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Observation (CEACR) - adoptée 2011, publiée 101ème session CIT (2012)

Convention (n° 95) sur la protection du salaire, 1949 - Ukraine (Ratification: 1961)

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Article 12, paragraphe 1, de la convention. Paiement du salaire à intervalles réguliers. Faisant suite à ses précédents commentaires, la commission prend note du rapport de la mission d’assistance technique en Ukraine, qui s’est déroulée du 16 au 19 mai 2011 suite à la discussion de la Commission de l’application des normes de la Conférence de juin 2010. La mission d’assistance technique a été chargée par la Commission de la Conférence d’étudier de manière plus approfondie les causes et l’ampleur du problème des arriérés de salaires, afin de mieux comprendre la situation, d’évaluer les mesures prises actuellement pour remédier à la situation, et de rassembler des statistiques et des documents actualisés. La commission prend note des conclusions, des observations et des recommandations de la mission d’assistance technique, résumées ci-après.
Conclusions – situation des arriérés de salaires. D’après les données communiquées par le gouvernement, le montant total des arriérés de salaires était de 1,32 milliard de hryvnias ukrainiennes (UAH) (environ 165 millions d’euros) au 1er avril 2011, soit une baisse de 26 pour cent par rapport à l’année précédente (1,79 milliard d’UAH en 2010). Le secteur industriel reste celui où le montant des arriérés de salaires accumulés est le plus élevé, puisqu’ils représentent près de 56 pour cent du montant total. Les arriérés de salaires ont atteint un niveau record en mars 2010. En janvier 2011, ils avaient reculé de près de 30 pour cent, avant d’augmenter à nouveau pour atteindre 1,32 milliard d’UAH en avril 2011. La mission d’assistance technique a donc estimé que la réduction était réelle, mais que l’économie ukrainienne demeurait vulnérable au problème des arriérés de salaires.
S’agissant de la structure de la dette salariale, entre mars 2010 et avril 2011, les arriérés de salaires ont essentiellement reculé dans les entreprises économiquement actives, par opposition aux entreprises en faillite. Toutefois, même dans les entreprises économiquement actives, il existait toujours des arriérés de salaires dans les entreprises d’Etat, où ils représentaient 32 pour cent du montant total des arriérés. Par ailleurs, dans les entreprises privées et les entreprises municipales, le montant des arriérés de salaires a baissé de 55 pour cent sur la même période. En conséquence, la mission d’assistance technique a fait observer que les mesures du gouvernement semblaient être suivies d’effets au niveau local, dans les entreprises municipales et le secteur privé, mais qu’il restait encore beaucoup à faire dans les entreprises d’Etat.
Activités des services d’inspection du travail. D’après les informations fournies par l’inspection du travail, en avril 2011, 3 483 entreprises inspectées présentaient des arriérés de salaires, les régions les plus touchées étant celles de Donetsk, de Lviv et de Lugansk. S’agissant du nombre de travailleurs, la région de Kharkiv est celle où le nombre de travailleurs affectés est le plus élevé. L’inspection du travail a confirmé que le nombre d’infractions à la législation concernant le paiement à temps du salaire et d’autres droits avait augmenté au premier trimestre 2011 par rapport à la même période de l’année 2010. S’agissant des actions revendicatives liées aux arriérés, d’après les informations du Service national de médiation et de conciliation (NSPP), 49 actions ont été intentées en 2010; elles concernaient 19 200 employés de 102 entreprises. Au premier trimestre 2011, 22 actions ont été intentées; elles concernaient 19 400 employés de 26 entreprises.
Situation en matière de salaires à la mine de Nikanor-Nova. Suite aux contacts directs établis avec la direction et les syndicats de la mine, la mission d’assistance technique a conclu qu’il n’existait actuellement aucun arriéré de salaire, et que les salaires étaient payés tous les mois, malgré un retard d’un mois pratiquement constant. La mission a toutefois indiqué qu’il n’existait pas de commun accord entre la direction et les travailleurs sur la méthodologie à utiliser pour déterminer le taux de salaire applicable aux mineurs employés à des travaux souterrains, notamment parce que la législation nationale, la convention collective générale et la convention collective sectorielle semblent fixer des taux de salaires minima différents. La mission d’assistance technique a conclu qu’il fallait manifestement mener d’autres consultations concernant les liens entre la loi de 2008 concernant les mesures destinées à renforcer le prestige du travail de mineur et les conventions collectives générale et sectorielle, ainsi que leurs effets sur les taux de salaires. S’agissant des conditions de travail générales dans les mines, la mission d’assistance technique a noté avec intérêt la ratification par l’Ukraine de la convention (no 174) sur la prévention des accidents industriels majeurs, 1993, et de la convention (no 176) sur la sécurité et la santé dans les mines, 1995, enregistrée le 15 juin 2011, et a espéré que ces instruments donneraient des orientations utiles pour améliorer les normes relatives à la sécurité et à la santé dans le secteur minier.
