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Observation (CEACR) - adoptée 2010, publiée 100ème session CIT (2011)

Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999 - Tchad (Ratification: 2000)

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La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente, qui était conçue dans les termes suivants:

Article 3 de la convention. Pires formes de travail des enfants. Alinéa a). Toutes les formes d’esclavage ou pratiques analogues. Recrutement forcé d’enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés. Se référant à ses commentaires précédents, la commission a noté que, selon l’article 14 de l’ordonnance no 01/PCE/CEDNACVG du 16 janvier 1991 portant réorganisation des forces armées tchadiennes (ordonnance no 1 du 16 janvier 1991), l’âge de recrutement pour les volontaires est de 18 ans et pour les appelés de contingent de 20 ans.

La commission a noté que, selon le Rapport du Secrétaire général des Nations Unies sur les enfants et le conflit armé au Tchad du 7 août 2008 (S/2008/532 pour la période allant de juillet 2007 à juin 2008), la situation politique, militaire et en matière de sécurité dans le pays est très sérieuse en raison du conflit armé interne entre les forces armées tchadiennes et les groupes rebelles armés, de la présence, à l’est du pays, de groupes rebelles étrangers, des raids transfrontières des milices Janjawid et des tensions interethniques. La commission a noté que, selon le rapport du Secrétaire général, le gouvernement tchadien et les trois principaux groupes rebelles, à savoir l’Union des forces pour la démocratie et le développement (UFDD), le Rassemblement des forces pour le changement (RFC) et la Concorde nationale tchadienne (CNT), ont signé, le 25 octobre 2007, un accord de paix qui prévoyait le cessez-le-feu immédiat. Cependant, malgré la signature de cet accord, les combats se sont poursuivis et toutes les parties au conflit ont continué de recruter et d’utiliser des enfants dans le conflit.

La commission a noté qu’il ressort du rapport du Secrétaire général que le recrutement forcé et l’utilisation d’enfants dans le conflit au Tchad sont liés à l’aspect régional du conflit. Les Toroboros ou groupes armés soudanais liés au gouvernement tchadien recrutent des enfants dans deux camps de réfugiés, à Tréguine et à Breidjing, pendant la saison des pluies. De plus, le recrutement se pratique aussi de façon intensive en fonction des besoins au Darfour. Ainsi, le Mouvement rebelle soudanais JEM (Justice and Equality Movement) continue de recruter dans les camps de réfugiés, notamment celui d’Oure Cassoni (Bahai), et dans les environs. Selon les informations contenues dans le rapport du Secrétaire général, entre 7 000 et 10 000 enfants seraient associés avec les forces et les groupes armés. La commission a noté que le Groupe de travail sur les enfants dans les conflits armés, dans ses conclusions de décembre 2008 (S/AC.51/2008/15), s’est inquiété que toutes les parties au conflit continuent de recruter et d’utiliser des enfants et a demandé de prendre des mesures pour traduire les coupables en justice et faire échec à l’impunité.

La commission a constaté que, depuis de nombreuses années, le Tchad est en proie à une instabilité et que la situation dans le pays demeure fragile. La commission a constaté également que, malgré le fait que l’ordonnance no 1 du 16 janvier 1991 prévoit que l’âge de recrutement pour les volontaires est de 18 ans et pour les appelés du contingent de 20 ans, le recrutement d’enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés continue dans la pratique. A cet égard, elle a relevé qu’aucune sanction n’est prévue en cas de violation de cette disposition. La commission a exprimé sa profonde préoccupation face à la situation actuelle, d’autant plus que la persistance de cette pire forme entraîne d’autres violations des droits de l’enfant, tels l’enlèvement, la mort et les violences sexuelles. Elle a rappelé au gouvernement que, en vertu de l’article 3 a) de la convention, le recrutement forcé ou obligatoire d’enfants de moins de 18 ans en vue de leur utilisation dans des conflits armés est considéré comme l’une des pires formes de travail des enfants et que, en vertu de l’article 1 de la convention, les Etats Membres doivent prendre des mesures immédiates et efficaces pour assurer l’élimination des pires formes de travail des enfants, et ce de toute urgence. La commission prie le gouvernement de prendre des mesures de toute urgence pour arrêter, dans la pratique, le recrutement forcé d’enfants de moins de 18 ans par les forces et groupes armés et procéder à la démobilisation immédiate et complète de tous les enfants. Se référant au Conseil de sécurité qui, dans sa résolution no 1612 du 26 juillet 2005, rappelle «la responsabilité qu’ont tous les Etats de mettre fin à l’impunité et de poursuivre quiconque est responsable de génocide, de crimes contre l’humanité, de crimes de guerre et d’autres crimes odieux commis sur la personne d’enfants», la commission prie instamment le gouvernement de prendre des mesures immédiates pour assurer que des enquêtes et des poursuites des contrevenants soient entreprises et que des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives soient imposées aux personnes reconnues coupables d’avoir recruté et utilisé des enfants de moins de 18 ans dans des conflits armés. Elle prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard.

Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces prises dans un délai déterminé. Alinéas b) et c). Aide directe pour soustraire les enfants des pires formes de travail des enfants et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale, y compris l’accès à l’éducation de base gratuite ou à la formation professionnelle. Enfants ayant été enrôlés et utilisés dans un conflit armé. Faisant suite à ses commentaires précédents, la commission a pris note que, selon le Rapport du Secrétaire général des Nations Unies sur les enfants et le conflit armé au Tchad du 7 août 2008 (S/2008/532), le gouvernement tchadien a, le 9 mai 2007, signé un accord avec l’UNICEF visant à assurer la libération et la réintégration durable de tous les enfants soldats associés à des groupes armés dans le pays. Selon le rapport du Secrétaire général, 512 enfants soldats ont été remis à l’UNICEF depuis la signature de l’accord, qui a fourni un appui dans cinq centres de transit. A ce jour, 265 enfants sont rentrés volontairement chez eux ou ont fait l’objet d’un regroupement familial, 220 ont été placés dans des écoles et 85 travaillent. La plupart des enfants démobilisés étaient associés à des groupes armés non gouvernementaux. Très peu d’enfants associés aux forces armées tchadiennes ont été libérés. Selon le rapport du Secrétaire général, des négociations sont en cours pour placer les enfants démobilisés qui sont toujours dans les centres dans des établissements de formation professionnelle et leur confier des activités rémunératrices. Des ONG partenaires de l’UNICEF œuvrent actuellement au programme de réintégration. En outre, le début encourageant des activités de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR) au Tchad devrait permettre la libération de quelque 2 500 autres enfants associés avec les forces et groupes armés.

La commission a noté également que, selon le rapport du Secrétaire général, le Tchad a entrepris de libérer en priorité les enfants associés aux groupes armés en détention. De plus, il a décidé qu’une équipe de travail interministérielle serait établie pour coordonner la réintégration des enfants et en assurer l’efficacité. Le Comité des droits de l’enfant, dans ses observations finales de février 2009 (CRC/C/TDC/CO/2, paragr. 71), a instamment invité le gouvernement à prendre sans délai les mesures qui s’imposent pour favoriser les contacts entre les groupes armés présents au Tchad et l’ONU en vue d’encourager la démobilisation des enfants et d’empêcher le recrutement d’enfants, notamment dans les camps de réfugiés. A cet égard, le Comité des droits de l’enfant a instamment invité le gouvernement à élargir la portée du programme de désarmement, de démobilisation et de réinsertion en insistant tout particulièrement sur la démobilisation et la réinsertion des filles.

La commission a pris note des mesures prises par le gouvernement pour démobiliser et réintégrer les enfants soldats, notamment grâce à la collaboration du gouvernement avec l’UNICEF. Elle a constaté toutefois que la situation actuelle du pays reste préoccupante. La commission prie donc le gouvernement de redoubler d’efforts et de continuer sa collaboration avec l’UNICEF et d’autres organisations afin d’améliorer la situation des enfants victimes de recrutement forcé qui sont utilisés dans les conflits armés. En outre, la commission prie le gouvernement de prendre des mesures dans un délai déterminé pour que les enfants soldats soustraits des forces et groupes armés bénéficient d’une assistance appropriée en matière de réadaptation et d’intégration sociales, y compris en les réintégrant dans le système scolaire ou dans une formation professionnelle, le cas échéant. Elle prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard.

En outre, la commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

La commission espère que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un proche avenir.

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