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Observation (CEACR) - adoptée 2006, publiée 96ème session CIT (2007)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Inde (Ratification: 1960)

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1. La commission prend note de la communication du Hind Mazdoor Sabha, une organisation de travailleurs, reçue le 29 août 2006 et transmise au gouvernement le 28 septembre 2006. Ce syndicat déclare dans cette communication que la protection prévue par les articles 14 (égalité devant la loi) et 15 (interdiction de toute discrimination fondée sur la religion, la race, la caste, le sexe ou le lieu de naissance) de la Constitution ne s’étend pas aux salariés du secteur privé. Une discrimination généralisée frappe ainsi les Dalits, les Adivasis et les femmes, dans les secteurs de la construction et de la pêche, ainsi que dans l’agriculture. La commission prie le gouvernement de donner, dans son prochain rapport, des informations en réponse aux questions soulevées par le Hind Mazdoor Sabha.

Discrimination fondée sur l’origine sociale

2. La commission rappelle que la discrimination dans l’emploi et la profession en fonction de la caste est une forme de discrimination qui repose sur l’origine sociale et qui est contraire à la convention. Dans son observation précédente, la commission soulignait que le problème de l’«intouchabilité», qui perdure malgré l’interdiction qui en est faite dans la Constitution, doit être abordé résolument pour parvenir à une élimination effective de la discrimination dans l’emploi et la profession qui frappe les Dalits à raison même de leur origine sociale. Dans ce contexte, la commission a pris note des recommandations faites par l’ex-Commission nationale pour les castes et tribus recensées, notamment des mesures visant à un renforcement de l’application de la loi sur la protection des droits civils, une coopération plus étroite des autorités publiques compétentes aux différents niveaux et de larges campagnes de sensibilisation.

3. Compte tenu de la gravité et de l’ampleur du problème, la commission regrette que le rapport du gouvernement ne contienne aucune information répondant spécifiquement aux interrogations qu’elle avait posées. En conséquence, la commission prie instamment le gouvernement de prendre des mesures en vue de l’élimination de la discrimination dans l’emploi et la profession qui frappe les Dalits, et de la promotion de l’égalité de chances et de traitement en ce qui les concerne, notamment à travers un renforcement de la protection légale et du processus d’autonomisation socio-économique de cette communauté, et de l’informer des mesures ainsi prises. De même, la commission réitère sa demande et prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour sensibiliser davantage les travailleurs et les employeurs sur ces questions, notamment sur la nécessité de rejeter et combattre la pratique de l’«intouchabilité» et de la discrimination au travail liée à la caste. Elle prie une fois de plus le gouvernement de faire connaître les mesures prises pour rechercher la coopération des organisations d’employeurs et de travailleurs dans ce domaine. Enfin, elle le prie de communiquer copie du plus récent rapport de la Commission nationale pour les castes recensées nouvellement créée.

4. Collecte manuelle des rejets. S’agissant de la pratique de la collecte manuelle des rejets et du fait que ce sont en général les Dalits qui exercent cette activité en raison de leur origine sociale, ce qui est en parfaite contradiction avec la convention, la commission avait noté dans son observation précédente que le dixième plan quinquennal (2002-2007) mentionne un programme national pour l’éradication progressive de la collecte manuelle des rejets avant 2007, avec des plans d’action adaptés à chaque Etat pour la réalisation d’un réseau de tout-à-l’égout et, concurremment, des possibilités de formation et d’emplois nouveaux pour les personnes qui exerçaient jusque-là cette activité. Dans son rapport, le gouvernement confirme qu’un plan d’action national pour l’éradication de la collecte manuelle des rejets est effectivement mis en œuvre, et il déclare qu’il «déploie de son mieux conseils et recommandations dans le but de cette éradication totale de la collecte manuelle des rejets d’ici 2007». Il ajoute qu’il «veille à ce que les gouvernements des Etats, la direction des chemins de fer et les autorités locales appliquent et fassent respecter cette interdiction de la collecte manuelle des rejets», conformément à la loi de 1993 interdisant la collecte manuelle des rejets et imposant le tout-à-l’égout. Le gouvernement recommande également le lancement d’une campagne nationale de sensibilisation par les médias. Des statistiques sur la prévalence de la collecte manuelle des rejets sont dressées actuellement.