Observations et recommandations. La mission d’assistance technique a relevé que la diminution du montant des arriérés de salaires était une évolution positive, qui confirme la détermination du gouvernement à faire face à ce problème. Le gouvernement a réaffirmé sa décision de faire figurer la lutte contre les arriérés de salaires accumulés parmi ses priorités, et de consacrer toute son énergie au paiement à temps de l’ensemble des sommes dues. En outre, les partenaires sociaux, également conscients de la gravité du problème, semblaient pleinement associés à l’effort collectif destiné à éradiquer à terme les arriérés de salaires. Un groupe de travail tripartite a été mis sur pied pour fournir des informations utiles en vue de cet effort, et pour proposer des solutions. La commission a également été convaincue que l’information circulait sans difficulté, et que les statistiques étaient communiquées sans entrave à toutes les personnes concernées.
La mission d’assistance technique a noté que certaines mesures en matière de politiques et de législation étaient à l’examen: i) le renforcement de la responsabilité des directeurs en cas de non-paiement des salaires; ii) la modification de la loi sur la faillite pour conférer un privilège de premier rang aux créances salariales lors de procédures de faillite; iii) l’élaboration d’une loi nouvelle prévoyant un fonds de garantie des salaires; et iv) l’augmentation du nombre d’inspecteurs du travail et de la fréquence des inspections. La mission a fait savoir que l’instauration de sanctions suffisamment dissuasives pour faire cesser l’impunité qui prévaut actuellement, et le renforcement des services d’inspection du travail – qui, à l’heure actuelle, inspecteraient chaque entreprise tous les 36 ans en moyenne – pourraient améliorer le suivi et l’application de la législation nationale. La mission a mentionné des problèmes concernant la méthodologie utilisée actuellement pour collecter des statistiques, à savoir le domaine couvert par l’étude mensuelle de la Commission nationale des statistiques, qui exclut les entreprises de moins de 50 employés, et l’absence de confidentialité dans le cadre du processus de collecte des rapports des entreprises. Elle a également souligné la nécessité d’adopter une définition commune de l’expression «arriérés de salaires», plus particulièrement en ce qui concerne le paiement des salaires avec un retard d’un mois, qui semble actuellement considéré comme une pratique normale dans certains lieux de travail.
La mission d’assistance technique a indiqué que le Bureau pouvait apporter une assistance technique, et mener des activités de partage des connaissances concernant, par exemple, la création et le fonctionnement d’un fonds de garantie des salaires, la réforme de la loi sur les faillites et l’amélioration de la collecte de données sur les arriérés de salaires. De façon plus générale, la mission a estimé que le problème des arriérés de salaires était structurel, et a préconisé une approche globale dans le cadre d’une politique générale sur les salaires; en conséquence, elle a proposé de s’intéresser également à des questions connexes, y compris les pratiques salariales informelles telles que les rémunérations cachées ou «enveloppes».
La commission a dûment examiné le rapport de la mission d’assistance technique, et note que les discussions avec les fonctionnaires, les membres des organisations d’employeurs et de travailleurs et les spécialistes du milieu universitaire étaient directes, libres et constructives. S’agissant de la situation générale des arriérés de salaires, la commission note avec intérêt que le montant total des arriérés a tendance à baisser, et que les salaires mensuels sont désormais payés régulièrement à la mine de Nicanor-Nova. Notant que le gouvernement a annoncé en septembre 2011 une nouvelle baisse des arriérés, qui étaient passés à 1,1 milliard d’UAH (près de 100,7 millions d’euros), la commission estime que la situation nécessite toujours un suivi rigoureux, et qu’il faudrait améliorer la méthodologie utilisée pour collecter des informations utiles.
La commission prend également note des diverses mesures prises et envisagées par le gouvernement en consultation avec les partenaires sociaux, notamment de lois et de politiques nouvelles. Tout en se félicitant de ces mesures, elle rappelle que le problème n’est pas un problème de conformité à la loi, mais plutôt un problème d’application effective de la législation existante. Par conséquent, elle souligne la nécessité de prendre des mesures sans tarder pour prévoir les sanctions appropriées, et renforcer les services d’inspection du travail. Elle rappelle à cet égard l’indication donnée par les services de l’inspection du travail pendant la mission d’assistance technique, selon laquelle, si le nombre d’inspecteurs était porté à 5 000, ils seraient en mesure d’inspecter chaque entreprise tous les cinq ans.
A la lumière de ce qui précède, la commission espère que le gouvernement prendra des mesures concrètes à titre prioritaire en se fondant sur les recommandations de la mission d’assistance technique pour: i) améliorer la méthodologie utilisée pour collecter des données sur les arriérés de salaires; ii) adopter des sanctions suffisamment dissuasives; iii) renforcer le système d’inspection du travail; et iv) traiter les questions qui ont une incidence directe sur la situation des arriérés de salaires, y compris par exemple la création d’une institution de garantie des salaires, la révision de la loi sur les faillites et la suppression de la pratique des «enveloppes». Elle demande aussi au gouvernement de tenir le Bureau informé de tout progrès réalisé en la matière, et de continuer à transmettre des statistiques détaillées sur le montant total des arriérés de salaires, ventilées par secteur économique, région, type de propriété et statut (actif ou inactif) d’activité de l’entreprise.
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