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Cas individuel (CAS) - Discussion : 1989, Publication : 76ème session CIT (1989)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord (Ratification: 1949)

Autre commentaire sur C087

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Un représentant gouvernemental a rappelé qu'en tant que membre fondateur de l'OIT, son pays continuait à apporter son soutien aux objectifs et aux activités de l'Organisation. Il a ensuite souligné que les travailleurs du service public jouissent dans son pays d'une plus grande liberté d'organisation, de négociation et de grève que les agents de la fonction de la plupart des autres pays et qu'à cet égard ils bénéficient du même traitement que les travailleurs des autres secteurs économiques. Par contre, certains cas portés à l'attention de la présente commission ont montré que le droit d'association était parfois totalement ou partiellement refusé aux agents de la fonction publique.

Son gouvernement apprécie la qualité du travail accompli par la commission d'experts qui assume la tâche complexe et difficile d'examiner l'état d'application des conventions à la lumière des législations nationales, en tenant compte des multiples facteurs socio-économiques et structures institutionnelles propres à chaque pays. La commission d'experts est une éminente autorité en droit dont les avis sont respectés. Toutefois, dans certaines situations complexes, les opinions divergent, même entre les experts et au sein d'organisations démocratiques et sensées - parmi lesquelles l'OIT occupe sans nul doute une position de phare: son gouvernement comprend pourquoi la commission est parvenue à ces conclusions, mais pense qu'il est possible d'interpréter les choses différemment.

Les mesures prises par son gouvernement à l'égard du personnel du Centre gouvernemental des communications de Cheltenham (GCHQ) n'ont été dictées que par le souci de la sécurité nationale. Bien que cet organisme ne fasse pas partie du Bureau des affaires étrangères et du Commonwealth, il s'agit en fait d'un des services hautement confidentiels de sécurité du système de défense et de sécurité du Royaume-Uni. Ce service apporte un concours de première importance aux forces armées britanniques et alliées, y compris une surveillance constante de toutes les formes d'activité armée hostile. L'orateur a déclaré que son gouvernement déplorait que la commission d'experts ait rejeté l'argument selon lequel la dérogation prévue à l'article 9 de la convention no 87 pour les forces armées s'appliquait aux employés du GCHQ. Les fonctions accomplies par le personnel de ce service sont très comparables à celles qu'assument les forces armées et son gouvernement comprend mal que cette dérogation ne s'applique pas au GCHQ. En conséquence, cette situation s'apparente fortement aux cas limites que la convention no 151 est censée clarifier. Le GCHQ doit fonctionner sans interruption si l'on veut satisfaire aux exigences de la sécurité nationale. Or d'importantes interruptions d'activité ont été causées par des mouvements de grève, et 10000 journées de travail ont été perdues entre 1979 et 1981. Son gouvernement a pris des mesures dictées par la ferme conviction qu'il était inadmissible qu'un service secret du pays puisse pâtir d'un mouvement de grève national.

En élaborant ses conventions, l'OIT a tenu compte de la spécificité des situations relatives à la sécurité et à la défense nationales; la convention no 151 contient une clause dérogatoire particulière pour ceux qui assument des fonctions de service secret ou confidentiel. Lorsqu'il a entrepris son action à l'encontre du GCHQ, le gouvernement était convaincu de s'en tenir à la lettre et à l'esprit de ces instruments. Le texte de la convention no 87 peut et doit être examiné conjointement avec celui des conventions no 98 et no 151. Son gouvernement a cru comprendre que ce sont les débats qu'a suscités l'application de la convention no 87 à la fonction publique qui ont conduit à l'adoption de la convention no 151 - instrument qui porte précisément sur ce sujet - laquelle reprenait dans l'ensemble les dispositions de la convention no 87. Il lui semble que le préambule de la convention no 151 indique qu'elle a été adoptée pour faire suite aux deux conventions précitées. Les conventions nos 87 et 151 sont intimement liées en ceci que le pouvoir conféré par l'article 12) de renoncer à appliquer les garanties prévues par cette convention serait sans utilité ni effet pratique si le même pouvoir ne s'appliquait pas aux dispositions comparables de la première convention. Ce qui signifie qu'il appartient aux gouvernements de fixer par le moyen de lois et de règlements nationaux la mesure dans laquelle la protection prévue par la convention s'applique aux travailleurs de la fonction publique assumant des fonctions hautement confidentielles: c'est précisément ce que le gouvernement a fait.

L'orateur a souligné que la commission d'experts dans son observation a noté que les moyens de contrôle de l'OIT ont toujours adopté un point de vue contraire à la position du gouvernement britannique. L'orateur a précisé cependant que cette même commission d'experts a reconnu dans le passé (dans son rapport de 1985) que l'interprétation du Comité de la liberté syndicale ne constituait pas forcément la seule interprétation acceptable et définitive de ces instruments. La commission d'experts était donc sur le point de reconnaître les difficultés que soulevait l'interprétation de la corrélation entre ces deux conventions. Par ailleurs, la Cour d'appel britannique, après avoir examiné de près cette question, a conclu que ces conventions devaient être considérées ensemble et que l'article 12 de la convention no 151 avait préséance sur la convention no 87. Le gouvernement du Royaume-Uni n'estime donc pas que les mesures prises à l'encontre du personnel du GCHQ constituent une violation de la convention no 87.

Son gouvernement a pris note du regret exprimé par la commission d'experts que 13 employés du GCHQ aient été licenciés pour avoir refusé de quitter le syndicat de leur choix et déploré vivement que de telles mesures aient été nécessaires bien qu'elles n'aient pas été prises à la légère. L'orateur a rappelé dans quel contexte ont eu lieu ces licenciements qui s'inscrivent dans la ligne de l'évolution de la situation au sein du GCHQ depuis la dernière réunion de la présente commission, en 1988. Depuis l'annonce faite, le 25 janvier 1984, des modifications qui allaient être apportées aux conditions d'emploi du personnel du GCHQ, toute latitude a été laissée aux petits groupes d'employés qui sont restés affiliés à un syndicat national d'accepter les nouvelles conditions d'emploi ou, lorsque cela était possible, d'être réaffectés vers un autre emploi du service public. La très grande majorité des employés du GCHQ (98 pour cent) a accepté ces nouvelles conditions. Presque tous les autres ont soit été mutés de leur propre gré à d'autres postes du service public qui leur permettaient de rester affiliés à leur syndicat ou soit donné leur démission, bénéficiant de la généreuse compensation prévue en cas de licenciement. Le 15 juillet 1988, le gouvernement a adressé une lettre aux 18 autres employés qui avaient refusé de quitter leur syndicat national ou s'étaient affiliés à une autre organisation après avoir accepté de se conformer aux nouvelles conditions de service pour leur demander s'ils étaient toujours membres d'un syndicat national et pour leur rappeler que, si tel était le cas, ils étaient en infraction vis-à-vis des conditions d'emploi prescrites. Le 29 septembre 1988, le gouvernement a annoncé qu'il était disposé à trouver d'autres emplois aux quelques employés réfractaires, et à mettre un terme à la relation de travail de ceux qui se refusaient à prendre une décision en leur offrant une compensation de salaire - c'est-à-dire ceux qui avaient refusé de quitter leur syndicat ou d'être mutés - lesquels n'avaient guère de chances de trouver un autre emploi, mais aussi qu'il allait prendre des sanctions à l'encontre de ceux qui s'étaient réaffiliés - c'est-à-dire ceux qui après avoir accepté les nouvelles conditions d'emploi s'étaient immédiatement réaffiliés - si ces derniers refusaient de mettre délibérément fin à leur emploi au GCHQ et de recevoir la compensation. A cette époque, le gouvernement était toujours disposé à permettre à ceux qui acceptaient ces nouvelles conditions de conserver leur emploi au GCHQ, et même souhaitait vivement qu'il en soit ainsi. A la fin du mois d'octobre 1988, le personnel du GCHQ comptait encore 17 syndicalistes, dont 10 avaient refusé de quitter leur organisation et 7 s'étaient réaffiliés. Sur ces 17 employés, 3 ont été mutés à d'autres emplois du service public, un "réaffilié" a accepté une retraite anticipée, et les 13 restants ont été licenciés. De ces 13 licenciés, les 7 qui avaient refusé de quitter leur organisation ont reçu une généreuse compensation, quant aux 6 autres qui s'étaient réaffiliés, ils ont reçu, dans un geste de bonne volonté, six mois de salaire au lieu du préavis de licenciement. Le personnel du GCHQ ne compte plus aujourd'hui de membres de syndicats nationaux mais une organisation du personnel a été créée qui jouit de nombreux droits accordés à une organisation syndicale, à l'exception du droit de grève. Plus de la moitié des employés du GCHQ en font partie.

