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Demande directe (CEACR) - adoptée 2010, publiée 100ème session CIT (2011)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - France (Ratification: 1981)

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Promotion de l’égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession. La commission se réfère à son observation dans laquelle elle prend note de l’amendement de l’article 1 de la Constitution, par la loi du 23 juillet 2008, selon lequel «la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales». Dans son rapport, le gouvernement indique que le taux d’emploi des femmes restait en 2004 inférieur de 11,5 points à celui des hommes et que le taux de chômage des femmes demeurait élevé. De plus, les femmes n’occupent que 25 pour cent des postes d’encadrement du secteur privé alors qu’elles représentent près de la moitié de la population active. La commission prend note à cet égard de la proposition de loi relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle actuellement en cours d’examen à l’Assemblée nationale et espère que cette loi sera bientôt adoptée et promulguée.

La commission note également que, dans son rapport concernant la Guadeloupe, le gouvernement indique que les inégalités entre hommes et femmes en matière d’accès au marché du travail sont persistantes et qu’il n’y a pas eu d’amélioration significative de la situation ces dernières années. Il en est de même en Guyane française où les services compétents constatent également la persistance d’inégalités entre hommes et femmes en matière d’emploi, malgré les actions menées par le service public de l’emploi régional.

La commission note que, dans sa délibération no 2009-237 du 29 juin 2009 relative à l’égalité entre les femmes et les hommes, la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité (HALDE) souligne que, malgré l’existence d’un cadre juridique renforcé, l’égalité entre hommes et femmes est encore loin d’être effective et formule un certain nombre de recommandations à destination des pouvoirs publics. La commission relève que, parmi ces recommandations, figurent notamment l’élaboration d’un dispositif législatif ou réglementaire définissant les mesures spécifiques destinées notamment à remédier aux inégalités de fait (actions positives) et permettant d’en assurer le développement ainsi qu’une réforme du congé parental pour assurer une meilleure répartition des responsabilités familiales entre les deux parents. La commission relève aussi que, selon la HALDE, les femmes sont encore mal informées sur les discriminations qu’elles peuvent subir et qu’il est nécessaire de mettre en œuvre des actions de sensibilisation qui doivent régulièrement faire l’objet d’évaluation.

La commission prend également note des informations sur le suivi et la mise en œuvre par les partenaires sociaux de l’accord interprofessionnel de 2004 relatif à la mixité et à l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, notamment de la conclusion d’un certain nombre d’accords et de conventions collectives. Elle relève toutefois que, selon le gouvernement, le bilan reste insuffisant car les accords ou conventions collectives concernés restent parfois limités au rappel des dispositions légales. La commission note à cet égard que la HALDE, dans sa délibération de 2009, insiste également sur le rôle des partenaires sociaux dans la mise en œuvre des droits sur l’égalité professionnelle entre hommes et femmes.

Compte tenu de ce qui précède, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les points suivants:

i)     les actions positives entreprises, en collaboration avec les partenaires sociaux, pour favoriser l’égalité d’accès des hommes et des femmes à l’emploi ainsi que leur impact sur l’emploi des femmes, y compris à des postes à responsabilités, et les mesures visant à lutter contre la ségrégation professionnelle de manière effective – y compris dans les départements et régions d’outre-mer;

ii)    les suites données aux recommandations formulées par la HALDE dans son rapport annuel de 2009, notamment dans la délibération no 2009-237, en matière d’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes;

iii)   les activités du Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, en particulier toute proposition ou recommandation formulée et, le cas échéant, les suites qui y ont été données;

iv)    la mise en œuvre de la loi relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle;

v)     les conventions collectives ou accords conclus récemment qui prévoient l’adoption et la mise en œuvre de mesures concrètes aux fins de l’égalité professionnelle.

