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Observation (CEACR) - adoptée 2002, publiée 91ème session CIT (2003)

Convention (n° 26) sur les méthodes de fixation des salaires minima, 1928 - Inde (Ratification: 1955)

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La commission prend note du rapport du gouvernement et des commentaires formulés par l’organisation Hind Mazdoor Sabha au titre de l’application de la présente convention, joints au rapport du gouvernement. Elle note également les commentaires du gouvernement concernant les observations de la Centrale des syndicats indiens (CITU). Elle note avec intérêt l’indication du gouvernement, en réponse aux commentaires précédents de la commission, selon laquelle la protection offerte par la loi sur les salaires minima de 1948 a étéétendue à un certain nombre de travailleurs à domicile et du secteur non structuré, et que des efforts sont accomplis pour faire entrer la totalité des travailleurs à domicile dans le champ d’application de la loi. La commission prie le gouvernement de communiquer les textes des instruments normatifs étendant auxdits travailleurs la protection de la loi sur les salaires minima.

I.  Institution d’un salaire de base national
  applicable à tous les travailleurs

1. La commission avait précédemment prié le gouvernement d’apporter ses observations en ce qui concerne les commentaires formulés par la Centrale des syndicats indiens (CITU) concernant l’absence de politique salariale pour la grande majorité des travailleurs du secteur non structuré. La CITU expliquait que, pour le gouvernement, le salaire de base national correspond au seuil sous lequel ne doit descendre aucun salaire minimum et qu’il ne devrait pas se situer en deçà du seuil de pauvreté. Cette organisation estimait qu’un grand nombre de travailleurs qualifiés sont employés dans le secteur non structuré, où le salaire minimum est en deçà du seuil de pauvreté et où les travailleurs n’ont pas de pouvoir de négociation pour se protéger contre l’exploitation par leurs employeurs. Cependant, malgré les déclarations du gouvernement, le salaire minimum de base se situerait, selon cette organisation, en deçà de ce seuil de pauvreté. De l’avis de cette organisation, les salaires des travailleurs du secteur non syndiqué devraient être au-dessus du seuil de pauvreté.

2. L’organisation Hind Mazdoor Sabha indique, pour sa part, qu’il n’existe pas un salaire minimum national, mais que le gouvernement a institué de manière arbitraire, depuis 1996, un salaire de base national fixéà 35 roupies par jour et portéà 45 roupies par jour, depuis 1999. Cette organisation regrette, par ailleurs, que les multiples taux auxquels sont fixés les salaires minima dans les Etats et les Territoires de l’Union, d’une part, et dans les différents emplois au sein d’un même Etat, d’autre part, varient de manière aussi importante et soient aussi disparates. Elle indique également, à cet égard, des taux de salaires minima variant de 16,75 roupies par jour (dans l’Etat de Karnakata) à 143,67 roupies (dans l’Etat de Kérala).

3. Le gouvernement indique, dans ses commentaires relatifs aux observations formulées par la CITU, qu’il serait difficile de concevoir une politique salariale uniforme compte tenu du fait que la fixation des salaires dépend de nombreux facteurs liés au coût de la vie qui varient d’un Etat à un autre et d’une industrie à une autre. Le gouvernement indique avoir toutefois établi à cet effet un salaire de base national en vue de protéger également les intérêts de ceux qui occupent des emplois non répertoriés, c’est-à-dire les emplois auxquels n’est pas applicable un salaire minimum. Le gouvernement central a ainsi prescrit aux gouvernements des Etats de fixer les salaires minima dans les emplois répertoriés à un niveau qui ne soit pas inférieur au taux du salaire de base national, fixé, depuis le 30 novembre 1999, à 45 roupies par jour. En ce qui concerne les commentaires de l’organisation Hind Mazdoor Sabha, le gouvernement indique que tous les taux de salaires minima applicables dans l’Etat de Karnataka ont fait l’objet de révision, à l’exception d’un ou deux d’entre eux. Le gouvernement déclare qu’une requête a été envoyée à cet Etat, lui demandant d’expliquer les raisons ayant empêché la révision des salaires minima applicables dans ces emplois afin de faire en sorte qu’ils soient équivalents ou supérieurs au taux de salaire de base.