Le gouvernement du Royaume-Uni prend acte du voeu formulé par la commission d'experts qu'il entame de nouvelles négociations avec les syndicats nationaux intéressés. En réalité, des discussions ont eu lieu après que le gouvernement eut fait connaître le 25 janvier 1984 les nouvelles conditions d'emploi, au cours desquelles les syndicats se sont déclarés tous prêts à considérer qu'un accord de "non-interruption du service" fournirait les garanties appropriées. Ces propositions de caractère limité, qui repoussaient à des négociations ultérieures l'identification des questions sur lesquelles porterait cet accord, ont été étudiées avec le plus grand soin par le gouvernement, qui s'est vu contraint de les rejeter, car elles ne constituaient pas une garantie suffisante que des pressions conflictuelles ne risquent de soulever des difficultés à l'avenir. Cette conclusion a trouvé sa confirmation dans le fait que le projet d'accord présenté par le Conseil des syndicats du service public avait été peu après dénoncé par deux grands syndicats au cours de leur assemblée annuelle de 1984. Les syndicats ont officiellement rejeté toute négociation destinée à préparer le terrain en vue de conclure un accord de renoncement à la grève au GCHQ. Le gouvernement reconnaît que les syndicats ont immédiatement précisé qu'ils pouvaient revenir sur leur position à ce sujet, mais cette éventualité elle-même a fortifié le gouvernement dans sa position. Il est dans l'intérêt du pays de veiller à l'avenir au fonctionnement ininterrompu du GCHQ, et, de toute évidence, cette continuité ne peut être assurée si les accords conclus par les syndicats des employés peuvent être dénoncés à tout moment à la suite d'un changement de cap dans l'action syndicale. Le gouvernement est également conscient qu'au Royaume-Uni très rares sont les syndicats qui sont disposés à signer des accords de renoncement à la grève, et qu'un syndicat qui choisirait délibérément de souscrire à un accord aux termes duquel l'arbitrage et non la grève mettrait fin à tous les conflits risquerait de se trouver dans une position difficile par rapport à l'ensemble du mouvement syndical. Ainsi, le Syndicat de l'électricité, de l'électronique, des télécommunications et de la plomberie (EETPU) a été exclu du Congrès des syndicats britanniques (TUC) en septembre 1988 pour avoir conclu avec deux entreprises privées un accord "isolé" de renoncement à la grève. Le gouvernement estime donc qu'en ce qui concerne le cas particulier du GCHQ et les intérêts de défense nationale qu'il sert, entamer de nouvelles négociations avec les syndicats en cause ne servirait à rien.

Si, de l'avis du gouvernement, les traditions et les valeurs du mouvement syndical britannique s'opposent à ce que ce soient à nouveau les syndicats nationaux qui représentent les intérêts du personnel de cet établissement de défense, les mesures qu'il a prises ne concernent que le GCHQ et ne constituent en aucune manière une attaque contre les syndicats ou, plus largement encore, contre l'organisation ou la représentation syndicale collective. Un autre moyen de satisfaire les voeux de la commission d'experts aurait été de soumettre les postes du GCHQ à l'autorité des forces armées; si les travailleurs assumant des tâches comparables au sein du même établissement avaient été reclassés de cette manière, la situation n'aurait posé aucun problème au regard de la convention: cela aurait été sans doute une solution de facilité mais, de l'avis de son gouvernement, une telle solution ne pouvait être envisagée ni en principe ni en pratique. En principe, les employés du GCHQ sont des fonctionnaires liés par les contrats d'emploi de la fonction publique; les affecter différemment aurait porté atteinte à leurs statuts et à leurs droits fondamentaux et ils s'y seraient certainement, et à juste titre, opposés avec énergie. Il s'ensuit que si un tel changement devait survenir, il prendrait beaucoup de temps. Quoi qu'il en soit, les employés du GCHQ se distinguent par des qualifications très particulières et très rares et un tel changement poserait des problèmes pratiques pour ainsi dire insurmontables. Le gouvernement en a donc déduit que des raisons de principe et de pratique rendaient un tel changement impossible.

En conclusion, le gouvernement a insisté sur le fait que les mesures prises à l'encontre du GCHQ ne constituaient par une atteinte à la liberté d'association ou à la liberté syndicale mais relevaient du seul souci de garantir les intérêts de la défense nationale. Depuis le moment où, en 1984, il a annoncé cette action, le gouvernement a tout fait pour donner satisfaction à la petite minorité des employés qui avait refusé de souscrire aux nouvelles conditions d'emploi. Le résultat n'est certes pas parfait, en l'occurrence il témoigne de la volonté du gouvernement de mettre en oeuvre tous les moyens raisonnables et possibles pour rester fidèle à l'esprit et à la lettre des conventions de l'OIT. Pour que les conventions puissent produire leur effet, leur interprétation ne doit pas être trop restrictive mais offrir des solutions appropriées, raisonnables et réalistes.

Le membre travailleur du Royaume-Uni a déclaré qu'il s'agissait d'un cas grave qui mettait en jeu un des principes fortement enraciné. Il avait espéré une amorce de progrès ou au moins un geste de conciliation, mais il semble que le gouvernement ne se soit jamais départi de sa position et répété les mêmes arguments chaque fois que ce cas est porté devant la présente commission ou le Comité de la liberté syndicale.

Il a écouté les arguments qui ont été avancés bien que ceux-ci ne soient pas nouveaux. Premièrement, en ce qui concerne la déclaration du gouvernement selon laquelle les fonctionnaires en général jouiraient au Royaume-Uni d'une plus grande liberté d'organisation et de négociation que ceux de la plupart des pays, l'orateur a répondu que les droits garantis aux agents de la fonction publique en général au Royaume-Uni sont ceux prévus dans les conventions que le gouvernement avait adoptées: ni plus ni moins. Si le gouvernement du Royaume-Uni est meilleur que celui des autres pays, c'est parce que ces pays violent les conventions concernées et en particulier le droit d'organisation. En refusant aux employés du GCHQ l'exercice de ce droit, le gouvernement s'aligne sur ces pays.

Deuxièmement, concernant la corrélation entre les conventions nos 87, 98 et 151, la commission d'experts a déjà répondu aux arguments du gouvernement. La convention no 151 n'a pas préséance sur les importants articles de la convention no 87. Chaque fois que le gouvernement a eu recours à ces arguments, la commission d'experts les a rejetés.

Troisièmement, répondant à la déclaration du gouvernement, selon laquelle les employés du GCHQ devraient en raison de la nature de leur travail être traités de même manière que les membres de la police et des forces armées, l'orateur a concédé qu'ils exercent des fonctions très particulières mais souligne qu'à juste titre cet argument a été rejeté par la commission d'experts; tous ces travailleurs sont affiliés à des syndicats nationaux depuis 30 à 40 ans; ils étaient alors, comme ils le sont toujours, des fonctionnaires. Le représentant gouvernemental a souligné lui-même qu'il n'était pas possible de les enrôler comme membres des forces armées puisqu'ils n'en font pas partie et ne peuvent être considérés comme tels.

Quatrièmement, quant à dire que les syndicats de la fonction publique n'accepteraient pas de renoncer au droit de grève parce que. lorsque cette proposition avait été avancée à une certaine époque, elle avait été rejetée par deux syndicats à l'assemblée de leurs congrès suivants, l'orateur a souligné qu'il y avait une grande différence entre la recherche d'une solution dans un congrès sur un cas hypothétique et une proposition réelle d'accord contraignant; un tel accord n'a jamais été soumis aux sessions des congrès syndicaux, étant donné qu'aucune offre de cette nature n'a jamais été faite par le gouvernement aux syndicats concernés. De fait, il y a à peine un ou deux mois, des discussions ont eu lieu au sein des syndicats du service public qui se sont déclarés disposés à négocier un véritable accord qui prévoirait des recommandations positives de ne pas interrompre le travail du GCHQ. Le gouvernement britannique devrait donc satisfaire la demande de la commission d'experts et chercher à négocier un tel accord de non-recours à la grève; si le mouvement syndical britannique refuse de négocier ou de conclure un accord. cela donnera au gouvernement un argument qu'il pourra présenter en toute confiance à la commission. On n'a pas demandé au gouvernement britannique de faire quelque chose d'inhabituel, seulement d'entamer des négociations.

Cinquièmement, en ce qui concerne la générosité du gouvernement dans la compensation faite aux travailleurs du GCHQ qui avaient été licenciés ou transférés obligatoirement. on ne saurait trop souligner qu'aucun prix ne peut compenser pour un déni à la liberté syndicale et au droit d'organisation. Le gouvernement a déjà montré sa soi-disante générosité lorsqu'il a offert au personnel du GCHQ 1000 livres à chacun d'eux pour qu'ils quittent leur syndicat. Les principes posés par la convention no 87 ne sont pas à vendre et ne peuvent être achetés à aucun prix.

