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Observation (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Argentine (Ratification: 1960)

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La commission prend note de la réponse du gouvernement aux commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI), du 4 août 2011, et de la Centrale des travailleurs de l’Argentine (CTA), en date du 31 août 2010, et en particulier de ce qui suit: 1) en ce qui concerne l’assassinat d’un manifestant du secteur ferroviaire, l’autorité judiciaire a inculpé plusieurs personnes; et 2) au sujet de l’attaque, avec des armes à feu, dont aurait fait l’objet le domicile d’un dirigeant syndical dans la province de Jujuy en 2011, le gouvernement a indiqué que, dans le cadre d’un cas que le Comité de la liberté syndicale examine actuellement, une enquête a été diligentée à ce sujet. La commission prend note aussi des informations suivantes du gouvernement: 1) depuis 2003, il mène une politique visant à approfondir constamment les principes de la liberté syndicale, et les mécanismes de dialogue social ont été renforcés; 2) entre janvier 2011 et octobre 2012, 298 statuts syndicaux et 682 enregistrements syndicaux ont été accordés; et 3) depuis 2004, la négociation collective a une dynamique propre et permanente et s’inscrit pleinement dans le modèle actuel de renforcement du marché interne; elle va de pair avec l’accroissement constant du salaire minimum vital, lequel est fixé à la suite d’un dialogue entre les représentations de travailleurs et d’employeurs (le gouvernement adresse des informations statistiques sur la négociation collective et sur les salaires qui seront étudiées dans le cadre de l’examen de l’application des conventions respectives).
La commission prend note aussi des commentaires du 31 août 2012 de la CSI et de ceux de la CTA des 31 août et 7 septembre 2012, qui portent sur les questions législatives qu’elle a déjà soulignées (selon la CTA, le gouvernement n’a promu aucune modification du régime syndical en vigueur et n’a soutenu aucun des projets soumis au Congrès national par des législateurs de divers groupes parlementaires) et sur des allégations de violation des droits syndicaux dans la pratique (le Comité de la liberté syndicale examine certains des faits allégués). La commission note que, selon le gouvernement, les différends qui avaient été signalés dans diverses entreprises ont été résolus.
En outre, la commission prend note des commentaires, en date du 10 septembre 2012, de la Confédération générale du travail (CGT), qui indiquent que la loi sur les associations syndicales: 1) prévoit les garanties suffisantes pour appliquer pleinement la convention no 87 et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et assurer la pleine participation de l’ensemble des organisations syndicales; et 2) assure un niveau minimum d’inclusion sociale grâce à la figure du syndicat doté du statut syndical, niveau à partir duquel les travailleurs et leurs organisations peuvent obtenir de meilleures conditions de travail.

Demande de statut syndical («personería gremial») de la CTA

La commission rappelle que, depuis 2005, elle note dans ses observations que la demande de reconnaissance de «personería gremial» (statut spécial qui octroie des droits exclusifs, comme le droit de conclure des conventions collectives, le droit des dirigeants à une protection spéciale, le droit à percevoir les cotisations syndicales retenues à la source par l’employeur, etc.) formulée par la CTA en août 2004 est en attente d’une réponse. A diverses occasions, la commission, de même que la Commission de l’application des normes de la Conférence et le Comité de la liberté syndicale (cas no 2477) ont prié instamment le gouvernement de se prononcer sans délai sur cette question. Dans ses commentaires de 2012, la CTA affirme que les autorités n’ont toujours pas répondu à sa demande de statut syndical. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique qu’il ne s’agit pas simplement de prendre des initiatives ou de les appuyer, comme l’affirment certaines organisations syndicales, ou d’affirmer que, à ce sujet, on pourrait appliquer des théories où il est question de confédérations ayant un seul secteur d’activités. La situation juridique de la CTA doit être analysée et s’inscrire dans le cadre du système de la loi no 23551 en tenant compte de la législation et de la jurisprudence applicables. A ce sujet, tout en prenant note des nouvelles informations du gouvernement, la commission prie instamment le gouvernement de se prononcer prochainement sur cette question. La commission prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard.