4. La commission prie le gouvernement de fournir copies des instruments normatifs établissant, depuis 1996, le salaire de base national. Elle se déclare préoccupée par le fait que le rapport du gouvernement ne contient aucune information relative aux commentaires formulés par l’organisation Hind Mazdoor Sabha selon lesquels le gouvernement aurait fixé les taux du salaire de base national de manière arbitraire. La commission prie le gouvernement d’indiquer si des consultations ont effectivement eu lieu avec les partenaires sociaux, préalablement à l’application des méthodes de fixation du salaire de base national, et de donner des précisions quant à la participation des organisations d’employeurs et de travailleurs à l’application de ces méthodes comme l’exige l’article 3, paragraphe 2 1) et 2), de la convention. Elle rappelle que les méthodes de fixation des salaires minima doivent être déterminées et appliquées en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs qui doivent y participer sur un pied d’égalité et avoir la faculté réelle d’influer sur les décisions à prendre. La commission prie, dès lors, le gouvernement de communiquer avec son prochain rapport toutes informations pertinentes quant aux mesures prises ou envisagées afin de se conformer aux obligations qui découlent de ces dispositions de la convention.

II.  Application des méthodes de fixation et de révision
  des salaires minima applicables aux emplois répertoriés

5. L’organisation Hind Mazdoor Sabha indique dans ses commentaires, joints au rapport du gouvernement, que le fonctionnement de la Commission centrale consultative et des commissions consultatives au niveau des différents Etats et Territoires de l’Union ayant pour mission de conseiller le gouvernement central et les gouvernements des Etats, relativement aux questions se rapportant à la fixation et à la révision des salaires minima, a été très irrégulier. Selon cette organisation, la commission centrale s’est réunie à seulement 14 reprises depuis 1948 jusqu’en 1992, alors qu’elle aurait dû le faire à 22 reprises. Cette organisation ajoute que la dernière réunion de ladite commission remonte au 27 juin 2002, soit dix ans après la dernière en date, tenue en 1992.

6. Le gouvernement indique dans son rapport que les méthodes de fixation des salaires minima ainsi que les modalités de leur application sont établies par la loi sur les salaires minima de 1948. En vertu de l’article 5 de celle-ci, les salaires minima en ce qui concerne les emplois répertoriés peuvent être fixés et révisés par le gouvernement central et les gouvernements des Etats, dans leurs champs de compétences respectifs, par deux moyens: soit au moyen des commissions consultatives créées en vertu de la loi sur les salaires minima et dans lesquelles sont représentés des employeurs et des travailleurs, soit par la méthode de la notification. En application de cette dernière, l’autorité compétente publie au journal officiel la proposition de fixation ou de révision des salaires minima. Cette publication ouvre une période de deux mois pendant laquelle toute personne affectée par la décision dispose du droit de présenter ses objections ou suggestions. Par ailleurs, le gouvernement indique, en ce qui concerne l’application des méthodes de révision des salaires minima, qu’il a accepté et mis en œuvre depuis 1988, en ce qui concerne les emplois répertoriés qui relèvent de son champ de compétence, c’est-à-dire 45 emplois de la sphère centrale, les recommandations formulées par le sous-comité de la Commission consultative centrale sur les critères de fixation des salaires minima, conseillant un réajustement des salaires minima en raison de hausses de l’indice des prix à la consommation, tous les six mois ou lorsqu’une hausse de 5 points de cet indice se produit. Le gouvernement indique également que 19 Etats ont établi un tel système permettant de lier les salaires minima à l’évolution de l’indice des prix à la consommation. Par ailleurs, dans l’éventualité où le gouvernement d’un Etat manquerait à fixer ou à réviser le salaire minimum applicable à un emploi recensé pendant plus de trois ans, le gouvernement central déclare qu’après avoir averti le gouvernement défaillant il peut lui-même fixer ou réviser le salaire minimum applicable audit emploi. Par ailleurs, et concernant les commentaires de l’organisation Hind Mazdoor Sabha, le gouvernement indique que le ministère du Travail fera des efforts pour qu’à l’avenir la commission centrale consultative siège plus fréquemment, et que les gouvernements des Etats ont reçu conseil de réunir, à leur niveau, les commissions consultatives de manière régulière.