Sixièmement, à propos des 10 000 journées de travail perdues, l'orateur a précisé qu'il ne s'agissait pas de 10 000 jours de travail perdus pour le GCHQ. Il ne peut pas révéler le nombre d'employés qui ont cessé leur travail au GCHQ, car il s'agit d'une information secrète qu'il n'est pas disposé à révéler, mais plusieurs milliers d'heures ont été perdues chaque semaine lorsqu'une large proportion du personnel est retourné à la maison le week-end. Ceci remet la prétention du gouvernement à sa juste place. Quoi qu'il en soit, l'enjeu pourrait prendre la forme de cette intéressante question: puisque les mouvements de grève ont eu lieu en 1979 et 1981, et que le gouvernement a attendu 1984 pour réagir, était-il à ce point urgent, pour la sécurité du pays, d'intervenir quand on avait laissé s'écouler un temps aussi long?

Enfin, lorsque le gouvernement invoque les jugements prononcés par les tribunaux britanniques et les Cours européennes, il est vrai que le gouvernement peut avoir eu gain de cause sur des points de détail technique, mais en l'occurrence la Constitution de l'OIT prévoit qu'un seul tribunal a qualité pour interpréter les conventions: la Cour internationale de Justice. Le représentant gouvernemental semble prétendre, d'une manière quelque peu perverse, qu'étant donné que la possibilité existe de porter les conclusions de la commission d'experts devant la Cour, leur ambiguïté doit donc exister. Le gouvernement du Royaume-Uni a mis en doute l'opinion de la commission d'experts: c'est donc lui qui crée l'ambiguïté Il faut rappeler, à ce propos, que la commission d'experts a invité le gouvernement, s'il désirait contester son interprétation, de le faire devant la Cour internationale de Justice. Le gouvernement britannique ne l'a pas fait et, de l'avis de l'orateur, n'est pas près de le faire car ses conseillers juridiques lui ont déjà laissé prévoir la réponse qu'il obtiendrait.

On observera que la commission d'experts a, dans ses observations finales, interpellé le gouvernement dans les termes les plus vifs ce qu'elle demande, c'est en fait des négociations. La présente commission ne peut recommencer chaque année à discuter du même problème et, de ce fait, est en droit d'obtenir une réponse à la simple question de savoir si oui ou non le gouvernement entamera des négociations avec les syndicats comme la commission d'experts le lui a recommandé? La réponse peut tenir en un mot. La commission n'a plus qu'à attendre la réponse du gouvernement pour former son jugement.

Les membres travailleurs ont tenu à faire observer que toutes les informations pertinentes sur ce cas avaient déjà été apportées à la présente commission. dans ses rapports de 1987 et 1988, par le Comité de la liberté syndicale, par la commission d'experts - ces trois organes s'étant tous trois prononcés sur cette question - et finalement par le représentant gouvernemental du Royaume-Uni dans sa présente déclaration. Il n'ont par conséquent rien à ajouter sur le fond. Bien qu'il ait été décidé, d'un commun accord, de borner la discussion à la première partie des observations de la commission d'experts concernant le Centre gouvernemental des communications de Cheltenham (GCHQ), les membres travailleurs observent avec préoccupation, à la lumière, des observations de la commission d'experts et des débats qui ont eu lieu ces dernières années, qu'il ne s'agit pas là d'un cas isolé, mais qu'il s'inscrit dans le cadre d'une série de mesures injustifiées prises à l'encontre des syndicats pour entraver leur activité normale, et notamment la négociation collective. Les arguments invoqués par le représentant gouvernemental sont en contradiction avec les observations de la commission d'experts et du Comité de la liberté syndicale au sujet de la restructuration systématique de la législation des relations de travail. Ce cas ne relève pas seulement de la convention no 151 mais aussi de la convention no 87 et soulève le problème de la liberté d'association et de négociation collective des fonctionnaires. La convention no 151 a pour but de compléter et de clarifier la convention no 87, et non de la remplacer. La liberté d'association et de négociation collective des fonctionnaires pose encore de graves difficultés dans ce pays.

Quant à la prétendue nécessité de prendre des mesures à 1,encontre du GCHQ, ils s'étonnent, à l'instar du membre travailleur du Royaume-Uni, que le gouvernement ait attendu 1984 pour changer le statut de ces fonctionnaires, alors que les événements sur lesquels on se base se sont produits en 1979 et 1981. Il est préoccupant que le gouvernement ait pris des mesures aussi graves que de procéder à des licenciements pendant que la procédure devant les organes de contrôle de l'OIT était en cours.

Sans pour autant faire usage de la possibilité d'un recours à la Cour internationale de Justice, le gouvernement refuse de négocier et de tenir compte des commentaires des organes de contrôle de l'OIT. Il est inquiétant qu'une sorte d'association interne des employés du GCHQ ait pu voir le jour alors que l'existence d'un syndicat normal est contestée Faut-il en déduire que ce type d'association met moins en danger la sécurité nationale qu'un syndicat traditionnel? Le patriotisme des fonctionnaires disparaît-il lorsqu'ils s'organisent?

Les membres travailleurs constatent avec regret que le gouvernement reste sur ses positions et se refuse à négocier: il s'agit donc d'un cas très sérieux. Ils veulent espérer que l'on ne soit pas parvenu à un point de non-retour.

Les membres employeurs ont rappelé que ce cas avait déjà été examiné par la présente commission à deux reprises - la première fois en 1985 - et que le gouvernement et les membres travailleurs restaient sur des positions antagonistes. Les membres employeurs déclarent qu'ils n'ont pourtant pas l'intention de s'ériger en arbitres. L'affaire concerne un Centre de communications dont les employés assument des fonctions comparables aux membres des forces armées et le gouvernement n'est pas disposé à tolérer des grèves qui pourraient avoir de graves répercussions; position qui semble justifiée. Les discussions et les négociations paritaires n'ont pas eu d'effet et le renoncement à tout affiliation syndicale proposée par le gouvernement a été refusé par 17 employés, dont 13 ont été réaffectés ou licenciés. Il s'agit là d'un cas très spécial qui ne met pas en cause l'économie du Royaume-Uni, que ce soit dans son ensemble ou même dans ses parties. C'est un cas bien spécifique qui ne saurait se reproduire en d'autres circonstances, car sa complexité provient aussi de la difficulté qu'il y a à faire la distinction entre les fonctionnaires et les membres des forces armées. Cette difficulté a des prolongements juridiques.

Lorsque, en 1985, la commission d'experts s'est pour la première fois penchée sur ce cas, elle a observé, dans son rapport, que la question débordait le cadre de la convention no 87 et que la situation était très complexe. C'était la relation entre les conventions nos 87 et 151 qui était en cause, et la commission d'experts a estimé alors qu'elle n'était pas en mesure de prendre une décision. Entre-temps, les experts ont modifié leur position. L'allusion faite à la Cour internationale de Justice à cette époque était légitime, puisque, selon la Constitution, elle est seule habilitée à trancher sur un problème d'interprétation. La question est de savoir qui doit porter l'affaire devant la Cour internationale de Justice. Est-ce qu'un gouvernement peut simplement s'adresser par lettre à la Cour internationale de Justice? Ce serait beaucoup trop simple.

Le fait que ce problème n'ait pu encore être résolu et qu'aucune solution ne soit en vue s'explique par les relations difficiles entre le gouvernement et les syndicats au Royaume-Uni. Ce cas devrait être replacé dans le contexte de la partie de l'observation de la commission d'experts qui ne sera pas discutée cette année.

Avant même que ne paraisse le rapport de la commission d'experts, les membres employeurs ont entendu les syndicats se plaindre du gouvernement en alléguant qu'il s'immisçait constamment dans les négociations collectives et qu'il violait les droits syndicaux. Les points qui sont évoqués actuellement peuvent être contestés, et devront être réexaminés par la commission 1,année prochaine. Les membres employeurs espèrent que la commission d'experts se penchera à nouveau sur ces questions d'ici là.

Ces relations difficiles entre les syndicats et le gouvernement entravent la recherche d'une solution. La question de savoir si ce centre de communications pourrait être rattaché aux forces armées est une question très difficile à trancher car elle relève de la législation nationale, mais théoriquement ce serait une solution envisageable. Quant à la question de savoir si cette solution est la meilleure, les membres employeurs ne sauraient se prononcer.

