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Observation (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999 - Maroc (Ratification: 2001)

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Article 3 de la convention. Pires formes de travail des enfants. Alinéas a) et d). Travail forcé ou obligatoire et travail dangereux. Travail domestique des enfants. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait noté les indications de la Confédération syndicale internationale (CSI) selon lesquelles le travail domestique des enfants, dans des conditions de servitude, est courant dans le pays, des parents vendant leurs enfants, parfois âgés de 6 ans seulement, pour qu’ils travaillent comme domestiques. La commission avait noté que l’article 10 du Code du travail interdit le travail forcé et qu’en vertu de l’article 467-2 du Code pénal le travail forcé des enfants de moins de 15 ans est interdit. Elle avait également noté qu’un projet de loi sur le travail domestique a été adopté et était en cours de validation. Ce projet de loi fixe l’âge minimum d’admission à ce type d’emploi à 15 ans, établit les conditions de travail et prévoit les mesures de contrôle ainsi que les sanctions applicables allant jusqu’à des peines d’emprisonnement à l’encontre des employeurs occupant des enfants de moins de 15 ans. La commission avait également noté qu’une liste spécifique fixant les travaux dangereux interdits dans le secteur du travail domestique serait élaborée et adoptée en conjonction avec la future loi relative aux conditions d’emploi et de travail des salariés domestiques. Ce projet de loi est en processus d’adoption depuis juin 2011.
La commission avait noté qu’une première enquête qualitative et quantitative sur les filles domestiques de moins de 18 ans a été réalisée en 2001 dans la Wilaya de Casablanca. Selon les résultats de l’enquête statistique réalisée en 2001, près de 23 000 jeunes filles âgées de moins de 18 ans travaillaient dans la région du Grand Casablanca en tant que domestiques, parmi lesquelles 59,2 pour cent ont moins de 15 ans. La commission avait noté que l’enquête a révélé que des pourcentages importants de ces filles n’étaient pas éduquées, faisaient l’objet de sanctions ou punitions dans l’exercice de leurs tâches, recevaient des coups et/ou étaient abusées sexuellement. La commission avait noté qu’une deuxième enquête était prévue dans le Grand Casablanca au cours du second semestre de 2010, avec extrapolation des résultats et des données au niveau national. La commission avait noté également les informations du gouvernement selon lesquelles les chiffres relevés par l’enquête de 2001 sont, depuis, en nette régression grâce aux efforts déployés par le Maroc au cours des dernières années, notamment en luttant contre l’abandon scolaire et toute autre forme d’exclusion sociale. En ce qui concerne la deuxième enquête qui doit être réalisée sur les filles domestiques à Casablanca, le gouvernement avait indiqué que le rapport méthodologique, permettant entre autres la détermination de la population cible et le planning de réalisation de l’enquête, a été élaboré et que l’enquête elle-même était en cours de réalisation.
La commission note les informations du gouvernement selon lesquelles, avec l’instauration du nouveau gouvernement, le projet de loi sur le travail domestique a été retiré du Parlement et soumis de nouveau au Conseil du gouvernement le 12 mars 2012, qui l’a reporté pour examen approfondi. En ce qui concerne l’enquête sur les filles domestiques à Casablanca, le gouvernement indique qu’elle a démarré au cours de l’année 2012 et que les résultats seront communiqués dès leur publication. La commission rappelle au gouvernement que les jeunes filles engagées dans des travaux domestiques sont souvent victimes d’exploitation et que la nature clandestine de ce travail rend difficile le contrôle de leurs conditions d’emploi. Elle rappelle également au gouvernement qu’en vertu de l’article 1 de la convention tout Etat Membre doit prendre des mesures immédiates et efficaces pour assurer l’interdiction des pires formes de travail des enfants, et ce de toute urgence. Observant que le gouvernement se réfère à l’adoption du projet de loi sur le travail domestique et de la liste spécifique fixant les travaux dangereux interdits dans le secteur du travail domestique depuis plusieurs années, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de s’assurer que ce projet de loi et cette liste soient adoptés de toute urgence. La commission prie également le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de mener à terme l’enquête sur la situation des petites filles domestiques à Casablanca dans les plus brefs délais et de communiquer une copie des résultats au Bureau avec son prochain rapport.
Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces prises dans un délai déterminé. Alinéas a) et b). Empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants et les soustraire de ces pires formes, et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. Prostitution enfantine et tourisme sexuel. Dans ses précédents commentaires, la commission s’était dite préoccupée par la persistance de la prostitution enfantine et du tourisme sexuel impliquant de jeunes Marocains et immigrés, notamment des garçons, et ce malgré la modification du Code pénal de 2003 qui a introduit le crime de tourisme sexuel. Elle avait noté les informations du gouvernement selon lesquelles le fléau de l’exploitation sexuelle des enfants demeure invisible et méconnu au Maroc, raison pour laquelle le gouvernement ne ménage pas ses efforts. La commission avait aussi noté que cinq unités de protection de l’enfance (UPE) ont été mises en place depuis 2007, à Marrakech, Casablanca, Tanger, Meknès et Essaouira, pour assurer une meilleure prise en charge médicale, psychologique et légale des enfants victimes de violence ou maltraitance, y compris les enfants victimes d’exploitation sexuelle ou économique, et dont des centaines d’enfants ont pu bénéficier. En outre, la commission avait noté que, dans le cadre de la mise en œuvre du Plan national d’action pour l’enfance (PANE) pour la décennie 2006 2015, une étude préliminaire sur la problématique de l’exploitation sexuelle des enfants a été réalisée au cours du mois de février 2007 en vue de l’élaboration d’une Stratégie nationale pour la prévention et la lutte contre une telle exploitation.
La commission observe l’absence d’informations, dans le rapport du gouvernement, relatives aux activités des UPE ainsi qu’aux résultats obtenus par l’application de la Stratégie nationale de lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants. La commission prie donc instamment le gouvernement de prendre des mesures immédiates et efficaces pour assurer que la Stratégie nationale de prévention et de lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants soit mise en œuvre dans les plus brefs délais et de fournir des informations sur les progrès réalisés à cet égard dans son prochain rapport. La commission prie également le gouvernement de communiquer des informations mises à jour sur le nombre d’enfants qui sont prévenus ou retirés de la prostitution par le biais des UPE. Finalement, la commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer copie de l’étude préliminaire sur la problématique de l’exploitation sexuelle des enfants réalisée en février 2007 en vue de l’élaboration de la stratégie nationale.
Alinéa d). Enfants particulièrement exposés à des risques. Travail domestique des enfants. La commission avait précédemment noté l’adoption du Programme national de lutte contre le travail domestique des petites filles (INQAD) dans le cadre du PANE. Elle avait également noté que, dans le cadre de son plan stratégique de 2008-2012 et suite à la mise en œuvre du programme INQAD, le ministère du Développement social, de la Famille et de la Solidarité prévoyait l’organisation de la deuxième Campagne nationale de sensibilisation pour la lutte contre le travail domestique des petites filles ainsi que l’élaboration de plans d’intervention régionaux. En outre, elle avait noté que, dans le cadre du Programme multisectoriel de lutte contre les violences fondées sur le genre par l’autonomisation des femmes et des filles au Maroc, mis en œuvre en collaboration avec le Programme des Nations Unies pour le développement, l’OIT/IPEC a initié un programme d’action de lutte contre le travail domestique des filles dans la région de Marrakech Tensift-El Haouz pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010.