Egalité de chances et de traitement des hommes et des femmes dans la fonction publique. La commission prend note des informations, y compris des données statistiques, fournies par le gouvernement en réponse à ses commentaires, notamment en matière de droit à la formation professionnelle et de reconnaissance des acquis de l’expérience professionnelle grâce aux dispositifs mis en place par la loi no 2007-148 du 2 février 2007 et l’accord du 21 novembre 2006 relatif à la formation professionnelle, et en matière de promotion interne. Elle constate cependant que, même si elle est en légère progression, la part des femmes dans l’encadrement supérieur dans la fonction publique de l’Etat reste très faible (16,3 pour cent en 2006). A cet égard, le gouvernement précise que divers facteurs peuvent expliquer la lente progression des femmes dans l’encadrement supérieur, mais que la difficulté principale réside dans les conditions de travail des agents nommés à ce type d’emploi et la difficulté de concilier vie professionnelle et vie familiale. Selon le rapport, certaines mesures ont été adoptées pour favoriser le maintien en activité des jeunes parents qui le souhaitent, telles que la participation aux frais de garde et l’incitation à la construction de crèches. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour intensifier les efforts entrepris pour promouvoir l’égalité entre hommes et femmes dans la fonction publique et encourager l’évolution professionnelle interne des femmes, notamment vers des postes dans l’encadrement supérieur, et de fournir des informations sur les progrès réalisés en la matière. Notant qu’une mission sur l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes dans la fonction publique a été confiée en octobre 2010 à une députée afin d’identifier les obstacles qui demeurent au sein des trois fonctions publiques en matière d’égalité professionnelle, en termes de déroulement de carrière comme de représentation féminine aux postes de décision et dans les instances de concertation, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les conclusions de cette étude et sur toute mesure de suivi prise ou envisagée.

Egalité d’accès des hommes et des femmes à la formation.En l’absence d’informations spécifiques sur ce sujet dans le rapport du gouvernement, la commission le prie à nouveau de fournir des informations sur les points suivants:

i)     les mesures prises au niveau des régions pour favoriser l’accès des femmes à l’ensemble des formations proposées et leur impact en matière d’égalité d’accès à la formation entre hommes et femmes;

ii)    les mesures prises par l’Etat pour assurer que les femmes bénéficiant de ces programmes de formation puissent ensuite accéder à des emplois en rapport avec leurs qualifications, et les résultats obtenus en la matière.

La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises au niveau local pour promouvoir l’égalité des hommes et des femmes en matière d’accès à la formation professionnelle en Guadeloupe, en Guyane française, à la Martinique et à la Réunion ainsi que sur tout bilan établi en la matière.

Discrimination fondée sur le sexe. Harcèlement sexuel. La commission note que la loi no 2008-496 du 27 mai 2008 précise que la discrimination inclut «tout agissement à connotation sexuelle, subi par une personne et ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement hostile, dégradant, humiliant ou offensant» (art. 11), ce qui correspondrait au harcèlement sexuel, sans que toutefois cette expression soit expressément reprise dans la loi. La commission observe en effet que la loi ne modifie pas directement la définition du harcèlement sexuel figurant à l’article L.1153-1 du Code du travail, à savoir «les agissements de harcèlement de toute personne dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d’un tiers». La commission craint que cette superposition de textes ne contribue pas à assurer la clarté juridique du dispositif de lutte contre le harcèlement sexuel au travail indispensable pour assurer aux travailleurs une protection pleine et entière contre cette pratique discriminatoire. La commission prie le gouvernement d’examiner la possibilité de prendre des mesures pour modifier la définition du harcèlement sexuel dans le Code du travail (art. L.1153-1) afin que soient couverts par la législation du travail non seulement le harcèlement sexuel qui s’apparente à un chantage sexuel (quid pro quo) mais également le harcèlement sexuel en raison d’un environnement de travail hostile. Le gouvernement est prié de fournir des informations sur toute mesure prise en ce sens. Par ailleurs, se référant à ses précédents commentaires sur l’application de la convention en Guyane française et à la Réunion, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute mesure prise pour prévenir ou lutter contre le harcèlement sexuel au travail, telles que des campagnes d’information ou de sensibilisation, ainsi que sur tout cas de harcèlement sexuel qui aurait été porté à la connaissance des services de l’inspection du travail ou des juridictions compétentes.

Discrimination fondée sur le sexe et la religion. La commission prend note de l’adoption de la loi no 2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public. Notant que la mise en œuvre de cette loi pourrait avoir un effet discriminatoire à l’égard des femmes de religion musulmane portant le voile intégral quant à leurs possibilités de trouver et d’exercer un emploi, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le nombre de femmes concernées par la loi no 2010-1192 et sur son application dans la pratique en ce qui concerne l’emploi et la profession.

Discrimination fondée sur la race, la couleur ou l’ascendance nationale. Gens du voyage. La commission note que, selon le rapport périodique de la France au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) en 2009, la population des gens du voyage est estimée en France à 300 000 personnes et que cette population rencontre de grandes difficultés d’ordre économique et social. Selon ce rapport, l’insertion professionnelle des gens du voyage est difficile sur le marché du travail compte tenu de leurs faibles qualifications. Le gouvernement indique également qu’ils souffrent de discrimination en matière d’emploi, de logement, d’éducation, de santé et de citoyenneté (CERD/C/FRA/17-19, 22 mai 2009, paragr. 95 et 96). La commission note qu’en réponse à ses précédents commentaires le gouvernement précise que la Commission nationale consultative sur les gens du voyage a essentiellement examiné, au cours de ces dernières années, la question de l’accueil et du stationnement des gens du voyage. En ce qui concerne l’accès à l’emploi, le gouvernement indique que, compte tenu du caractère non salarié de la plupart des activités exercées par les gens du voyage, certains dispositifs, tels que le statut d’autoentrepreneur ou le revenu de solidarité active (RSA) pour les non-salariés, sont susceptibles d’améliorer leur situation au regard de l’emploi mais qu’aucune donnée ne permet d’évaluer l’impact de ces mesures sur l’emploi des gens du voyage. La commission prend note de la mise en œuvre, entre 2002 et 2007, du projet CODIPE («Contre la discrimination, pour l’emploi») qui avait pour objectif l’insertion économique des gens du voyage par la reconnaissance des savoir-faire et le développement de nouvelles activités économiques et des activités de l’Association pour le droit à l’initiative économique en faveur des gens du voyage cofinancées par l’Etat. A la lumière de ce qui précède, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les points suivants:

i)     les mesures spécifiques prises ou envisagées pour promouvoir l’égalité de chances et de traitement des gens du voyage en matière d’emploi et de profession, notamment les mesures destinées à améliorer leur niveau de qualification en facilitant l’accès à l’éducation et en encourageant l’accès à la formation professionnelle, et à reconnaitre et valider leurs compétences professionnelles;

ii)    tout dispositif existant permettant d’évaluer l’impact de ces mesures sur l’insertion professionnelle et l’emploi des gens du voyage, y compris l’exercice d’activités indépendantes et, par conséquent, sur leur situation économique et sociale;

iii)   toute activité menée par la Commission nationale consultative sur les gens du voyage en vue de promouvoir l’égalité de chances et de traitement en matière d’emploi et de profession;

iv)    toute suite donnée aux recommandations concernant l’accès à l’emploi des gens du voyage, formulées en février 2008 par la Commission consultative des droits de l’homme.

