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Observation (CEACR) - adoptée 1995, publiée 82ème session CIT (1995)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Inde (Ratification: 1954)

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1. A la suite de la discussion qui a eu lieu sur le problème de la servitude pour dette en Inde à la Commission de la Conférence en 1994, la commission a pris note des rapports détaillés fournis par le gouvernement en juin 1994 et février 1995 sur l'application de la convention.

2. Dans ses commentaires précédents, la commission a noté que des années se sont écoulées depuis que les autorités de l'Inde ont pris la décision, en 1976, d'abolir la servitude pour dette et que la Cour suprême a adopté sa décision de 1983 qui fait autorité. Cependant, dans la pratique, la situation ne semblait pas avoir progressé beaucoup, et un certain nombre de propositions et de recommandations formulées par la Commission nationale sur le travail rural visant à améliorer la situation n'avait pas encore été mis en oeuvre.

3. La commission avait noté la déclaration d'un représentant gouvernemental devant la Commission de la Conférence en 1993, selon laquelle il existait déjà en Inde un niveau de sensibilisation élevé au sujet du problème de la servitude pour dette et le gouvernement ne ménageait aucun effort pour l'éradiquer. En 1994, la Commission de la Conférence a noté qu'en dépit des efforts accomplis, il restait beaucoup à faire pour surmonter les problèmes déjà discutés au cours de nombreuses sessions précédentes concernant notamment l'identification, la libération et la réadaptation des personnes en servitude, y compris les enfants, ainsi que, en particulier, l'introduction d'un système efficace de mise en oeuvre. A cet égard, la commission est restée très profondément préoccupée par la situation.

Identification des travailleurs en servitude et dimension du problème

4. Estimations divergentes. La commission a précédemment noté qu'il n'existe pas d'enquête complète sur la dimension du problème. Une enquête organisée en 1978-79 sous les auspices de la Fondation Gandhi pour la paix (GPF) en coopération avec l'Institut national du travail (NLI), couvrant dix des 21 Etats mais uniquement les domaines traditionnels, a estimé que le nombre des travailleurs asservis était de l'ordre de 2,6 millions; un rapport de la Sous-commission de la servitude pour dette, créée par la Commission centrale permanente de la main-d'oeuvre rurale, a estimé qu'en 1979 le nombre de travailleurs asservis du secteur rural s'élevait à environ 2 millions. En 1980, selon les estimations des gouvernements de neuf Etats, le nombre des travailleurs soumis à la servitude pour dette était de 120 000, alors qu'en 1990 il est passé à 240 000 dans 12 Etats. Le Front de libération des travailleurs asservis de l'Inde a avancé le chiffre d'environ 5 millions d'adultes et de 10 millions d'enfants asservis.

5. Instructions de 1992 du gouvernement. Dans sa déclaration à la Commission de la Conférence en 1992, le gouvernement s'est référé à des difficultés dans la collecte d'informations de différents gouvernements d'Etats. Notant que l'identification des travailleurs en servitude était principalement entreprise par le ministère du Revenu et l'agent de développement régional des gouvernements des Etats, il a indiqué que selon les statistiques disponibles au 31 mars 1991, le nombre total des travailleurs en servitude identifiés était de 255 608, dont 222 985 ont bénéficié de programmes de réadaptation. Afin d'accélérer le processus d'identification, le gouvernement central a donné des instructions par voie circulaire aux différents gouvernements d'Etats, soulignant la nécessité d'entreprendre périodiquement de nouveaux efforts pour l'identification des travailleurs en servitude. Il a suggéré les mesures suivantes:

a) le ministère du Revenu devait effectuer des enquêtes à domicile avec l'aide des agences locales, comme la Direction de l'économie et des statistiques, la Direction locale du bien-être des classes défavorisées et les organismes similaires, sur le modèle des études effectuées par l'Institut national de sondages lors de son 32e exercice;

b) l'identification devait être faite durant les recensements pour l'attribution des sites de construction de maisons, dans le cadre de l'IRDP;

c) des études approfondies devaient être entreprises dans les carrières d'extraction de pierres et les briqueteries.

A cette fin, le Secrétaire au travail de l'Union s'est adressé le 7 février 1992 aux secrétaires en chef de tous les gouvernements des Etats concernés afin qu'ils prennent des mesures vigoureuses pour l'identification et la réadaptation des travailleurs asservis, et un système de contrôle trimestriel a été mis en place.

6. En 1993, la commission, tout en notant que dans son rapport pour la période se terminant le 30 juin 1985, le gouvernement s'était déjà référé au même genre de mesures, a exprimé l'espoir que le gouvernement fournirait des informations détaillées sur les résultats obtenus à la suite de ces instructions, en particulier sur toute augmentation sensible du nombre des travailleurs asservis identifiés et réadaptés, sur les mesures prises au niveau de l'Etat et communiquées au gouvernement central et sur toute nouvelle évaluation de la situation effectuée par le gouvernement central.

7. Définition à utiliser. La commission a cependant observé que le rapport de la Commission sur le travail rural indiquait que la définition de la servitude pour dette adoptée par l'Institut national de sondage lors de son 32e exercice (1977-78) était restrictive, ne portant pas sur l'intégralité de la servitude telle que définie par la loi, bien qu'elle s'appliquât aux zones traditionnelles et non traditionnelles. La commission a exprimé l'espoir que toutes les enquêtes à domicile et tous les recensements et études entrepris prendraient en compte la définition complète de la loi de 1976 portant abolition du régime de la servitude pour dette telle qu'interprétée par la Cour suprême de l'Inde en 1983 et avec les amendements adoptés en 1985. Elle a demandé au gouvernement de fournir des informations à cet égard, y compris toutes instructions adoptées à cet effet.