La commission note les informations du gouvernement selon lesquelles, en 2011, suite aux activités menées avec la coopération de l’OIT/IPEC, 12 192 enfants ont pu être retirés de leurs milieux de travail et offerts des alternatives viables, et 20 993 enfants ont pu être prévenus de l’engagement dans le travail. La commission note également que, selon les informations disponibles de l’OIT/IPEC, un projet d’intervention de l’IPEC dans le domaine de lutte contre le travail domestique des petites filles est en cours jusqu’en 2014, dans le cadre du projet d’appui à la mise en œuvre de la Déclaration de l’OIT (PAMODEC). Ce projet de l’OIT/IPEC/PAMODEC concerne trois axes fondamentaux, soit la prévention, le retrait et la protection, et met l’accent sur l’éducation, le renforcement des capacités et l’appropriation nationale. Des activités ont déjà eu lieu dans le cadre du projet, dont la formation de 50 points focaux sur l’amélioration du système de suivi et collecte d’informations, avec un volet particulier sur la lutte contre le travail domestique des enfants, des séances de formation sur le travail domestique des enfants au profit des éducateurs et des animateurs sociaux des ONG, et des sessions d’information au profit des enseignants et des inspecteurs de l’enseignement du primaire et du collège dans la région de Fès, dont l’objectif est de mieux lutter contre la déperdition scolaire, particulièrement pour les filles. La commission encourage le gouvernement à redoubler ses efforts en matière d’identification, de retrait et de réinsertion des filles de moins de 18 ans qui travaillent comme domestiques et qui sont victimes d’exploitation économique ou sexuelle, et le prie de continuer de fournir des informations sur les résultats obtenus, notamment dans le cadre du projet de l’OIT/IPEC/PAMODEC sur le travail domestique des petites filles. La commission encourage le gouvernement à ratifier la convention (no 189) sur les travailleuses et travailleurs domestiques, 2011, qui contient des dispositions clés en matière de protection des enfants.
Article 5 et Point V du formulaire de rapport. Mécanismes de surveillance et application de la convention dans la pratique. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que, dans le cadre du projet de l’OIT/IPEC «Combattre le travail des enfants au Maroc en créant un environnement national propice et en mettant en place une intervention directe contre les pires formes de travail des enfants dans les zones rurales», plusieurs sessions de formation ont été organisées pour renforcer la capacité d’une variété d’acteurs impliqués dans la lutte contre le travail des enfants, dont 330 inspecteurs du travail ainsi que 43 agents de contrôle récemment désignés comme points focaux. Ces agents désignés comme points focaux ont notamment pour mission de contrôler les établissements employant des enfants. La commission avait noté les informations du gouvernement relatives aux activités menées par les points focaux pendant les années 2008 à 2010.
La commission note les informations communiquées par le gouvernement en ce qui concerne les activités menées par les points focaux en 2011. Ainsi, les points focaux ont visité 383 établissements, dans lesquels ils ont détecté 119 enfants travailleurs âgés de moins de 15 ans et 397 enfants travailleurs âgés de 15 à 18 ans. Au cours de ces visites, 1 234 observations ont été enregistrées, neuf délits et infractions ont été constatés et quatre procès-verbaux ont été dressés. Les secteurs employant des enfants de 15 à 18 ans sont le commerce et la mécanique (31 pour cent), la menuiserie (19 pour cent), la fabrication (14 pour cent), la vente au détail (11 pour cent) et l’industrie du textile (8 pour cent). La commission note que, selon le rapport de 2011 sur le travail des enfants au niveau national communiqué par le gouvernement avec son rapport, les inspections du travail ont révélé que des enfants sont impliqués dans des travaux susceptibles de nuire à leur santé. Les dangers incluent notamment: l’impact de la radiation et l’exposition aux blessures et brûlures durant le soudage; l’usage de machines avec des parties tranchantes et le port de lourdes charges; l’usage de produits chimiques et l’aspiration de poussière; l’usage de teintures; l’usage d’électricité; et l’exposition à de hautes températures. Le rapport indique que, lorsque des enfants âgés de 15 à 18 ans sont détectés dans de telles situations, un travail adéquat leur est offert comme alternative. Exprimant sa préoccupation face à la situation des enfants de moins de 18 ans engagés dans des travaux dangereux et le nombre peu élevé d’infractions relevées et de procès-verbaux dressés en comparaison, la commission prie le gouvernement de redoubler d’efforts afin d’assurer que tous les enfants de moins de 18 ans ne soient pas engagés dans les pires formes de travail des enfants, notamment dans les travaux dangereux. La commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations sur l’application de la convention dans la pratique, y compris des statistiques et des informations sur la nature, l’étendue et l’évolution des pires formes de travail des enfants. Dans la mesure du possible, toutes ces informations devraient être ventilées par âge et par sexe.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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