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Demande directe (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

Convention (n° 81) sur l'inspection du travail, 1947 - Sénégal (Ratification: 1962)

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La commission prend note du rapport du gouvernement pour la période se terminant le 1er septembre 2006 en réponse à ses commentaires antérieurs, ainsi que des documents joints en annexe. Elle prend également note de la transmission par le gouvernement, en date du 26 octobre 2006, des commentaires formulés sur ce rapport par la Confédération nationale des employeurs du Sénégal (CNES), la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal (CNTS) et l’Union nationale des syndicats autonomes du Sénégal (UNSAS).

1. Articles 2, 3, paragraphe 1 a), et 18 de la convention.Contrôle des dispositions légales et application des sanctions appropriées. Faisant suite à ses commentaires antérieurs au sujet de la nécessité d’établir un système de sanctions applicable aux infractions aux dispositions relatives aux conditions de travail, la commission note que le gouvernement se réfère aux dispositions du décret no 62-017 PC/MFPT/DGTSS/TMO du 22 janvier 1962, pris en application de l’ancien Code du travail, toujours en vigueur. Elle note qu’en effet ce décret prévoit des sanctions applicables aux infractions aux dispositions concernant notamment les salaires, le repos hebdomadaire, les contrats de travail et d’apprentissage et certaines mesures d’hygiène. La commission constate, d’une part, que les dispositions dudit décret s’appliquent expressément à certains articles de l’ancien Code du travail, qui ne correspondent pas aux articles pertinents du code de 1997 et, d’autre part, que les montants fixés ne semblent pas avoir été révisés depuis plus de quarante ans. Il serait donc en tous points souhaitable pour que les employeurs et les travailleurs soient informés de leurs droits et obligations réciproques, pour que les inspecteurs du travail et toute autre autorité ou juridiction saisie de cas d’infraction aux dispositions légales relatives aux conditions de travail puissent en assurer le contrôle et pour que les sanctions applicables soient, comme prescrit par l’article 18, appropriées, que des textes pertinents soient pris en application du nouveau code et que les montants desdites sanctions soient fixés de manière à garder un caractère dissuasif en fonction de l’évolution de la situation monétaire. La consolidation des textes applicables dans un document unique en faciliterait certainement le contrôle par les inspecteurs et les juges, ainsi que le respect par les employeurs de bonne foi. Au paragraphe 292 de son étude d’ensemble de 2006 sur l’inspection du travail, la commission souligne qu’il est nécessaire, pour assurer la crédibilité et l’efficacité du système de protection au travail, que les infractions soient identifiées par la législation nationale et que les poursuites intentées ou recommandées par les inspecteurs du travail à l’encontre d’employeurs en infraction soient de nature à dissuader l’auteur de l’infraction de persister dans la négligence ou la violation de la législation pertinente et à faire prendre conscience aux employeurs, en général, des risques qu’ils seraient susceptibles d’encourir en n’assumant pas leurs obligations. Il importe en outre que les peines encourues soient définies en tenant compte de la nature et de la gravité de l’infraction et que le montant des amendes soit régulièrement révisé pour tenir compte de l’inflation. Il serait en effet regrettable que les employeurs puissent préférer s’acquitter d’amendes jugées plus économiques plutôt que de prendre les mesures nécessaires à la mise en conformité avec les dispositions légales sur les conditions de travail, phénomène largement observé et rapporté au BIT par de nombreuses organisations syndicales (paragr. 295 de l’étude d’ensemble). La commission livre un certain nombre d’exemples de bonne pratique à cet égard (paragr. 296 et suiv.). La commission espère que le gouvernement prendra rapidement, à la lumière de ce qui précède, des mesures pertinentes et qu’il communiquera des informations sur tout développement dans ce sens.

La commission prie par ailleurs le gouvernement de communiquer, dès leur adoption, copie des décrets d’application des articles L 168 (mesures relatives à la santé et à la sécurité des travailleurs), L 185 (services et délégués de sécurité du travail) et L 190 (statut des inspecteurs et contrôleurs du travail) du Code du travail dont il indique qu’ils sont toujours en cours d’élaboration, bien qu’il se soit écoulé dix ans depuis l’adoption dudit code. Elle prie également le gouvernement de préciser si un projet de décret d’application de l’article L 189 (services du travail et de la sécurité sociale) est également en préparation.