Quoi qu'il en soit, eu égard à la divergence des points de vue, il faudrait préciser dans les conclusions que ce n'est pas la liberté d'association dans ce pays qui est mise en cause, mais la situation des travailleurs d'un secteur particulier qui pose de grandes difficultés. Cette question ne concerne en rien l'économie nationale dans son ensemble, ni ses liens avec la liberté syndicale. Il faut admettre que pendant un certain temps des positions sont parfois inconciliables, surtout quand il s'agit d'un secteur aussi particulier. Les membres employeurs ont rappelé que certains cas - trop nombreux - avaient parfois été discutés pendant 20 ans sans solution ni progrès. Le cas dont la commission est saisie est un cas assez récent qui a été discuté à trois reprises pendant un laps de temps relativement court. A l'heure actuelle aucune solution ne semble être en vue, et il faut en prendre acte tout en le déplorant.

Le membre travailleur de la Suède parlant au nom des membres travailleurs du Danemark, de la Finlande, de la Norvège et de la Suède a déclaré qu'un des principes fondamentaux de l'OIT était d'avoir un système de contrôle efficace, mais que ce contrôle perdait toute utilité si les Etats Membres ne respectaient pas l'avis exprimé par les organes de contrôle. La commission d'experts et la présente commission pensent examiner avec objectivité, indépendance et impartialité les cas qui leur sont soumis. Jusqu'à présent, leur opinion avait force exécutoire pour les Etats Membres, la Cour internationale de Justice étant là pour trancher en dernier ressort. Si ce principe n'est plus respecté, c'est toute l'action de l'OIT qui est sapée. En général, toutefois, l'interprétation des organes de contrôle n'est pas mise en cause car les Etats Membres le plus souvent se rangent à leur avis, comme le montre le fait que, depuis la fondation de l'OIT, seul un cas ait été porté devant la Cour internationale de Justice. Dans le cas présent, en dépit des injonctions unanimes des organes de contrôle, treize employés du GCHQ ont été licenciés pour avoir refusé de quitter le syndicat de leur choix. Le droit de s'affilier à un syndicat ou de participer à ses activités est un droit fondamental de l'homme. Il est donc de la plus haute importance qu'un des membres les plus en vue de l'OIT ne passe pas outre aux observations de ces deux commissions en faisant appel à la Cour internationale de Justice pour trancher. Tout pas en avant sur cette voie risquerait de mettre en difficulté les organes de contrôle et de porter atteinte à la procédure tout entière. L'orateur invite donc instamment le gouvernement à reprendre les négociations avec les syndicats en vue de trouver une solution qui satisfasse aux exigences de la convention car, sinon, il leur restera plus qu'une solution: faire appel à la Cour internationale de Justice.

Le membre travailleur de la Pologne a déclaré que son organisation se réjouissait de l'occasion qui lui était offerte de prendre à nouveau la parole au BIT après une absence de huit ans et a exprimé sa satisfaction de voir qu'elle n'avait pas été oubliée. L'orateur a souligné que les employés du GCHQ étaient des syndicalistes de longue date, et dans plusieurs cas depuis 40 ans; pendant toutes ces années, leur affiliation n'avait jamais soulevé de difficulté et leur loyauté n'a pas été mise en doute. Bien que les organes de contrôle de l'OIT en soient arrivés aux mêmes conclusions et que les syndicats aient fait preuve de beaucoup de souplesse et de bonne volonté en vue de conclure un accord, tout semblait prouver que le gouvernement avait malheureusement repoussé toute possibilité d'accord négocié. La crédibilité de l'OIT de laquelle le syndicat "Solidarité" a eu si souvent à se féliciter, risque d'être compromise si les organes de contrôle ne parviennent pas à adopter une stratégie cohérente. Après tant d'années de discussions sur ce cas, devant la présente commission, il est nécessaire, dans l'intérêt de la crédibilité de cette commission, d'insister sur la gravité de ce cas pour les travailleurs du Royaume-Uni et du monde entier. Le cas du GCHQ met en cause un principe fondamental: la liberté d'association et la dignité de l'homme.

Le membre employeur de la Suède a déclaré à propos des observations de la commission d'experts qu'il ne mettait pas en doute son impartialité ou son indépendance, mais sa qualité pour juger de ce cas. La commission d'experts, à son avis, semble avoir oublié les principes de base qui régissent l'interprétation des traités entre Etats, si l'on observe dans les rapports de ces dernières années le nombre croissant de cas où son interprétation est allée trop loin: l'orateur la met donc en garde contre cette tendance. Revenant au cas présent, il a exprimé l'espoir que la commission reconsidérerait sa position à ce sujet. A son avis, le Centre gouvernemental de communications de Cheltenham (GCHQ) devrait être assimilé aux forces armées ou à la police, et seule la Cour internationale de Justice a qualité pour décider de l'interprétation à donner aux conventions; or il n'y a que deux voies possibles: ou bien la Conférence ou la majorité du Conseil d'administration peuvent demander un avis à la Cour internationale de Justice, ou bien un gouvernement autre que celui du Royaume-Uni, ou un délégué travailleur, peut déposer une plainte constitutionnelle. Le Conseil d'administration peut alors établir une commission d'enquête dont les conclusions peuvent faire l'objet d'un recours devant la Cour internationale de Justice. Cette procédure existe déjà depuis cinq ans et n'a jamais été utilisée. En conséquence, la commission devrait cesser d'examiner ce cas, laissant le soin aux travailleurs, s'ils le désirent, de déposer une plainte constitutionnelle, ce qui pourrait entraîner la saisine de la Cour internationale de Justice.

Le membre travailleur de la République fédérale d'Allemagne a déclaré que le plus inquiétant dans les propos du représentant gouvernemental était qu'il puisse penser que les syndiqués puissent constituer une menace pour la sécurité du pays ou pourraient le devenir. On retrouve là l'ostracisme de la fin du siècle dernier à l'égard du mouvement syndical tout entier. Les membres du GCHQ défendent leurs propres intérêts économiques et sociaux et doivent, au même titre que tous les autres salariés, avoir le droit de s'associer librement et de négocier collectivement. Le gouvernement n'a pas tenu compte des observations, des commentaires, des suggestions et des demandes des organes de contrôle de l'OIT. Il s'agit d'un cas grave qui sape l'autorité des procédures de contrôle. Pour qu'un dialogue soit fructueux, il ne faut pas que l'un parle et que l'autre n'écoute pas. La présente commission ne peut accepter que des pays ignorent purement et simplement ses conclusions, car cela remettrait en question son autorité.

Le membre travailleur des Pays-Bas s'est déclaré profondément préoccupé des conséquences que pourrait avoir ce cas sur le système de contrôle de l'OIT, notamment à la lumière des dernières observations des membres employeurs. A ses yeux, la phrase essentielle de la déclaration gouvernementale est la suivante: "Nous comprenons que la commission d'experts ait pu aboutir à de telles conclusions, mais nous voyons les choses différemment et cela devrait être notre droit." En 1978, il y a déjà eu, au sein de la présente commission, une discussion entre les représentants gouvernementaux du Royaume-Uni et de l'URSS sur le même sujet. Au représentant gouvernemental de l'URSS qui défendait alors le point de vue du gouvernement britannique d'aujourd'hui, son adversaire rétorquait que, si la commission acceptait cette position. c'était toute la procédure de contrôle de l'OIT qui en pâtirait. Lorsque, par le passé, les divergences de vues ont persisté pendant vingt ans, la commission a toujours réagi en exprimant ses préoccupations dans un paragraphe spécial. La question essentielle est ici de savoir si la présente commission fait siennes les observations de la commission d'experts sur ce cas, qui reprennent celles qui avaient été exposées dans les différents rapports de ces dernières années. Au cours des deux dernières années, la présente commission a, dans l'ensemble, toujours partagé les vues de la commission d'experts. Cela pose donc le problème suivant: la commission d'experts a-t-elle modifié son interprétation sur cette convention, notamment en ce qui concerne le cas présent? Ce n'est pas le cas.

Le membre travailleur des Etats-Unis, commentant les propos du représentant gouvernemental selon lesquels il ne servirait à rien de réentamer des négociations avec les syndicats intéressés,a déclaré que cette affirmation le préoccupait beaucoup, car cela revenait à fermer la porte à toute possibilité de résoudre le problème par la consultation, bien que les syndicats soient disposés à réenvisager la possibilité d'accéder aux voeux du gouvernement en signant un accord de renoncement à la grève. Les difficultés juridiques que soulève ce cas sont telles que le seul arbitre habilité en fin de compte à trancher est la Cour internationale de Justice. Son intention n'est pas de contester l'argument du gouvernement selon lequel les tribunaux britanniques auraient statué qu'il devait y avoir amalgame des conventions nos 151 et 87; il émet cependant de sérieux doutes sur le fait que les tribunaux britanniques aient indiqué par la même occasion qu'il n'y avait pas d'autres recours possibles pour parvenir à une solution ou à un compromis sur une éventuelle clause de renoncement à la grève dans un accord entre le gouvernement et les syndicats. A aucun moment, le représentant gouvernemental n'a fait état d'un quelconque abandon de la procédure normale de négociation, réexamen et renégociation si cela est nécessaire, utilisée pour résoudre un problème grave; au contraire, le gouvernement britannique semble rester sur ses positions, fidèle aux principes fondamentaux qu'il a toujours défendus. En conséquence, la présente commission ne peut qu'être préoccupée par un refus aussi catégorique de reprendre les négociations alors que le syndicat s'est déclaré disposé à négocier la question même qui est à l'origine des préoccupations du gouvernement dans ce cas particulier.

