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Demande directe (CEACR) - adoptée 2005, publiée 95ème session CIT (2006)

Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 - Emirats arabes unis (Ratification: 1997)

Autre commentaire sur C105

Observation
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La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement en réponse à ses précédents commentaires.

Travail obligatoire dans les prisons. 

1. Dans ses précédents commentaires, la commission se référait à certaines dispositions de la législation nationale aux termes desquelles des peines d’emprisonnement (comportant une obligation de travailler en prison) peuvent être imposées dans des circonstances qui relèvent de l’article 1 a), c) et d) de la convention. Dans son dernier rapport, le gouvernement indique que toutes les dispositions en question prévoient simplement des peines d’emprisonnement, sans faire mention d’une peine de travail forcé. Tout en prenant dûment note de ces indications, de même que de la référence faite par le gouvernement à la définition du travail forcé contenue à l’article 2, paragraphe 1, de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, la commission souhaite attirer l’attention du gouvernement sur les explications données aux paragraphes 102 à 109 de son étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, où elle souligne que la définition du travail forcé ou obligatoire donnée par la convention no 29 ne fait aucune distinction entre les différentes formes de travail et que la convention interdit le recours à «toute forme» de travail forcé ou obligatoire en tant que sanction, mesure de coercition, d’éducation, de discipline ou encore de punition à l’encontre de personnes couvertes par l’article 1 a), c) et d). La commission a donc considéré que toute sanction comportant du travail obligatoire, y compris toute peine de prison comportant une obligation de travailler en prison, relève de la convention dès lors qu’elle rentre dans l’un des cinq cas spécifiés par celle-ci.

2. A la lumière des considérations qui précèdent, la commission note qu’en vertu de l’article 70 du Code pénal une personne condamnée qui exécute une peine privative de liberté a l’obligation d’accomplir les travaux qui sont prescrits par l’institution pénitentiaire. Elle avait également noté antérieurement qu’en vertu de l’article 24 de la loi fédérale portant organisation des établissements pénitentiaires (no 43 de 1992) les détenus de la catégorie «c» (ceux qui sont condamnés pour une certaine durée ou à vie) doivent être employés à des tâches spécifiées par le règlement de la prison et ont droit à une rémunération (les tâches auxquelles les détenus peuvent être employés sont spécifiées au chapitre 3 du décret ministériel no 471 de 1995).

Article 1 a) de la convention. Coercition politique et sanction de l’expression de certaines opinions politiques ou d’une opposition idéologique au régime établi. 

3. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que certaines dispositions du Code pénal interdisent de constituer une organisation ou de tenir une assemblée ou une conférence dans le but d’attaquer ou de malmener les fondements ou les enseignements de l’Islam, ou d’appeler à l’observance d’une autre religion; ces infractions étant passibles d’une peine d’emprisonnement allant jusqu’à dix ans (art. 317 et 320). Elle avait également noté que les dispositions des articles 318 et 319 du Code pénal exposent à une peine d’emprisonnement celui qui est membre d’une association du type visé à l’article 317 ou s’en prend aux fondements ou aux enseignements de l’Islam, fait du prosélytisme pour une autre religion ou appelle à une idéologie qui en relève. Comme indiqué plus haut, les peines d’emprisonnement comportent une obligation de travailler.

4. La commission rappelle que l’article 1 a) interdit le recours au travail forcé ou obligatoire à titre de sanction de l’expression d’opinions politiques ou d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. Elle renvoie également aux explications données aux paragraphes 133 à 140 de son étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, où elle avait fait observer que la convention n’interdit ni les peines comportant du travail obligatoire à l’égard de personnes ayant recouru à la violence, incité à la violence ou s’étant livrées à des préparatifs de violence ni l’imposition judiciaire de certaines restrictions à l’égard des personnes condamnées pour de tels crimes. Mais, en revanche, les peines comportant du travail obligatoire tombent sous le coup de la convention lorsqu’elles sanctionnent une interdiction d’exprimer des opinions ou de manifester une opposition au système politique, social ou économique établi. La liberté d’exprimer des opinions politiques ou des conceptions idéologiques peut également se trouver restreinte au moyen de l’interdiction de diverses formes de réunions ou d’associations, ce qui est également contraire à la convention dès lors que l’interdiction en question s’appuie sur des sanctions comportant un travail obligatoire.

5. En conséquence, la commission réitère l’espoir que des mesures appropriées seront prises ou envisagées en vue de rendre les articles 317 à 320 du Code pénal conformes à la convention et que, dans l’attente de l’adoption de telles mesures, le gouvernement fournira des informations sur l’application des articles 317 à 320 dans la pratique, notamment copie de toutes décisions de justice s’appuyant sur ces articles, en précisant les sanctions imposées.

6. La commission avait noté qu’en vertu de la loi fédérale no 15 de 1980 concernant les publications et les parutions des peines d’emprisonnement (comportant un travail obligatoire, comme indiqué plus haut) peuvent être infligées en vertu des articles 86 et 89 de cette loi en cas d’infraction à ses dispositions suivantes:

-           art. 70 (interdiction de critiquer le Président de la République ou des dirigeants des émirats);

-           art. 71 (interdiction de publier des documents portant atteinte à l’Islam, au gouvernement, aux intérêts du pays ou aux systèmes qui fondent la société);

-           art. 76 (interdiction de publier des documents diffamatoires sur le président d’un pays arabe ou musulman ou d’un pays ami, de même que des documents pouvant altérer les liens du pays avec des pays arabes, musulmans ou amis);

-           art. 77 (interdiction de publier des documents causant une injustice aux Arabes ou donnant une image déformée de la civilisation ou du patrimoine culturel arabe);

-           art. 81 (interdiction de publier des documents portant atteinte à la monnaie nationale ou jetant la confusion sur la situation économique d’un pays).