5. La commission note, certes, que le gouvernement déclare avoir fait siennes les recommandations de la commission en ce qui concerne la collecte manuelle des rejets, mais elle note que le rapport est loin de satisfaire aux demandes d’information qu’elle avait faites dans sa précédente observation. Elle avait en effet demandé des informations sur les mesures spécifiquement prises à propos d’un certain nombre de problèmes. Il en résulte qu’elle n’est pas en mesure d’évaluer les progrès acquis dans le sens d’une éradication aussi rapide que possible de la collecte manuelle des rejets, pratique qui est indissociable d’une discrimination grave et systématique fondée sur l’origine sociale et qui est contraire à la convention. En conséquence, la commission prie instamment le gouvernement de communiquer des informations détaillées – statistiques comprises – sur l’action spécifiquement menée par le gouvernement central et par celui des Etats et territoires de l’Union pour mettre un terme à la pratique de la collecte manuelle des rejets, et sur les progrès acquis en termes d’identification, d’affranchissement et de réinsertion des personnes qui exerçaient jusque-là ces activités. Dans ce contexte, la commission incite vivement le gouvernement à prendre les mesures décisives suivantes:

a)    veiller à ce que chaque Etat, collectivité locale et direction des chemins de fer applique et fasse respecter les interdictions énoncées par la loi de 1993 interdisant la collecte manuelle des rejets et imposant la réalisation d’un réseau de tout-à-l’égout, et de veiller à ce que les sanctions prévues en cas d’infraction soient effectivement imposées (prière d’indiquer le nombre de poursuites engagées, et le nombre et la nature des sanctions imposées);

b)    évaluer l’efficacité des systèmes actuels de réalisation de tout-à-l’égout et des systèmes de réinsertion des personnes qui exerçaient cette activité;

c)     lancer ou intensifier des programmes de sensibilisation et d’éducation de la population, et des programmes de formation professionnelle s’adressant aux autorités compétentes, de manière à déclencher le changement dans les attitudes et dans les habitudes sociales qui est nécessaire pour parvenir à l’élimination de cette pratique de collecte manuelle des rejets.

La commission exprime l’espoir que le prochain rapport du gouvernement contiendra des informations sur l’action spécifiquement menée par rapport à ces questions. En outre, elle le prie de communiquer copie du Plan d’action national pour l’élimination de la collecte manuelle des rejets ainsi que des informations sur sa mise en œuvre et les résultats obtenus.

Egalité de chances et de traitement entre hommes et femmes

6. Commentaires de syndicats. La commission rappelle la teneur d’une communication reçue du Centre des syndicats indiens (CITU) en date du 24 août 2005 relative à la mise en œuvre, dans une entreprise du secteur public, d’un plan spécial de départ volontaire des femmes à la retraite en vue d’une réduction des effectifs et, concurremment, l’octroi à titre prioritaire d’un nouvel emploi aux fils d’anciens salariés décédés et le déni du même avantage aux filles.

7. Le gouvernement déclare que dans l’entreprise en question – Coal India – un plan de départ volontaire à la retraite a été introduit en 2002 et a été appliqué jusqu’au 31 décembre 2003. Le gouvernement souligne le caractère volontaire de ce plan par lequel il était offert aux ouvrières non qualifiées des indemnités de licenciement pleines et entières. La direction proposait également un emploi aux fils de ces femmes partant à la retraite. Quant à l’allégation selon laquelle l’entreprise refuserait d’engager des filles d’anciens salariés décédés, le gouvernement invite à considérer que, si l’entreprise en question emploie environ 30 000 femmes, cet élément-là ne semble pas confirmer une telle allégation. Il déclare néanmoins que les femmes ne peuvent être employées à des travaux souterrains dans les mines et que, «par conséquent, d’une manière générale, on donne la préférence aux descendants de sexe masculin, lorsqu’ils sont disponibles».

