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Informe provisional - Informe núm. 355, Noviembre 2009

Caso núm. 2620 (República de Corea) - Fecha de presentación de la queja:: 18-DIC-07 - Cerrado

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  1. 679. Le comité a examiné ce cas quant au fond à sa réunion de mars 2009 et a présenté un rapport intérimaire approuvé par le Conseil d’administration à sa 304e session. [Voir 353e rapport, paragr. 750-795.]
  2. 680. Dans une communication en date du 21 juillet 2009, la Confédération coréenne des syndicats (KCTU) a présenté des informations supplémentaires à l’appui de ses allégations.
  3. 681. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication en date du 5 octobre 2009.
  4. 682. La République de Corée n’a ratifié ni la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 683. Lors de son examen antérieur du cas, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 353e rapport, paragr. 795]:
    • a) S’agissant du refus des autorités de reconnaître la constitution du MTU et de lui octroyer le statut d’organisation syndicale, le comité observe que cet aspect du cas est en instance devant la Cour suprême et demande au gouvernement de transmettre la décision de justice dès qu’elle aura été rendue de façon que le comité puisse examiner cet aspect du cas en toute connaissance de cause. Le comité a l’intention d’examiner cette question dans tous les cas à sa session de novembre 2009.
    • b) Le comité demande au gouvernement de s’abstenir à l’avenir de prendre des mesures qui comporteraient un risque grave d’interférence avec des activités syndicales, comme l’arrestation et l’expulsion de dirigeants syndicaux juste après leur élection et alors que leur recours sont pendants devant une instance juridique.

B. Nouvelles allégations de l’organisation plaignante

B. Nouvelles allégations de l’organisation plaignante
  1. 684. Dans sa communication du 21 juillet 2009, l’organisation plaignante, la KCTU, déclare que, le 25 septembre 2008, le «Comité sur le renforcement de la compétitivité nationale», un comité sud-coréen mis en place et supervisé par le Président Lee Myeong-bak, a publié un rapport intitulé «Plan d’amélioration de la politique régissant la main-d’œuvre étrangère non qualifiée». Ce document présentait plusieurs réformes devant être mises en œuvre en 2009 en vue de réduire les coûts à la charge des employeurs engageant des travailleurs migrants en situation régulière et de renforcer la répression à l’encontre des travailleurs migrants sans papiers. Il était fait spécifiquement référence dans ce rapport au Syndicat des travailleurs migrants (MTU), la constitution d’un tel syndicat «par des étrangers en situation irrégulière» étant considérée comme dénotant une «tendance au non-respect de la loi». Ce document annonçait l’intention du gouvernement de «renforcer la répression contre ceux qui adhèrent à ce syndicat [le MTU] et soutiennent ses activités et manifestations illégales», l’arrestation et l’expulsion des leaders syndicaux du MTU étant citées comme des exemples du type de mesures appliquées pour renforcer la répression contre le syndicat.
  2. 685. L’organisation plaignante indique que la répression qu’a exercée le gouvernement contre des dirigeants syndicaux du MTU et son intention manifeste de poursuivre ses attaques ont beaucoup nui aux activités du syndicat. Le MTU a dû fonctionner sans dirigeants officiels, dans le cadre d’une structure d’urgence où les décisions sont prises par un comité directeur d’urgence mais sans représentants officiels visibles. Ainsi, la raison pour laquelle il n’y a plus eu d’arrestations de dirigeants syndicaux tient au fait qu’il n’en restait plus aucun. En même temps, l’hostilité du gouvernement continue à empêcher le syndicat de mener ses activités quotidiennes car, dans leur majorité, les adhérents et les adhérents potentiels craignent qu’une participation active ne leur fasse courir le risque d’une arrestation et d’une expulsion. Cette crainte est partagée non seulement par les travailleurs migrants sans papiers, mais également par les travailleurs migrants en situation régulière qui reconnaissent que le fait d’être en règle ne les protège pas contre le risque d’être la cible d’attaques et de harcèlement de la part du gouvernement. De plus, ce dernier a qualifié d’«illégales» les activités du MTU contre sa politique et s’est fondé sur cet argument pour justifier la poursuite de la répression contre le syndicat sans reconnaître que l’opposition à des mesures telles que la répression et les restrictions à la liberté de l’emploi des travailleurs en règle en vertu du système de permis pour l’emploi (EPS) tient au fait que le MTU s’est fixé pour objectif l’amélioration des conditions de travail des travailleurs migrants.
