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Observation (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Argentine (Ratification: 1960)

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La commission prend note du rapport du gouvernement. Elle prend note aussi des commentaires de la Centrale des travailleurs argentins (CTA) de décembre 2006 et du 30 août 2007, de la Confédération syndicale internationale (CSI) du 28 août 2007, et de la Confédération générale du travail de la République argentine (CGT) du 4 septembre 2007, qui portent sur les questions qu’elle a déjà soulevées. La commission note avec préoccupation que, dans sa communication d’août 2007 transmise au gouvernement le 21 septembre 2007, la CTA fait état du vol d’ordinateurs dans des locaux syndicaux et dans l’étude du conseiller juridique de la CTA, d’attaques du domicile d’un dirigeant syndical de la CTA et du siège de la CTA à Buenos Aires, ainsi que d’agressions physiques à l’encontre de manifestants – agressions qui ont entraîné la mort d’un travailleur et fait plusieurs blessés – dans les provinces de Neuquén, Salta et Santa Cruz, et dans la ville autonome de Buenos Aires. La commission note qu’elle n’a pas reçu les observations du gouvernement sur ces commentaires. En conséquence, la commission demande au gouvernement de diligenter les enquêtes nécessaires pour éclaircir ces faits et punir les coupables. La commission prend aussi note des commentaires en date du 4 juin 2007 de la Fédération des fonctionnaires du gouvernement de la ville autonome de Buenos Aires. Enfin, la commission prend note de la réponse du gouvernement au sujet des commentaires de la CTA de décembre 2006.

La commission prend aussi note du débat qui a eu lieu en juin 2007 à la Commission de l’application des normes de la Conférence et, en particulier, des conclusions de la Commission de l’application des normes: 1) celle-ci a appelé instamment le gouvernement à donner une réponse à la demande de reconnaissance de statut syndical faite par la Centrale des travailleurs argentins (CTA), et 2) demandé au gouvernement d’élaborer, en concertation avec l’ensemble des partenaires sociaux et avec l’assistance de l’OIT, un projet de loi de nature à donner pleinement effet à la convention et tenant compte de tous les commentaires de la commission d’experts. A ce sujet, la commission note que, à propos des conclusions de la Commission de la Conférence, le gouvernement indique qu’il prend des mesures pour trouver des solutions de rechange avec la participation des acteurs intéressés, qu’en octobre 2007 il a tenu une réunion avec des représentants des travailleurs (CGT et CTA) et des employeurs, qu’à son sens cette réunion a été satisfaisante, et que d’autres réunions sont prévues afin de réaliser les objectifs indiqués.

Demande de statut syndical de la CTA

La commission rappelle que, dans son observation précédente, elle avait noté que la demande de statut syndical de la CTA était en cours depuis 2004, et que cette demande n’avait pas encore fait l’objet d’une décision. La commission avait demandé au gouvernement de se prononcer sans retard sur cette question. Dans ses commentaires, la CTA affirme qu’à ce jour sa demande de statut syndical n’a pas été tranchée.

La commission note que, de nouveau, le gouvernement indique que la procédure est en cours et qu’elle n’est pas bloquée, à l’exception des périodes normales pendant lesquelles il a fallu attendre puis examiner les réponses des intéressés, lesquelles constituent un dossier très complexe. Le gouvernement indique aussi ce qui suit: a) il respecte tous les aspects du principe de la liberté syndicale et il a suivi la procédure prévue dans la législation – notamment la participation des associations syndicales à la procédure –, législation que la CTA a reconnue expressément en inscrivant sa demande de statut syndical dans le cadre de la loi no 23551 et de son décret réglementaire; b) le fait de respecter les procédures et de garantir l’exercice du droit de défense de l’ensemble des entités visées dans la procédure administrative, à laquelle participent les associations syndicales de premier, deuxième et troisième degrés dont les droits subjectifs s’opposent, implique nécessairement des délais qui sont conformes aux caractéristiques de la procédure; c) la liberté d’opinion et le droit légitime de la défense, qui font partie des droits fondamentaux de l’homme, ont été un élément important des discussions qui ont précédé l’adoption de la convention no 87; il ne s’agit pas d’initiatives qui visent à retarder la procédure; au contraire, elles sont destinées à donner à toutes les parties intéressées la possibilité de s’exprimer et de faire connaître leurs intérêts légitimes; d) le système de représentativité et l’examen de la représentativité afin d’accorder le statut syndical ont été acceptés par l’OIT; et e) il faut prendre en compte non seulement les intérêts de la CTA, mais aussi ceux de la CGT, situation complexe qui mérite un débat et qui, précisément, oblige à comparer la représentativité des entités de premier, de deuxième et de troisième degrés, ce qui, étant donné le nombre des syndicats en place en Argentine qui ont le statut syndical, demande du temps et une évolution. Il n’y a pas de retard dans l’administration; dans cette procédure où les intérêts s’opposent, les ressources administratives sont utilisées rationnellement.

