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Informe en el que el Comité pide que se le mantenga informado de la evolución de la situación - Informe núm. 362, Noviembre 2011

Caso núm. 2741 (Estados Unidos de América) - Fecha de presentación de la queja:: 10-NOV-09 - Cerrado

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740. La plainte, en date 10 novembre 2009, figure dans une communication du Syndicat des travailleurs du transport du Grand New York, AFL-CIO, Local 100 (Local 100) et du Syndicat américain des travailleurs du transport, AFL-CIO (TWUA). Les organisations plaignantes ont ensuite fourni des informations complémentaires le 16 décembre 2009 et le 14 mars 2011.

  1. 740. La plainte, en date 10 novembre 2009, figure dans une communication du Syndicat des travailleurs du transport du Grand New York, AFL-CIO, Local 100 (Local 100) et du Syndicat américain des travailleurs du transport, AFL-CIO (TWUA). Les organisations plaignantes ont ensuite fourni des informations complémentaires le 16 décembre 2009 et le 14 mars 2011.
  2. 741. Le gouvernement a présenté ses observations dans une communication en date du 15 avril 2011.
  3. 742. Les Etats-Unis n’ont pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 743. Dans leur communication en date du 10 novembre 2009, Local 100 et le TWUA déclarent que la loi de 1967 sur l’emploi des travailleurs du secteur public (article 14 de la loi sur le service public de New York) dite «loi Taylor» interdit de façon inconditionnelle dans le secteur public les grèves, les «arrêts de travail concertés» et même «toute action concertée visant à ralentir les activités» (sections 201(9), 209(5) et 210). Les organisations plaignantes indiquent également que la loi Taylor substitue au droit de grève la mise en place d’un arbitrage obligatoire entre travailleurs et employeurs et réprime le recours illégal à la grève par des sanctions excessives telles que, notamment, l’emprisonnement des dirigeants syndicaux, de lourdes amendes et la suspension de la retenue des cotisations syndicales à la source. La loi exige également que les syndicats voulant représenter les travailleurs du secteur public dans la négociation collective s’engagent par écrit à ne pas «recourir au droit de grève dans le cadre du secteur public, quelle que soit l’administration concernée, participer et apporter leur appui à une grève dans le secteur public et imposer à quiconque d’intégrer, de diriger ou de soutenir une grève dans le secteur public» (section 207(3)(b)). Selon les organisations plaignantes, ces dispositions de la loi Taylor contreviennent gravement aux conventions nos 87 et 98 de l’OIT tant en soi que par le fait qu’elles s’appliquent à une grève de 60 heures organisée par Local 100 entre le 20 et le 22 décembre 2005.
  2. 744. Les organisations plaignantes déclarent qu’elles ont déposé la présente plainte suite à la conclusion, dans les instances judiciaires nationales, d’une importante procédure concernant la grève de 2005 et ses conséquences pour Local 100. Elles indiquent qu’elles sont conscientes de ne pas avoir épuisé les voies de recours internes mais qu’elles ont choisi de ne pas utiliser certaines d’entre elles du fait que les tribunaux ont jusqu’à présent examiné avec très peu de bienveillance les actions visant à remettre en cause la validité de la loi Taylor ou le caractère légal de restrictions analogues au droit de grève. Les organisations plaignantes renvoient à un certain nombre de décisions judiciaires montrant que la loi Taylor avait été maintenue en dépit de nombreuses actions la contestant et que les tribunaux l’avaient estimée conforme au droit interne, y compris à la Constitution de l’Etat de New York et à celle des Etats-Unis.
  3. 745. Local 100 représente plus de 38 000 travailleurs parmi lesquels figurent pratiquement tous les employés des services de transport public de la ville de New York. Entre le 20 et le 22 décembre 2005, une grève a éclaté dans le contexte de la négociation d’un nouvel accord entre les services de la Metropolitan Transportation Authority (MTA) (transports publics de New York), le TWUA et Local 100 suite à l’expiration de la convention collective le 15 décembre 2005. Les organisations plaignantes indiquent que l’employeur a fait preuve de mauvaise foi pendant toute la durée des négociations et se fondent sur les éléments suivants pour le démontrer. En premier lieu, les organisations plaignantes font valoir que l’employeur a imposé au syndicat d’accepter un système différent de retraite et de prestations en matière de soins (au détriment des employés nouvellement embauchés) n’imposant aucune contrainte économique à l’employeur. Selon le président de Local 100, «ils ont exigé un arbitrage avant même d’essayer de trouver un nouvel accord et, quelques heures avant que la convention n’expire, la MTA a dépensé un milliard de dollars d’excédents». Les organisations plaignantes indiquent également que l’employeur a présenté une proposition financière seulement quelques jours avant que la convention avec Local 100 n’expire, a commis des représentants ne disposant d’aucun pouvoir réel de négociation et n’a envoyé un représentant disposant d’un tel pouvoir qu’une heure avant l’expiration de la convention collective.
  4. 746. Le 12 décembre 2005, trois jours avant la date d’expiration de la convention collective, le Procureur général de New York, agissant à la demande de l’employeur, a rendu une ordonnance interdisant à Local 100 de recourir à la grève conformément à la section 210(1) de la loi Taylor qui dispose qu’une organisation de fonctionnaires ou de salariés n’a pas le droit de faire grève et qu’il est interdit à toute organisation de fonctionnaires ou de salariés de déclencher une grève, d’encourager une grève ou de participer à une grève. Cette ordonnance a été rendue le 13 décembre (New York City Transit Authority contre Transport Workers Union Local 100, 35 A.D.3d.)
  5. 747. Le 20 décembre, cinq jours après l’expiration de l’accord de négociation collective, comme l’employeur refusait encore de négocier de bonne foi, Local 100 a déclenché la grève. Les organisations plaignantes déclarent que, à aucun moment durant la grève, la santé et la sécurité des résidents de la zone urbaine de New York n’ont été menacées et que le mouvement s’est déroulé de façon pacifique sans occasionner de troubles à l’ordre public. Le 22 décembre, l’employeur a renoncé à ses exigences. Selon les organisations plaignantes, les parties sont parvenues à un accord provisoire quelques jours plus tard. L’employeur a cependant refusé d’honorer cet accord provisoire et, finalement, une commission d’arbitrage a entériné l’accord auquel les parties étaient parvenues au cours des négociations qui ont mis fin à la grève.
  6. 748. Les organisations plaignantes indiquent en outre que, pendant le premier jour de grève, le tribunal a estimé que le syndicat ne s’était pas conformé à l’ordonnance du procureur et lui a infligé une amende d’un million de dollars par jour de grève. Le 19 avril 2006, le tribunal a statué que le syndicat devrait s’acquitter d’une amende de 2,5 millions de dollars pour avoir fait grève pendant 60 heures et que chacun des grévistes serait privé de deux jours de salaire par jour de grève. Il a en outre décidé que, conformément aux dispositions de la loi Taylor, la retenue à la source des cotisations syndicales destinées à Local 100 serait suspendue.
  7. 749. Les organisations plaignantes déclarent que cette amende ainsi que la suspension de la retenue à la source des cotisations syndicales (qui, trois mois après l’application de la décision de justice, se traduisait déjà par une perte de revenu d’un million de dollars pour le syndicat) ont représenté une lourde charge financière pour Local 100 et ses membres. Les organisations plaignantes ont également indiqué que ces sanctions avaient eu un effet catastrophique dans la mesure où le syndicat avait dû engager des dépenses pour obtenir le versement des cotisations par ses membres et consacrer une large part de son budget et du temps de travail de son personnel à cette tâche pendant les 19 mois de suspension de la retenue des cotisations à la source. Ce prélèvement a été rétabli le 10 novembre 2008 (seulement après que Local 100 se fut engagé à ne plus recourir à la grève dans le futur). Le TWUA a également enregistré une perte substantielle de 25 pour cent de ses recettes dans la mesure où Local 100 lui reverse 30 pour cent de ses revenus.
  8. 750. De plus, les organisations plaignantes indiquent que, le 24 avril 2006, le président de Local 100 a été condamné à dix jours d’emprisonnement en raison de son implication dans la violation de l’ordonnance (New York City Transit Authority contre Transport Workers Union of America, 2006 N.Y.Misc. Lexis 4046 (Sup. Ct. Kings Co.2006) affirmed 37 A.D.3d679 (App.Div 2d Dept.2007)).
  9. 751. Les organisations plaignantes déclarent que les sanctions infligées au syndicat à la suite de la grève ont été si disproportionnées que l’on peut légitimement se demander si elles n’avaient pas pour but de paralyser, voire de détruire, le syndicat et de dissuader les autres syndicats de recourir à la grève. Parallèlement, les organisations plaignantes font valoir que les amendes frappant chacun des grévistes pouvaient être interprétées comme étant un calcul visant à inciter ces derniers à se détourner du syndicat. Viennent en outre s’ajouter à ces éléments d’intimidation et de harcèlement la condamnation du président de Local 100 à une peine de prison ainsi que les pénalités financières, lesquelles ont sapé la capacité future du syndicat à représenter adéquatement ses membres et ont eu un effet dissuasif sur les autres organisations.
  10. 752. Dans leur communication du 16 décembre 2009, les organisations plaignantes indiquent que l’accord de négociation collective signé par deux sous-agences relevant de l’employeur après la grève de décembre 2005 a expiré le 15 janvier 2009. Bien que les négociations pour un nouvel accord aient commencé plusieurs mois auparavant, les parties ont été incapables de parvenir à un accord général. Un second accord de négociation collective avec une autre sous-agence de l’employeur a expiré le 31 mars 2006 et les parties ont été incapables de parvenir à un accord pendant plus de deux ans et demi. Le 6 janvier 2009, une déclaration conjointe faisant état du fait que les négociations étaient dans l’impasse a été soumise à la Commission des relations d’emploi dans le service public (PERB) afin d’obtenir un arbitrage concernant les deux accords conformément à la section 209 de la loi Taylor. Des audiences ont eu lieu en avril, mai et juin 2009 au cours desquelles les parties ont présenté un grand nombre de témoignages et de documents probants. Le 9 juin 2009, la commission a rendu une sentence arbitrale concernant une des sous-agences de l’employeur couvrant la période du 1er avril 2006 au 31 mars 2009 désormais totalement écoulée. Le 11 août 2009, la commission a rendu une autre sentence arbitrale portant sur les conditions d’emploi des travailleurs dans trois autres sous-agences et couvrant la période allant jusqu’au 15 janvier 2012. Les organisations plaignantes indiquent que l’employeur n’a fait aucun effort pour appliquer la sentence malgré une décision de la Cour suprême de l’Etat de New York la rendant exécutoire dans sa totalité. Les organisations plaignantes déclarent que, un an après l’expiration de l’accord de négociation collective, elles s’attendaient à ce que le litige dure encore plusieurs années après le processus d’arbitrage et s’inquiétaient des implications que pourraient avoir de tels retards dans le processus de négociation.
  11. 753. Les organisations plaignantes demandent au comité de recommander aux Etats-Unis de prendre des mesures pour veiller à ce que l’Etat de New York interprète le droit interne conformément aux obligations internationales des Etats-Unis et légifère en conséquence. Les organisations plaignantes ont en outre demandé au comité de recommander que Local 100 obtienne une indemnité correspondant au minimum au remboursement des amendes qui lui ont été infligées ainsi qu’à ses membres, ainsi qu’une somme le dédommageant des pertes induites par la suspension pendant près de 18 mois de la retenue des cotisations syndicales à la source. Elles ont également instamment prié le comité d’inviter le gouvernement des Etats-Unis à ratifier au plus tôt les conventions nos 87 et 98.
