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Observation (CEACR) - adoptée 2004, publiée 93ème session CIT (2005)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Maroc (Ratification: 1963)

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1. Dans son observation de 2003, la commission faisait état d’une communication de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) signalant l’existence de dispositions légales restreignant directement et indirectement l’emploi des femmes, d’inégalités entre hommes et femmes en ce qui concerne l’accès aux postes de responsabilité dans la fonction publique, et de graves violations du Code du travail dans l’industrie textile d’exportation, où la grande majorité des employés sont des femmes très jeunes et analphabètes. En réponse, le gouvernement avait souligné l’absence de dispositions discriminatoires dans la législation nationale, l’interdiction expresse de toute discrimination dans le nouveau Code du travail et les progrès récemment réalisés en ce qui concerne l’accès des femmes aux postes de responsabilité. Afin de pouvoir mieux apprécier la situation au regard des allégations de la CISL, la commission avait demandé de plus amples informations sur la répartition des hommes et des femmes aux différents niveaux de l’administration publique; les conditions de travail dans l’industrie textile d’exportation; les restrictions existant en droit et en pratique à l’emploi des femmes; et les différences entre hommes et femmes dans le Code de la famille susceptibles de défavoriser les femmes sur le marché du travail. Elle avait également prié le gouvernement de fournir le texte du nouveau Code du travail.

Réformes législatives

2. La commission a pris note avec intérêt de l’adoption, le 16 janvier 2004, du nouveau Code de la famille qui garantit l’égalité de droits et de responsabilités entre l’homme et la femme au sein de la famille et met fin à certaines restrictions existant au détriment de la femme dans le précédent Code du statut personnel (Moudawa). D’après le dernier rapport du gouvernement, le Code de la famille constitue un tournant décisif dans l’histoire du Maroc, et a été initié par la mouvance féministe, tout en s’adaptant efficacement aux circonstances politiques, juridiques, économiques et sociales du Maroc. La commission est d’avis que le nouveau Code de la famille marque une étape importante dans la poursuite de l’égalité entre hommes et femmes au sein de la société et qu’il crée un environnement nouveau, qui devrait être propice à la réalisation de progrès plus rapides dans l’égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes dans l’emploi.

3. La commission a noté avec intérêt que l’article 9 de la loi no 65-99 portant Code du travail interdit, conformément à la convention, toute discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe, le handicap, la situation conjugale, la religion, l’opinion politique, l’affiliation syndicale, l’ascendance nationale ou l’origine sociale, ayant pour effet de violer ou d’altérer le principe d’égalité de chances ou de traitement sur un pied d’égalité en matière d’emploi ou l’exercice d’une profession, notamment en ce qui concerne l’embauchage, la conduite et la répartition du travail, la formation professionnelle, le salaire, l’avancement, l’octroi des avantages sociaux, les mesures disciplinaires et le licenciement. Cet article prévoit que la femme a le droit de conclure un contrat de travail et, qu’elle soit mariée ou non, d’adhérer à un syndicat professionnel et de participer à son administration et à sa gestion. La commission note aussi que l’article 40 du code considère le harcèlement sexuel comme une faute grave de la part de l’employeur ou du chef d’entreprise.

4. La commission note encore que le Code pénal, modifié en 2003, contient maintenant plusieurs nouvelles dispositions sanctionnant toute forme de discrimination et assurant une meilleure protection de la femme, notamment contre le harcèlement sexuel, et que les réformes du Code du commerce et du dahir sur les obligations et les contrats confèrent à la femme le droit de louer ses services et de faire du commerce sans le consentement de son mari.

Politiques et pratiques

5. La commission se félicite des efforts importants qui ont été faits par le gouvernement ces dernières années pour créer un cadre juridique visant àéliminer les discriminations existant contre les femmes et à promouvoir l’égalité de chances et de traitement, y compris en matière d’emploi. Elle rappelle toutefois que l’existence de textes législatifs ne suffit pas à assurer la pleine application de la convention. Celle-ci suppose aussi que soient prises un ensemble de mesures d’ordre pratique pour supprimer les obstacles qui peuvent entraver la réalisation de l’égalité et pour réduire les inégalités existant dans les faits entre hommes et femmes dans le domaine de l’emploi et du travail.