  3. 686. D’après l’organisation plaignante, la position du gouvernement a également un effet dissuasif sur les adhérents potentiels en règle ou sans papiers, qui voient enfreint leur droit d’adhérer au MTU et de faire entendre par le biais de ce syndicat leurs critiques légitimes à l’encontre de politiques qui sont à l’origine de la discrimination et de l’exploitation dont ils sont victimes. Le fait que le MTU soit demeuré sans statut légal a aussi considérablement gêné la conduite de ses activités. L’examen du cas concernant ce statut est pendant devant la Cour suprême depuis plus de deux ans; pendant tout ce temps-là, le MTU n’a pas été en mesure de poursuivre des négociations collectives ni d’autres activités connexes, ce qui, à l’évidence, a eu des répercussions sur sa capacité d’œuvrer pour l’amélioration des conditions de travail de ses adhérents. Les avocats du MTU pensent que la procédure est retardée pour éviter soit d’avoir à reconnaître le MTU, soit d’aviver le mécontentement de l’opinion publique par une décision défavorable au syndicat. Cela étant, les adhérents au MTU se voient toujours dénier le droit d’exercer pleinement leur droit syndical en raison de l’ambiguïté du statut du MTU.
  4. 687. L’organisation plaignante indique que l’adhésion au MTU a, dès la création de celui-ci, été ouverte à tous les travailleurs migrants de la région de Séoul-Gyeonggi-Incheon, qu’ils soient en situation régulière ou non. Aux termes de l’article 2 de ses statuts, l’objectif du MTU est «de s’opposer à la répression (des travailleurs migrants sans papiers), d’améliorer les conditions de travail des travailleurs migrants ainsi que leurs droits et d’obtenir la légalisation de leur liberté de travailler». Si le MTU s’oppose à la répression de l’immigration, c’est parce qu’il juge préoccupantes les violations des droits qui se produisent à l’occasion des descentes de police et des mises en détention; son soutien en faveur d’un programme de légalisation part du constat que les travailleurs sans papiers sont particulièrement exposés au risque d’être exploités et que cela a, en retour, des répercussions pour l’ensemble de la main-d’œuvre. Cette position est partagée par les syndicats des pays accueillant un grand nombre de migrants sans papiers qui, de façon tout à fait naturelle, affilient les travailleurs migrants en situation irrégulière. Par exemple, les membres du mouvement syndical américain, tels que la Fédération américaine du travail et le Congrès des organisations industrielles (AFL-CIO) et la Fédération «Change to Win», ont récemment publié un «Plan-cadre pour une réforme complète de l’immigration» dans lequel il est reconnu que «l’arrestation et l’expulsion» de millions de travailleurs migrants sans papiers intégrés à la main-d’œuvre américaine «n’est pas une solution réaliste», et où il est demandé qu’un programme d’amnistie soit mis en place afin d’empêcher les employeurs d’exploiter ces travailleurs pour tirer à la baisse l’ensemble des salaires. La mise en place d’un système empêchant les employeurs de priver les travailleurs de leurs droits en raison de leur statut d’immigrant est également demandée. L’«amélioration des conditions de travail des travailleurs migrants», qui est l’objectif du MTU, vaut bien entendu autant pour les travailleurs en situation régulière que pour les sans-papiers, d’où sa position critique vis-à-vis du système de permis de travail coréen.
