives, qui accordent aux travailleurs le droit de récupérer des jours fériés tombant un week-end.
  10. 748. Le comité considère que la suspension par la loi de dispositions de conventions collectives déjà conclues est incompatible avec les principes de libre négociation collective. La première raison en est que la négociation volontaire des conventions collectives, et donc l’autonomie des partenaires sociaux à la négociation, constitue un aspect fondamental des principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, 1996, paragr. 844.] Il rappelle que, dans un cas antérieur, il avait conclu ce qui suit: la suspension ou la dérogation – par voie de décret, sans l’accord des parties – de conventions collectives librement conclues est contraire aux principes de la libre négociation collective volontaire consacrés par l’article 4 de la convention no 98. Si un gouvernement souhaite que les dispositions d’une convention collective soient adaptées à la politique économique du pays, il doit essayer d’amener les parties à prendre en compte volontairement ces considérations, sans leur imposer la renégociation des conventions collectives en vigueur. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 876.] Si le comité ne remet pas en question les mesures prises par le gouvernement en vue de modifier la prescription législative selon laquelle les jours fériés tombant un jour de repos en semaine doivent être compensés par un jour de congé, il demande au gouvernement de modifier l’article 6 de la loi sur les fêtes nationales et les autres jours fériés de manière à s’assurer qu’il ne rende pas automatiquement nulle et non avenue toute disposition des conventions collectives existantes qui accorde aux travailleurs le droit de récupérer des jours fériés tombant un samedi ou un dimanche, et à permettre ainsi que de telles questions soient réglées par le biais de négociations libres et volontaires. Le comité demande à être tenu informé à ce sujet.
  11. 749. En outre, le comité note que l’article 6 de la loi sur les fêtes nationales et les autres jours fériés interdit également des négociations volontaires dans le futur sur la question de l’octroi aux travailleurs du droit de récupérer des jours de fête ou fériés tombant un samedi ou un dimanche. De ce fait, toute disposition adoptée dans une future convention collective qui dérogerait aux dispositions de l’article 6 serait automatiquement nulle et non avenue.
  12. 750. Le comité rappelle qu’il a accepté dans le passé que des gouvernements prennent des mesures limitant la négociation collective uniquement dans le cadre de politiques de stabilisation économique, à condition que ces mesures ne soient appliquées qu’à titre exceptionnel et ne dépassent pas une durée raisonnable. Par exemple, le comité a estimé que les dispositions législatives qui interdisent la négociation d’augmentations salariales venant en sus des indemnités du coût de la vie sont contraires au principe de la négociation collective volontaire, consacré par la convention no 98. Une telle restriction ne peut être admissible que si elle reste dans le cadre d’une politique de stabilisation économique, et encore ne doit-elle être appliquée qu’à titre exceptionnel, limitée au strict nécessaire et ne pas dépasser une durée raisonnable. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 891.] Le comité observe cependant que le gouvernement n’a pas établi par des preuves documentaires que la mesure examinée entrait dans le cadre d’une politique de stabilisation économique, appliquée à titre exceptionnel pour une durée limitée.
  13. 751. Le comité rappelle qu’une intervention des autorités publiques visant essentiellement à garantir que les parties qui négocient subordonnent leurs intérêts à la politique économique nationale du gouvernement, que celle-ci recueille ou non leur agrément, n’est pas compatible avec les principes généralement acceptés selon lesquels les organisations de travailleurs et d’employeurs devraient avoir le droit d’organiser librement leurs activités et de formuler leurs programmes, les autorités publiques devant s’abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l’exercice légal, et la législation nationale ne devant pas être de nature, ou ne devant pas être appliquée de façon à compromettre la jouissance de ce droit. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 867.] Le comité demande par conséquent au gouvernement de modifier l’article 6 de la loi sur les fêtes nationales et les autres jours fériés de manière à s’assurer que cette disposition n’interdise pas à l’avenir des négociations volontaires sur la question de l’octroi aux travailleurs du droit de récupérer des jours de fête nationale ou fériés tombant un samedi ou un dimanche. Le comité demande à être tenu informé à ce sujet.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 752. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
    • Le comité demande au gouvernement de modifier l’article 6 de la loi sur les fêtes nationales et les autres jours fériés de manière à s’assurer que cette disposition: i) ne rende pas automatiquement nulle et non avenue toute disposition des conventions collectives existantes qui accorde aux travailleurs le droit de récupérer des jours fériés tombant un samedi ou un dimanche; et ii) n’interdise pas à l’avenir des négociations volontaires sur la question de l’octroi aux travailleurs du droit de récupérer des jours de fête nationale ou fériés tombant un samedi ou un dimanche au titre d’une convention collective. Le comité demande à être tenu informé à ce sujet.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer