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Observation (CEACR) - adoptée 2009, publiée 99ème session CIT (2010)

Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999 - Maroc (Ratification: 2001)

Autre commentaire sur C182

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Article 3 de la convention et Point V du formulaire de rapport. Pires formes de travail des enfants et application de la convention dans la pratique. Alinéas a) et d). Travail forcé ou obligatoire et travail dangereux. Travail domestique des enfants. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté les indications de la Confédération syndicale internationale (CSI) selon lesquelles le travail domestique des enfants, dans des conditions de servitude, est courant dans le pays, des parents vendant leurs enfants, parfois âgés de six ans seulement, pour qu’ils travaillent comme domestiques. La CSI avait également indiqué qu’environ 50 000 enfants, majoritairement des filles, travaillent comme domestiques. De ce nombre, environ 13 000 fillettes de moins de 15 ans sont employées comme servantes dans la ville de Casablanca; 80 pour cent d’entre elles viennent des zones rurales et sont analphabètes, 70 pour cent ont moins de 12 ans et 25 pour cent moins de dix ans. La commission avait noté que l’article 10 du Code du travail interdit le travail forcé. Elle avait en outre constaté que, en vertu de l’article 467-2 du Code pénal, le travail forcé des enfants de moins de 15 ans est interdit. La commission avait également noté qu’un projet de loi sur le travail domestique avait été adopté et était en cours de validation. Ce projet de loi fixe l’âge minimum d’admission à ce type d’emploi à 15 ans, établit les conditions de travail et prévoit les mesures de contrôle ainsi que les sanctions applicables.

La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle le projet de loi sur le travail domestique est toujours en cours d’approbation. Le gouvernement indique également que le dahir du 24 décembre 2004 fixant la liste des travaux dangereux sera actualisé au cours de l’année 2010 conformément à l’esprit de la convention (no 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999. La commission note également l’indication du gouvernement selon laquelle le ministère du Développement social, de la Famille et de la Solidarité (MDFS) a, en collaboration avec l’OIT/IPEC, organisé en 2008 un cycle de formation pour les ONG œuvrant dans le domaine de la protection de l’enfance dans les villes de Tahanaout, Fès, Safi, Casablanca, Kénitra, Khouribga, Taza et Agadir, identifiées comme étant des zones clés, relativement à l’offre et la demande du travail domestique des enfants, et dont l’objectif était le renforcement des capacités institutionnelles pour assurer une meilleure intervention dans la lutte contre le travail domestique des petites filles. Finalement, la commission note l’information du gouvernement selon laquelle le MDFS prévoit la réalisation d’une enquête sur la situation des petites filles domestiques à Casablanca au cours de l’année 2010.

Tout en prenant bonne note des mesures prises par le gouvernement, la commission doit à nouveau rappeler que, en vertu de l’article 3 a) et d) de la convention, le travail ou l’emploi dans des conditions assimilables à de l’esclavage ou dangereuses constituent des pires formes de travail des enfants et sont, aux termes de l’article 1, à éliminer de toute urgence. La commission prie donc instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que le projet de loi sur le travail domestique soit adopté de toute urgence. Elle exprime l’espoir que le dahir du 24 décembre 2004 fixant la liste des travaux dangereux sera actualisé de manière à inclure le travail domestique des enfants de moins de 18 ans dans des conditions assimilables à l’esclavage ou conditions dangereuses. En outre, la commission prie à nouveau le gouvernement de redoubler d’efforts et de prendre les mesures nécessaires, de toute urgence, pour assurer que les personnes qui ont recours au travail domestique des enfants de moins de 18 ans à titre de travail forcé, ou qui les emploient à des travaux dangereux, soient poursuivies et que des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives leur soient imposées. Elle prie enfin le gouvernement de fournir copie de l’enquête sur la situation des petites filles domestiques à Casablanca et de communiquer des informations sur l’application des dispositions s’appliquant à ces pires formes de travail des enfants, notamment des statistiques sur le nombre et la nature des infractions signalées, les enquêtes menées, les poursuites, les condamnations et les sanctions pénales appliquées.

Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces prises dans un délai déterminé. Alinéas a) et b). Empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants et les soustraire de ces pires formes, et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. Prostitution enfantine et tourisme sexuel. Dans ses commentaires précédents, la commission s’était dite préoccupée par la persistance de la prostitution enfantine et du tourisme sexuel impliquant de jeunes Marocains et immigrés, notamment des garçons, et ce malgré la modification du Code pénal de 2003 qui a introduit le crime de tourisme sexuel. La commission avait noté l’indication du gouvernement que, dans le cadre de la mise en œuvre du Plan national pour l’enfance (PANE) pour la décennie 2006-2016, une étude préliminaire sur la problématique de l’exploitation sexuelle des enfants avait été réalisée, au cours du mois de février 2007, en vue de l’élaboration d’une stratégie nationale pour la prévention et la lutte contre une telle exploitation.

La commission note l’information du gouvernement selon laquelle des unités de protection de l’enfance  à Casablanca et Marrakech ont été mises en place pour assurer une meilleure prise en charge médicale, psychologique et légale des enfants victimes de violence ou maltraitance, dont les enfants victimes d’exploitation sexuelle ou économique. La commission observe toutefois que le gouvernement ne fournit aucune information relative aux résultats de l’étude préliminaire sur la problématique de l’exploitation sexuelle des enfants, ni sur l’élaboration de la stratégie nationale pour la prévention et la lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants, préoccupation qui est également exprimée par le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes dans ses observations finales du 8 avril 2008 (CEDAW/C/MAR/CO/4, paragr. 22). Par conséquent, la commission prie le gouvernement de prendre des mesures immédiates et efficaces dans un délai déterminé pour assurer que la Stratégie nationale de prévention et lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants soit adoptée et que cette stratégie comprenne des mesures pour: a) empêcher que les enfants ne soient victimes de prostitution, notamment dans le cadre du tourisme sexuel; et b) prévoir une aide directe nécessaire et appropriée pour soustraire les enfants victimes de cette pire forme de travail des enfants et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les progrès réalisés à cet égard.

Alinéa d). Enfants particulièrement exposés à des risques. Travail domestique des enfants. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que, selon la CSI, les sévices physiques et sexuels dont sont souvent victimes les filles employées comme servantes ou «petites bonnes» sont l’un des problèmes les plus graves que rencontrent les enfants marocains. La commission avait, entre autres, pris note du Programme national de lutte contre le travail domestique des petites filles (INQAD), adopté dans le cadre du PANE.

La commission note les informations du gouvernement selon lesquelles, dans le cadre de son Plan stratégique de 2008-2012 et suite à la mise en œuvre du programme INQAD, le MSDF prévoit l’organisation de la deuxième campagne nationale de sensibilisation pour la lutte contre le travail domestique des petites filles, ainsi que l’élaboration de plans d’intervention régionaux. A cet effet, la commission note que, dans le cadre du Programme multisectoriel de lutte contre les violences fondées sur le genre par l’autonomisation des femmes et des filles au Maroc, mis en œuvre en collaboration avec le PNUD, l’OIT/IPEC a initié un programme d’action de lutte contre le travail domestique des filles dans la région de Marrakech Tensift-El Haouz pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010. Ce programme entend aider 1 000 enfants écoliers et écolières qui seront sensibilisés contre l’abandon scolaire; 100 filles âgées de moins de 15 ans écolières issues de familles très pauvres et présentant de grands risques d’abandon scolaire qui seront également sensibilisées; 30 filles âgées de moins de 15 ans qui seront retirées du travail domestique et réhabilitées et réinsérées socialement; 20 filles âgées de 15 à 17 ans qui seront retirées du travail domestique dont les conditions sont dangereuses et relèvent des pires formes de travail des enfants; et 50 filles domestiques âgées de 15 à 17 ans travaillant dans des conditions acceptables mais qui verront leurs conditions de vie et de travail améliorées. Tout en prenant bonne note des mesures prises par le gouvernement dans la lutte contre le travail domestique des enfants, la commission constate cependant que la gravité de ce fléau demeure très importante au Maroc. La commission prie donc le gouvernement de redoubler d’efforts pour protéger ces enfants, notamment contre l’exploitation économique et sexuelle, et le prie de continuer de communiquer des informations sur les progrès réalisés à cet égard, en terme du nombre d’enfants de moins de 18 ans prévenus ou retirés des pires formes de travail des enfants dans le secteur du travail domestique.

La commission soulève d’autres points dans une demande adressée directement au gouvernement.

[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 99e session et de répondre en détail aux présents commentaires en 2010.]

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