8. Absence de suite donnée aux instructions de 1992 du gouvernement. La commission note, selon la déclaration du gouvernement à la Commission de la Conférence en 1993, que le travail que l'Organisation nationale de récolte de données (NNSO) doit entreprendre sur la proposition du ministre du Travail pour rassembler les informations sur le travail en servitude n'est pas prévu avant 1998-99. Avec son rapport reçu en juin 1994, le gouvernement a fourni une indication du nombre de travailleurs en servitude identifiés, libérés et réadaptés dans 12 Etats à la date du 31 mars 1993, et les objectifs provisoires de réadaptation fixés pour 1993-94. Le nombre total indiqué est de 251 069 pour les personnes identifiées et libérées et de 224 074 réadaptées, c'est-à-dire pour quelque raison 1 pour cent de moins de personnes identifiées que deux années auparavant et 1 pour cent de plus ayant bénéficié de mesures de réadaptation (avec un objectif provisoire de réadaptation pour 2 179 travailleurs en sept Etats en 1993-94). Aucune information n'a été donnée sur la méthodologie ou la définition utilisée ni sur une suite donnée aux instructions précitées adoptées par le gouvernement central en février 1992.

9. Nouvelles discussions préliminaires. Dans le même rapport, le gouvernement a indiqué que le 15 avril 1993, lors d'une réunion tenue par le ministre d'Etat du Travail avec les secrétaires au travail des Etats dans lesquels le problème de la servitude pour dette est endémique, il a été décidé de créer un comité comprenant des secrétaires au travail de cinq Etats pour étudier et recommander une définition praticable de la servitude pour dette et les modalités et la procédure pour l'identification des travailleurs asservis. La réunion est tombée d'accord pour que tous les gouvernements des Etats mènent une nouvelle enquête pour identifier les travailleurs asservis dans leurs Etats respectifs. Lors de l'enquête, les recommandations du comité précité, nommé pour développer une définition praticable de la servitude pour dette, seront gardées à l'esprit. Il a également été décidé que tous les Etats devraient s'efforcer de compléter l'enquête en septembre 1993. Deux réunions du Comité des secrétaires au travail ont été tenues le 18 juin et le 23 juillet 1993, où la méthodologie pour l'identification et la réadaptation des travailleurs asservis dans les différents Etats et les difficultés rencontrées par eux ont été discutées. Le comité a été unanime sur l'adoption d'une définition simple praticable de la servitude pour dette. Le mandat du comité a été prorogé et le gouvernement a indiqué, dans son rapport reçu en février 1995, que le rapport du comité a été reçu par le gouvernement de l'Inde et fait l'objet de consultations avec les gouvernements des Etats. Il n'a pas été communiqué à l'OIT. Le gouvernement ajoute que, en septembre-octobre 1994, le ministre du Travail a tenu trois conférences séparées avec 15 ministres du Travail des Etats qui ont recommandé que les Etats entreprendront des enquêtes pour identifier les travailleurs qui peuvent se trouver en servitude malgré la loi de 1976 portant abolition du régime de la servitude pour dette. Ces études devaient être complétées dans un délai de six mois. Les Etats devaient aussi sélectivement entreprendre des études complémentaires pour évaluer si des travailleurs asservis ayant bénéficié de mesures de réadaptation étaient depuis lors retombés en servitude.

10. Le gouvernement indique en outre que certains députés au Parlement ont signalé l'existence de servitude pour dette dans la région de Dehradun de l'Etat d'Uttar Pradesh. Le gouvernement de l'Etat d'Uttar Pradesh a nié toute nouvelle apparition du problème. Pour vérifier l'existence éventuelle de servitude pour dette dans la région de Dehradun, l'Académie nationale d'administration Lal Bahadur Shastri à Mussoorie a accepté de mener une enquête.

11. Absence continue de progrès. La commission a pris bonne note de ces indications. Elle note qu'aucune des enquêtes par Etat annoncée à plusieurs reprises par le gouvernement, avec des délais déjà passés, ne semble à ce jour avoir été entreprise par les gouvernements des Etats, et que les ministres du Travail des Etats semblent avoir décidé de ne pas utiliser la définition de la loi de 1976 portant abolition du régime de la servitude pour dette, telle qu'interprétée par la Cour suprême de l'Inde en 1983 et avec les amendements adoptés en 1985, mais une "simple, praticable", qui n'a pas été communiquée au BIT.

12. Emplois à examiner. Dans son observation de 1994, la commission a également noté à la lecture du rapport de la Commission nationale sur le travail rural que des éléments de travail en conditions de servitude ont été décelés dans les emplois non agricoles énumérés ci-après, mais n'ont pas été examinés de manière adéquate par des enquêtes et études: les carrières de pierres, les travailleurs migrants, les travailleurs des briques, les Joginis et Devadasis, les pêcheurs, la main-d'oeuvre du bâtiment et de la construction de routes, les travailleurs des forêts, la fabrication des bidis, le tissage des tapis, la poterie, le tissage, le portage, le travail des enfants dans les fabriques d'allumettes et de feux d'artifice, etc. La commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur toutes études ou enquêtes dans ces secteurs et sur le nombre de travailleurs asservis identifiés libérés et réadaptés.

13. Etudes de cas. Carrières du Haryana: les vues du gouvernement. Le gouvernement a fourni en février 1995 le texte du rapport daté du 30 mars 1993 du Sous-comité sur l'élimination du travail des enfants dans les fabriques d'allumettes et de feux d'artifice du Tamil Nadu et, en juin 1994, le texte du rapport du comité nommé par la Cour suprême, par son ordonnance du 21 février 1991, pour enquêter sur l'identification de travailleurs en servitude dans l'Etat de Haryana (la Cour suprême avait statué sur le principal, à savoir le recours no 2135/1982 Bandhua Mukti Morcha v. the Union of India, par son jugement du 16 décembre 1983). En commentant le rapport de ce comité, le gouvernement, dans son rapport reçu en juin 1994, se réfère à l'évaluation par le comité de 2 000 travailleurs employés dans les carrières d'extraction de pierres du district de Faridabad et allègue que, si le comité s'est référé de manière critique aux conditions de travail insatisfaisantes dans les carrières et à des litiges concernant les salaires minima payés aux travailleurs, il n'a pas considéré ces travailleurs comme des travailleurs en servitude; dans son dernier rapport, le gouvernement ajoute que l'issue de cette affaire, dans laquelle s'est engagée une des ONG les plus actives dans le domaine du travail en servitude, révèle que, tout en étant bien intentionnées, leurs revendications/plaintes peuvent être hautement exagérées.