  5. 688. L’organisation plaignante signale que, en dépit des difficultés auxquelles il est confronté en raison de la répression exercée par le gouvernement, le MTU a poursuivi ses activités courantes, notamment en dispensant des conseils et de l’aide aux migrants affiliés ou non concernant des problèmes liés à leur travail (non-paiement des salaires et des heures supplémentaires, accidents du travail, etc.), en leur faisant connaître leurs droits syndicaux, qu’ils soient ou non affiliés et en recrutant de nouveaux adhérents. Le MTU forme également de nouveaux dirigeants et responsables syndicaux. Depuis sa constitution, le MTU s’est efforcé de représenter les intérêts de tous les migrants, qu’ils soient en situation régulière ou non. Toutefois, le fait que seuls des visas à court terme (trois ans) soient octroyés en vertu du système de permis de travail coréen signifie que, jusqu’à récemment, la plupart des migrants en situation régulière n’avaient pas résidé suffisamment longtemps en République de Corée pour avoir acquis une expérience professionnelle assez longue dans la société sud-coréenne leur permettant d’occuper des fonctions de dirigeant syndical. Par conséquent, peu de travailleurs migrants en règle ont participé à la constitution du MTU et au début de ses travaux. Du fait que davantage de travailleurs en situation régulière sont parvenus au terme de leur visa ou ont renouvelé leur visa pour trois années supplémentaires, un nombre sans cesse croissant d’entre eux ont adhéré au syndicat et occupent des positions d’encadrement. Parmi les nouveaux adhérents au MTU, beaucoup sont en situation régulière et certains d’entre eux occupent maintenant des postes de responsabilité dans le syndicat.
  6. 689. L’organisation plaignante ajoute que l’expulsion du président du MTU, Kajiman Khapung, de son vice-président, Raju Kumar Gurung (Raju), et de son secrétaire général, Maniruzzaman (Masum), a eu lieu le 13 et non le 11 décembre 2007 comme indiqué dans la communication de l’organisation plaignante du 18 décembre 2007. En conclusion, l’organisation plaignante demande au comité d’établir des conclusions sur le présent cas aussi rapidement que possible car une décision de la Cour suprême sur le statut officiel du syndicat MTU est pendante.

C. Réponse du gouvernement

C. Réponse du gouvernement
  1. 690. Dans sa communication en date du 5 octobre 2009, le gouvernement indique que le rapport dont fait mention la KCTU, le «Plan d’amélioration de la politique régissant la main-d’œuvre étrangère non qualifiée», n’avait pas pour objectif de cibler et d’attaquer les dirigeants du MTU, mais avait été plutôt élaboré pour fournir efficacement en travailleurs étrangers les secteurs faisant face à une pénurie de main-d’œuvre, compte tenu de l’offre et de la demande de la main-d’œuvre locale, et à minimiser les coûts sociaux. Le rapport contient les plans suivants: un plan d’accueil des travailleurs étrangers avec une vision à moyen et à long terme, et le contrôle du nombre de Coréens travaillant à l’étranger et les industries pour lesquelles ces derniers sont employés de manière à pourvoir aux emplois vacants en République de Corée; un plan destiné à recevoir le volume de main-d’œuvre nécessaire, à simplifier la procédure d’emploi, et à offrir des conditions d’emploi plus stables pour les travailleurs étrangers afin de répondre aux besoins des entreprises; et un plan visant à étendre les services publics relatifs à l’emploi et au voyage des travailleurs étrangers, renforcer les services liés à la période suivant l’emploi qui tiennent compte des caractéristiques de chaque industrie, et créer un environnement confortable et accueillant propice à demeurer dans le pays, cela de manière à offrir un soutien lié à la demande pour l’emploi et le voyage de travailleurs étrangers. Le plan comprend également des mesures pour réduire le nombre d’étrangers en situation irrégulière en mettant en place un système gouvernemental de gestion des résidents étrangers en situation irrégulière, qui préviendrait le séjour illégal d’étrangers et sanctionnerait les étrangers en situation irrégulière.
  2. 691. Le gouvernement indique que la mise en cause par le MTU de sa politique relative à la main-d’œuvre étrangère pourrait être interprétée comme une ingérence excessive dans la politique d’immigration d’un pays souverain, et réitère que les dirigeants du MTU ont été expulsés non pas parce qu’ils étaient des dirigeants syndicaux mais parce qu’ils séjournaient illégalement en Corée du Sud.
  3. 692. Le gouvernement indique que le statut de syndicat a été refusé au MTU pour les raisons suivantes: en premier lieu, le MTU n’a pas donné suite à la demande d’informations supplémentaires du gouvernement pour déterminer s’il était composé de plusieurs syndicats ou non; en deuxième lieu, il n’était pas possible pour le MTU d’établir des relations de travail légitimes et de s’engager dans la négociation collective dans le futur, car ses membres séjournaient irrégulièrement en République de Corée. En troisième lieu, en s’opposant à la répression de résidents étrangers en situation irrégulière, le MTU s’engage dans des activités qui vont à l’encontre de la loi et de l’ordre dans un pays souverain et qui vont au-delà de la raison d’être d’un syndicat reconnu comme légitime en vertu de la TULRAA.
