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Demande directe (CEACR) - adoptée 2008, publiée 98ème session CIT (2009)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Maroc (Ratification: 1957)

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La commission prend note des informations fournies par le gouvernement relatives à l’article 26 du décret no 2-00-485 du 3 novembre 2000, qui permet aux condamnés d’être employés à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire à des travaux d’intérêt général, selon lesquelles ces travaux sont exécutés pour le compte de l’Etat ou des collectivités publiques et ne peuvent être accomplis au profit de particuliers ou de sociétés privées.

Articles 1 et 2, paragraphes 1, de la convention. 1.  Traite des personnes. Dans ses précédents commentaires, la commission a demandé au gouvernement de préciser les dispositions de la législation nationale permettant de poursuivre et de sanctionner les auteurs de traite des personnes en général – et pas uniquement les mineurs –, que ce soit pour leur exploitation sexuelle ou pour l’exploitation de leur travail. Se référant au rapport de la Rapporteuse spéciale sur les droits de l’homme des migrants de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies, qui invitait le gouvernement «à prendre conscience de la présence du phénomène de la prostitution et de l’exploitation des migrantes subsahariennes et à mettre en place des instruments adéquats visant la protection, l’assistance et la réhabilitation des victimes de la traite des êtres humains» (E/CN.4/2004/76/Add.3, paragr. 78), la commission a demandé des informations notamment sur les procédures judiciaires engagées contre les personnes responsables de la traite et sur la protection accordée aux victimes.

Dans son dernier rapport, le gouvernement se réfère aux dispositions du Code pénal qui incriminent la prostitution et le proxénétisme ainsi qu’à la loi no 02-03 relative à l’entrée et au séjour des étrangers au Royaume du Maroc, à l’émigration et l’immigration irrégulières. Le gouvernement évoque également la mise en place de mécanismes de coopération et de partenariats pour dissuader les mouvements migratoires clandestins (renforcement de la coopération bilatérale en matière judiciaire et entre les forces de l’ordre marocaines et leurs homologues des pays de destination; actions de sensibilisation menées par les médias et les ONG). Tout en prenant note de ces informations, la commission constate que la législation ne contient toujours pas de dispositions incriminant expressément la traite des personnes. Elle espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour adopter très prochainement la législation pertinente à cet égard. Il est en effet indispensable pour lutter efficacement contre ce phénomène de disposer d’une législation définissant spécifiquement les éléments constitutifs de la traite des personnes, tant à des fins d’exploitation de leur travail que d’exploitation sexuelle, l’incriminant et prévoyant des sanctions pénales dissuasives. La commission est par ailleurs consciente des difficultés rencontrées par le Maroc, pays traditionnel d’émigration, qui est devenu ces dernières années un pays de transit pour un flux migratoire important en provenance d’Afrique subsaharienne vers l’Europe. La commission souligne à cet égard qu’il est important de distinguer parmi les migrants en situation irrégulière ceux qui en raison de la situation de vulnérabilité dans laquelle ils se trouvent sont victimes de traite en vue d’exploitation de leur travail. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises pour identifier ces victimes, les inciter à s’adresser aux autorités pour dénoncer leur situation et leur garantir une protection. Prière également d’indiquer les activités de sensibilisation menées à cette fin auprès des autorités compétentes (force de l’ordre et autorités judiciaires) et les difficultés auxquelles ces dernières sont confrontées. Enfin, la commission souhaiterait que le gouvernement communique des informations sur les décisions de justice prononcées à l’encontre des personnes qui se livrent à la traite des personnes, en précisant la nature des sanctions imposées.