14. Carrières de Haryana: non-pertinence des chiffres avancés par le gouvernement. Ces allégations ne sont pas étayées par les conclusions formulées par le comité nommé par la Cour suprême. Ce comité a relevé que, si un rapport soumis par le gouvernement de Haryana a indiqué que le nombre des travailleurs en servitude était de 544 dont 21 avaient bénéficié de mesures de réadaptation au 30 novembre 1990, ces chiffres concernaient les travailleurs en servitude identifiés dans tout le Haryana et principalement dans les briqueteries, alors que le requérant se référait au seul cas des travailleurs des carrières d'extraction de pierres du district de Faridabad; pour ce seul cas, le nombre de personnes sur la liste fournie à l'origine par le requérant était de 2 800 parmi lesquelles 1 983 ont ensuite été identifiées; la liste finale de 2 000 personnes, dressée par le comité, comprend certaines personnes qui ne figuraient pas sur la liste première. En outre, le comité estime que quelque 200 personnes ont été omises de la liste finale qui n'étaient pas disponibles pour être identifiées, soit par peur de l'entrepreneur, soit parce qu'elles étaient sorties le jour de la visite du comité.

15. Critères d'identification. Le comité nommé par la Cour suprême a adopté les critères suivants d'identification:

Article 23 de la Constitution de l'Inde qui interdit la traite des êtres humains et le travail forcé.

La définition du "régime de la servitude pour dette" à l'article 2(g) de la loi de 1976 portant abolition du régime de la servitude pour dette, les définitions de dette impliquant la servitude à l'article 2(d), travail en servitude à l'article 2(e), travailleurs asservis à l'article 2(f), salaires nominaux à l'article 2(i) et d'autres principes inscrits dans ladite loi.

Les différents principes définis par la Cour suprême sur le concept du travail forcé aux termes de l'article 23 de la Constitution et son rapport avec le salaire dans People's Union for Democratic Rights v. the Union of India, 1982 (8) SCC 235 et Bandhua Mukti Morcha v. the Union of India, 1984 (3) SCC 161. (Ci-après cités comme, respectivement, le jugement PUDR et le jugement sur le travail en servitude.)

Une note juridique a été préparée pour aider le comité en résumant tous les principes en question et les conclusions qui s'en dégagent sont les suivantes:

a) toute forme de travail forcé qui comprend le travail en servitude est interdite en vertu de l'article 23 de la Constitution et toute violation de cette disposition qui est opposable à l'Etat et à toute personne est un délit (jugement PUDR);

b) la loi de 1976 portant abolition du régime de la servitude pour dette a été adoptée pour donner effet à l'article 23 (jugement sur le travail en servitude);

c) toute forme de travail forcé relève de l'interdiction de l'article 23, que la personne contrainte à donner son travail à une autre soit rémunérée ou non (jugement PUDR);

d) "être forcé" signifie simple contrainte juridique ou physique mais inclut également la contrainte économique qui ne laisse à une personne d'autre choix que de travailler pour moins que le salaire minimum (jugement PUDR);

e) lorsqu'une personne fournit du travail ou des services pour moins que le salaire minimum, le travail ou le service qu'elle fournit relève clairement du "travail forcé" aux termes de l'article 23 (jugement PUDR);

f) chaque fois qu'il est démontré qu'un travailleur est amené à fournir du travail forcé, la présomption est qu'il doit le faire en raison d'une contrepartie économique qu'il a reçue et il est de ce fait un travailleur asservi (jugement sur le travail en servitude).

16. Carrières de Haryana: rôle de la structure de salaire. Le comité nommé par la Cour suprême a appliqué tous les critères susmentionnés pour l'identification des personnes sur la liste des requérants ainsi que pour des cas nouveaux ou cas omis antérieurement. Dans ses conclusions, le comité a noté que la Cour suprême a indiqué dans le jugement PUDR, entre autres, que, lorsqu'une personne fournit du travail ou des services pour moins que le salaire minimum, le travail ou service qu'elle fournit relève clairement du "travail forcé" sous l'article 23 de la Constitution. La Cour suprême a indiqué dans le jugement sur le travail en servitude que, chaque fois qu'il est démontré qu'un travailleur est amené à fournir du travail forcé, la présomption serait qu'il doit le faire en raison d'une contrepartie économique qu'il a reçue et qu'il est donc un travailleur asservi. La Cour suprême, dans son jugement sur le travail en servitude, a aussi ordonné dans le cadre de ses 21 directives déjà notoires, entre autres, que toutes les mesures nécessaires doivent être prises pour assurer le paiement des salaires dus aux travailleurs (directives 5, 6 et 8). Le comité s'est donc appuyé sur la structure salariale qui était clairement identifiable aux fins de qualifier les travailleurs pour les prestations auxquelles ils peuvent prétendre aux termes de la loi de 1976 portant abolition du régime de la servitude pour dette. D'autres critères tels que l'endettement ou la possibilité de changer d'employeur étaient variables et non nécessairement constants.

17. Action à entreprendre. La commission espère que les mesures nécessaires seront bientôt prises aux niveaux national et étatique, conformément à la loi de 1976 portant abolition du régime de la servitude pour dette, pour l'identification systématique des travailleurs asservis, pratiquement bloquée depuis plusieurs années, et que le gouvernement fournira des informations sur la suite donnée à ses instructions de 1992 et sur des résultats concrets en tenant compte également des indications de la Commission nationale sur le travail rural concernant les emplois qui n'ont pas été examinés de manière adéquate par des enquêtes ou études.

Rôle des comités de vigilance

18. Dans ses commentaires précédents, la commission avait demandé des informations sur le fonctionnement des comités de vigilance et sur la mise en oeuvre effective des compétences qui leur sont confiées par la loi de 1976 portant abolition du régime de servitude pour dette pour l'identification, la libération et la réadaptation des travailleurs asservis. Le gouvernement a transmis des informations spécifiques communiquées par les gouvernements de dix Etats sur le nombre de comités de vigilance constitués au niveau des districts et sous-divisions avec quelques indications sur leurs composition et activités. Dans son rapport reçu en juin 1994, le gouvernement a indiqué que le gouvernement central ne surveille pas directement le fonctionnement des comités de vigilance à présent et que le gouvernement central n'a reçu aucune proposition des gouvernements des Etats pour améliorer le fonctionnement des comités de vigilance. En février 1995, le gouvernement a ajouté que les comités de vigilance ont été constitués dans tous les Etats dans lesquels le problème du travail en servitude est considéré comme endémique, et le gouvernement estime que les succès obtenus par les comités de vigilance au cours des années en entreprenant l'identification et la réadaptation d'un très grand nombre de travailleurs asservis qui sont très largement dispersés dans des régions rurales et de l'intérieur fournissent la preuve de leur fonctionnement effectif.

