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Observation (CEACR) - adoptée 2009, publiée 99ème session CIT (2010)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Paraguay (Ratification: 1967)

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Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention.Servitude pour dettes des communautés indigènes du Chaco.

Dans sa précédente observation, la commission a une nouvelle fois exprimé sa préoccupation face aux situations de servitude pour dettes qui sévissent dans les communautés indigènes du Chaco. La commission a pris note du rapport Servitude pour dettes et marginalisation dans le Chaco paraguayen élaboré dans le cadre de la coopération technique proposée par le projet «Travail forcé, discrimination et réduction de la pauvreté dans les communautés indigènes» menée par le Programme d’action spécial de l’OIT pour combattre le travail forcé (SAP-FL). Sur la base des recherches menées, le rapport confirme l’existence de pratiques de travail forcé et précise qu’un ensemble d’éléments conduit à la situation de travail forcé dans laquelle se trouvent de nombreux travailleurs indigènes dans les exploitations du Chaco: les travailleurs perçoivent des salaires inférieurs au minimum légal; ils disposent d’une quantité insuffisante de nourriture, et les produits alimentaires disponibles dans les plantations sont vendus à des prix excessifs du fait que les travailleurs n’ont accès à aucun autre marché et ne disposent pas d’autres sources de subsistance (pêche et chasse); les salaires sont partiellement ou intégralement versés en nature. Tout ceci conduit à l’endettement du travailleur, ce qui l’oblige, et dans de nombreux cas également sa famille, à rester travailler dans l’exploitation. Ce rapport a été validé lors de séminaires réalisés séparément avec les organisations d’employeurs et de travailleurs ainsi qu’avec les services de l’inspection du travail.

La commission a également pris note des commentaires formulés par la Confédération syndicale internationale (CSI) au sujet de la violation de l’article 47 du Code du travail selon lequel sont nuls les accords qui fixent un salaire inférieur au minimum légal et qui entraînent l’obligation directe ou indirecte d’acquérir des biens de consommation dans les magasins, commerces ou lieux déterminés par l’employeur. Selon les articles 231 et 176 du Code du travail, le paiement peut se faire en nature à hauteur de 30 pour cent du salaire, et les prix des articles vendus doivent correspondre à ceux pratiqués dans le village le plus près de l’établissement. La CSI a allégué que ces dispositions ne sont pas respectées dans la pratique, favorisant ainsi les conditions de l’endettement qui conduit à des situations de travail forcé auxquelles sont soumis les travailleurs indigènes du Chaco.

La commission a souligné que la servitude pour dettes relève du travail forcé tel que défini par la convention et constitue une grave violation de cette dernière. Elle a demandé au gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour combattre les pratiques au terme desquelles du travail forcé est imposé aux travailleurs indigènes du Chaco.

La commission prend note de la discussion qui a eu lieu au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence en 2008 et, en particulier, les conclusions de cette discussion dans lesquelles la Commission de la Conférence a fait part de sa préoccupation face aux conséquences que peut avoir pour ces travailleurs leur situation de paysans sans terre et face à leur situation de vulnérabilité. Elle a considéré que les mesures requises devaient être prises de toute urgence.

Mesures prises par le gouvernement

Programme par pays pour le travail décent. La commission note que, suite à une initiative tripartite, le gouvernement a souscrit avec l’OIT un programme par pays pour le travail décent dont l’un des objectifs est d’améliorer la mise en œuvre des normes internationales du travail à travers les programmes pour l’éradication du travail forcé et des pires formes du travail des enfants, le renforcement de l’inspection du travail et l’adéquation des lois nationales avec les conventions de l’OIT ratifiées.

Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé.Plan d’action relatif au travail forcé. La commission note que le ministère de la Justice et du Travail, par la résolution no 230 de mars 2009, a établi la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé. Le plan d’action élaboré par cette commission comprend, en plus des activités de sensibilisation des travailleurs et des employeurs, une campagne radiodiffusée de sensibilisation de la société dans son ensemble d’une durée d’un mois, ainsi qu’une activité de formation des inspecteurs du travail suivie de visites dans les établissements agricoles. Est également envisagée une recherche sur le thème des femmes indigènes et la discrimination. Par ailleurs, un bureau de la Direction du travail dans la localité de Teniente Irala Fernandez dans le Chaco a été créé.