  12. 754. Enfin, dans une communication du 14 mars 2011, les organisations plaignantes font valoir qu’au moins 20 Etats ont lancé des initiatives législatives visant à limiter la liberté syndicale. Selon ces organisations, ces attaques dirigées à l’échelle nationale contre le droit de négociation collective ont une implication directe sur les questions soulevées dans cette affaire, tandis que celles ciblant la négociation collective dans le secteur public visent à délégitimer l’activité syndicale internationalement protégée. Selon les organisations plaignantes, le fait que ces limitations du droit à la liberté syndicale ne se soient heurtées à aucun obstacle tangible a provoqué une crise nationale.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 755. Dans une communication en date du 15 avril 2011, le gouvernement déclare que le taux de syndicalisation dans le secteur public national est actuellement de 36,2 pour cent et qu’il est resté relativement stable pendant ces dernières décennies.
  2. 756. Le gouvernement déclare en outre qu’un système de gouvernement décentralisé et différencié selon les Etats est en vigueur dans son pays et qu’il est consacré par la Constitution des Etats-Unis. La Constitution établit un régime fédéraliste dans lequel le gouvernement national exerce uniquement les pouvoirs qui lui sont expressément conférés par cette dernière. Tous les autres pouvoirs sont conférés aux 50 Etats ou au peuple lui-même. Ces principes ont été réaffirmés plusieurs fois, y compris par le décret exécutif no 13132 qui interdit expressément aux administrations fédérales de soumettre au Congrès des propositions de loi qui «portent atteinte à des fonctions essentielles à l’existence indépendante et séparée des Etats» (section 5(a)). Le gouvernement indique que les relations professionnelles aux niveaux local et de l’Etat sont souvent considérées comme des «fonctions essentielles» à «l’existence indépendante et distincte» des Etats et des collectivités locales. La réglementation des relations professionnelles aux Etats-Unis respecte la répartition du pouvoir prescrite par la Constitution entre le gouvernement national, le gouvernement des Etats et les collectivités locales. Lorsque le Congrès a promulgué la loi nationale sur les relations professionnelles (NLRA), il a expressément exclu l’administration des Etats et les collectivités locales, en tant qu’employeurs, du champ d’application de la loi, respectant ainsi les principes du fédéralisme.
  3. 757. Le Code du travail de chacun des Etats reflète l’équilibre entre les droits des employeurs et des travailleurs qu’ont voulu instaurer leurs institutions respectives. Si les approches réglementaires choisies par les Etats diffèrent quelque peu les unes des autres, il n’en demeure pas moins que la plupart des Etats appliquent des dispositions constitutionnelles ou des législations qui garantissent expressément le droit à la liberté syndicale pour les employés du secteur public. Le gouvernement indique que 25 Etats, ainsi que le district de Columbia, ont adopté une législation du travail très complète pour la majorité des employés du service public qui définit, entre autres, des méthodes permettant de sortir de l’impasse en matière de négociation. Trente-cinq Etats ont mis en place des commissions des relations professionnelles dans le secteur public qui sont généralement des organismes administratifs de nature quasi judiciaire chargés d’administrer le droit des travailleurs du service public en matière de convention collective et de résoudre les conflits du travail. En outre, presque tous les Etats disposent d’un système de résolution des différends permettant de recourir à des procédures de médiation, d’arbitrage ou d’enquête dans le cadre de conflits du travail ou de négociations en vue d’un accord.
  4. 758. Pour ce qui est de l’Etat de New York, le gouvernement déclare qu’il a le taux de syndicalisation le plus élevé du pays (24,2 pour cent dans le secteur public et le secteur privé). Le gouvernement indique que la loi Taylor régit les relations professionnelles à tous les échelons de l’administration et qu’elle confère des droits importants aux travailleurs du service public, y compris celui de constituer des organisations et d’être représentés par ces dernières. Les syndicats de travailleurs du service public ont également le droit de négocier collectivement avec leurs employeurs en ce qui concerne leurs conditions d’emploi.