19. La commission considère que cette évaluation n'est pas étayée par les statistiques fournies par le gouvernement pour ces dernières années, mentionnées au point 8 plus haut. Dans son rapport publié en 1991, la Commission nationale sur le travail rural a indiqué que, si quelques comités de vigilance avaient réalisé un bon travail, la plupart d'entre eux n'avaient pas été institués ou reconstitués ou bien n'avaient exercé aucune activité, n'ayant pas tenu de réunion régulière. Aucune surveillance n'avait été exercée sur le fonctionnement de ces comités et, ces dernières années, il n'avait pratiquement plus été procédé à l'identification de travailleurs asservis. La commission note qu'il en est toujours ainsi, bien que des comités de surveillance existent à présent aux niveaux de district et de sous-division dans un certain nombre d'Etats. Ainsi que l'a relevé la commission nationale, il semble nécessaire de stimuler l'activité des comités de vigilance et de veiller à leur composition telle que prescrite. En outre, le concours d'organisations bénévoles et la création d'une autorité nationale sur le travail en servitude, tels que recommandés par la Commission nationale sur le travail rural en 1991, peuvent aider en amenant les comités de vigilance à rendre des comptes et en accélérant le processus d'identification, de libération et de réadaptation des travailleurs asservis.

Concours d'organisations bénévoles

20. Dans ses commentaires précédents, la commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur le fonctionnement du programme visant à associer des organisations bénévoles à l'identification et à la réadaptation des travailleurs asservis. Dans ses rapports reçus en juin 1994 et février 1995, le gouvernement a fourni les noms de dix organisations bénévoles travaillant le plus souvent au niveau de un ou de deux districts dans six Etats, et les informations reçues de huit des gouvernements des Etats concernant les activités d'organisations bénévoles. Au Bihar, Antyodaya Ashram de Santhal Pargana et T. Chakkalakar de Rampura Ashram ont aidé à l'identification de 2 662 travailleurs asservis dans le district de Dumka et 317 dans le district de Bettiah. Au Tamil Nadu, l'Organisation pour la réadaptation et le développement des travailleurs asservis, de Madras, a mené une enquête sur la réadaptation de travailleurs asservis libérés de langue tamil et a soumis son rapport et des propositions d'amélioration au ministre de l'Union en 1990. En Uttar Pradesh, Bandhua Mukti Morcha et Bandhua Mukti travaillent dans le district de Mirzapur; dans aucun des autres districts les magistrats n'ont soumis de réponse positive au gouvernement de l'Etat qui leur a demandé de prendre contact avec les organisations bénévoles. Le gouvernement de l'Etat de l'Andhra Pradesh a accepté d'entreprendre de nouveaux efforts en vue d'associer les organisations bénévoles à la tâche d'identifier les travailleurs asservis, "bien que dans le passé la réponse n'a pas été encourageante". Le gouvernement de l'Etat de Maharasthra a été catégorique en rejettant le concours des organisations bénévoles "parce qu'elles tendent à adopter une vue exagérée de l'existence de travail en servitude"; la commission note qu'au Maharashtra 1 382 travailleurs ont été identifiés et 1 300 réadaptés, tandis que 82 ne sont pas censés avoir besoin d'une aide à la réadaptation. En revanche, le gouvernement de l'Etat de Karnataka a adressé des directives aux Vice-commissaires pour l'identification des travailleurs asservis dans lesquelles il est souligné que les organisations non gouvernementales et les institutions bénévoles devraient être associées à cette tâche. Bien que les détails des résultats obtenus lors de cet exercice n'ont pas été mentionnés, il a été relevé qu'ils font un travail remarquable. Karnataka se trouve être l'Etat où, au 31 mars 1993, le plus grand nombre de travailleurs asservis avaient été identifiés et libérés (62 708 personnes) et réadaptés (54 078 personnes).

21. La commission exprime à nouveau l'espoir que le gouvernement prendra des mesures tendant à s'assurer le concours de davantage d'institutions bénévoles, notamment celles qui se préoccupent du travail en servitude depuis des années, telles que le Front de libération des travailleurs asservis, AWARE et Vidhayak Samsad, et qu'il fournira des informations détaillées sur les mesures prises et les résultats obtenus.

Concours des syndicats

22. Dans ses commentaires précédents, la commission a souligné l'importance de l'association des syndicats dans la procédure d'identification et de réadaptation des travailleurs asservis. Dans son rapport reçu en juin 1994, le gouvernement déclare que les syndicats se trouvent dans le secteur organisé et leur association à l'identification et la réadaptation des travailleurs asservis qui se trouvent principalement dans le secteur non organisé ne peut pas être une proposition praticable. La commission en prend bonne note. Rappelant l'indication par la Commission nationale sur le travail rural que des éléments de travail en condition de servitude ont été décelés mais non examinés de manière adéquate, entre autres, dans des emplois non agricoles tels que les carrières de pierres, les briqueteries, le bâtiment et la construction des routes, les travaux forestiers, la fabrication des bidis, le tissage des tapis, la poterie, le tissage, la commission espère que des mesures seront prises où cela est nécessaire pour assurer le respect du droit d'organisation des travailleurs dans ces emplois.

Proposition en vue de l'institution d'une autorité nationale sur le travail en servitude

23. La commission avait précédemment noté qu'au cours des débats de la 15e session du Groupe de travail des formes contemporaines d'esclavage, tenue en juillet 1990, Anti-esclavage international a indiqué que la gravité et l'ampleur persistantes de la servitude pour dette découlaient en partie des faiblesses inhérentes au fonctionnement et à la conception de la mise en oeuvre de la loi de 1976 portant abolition du régime de la servitude pour dette, et a demandé que soit créée une commission nationale sur le travail en servitude. La commission avait en outre noté que, dans son rapport publié en 1991, la Commission nationale sur le travail rural a recommandé d'améliorer la mise en oeuvre de la loi de 1976 portant abolition du régime de la servitude pour dette par la création d'un réseau d'institutions aux niveaux national et des Etats en tant qu'institutions nodales chargées de surveiller et coordonner l'identification, la libération et la réadaptation des travailleurs asservis, et d'accroître le sens des responsabilités de l'administration et des comités de vigilance. Une autorité nationale ou une commission nationale sur la servitude pour dette devrait être constituée sur le modèle de la Commission nationale des castes et tribus protégées et, au niveau des Etats, des commissaires au travail en servitude devraient être nommés.