Le membre employeur des Etats-Unis, répondant à la déclaration du membre travailleur des Pays-Bas, a déclaré qu'à son avis on mettait trop de hâte à se prononcer sur un cas, en fait, récent. Le problème, à son avis, relevait davantage de la forme que du fond, étant donné que, semble-t-il, les employés du GCHQ assumaient des fonctions essentiellement militaires. Si, eu égard à leurs fonctions, on les avait classés dans la catégorie des "militaires", aucun problème ne se serait sans doute posé; le fait qu'on ne les ait pas définis comme tels semble changer la face du problème pour la commission d'experts. L'orateur a également déclaré qu'on se trouvait en face d'un double problème. D'abord, comme l'ont souligné les membres employeurs, on pouvait se poser la question de savoir si, à la lumière des observations formulées par la commission d'experts en 1985, l'opinion de la commission d'experts avait évolué et changé. Deuxièmement, comme l'a relevé le membre employeur de la Suède, on peut se demander si, oui ou non, la commission d'experts a poussé trop loin son interprétation de cette convention particulière ou l'a mal interprétée. Ces problèmes n'ont rien de commun avec les débats qui ont eu lieu à la fin des années soixante-dix et au début des années quatre vingt, lesquels portaient en fait sur le degré d'application des instruments et cherchaient à déterminer si l'on pouvait tolérer les différences d'application, compte tenu de l'approche essentiellement différente de certains gouvernements sur des questions politiques, sociales et économiques.

Le membre travailleur des Pays-Bas, répondant à l'orateur précédent, est revenu sur deux points. Il souhaite d'abord apporter quelque éclaircissement sur ce qu'il a dit précédemment: si la présente commission s'est rangée pendant un certain nombre d'années à l'avis de la commission d'experts, on ne peut expliquer le désaccord d'aujourd'hui que parce que la commission d'experts aurait modifié son interprétation. Deuxièmement, il a expliqué les critiques qu'il avait formulées lors de son intervention sur le cas néerlandais. Ces critiques portaient sur le fait que les syndicats néerlandais avaient demandé pendant plusieurs années à la commission d'experts de leur donner son interprétation, laquelle s'était fait attendre pendant plusieurs années.

Le représentant gouvernemental du Royaume-Uni s'est engagé à communiquer toutes ces observations à son gouvernement. Il a complété sa précédente déclaration en expliquant qu'étant donné que le Royaume-Uni a un système fonde sur la Common law et non sur le droit civil, qu'en réalité et en pratique, premièrement les fonctionnaires du Royaume-Uni jouissaient d'une plus grande liberté d'association que ceux de la plupart des autres pays. Deuxièmement, il ne s'agissait pas ici de la liberté d'association en général mais d'un cas très particulier, à savoir un établissement qui joue un rôle de première importance dans la défense nationale. Troisièmement, les représentants des syndicats suggèrent aujourd'hui pour la première fois depuis quatre ans la possibilité d'un accord de renonciation à la grève, l'orateur pense que le gouvernement n'en a pas entendu parler. Quatrièmement, il n'a jamais été dans l'intention du gouvernement britannique de mettre en doute la loyauté des employés du GCHQ ou celle des syndicats. Quoi qu'il en soit, les syndicats nationaux se sont servis du cas des employés du GCHQ pour faire pression sur le gouvernement lors des négociations nationales dans la fonction publique. Leur action est peut-être légitime, mais elle nuit à la crédibilité des syndicats en ce qui concerne le cas particulier et la situation unique de cet établissement: cela est inquiétant et fâcheux. L'orateur a encore souligné que ce n'était pas la liberté d'association dans son ensemble qui était mise en cause mais le cas exceptionnel d'un établissement qui assumait des fonctions très spécifiques; l'action entamée par le gouvernement n'avait rien d'antisyndical, mais était dictée uniquement par le souci de préserver les intérêts de la sécurité nationale. Lors de la dernière réunion du Conseil d'administration. le nouveau membre travailleur du Comité de la liberté syndicale a souligné qu'il était important de distinguer entre ce qu'il appelait des "idioties de la bureaucratie" et des violations monstrueuses des droits de l'homme". Le gouvernement n'estime pas qu'il y a eu violation de la convention no 87, mais si la présente commission devait en juger autrement, l'orateur exprime l'espoir que sa faute soit mise en compte de l'incurie bureaucratique Les membres travailleurs ayant évoqué certaines conclusions particulières, l'orateur exprime le souhait que la présente commission les examinera avec le plus grand soin et la plus grande clarté avant de les faire siennes. Tirer des conclusions de ce genre sur des questions qui ne relèvent pas des droits fondamentaux de l'homme amoindrirait la portée des sanctions que peut infliger l'OIT. La présente commission doit se garder des doubles normes et veiller à préserver l'universalité des normes de l'OIT.

Les membres travailleurs ont proposé que les conclusions soient consignées dans un paragraphe spécial du rapport général de la commission car, bien qu'il s'agisse d'un cas important qui avait déjà été discuté à plusieurs reprises, le gouvernement n'avait pas entamé de négociations avec les organisations syndicales intéressées et la situation n'avait pas progressé.

Les membres employeurs soulignent que la commission n'a pas discuté des questions législatives et que celles-ci ne devraient donc pas être mentionnées dans les conclusions; s'il en est fait mention, l'opinion dissidente des employeurs devra également être évoqués. La proposition de consigner des conclusions dans un paragraphe spécial est inacceptable: il s'agit d'une question juridique complexe, que seule la Cour internationale de Justice est habilitée à trancher en dernier ressort; il faut également savoir qui prendra l'initiative d'un appel à la Cour. Par conséquent, la situation n'est pas aussi claire que certains intervenants l'ont parfois affirmé. Il ne s'agit pas d'un cas typique. Heureusement, l'existence et la portée de la liberté syndicale dans ce pays ne sont pas en jeu; il s'agit simplement d'un cas individuel et marginal qui mérite qu'on s'en occupe en tant que tel et qui est aujourd'hui discuté pour la troisième fois. A de nombreuses reprises, un débat s'est poursuivi pendant plus de vingt ans sur une question de monopole syndical prévu par la législation qui privait tous ces travailleurs de la liberté syndicale. Il se pose donc un problème d'égalité de traitement et de ce fait un paragraphe spécial ne peut être accepté dans le présent cas.

Les membres travailleurs ont demandé qu'un vote nominal ait lieu pour décider si le cas devait faire l'objet d'un paragraphe spécial.

Le membre gouvernemental de la Tchécoslovaquie, parlant au nom d'un certain nombre de pays socialistes, a déclaré qu'il ne souhaitait pas résoudre le problème par le vote. Néanmoins, s'il devait y avoir vote, la complexité des problèmes soulevés réclamerait que l'on prévoie un temps de réflexion; il demandait en conséquence que le vote soit repoussé à plus tard, en formulant l'espoir que les membres travailleurs et les membres employeurs seraient parvenus entre-temps à s'entendre.

Le membre gouvernemental des Etats-Unis s'est demandé s'il convenait d'aller aussi loin dans ce cas. Il a estimé qu'il ne s'agissait pas ici de savoir si le Royaume-Uni était un pays développé ou en développement et que s'il y avait eu violation notoire de la liberté syndicale, cela méritait évidemment un paragraphe spécial. Ce cas était vraiment très spécial. Il craignait qu'un vote à ce sujet ne pût affecter la bonne volonté et le consensus qui étaient si importants pour le travail de la commission.

Le membre gouvernemental de la France a demandé que, si l'on devait voter, il soit donné aux membres la possibilité de fournir des explications de vote.

Après la proclamation des résultats du vote, certains membres gouvernementaux ont fourni une explication de vote.

Un membre gouvernemental de la Suède, s'exprimant au nom des cinq pays nordiques, a déclaré que les gouvernements de ces pays souscrivent aux conclusions adoptées sur ce cas par la présente commission, mais ils ont voté contre un paragraphe spécial parce qu'ils souhaitent conserver leur signification particulière aux paragraphes spéciaux qui, selon eux, devraient continuer à être réservés aux cas les plus graves.