La commission prend dûment note des actions entreprises par le gouvernement en vue de l’éradication des pratiques de travail forcé au sein des communautés indigènes du Chaco. Toutefois, si les mesures prises jusqu’alors constituent un premier pas, elles doivent être renforcées et aboutir à une action systématique, proportionnelle à la gravité du problème, si l’on souhaite y apporter une solution.

La commission espère que le gouvernement fournira des informations sur le mandat et le fonctionnement du bureau de Teniente Irala Fernandez, sur les mécanismes prévus pour recevoir les dénonciations de travail forcé (procédures, autorités compétentes, assistance juridique). Etant donné le rôle fondamental joué par les services de l’inspection du travail dans la lutte contre le travail forcé, la commission espère que le gouvernement communiquera des informations au sujet des activités menées par ces services et des mesures prises pour les renforcer.

La commission espère également que le gouvernement communiquera des informations sur le nombre de cas dans lesquels les services d’inspection ont constaté la violation des articles 47, 176 et 231 du Code du travail et elle renvoie aux commentaires formulés sur l’application de la convention (nº 95) sur la protection du salaire, 1949, ainsi que la convention (nº 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989.

Article 25.Sanctions pour exaction de travail forcé. La commission rappelle que, en vertu de l’article 25 de la convention, des sanctions pénales devront être imposées et strictement appliquées aux personnes qui auront été reconnues coupables d’avoir imposé du travail forcé. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour assurer l’application de l’article 25 de la convention, en communiquant des informations sur les dispositions de la législation nationale qui permettent de sanctionner les personnes qui imposent du travail forcé, ainsi que des copies des décisions de justice pertinentes.

Article 2, paragraphe 2 c).Travail imposé aux prisonniers en détention préventive. La commission note que le gouvernement n’a pas communiqué les informations demandées au sujet de la modification de l’article 39 de la loi no 210 de 1970 selon lequel les détenus ont l’obligation de travailler. L’article 10 de cette loi considère comme détenu non seulement la personne condamnée mais également celle soumise à des mesures de sûreté dans un établissement pénitentiaire. La commission a rappelé que les détenus qui n’ont pas fait l’objet d’une condamnation ne doivent pas être soumis à l’obligation de réaliser un quelconque travail.

La commission avait pris note de l’avant-projet de Code de procédure pénale, communiqué par le gouvernement avec son rapport de 2006. Les articles 127, 68 et 69 de ce projet, lus conjointement, prévoyaient l’obligation de travailler pour les détenus, définis comme toute personne condamnée à une peine privative de liberté suite à la décision définitive prononcée par le tribunal compétent. Si ces dispositions étaient adoptées, elles permettraient de donner effet à l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention, selon lequel un travail ou un service ne peut être exigé d’un individu qu’en vertu d’une condamnation prononcée par une décision de justice. La commission avait cependant relevé que l’article 34 de l’avant-projet prévoyait que «les dispositions relatives aux conditions de vie et aux normes de conduite du Titre III s’appliqueront aux prévenus dans la mesure où elles sont compatibles avec leur condition de prévenu, elles ne contredisent pas la présomption d’innocence et elles se révèlent plus avantageuses et utiles pour protéger la personnalité du prévenu». A cet égard, la commission avait constaté que les dispositions relatives au travail obligatoire des détenus sont comprises dans le Titre III, chapitre 7. Ces dernières pourraient donc en vertu de l’article 34 être applicables aux prévenus. Il serait par conséquent nécessaire, pour éliminer la possibilité d’imposer un travail aux personnes qui se trouvent en détention préventive, que cela soit expressément interdit, sous la réserve que le prévenu puisse travailler s’il le demande.

La commission espère que le gouvernement pourra dans son prochain rapport indiquer que la législation a été mise en conformité avec la convention et fournir une copie du Code de procédure pénale, dès qu’il aura été adopté.

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