24. En réponse, le gouvernement a indiqué à la Commission de la Conférence en 1992 que la question de créer une commission nationale sur le travail en servitude a été examinée en détail par le ministre du Travail à la lumière des recommandations de la Commission nationale sur le travail rural et qu'il a été décidé que la création d'une telle commission n'était pas nécessaire à ce stade. Ce qu'il fallait était une meilleure mise en oeuvre des dispositions de la loi par les gouvernements des Etats qui devait être étroitement suivie chaque mois.

25. En 1993, la commission avait noté que le Parlement avait été saisi d'un projet de loi tendant à la création d'une commission des droits de l'homme, et elle a estimé que cette commission pourrait être chargée des questions touchant à la servitude. A la suite de la création d'une Commission nationale des droits de l'homme, en octobre 1993, en application de la loi de 1993 sur la protection des droits de l'homme, la commission a prié le gouvernement en 1994 de fournir des informations sur toute mesure envisagée pour étendre les compétences de cette commission en conséquence ou pour créer une commission nationale sur le travail en servitude.

26. La commission note la déclaration du gouvernement dans son rapport reçu en février 1995 selon laquelle la Commission nationale des droits de l'homme devra s'acquitter d'un large éventail de fonctions et son champ d'activité n'est pas limité aux infractions commises par les agents de l'Etat. Le gouvernement est toujours d'avis qu'une meilleure mise en oeuvre de la loi de 1976 portant abolition du régime de servitude pour dette par les gouvernements des Etats éradiquera le mal. Cependant, divers groupes d'intérêt ont plaidé en faveur de la création d'une commission nationale sur le travail en servitude. En conséquence, un comité de ministres du Travail, présidé par le ministre du Travail du gouvernement de Maharashtra, a été constitué pour examiner cette question. Il y a eu un retard dans la présentation du rapport de ce comité en raison de changements fréquents à la tête du ministère du Travail de Maharashtra. Il a été demandé au gouvernement de l'Etat de Maharashtra d'accélérer la présentation du rapport du comité.

27. La commission prend bonne note de ces indications. Elle note que quatre années se sont écoulées depuis que la Commission nationale sur le travail rural a publié son rapport. Depuis lors, la recommandation tendant à créer un réseau d'institutions chargées de surveiller et coordonner l'abolition du travail en servitude aux niveaux national et étatique n'a pas été suivie d'effets et, avec quelques exceptions principalement dues à l'initiative d'organisations bénévoles, l'identification des travailleurs asservis ne semble plus avancer. En même temps, la commission note l'absence d'une présentation régulière d'une vue d'ensemble de l'état du problème telle qu'elle avait été donnée jusqu'en 1989, dans une certaine mesure, dans les rapports du Commissaire aux castes et tribus protégées (29e rapport, 1987-1989) et, dernièrement, dans le rapport de la Commission nationale sur le travail rural publié en 1991. La commission relève que, s'il existe déjà un niveau de sensibilisation élevé au sujet du problème du travail en servitude, il n'est pas évident qu'aucun effort n'est ménagé pour maintenir cette sensibilisation, voire résoudre le problème. La commission espère prendre bientôt connaissance d'une suite donnée à la proposition formulée par la Commission nationale sur le travail rural en 1991 en vue de l'institution d'une autorité nationale sur le travail en servitude pour surveiller et coordonner aux niveaux national et étatique l'identification, la libération et la réadaptation des travailleurs asservis et accroître le sens des responsabilités de l'administration et des comités de vigilance.

Réadaptation

28. Délai entre libération et réadaptation. La commission avait précédemment noté que la Commission nationale sur le travail rural avait relevé le délai considérable entre la libération et la réadaptation et un mauvais suivi de la réadaptation, menant à la misère et à une rechute en servitude. Se référant aux statistiques fournies par le gouvernement sur le nombre de travailleurs asservis qui ont été identifiés, le nombre de travailleurs réadaptés et les objectifs pour 1993-94, la commission avait constaté que dans certains Etats de nombreux travailleurs asservis identifiés attendaient encore d'être réadaptés. Ainsi, dans l'Etat d'Andhra Pradesh, sur 35 934 travailleurs asservis identifiés, 25 753 avaient été réadaptés et il en restait encore 10 181 qui devaient être réadaptés mais, regrettablement, l'objectif provisoire pour une réadaptation en 1993-94 était seulement de 1 000 personnes.

29. La commission note avec intérêt, selon le dernier rapport du gouvernement, que la réadaptation des travailleurs asservis qui tendait à tarder en Andhra Pradesh a été accélérée à la suite d'efforts conjoints du ministère du Travail et du gouvernement de l'Etat, et des problèmes rencontrés sur le terrain ont été résolus. Le flux d'aides financières du gouvernement de l'Inde au gouvernement de l'Etat d'Andhra Pradesh pour la réadaptation des travailleurs asservis est passé de 0 roupie en 1991-92 à 2,7 millions de roupies en 1992-93, et même 10,1 millions de roupies en 1993-94. L'objectif annuel de réadapter 1 000 travailleurs asservis en Andhra Pradesh en 1993-94 a été pratiquement atteint; comparé à l'année précédente, l'objectif pour 1994-95 pour la réadaptation de travailleurs asservis en Andhra Pradesh a été augmenté de 100 pour cent. La commission se réjouit de ce progrès et note que, même au taux de 2 000 personnes réadaptées par an, les derniers travailleurs asservis attendant leur réadaptation au 31 mars 1993 ne bénéficieraient de mesures de réadaptation qu'en 1999. La commission espère prendre connaissance d'autres mesures adoptées pour accélérer la procédure de réadaptation des travailleurs asservis identifiés en Andhra Pradesh et Karnataka, de même que dans d'autres Etats où de nouveaux travailleurs asservis sont identifiés.