Un membre gouvernemental de la République fédérale d'Allemagne a expliqué le "non" de son gouvernement en notant que le vote ne portait pas sur le fait de savoir si le Royaume-Uni a violé ou non la convention: le vote portait plutôt sur les principes fondamentaux régissant les travaux de la présente commission, à savoir le dialogue et le consensus. Procéder à un vote est contraire au consensus et ne contribue pas à élargir le dialogue, qui est recherché dans ce cas en particulier par les membres travailleurs.

Un membre gouvernemental du Portugal a déclaré qu'il a voté contre à cause des doutes qui entourent l'interprétation de la situation. Son gouvernement pense que ce cas devrait faire l'objet d'une analyse juridique approfondie; la présente commission ne devrait pas prendre une décision qui, de par sa nature exceptionnelle, devrait être considérée comme finale. En outre, dans d'autres cas où il existait des doutes sur l'interprétation d'une situation, des décisions autres que celle proposée dans ce cas ont été prises; cela empêchait de mentionner le cas du Royaume-Uni dans un paragraphe spécial du rapport.

Un membre gouvernemental de l'Australie a indiqué qu'il n'était pas en faveur de l'inclusion de ce cas dans un paragraphe spécial pour les raisons suivantes: la présente commission recherche traditionnellement le consensus. L'approche adoptée dans le présent cas est préoccupante. Son gouvernement a pris note avec intérêt de la discussion et des circonstances particulières et uniques qui entourent ce cas. Il estime qu'il pourrait y avoir infraction à la convention sur le plan technique. Le gouvernement du Royaume-Uni n'a fait aucune démarche pour traiter les questions soulevées par la commission d'experts et n'éprouve apparemment pas le besoin d'en entreprendre. Le gouvernement australien appuie les conclusions de la commission d'experts. Il encourage le gouvernement du Royaume-Uni à entreprendre de nouvelles négociations avec les syndicats en cause afin de chercher à résoudre la question en conformité avec ses obligations au titre de la convention. Cependant, les paragraphes spéciaux n'ont été utilisés dans le passé que dans les cas de violation flagrante des droits de l'homme, circonstances qui ne s'appliquent pas à ce cas. Au stade actuel, un paragraphe spécial constituerait une réponse disproportionnée.

Les membres travailleurs ont déclaré ne pas regretter le résultat du vote en dépit de la tristesse que leur cause le fait de ne pas avoir pu parvenir à un consensus avec le groupe des employeurs, comme c'est le cas normalement. Ils ont souhaité clarifier la signification des paragraphes spéciaux qui ne contiennent pas de jugement. Ces paragraphes ont pour but uniquement d'attirer l'attention sur les problèmes importants qui doivent être soulignés et d'inviter les gouvernements et les organisations d'employeurs et de travailleurs à s'efforcer de surmonter les difficultés. Ils se sont référé à la conviction du groupe des travailleurs dans l'indépendance, l'impartialité et de l'objectivité de la commission d'experts et à la grande importance qu'ils attachent au Comité de la liberté syndicale. Ils ont déclaré que les normes et le système de contrôle existent tant pour les pays industrialisés que pour les pays en développement; bien que dans les pays industrialisés les problèmes n'aient pas la même dimension que dans les pays pauvres, dès lors qu'il existe des difficultés sérieuses, particulièrement en relation avec les normes fondamentales, telles que la liberté syndicale, les membres travailleurs considèrent que l'attention doit être attirée également sur ces problèmes. Ils ont expliqué qu'ils ont proposé un paragraphe spécial: premièrement, parce qu'ils croient que toutes les possibilités de dialogue et de conciliation à l'intérieur du pays n'ont pas été épuisées; deuxièmement, parce que 13 travailleurs ont été licenciés pendant qu'était en cours une procédure devant le Comité de la liberté syndicale à cause de la fidélité de ces travailleurs à leur organisation syndicale; et troisièmement. pour insister et pour inviter le gouvernement du Royaume-Uni à ne pas fermer la porte et à s'ouvrir à la négociation. Ils se sont déclarés surpris de la faible différence dans le résultat du vote et satisfaits de la solidarité totale du groupe des travailleurs, solidarité qu'ils considèrent d'une importance historique.

Un membre gouvernemental de l'Equateur a expliqué qu'il avait voté avec regret en faveur de l'inscription du Royaume-Uni, dans un paragraphe spécial avec l'espoir que cela inciterait d'autres pays à réfléchir à la tendance qui consiste à singulariser les situations de petits pays, situations qui sont parfois le résultat de pressions politiques extérieures. Il s'est déclaré satisfait qu'un vote démocratique, en relation avec le cas de Royaume-Uni, ait montré que les principes d'équité ne sont pas toujours violés.

Un membre gouvernemental des Etats-Unis d'Amérique a déclaré qu'il était lamentable que la situation se soit à ce point polarisée. Son gouvernement se demande si cette question méritait d'être soumise à un vote. L'oratrice a exprimé l'espoir que la présente commission pourra désormais travailler, de manière positive et constructive, sur la base de la bonne volonté et du consensus. Son gouvernement a voté contre un paragraphe spécial parce que son usage devrait être réservé à des violations persistantes et graves des conventions ratifiées. Le cas du Royaume-Uni ne répond pas à ces critères. Son gouvernement croit fermement en l'application universelle et uniforme des normes de l'OIT sans considération de l'orientation politique et du niveau de développement économique. A son avis, ce vote ne portait pas sur le fait qu'il y aurait ou non des normes différentes, selon les cas, mais en faveur ou contre l'abaissement des normes que la présente commission applique pour décider si un cas doit ou non être mentionné dans un paragraphe spécial. Elle a déclaré que son gouvernement n'était pas disposé à modifier le critère servant à déterminer si un cas doit ou non être inscrit dans un paragraphe spécial. Elle considère qu'un autre cas discuté récemment devant la présente commission ne méritait pas non plus de paragraphe spécial, étant donné que le gouvernement en question avait pris des mesures en vue d'une meilleure application d'une convention ratifiée.

Le membre gouvernemental de la France a déclaré avoir voté "non" pour des raisons tenant essentiellement à la "jurisprudence" de la présente commission. Les pratiques très anciennes de travail de la commission permettent d'avoir une position constante et objective, que les pays soient grands ou petits, industrialisés ou en voie de développement. Conformément à la tradition, le paragraphe spécial doit être appliqué quand un pays présente une double caractéristique: d'abord que le cas ait été examiné depuis longtemps sans progrès et ensuite que le cas présente une très grande gravité largement liée à la violation des droits de l'homme. Il faut remettre chaque examen d'un paragraphe spécial en perspective, c'est-à-dire relativiser et comparer. Il ne semble pas que le cas du Royaume-Uni présentait la double caractéristique d'un paragraphe spécial. L'orateur a exprimé l'espoir qu'on en revienne au consensus, qui est la règle normale de fonctionnement de la présente commission.

Un membre gouvernemental de l'Uruguay, en expliquant son vote en faveur d'un paragraphe spécial. a déclaré qu'il s'est basé sur les faits objectifs décrits dans l'observation de la commission d'experts qui a indiqué que les travailleurs ont été licenciés alors que le Comité de la liberté syndicale était en train d'examiner le cas. En ce sens, son vote constitue un appui au système de contrôle de l'OIT. Il a indiqué que les mêmes critères devraient être appliqués à d'autres cas similaires ou même plus graves examinés par la présente commission.

Un membre gouvernemental des Pays-Bas a déclaré que son gouvernement avait voté "non" parce qu'il considère que la présente commission devrait suivre la procédure habituelle de prises de décisions par consensus.

Un membre gouvernemental de la Tchécoslovaquie, expliquant les raisons pour lesquelles il s'est abstenu pendant le vote, s'est référé à l'avis exprimé antérieurement par son gouvernement, selon lequel de telles questions devraient être décidées par consensus et non par un vote. En outre, son gouvernement est d'avis que des sanctions ne devraient être appliquées qu'en cas de violations graves et répétées des conventions et lorsqu'il y a consensus pour les appliquer. Son gouvernement n'a pas été pleinement convaincu par les arguments avancés et il s'est demandé s'il s'agissait d'une véritable question de principe ou s'il s'agissait plutôt d'une question de désaccord entre le gouvernement du Royaume-Uni et la commission d'experts au sujet de l'interprétation d'une question spécifique couverte par la convention no 87.