6. A cet égard, la commission note que le cinquième rapport périodique du Maroc sur l’application du Pacte international sur les droits civils et politiques (document CCPR/C/MAR/2004/5) reconnaît que malgré l’arsenal législatif existant des disparités persistent, notamment dans le domaine de l’emploi, disparités liées à des facteurs économiques et géographiques ainsi qu’à la persistance de certaines traditions et coutumes dans certains milieux. La commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les mesures qui ont été prises ou qui sont envisagées pour encourager le changement nécessaire des mentalités et des comportements chez les hommes comme chez les femmes, et pour promouvoir la compréhension et l’acceptation du principe de l’égalité entre hommes et femmes, en particulier dans le domaine du travail et de l’emploi.

7. Un obstacle majeur à la réalisation de l’égalité dans la pratique est le taux d’analphabétisme chez les femmes, qui limite considérablement leur capacité d’exercer les droits que leur confère la législation. Selon le rapport précité sur l’application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en dépit des efforts du gouvernement, l’analphabétisme demeure un fléau national, et les femmes analphabètes, plus nombreuses dans les zones rurales, représentent 61,9 pour cent des analphabètes au niveau national. La commission engage le gouvernement à poursuivre vigoureusement son action pour éradiquer l’analphabétisme féminin et pour encourager les filles et les femmes à acquérir l’instruction et la formation qui leur permettront d’accéder à l’emploi sur un pied d’égalité avec les hommes. Elle espère que le prochain rapport contiendra des informations sur les résultats obtenus à cet égard.

8. La commission note que le dernier rapport ne contient pas les informations qu’elle avait demandées sur la situation des femmes dans l’industrie textile d’exportation. Elle note cependant, d’après le rapport fourni par le gouvernement sur l’application de la convention (no 100) sur l’égalité de rémunération, 1951, qu’un programme pilote du BIT pour la promotion du travail décent, associant le ministère de l’Emploi et les partenaires sociaux, est en cours d’application dans le secteur textile-habillement. La note de synthèse de ce programme fait état de «déficits de travail décent» affectant plus particulièrement les femmes, dont les emplois sont plus précaires, les salaires inférieurs, et dont l’ancienneté professionnelle n’est pas reconnue de la même façon. Le plan d’action de ce programme pilote prévoit l’élaboration d’un plan d’action sectoriel visant àéliminer toutes les formes de discrimination entre femmes et hommes. La commission prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur les progrès éventuellement réalisés grâce à la mise en œuvre du programme pilote. Elle le prie d’indiquer les mesures de contrôle et les sanctions prises pour veiller au respect des dispositions légales relatives à la non-discrimination et aux conditions d’emploi des femmes dans les entreprises du secteur.

9. La commission note que le rapport reprend les informations déjà données dans le rapport précédent sur la nomination d’un certain nombre de femmes aux niveaux les plus élevés de l’Etat. Le gouvernement a aussi fourni des tableaux statistiques sur les effectifs du personnel de l’Etat par sexe, mais sans les informations ou commentaires qui permettraient à la commission d’apprécier l’étendue des progrès éventuellement réalisés. La commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport s’il envisage de mettre en œuvre une politique systématique de promotion des femmes aux postes de responsabilité dans la fonction publique et dans les emplois contrôlés par le gouvernement, comprenant éventuellement la fixation d’objectifs chiffres et la mise sur pied d’un mécanisme de suivi (en anglais: monitoring).

10. La commission a noté l’ouverture en octobre 2004 du Centre d’information, de documentation et d’études sur la femme dont la mission est de recueillir et de traiter les données démographiques et statistiques relatives à la situation de la femme, d’élaborer des études et des travaux de réflexion sur la femme et de mettre en place des programmes de formation et de formation continue. La commission espère que le centre servira aussi à recueillir et à analyser les données statistiques sur l’emploi des femmes qui sont indispensables pour servir de base à la définition de politiques de promotion de l’égalité de chances et de traitement, telle que celle mentionnée au paragraphe ci-dessus. Elle espère que le gouvernement fournira dans son prochain rapport des informations sur le travail réalisé par le centre sur les questions touchant à l’emploi.

La commission soulève d’autres points dans une demande adressée directement au gouvernement.

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