  5. 759. Le gouvernement indique que, si la loi Taylor interdit expressément aux travailleurs du service public de faire grève, elle établit toutefois une Commission des relations d’emploi dans le service public (PERB) de trois membres qui est une instance neutre et indépendante chargée d’administrer le système de règlement des différends des travailleurs du service public (section 209). La loi Taylor met en place des procédures générales de médiation et d’enquête pour tous les agents concernés et prévoit même des procédures d’arbitrage contraignantes pour les travailleurs du transport lorsque la PERB certifie que la négociation d’un accord ne peut aboutir par la seule volonté des parties (section 209(5)). Le gouvernement déclare également que l’Etat de New York a adopté une loi qui autorise le prélèvement automatique des cotisations syndicales sur le salaire des travailleurs du service public de l’Etat et des collectivités locales couverts par un accord de négociation collective.
  6. 760. Le gouvernement indique que la ville de New York et ses travailleurs du transport sont parties à des accords de négociation collective depuis plus de 40 ans et qu’ils ont notamment conclu un accord couvrant la période allant du 16 décembre 2002 au 15 décembre 2005. La négociation des termes d’un accord ultérieur a commencé en octobre 2005 et s’est poursuivie jusqu’à ce que Local 100 vote une grève le 20 décembre 2005. Selon le gouvernement, les organisations plaignantes n’ont pas sollicité le système de résolution des différends avant la déclaration de grève, et la grève est intervenue après seulement un mois et demi de négociations sans qu’il y ait eu recours à la médiation légalement prévue ou au système d’arbitrage contraignant qui a largement fait ses preuves dans le passé.
  7. 761. Le gouvernement des Etats-Unis reconnaît que ses pouvoirs sont limités par le système démocratique fédéral et qu’en conséquence celui-ci n’est pas autorisé à modifier directement les lois relatives aux relations professionnelles telles que la loi Taylor. Le gouvernement indique toutefois que les Etats-Unis tiennent à faire évoluer la situation et continueront de ce fait à promouvoir les principes de la liberté syndicale et de la négociation collective dans tout le pays. Le gouvernement déclare qu’il a récemment entrepris des activités de premier plan pour favoriser l’application de ces principes, notamment dans le cadre du Service fédéral de médiation et de conciliation (FMCS). Le FMCS met un certain nombre de services à disposition dans le secteur public aux niveaux fédéral, des Etats et local, notamment un service relatif au règlement des différends dans les processus de négociation collective. Le gouvernement fait également observer qu’il a montré lui-même la voie à suivre avec sa gestion des relations professionnelles dans le secteur fédéral et notamment l’application des décrets exécutifs nos 13522 et 13496 signés le 9 décembre 2009 par le Président Obama, lesquels ont permis d’instaurer au sein de l’exécutif des relations professionnelles performantes axées sur la coopération. Le gouvernement a également créé un Conseil fédéral sur les relations professionnelles chargé de conseiller le Président et a demandé à toutes les institutions fédérales de créer des instances de gestion des relations professionnelles pour renforcer la coopération et contrôler les améliorations dans les domaines identifiés par les membres du conseil. Il a enfin lancé plusieurs projets pilotes dans le cadre desquels certaines questions pourront être négociées par des instances exécutives. Le décret exécutif no 13522 est en cours d’application. Le décret exécutif no 13496 a été signé le 30 janvier 2009 et demande aux entreprises publiques et à leurs sous-traitants de faire connaître aux salariés leurs droits consacrés par la loi nationale sur les relations professionnelles (NLRA) au moyen d’affiches apposées de manière apparente dans les lieux de travail. Le gouvernement indique qu’il continuera à promouvoir ces grands principes tant au niveau fédéral qu’à celui des Etats.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 762. Le comité observe que les allégations de Local 100 et du TWUA concernent la législation d’un Etat restreignant le droit de grève des travailleurs du transport public et son application dans le cadre d’une grève lancée par Local 100 entre le 20 et le 22 décembre 2005. Plus précisément, les organisations plaignantes font référence à la loi de 1967 sur l’emploi des travailleurs du secteur public (article 14 de la loi sur le service public de New York) dite «loi Taylor» qui interdit de façon inconditionnelle dans le secteur public les grèves, les arrêts de travail concertés et même «toute action concertée visant à ralentir les activités» (sections 201(9), 209(5) et 210). Les organisations plaignantes signalent également que la loi Taylor substitue au droit de grève la mise en place d’un arbitrage obligatoire entre travailleurs et employeurs et réprime le recours illégal à la grève par des sanctions excessives telles que, notamment, l’emprisonnement des dirigeants syndicaux, de lourdes amendes et la suspension du prélèvement des cotisations syndicales à la source. La loi exige également que les syndicats voulant représenter les travailleurs du secteur public dans la négociation collective s’engagent par écrit à ne pas «recourir au droit de grève dans le cadre du service public, quelle que soit l’administration concernée, participer et apporter leur appui à une grève dans le service public et imposer à quiconque d’intégrer, de diriger ou de soutenir une grève dans le service public» (section 207(3)(b)).