Un membre gouvernemental de Bulgarie a expliqué que sa délégation s'est abstenue lors du vote en se fondant sur l'opinion de son gouvernement selon laquelle seul le dialogue devrait être encouragé au sein de la présente commission où les décisions ne devraient être obtenues que par le consensus. Un vote n'est pas un dialogue. Quel que soit son résultat, il ne sert pas la cause de la coopération. L'orateur a souligné qu'on devrait se concentrer sur le dialogue si l'on veut obtenir de meilleurs résultats.

Un membre gouvernemental de la Turquie a souhaité expliquer pourquoi son gouvernement a voté contre. Il a rappelé le mandat de la présente commission, qu'il ne faudrait pas outrepasser; selon lui le maintien d'un équilibre entre le Nord et le Sud, l'Est et l'Ouest, incombe à d'autres organes des Nations Unies qui ont des responsabilités à cet égard. Bien que son gouvernement ait un grand respect pour la commission d'experts et pour son rapport, il ne prend pas ses conclusions comme paroles ayant force de loi. La présente commission est censée se sentir libre d'évaluer pleinement tous les aspects du rapport sans préjuger nullement d'aucune considération sur un pays déterminé.

Un membre gouvernemental du Royaume-Uni a déclare que son gouvernement a voté "non" parce qu'il considère que la demande d'un paragraphe spécial dans ce cas est disproportionnée et qu'elle mine la valeur des sanctions de l'OIT. Cela n'est pas une question Nord-Sud. Il s'agit des règles régissant les pratiques de la présente commission. Les membres travailleurs avaient néanmoins demandé un vote dont l'issue a été soumise au processus démocratique. Les résultats du vote sont maintenant devant la commission. L'orateur a remercié la commission pour sa décision. qui marque un retour au sens des proportions. Son gouvernement a exprimé l'espoir que les membres travailleurs prendront bonne note du résultat.

Le président de la commission a proposé les conclusions suivantes."La commission a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental ainsi que des discussions détaillées qui ont eu lieu au sein de la commission. La commission a exprimé sa préoccupation quant à la situation commentée par la commission d'experts qui constate, dans son rapport, que contrairement à la convention, les travailleurs du GCHQ continuent à ne pas jouir du droit syndical. Elle a tenu à rappeler à cet égard les conclusions du Comité de la liberté syndicale concernant le cas du GCHQ. La commission a noté avec regret le fait que le gouvernement a licencié des travailleurs du GCHQ et ce pendant la procédure en cours devant le Comité de la liberté syndicale et qu'il ne considère pas utile de négocier avec les associations de travailleurs au sujet du droit syndical de ceux-ci. Elle a exprimé le ferme espoir que le gouvernement reconsidérera sa position, à travers le dialogue avec les syndicats, afin de trouver des solutions à la situation législative et de ce fait qui soient en pleine conformité avec la convention. La commission a exprimé le ferme espoir que le prochain rapport du gouvernement demandé par la commission d'experts contiendra des informations sur une évolution décisive de la situation conforme à la convention. La commission a demandé, par ailleurs, au gouvernement d'accorder une grande attention aux commentaires de la commission d'experts relatifs à la loi de 1988 sur l'emploi et de fournir des informations sur les mesures qu'il entend prendre pour donner satisfaction à ces commentaires.

Les membres travailleurs ont proposé que les conclusions soient consignées dans un paragraphe spécial du rapport général de la commission car, bien qu'il s'agisse d'un cas important qui avait déjà été discuté à plusieurs reprises, le gouvernement n'avait pas entamé de négociations avec les organisations syndicales intéressées et la situation n'avait pas progressé.

Les membres employeurs soulignent que la commission n'a pas discuté des questions législatives et que celles-ci ne devraient donc pas être mentionnées dans les conclusions; s'il en est fait mention, l'opinion dissidente des employeurs devra également être évoqués. La proposition de consigner des conclusions dans un paragraphe spécial est inacceptable: il s'agit d'une question juridique complexe, que seule la Cour internationale de Justice est habilitée à trancher en dernier ressort; il faut également savoir qui prendra l'initiative d'un appel à la Cour. Par conséquent, la situation n'est pas aussi claire que certains intervenants l'ont parfois affirmé. Il ne s'agit pas d'un cas typique. Heureusement, l'existence et la portée de la liberté syndicale dans ce pays ne sont pas en jeu; il s'agit simplement d'un cas individuel et marginal qui mérite qu'on s'en occupe en tant que tel et qui est aujourd'hui discuté pour la troisième fois. A de nombreuses reprises, un débat s'est poursuivi pendant plus de vingt ans sur une question de monopole syndical prévu par la législation qui privait tous ces travailleurs de la liberté syndicale. Il se pose donc un problème d'égalité de traitement et de ce fait un paragraphe spécial ne peut être accepté dans le présent cas.

Les membres travailleurs ont demandé qu'un vote nominal ait lieu pour décider si le cas devait faire l'objet d'un paragraphe spécial.

Le membre gouvernemental de la Tchécoslovaquie, parlant au nom d'un certain nombre de pays socialistes, a déclaré qu'il ne souhaitait pas résoudre le problème par le vote. Néanmoins, s'il devait y avoir vote, la complexité des problèmes soulevés réclamerait que l'on prévoie un temps de réflexion; il demandait en conséquence que le vote soit repoussé à plus tard, en formulant l'espoir que les membres travailleurs et les membres employeurs seraient parvenus entre-temps à s'entendre.

Le membre gouvernemental des Etats-Unis s'est demandé s'il convenait d'aller aussi loin dans ce cas. Il a estimé qu'il ne s'agissait pas ici de savoir si le Royaume-Uni était un pays développé ou en développement et que s'il y avait eu violation notoire de la liberté syndicale, cela méritait évidemment un paragraphe spécial. Ce cas était vraiment très spécial. Il craignait qu'un vote à ce sujet ne pût affecter la bonne volonté et le consensus qui étaient si importants pour le travail de la commission.

Le membre gouvernemental de la France a demandé que, si l'on devait voter, il soit donné aux membres la possibilité de fournir des explications de vote.

La commission a adopté les conclusions proposées par le président en ce qui concerne la question du GCHQ et elle a décidé qu'un vote nominal aurait lieu plus tard pour décider de l'opportunité de mentionner ce cas dans un paragraphe spécial, à moins qu'entre temps les membres travailleurs et les membres employeurs n'aient pu parvenir à un accord sur cette question.

Lors d'une séance ultérieure, la commission a procédé à un vote par appel nominal, à la demande du groupe des travailleurs, portant sur la demande de mentionner ce cas dans un paragraphe spécial du rapport de la commission.

Le résultat du vote a été le suivant: 56845 voix contre, 60398 voix pour avec 9555 abstentions.

En conséquence, la commission a décidé de ne pas mentionner ce cas dans un paragraphe spécial de son rapport.

Après la proclamation des résultats du vote, certains membres gouvernementaux ont fourni une explication de vote.

Un membre gouvernemental de la Suède, s'exprimant au nom des cinq pays nordiques, a déclaré que les gouvernements de ces pays souscrivent aux conclusions adoptées sur ce cas par la présente commission, mais ils ont voté contre un paragraphe spécial parce qu'ils souhaitent conserver leur signification particulière aux paragraphes spéciaux qui, selon eux, devraient continuer à être réservés aux cas les plus graves.

Un membre gouvernemental de la République fédérale d'Allemagne a expliqué le "non" de son gouvernement en notant que le vote ne portait pas sur le fait de savoir si le Royaume-Uni a violé ou non la convention: le vote portait plutôt sur les principes fondamentaux régissant les travaux de la présente commission, à savoir le dialogue et le consensus. Procéder à un vote est contraire au consensus et ne contribue pas à élargir le dialogue, qui est recherché dans ce cas en particulier par les membres travailleurs.

Un membre gouvernemental du Portugal a déclaré qu'il a voté contre à cause des doutes qui entourent l'interprétation de la situation. Son gouvernement pense que ce cas devrait faire l'objet d'une analyse juridique approfondie; la présente commission ne devrait pas prendre une décision qui, de par sa nature exceptionnelle, devrait être considérée comme finale. En outre, dans d'autres cas où il existait des doutes sur l'interprétation d'une situation, des décisions autres que celle proposée dans ce cas ont été prises; cela empêchait de mentionner le cas du Royaume-Uni dans un paragraphe spécial du rapport.