  4. 693. S’agissant des restrictions aux changements de lieu de travail dans le système de permis pour l’emploi (EPS), le gouvernement soutient que de telles restrictions sont généralement utilisées par les pays qui ont adopté un système de permis d’emploi. L’objectif de l’EPS n’est pas d’octroyer des permis de travail qui permettent aux travailleurs migrants d’être libres de trouver des emplois en République de Corée, mais de donner des permis de travail qui permettent aux travailleurs migrants de travailler dans les lieux de travail où il y a une demande de main-d’œuvre. Cependant, un travailleur migrant est autorisé à se déplacer vers un autre lieu de travail jusqu’à quatre fois si les conditions d’un changement de lieu de travail, qui prennent en compte les droits fondamentaux des travailleurs migrants, sont satisfaites. Plus de 90 pour cent des travailleurs migrants ayant demandé à changer de lieu de travail ont été autorisés à le faire; en 2008, cette autorisation a été accordée dans 26 164 cas.
  5. 694. Concernant la répression des étrangers qui séjournent illégalement en République de Corée, le gouvernement indique que de telles mesures de répression sont menées pour maintenir l’ordre dans le contrôle de l’immigration. Un pays a le droit d’arrêter les étrangers en situation irrégulière en vertu du contrôle de l’immigration et de les expulser dans leurs pays d’origine, cela n’a rien à voir avec les droits des travailleurs étrangers de mener des activités syndicales. Même un dirigeant syndical peut légitimement être arrêté et expulsé si il ou elle a violé la loi sur le contrôle de l’immigration, et s’opposer à ce genre d’arrestation et d’expulsion revient à s’opposer à des mesures de contrôle aux frontières d’un pays.
  6. 695. Le gouvernement déclare, en ce qui concerne la décision attendue de la Cour suprême, que l’allégation de l’avocat de la défense du MTU selon laquelle la Cour suprême retarderait sa décision afin d’éviter le risque d’attiser négativement l’opinion publique est inappropriée et ne dépeint qu’une opinion personnelle. Le gouvernement indique qu’il souhaite également que cette décision soit rendue dès que possible et souligne que, la Cour suprême étant un organe strictement indépendant, chacun devrait s’abstenir de spéculer sur les raisons des retards dans ses décisions.
  7. 696. Le gouvernement indique qu’il a mis en place divers dispositifs juridiques et institutionnels pour l’élimination de la discrimination à l’encontre des travailleurs étrangers et pour protéger leurs droits et leurs intérêts. Les étrangers qui résident légalement en République de Corée peuvent légitimement aspirer à travailler en vertu de la loi sur l’emploi des travailleurs étrangers, ils sont soumis à la loi sur les normes du travail et se voient accorder les droits fondamentaux du travail. En outre, afin d’empêcher les atteintes aux droits de l’homme des travailleurs étrangers, des fonctionnaires visitent les lieux de travail où des travailleurs étrangers sont employés afin de fournir des conseils et autres services nécessaires pour résoudre leurs difficultés. Afin d’aider les travailleurs étrangers à bien s’adapter à la vie en République de Corée, le gouvernement a mis en place des centres de soutien pour travailleurs étrangers qui offrent des services d’interprétation, la possibilité d’apprendre le coréen, des services de conseil pour régler des différends et d’autres services. En juillet 2009, de tels centres opéraient dans cinq villes, dont Séoul, Ansan, et Gimhae où se concentrent les travailleurs étrangers. Tant le nombre de centres de soutien que les services qu’ils offrent seront augmentés. En outre, 100 abris pour travailleurs étrangers fonctionnent, principalement gérés par des organismes privés. Enfin, le gouvernement déclare qu’il reconnaît la diversité culturelle parmi les travailleurs étrangers et les aide à s’adapter à leur nouvelle vie en République de Corée, en organisant des événements comme les festivals culturels.