7. La commission croit comprendre que, même dans la sphère centrale, les salaires minima applicables aux emplois répertoriés ont été révisés, au moyen de la méthode de la notification dans le journal officiel, en janvier 2002, soit huit ans après leur dernier réajustement. Elle note que l’application des méthodes de fixation des salaires minima applicables aux emplois répertoriés peut être réalisée soit au moyen des commissions consultatives sur les salaires minima que chaque autorité peut établir pour les emplois entrant dans son champ de compétence et au sein desquelles le gouvernement nomme des représentants, en nombre égal, des travailleurs et des employeurs, soit par la méthode de la notification. La commission prie, à cet égard, le gouvernement de spécifier la manière dont le gouvernement central et les gouvernements des Etats et Territoires de l’Union s’assurent, lorsqu’ils appliquent la méthode de la notification, que les organisations d’employeurs et de travailleurs participent en nombre égal et sur un pied d’égalitéà l’application des méthodes de fixation des salaires minima, conformément à l’article 3, paragraphe 2 2), de la convention. Par ailleurs, la commission prie le gouvernement de bien vouloir apporter dans son prochain rapport des informations quant à la manière dont il intervient afin d’assurer l’application, avec la participation des organisations d’employeurs et de travailleurs, des méthodes de révision des salaires minima dans les Etats et Territoires de l’Union dont les gouvernements n’appliquent pas lesdites méthodes, et où parfois, comme au Tamil Nadu, l’application des méthodes de fixation et de révision de certains salaires minima a été défaillante depuis 1977 et où les partenaires sociaux n’y ont pas été associés. Cette défaillance a pour résultat de placer le salaire minimum mensuel à un niveau qui équivaut à quatre jours de travail au taux du salaire de base national. La commission prie, en outre, le gouvernement de préciser quelles sont les dispositions prises pour assurer le respect par les gouvernements des Etats et Territoires de l’Union du taux du salaire de base national, applicable sans distinction du caractère répertorié ou non des emplois à travers tout le pays.

III.  Application pratique de la convention

8. Selon les informations figurant dans les commentaires communiqués par l’organisation Hind Mazdoor Sabha, le contrôle de l’application de la loi sur les salaires minima de 1948 est inefficace, les inspecteurs du travail ne disposant pas même du droit d’inspecter, en vertu des nouvelles règles en vigueur dans un grand nombre d’Etats. Cette organisation fait également mention de cas dans lesquels les autorités compétentes auprès du Commissaire au travail contribuent à la signature d’un accord sur les salaires à un niveau équivalant à moins de la moitié du salaire minimum en vigueur au sein de l’Etat pour une profession déterminée, comme par exemple au Bengale-Occidental. Selon l’organisation Hind Mazdoor Sabha, de telles pratiques se produisent sous la menace de voir les employeurs transférer leurs unités de production dans les Etats voisins où le salaire minimum est beaucoup plus bas.

9. Sur ce point, le gouvernement indique dans son rapport que la loi sur les salaires minima impose aux employeurs de payer aux travailleurs un salaire au moins équivalant au minimum établi. Des inspecteurs procèdent, à cet effet, à des inspections régulières en vue de constater le non-respect des dispositions législatives concernant les salaires minima. Ils disposent du pouvoir d’intenter des poursuites civiles et pénales à l’encontre des contrevenants, et ce droit a également étéétendu aux travailleurs. En outre, le gouvernement indique que, lorsque des plaintes faisant état d’obstructions aux inspections effectuées par les inspecteurs du travail sont reçues, celles-ci font l’objet de discussions avec le gouvernement de l’Etat concerné. Le gouvernement souligne que de telles discussions doivent avoir lieu avec le gouvernement du Bengale-Occidental relativement aux faits soulevés par l’organisation Hind Mazdoor Sabha. Il observe enfin qu’il envisage d’apporter certaines modifications à la loi sur le salaire minimum dans le but de rendre celle-ci plus contraignante.

10. La commission prie le gouvernement de tenir le Bureau international du Travail informé de l’issue des discussions avec les autorités du Bengale-Occidental. Elle prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les mesures prises ou envisagées afin de prévenir que de tels cas se reproduisent dans la pratique. La commission prie en outre le gouvernement d’indiquer toutes mesures appropriées ayant été prises, en concertation avec les Etats de l’Union, visant à garantir que les inspecteurs du travail ne seront pas empêchés dans l’exercice de leurs fonctions. Elle note par ailleurs que le gouvernement ne fournit pas non plus de réponse aux commentaires précédemment formulés par le Congrès des syndicats unis, selon lesquels il est arrivé que des employeurs saisissent la justice pour des affaires de paiement de salaires minima avec, en conséquence, une suspension du bénéfice du salaire minimum pour les travailleurs concernés. La commission rappelle qu’en vertu de l’article 4, paragraphe 1, de la convention le système de contrôle établi en vertu de cette disposition doit sanctionner toute violation du taux de salaire minimum applicable.