Un membre gouvernemental de l'Australie a indiqué qu'il n'était pas en faveur de l'inclusion de ce cas dans un paragraphe spécial pour les raisons suivantes: la présente commission recherche traditionnellement le consensus. L'approche adoptée dans le présent cas est préoccupante. Son gouvernement a pris note avec intérêt de la discussion et des circonstances particulières et uniques qui entourent ce cas. Il estime qu'il pourrait y avoir infraction à la convention sur le plan technique. Le gouvernement du Royaume-Uni n'a fait aucune démarche pour traiter les questions soulevées par la commission d'experts et n'éprouve apparemment pas le besoin d'en entreprendre. Le gouvernement australien appuie les conclusions de la commission d'experts. Il encourage le gouvernement du Royaume-Uni à entreprendre de nouvelles négociations avec les syndicats en cause afin de chercher à résoudre la question en conformité avec ses obligations au titre de la convention. Cependant, les paragraphes spéciaux n'ont été utilisés dans le passé que dans les cas de violation flagrante des droits de l'homme, circonstances qui ne s'appliquent pas à ce cas. Au stade actuel, un paragraphe spécial constituerait une réponse disproportionnée.

Les membres travailleurs ont déclaré ne pas regretter le résultat du vote en dépit de la tristesse que leur cause le fait de ne pas avoir pu parvenir à un consensus avec le groupe des employeurs, comme c'est le cas normalement. Ils ont souhaité clarifier la signification des paragraphes spéciaux qui ne contiennent pas de jugement. Ces paragraphes ont pour but uniquement d'attirer l'attention sur les problèmes importants qui doivent être soulignés et d'inviter les gouvernements et les organisations d'employeurs et de travailleurs à s'efforcer de surmonter les difficultés. Ils se sont référé à la conviction du groupe des travailleurs dans l'indépendance, l'impartialité et de l'objectivité de la commission d'experts et à la grande importance qu'ils attachent au Comité de la liberté syndicale. Ils ont déclaré que les normes et le système de contrôle existent tant pour les pays industrialisés que pour les pays en développement; bien que dans les pays industrialisés les problèmes n'aient pas la même dimension que dans les pays pauvres, dès lors qu'il existe des difficultés sérieuses, particulièrement en relation avec les normes fondamentales, telles que la liberté syndicale, les membres travailleurs considèrent que l'attention doit être attirée également sur ces problèmes. Ils ont expliqué qu'ils ont proposé un paragraphe spécial: premièrement, parce qu'ils croient que toutes les possibilités de dialogue et de conciliation à l'intérieur du pays n'ont pas été épuisées; deuxièmement, parce que 13 travailleurs ont été licenciés pendant qu'était en cours une procédure devant le Comité de la liberté syndicale à cause de la fidélité de ces travailleurs à leur organisation syndicale; et troisièmement. pour insister et pour inviter le gouvernement du Royaume-Uni à ne pas fermer la porte et à s'ouvrir à la négociation. Ils se sont déclarés surpris de la faible différence dans le résultat du vote et satisfaits de la solidarité totale du groupe des travailleurs, solidarité qu'ils considèrent d'une importance historique.

Un membre gouvernemental de l'Equateur a expliqué qu'il avait voté avec regret en faveur de l'inscription du Royaume-Uni, dans un paragraphe spécial avec l'espoir que cela inciterait d'autres pays à réfléchir à la tendance qui consiste à singulariser les situations de petits pays, situations qui sont parfois le résultat de pressions politiques extérieures. Il s'est déclaré satisfait qu'un vote démocratique, en relation avec le cas de Royaume-Uni, ait montré que les principes d'équité ne sont pas toujours violés.

Un membre gouvernemental des Etats-Unis d'Amérique a déclaré qu'il était lamentable que la situation se soit à ce point polarisée. Son gouvernement se demande si cette question méritait d'être soumise à un vote. L'oratrice a exprimé l'espoir que la présente commission pourra désormais travailler, de manière positive et constructive, sur la base de la bonne volonté et du consensus. Son gouvernement a voté contre un paragraphe spécial parce que son usage devrait être réservé à des violations persistantes et graves des conventions ratifiées. Le cas du Royaume-Uni ne répond pas à ces critères. Son gouvernement croit fermement en l'application universelle et uniforme des normes de l'OIT sans considération de l'orientation politique et du niveau de développement économique. A son avis, ce vote ne portait pas sur le fait qu'il y aurait ou non des normes différentes, selon les cas, mais en faveur ou contre l'abaissement des normes que la présente commission applique pour décider si un cas doit ou non être mentionné dans un paragraphe spécial. Elle a déclaré que son gouvernement n'était pas disposé à modifier le critère servant à déterminer si un cas doit ou non être inscrit dans un paragraphe spécial. Elle considère qu'un autre cas discuté récemment devant la présente commission ne méritait pas non plus de paragraphe spécial, étant donné que le gouvernement en question avait pris des mesures en vue d'une meilleure application d'une convention ratifiée.

Le membre gouvernemental de la France a déclaré avoir voté "non" pour des raisons tenant essentiellement à la "jurisprudence" de la présente commission. Les pratiques très anciennes de travail de la commission permettent d'avoir une position constante et objective, que les pays soient grands ou petits, industrialisés ou en voie de développement. Conformément à la tradition, le paragraphe spécial doit être appliqué quand un pays présente une double caractéristique: d'abord que le cas ait été examiné depuis longtemps sans progrès et ensuite que le cas présente une très grande gravité largement liée à la violation des droits de l'homme. Il faut remettre chaque examen d'un paragraphe spécial en perspective, c'est-à-dire relativiser et comparer. Il ne semble pas que le cas du Royaume-Uni présentait la double caractéristique d'un paragraphe spécial. L'orateur a exprimé l'espoir qu'on en revienne au consensus, qui est la règle normale de fonctionnement de la présente commission.

Un membre gouvernemental de l'Uruguay, en expliquant son vote en faveur d'un paragraphe spécial. a déclaré qu'il s'est basé sur les faits objectifs décrits dans l'observation de la commission d'experts qui a indiqué que les travailleurs ont été licenciés alors que le Comité de la liberté syndicale était en train d'examiner le cas. En ce sens, son vote constitue un appui au système de contrôle de l'OIT. Il a indiqué que les mêmes critères devraient être appliqués à d'autres cas similaires ou même plus graves examinés par la présente commission.

Un membre gouvernemental des Pays-Bas a déclaré que son gouvernement avait voté "non" parce qu'il considère que la présente commission devrait suivre la procédure habituelle de prises de décisions par consensus.

Un membre gouvernemental de la Tchécoslovaquie, expliquant les raisons pour lesquelles il s'est abstenu pendant le vote, s'est référé à l'avis exprimé antérieurement par son gouvernement, selon lequel de telles questions devraient être décidées par consensus et non par un vote. En outre, son gouvernement est d'avis que des sanctions ne devraient être appliquées qu'en cas de violations graves et répétées des conventions et lorsqu'il y a consensus pour les appliquer. Son gouvernement n'a pas été pleinement convaincu par les arguments avancés et il s'est demandé s'il s'agissait d'une véritable question de principe ou s'il s'agissait plutôt d'une question de désaccord entre le gouvernement du Royaume-Uni et la commission d'experts au sujet de l'interprétation d'une question spécifique couverte par la convention no 87.

Un membre gouvernemental de Bulgarie a expliqué que sa délégation s'est abstenue lors du vote en se fondant sur l'opinion de son gouvernement selon laquelle seul le dialogue devrait être encouragé au sein de la présente commission où les décisions ne devraient être obtenues que par le consensus. Un vote n'est pas un dialogue. Quel que soit son résultat, il ne sert pas la cause de la coopération. L'orateur a souligné qu'on devrait se concentrer sur le dialogue si l'on veut obtenir de meilleurs résultats.

Un membre gouvernemental de la Turquie a souhaité expliquer pourquoi son gouvernement a voté contre. Il a rappelé le mandat de la présente commission, qu'il ne faudrait pas outrepasser; selon lui le maintien d'un équilibre entre le Nord et le Sud, l'Est et l'Ouest, incombe à d'autres organes des Nations Unies qui ont des responsabilités à cet égard. Bien que son gouvernement ait un grand respect pour la commission d'experts et pour son rapport, il ne prend pas ses conclusions comme paroles ayant force de loi. La présente commission est censée se sentir libre d'évaluer pleinement tous les aspects du rapport sans préjuger nullement d'aucune considération sur un pays déterminé.

Un membre gouvernemental du Royaume-Uni a déclare que son gouvernement a voté "non" parce qu'il considère que la demande d'un paragraphe spécial dans ce cas est disproportionnée et qu'elle mine la valeur des sanctions de l'OIT. Cela n'est pas une question Nord-Sud. Il s'agit des règles régissant les pratiques de la présente commission. Les membres travailleurs avaient néanmoins demandé un vote dont l'issue a été soumise au processus démocratique. Les résultats du vote sont maintenant devant la commission. L'orateur a remercié la commission pour sa décision. qui marque un retour au sens des proportions. Son gouvernement a exprimé l'espoir que les membres travailleurs prendront bonne note du résultat.

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