  2. 763. Le comité prend dûment note de la réponse du gouvernement qui déclare que si la loi Taylor interdit aux travailleurs du service public de recourir à la grève, elle met cependant en place pour ces derniers un système de règlement des différends par le biais de la PERB et de procédures générales de médiation et d’enquête ainsi que des procédures spécifiques d’arbitrage obligatoire pour les travailleurs du transport. Le gouvernement indique également que les organisations plaignantes n’ont pas utilisé ce système de règlement des différends avant de faire grève alors que ce système avait largement démontré son efficacité dans le passé.
  3. 764. Le comité observe à cet égard que les organisations plaignantes font valoir que l’employeur a fait preuve de mauvaise foi pendant toute la durée des négociations et a exigé un arbitrage avant même d’essayer de régler le litige. Selon les organisations plaignantes, les éléments démontrant la mauvaise foi de l’employeur sont notamment les suivants: l’employeur a dépensé un milliard de dollars d’excédents quelques heures avant l’expiration de la convention collective, n’a fait aucune concession dans les négociations, a commis des représentants sans réel pouvoir de négociation et n’a envoyé un représentant disposant d’un tel pouvoir qu’une heure avant l’expiration de l’accord de négociation collective. Le comité constate en outre que, selon le gouvernement, les organisations plaignantes n’ont pas sollicité le système de résolution des différends prévu par la loi Taylor avant la déclaration de grève.
  4. 765. Le comité rappelle qu’il importe qu’employeurs et syndicats participent aux négociations de bonne foi et déploient tous leurs efforts pour aboutir à un accord, des négociations véritables et constructives étant nécessaires pour établir et maintenir une relation de confiance entre les parties. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 935.] Le comité rappelle également que toute intervention des pouvoirs publics dans un conflit du travail doit être compatible avec le principe de la négociation libre et volontaire; cela signifie que les organismes appelés à résoudre des différends entre les parties à une négociation collective doivent être indépendants, et le recours à ces organismes devrait se faire sur une base volontaire, excepté lorsqu’il y a crise nationale aiguë. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1004.] Le comité prie le gouvernement d’encourager les parties à prendre, à l’avenir, toutes les mesures qui s’imposent à cet égard.
  5. 766. En ce qui concerne les procédures d’arbitrage préalables, le comité observe que, dans la loi Taylor, ces procédures sont établies dans un cadre qui interdit strictement tout mouvement de grève dans le service public. En outre, les organisations plaignantes ont exprimé leurs préoccupations concernant le respect et la mise en œuvre de sentences arbitrales définitives dans leurs allégations concernant une procédure d’arbitrage ultérieure débouchant sur deux sentences arbitrales rendues par la PERB, dont l’une datant du 11 août 2009 n’a pas été jusqu’à présent appliquée par l’employeur malgré une décision favorable de la Cour suprême de New York. Le comité observe que le gouvernement n’a fourni aucune information sur la non-application de la sentence arbitrale de la PERB rendue le 11 août 2009 et veut croire qu’il prendra toutes les mesures nécessaires pour se conformer réellement à la décision de la Cour suprême relative à l’application de ladite décision. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
  6. 767. En ce qui concerne l’interdiction générale de tout mouvement de grève dans le service public imposée par la loi Taylor, le comité rappelle qu’il a toujours reconnu aux travailleurs et à leurs organisations le droit de grève comme moyen légitime de défense de leurs intérêts économiques et sociaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 521.] Si le droit de grève peut être restreint, voire interdit: 1) dans la fonction publique uniquement pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat; ou 2) dans les services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire les services dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne, le comité rappelle que le secteur des transports, y compris celui d’une grande métropole, ne constitue pas un service essentiel au sens strict du terme. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 576 et 587.]