D. Conclusions du comité

D. Conclusions du comité
  1. 697. Le comité rappelle que ce cas concerne des allégations selon lesquelles, dans un climat allégué de discrimination généralisée, animée par la volonté de cantonner les travailleurs migrants dans le rôle d’une main-d’œuvre sous-payée et facile à exploiter, le gouvernement a refusé d’enregistrer le MTU et s’est livré à une répression ciblée à son encontre en procédant successivement à l’arrestation de ses présidents, Anwar Hossain, Kajiman Khapung et Toran Limbu, de ses vice-présidents, Raj Kumar Gurung (Raju) et Abdus Sabur, et de son secrétaire général, Abul Basher Moniruzzaman (Masum), puis à l’expulsion d’un grand nombre d’entre eux.
  2. 698. Le comité rappelle que, d’après son examen antérieur de ce cas, les faits qui ressortent des allégations précédentes de l’organisation plaignante et de la précédente réponse du gouvernement sont les suivants: le 3 mai 2005, le MTU a envoyé une notification de sa création au bureau régional du travail de Séoul. Le 3 juin 2005, celui-ci a rejeté cette notification en se fondant essentiellement sur les arguments suivants: i) le syndicat a omis de produire des pièces qui prouveraient que sa création ne viole pas les dispositions de la TULRAA (Trade Union and Labour Relations Adjustment Act), loi qui prévoit le monopole syndical au niveau de l’entreprise; et ii) le syndicat est essentiellement constitué d’étrangers employés illégalement «n’ayant pas le droit de s’affilier à un syndicat», et les dirigeants de ce syndicat sont des étrangers sans titre de séjour ou de travail légal. Le 14 juin 2005, le MTU a engagé un recours administratif contre le bureau régional du travail de Séoul qui a été rejeté par les instances compétentes essentiellement pour les motifs suivants: i) le syndicat était dans l’obligation de produire des pièces permettant d’établir que les dispositions de la TULRAA relatives au monopole syndical n’étaient pas violées; et ii) les travailleurs migrants en situation irrégulière n’ayant rigoureusement pas le droit de prendre un emploi en vertu de la loi sur le contrôle de l’immigration ne sont pas légalement fondés à rechercher le maintien ou l’amélioration de leurs conditions de travail ou l’amélioration de leur statut; de tels droits ne sont conférés que si l’on suppose que la relation de travail légitime se poursuivra; par conséquent, des travailleurs migrants en situation irrégulière ne sont pas en droit de constituer un syndicat. Le MTU a fait appel de cette décision devant la Haute Cour de Séoul qui a tranché en sa faveur le 1er février 2007 pour les motifs suivants: i) il n’est aucunement nécessaire de produire des pièces démontrant que les dispositions de la TULRAA instaurant le monopole syndical se trouvent respectées puisque les dispositions en question ne sont applicables que dans des circonstances spécifiques, au niveau de l’entreprise, alors que le MTU a été constitué à un niveau supérieur; ii) des travailleurs migrants en situation irrégulière restent des travailleurs aux termes de la Constitution et de la TULRAA et, par conséquent, la loi garantit la protection de leurs droits syndicaux; en tant que travailleurs, ils ont le droit de constituer des syndicats dès lors qu’effectivement ils fournissent des services dont ils tirent un salaire ou un revenu équivalent qui leur est versé à raison même de la fourniture de ces services; et iii) les restrictions que la loi sur le contrôle de l’immigration fait peser sur l’emploi de travailleurs migrants en situation irrégulière n’ont pas pour finalité d’interdire aux travailleurs étrangers de constituer une organisation de travailleurs en vue d’améliorer leurs conditions de travail. Pour ces motifs, la Haute Cour a estimé qu’il était contraire à la loi d’exiger la communication d’une liste des adhérents à seule fin de contrôler si ces personnes avaient un titre de séjour en règle. Le gouvernement a fait appel de cette décision et le cas est pendant devant la Cour suprême. Plusieurs dirigeants syndicaux du MTU ont depuis été arrêtés dans le cadre d’une série de campagnes de répression et, dans certains cas, expulsés.