2. Articles 5 a) et 18. Obstacles à l’exercice de missions d’inspection. La commission note avec intérêt la communication d’une copie de formulaire de demande aux autorités de police et de gendarmerie de notifier une convocation par l’inspection du travail à toute personne ayant refusé de s’y soumettre. La commission saurait gré au gouvernement d’indiquer si, dans la pratique, les inspecteurs du travail ont la possibilité d’obtenir une assistance des forces de l’ordre en cas d’obstacles à l’exercice de leurs fonctions à l’occasion d’un contrôle d’établissement. Le gouvernement est prié, le cas échéant, de décrire la procédure pertinente et de fournir des informations sur la jurisprudence en la matière pour ce qui est des sanctions imposées dans la pratique aux employeurs récalcitrants aux interventions des inspecteurs du travail.

3. Articles 10 et 11. Ressources humaines et logistiques de l’inspection du travail. Selon la CNTS, il n’est pas déployé d’efforts pour doter l’inspection du travail de moyens adéquats, ce qui aurait pour conséquence de réduire considérablement les actions des inspecteurs et contrôleurs du travail. L’improbabilité des visites d’inspection dans les établissements aurait pour conséquence de favoriser le manquement aux dispositions légales relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs dans l’exercice de leur profession, en particulier en matière d’hygiène et de sécurité au travail. L’organisation s’interroge avec inquiétude sur les intentions du gouvernement à cet égard à court, moyen et long terme. Pour l’UNSAS, l’insuffisance budgétaire constitue un handicap majeur pour l’administration du travail qui fonctionne en sous-effectif et est confrontée à des difficultés de gestion de son courrier et d’envoi des convocations aux usagers. Le manque de moyens de transport empêcherait par ailleurs les inspecteurs de jouer leur rôle en matière de prévention des conflits. Il en résulterait un engorgement des juridictions du travail. En outre, les conditions de service des inspecteurs du travail ne seraient pas suffisamment motivantes, ce qui les conduirait à se désengager au profit du secteur privé où les conditions de travail et les avantages sociaux seraient bien plus attrayants que ceux offerts par la fonction publique. La CNES estime, pour sa part, que l’amélioration des conditions de travail dépendra des moyens mis à la disposition de l’inspection du travail, ainsi que de la manifestation de la capacité de celle-ci à exécuter correctement ses tâches, comme par exemple à produire des rapports périodiques.

La commission note avec préoccupation les points de vue convergents de ces organisations au sujet de la précarité des moyens de l’inspection du travail et des conséquences de ces insuffisances à divers niveaux sur son fonctionnement et sur les conditions de travail. Le gouvernement reconnaît quant à lui que les moyens de transport qui avaient été mis à disposition des inspecteurs entre 2000 et 2002 ne fonctionnent plus et n’ont pu être remplacés. Il indique qu’en conséquence les inspecteurs en sont réduits à agir dans le cadre «d’inspections assises», c’est-à-dire à intervenir dans la résolution des conflits dont ils sont saisis et que les quelques inspections effectuées dans les entreprises sont directement liées à ces conflits. La commission voudrait souligner à l’attention du gouvernement qu’il lui incombe de prendre, conformément à l’article 11, les mesures nécessaires visant à fournir aux inspecteurs du travail les facilités de transport, lorsqu’il n’existe pas de facilités de transport public appropriées (paragraphe 1 b)), ainsi que le remboursement de leurs frais de déplacement professionnel (paragraphe 2), afin de leur permettre d’exercer leurs fonctions et notamment d’effectuer des visites d’établissements aussi fréquemment et soigneusement que prescrit par l’article 16. Elle espère que le gouvernement prendra dans les meilleurs délais des mesures visant à faire porter effet à ces dispositions de la convention, notamment pour réunir les conditions permettant d’établir, au besoin avec l’assistance technique du BIT et le recours à la coopération financière internationale, un diagnostic du fonctionnement de l’inspection du travail et de ses besoins en ressources humaines et en moyens matériels et logistiques, aux fins de prévisions budgétaires appropriées. Elle le prie de tenir le BIT informé de tout développement à cet égard ainsi que de toute difficulté rencontrée.