30. Notant que, pour certains Etats, un nombre considérable de travailleurs asservis ont été désignés dans le rapport du gouvernement comme n'étant pas disponibles pour réadaptation, la commission saurait gré au gouvernement de fournir une explication par rapport à la loi de 1976 portant abolition du régime de servitude pour dette.

31. Adaptation du programme soutenu par le gouvernement central. La commission avait précédemment noté qu'en exécution du programme de réadaptation soutenu par le gouvernement central une somme de 6 250 roupies est dépensée pour la réadaptation de chaque travailleur asservi. Un montant de 500 roupies est prélevé sur cette somme pour être remis en espèces à l'intéressé pour lui permettre de subsister jusqu'à sa réadaptation. La commission avait demandé si un tel montant s'était révélé suffisant pour éviter que le travailleur qui vient d'être libéré ne retombe en servitude par manque de moyen de subsistance d'autant qu'une longue période s'écoule entre sa libération et sa réadaptation.

32. Le gouvernement note l'indication fournie par le gouvernement dans son rapport reçu en juin 1994 selon laquelle les gouvernements des Etats ont exprimé des avis divergents: Haryana considère que, puisque aucun travailleur asservi n'a été identifié pour être libéré, il n'y a pas eu lieu de faire le paiement de 500 roupies. Maharashtra et Tamil Nadu ont déclaré qu'il n'y a pas eu de plainte au sujet d'une insuffisance de fonds ou de rechute en servitude; en revanche Gujarat, Uttar Pradesh, Karnatka et Bihar ont considéré l'allocation de subsistance de 500 roupies insuffisante; pour Gujarat et Uttar Pradesh elle devrait maintenant être portée à 1 000 roupies et à Bihar, le gouvernement a suggéré qu'elle devrait être de 1 500 roupies payées à raison de 250 roupies par mois pendant six mois, la durée que la procédure de réadaptation prend normalement. Selon le gouvernement d'Uttar Pradesh, le montant global de 6 250 roupies devrait être porté à 15 000 roupies. Le gouvernement de Karnataka ajoute que la réadaptation des travailleurs asservis est entreprise par la promotion de leur emploi indépendant. En 1992-93 le gouvernement de Karnataka a commencé à fournir des terres agricoles pour la réadaptation par groupes des travailleurs asservis. La dimension minimale des domaines agricoles et de 20 hectares pour 12 travailleurs asservis réadaptés. Cet exercice a démarré dans six districts; il permet de fournir des services communs, d'obtenir la synergie des programmes gouvernementaux groupés et de surveiller correctement le travail accompli.

33. La commission espère que le gouvernement sera en mesure d'augmenter les fonds versés en vertu du programme soutenu par le gouvernement central et qu'il fournira des informations sur toutes mesures prises à cet égard.

34. Intégration du programme de réadaptation soutenu par le gouvernement central dans d'autres programmes de lutte contre la pauvreté. La commission a noté avec intérêt les détails fournis par le gouvernement sur les mesures prises dans neuf Etats pour l'intégration du programme soutenu par le gouvernement central dans d'autres programmes tels que le programme de développement rural intégré, Jawahar Rozgar Vojana, le programme d'assurance emploi, la formation des jeunes ruraux pour des emplois indépendants, le plan spécial composé/sous-plan pour les castes et tribus protégées. Elle espère que le gouvernement sera en mesure de faire état de nouvelles démarches dans ce domaine.

35. Suite donnée à d'autres recommandations. La commission avait précédemment noté que dans sa déclaration à la Conférence en 1993 le représentant du gouvernement a mentionné des subsides à la réadaptation, à vocation agraire, non agraire ou artisanale. Elle avait également noté que la Commission nationale sur le travail rural a fait ressortir certaines lacunes, telles que la qualité médiocre des terres attribuées dans le cadre de la réadaptation en milieu rural, et avait souligné la nécessité de tenter la réadaptation des travailleurs migrants soit dans l'Etat où ils travaillent soit dans leur Etat d'origine. La commission nationale avait suggéré que le système de réadaptation soit choisi en consultation avec les intéressés et bien aménagé; que les terres devant être allouées dans le cadre des programmes de réadaptation agraire soient de bonne qualité; que les établissements bancaires publics aient pour consigne d'octroyer des prêts à la consommation, étant donné que la principale cause de rechute dans la servitude est l'endettement contracté pour les besoins de la consommation. La commission exprime à nouveau l'espoir que le gouvernement fera état de mesures prises ou envisagées à la suite des propositions formulées par la Commission nationale sur le travail rural.

36. Notant avec intérêt les informations fournies par le gouvernement sur le programme alternatif de développement indépendant des travailleurs asservis libérés, soumis à la Cour suprême de l'Inde par le Mukti Niketan, ayant été invité à le faire dans l'intérêt public (recours no 483 de 1987), la commission espère que le texte du jugement sera bientôt communiqué. Elle attend également avec intérêt le résultat du recours no 121215 de 1984 à la Cour suprême.

Sanctions pénales et respect de la législation.

37. La commission a noté dans ces précédents commentaires à la lecture du rapport de la Commission nationale sur le travail rural que bien peu de poursuites avaient été engagées contre des personnes coupables d'asservissement. La commission nationale a souligné que le processus d'identification et de libération des travailleurs asservis ainsi que la traduction en justice des coupables devraient autant que possible s'exercer simultanément, et elle a formulé un certain nombre de propositions pour améliorer la situation. La commission a noté la déclaration du gouvernement devant la Commission de la Conférence en 1993 que les poursuites pénales doivent respecter la procédure judiciaire régulière et ne peuvent s'exercer dans des délais artificiels. La commission avait demandé combien de temps était requis par la procédure régulière dans les conditions nationales pour engager une poursuite pénale. Faisant observer que la loi portant abolition du régime de servitude pour dette a été adoptée en 1976 et s'appuyant sur l'évaluation de la Commission nationale sur le travail rural, la commission avait demandé des informations détaillées sur les mesures prises pour garantir une procédure judiciaire régulière. Relevant par ailleurs que les sanctions pénales prévues par la loi de 1976 comportent, à côté d'une peine de prison allant jusqu'à trois ans, une amende plutôt insignifiante de 2 000 roupies, la commission avait demandé des informations sur les mesures prises pour assurer une punition efficace des coupables avec une indication notamment du nombre des procédures engagées, des condamnations prononcées et des peines infligées depuis l'entrée en vigueur de la loi de 1976.