7. Se référant aux explications données aux paragraphes 133 à 141 de l’étude d’ensemble susmentionnée, la commission a fait observer que des restrictions aux droits et libertés de la personne peuvent être imposées par la loi pour garantir le respect des droits et libertés d’autrui et satisfaire aux préceptes légitimes de la moralité, de l’ordre public et du bien-être général d’une société démocratique (par exemple, lois sur la diffamation, la sédition et la subversion, l’ordre public et la sécurité). Cela étant, lorsque ces restrictions sont formulées d’une manière si générale qu’elles peuvent amener à l’imposition de sanctions comportant du travail obligatoire à l’encontre des personnes qui ont ou expriment des opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi, de telles restrictions tombent sous le coup de la convention.

8. Par conséquent, la commission réitère l’espoir que les dispositions susmentionnées de la loi fédérale no 15 de 1980 seront réexaminées à la lumière de ces considérations, de sorte que des sanctions comportant du travail forcé ou obligatoire ne puissent plus être imposées pour avoir eu ou avoir exprimé des opinions politiques ou des conceptions idéologiques opposées à l’ordre politique, social ou économique établi. Notant également que le gouvernement indique dans son rapport que les dispositions en question n’ont jamais été appliquées dans la pratique et qu’aucune décision ni aucun règlement n’a été pris en application de cette loi, la commission prie le gouvernement de communiquer copie dès son adoption de toute décision ou de tout règlement, auxquels se réfère l’article 107 de la loi.

9. La commission avait noté qu’en vertu de l’article 41 de la loi fédérale no 6 de 1974 sur les organisations à but non lucratif toute violation des dispositions de cette loi est passible d’une peine d’emprisonnement (qui implique un travail obligatoire en prison). La commission demande à nouveau au gouvernement de fournir des informations sur l’application de l’article 41 dans la pratique et de communiquer copie de toute décision de justice qui en définit ou en illustre la portée.

10. Article 1 c). La commission avait pris note des dispositions de la loi fédérale no 26 de 1981 sur la marine marchande en vertu desquelles des peines d’emprisonnement (impliquant un travail obligatoire en prison) peuvent être infligées aux marins pour diverses infractions à la discipline du travail, comme l’inobservation d’ordres liés au service, des manquements aux obligations du service à bord du navire ou aux devoirs de la garde, l’absence du bord sans autorisation ou tout autre acte susceptible de perturber l’ordre ou le service à bord (art. 200(a), (c), (g) et (j)), le refus de respecter un ordre concernant le travail à bord du navire, les actes répétés de désobéissance (art. 204(d) et (e)) ou encore la commission d’actes précisés à l’article 204 par plus de trois personnes agissant de concert (art. 205).

11. La commission avait rappelé que l’article 1 c) de la convention interdit le recours au travail forcé en tant que mesure de discipline du travail. Elle s’était également référée aux paragraphes 117 à 119 de l’étude d’ensemble susmentionnée, où elle a souligné que la convention ne couvre pas les peines sanctionnant des actes ayant mis en danger la sécurité du navire ou la vie ou la santé des personnes à bord (comme les peines d’emprisonnement prévues à l’article 209 de la loi fédérale sur la marine marchande qui punit des actes ayant mis en péril le navire ou la vie des personnes à bord). Par contre, des sanctions qui s’appliquent, d’une manière plus générale, à des manquements à la discipline du travail, comme l’abandon du bord, l’absence sans autorisation ou la désobéissance, rentrent dans le champ d’application de la convention. Tout en prenant note des indications données par le gouvernement dans son rapport, selon lesquelles les dispositions précitées de la loi fédérale sur la marine marchande n’ont pas été appliquées dans la pratique, la commission exprime néanmoins l’espoir que les dispositions en question seront soit abrogées, soit modifiées, de manière à limiter leur champ d’application aux actes ayant entraîné la mise en péril du navire ou de la vie ou de la santé des personnes à bord, de manière à mettre ces dispositions en conformité avec la convention ainsi qu’avec la pratique déclarée.

12. Article 1 d). Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que l’article 231, paragraphe 1, du Code pénal prévoit des peines d’emprisonnement (impliquant l’obligation de travailler) dans le cas où trois fonctionnaires publics au moins abandonnent leur poste ou s’abstiennent délibérément d’accomplir l’une des obligations qui s’y attachent en agissant de manière concertée ou dans un but contraire à la loi. La commission avait attiré l’attention du gouvernement sur le paragraphe 123 de son étude d’ensemble de 1979, où elle a fait valoir que la convention ne s’oppose pas à ce que des sanctions (y compris celles comportant une obligation de travailler) puissent être infligées pour participation à des grèves dans la fonction publique ou dans d’autres services essentiels, à condition que ces sanctions ne soient applicables que lorsqu’il s’agit de services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire de ceux dont l’interruption mettrait en danger l’existence ou le bien-être de l’ensemble ou d’une partie de la population, et que des garanties doivent être prévues sous la forme de procédures alternatives appropriées.

13. La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur l’application de cette disposition dans la pratique, notamment copie de toute décision de justice qui en définit ou en illustre la portée.

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