Roms. La commission note que, dans les observations finales qu’il a formulées le 27 août 2010, le CERD s’est déclaré inquiet de la montée des manifestations et des violences à caractère raciste envers les Roms sur le territoire français. Le CERD a également fait part de sa préoccupation relative à la situation difficile dans laquelle se trouvent les Roms quant à l’exercice de leurs droits économiques, sociaux et culturels (CERD/C/FRA/CO/17-19, 27 août 2010, paragr. 14 et 15). La commission note également que des Roms, originaires de Roumanie et de Bulgarie, ont récemment fait l’objet de mesures d’éloignement collectives vers leur pays d’origine, dans le cadre d’une politique dite «d’aide au retour». La commission observe que l’adoption et la mise en œuvre de ces mesures largement médiatisées, qui visaient plus particulièrement un groupe ethnique, peuvent avoir pour effet de renforcer les stéréotypes et préjugés dont ils sont déjà victimes. La commission prie instamment le gouvernement de prendre toute mesure appropriée pour lutter contre la discrimination à l’égard des Roms et promouvoir le respect et la tolérance entre toutes les composantes de la population. Elle le prie de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées, en collaboration avec les organisations représentant les Roms, pour assurer l’accès à l’éducation des enfants roms ainsi que l’accès à l’emploi, y compris à l’emploi indépendant, et à la formation professionnelle des hommes et des femmes roms.

Inspection du travail. La commission se félicite du fait que l’égalité professionnelle entre hommes et femmes a fait l’objet d’une campagne nationale de contrôle de l’inspection du travail en 2008 et que, dans ce cadre, un guide de contrôle ainsi que divers outils méthodologiques ont été élaborés et mis à disposition des inspecteurs du travail. Elle observe toutefois qu’aucune action n’a été entreprise en 2008 par les services de l’inspection du travail de la Martinique et que, selon le rapport du gouvernement, les inspecteurs du travail de Saint-Pierre-et-Miquelon n’ont pas été formés aux contrôles en matière de discrimination. Compte tenu de la persistance de la discrimination au travail, la commission incite le gouvernement à continuer de renforcer la capacité des inspecteurs du travail en matière de lutte contre la discrimination en leur permettant de bénéficier de formations appropriées et en les dotant de moyens adéquats, notamment dans les départements et régions d’outre-mer. Prière de continuer à fournir des informations sur les activités concrètes menées par les inspecteurs du travail en matière de lutte contre la discrimination et de promotion de l’égalité dans l’emploi et la profession sur l’ensemble du territoire.

Application. La commission prend note avec intérêt des activités de la HALDE présentées dans ses rapports annuels de 2008 et 2009. Elle note que la HALDE a reçu 10 545 réclamations en 2009, soit 21 pour cent de plus qu’en 2008. La commission constate que 48,5 pour cent des réclamations concernent l’emploi, deux tiers dans le secteur privé et un tiers dans le secteur public (75 pour cent concernant le déroulement de carrière et 25 pour cent le recrutement). Elle relève à cet égard que l’emploi constitue l’une des trois priorités de la HALDE qui développe dans ce domaine des actions de prévention et de lutte contre la discrimination ainsi que des activités de promotion de l’égalité depuis sa création, en 2005. Parmi ces initiatives, la commission relève la conclusion, en 2009 et 2010, de conventions de partenariat entre la HALDE et les parquets généraux de plusieurs grandes villes afin d’harmoniser leurs actions de lutte contre la discrimination et de rendre plus efficace le traitement des plaintes et des réclamations. Enfin, la commission prend note du projet de loi relatif au Défenseur des droits qui prévoit l’intégration de la HALDE, ainsi que celle du Défenseur des enfants, du Médiateur de la République et de la Commission nationale de la déontologie de la sécurité, au sein d’une institution unique: le Défenseur des droits.

La commission espère que le gouvernement veillera à ce que le Défenseur des droits, dont le mandat est beaucoup plus large que celui de la HALDE, dispose des moyens et des ressources nécessaires, tant sur le plan humain que matériel, pour lui permettre de répondre au nombre croissant de réclamations alléguant des discriminations liées à l’emploi, de mener des actions de sensibilisation et des activités de recherche, de formuler des recommandations auprès des autorités et de promouvoir l’égalité professionnelle auprès des acteurs concernés. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les attributions définitives et les moyens à la disposition du Défenseur des droits en matière de lutte contre la discrimination dans l’emploi et de promotion de l’égalité professionnelle.

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