Loi sur les associations syndicales et son décret réglementaire

La commission rappelle que, depuis de nombreuses années, ses commentaires portent sur certaines dispositions de la loi no 23551 de 1988 sur les associations syndicales et de son décret réglementaire no 467/88 qui ne sont pas conformes à la convention. La commission note que le gouvernement indique ce qui suit: 1) il est surprenant que la commission n’ait jamais mentionné l’évolution constante et permanente des politiques du gouvernement (dont il est fait référence dans les paragraphes précédents) qui approfondissent les principes de la liberté syndicale; 2) le gouvernement a poursuivi dans cette voie, même en période de crise, qui plus est dans le cadre d’une politique économique et sociale qui est conforme aux principes du Pacte mondial pour l’emploi; 3) le système de contrôle se doit de souligner les avancées et les bonnes pratiques des pays étant donné que son rôle est de collaborer avec l’Etat pour résoudre les difficultés; 4) s’il est vrai que, de par leur mission, les organes de contrôle sont habilités à examiner comment l’Etat applique la convention, il ne faut pas perdre de vue que les modalités d’application peuvent varier selon les Etats et que ces modalités sont étroitement liées aux particularités politiques, sociales et culturelles de chaque pays; 5) l’élaboration par le gouvernement de politiques sociales et institutionnelles démontre l’ample participation aux questions sociales et du travail de tous les acteurs et la détermination sans équivoque de l’Etat, laquelle doit aussi être prise en compte lorsque l’on exprime des vues sur le système des relations du travail; 6) il ne semble pas approprié, au vu de la réalité, d’utiliser des termes comme «la commission prie instamment le gouvernement» comme s’il ne s’agissait que d’une question de temps pour que le gouvernement puisse traiter et résoudre des problèmes qui accompagnent l’histoire syndicale du pays, lequel est parvenu à un modèle de relation du travail, alors que l’Etat a démontré l’importance qu’il accorde à la question sociale en général et, en particulier, à ses rapports avec les partenaires sociaux; 7) autrement dit, pour que l’Etat argentin progresse dans la voie qu’il suit depuis des années, tout dépend de processus sociaux et culturels qui permettent de faire converger les intérêts de tous les acteurs dans le même sens et de poursuivre l’action que l’Etat a entamée en prenant les mesures institutionnelles susmentionnées; 8) la mission d’assistance technique qui s’est rendue dans le pays en 2010 a considéré elle-même que le dialogue social qui est requis comporte un engagement politique substantiel que le gouvernement recherche, mais que cet engagement connaît des difficultés tant en ce qui concerne son orientation que les revendications qui sont formulées, en raison de divergences législatives et de certaines attitudes hostiles de la part des partenaires sociaux, ce qui empêche de déterminer une position définie en vue d’un ordre du jour qui tienne compte des éventuelles questions soulevées par les organes de contrôle de l’OIT à propos de l’application des conventions; 9) malgré ces difficultés, le gouvernement continue à rechercher un dialogue social tripartite et un engagement afin que, sans cesser d’aspirer à la justice sociale plus importante qui caractérise les politiques du gouvernement, on puisse progresser dans le sens des consensus nécessaires pour mieux satisfaire les observations du système de contrôle de l’OIT; et 10) à cette fin, un groupe de travail tripartite a été constitué le 17 octobre 2012 pour élaborer un ordre du jour et traiter les questions soulevées par la mission d’assistance technique afin d’analyser et de déterminer les moyens d’action possibles pour améliorer la conformité avec les commentaires des organes de contrôle de l’OIT.
La commission se félicite de ces informations. A propos de la déclaration du gouvernement selon laquelle la commission n’a pas mentionné les évolutions positives en matière de liberté syndicale et de négociation collective, elle souligne qu’elle a inclus le cas de l’Argentine dans la liste des cas de progrès à plusieurs reprises ces dernières années (en 2001, 2010 et 2011 à propos de la convention no 87, et en 2005 à propos de la convention no 98). Néanmoins, la commission souhaite souligner que certains problèmes persistent et qu’une centrale syndicale au moins les souligne chaque année.
La commission rappelle que les questions législatives en suspens sont les suivantes:

Statut syndical

  • -L’article 28 de la loi sur les associations syndicales, qui impose à une association, pour pouvoir disputer à une autre le statut syndical, la «personería gremial», de compter un nombre d’affiliés «considérablement supérieur»; et l’article 21 du décret réglementaire no 467/88, qui définit le sens des termes «considérablement supérieur» en indiquant que l’association qui demande ce statut doit compter au moins 10 pour cent d’affiliés cotisants de plus que l’association qui a ce statut. La commission souligne depuis un certain temps que la règle imposant de justifier d’un pourcentage considérablement supérieur, c’est-à-dire 10 pour cent d’affiliés de plus que le syndicat qui bénéficie de la «personería gremial», constitue une condition excessive et contraire aux exigences de la convention et que cette condition crée dans la pratique une difficulté pour les associations syndicales représentatives simplement enregistrées qui souhaitent obtenir la «personería gremial».
  • -L’article 29 de la loi, qui dispose que la «personería gremial» ne peut être conférée à un syndicat d’entreprise que lorsqu’il n’existe pas d’autre syndicat ayant ce statut dans le secteur d’activités, la catégorie ou le secteur géographique concernés; et l’article 30 de la loi, qui fait obligation aux syndicats de corps de métier, de profession ou de catégorie, pour obtenir la «personería gremial», de démontrer qu’ils défendent des intérêts différents de ceux du syndicat qui bénéficie de ce statut, syndicat qui ne doit pas déjà représenter les travailleurs affiliés au syndicat qui demande la «personería gremial». La commission a considéré que les conditions imposées aux syndicats d’entreprise, de corps de métier ou de catégorie pour obtenir la «personería gremial» sont excessives car, dans la pratique, elles restreignent l’accès de ces organisations à ce statut et privilégient les organisations syndicales qui bénéficient de ce statut, même lorsque les syndicats d’entreprise, de corps de métier ou de catégorie sont plus représentatifs dans leur domaine, selon les dispositions de l’article 28.

Avantages découlant du statut syndical

  • -L’article 38 de la loi, qui ne permet qu’aux associations ayant la «personería gremial» et non aux autres de retenir sur les salaires les cotisations syndicales. La commission rappelle, comme l’a souligné la Cour suprême de justice de la nation dans la décision susmentionnée, que le critère de plus grande représentativité ne devrait pas conférer au syndicat le plus représentatif des privilèges qui vont au-delà de la priorité de représentation dans les négociations collectives, dans les consultations de la part des autorités et dans le choix des délégations devant les organismes internationaux. Par conséquent, la commission est d’avis que cette disposition porte préjudice aux organisations qui ne bénéficient pas de la «personería gremial» et constitue une discrimination indue à leur encontre.
  • -Les articles 48 et 52 de la loi, qui prévoient que seuls les représentants des associations dotées de la «personería gremial» bénéficient d’une protection spéciale (immunité syndicale). La commission note que, dans les cas de discrimination antisyndicale, les articles 48 et 52 favorisent les représentants des organisations bénéficiant de la «personería gremial», ce qui va au-delà des privilèges qui peuvent être accordés aux organisations les plus représentatives, en vertu du principe indiqué dans le paragraphe précédent.
Dans ses observations précédentes, la commission avait noté que la Cour suprême de justice de la Nation et d’autres instances judiciaires nationales avaient déclaré inconstitutionnels certains des articles de la loi sur les associations syndicales qui font l’objet de commentaires de la commission. La commission note que la CTA fait état de décisions des autorités judiciaires de première et de seconde instance qui ont déclaré inconstitutionnels les articles 28, 29 et 30 de la loi sur les associations syndicales au sujet desquels la commission a formulé des commentaires. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique que les décisions de la Cour suprême – au-delà du fait qu’elles s’appliquent à un cas concret – mettent en évidence la tendance à l’approfondissement des principes de la liberté syndicale. Le gouvernement ajoute que l’on ne peut pas ne pas tenir compte du fait que ces résultats sont allés dans le sens de la politique du gouvernement qui vise à renforcer le dialogue social et les paramètres applicables au monde du travail. Le gouvernement affirme aussi que, dans ses décisions, la Cour suprême n’a pas remis en question le modèle de promotion de l’unité que comporte la loi no 23551.
La commission se félicite que les décisions rendues par la Cour suprême de justice de la Nation et par d’autres instances judiciaires, nationales ou provinciales, visent à régler certains des problèmes en suspens, conformément à la convention. La commission se félicite aussi de la création du groupe de travail tripartite mentionné par le gouvernement et espère que le gouvernement prendra ces décisions en compte.
Tout en prenant note des progrès mentionnés par le gouvernement en matière de négociation collective et de salaires, ce dont elle se félicite, la commission exprime le ferme espoir que, à la suite d’un examen tripartite des questions en suspens avec l’ensemble des partenaires sociaux, les mesures nécessaires seront prises pour rendre pleinement conformes à la convention la loi sur les associations syndicales et son décret réglementaire. La commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport toute mesure prise à ce sujet.
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