  3. 699. S’agissant du refus des autorités de reconnaître la constitution du MTU et de lui octroyer le statut d’organisation syndicale, le comité rappelle que l’examen de cet aspect du cas est en instance devant la Cour suprême et qu’il a demandé au gouvernement de lui transmettre l’arrêt de la cour dès qu’il aura été rendu. Le comité note avec regret que plus de deux ans se sont écoulés depuis que la Haute Cour de Séoul a tranché en faveur du syndicat sans qu’un jugement ait été prononcé par la Cour suprême sur l’appel de cette décision et sans que le MTU ait bénéficié d’une mesure de référé. Dans ces circonstances et comme indiqué dans ses conclusions précédentes, le comité procédera à un examen de cet aspect du cas.
  4. 700. Le comité rappelle les indications précédentes de l’organisation plaignante concernant le refus des autorités de reconnaître le MTU et de lui octroyer le statut de syndicat, en particulier les points suivants: i) comme la Haute Cour l’a reconnu, le bureau régional du travail de Séoul n’aurait pas dû rejeter la notification de la constitution du MTU car la vérification du statut résidentiel des travailleurs migrants n’est pas une condition préalable à la création d’un syndicat aux termes de la Constitution et de la TULRAA; et ii) il n’était pas nécessaire de vérifier le respect du monopole du syndicat au niveau de l’entreprise dans le cas d’espèce, étant donné que le MTU est constitué à un niveau supérieur à celui de l’entreprise.
  5. 701. Le comité note également, à cet égard, que le gouvernement réitère que les dirigeants du MTU ont été expulsés non pour leurs activités syndicales, mais pour avoir séjourné illégalement dans le pays, et qu’il n’a aucune obligation de délivrer un certificat de rapport et de donner des privilèges juridiques à un syndicat qui: 1) avait à sa tête un contrevenant qui résidait illégalement en République de Corée; 2) avait déclaré dans ses statuts son opposition à la répression des résidents étrangers en situation irrégulière, ce qui va à l’encontre des lois du pays; 3) ne pouvait pas établir des relations de travail légitimes ni s’engager dans une négociation collective dans la mesure où ses membres résidaient illégalement en République de Corée; et 4) a rejeté la demande du gouvernement pour des documents complémentaires.
  6. 702. S’agissant des objections du gouvernement aux statuts du MTU, le comité rappelle que, comme il l’a indiqué par le passé, les travailleurs devraient pouvoir constituer, dans un climat de pleine sécurité, les organisations qu’ils jugent appropriées, qu’ils approuvent ou non le modèle économique et social du gouvernement ou même le modèle politique du pays [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 213] ou, comme dans le cas d’espèce, la politique migratoire du gouvernement. Le comité rappelle que, en vue de garantir pleinement le droit des organisations de travailleurs d’élaborer leurs statuts et règlements en toute liberté, la législation nationale ne devrait fixer que des conditions de forme en ce qui concerne les statuts des syndicats, et les statuts et règlements ne devraient pas être soumis à l’accord préalable des pouvoirs publics pour entrer en vigueur. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 371.]
  7. 703. Concernant le fait que les documents confirmant l’application des dispositions de la TULRAA sur le monopole syndical n’ont pas été produits, le comité rappelle qu’il demande la légalisation du pluralisme syndical au niveau de l’entreprise depuis le premier examen du cas no 1865 et qu’il a prié instamment le gouvernement d’accélérer ce processus depuis 2001, quand la légalisation du pluralisme a été reportée. Le comité a donc demandé instamment au gouvernement à maintes reprises de prendre rapidement des dispositions en vue de légaliser le pluralisme syndical au niveau de l’entreprise, en pleine consultation avec tous les partenaires sociaux concernés, de manière à garantir à tous les niveaux le droit des travailleurs de constituer les organisations de leur choix et de s’y affilier. [Voir 335e rapport, paragr. 821, et 346e rapport, paragr. 806 c) 1).] En tout état de cause, le comité croit comprendre, d’après les allégations de l’organisation plaignante, que le MTU a été constitué à un niveau supérieur à celui de l’entreprise.