La commission note de nouveau avec regret que, malgré tout le temps passé (plus de trois ans), l’autorité administrative ne s’est pas prononcée sur la demande de statut syndical de la CTA. Dans ces conditions, la commission prie instamment le gouvernement d’agir sans retard à ce sujet, et de la tenir informée.

Loi sur les associations syndicales et décret d’application correspondant

La commission rappelle que, depuis de nombreuses années, ses commentaires portent sur certaines dispositions de la loi no 23551 de 1988 sur les associations syndicales et sur le décret d’application correspondant (no 467/88). La commission prend note des indications suivantes du gouvernement: 1) les dispositions de cette loi s’inspiraient des principes essentiels de la justice sociale, puisqu’il a été tenu compte des interprétations qui avaient été formulées au sujet de la portée de la notion de liberté syndicale à l’OIT, ainsi que de l’assistance technique fournie par le Bureau en 1984; et 2) il existe actuellement plus de 2 800 associations syndicales de premier, deuxième et troisième degrés, soit une association syndicale pour 3 500 salariés, ce qui démontre que la liberté syndicale n’est pas seulement un droit: elle est aussi dûment et pleinement exercée. La commission note que, au sujet des dispositions législatives qui ont fait l’objet de commentaires, le gouvernement se borne à répéter d’une façon générale les observations qu’il a adressées dans le passé. Dans ces conditions, prenant en compte les derniers commentaires du gouvernement, la commission ne peut que renouveler ses observations précédentes au sujet des dispositions suivantes:

Statut syndical

–           l’article 28 de la loi, qui impose à une association, pour pouvoir contester à une autre le statut syndical, de compter un nombre d’affiliés «considérablement supérieur» et l’article 21 du décret réglementaire no 467/88, qui définit le sens des termes «considérablement supérieur» et dispose que l’association qui revendique le statut syndical doit compter au moins 10 pour cent d’adhérents cotisants de plus que sa rivale. Selon le gouvernement, la législation ne porte pas atteinte aux principes établis par la convention, puisque pour se voir conférer le statut syndical un syndicat doit être plus représentatif. La commission considère que la règle imposant de justifier d’un pourcentage considérablement supérieur, c’est-à-dire 10 pour cent d’adhérents de plus que le syndicat préexistant, constitue une condition excessive et contraire aux exigences de la convention, qui crée dans la pratique une difficulté aux organisations syndicales simplement enregistrées pour obtenir le statut syndical;

–           l’article 29 de la loi, qui dispose que le statut syndical ne peut être conféré à un syndicat d’entreprise que lorsqu’il n’existe pas d’autre syndicat ayant ce statut dans le secteur d’activité, la catégorie ou le secteur géographique concernés; et l’article 30 de la loi, qui fait obligation au syndicat de corps de métier, de profession ou de catégorie, pour obtenir le statut syndical, de démontrer qu’il défend des intérêts différents de ceux du syndicat préexistant, syndicat dont le statut ne doit pas englober la représentation revendiquée. La commission note que le gouvernement indique, à propos de l’article 29, que les syndicats en place dans une entreprise existent et fonctionnent librement. Ils exercent leurs droits consacrés par la législation; au sujet de l’article 30, le gouvernement indique que cet article a mis fin à une violation flagrante de la liberté syndicale que comportait une loi de facto qui interdisait la présence dans une même association syndicale de cadres et de travailleurs n’ayant pas ce statut. La commission insiste néanmoins sur le fait que les conditions imposées aux syndicats d’entreprise, de corps de métier ou de catégorie pour obtenir le statut syndical sont excessives et que, dans la pratique, elles restreignent l’accès de ces organisations au statut syndical et privilégient les organisations préexistantes, même lorsque les syndicats d’entreprise, de corps de métier ou de catégorie se révèlent plus représentatifs, selon les dispositions de l’article 28.