2. Liberté des fonctionnaires et des militaires de carrière de quitter leur emploi. En vertu des articles 77 et 78 du dahir du 24 février 1958 portant statut général de la fonction publique, la démission d’un fonctionnaire n’a d’effet que si elle est acceptée par l’autorité investie du pouvoir de nomination; en cas de refus, l’intéressé peut saisir la Commission administrative paritaire. Notant les critères pris en considération pour l’acceptation ou le rejet d’une demande de démission (nécessité du service et impossibilité de remplacer le fonctionnaire démissionnaire), la commission avait demandé au gouvernement de modifier la législation afin de limiter la possibilité de retenir un fonctionnaire dans son emploi aux cas exceptionnels de force majeure et de garantir la liberté des fonctionnaires de quitter leur service après un délai de préavis raisonnable. Dans son dernier rapport, le gouvernement indique que le ministère de la Fonction publique considère que l’article 77 tient compte de l’équilibre devant exister entre le principe de la continuité du service public et le droit des fonctionnaires d’abandonner leur travail. Il ajoute que les administrations publiques approuvent, dans la majorité des cas, les demandes de démissions déposées par les fonctionnaires. Enfin, dans le cadre de la réforme de l’administration publique, une opération a été lancée depuis janvier 2005 qui permet aux différentes catégories de fonctionnaires de profiter de «départs volontaires» en bénéficiant d’une indemnité de départ et en préservant leur droit à la retraite. La commission prend note de ces informations et du fait que 40 000 fonctionnaires ont bénéficié de cette opération. Elle prie le gouvernement de préciser si l’opération de départ volontaire se poursuit. La commission espère en outre que le gouvernement prendra les mesures nécessaires, par exemple en donnant des instructions en ce sens, pour que, dans les cas où une demande de démission est rejetée pour nécessité de service ou impossibilité de remplacer le fonctionnaire démissionnaire, l’autorité compétente s’assure que le fonctionnaire ne sera pas retenu dans son emploi au-delà d’un délai raisonnable. Prière de communiquer des informations sur le nombre de demandes de démission refusées et les circonstances à l’origine de ces refus.

3. Répression du vagabondage. Depuis de nombreuses années, la commission attire l’attention du gouvernement sur les termes de l’article 329 du Code pénal qui donnent une définition trop large du vagabondage et peuvent ainsi constituer un moyen de contraindre indirectement une personne au travail. Est considéré comme vagabond, et passible d’une peine d’emprisonnement d’un à six mois, «quiconque, n’ayant ni domicile certain ni moyens de subsistance, n’exerce habituellement ni métier ni profession, bien qu’étant apte au travail, et qui ne justifie pas avoir sollicité du travail ou qui a refusé le travail rémunéré qui lui était offert». La commission avait noté les informations communiquées par le gouvernement selon lesquelles cet article ne s’applique pas aux personnes sans emploi qui ont des moyens de subsistance, tels qu’un héritage, ni aux personnes qui ont recherché un emploi sans en trouver, mais s’applique aux seules personnes dont l’abstention de travailler est susceptible de déranger autrui, en particulier si elles sont sans domicile et dépourvues de moyens de subsistance. Elle avait également noté que parmi les condamnations pour vagabondage citées par le gouvernement aucune juridiction n’a condamné le simple délit de vagabondage. Il s’agissait au contraire de condamnations pour le délit de vagabondage accompagné d’autres délits, notamment les actes de violence, le vol ou la tentative de vol et la mendicité.

Dans son dernier rapport, le gouvernement indique que, suite à la visite d’une équipe multidisciplinaire du BIT au Maroc en décembre 2006, des contacts ont eu lieu entre le ministère du Travail et le ministère de la Justice pour examiner les différentes possibilités d’harmonisation de la législation nationale avec la convention. La commission prend note de ces informations et espère que ces premiers contacts permettront d’aboutir à l’adoption de mesures concrètes visant à modifier les dispositions de l’article 329 du Code pénal de manière à ce que la législation reflète la pratique suivie par les tribunaux et ne permette pas de qualifier de vagabonds et, par voie de conséquence, de punir les personnes sans domicile ni moyens de subsistance, n’exerçant aucun métier ou profession, qui ne troublent ni l’ordre ni la sécurité publics.

Article 2, paragraphe 2 c). Travail pénitentiaire. Prisonniers concédés à des entreprises privées ou des particuliers. En réponse aux commentaires de la commission, le gouvernement indique que l’administration pénitentiaire n’a jamais fait usage de la possibilité offerte par l’article 40 de la loi no 23-98 relative à l’organisation et au fonctionnement des établissements pénitentiaires. Cet article prévoit qu’aucun détenu ne peut travailler pour le compte d’un particulier ou d’un organisme privé autrement que sous le régime de la concession et en vertu d’une convention administrative fixant notamment les conditions d’emploi et de rémunération. La commission prend note de ces informations. Elle souhaiterait que, dans ses prochains rapports, le gouvernement indique si l’administration pénitentiaire a modifié ou envisage de modifier sa pratique en concluant des conventions administratives de cession de main-d’œuvre pénale avec des entreprises privées. Elle rappelle à cet égard que l’emploi de prisonniers par des personnes privées ne pourrait être compatible avec la convention que dans la mesure où les conditions dans lesquelles le travail s’exerce se rapprochent de celles d’une relation de travail libre.

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