  8. 704. En ce qui concerne le statut des responsables du MTU, le comité a considéré qu’il y aurait lieu de conférer une plus grande souplesse aux dispositions législatives, afin de permettre aux organisations d’élire librement et sans entrave leurs dirigeants et aux travailleurs étrangers d’accéder aux fonctions syndicales, du moins après une période raisonnable de résidence dans le pays d’accueil. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 420.] Ainsi, les inquiétudes exprimées par le gouvernement à cet égard ne semblent pas être contraires aux principes de la liberté syndicale. Le comité fait par ailleurs observer qu’il peut être difficile dans la conjoncture actuelle de satisfaire à la condition d’une durée de résidence raisonnable avant que les travailleurs migrants puissent être candidats à un poste de responsabilité dans un syndicat, étant donné l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle, alors que le MTU forme de nouveaux dirigeants et que des travailleurs migrants en situation régulière occupent des fonctions de responsabilité au sein du syndicat, le fait que la durée de résidence légale des travailleurs soit limitée à trois ans non seulement réduit la possibilité pour le syndicat de mettre en place des dirigeants à long terme, mais aussi contraint des travailleurs migrants relativement inexpérimentés à occuper des fonctions de responsabilité alors qu’ils ne bénéficient que de très peu, voire d’aucune, protection contre le risque d’être renvoyés ou expulsés. De plus, le comité note avec préoccupation l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle le fait que la Cour suprême ne se soit pas prononcée sur le statut du MTU a considérablement nui à la conduite de ses activités et à sa capacité de défendre les intérêts de ses adhérents.
  9. 705. S’agissant des travailleurs migrants, le comité rappelle une fois de plus, comme il l’a fait dans son examen précédent de ce cas [voir 353e rapport, paragr. 788], le principe général en vertu duquel tous les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, y compris sans discrimination tenant à l’occupation, devraient avoir le droit de constituer les organisations de leur choix et de s’y affilier. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 216.] Le comité rappelle en outre que, chaque fois qu’il a examiné une législation déniant aux travailleurs migrants en situation irrégulière le droit de se syndiquer – situation qui correspond à celle qui est présentée –, il a souligné que tous les travailleurs, à la seule exception des membres des forces armées et de la police, sont couverts par la convention no 87 et, en conséquence, il a toujours demandé au gouvernement de tenir compte dans sa législation de la teneur de l’article 2 de la convention no 87. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 214.] Le comité rappelle également la résolution concernant une approche équitable pour les travailleurs migrants dans une économie mondialisée adoptée par la Conférence de l’OIT à sa 92e session en 2004, aux termes de laquelle «tous les travailleurs migrants bénéficient également de la protection offerte par la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail et son suivi (1998). Par ailleurs, les huit conventions fondamentales de l’OIT relatives à la liberté syndicale et au droit de négociation collective, à la non-discrimination en matière d’emploi et de profession, à l’interdiction du travail forcé, et à l’élimination du travail des enfants couvrent les travailleurs migrants, quel que soit leur statut.» (paragr. 12). Dans ces circonstances et au vu des informations récemment fournies par l’organisation plaignante concernant le fait que ses dirigeants et un grand nombre de ses adhérents sont en situation régulière, le comité demande au gouvernement de procéder le plus rapidement possible à l’enregistrement du MTU et de garantir que les décisions nationales concernant la demande d’enregistrement du MTU reconnaissent le principe selon lequel tous les travailleurs doivent se voir garantir le plein exercice de leurs droits syndicaux. Il demande en outre au gouvernement de veiller à ce que les conclusions du comité, en particulier celles ayant trait aux droits syndicaux des travailleurs migrants, soient portées à l’attention de la Cour suprême et de lui communiquer une copie de l’arrêt de la cour dès qu’il aura été rendu.
  10. 706. Le comité note que l’organisation plaignante renouvelle l’allégation qu’elle avait précédemment formulée concernant la discrimination et la répression généralisées exercées à l’encontre des travailleurs migrants. Le comité considère que c’est précisément pour cette raison que les droits syndicaux de tous les travailleurs, quel que soit leur statut, doivent être garantis afin d’éviter le risque qu’il ne soit tiré avantage de leur situation précaire. Au vu de ce qui précède et soulignant l’importance qu’il convient d’attacher à la protection des droits des travailleurs migrants, qu’ils soient en situation régulière ou non, de se syndiquer, le comité demande au gouvernement d’entreprendre un examen approfondi de la situation quant au statut des travailleurs migrants en collaboration avec les partenaires sociaux concernés, de façon à garantir et protéger pleinement les droits fondamentaux de liberté syndicale et de négociation collective de l’ensemble des travailleurs migrants, qu’ils soient en situation régulière ou non, et conformément aux principes de la liberté syndicale, et de privilégier le dialogue avec les partenaires sociaux concernés afin de trouver des solutions négociées aux difficultés auxquelles ces travailleurs sont confrontés. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard.