  7. 768. Le comité note toutefois qu’un service minimum pourrait être approprié comme solution de rechange possible dans les situations où une limitation importante ou une interdiction totale de la grève n’apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause le droit de grève de la plus grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d’assurer la satisfaction des besoins de base des usagers ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu des installations. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 607.] Le respect de l’obligation de maintenir un service minimum des activités du métro pour satisfaire aux nécessités minimales des collectivités locales ne va pas à l’encontre des principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 617.] Le comité rappelle que «dans la détermination des services minima et du nombre de travailleurs qui en garantissent le maintien, il importe que participent non seulement les pouvoirs publics, mais aussi les organisations d’employeurs et de travailleurs concernées. En effet, outre que cela permettrait un échange de vues réfléchi sur ce que doivent être en situation réelle les services minima strictement nécessaires, cela contribuerait aussi à garantir que les services minima ne soient pas étendus au point de rendre la grève inopérante en raison de son peu d’impact, et à éviter de donner aux organisations syndicales l’impression que l’échec de la grève tient à ce que le service minimum a été prévu d’une manière trop large et fixé unilatéralement.» [Voir Recueil, op. cit., paragr. 612.] Par ailleurs, le comité souhaite rappeler qu’en l’absence d’accord entre les parties la tâche d’élaborer un service minimum doit être confiée à un organe indépendant. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 613 et 618.]
  8. 769. Compte tenu des principes ci-dessus et en dépit de l’existence d’un système de résolution des différends, le comité considère que les restrictions du droit de grève dans le secteur des transports telles qu’elles sont énoncées dans la loi Taylor ne sont pas conformes aux principes de la liberté syndicale. Tout en prenant note de la référence du gouvernement au système fédéraliste de gouvernance constitutionnelle, le comité prie néanmoins le gouvernement de prendre des mesures pour rendre la loi conforme aux principes de la liberté syndicale et de faire en sorte que les restrictions au droit de grève ne puissent être applicables: 1) qu’à l’égard des fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat; et 2) des fonctionnaires qui travaillent dans les services essentiels au sens strict du terme. Le gouvernement peut, néanmoins, s’il le désire, envisager la possibilité de prévoir un service minimum négocié dans le secteur des transports publics conformément aux principes précités.
  9. 770. Le comité note également que, en application de la loi Taylor, des sanctions ont été prises après la grève contre les organisations plaignantes pour violation d’une ordonnance du Procureur général de New York, interdisant de recourir à la grève (le procureur agissait à la demande de l’employeur). Local 100 a été condamné à une amende de 2,5 millions de dollars pour avoir organisé une grève de 60 heures, son président a été incarcéré pendant dix jours et la retenue à la source des cotisations syndicales a été suspendue pendant 19 mois. Les grévistes ont également été individuellement condamnés à des amendes équivalant à deux journées de salaire par jour de grève. Le comité observe par ailleurs que, dans sa réponse, le gouvernement n’a pas contesté le fait que le mouvement se soit déroulé de manière pacifique sans occasionner de troubles à l’ordre public.
  10. 771. Le comité observe que les sanctions infligées sont liées au non-respect d’une ordonnance rendue sur la base de la section 210(1) de la loi Taylor qui interdit tout mouvement de grève dans le service public et qui, en l’espèce, contrevient aux principes de la liberté syndicale.
  11. 772. Le comité rappelle que, à l’instar de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, il estime qu’aucun travailleur participant à une grève de façon pacifique ne devrait être passible de sanctions pénales ni, par conséquent, d’une peine d’emprisonnement: nul ne devrait pouvoir être privé de liberté ni faire l’objet de sanctions pénales pour le simple fait d’avoir organisé une grève pacifique ou d’y avoir participé. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 672, et 358e rapport, cas no 2742, paragr. 279.]