38. Efficacité des sanctions pénales. La commission note que le gouvernement n'a pas fourni d'informations sur les sanctions pénales infligées en application de la loi de 1976. Rappelant qu'aux termes de l'article 25 de la convention le fait d'exiger illégalement forcé ou obligatoire devra être passible de sanctions pénales, et le gouvernement aura l'obligation de s'assurer que les sanctions imposées sont réellement efficaces et strictement appliquées, la commission exprime à nouveau l'espoir que les mesures nécessaires seront prises pour assurer que les sanctions imposées par la loi sont réellement efficaces, et que le gouvernement fournira des informations sur tout amendement correspondant de la loi de 1976. En attendant ces mesures, la commission espère que des informations complètes seront fournies sur le nombre des cas dans lesquels des simples amendes, des peines de prison fermes ou des peines avec sursis ont été infligées aux personnes condamnées.

39. Statistiques judiciaires. La commission note les statistiques fournies par le gouvernement sur le nombre de poursuites engagées dans 12 Etats en application de la loi de 1976 portant abolition du régime de servitude pour dette jusqu'en mars 1993, avec une indication du nombre de délinquants poursuivis (dans trois Etats) et condamnés (en Uttar Pradesh). La commission note que dans le seul Uttar Pradesh avec 27 489 travailleurs asservis identifiés au 31 mars 1993, 2 305 poursuites ont été engagées, suivies de 1 031 acquittements et 1 190 condamnations, avec 84 cas encore en suspens; en revanche pour 11 autres Etats, avec plus de 220 000 travailleurs asservis identifiés, les indications du gouvernement font état d'un total de seulement 2 354 poursuites engagées avec 987 personnes effectivement poursuivies (dans trois Etats).

40. Mesures visant à assurer le respect de la législation: rapidité et efficacité. Au sujet de la synchronisation de l'identification et réhabilitation des travailleurs asservis et de l'engagement de poursuites judiciaires contre les personnes coupables d'asservissement, le gouvernement indique dans son dernier rapport que certains des gouvernements d'Etat redoutent que la crainte d'une action punitive peut s'avérer contre-productive puisqu'elle peut empêcher les coupables de coopérer volontairement au processus d'identification. La commission note que le processus d'identification semble être au point mort en attendant la coopération volontaire de ceux qui violent la loi. La commission note également l'indication du gouvernement que l'ouverture de poursuites en justice ne prend pas de temps mais que, étant donné le fonctionnement indépendant de la justice il n'est pas possible pour les autorités administratives de prescrire un délai pour la conclusion de procédures judiciaires. A cet égard, la commission note toutefois aussi la déclaration du gouvernement dans son rapport reçu en juin 1994 selon laquelle l'article 21 de la loi de 1976 portant abolition du régime de servitude pour dette prévoit le jugement sommaire des violations de la loi. La commission exprime à nouveau l'espoir que le gouvernement prendra bientôt les mesures nécessaires pour assurer, conformément à son obligation au titre de l'article 25 de la convention, que pour le fait d'exiger illégalement du travail forcé des sanctions pénales efficaces soient imposées à ceux qui violent la loi et strictement appliquées. Elle espère que le gouvernement fournira des informations sur les mesures prises, ainsi que des statistiques à jour sur le nombre de poursuites engagées et de condamnations prononcées, avec une indication du genre de peine imposée, tel que demandé.

41. Assistance juridique. A la suite d'une proposition faite par la Commission nationale sur le travail rural, la commission note avec intérêt l'indication du gouvernement dans son rapport reçu en juin 1994 qu'il existe déjà dans différents Etats des dispositions visant à fournir une assistance juridique aux pauvres et que des instructions supplémentaires seront données à cet égard. Elle espère que le gouvernement fournira des informations sur les mesures prises et leur incidence sur l'application de la loi de 1976 portant abolition du régime de servitude pour dette. A cet égard, rappelant la proposition de la Commission nationale sur le travail rural que des dispositions juridiques soient prises pour assurer le paiement d'arriérés de salaire dûs aux travailleurs asservis libérés ainsi que la restitution de terres appartenant à des travailleurs asservis mais accaparés par des usuriers ou des propriétaires terriens plus puissants pour cause de prêts à des taux usuraires, la commission note l'indication du gouvernement dans son rapport selon laquelle les dispositions de la loi sur les salaires minima s'appliquent aux revendications salariales des travailleurs asservis libérés et qu'il existe déjà une disposition dans la loi de 1976 portant abolition du régime de servitude pour dette visant à ce que les terres appartenant aux travailleurs asservis leur soient restituées après leur libération, libres de toute charge. La commission espère que le gouvernement fournira des données sur les mesures pratiques prises par le moyen de programmes d'assistance juridique, ou autrement, pour assurer l'application en pratique des dispositions légales en question.

Servitude pour dette des enfants

42. Dans ses commentaires précédents, la commission s'est référée aux déclarations faites devant la Sous-commission des Nations Unies de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, selon lesquelles les enfants seraient en servitude dans l'agriculture, la fabrication de briques, les carrières de pierres, le tissage des tapis, le tissage au métier, la fabrication des allumettes et feux d'artifice, la verroterie, et la taille et le polissage des diamants; la servitude pour dette et le travail forcé des enfants allant de pair avec le trafic, les enlèvements, l'oppression, le déni de la liberté de se déplacer, les voies de fait, les sévices sexuels, la faim, les horaires de travail exténuants et les conditions de travail dangereuses. La commission a noté l'indication du gouvernement selon laquelle il n'est pas fait de distinction entre la servitude des enfants et la servitude des adultes dans le cadre du mécanisme d'identification et de réadaptation créé à cette fin. Considérant toutefois la vulnérabilité particulière des enfants et leurs besoins spécifiques, la commission a demandé des informations sur toutes mesures particulières prises pour leur identification, libération et réadaptation.

La commission a également demandé un rapport complet sur la situation des enfants en servitude.