  11. 707. Le comité rappelle qu’il avait déjà exprimé sa profonde préoccupation devant la coïncidence dans le temps entre l’arrestation et l’expulsion des dirigeants du MTU et les activités syndicales de ces travailleurs qui résidaient dans le pays depuis de nombreuses années. [Voir 353e rapport, paragr. 790-793.] A cet égard, le comité note que le gouvernement et l’organisation plaignante se réfèrent à un rapport du gouvernement intitulé «Plan d’amélioration de la politique régissant la main-d’œuvre étrangère non qualifiée» qui, selon l’organisation plaignante, fait une référence spécifique au MTU, qualifie «la création d’un syndicat par des travailleurs en situation irrégulière» de «tendance au mépris de la loi», et déclare l’intention du gouvernement de «renforcer la répression contre ceux qui participent et soutiennent les activités syndicales illégales et protestations [du MTU]», tout en citant l’arrestation et l’expulsion des dirigeants du MTU comme des exemples de mesures à prendre.
  12. 708. Tout en notant que le gouvernement déclare que le rapport n’avait pas pour objectif de cibler et d’attaquer les dirigeants du MTU, mais avait été plutôt élaboré pour fournir efficacement en travailleurs étrangers les secteurs faisant face à une pénurie de main-d’œuvre, compte tenu de l’offre et de la demande de la main-d’œuvre locale, et à minimiser les coûts sociaux par la fourniture de services, le comité note cependant que le gouvernement confirme que le plan exposé dans le rapport comprend des mesures visant à réduire le nombre d’étrangers en situation irrégulière en mettant en place un système gouvernemental de gestion des résidents étrangers en situation irrégulière, qui permettrait de prévenir le séjour illégal d’étrangers et de réprimer les étrangers en situation irrégulière.
  13. 709. Enfin, le comité prend note de l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle, à la suite de l’arrestation et de l’expulsion de plusieurs dirigeants du MTU, le syndicat a dû se passer d’une direction officielle et fonctionne avec une structure d’urgence dans laquelle les décisions sont prises par un comité de direction d’urgence mais sans représentants visibles publiquement. Compte tenu de ces indications, le comité prie à nouveau le gouvernement de s’abstenir de prendre des mesures qui comporteraient un risque grave d’interférence avec des activités syndicales, comme l’arrestation et l’expulsion de dirigeants syndicaux en relation avec leur élection et tandis que leurs recours sont pendants devant une instance judiciaire.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 710. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que le syndicat MTU soit rapidement enregistré et de garantir que les décisions nationales concernant la demande d’enregistrement du MTU reconnaissent le principe selon lequel tous les travailleurs doivent pouvoir exercer pleinement leurs droits syndicaux. Il demande en outre au gouvernement de veiller à ce que les conclusions du comité, en particulier celles ayant trait aux droits syndicaux des travailleurs migrants, soient portées à l’attention de la Cour suprême et de lui fournir une copie de l’arrêt de cette cour dès qu’il aura été rendu.
    • b) Le comité demande au gouvernement d’entreprendre un examen approfondi de la situation en ce qui concerne le statut des travailleurs migrants avec les partenaires sociaux concernés afin de pleinement garantir et protéger les droits fondamentaux de liberté syndicale et de négociation collective de tous les travailleurs migrants, qu’ils soient en situation régulière ou non et conformément aux principes de la liberté syndicale, et de privilégier le dialogue avec les partenaires sociaux concernés afin de trouver des solutions négociées aux difficultés auxquelles sont confrontés ces travailleurs. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard.
    • c) Le comité demande une fois de plus au gouvernement de s’abstenir de prendre à l’avenir des mesures qui comporteraient un risque grave d’interférence avec des activités syndicales, comme l’arrestation et l’expulsion de dirigeants syndicaux en relation avec leur élection et alors que leurs recours sont pendants devant une instance judiciaire.
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