4. Article 12, paragraphes 1 a) et b), et 2. Prérogatives d’investigation des inspecteurs. Selon le gouvernement, il serait donné effet à ces dispositions de la convention par l’article L 197, alinéas 1 et 2, du Code du travail. Or la commission observe que, suivant l’article 12, paragraphe 1 a), de la convention, le droit de libre entrée des inspecteurs dans les établissements assujettis s’étend sans restriction d’aucune sorte «à toute heure du jour et de la nuit». En subordonnant leur droit d’entrée de nuit dans ces établissements à la condition qu’un travail collectif y soit effectué, la législation nationale susvisée est contraire à la convention puisqu’elle ne permet pas l’exercice de certains contrôles techniques nécessitant l’arrêt des machines par exemple ou de contrôles permettant de vérifier qu’il n’est pas fait recours au travail clandestin, après l’horaire de fermeture des établissements censés fonctionner exclusivement de jour.

La commission note par ailleurs que, en vertu du paragraphe 1 de l’article L 197 du code, le chef d’entreprise ou d’établissement ou son représentant pourra accompagner, au cours de sa visite, l’inspecteur du travail et de la sécurité sociale. Cette disposition est également contraire à la convention dans la mesure où elle entrave la liberté d’action dont l’inspecteur doit jouir au cours de la visite d’établissement pour être à même de décider, conformément à l’article 12, paragraphe 1 c) i), d’interroger «seul, ou en présence de témoins, l’employeur ou le personnel» et de remplir ses obligations de secret professionnel et de confidentialité quant à la source des plaintes prescrites par l’article 15 b) et c). La commission souligne par ailleurs que la liberté d’action qui devrait être reconnue aux inspecteurs du travail à l’occasion des visites d’inspection s’étend jusqu’à celle de s’abstenir de notifier sa présence à l’employeur ou à son représentant, s’il estime qu’un tel avis risque de porter préjudice à l’efficacité du contrôle (article 12, paragraphe 2).

Appelant l’attention du gouvernement sur les paragraphes 261 à 275 de son étude d’ensemble de 2006 précitée, la commission le prie à nouveau de prendre les mesures nécessaires pour mettre la législation en conformité avec la convention sur: 1) l’étendue du droit de libre entrée des inspecteurs dans les établissements assujettis ainsi que le droit d’entrée dans les locaux que les inspecteurs ont un motif raisonnable de supposer être assujettis à leur contrôle; 2) la libre décision de l’inspecteur quant à l’opportunité d’autoriser l’employeur ou son représentant de l’accompagner au cours de la visite d’inspection; et 3) le droit de l’inspecteur de s’abstenir d’aviser de sa présence l’employeur ou son représentant s’il estime qu’un tel avis risque de porter préjudice à l’efficacité du contrôle.

5. Articles 19, 20 et 21. Obligations de rapport sur les activités d’inspection. La commission note, en réponse à sa demande réitérée de communication des résultats d’une enquête annoncée en 1992 sur la médecine du travail dans les entreprises de l’électricité, de l’eau et du bâtiment, que cette étude n’a jamais été réalisée, faute de financement. Elle note également qu’aucun rapport annuel de caractère général sur les travaux des services d’inspection n’a été reçu au BIT depuis de nombreuses années. Il ressort par ailleurs des commentaires émis par la CNES que les services d’inspection ne seraient pas en mesure de produire des rapports périodiques de leurs activités. Notant néanmoins l’engagement du gouvernement d’étudier la meilleure manière de former et de sensibiliser les inspecteurs régionaux du travail à la collecte et à la transmission de données statistiques, la commission espère qu’il veillera à ce que l’autorité centrale d’inspection du travail déploie des efforts pour l’établissement d’outils à cette fin tels que, notamment, des formulaires de rapport de visites d’inspection à l’usage des inspecteurs et contrôleurs, adaptés aux diverses catégories d’établissements commerciaux et industriels assujettis et contenant notamment des rubriques concernant le type de visite, les domaines législatifs objet du contrôle, les constats effectués, les suites données au contrôle (conseils, informations, mise en demeure, mesure conservatoire jusqu’à mise en conformité, initiative ou recommandation de poursuite légale). Un traitement pertinent de ces documents par les bureaux d’inspection permettra l’établissement et la transmission à l’autorité centrale d’inspection de rapports périodiques tels que visés par l’article 19 afin de permettre à cette dernière de disposer des informations nécessaires à l’élaboration du rapport annuel dont la publication et la communication sont prescrites par l’article 20 et dont le contenu est défini par l’article 21. La commission espère que le gouvernement ne manquera pas de fournir dans son prochain rapport des informations sur tout développement en la matière et de communiquer tout document et tout rapport pertinents.

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