Avantages découlant du statut syndical

–           l’article 38 de la loi en question, qui permet seulement aux associations ayant le statut syndical mais non à celles qui sont simplement enregistrées de bénéficier du prélèvement automatique des cotisations syndicales. La commission note que, selon le gouvernement, la majorité des associations syndicales du premier degré sont affiliées à des fédérations qui jouissent du statut syndical, si bien qu’elles perçoivent les cotisations versées par leurs affiliés par l’intermédiaire de la fédération, qui encaisse ces cotisations au moyen du prélèvement direct effectué par l’employeur. Le gouvernement ajoute que rien n’empêche les organisations simplement enregistrées de s’entendre avec l’employeur afin que celui-ci effectue à leur profit le prélèvement des cotisations syndicales sur le salaire des travailleurs. La commission rappelle que le critère de plus grande représentativité ne devrait pas conférer au syndicat le plus représentatif des privilèges qui vont au-delà de la priorité de représentation dans les négociations collectives, dans les consultations avec les autorités et dans le choix des délégations devant les organismes internationaux. Par conséquent, la commission est d’avis qu’une telle discrimination au préjudice d’organisations simplement enregistrées n’est pas justifiée;

–           les articles 48 et 52 de la loi en question, qui prévoient que seuls les représentants des associations dotées du statut syndical bénéficient de l’immunité syndicale. La commission note que, selon le gouvernement, tous les travailleurs ou associations syndicales jouissent de la protection générale établie par l’article 47 et peuvent intenter une action en amparo en cas de violation de leurs droits de liberté syndicale garantis par la loi. La loi ne prévoit pas de restrictions à ce sujet. La commission estime néanmoins que les articles 48 et 52 établissent, en cas de discrimination antisyndicale, un traitement plus favorable pour les représentants des organisations ayant le statut syndical, ce qui va au-delà des avantages pouvant être attribués aux organisations les plus représentatives, comme indiqué dans le paragraphe précédent.

La commission souligne que beaucoup de temps s’est écoulé depuis qu’elle formule des commentaires à ce sujet et que, bien que le gouvernement ait bénéficié de l’assistance technique du BIT à plusieurs reprises, les mesures nécessaires pour effectuer les modifications demandées n’ont pas été prises. Dans ces conditions, la commission demande de nouveau au gouvernement de prendre des mesures pour modifier l’ensemble des dispositions mentionnées afin de les rendre pleinement conformes à la convention. La commission espère constater des progrès concrets dans un avenir très proche.

Détermination des services minimums

Dans son observation précédente, la commission avait constaté que les commentaires de la CTA portaient sur la récente promulgation du décret no 272/2006, portant réglementation de l’article 24 de la loi no 25877 relative aux différends collectifs du travail. La CTA dénonce le fait que, en vertu de l’article 2 b) de ce décret, la Commission de garantie qui, pour la détermination des services minimums, se compose de représentants des organisations d’employeurs et de travailleurs ainsi que d’autres personnes indépendantes n’a qu’un rôle consultatif, la décision finale concernant la détermination de ces services restant du ressort du ministère du Travail «dans le cas où les parties n’en auraient pas encore convenu» ou «lorsque les accords seraient insuffisants». La commission avait demandé au gouvernement de l’informer sur l’application dans la pratique de la nouvelle disposition, et plus particulièrement sur le nombre des cas dans lesquels l’autorité administrative a modifié les termes de l’avis de la Commission de garantie sur les services minimums.

La commission prend note des informations suivantes du gouvernement au sujet de l’alinéa b) du décret no 272/2006: 1) il faut analyser cette disposition conjointement avec le reste de la réglementation, étant donné que l’article 10 du décret établit ce qui suit: «dans le cas où les parties ne respecteraient pas, dans les délais prévus, les obligations prévues aux articles 7, 8 et 9 du décret ou si les services minimums fixés par les parties sont insuffisants l’autorité d’application, en consultation avec la Commission de garantie, fixe les services minimums indispensables pour assurer la prestation du service, le nombre des travailleurs qui seront affectés au service, les horaires de travail, la définition des fonctions et la formation des équipes, dans le respect du droit de grève et des droits des usagers intéressés»; 2) l’article 24 de la loi no 25877 a donné comme seule faculté à la Commission de garantie de définir comme essentiels les services que la loi ne prévoit pas; du point de vue juridique, il est inapproprié d’étendre ses facultés au moyen de la réglementation, mais il est possible de lui confier des fonctions complémentaires et consultatives telles qu’elles étaient prévues; et 3) la faculté qui a finalement été donnée au ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale ne saurait être qualifiée d’unilatérale et de discrétionnaire, étant donné que l’article 10 et l’alinéa b) de l’article 2 du décret réglementaire établissent que l’autorité d’application doit consulter la Commission de garantie en ce qui concerne la fixation des services minimums. Par ailleurs, le caractère discrétionnaire de cette faculté a été limité expressément. En effet, il est obligatoire pour ce ministère, lorsqu’il exerce cette fonction, de «veiller tant au respect du droit de grève qu’aux droits des usagers concernés».

La commission demande au gouvernement de l’informer sur les cas dans lesquels la Commission de garantie des services minimums est intervenue, et d’indiquer en particulier le nombre de fois où l’autorité administrative a modifié les termes de la décision de cette commission.

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