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Observation (CEACR) - adoptée 1992, publiée 79ème session CIT (1992)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Panama (Ratification: 1958)

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La commission prend note des rapports du gouvernement et des informations fournies à la Commission de la Conférence en 1991.

La commission rappelle que des points en instance depuis de nombreuses années portent sur les questions suivantes:

- exclusion des fonctionnaires publics du champ d'application du Code du travail et, par là même, déni de leur droit de se syndiquer et de négocier collectivement (art. 2, 2), du Code du travail);

- exigence d'un nombre trop élevé de membres pour constituer une organisation professionnelle (50 travailleurs ou 10 employeurs, art. 344 du code);

- exigence de 75 pour cent de membres panaméens dans un syndicat (art. 347);

- révocation automatique du mandat d'un dirigeant syndical quand il est licencié (art. 359);

- larges pouvoirs de contrôle des autorités sur les registres, les procès-verbaux et la comptabilité des syndicats (art. 376, 4)).

Plus récemment, la commission a relevé qu'en vertu de la loi no 13 du 11 octobre 1990 les conflits collectifs peuvent être soumis à l'arbitrage obligatoire dans toutes les entreprises de service public et dans toutes celles où la prolongation de la grève risque d'entraîner de graves perturbations économiques. La commission a aussi relevé que la loi no 25 du 14 décembre 1990, applicable rétroactivement depuis le 4 décembre 1990, autorisait l'organe exécutif et les directeurs d'institutions autonomes et semi-autonomes, des entreprises publiques, municipales et d'autres institutions publiques de l'Etat à déclarer nulles et non avenues les nominations d'agents publics qui avaient participé ou qui participaient à l'organisation, à l'instigation ou à l'exécution d'actes portant atteinte à la démocratie et à l'ordre constitutionnel, qu'ils exercent ou non des fonctions dans les organes directeurs d'organisations syndicales ou d'associations de fonctionnaires; il en était de même des nominations de délégués et représentants syndicaux ou sectoriels et des dirigeants des associations de fonctionnaires, indépendamment de l'existence ou de l'absence de protection syndicale, qu'ils soient ou non assujettis au régime de lois spéciales.

Droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d'aucune sorte, de constituer des organisations de leur choix, et de s'y affilier

S'agissant de l'exclusion des fonctionnaires publics du champ d'application du Code du travail, et par conséquent des droits d'association et de négociation collective, le gouvernement indique que la Constitution nationale, aux chapitres 2 et 3 du titre XI, établit "les principes de base de l'administration du personnel" et "l'organisation de l'administration du personnel", en vertu de quoi a été édictée la loi de 1963 sur la carrière administrative, modifiée par décret du Conseil des ministres en 1968, qui abrogea les articles concernant la stabilité dans l'emploi public. C'est pour cette raison que l'on ne peut appliquer le Code du travail auxdits fonctionnaires, à l'exception des dérogations qui autorisent l'association syndicale, contenues dans la loi no 8 du 25 février 1975 et les lois nos 34 et 40 de février 1979, qui s'appliquent à certaines entreprises de l'Etat. La commission, tout en prenant note de ces informations, désire souligner que les normes contenues dans la convention s'appliquent à tous les travailleurs "sans distinction d'aucune sorte" et, par conséquent, s'étendent aux fonctionnaires et employés publics.

En ce qui concerne l'exigence d'un nombre trop élevé de membres pour constituer une organisation syndicale (art. 344 du Code du travail), la commission prend note des informations du gouvernement, qui souligne que cet article a pour objet de renforcer les organisations syndicales afin de donner effet au droit de négociation collective en s'appuyant sur le principe de la majorité. La commission a signalé à diverses occasions que l'exigence d'un nombre trop élevé de membres pourrait entraver, voire empêcher, la création d'organisations professionnelles, ce qui serait en contradiction avec l'article 2 de la convention.

Quant à l'exigence de 75 pour cent de membres panaméens dans un syndicat (art. 347 du code), le gouvernement indique qu'il ne s'agit pas là d'une norme discriminatoire, mais que cela répond aux aspirations des organisations de travailleurs, étant donné que, du fait de conditions historiques, les syndicats étaient contrôlés par des étrangers qui détenaient le pouvoir économique; il n'existe pas de prescriptions interdisant aux étrangers de se syndiquer, pourvu que leur nombre ne dépasse pas 25 pour cent des membres inscrits à un syndicat. Tout en prenant note de ces déclarations, la commission souhaite répéter au gouvernement que le droit des travailleurs de constituer des organisations et de s'y affilier, sans distinction d'aucune sorte, implique que tous ceux qui séjournent légalement sur son territoire bénéficient des droits syndicaux prévus par la convention, sans aucune différence, particulièrement en ce qui concerne la nationalité (voir à cet égard, les paragraphes 76, 77, 96 et 97 de l'Etude d'ensemble de 1983 sur la liberté syndicale et la négociation collective).

Droit des organisations de travailleurs d'élire librement leurs représentants, d'organiser leur gestion et de formuler leur programme d'action

Pour ce qui a trait aux larges pouvoirs des autorités d'examiner, au moins tous les six mois, les registres, les procès-verbaux et la comptabilité des syndicats (art. 376, 4) du code), le gouvernement précise que l'Etat ne contrôle pas l'activité syndicale dans le seul dessein de procéder à des contrôles comptables et d'enregistrer des procès-verbaux, mais que les syndicats sont des organismes d'intérêt public et qu'en conséquence le ministère du Travail et du Bien-être social est tenu d'en encourager la constitution. Le gouvernement affirme qu'il n'existe pas de véritables pouvoirs de contrôle sur la documentation syndicale de cette nature, car l'enregistrement des procès-verbaux se limite à ce qui concerne les changements ou le choix de directives, à la réforme des statuts et à l'autorisation d'exercer les droits des syndicats dans leurs relations avec des tiers en application du principe fondamental de la publicité et de l'authenticité de leur personnalité juridique et de leur représentation légale. Le ministère n'intervient qu'en cas de contestation de l'élection du conseil de direction d'un syndicat de la part de ses membres, selon une procédure normale et avec l'accord de la juridiction du travail compétente. Il n'existe pas non plus de contrôle de la comptabilité des syndicats, car la révision de leurs livres à pour unique objet de vérifier le bien-fondé des plaintes en malversation des fonds syndicaux ou d'agir d'office afin de constater le bon emploi de ces derniers. Le ministère ne peut suspendre aucun dirigeant syndical, quand bien même serait prouvée la malversation ou l'appropriation de fonds syndicaux. De plus, la formalité de présentation de la demande d'inscription d'un syndicat a pour objet d'assurer la protection ou le statut syndical des membres d'un syndicat en voie de constitution, comme le prévoient les articles 381 et 385 du code. La commission prend note des informations détaillées fournies par le gouvernement sur ces points, mais rappelle que la disposition en cause de l'article 376 confère des pouvoirs excessifs aux autorités administratives en matière de gestion interne des syndicats, ce qui n'est pas conforme aux principes établis à l'article 3 de la convention, selon lequel les organisations considérées doivent avoir le droit d'organiser leur gestion sans intervention des autorités publiques de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal. La commission estime que le contrôle de la comptabilité des syndicats doit pouvoir s'exercer quand une certaine proportion d'affiliés en font la demande ou sur intervention du pouvoir judiciaire.

Pour en revenir à la loi no 13 du 11 octobre 1990, qui contient des restrictions au droit de grève, la commission prend note des informations fournies par le gouvernement selon lesquelles l'autorité publique peut recourir à l'arbitrage en cas de grève prolongée, qui pourrait entraîner de graves perturbations économiques dans l'entreprise. Ce pouvoir ne s'exerce qu'après vérification des faits et audition des travailleurs intéressés. Cette loi a un caractère transitoire et exceptionnel (pour une période de trois ans); elle a été promulguée dans le cadre du concept de la "politique de stabilisation" afin de rendre possible le redressement économique nécessaire et de stimuler la création de nouvelles sources de travail. La commission relève que, sur la base d'un accord de concertation sociale entre travailleurs, employeurs et gouvernement, signé le 4 décembre 1991, la question de l'éventualité de la modification de la loi no 13 d'octobre 1990 va faire l'objet de consultations. La commission, tout en prenant note de ces informations, souligne que, selon ses principes, le droit de grève ne peut faire l'objet de restrictions sévères telles que le recours à l'arbitrage obligatoire que: 1) dans les services essentiels au sens strict du terme (c'est-à-dire ceux dont l'interruption pourrait mettre en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne; 2) dans le cas des fonctionnaires qui agissent en tant qu'organe de la puissance publique; 3) en cas de crise nationale aiguë. La commission avait observé qu'il n'y avait pas de recours judiciaire contre les décisions de révocation des agents publics.

Quant à la loi no 25 de 1990, le gouvernement précise qu'il s'agissait d'un texte d'ordre public visant à réprimer les actes subversifs de fonctionnaires publics, dont les dispositions temporaires ont expiré le 31 décembre 1991. Il ne s'agissait pas de licencier ou de sanctionner des dirigeants syndicaux pour leurs activités syndicales, mais de sanctionner des agents publics pour participation à une tentative de coup d'Etat et incitation à une grève générale visant à faire tomber le gouvernement. La commission fait à nouveau observer que la loi no 25, dans la mesure où elle pouvait donner lieu à des licenciements antisyndicaux, portait gravement atteinte au droit des associations d'agents publics d'organiser leurs activités, y compris par le recours à la grève, et qu'elle visait à justifier le licenciement d'un nombre important d'entre eux sans leur concéder un droit de recours en justice contre pareille décision. La commission prend donc acte de l'expiration de la période d'application de cette loi.

La commission, compte tenu de la gravité des divergences constatées et du temps écoulé depuis sa première observation sur ces questions, invite une fois de plus instamment le gouvernement à modifier sa législation et sa pratique à brève échéance pour les mettre en conformité avec la convention.

[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 79e session.]

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