8. La commission note en outre que le gouvernement indique que la plupart des femmes employées par Coal India sont recrutées sous le régime de la convention collective nationale sur les salaires dans le secteur du charbon (NCWA). Les clauses 9.3.0 à 9.3.4 de cette NCWA concernent l’offre d’un emploi à un parent direct d’un ouvrier mort en service. A cette fin, le parent direct se définit comme étant «la femme ou le mari, selon le cas, la fille ou le fils non marié, et enfin le fils légalement adopté. Lorsqu’aucun parent direct n’est disponible pour l’emploi, le frère, la sœur veuve/la belle-sœur veuve ou le gendre vivant chez le défunt et dépendant presque entièrement de ses gains est assimilé à un parent direct de celui-ci» (clause 9.3.3). Pour être admis à poser leur candidature pour un emploi, les parents directs «doivent être physiquement aptes, avoir les capacités requises pour l’emploi et être âgés au plus de 35 ans» (clause 9.3.4). Des dispositions spéciales régissent l’emploi et la rémunération des parents directs de sexe féminin (clause 9.5.0); il existe même une disposition sur l’inscription des parents directs de sexe masculin de plus de 12 ans sur une liste de réserve dans le cas où un emploi n’est pas offert à l’épouse du travailleur décédé. La commission croit comprendre que les clauses de la NCWA sont susceptibles d’être révisées par suite de plusieurs décisions rendues par la Cour suprême.

9. La commission rappelle que la convention tend à l’élimination de la discrimination sur les plans de l’accès à l’emploi, des conditions d’emploi – y compris des facilités et avantages de prévoyance qui s’y attachent – et enfin sur celui de la sécurité de l’emploi. Une différence de traitement fondée sur le sexe n’est admissible que en ce qui concerne un emploi particulier, à raison même des exigences inhérentes à cet emploi. Notant que le régime en question n’est plus en vigueur, la commission fait observer que des plans de départ à la retraite volontaire qui viseraient le départ des femmes seulement ne seraient pas compatibles avec le principe d’égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes, au sens de la convention. La commission considère également que le fait d’accorder un traitement préférentiel aux fils des travailleuses qui prennent une retraite anticipée, de même qu’aux parents directs de sexe masculin d’un travailleur mort en service, est discriminatoire.

10. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que les plans de départ à la retraite anticipée soient conçus et appliqués sans discrimination fondée sur le sexe. S’agissant de l’octroi d’un emploi à un parent direct, la commission prie le gouvernement de donner des informations sur les mesures prises pour garantir que les parents directs de l’un ou l’autre sexe bénéficient d’une telle mesure sur un pied d’égalité. Elle le prie également de fournir des informations sur la révision des clauses de la NCWA qui touchent à l’octroi d’un emploi à un parent direct et sur les mesures prises pour veiller à ce que ces clauses soient conformes au principe d’égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes.

11. Mesures de promotion de l’égalité entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que, d’après les chiffres du recensement de 2001, la présence des femmes dans le secteur organisé, le secteur public et l’emploi administratif reste très basse comparée à celle des hommes. Dans son rapport, le gouvernement déclare qu’un Plan d’action pour la mise en œuvre de la politique nationale de 2001 sur l’émancipation des femmes a été finalisé et sera soumis à l’approbation du Cabinet. La commission prie le gouvernement de la tenir informée des progrès accomplis en ce qui concerne la mise en œuvre de la politique nationale de la femme, dans la mesure où elle est liée à la promotion de l’égalité entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession, et aussi de la tenir informée de l’impact des mesures prises. Elle le prie à nouveau de fournir des informations sur l’action spécifiquement prise ou envisagée pour promouvoir l’accès des femmes à l’emploi sur un pied d’égalité dans le secteur organisé, dans le secteur public et dans l’administration gouvernementale. Elle le prie de fournir des données à jour concernant les mesures prises ou envisagées pour promouvoir l’accès des femmes à la formation professionnelle et à des activités génératrices de revenus, y compris sur les mesures et programmes ciblant les Dalits et les femmes appartenant à des tribus. Enfin, elle le prie de la tenir informée des progrès concernant l’adoption d’une législation interdisant le harcèlement sexuel.

[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 96e session, et de communiquer un rapport détaillé en 2007.]

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