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Observation (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

Convention (n° 94) sur les clauses de travail (contrats publics), 1949 - Espagne (Ratification: 1971)

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Article 2 de la convention. Insertion de clauses de travail dans les contrats publics. La commission note les observations formulées par la Confédération syndicale des commissions ouvrières (CC.OO.), dans une communication datée du 13 août 2012. Elle note que, selon la CC.OO., l’ordre juridique national ne garantit pas la mise en œuvre de l’obligation essentielle imposée par la convention, à savoir l’insertion dans les contrats publics de clauses de travail conformes à son article 2, paragraphe 1. La commission note que la CC.OO. se réfère à l’article 84, paragraphe 2, du statut des travailleurs, tel qu’amendé par le décret royal législatif no 3/2012 du 10 février 2012 portant mesures urgentes pour la réforme du marché du travail et par la loi no 3/2012 du 6 juillet 2012 du même intitulé. Cette disposition prévoit que l’application des accords d’entreprise est prioritaire par rapport à celle des conventions collectives sectorielles, que ces dernières soient applicables au niveau national ou d’une communauté autonome ou qu’elles aient un champ d’application plus restreint, et ce en ce qui concerne notamment le montant du salaire, la compensation des heures supplémentaires, la rémunération spécifique du travail par équipes ainsi que le temps de travail et sa répartition. La CC.OO. considère que l’application de la convention n’est donc pas garantie, étant donné qu’une entreprise peut fixer des conditions de travail inférieures à celles établies par voie de convention collective sectorielle, à la seule condition de respecter les minima légaux, ces conditions de travail étant dès lors loin d’être au moins aussi favorables que les conditions établies pour un travail de même nature dans la profession ou l’industrie intéressée de la même région, comme le prescrit la convention.
La commission note que, dans sa réponse aux observations de la CC.OO., reçue le 20 novembre 2012, le gouvernement fait valoir que l’application de l’article 2, paragraphe 1, de la convention n’est pas affectée par la nouvelle réglementation de la négociation collective dérivant de la réforme de la législation du travail de 2012. En premier lieu, selon le gouvernement, la primauté des conventions d’entreprise sur les conventions sectorielles n’affecte en rien l’existence de ces dernières. En outre, la convention propose trois types de sources de réglementation par rapport auxquelles doivent être comparées les conditions de travail des salariés employés au service d’un adjudicataire de contrat public: une convention collective couvrant un nombre substantiel d’employeurs et de travailleurs; une sentence arbitrale; ou la législation nationale. La primauté attribuée aux conventions d’entreprise n’affecterait donc que l’une de ces sources. Le gouvernement indique également que tout adjudicataire doit respecter, vis-à-vis de ses salariés, les obligations que lui impose la législation du travail. Cette obligation est énoncée dans la plupart des cahiers des charges administratives approuvés par les organes compétents de l’Etat, des communautés autonomes et des entités locales. Le gouvernement se réfère aussi au décret royal législatif no 3/2011 du 14 novembre 2011 portant texte consolidé de la loi relative aux contrats publics, dont l’article 60 établit une interdiction d’être partie à un contrat public, notamment pour les personnes ayant été condamnées pour délit à l’encontre des droits des travailleurs ou ayant été sanctionnées pour une infraction très grave en matière sociale. Le gouvernement conclut en indiquant qu’il n’existe pas de législation sociale particulière pour les entreprises qui passent des contrats avec l’administration publique, la législation commune leur étant applicable dans tous les domaines.
La commission note l’adoption du décret royal législatif no 3/2011 qui abroge notamment la loi no 30/2007 du 30 octobre 2007 relative aux contrats publics, à laquelle elle se référait dans son précédent commentaire. Elle relève cependant que ce texte ne donne pas plus que la législation précédemment en vigueur effet aux dispositions principales de la convention, et, en particulier, n’exige pas l’insertion de clauses de travail conformes à l’article 2, paragraphe 1, de la convention dans tous les contrats publics auxquels elle s’applique. En effet, contrairement à ce qu’avance le gouvernement, cette disposition n’offre pas un choix entre trois modes de réglementation des conditions de travail pour sa mise en œuvre. Les entreprises doivent en réalité offrir aux travailleurs employés pour l’exécution de contrats publics des salaires et autres conditions de travail au moins aussi favorables que les normes les plus élevées établies dans la même région par voie de convention de collective, de sentence arbitrale ou de législation. Lorsque, comme c’est le cas en Espagne, la législation du travail ne fixe que des normes minimales qui sont relevées au moyen de la négociation collective, l’application de la législation générale du travail aux conditions d’exécution des contrats publics ne suffit pas à assurer la mise en œuvre de la convention.
En outre, les conventions collectives auxquelles se réfère l’article 2, paragraphe 1, de la convention sont celles qui, établies pour un travail de même nature et effectué dans la même région que le travail exécuté dans le cadre du contrat public, s’appliquent à une proportion substantielle des employeurs et travailleurs de la profession ou l’industrie intéressée. A cet égard, la commission relève que l’article 84, paragraphe 2, du statut des travailleurs, tel qu’amendé par le décret royal législatif no 3/2012 et par la loi no 3/2012, permet à des accords d’entreprise de déroger aux conventions collectives sectorielles, y compris en matière de rémunération et de temps de travail. La réforme de la négociation collective adoptée en 2012 ne paraît donc pas assurer la mise en œuvre de la convention, dans la mesure où une entreprise déterminée, partie à un contrat public, pourrait conclure un accord d’entreprise prévoyant des conditions de travail inférieures à celles fixées dans des conventions collectives applicables à une proportion substantielle des employeurs et des travailleurs du secteur d’activité concerné.
La commission note par ailleurs que l’article 73 du décret royal législatif no 3/2011 prévoit que les entrepreneurs peuvent prouver qu’ils ne font pas l’objet d’une interdiction d’être partie à un contrat public en vertu de l’article 60 de ce décret-loi royal au moyen d’une déclaration devant un juge ou d’une certification administrative. Elle relève que ces dispositions, si elles constituent un instrument utile pour lutter contre les infractions à la législation du travail, ne sont pas non plus de nature à assurer la pleine conformité avec la convention. Premièrement, comme il est indiqué plus haut, les clauses de travail doivent viser non seulement le respect de la législation du travail, mais aussi celui des conventions collectives et sentences arbitrales applicables. En outre, comme la commission l’a souligné dans son étude d’ensemble de 2008 sur les clauses de travail dans les contrats publics (paragr. 118), l’objectif de l’insertion de clauses de travail dans les contrats publics dépasse celui d’une simple attestation, étant donné qu’il s’agit d’éliminer les effets négatifs de soumissions concurrentielles sur les conditions de travail. La simple indication qu’aucune violation de la législation du travail n’a été enregistrée à l’occasion des travaux déjà effectués par l’entrepreneur n’est pas suffisante pour répondre à cette exigence. En effet, un certificat atteste les résultats antérieurs du soumissionnaire et le fait qu’il a respecté la législation, mais, à la différence des clauses de travail, il ne comporte aucune obligation impérative concernant les travaux futurs à réaliser.
A la lumière des considérations qui précèdent, la commission ne peut que conclure que la législation nationale ne donne pas effet à l’article 2, paragraphe 1, de la convention et demande instamment au gouvernement de prendre dans les meilleurs délais les mesures requises pour la mettre en conformité avec la convention. Elle prie le gouvernement de tenir le Bureau informé de toute décision qu’il pourrait prendre en la matière.
[Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2013.]
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