  12. 773. Dans ce contexte, le comité exprime sa vive préoccupation face à la gravité des sanctions pénales et financières infligées à Local 100 pour une grève qui a duré moins de trois jours. Le comité considère que ces amendes sont susceptibles d’avoir eu des conséquences très dommageables sur les ressources financières de Local 100, d’avoir entravé les activités du syndicat et porté atteinte à sa capacité à représenter adéquatement ses membres. Il estime, en outre, que ces amendes peuvent avoir eu pour effet d’intimider les travailleurs et de les dissuader d’exercer leurs droits syndicaux. De plus, le comité rappelle que la suppression de la possibilité de retenir les cotisations à la source, qui pourrait déboucher sur des difficultés financières pour les organisations syndicales, n’est pas propice à l’instauration de relations professionnelles harmonieuses et devrait donc être évitée. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 475.] Dans le présent cas, le comité considère que la suspension du dispositif de retenue des cotisations syndicales à la source ne peut être justifiée. Enfin, pour ce qui est des grévistes, tout en prenant note que les déductions de salaire pour les jours de grève ne soulèvent pas d’objections du point de vue des principes de la liberté syndicale [voir Recueil, op. cit., paragr. 654], le comité estime que des sanctions supplémentaires telles que les retenues sur le salaire supérieures au montant correspondant à la durée de la grève revêtent dans ce cas un caractère de sanction visant à réprimer une action légitime de revendication. Le comité prie donc instamment le gouvernement de prendre des mesures sans délai pour faire en sorte que le syndicat soit pleinement indemnisé pour les préjudices subis au titre des sanctions prises à son encontre, y compris ceux induits par la suppression du dispositif de retenue des cotisations syndicales, et que les grévistes, dont M. Toussaint qui a été condamné à dix jours de détention, obtiennent pleine réparation pour les diverses sanctions qui leur ont été infligées. Le comité prie instamment le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard.
  13. 774. Enfin, le comité accueille favorablement les mesures prises par le gouvernement au niveau fédéral en vue de promouvoir la négociation collective dans le service public et veut croire qu’il prendra les mesures nécessaires pour promouvoir le plein respect des principes de la liberté syndicale dans le pays. Le comité prie instamment le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard. Le comité invite le gouvernement à considérer la possibilité de prendre les mesures nécessaires afin de ratifier la convention no 87 et la convention no 98.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 775. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Tout en prenant note de la référence du gouvernement au système fédéraliste de gouvernance constitutionnelle, le comité prie néanmoins le gouvernement de prendre des mesures visant à rendre, par l’amendement des dispositions pertinentes de la loi Taylor, la législation de l’Etat conforme aux principes de la liberté syndicale, de sorte que les restrictions au droit de grève ne puissent être applicables: 1) qu’à l’encontre des fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat; et 2) des fonctionnaires qui travaillent dans les services essentiels au sens strict du terme.
    • b) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre sans délai des mesures pour faire en sorte que le syndicat soit pleinement indemnisé pour les préjudices subis au titre des sanctions prises à son encontre, y compris ceux induits par la suppression du dispositif de retenue des cotisations syndicales, et que les grévistes, dont M. Toussaint qui a été condamné à dix jours de détention, obtiennent pleine réparation pour les diverses sanctions qui leur ont été infligées. Le comité prie instamment le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard.
    • c) Le comité s’attend à ce que le gouvernement prenne toutes les mesures nécessaires pour appliquer la décision de la Cour suprême concernant la décision arbitrale de la PERB.
    • d) Prenant note des initiatives prises au niveau fédéral pour promouvoir la négociation collective dans le secteur public, le comité veut croire que le gouvernement continuera de prendre des mesures pour promouvoir le plein respect des principes de la liberté syndicale dans tout le pays.
    • e) Le comité prie instamment le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation au regard des recommandations formulées ci-dessus.
    • f) Le comité invite le gouvernement à considérer la possibilité de prendre les mesures nécessaires afin de ratifier la convention no 87 et la convention no 98.
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