National Legislation on Labour and Social Rights
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La commission prend note du rapport du gouvernement et de sa réponse au sujet des commentaires formulés par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), désormais Confédération syndicale internationale (CSI), du 10 août 2006, lesquels se référaient aux questions législatives et pratiques en cours d’examen et à la détention et à l’emprisonnement de dirigeants syndicaux.
La commission note que le gouvernement indique de nouveau que la révision du Code du travail se poursuit. A cette fin, d’amples consultations sont menées. Elles recouvrent les 19 syndicats nationaux de branche et la Centrale des travailleurs de Cuba. A ce sujet, la commission fait observer que ce processus suit son cours depuis de nombreuses années, sans résultat concret à ce jour. La commission exprime l’espoir que la révision du Code du travail parviendra à son terme dans un proche avenir et que les commentaires qu’elle formule dans les paragraphes suivants à propos de l’application de la convention auront été pris en considération. Rappelant au gouvernement que l’assistance technique du Bureau est à sa disposition, elle le prie de communiquer copie du projet mentionné.
I. Monopole syndical
Articles 2, 5 et 6 de la convention. La commission observe que, depuis de nombreuses années, elle souligne qu’il est nécessaire de supprimer des articles 15 et 16 du Code du travail de 1985 la mention qui y est faite de la Centrale des travailleurs. La commission note que, selon le gouvernement, la législation en vigueur et la pratique quotidienne dans tous les centres de travail garantissent le plein exercice de l’activité syndicale et du droit d’association. D’après le gouvernement, le Code du travail n’interdit pas aux travailleurs de choisir la forme et la structure syndicale qu’ils jugent utiles, et l’article 15 du Code du travail reprend pour l’essentiel les dispositions de l’article 3 de la convention. Les statuts, règlements et principes qui régissent l’activité des 19 syndicats nationaux de branche et de la Centrale des travailleurs de Cuba, à laquelle ces syndicats se sont affiliés de leur plein gré, sont examinés et adoptés par les syndicats lors de leurs congrès respectifs. A ce sujet, aucune disposition de la législation ne donne d’indication au sujet de la structure syndicale. Le gouvernement souligne aussi que la tradition d’unité du mouvement syndical cubain et la libre volonté des travailleurs ont abouti à la création, en 1939, de la Centrale des travailleurs de Cuba. La centrale n’a donc pas été créée en vertu d’une disposition législative. Selon le gouvernement, ni les 19 syndicats de branche ni la Centrale des travailleurs de Cuba, ni les plus de 70 000 sections syndicales qui existent n’ont dû demander l’autorisation d’exercer librement leurs activités dans les centres de travail. La commission doit insister une fois de plus sur le fait que le pluralisme syndical doit être possible dans tous les cas et que la loi ne doit pas institutionnaliser un monopole de fait en se référant à une centrale syndicale spécifique. Même dans le cas où l’unification du mouvement syndical a eu, à un moment donné, la préférence de tous les travailleurs, ceux-ci doivent toujours pouvoir conserver le libre choix de créer, s’ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure établie et de s’affilier à l’organisation de leur choix (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 96). Dans ces conditions, la commission demande au gouvernement de faire le nécessaire pour veiller à ce que tous les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, aient le droit de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s’affilier à ces organisations. La commission demande aussi au gouvernement de prendre des mesures pour modifier les articles susmentionnés du Code du travail et de l’informer dans son prochain rapport de toute mesure prise à cet égard.
Article 3. La commission rappelle que, depuis plusieurs années, elle dit qu’il est nécessaire de modifier l’article 61 du décret-loi no 67 de 1983, article qui confère à la centrale des travailleurs le monopole de la représentation des travailleurs du pays devant les instances gouvernementales. La commission note que le gouvernement réaffirme que cette disposition a été modifiée par le décret-loi no 147 de 1994 et qu’actuellement c’est l’accord no 4085 du 2 juillet 2001 qui s’applique. A ce sujet, la commission constate que le décret-loi no 147 de 1994 n’abroge pas expressément l’article susmentionné, que l’accord no 4085 n’a pas été communiqué par le gouvernement et qu’elle n’en a donc pas pris connaissance. Dans ces conditions, la commission prie instamment le gouvernement de modifier l’article 61 du décret-loi no 67 de 1983 afin de garantir le pluralisme syndical, par exemple en remplaçant la mention qui y est faite de la Centrale des travailleurs de Cuba par la mention «organisation la plus représentative». La commission demande aussi au gouvernement de communiquer copie de l’accord no 4085 du 2 juillet 2001.
II. Droit de grève
Dans son observation précédente, la commission a noté que le droit de grève n’est pas reconnu dans la législation et que, dans la pratique, le recours à la grève est interdit. Elle avait demandé au gouvernement de prendre des mesures pour garantir que nul ne puisse faire l’objet d’une discrimination ou d’un préjudice dans le cadre de son emploi au motif d’avoir exercé pacifiquement le droit de grève. Elle lui avait aussi demandé de la tenir informée à cet égard. La commission note que le gouvernement réaffirme que la législation cubaine n’interdit pas le droit de grève, pas plus qu’elle ne prévoit de sanctions pour l’exercice de la grève, et que les organisations syndicales ont pour prérogative de décider de leur action à ce sujet. Les travailleurs cubains bénéficient du dialogue social participatif et démocratique à tous les niveaux de la prise de décisions. L’accent est mis sur la collaboration et non sur le conflit, ce qui a permis d’améliorer les salaires, les prestations de sécurité sociale, les mesures de sécurité et de santé, entre autres, et d’accroître constamment les qualifications des travailleurs. Les représentants syndicaux participent à tous les processus d’élaboration de la législation du travail et de la sécurité sociale et, à de multiples occasions, les projets sont menés en consultation avec les assemblées de travailleurs dans les centres de travail. Selon le gouvernement, si jamais les travailleurs cubains décidaient de faire grève, rien ne pourrait les en empêcher. La commission souligne de nouveau que le droit de grève constitue l’un des moyens essentiels dont les travailleurs et leurs organisations disposent pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux. Elle demande de nouveau au gouvernement de veiller expressément dans la législation à ce que nul ne soit victime de discrimination ou de préjudice dans son emploi au motif d’avoir exercé pacifiquement ce droit.