43. Salaire minimum. La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement indique son ferme engagement d'éliminer progressivement le fléau que constitue le travail des enfants. Dans le cadre du programme d'action législatif, le gouvernement a déposé devant le Parlement un projet de loi visant à modifier la loi de 1986 sur l'interdiction et la réglementation du travail des enfants. Le projet consiste à écarter toute disposition en matière de fixation du salaire minimum qui tendrait à encourager le travail des enfants. Le texte du projet de loi fait actuellement l'objet de consultations avec le ministère compétent. La commission espère apprendre l'adoption de ce projet.

44. Statistiques sur l'application de la loi. Bien que des données particulières sur les cas de travail forcé des enfants ne soient ni recueillies ni traitées, le gouvernement signale une augmentation non négligeable au cours des deux dernières années du nombre des inspections, des poursuites et des condamnations en vertu de la loi de 1986 sur l'interdiction et la réglementation du travail des enfants et de la loi de 1948 sur les fabriques. La commission note toutefois que, d'après les données fournies par le gouvernement en juin 1994 concernant l'année 1993 et couvrant 15 Etats, des poursuites en application de la loi sur le travail des enfants n'ont été engagées que dans l'Uttar Pradesh (4 770), le Tamil Nadu (16) et le Maharashtra (37) et que des condamnations ne sont intervenues que dans l'Uttar Pradesh (567) et le Tamil Nadu (2).

D'après les rapports communiqués par les gouvernements des Etats, environ 1 400 enfants en servitude ont été identifiés. D'après le recensement national de 1987, 17,02 millions d'enfants sont au travail. Parmi eux, 2 millions sont employés à des activités dangereuses.

Le Premier ministre, dans sa déclaration à la nation pour célébrer le jour de l'indépendance (le 15 août 1994), a annoncé la mise en place d'un nouveau programme visant à éliminer la pratique illégale de l'emploi des enfants dans des occupations dangereuses. Dans le cadre de ce programme, il est prévu que d'ici l'an 2 000 environ 2 millions d'enfants employés dans des conditions dangereuses auront cessé de travailler.

45. L'action du gouvernement. Le 1er octobre 1994, l'Autorité nationale pour l'élimination du travail des enfants a été instituée, sous la présidence du ministère du Travail. Afin de s'attaquer au problème du travail des enfants, l'autorité a adopté au cours de sa troisième réunion, le 16 janvier 1995, un programme d'action intitulé "Identification, libération et réadaptation des enfants qui travaillent". Une circulaire a été soumise aux Etats et territoires de l'union pour adoption.

Cette circulaire comprend les actions nécessaires pour s'attaquer au problème du travail des enfants, particulièrement dans les emplois dangereux. Il prône le rapprochement des services et des structures de l'administration centrale et des administration des Etats en vue de coordonner efficacement la mise en oeuvre, au niveau des districts, les projets d'élimination du travail des enfants. Dans l'ensemble, il a pour but de:

a) mieux faire respecter les lois devant assurer la protection des enfants;

b) retirer les enfants du travail et les orienter vers des écoles spéciales, où ils recevront un enseignement primaire et pré-professionnel, un supplément de nourriture et des bourses;

c) prêter assistance aux parents au moyen de programmes de lutte contre la pauvreté et d'augmentation des revenus, en vue d'éviter qu'ils ne recourent au travail de leurs enfants;

d) empêcher de nouvelles entrées d'enfants dans le monde du travail par l'intensification des activités visant à fournir une éducation pré-scolaire, protéger la santé et assurer l'alimentation des enfants âgés de 0 à 6 ans, par des programmes tels que les services intégrés de développement des enfants, des programmes d'alimentation communautaires, etc.

Le gouvernement poursuit activement l'objectif d'élimination du travail des enfants dans l'industrie de l'ardoise à Mandsaur (Madhyar Pradesh) et dans la tuilerie à Jaggampet (Andhra Pradesh). Ces deux projets nationaux sur le travail des enfants ont été identifiés par la commission nationale consultative sur le travail des enfants.

46. La commission espère connaître les résultats de ces programmes et plans d'actions, ainsi que sur le suivi du rapport du Sous-comité sur l'élimination du travail des enfants dans les fabriques d'allumettes et de feux d'artifice du Tamil Nadu, dont une copie a été fournie par le gouvernement en février 1995.

47. Protection contre l'exploitation sexuelle. Le gouvernement a indiqué, dans le rapport reçu en juin 1994, qu'il a été demandé aux instances gouvernementales des Etats et des territoires de l'Union d'instituer des comités consultatifs au niveau des Etats, pour prendre des mesures en vue d'éradiquer la prostitution des enfants, et d'élaborer et mettre en oeuvre des programmes d'assistance sociale pour prodiguer des soins aux enfants concernés et assurer leur protection, développement et réadaptation.

48. La commission note que le gouvernement indique, dans son dernier rapport, que le gouvernement de l'Uttar Pradesh est saisi des allégations concernant le problème de la prostitution des enfants et qu'il réalisera une enquête dans les zones concernées. Des commissariats de police dont le personnel est exclusivement féminin ont été créés, des "fonctionnaires de sauvetage" ("rescues officers") ont été nommés dans certains quartiers sensibles pour organiser des opérations de sauvetage des victimes avec l'assistance de la police et suivre les procès. Font partie des mesures visant à s'attaquer au problème, la sensibilisation de la police dans le cadre de leur formation, le renversement de la charge de la preuve de la victime sur l'accusé, l'implication des ONG dans la réadaptation des victimes de prostitution enfantine. En ce qui concerne l'allégation spécifique de vente aux enchères et d'exploitation sexuelle des enfants, les magistrats des districts d'Agra, de Saharanpur et de Varanasi ont indiqué qu'aucun cas de la sorte n'avait été signalé. Dans ces trois districts, au cours des trois dernières années, 57 opérations de sauvetage ont été menées, et 465 cas de répression d'activités immorales ont été enregistrés par les tribunaux, avec des condamnations dans 131 cas.

La commission espère que le gouvernement communiquera une copie du rapport de l'enquête qui doit être réalisée ainsi que des informations sur les mesures supplémentaires prises par l'Uttar Pradesh et par les autres Etats et territoires de l'Union.

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