11. A cet égard, la commission rappelle qu’elle s’était référée à un certain nombre de cas soumis à sa considération à travers des commentaires d’organisations syndicales et qui étaient, selon le gouvernement, en instance. Le gouvernement se réfère dans son rapport à certains de ces cas, tout en indiquant que certains d’entre eux n’ont toujours pas été jugés. La commission ne peut, dès lors, qu’exprimer sa préoccupation devant la lenteur de fonctionnement du système judiciaire censé permettre aux travailleurs de recouvrer le montant des salaires qui leur sont dus. En effet, elle rappelle que dans certaines de ces affaires les faits remontent à 1996. Tout en priant le gouvernement d’informer le Bureau international du Travail de l’issue de ces procédures, la commission le prie de prendre, dans le même temps, toutes les mesures nécessaires et appropriées pour que les salaires qui seraient effectivement dus aux travailleurs leur soient versés promptement étant donné que ces travailleurs perçoivent le salaire minimum et se trouvent par conséquent dans une situation d’étroite dépendance vis-à-vis de leur salaire. La commission prie, en outre, le gouvernement de fournir avec son prochain rapport des précisions supplémentaires quant aux pouvoirs d’inspection dont jouit le personnel chargé de contrôler l’application de la loi sur les salaires minima, tant dans la sphère centrale que dans celle des différents Etats et Territoires de l’Union.

12. La commission observe, par ailleurs, que selon certaines informations les prescriptions du gouvernement central tendant à faire respecter le taux du salaire de base national n’étaient, au 1er octobre 2001, pas respectées dans 12 des 33 Etats et Territoires de l’Union, et cela même en ce qui concerne les emplois répertoriés (Andhra Pradesh, Arunachal Pradesh, Assam, Bihar, Goa, Jammu&Kashmir, Kerala, Maharashtra, Manipur, Orissa, Tripura, Uttar Pradesh et Pondicherry). Or la commission rappelle qu’il est généralement admis que près de 92 pour cent des travailleurs salariés sont employés dans le secteur non structuré, dont une grande partie occupent des emplois qui ne figurent pas parmi les emplois répertoriés auxquels sont applicables les salaires minima et seraient, à ce titre, éligibles au salaire de base national. La commission prie le gouvernement de communiquer avec son prochain rapport des informations, notamment statistiques, relatives au respect du taux du salaire de base national par les gouvernements des Etats et des Territoires de l’Union ainsi que sur les mesures pour garantir ce respect, tant en ce qui concerne les travailleurs des emplois répertoriés que pour ceux occupés dans des emplois non répertoriés, conformément à l’article 3, paragraphe 2 3), de la convention.

13. Enfin, la commission rappelle qu’en vertu de l’article 3, paragraphe 2 3), de la convention les taux minima de salaire doivent être obligatoires pour les employeurs et les travailleurs et ne pourront être abaissés par ceux-ci ni par accord individuel, ni, sauf autorisation de l’autorité compétente, par contrat collectif. Elle prie le gouvernement de fournir des précisions quant aux commentaires de la Hind Mazdoor Sabha d’après lesquels, dans certains cas, les autorités compétentes auprès du Commissaire au travail contribuent à la signature d’un accord sur les salaires à un niveau équivalant à moins de la moitié du salaire minimum en vigueur au sein de l’Etat, comme par exemple au Bengale-Occidental. Elle rappelle qu’une telle faculté est laissée par la convention uniquement dans les cas de conclusion de contrats collectifs et prie le gouvernement d’indiquer s’il s’agissait, dans le cas cité par la Hind Mazdoor Sabha, de tels contrats et de préciser le nombre de reprises auxquelles il a été fait usage de la faculté laissée par cette disposition de la convention d’abaisser les taux minima de salaire par autorisations générales ou particulières des autorités compétentes.

La commission prie le gouvernement de tenir le Bureau international du Travail informé du projet d’amendement de la loi sur le salaire minimum évoqué dans son rapport.

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