III. Droits syndicaux et libertés publiques
Condamnation de syndicalistes. La commission rappelle que, dans ses commentaires précédents, elle avait évoqué la condamnation de dirigeants syndicaux à des peines de douze à vingt-six ans d’emprisonnement pour trahison et conspiration. Elle avait demandé au gouvernement de faire le nécessaire pour que soient libérés sans délai les dirigeants syndicaux qui ont été condamnés à des peines de prison sévères. La commission note que, dans ses commentaires de 2006, la CISL, désormais Confédération syndicale internationale (CSI), a fait mention des faits suivants: 1) la détention, le 10 janvier 2006, de M. Juan Antonio Salazar du Syndicat libre des travailleurs de Cuba qui a été accusé d’avoir proféré des menaces, menaces dont il n’avait aucunement connaissance; et 2) six des sept dirigeants syndicaux indépendants qui ont été condamnés à des peines d’emprisonnement de douze à vingt-six ans sont toujours détenus; pour des raisons de santé, le septième doit purger sa peine à son domicile ou à l’hôpital. A ce sujet, la commission prend note de l’indication du gouvernement, à savoir que M. Salazar n’a pas été détenu, qu’il ne représentait aucun secteur des travailleurs cubains, que sans emploi depuis 1995 il avait commis précédemment de nombreux délits de droit commun et qu’il avait été traduit en justice à plusieurs occasions. Le gouvernement ajoute que M. Salazar a quitté le pays le 29 novembre 2005. En ce qui concerne la condamnation de dirigeants syndicaux, la commission prend note des indications suivantes du gouvernement: 1) aucun des condamnés n’était dirigeant syndical, étant donné qu’ils avaient pris la décision de ne pas avoir de relation de travail depuis plusieurs années; 2) ils menaient des activités visant à renverser l’ordre politique, économique et social décidé par le peuple cubain et consacré dans la Constitution; 3) leur responsabilité a été établie pour des actes qualifiés de délits qui visaient à nuire à la souveraineté de la nation; ils ont été sanctionnés conformément à l’article 91 du Code pénal et à la loi no 88 de 1999 de protection de l’indépendance nationale et de l’économie de Cuba; 4) aucun d’entre eux n’a été jugé ou sanctionné pour avoir exercé ou défendu la liberté d’opinion ou d’expression; 5) tous ont porté atteinte aux droits de l’homme du peuple cubain, en particulier à l’exercice des droits à la libre détermination, au développement et à la paix; 6) actuellement, la plupart des condamnés sont en prison où ils purgent leur peine, mais plusieurs ont bénéficié de mesures «extrapénales» pour des raisons humanitaires; et 7) la dignité humaine et l’intégrité physique et psychique des condamnés ont été respectées rigoureusement, et les détenus ont bénéficié en prison des mesures amples dont jouit l’ensemble de la population carcérale cubaine.
La commission note toutefois que le gouvernement fait mention de chefs d’inculpation généraux sans préciser les faits concrets qui ont entraîné la condamnation de ces personnes. Par ailleurs, le Comité de la liberté syndicale a demandé la libération de plusieurs d’entre elles. La commission rappelle à nouveau que la liberté d’association n’est qu’un aspect de la liberté d’association en général qui, elle-même, doit s’intégrer dans le vaste complexe des libertés fondamentales de l’homme, interdépendantes et complémentaires les unes des autres. Elle rappelle en outre qu’en 1970 la Conférence internationale du Travail a énuméré de manière explicite les droits fondamentaux qui sont nécessaires à l’exercice de la liberté syndicale, à savoir: a) le droit à la liberté et à la sûreté de la personne, ainsi qu’à la protection contre les arrestations et les détentions arbitraires; b) la liberté d’opinion et d’expression, et en particulier le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontière, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit; c) la liberté de réunion; d) le droit à un jugement équitable par un tribunal indépendant et impartial; et e) le droit à la protection des biens des syndicats. Dans ces conditions, la commission demande de nouveau au gouvernement de faire le nécessaire pour que soient libérés sans délai les dirigeants syndicaux qui ont été condamnés à de sévères peines d’emprisonnement.
Enfin, la commission prend note des commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI) du 28 août 2007 qui portent sur des questions législatives et pratiques en cours d’examen et sur des cas concrets de détentions de travailleurs de la Confédération ouvrière nationale indépendante (CONIC), de harcèlements et de menaces d’emprisonnement qui visent des délégués du Syndicat des travailleurs de l’industrie légère (SITIL) et de la confiscation de matériel et de l’aide humanitaire envoyée de l’étranger au Conseil unitaire des travailleurs cubains (CUTC). La commission demande au gouvernement de communiquer ses observations sur ces cas concrets dans la mesure où sa réponse ne n’y réfère pas spécifiquement.