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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2016, Publication : 105ème session CIT (2016)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Guatemala (Ratification: 1952)

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 2016-Guatemala-C087-Fr

Le gouvernement a communiqué les informations écrites suivantes:

Progrès relatifs à l’exécution de la feuille de route découlant de la plainte en application de l’article 26 de la Constitution de l’OIT relative au non-respect de la convention no 87. Enquêtes sur les homicides et décisions rendues jusqu’à présent. Le gouvernement du Guatemala fait part de sa préoccupation par rapport à ces faits et continue, par l’intermédiaire de l’unité spéciale du ministère public pour les délits commis contre des syndicalistes, d’enquêter pour parvenir à la condamnation des auteurs des faits délictueux. Lors de la 326e session du Conseil d’administration de mars 2016, des informations ont été transmises à propos des 14 décisions rendues. Depuis, les enquêtes ont progressé. L’unité spéciale du ministère public a avancé au niveau des démarches effectuées dans le cadre de l’affaire de Bruno Ernesto Figueroa, membre de la sous-délégation du Système pour une prise en charge sanitaire intégrale du syndicat SNTSG (cas no 2609 devant le Comité de la liberté syndicale): a) le 14 avril 2016, des poursuites ont été engagées et une demande d’ouverture de procédure judiciaire a été émise contre quatre personnes pour assassinat, tentative d’assassinat et association illicite; b) le 16 mai 2016, dans la décision de la 10e chambre du tribunal de première instance chargé des poursuites pénales contre la production et le trafic de drogue et des infractions contre l’environnement du département de Guatemala, le chef d’accusation a été reconnu et des poursuites pénales ont été engagées; c) l’audience d’ouverture du procès oral et public d’une autre personne, inculpée de complicité et d’association illicite dans la même affaire, est prévue pour le 29 août 2016.

Progrès relatifs à la convention de collaboration entre la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG) et l’unité spéciale du ministère public pour les délits commis contre des syndicalistes. Quatre réunions ont eu lieu dans le cadre de la convention de collaboration entre les deux entités afin de donner suite aux enquêtes et de faire la lumière sur les faits délictueux. Lors de ces réunions, des observations et des recommandations ont été émises, puis appliquées dans différentes affaires, ce qui a permis d’aboutir à la condamnation à cinq ans de Gerardo Aníbal López (condamné) dans l’affaire de M. Marlon Dagoberto Vásquez (victime) et à l’extinction des poursuites pénales dans l’affaire de M. Jorge Ricardo Barrera Barco (victime) relative à la mort du membre syndical Rómulo Emanuel Mejía Peña. Récemment, le ministère du Travail a tenu des réunions avec les autorités du ministère public et la CICIG pour donner suite aux enquêtes du ministère public. La coopération de la commission a été sollicitée en vue d’accélérer et de hiérarchiser les enquêtes; le commissaire et la Procureure générale de la République ont apporté leur total soutien à la résolution de ces affaires.

Exécution de l’instruction générale no 1-2015 du ministère public pour améliorer l’efficacité des enquêtes sur les assassinats de dirigeants syndicaux et de syndicalistes. L’affaire de M. Mynor Rolando Castillo Ramos. Depuis l’entrée en vigueur de l’instruction no 1-2015, l’unité spéciale du ministère public pour les délits commis contre des syndicalistes a effectué les procédures d’enquête mentionnées dans l’instruction. Preuve en est l’enquête menée sur la mort, en 2015, de M. Mynor Rolando Castillo Ramos, membre du Syndicat des travailleurs de la municipalité de Jalapa, dont le rapide processus d’enquête a permis au ministère public de mettre en accusation l’auteur matériel du fait délictueux et d’ouvrir une procédure judiciaire. Le 18 mai 2016, le tribunal de première instance chargé des poursuites pénales contre la production et le trafic de drogue et des infractions contre l’environnement du département de Jalapa a reconnu le chef d’accusation et a entamé des poursuites pénales pour assassinat et tentative d’assassinat contre une personne qui faisait préalablement l’objet d’un examen psychiatrique.

Etudes de risque pour les dirigeants syndicaux et les syndicalistes menacés et mise en place de mesures de protection. Premier trimestre de 2016. Le ministère de l’Intérieur a fait savoir que, au cours du premier trimestre de 2016, il avait reçu 14 plaintes/demandes de mesures de protection pour lesquelles le département d’analyse des risques de la Division chargée de la protection des personnes et de la sécurité de la police nationale civile a effectué une analyse des risques par rapport aux règles établies; le niveau de risque ayant été jugé faible, aucune mesure n’a été prise.

Demandes d’application du mécanisme de mesures de sécurité préventives conformément au Protocole de mise en œuvre de mesures de sécurité immédiates et préventives en faveur des défenseurs des droits de l’homme sollicitées par le ministère public. Au cours du premier trimestre de 2016, le ministère public, par l’intermédiaire de son unité spéciale, a demandé au ministère de l’Intérieur la mise en place de sept mesures de sécurité préventives personnelles pour des dirigeants syndicaux et des syndicalistes. De plus, huit mesures concernant la sécurité du périmètre ont été demandées à la police nationale civile.

Ligne téléphonique gratuite 1543 pour recueillir les plaintes pour violence ou menaces à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme. Le numéro d’urgence est actif 24 heures sur 24; un personnel spécialisé y répond, dont la mission est de coordonner le soutien immédiat de la police nationale civile et l’activation du Protocole de mise en œuvre de mesures de sécurité immédiates et préventives pour la victime pendant qu’une étude de risque est menée. Dans le cadre du suivi des appels reçus au numéro 1543 au cours du premier trimestre de 2016, deux plaintes ont été déposées auprès du ministère public qui font actuellement l’objet d’enquêtes de la part de l?’unité spéciale du ministère public pour les délits commis contre des syndicalistes et des journalistes.

Formation à la liberté syndicale des personnes chargées de répondre à la ligne téléphonique gratuite 1543. Le 29 mars 2016, le ministère du Travail et de la Protection sociale, avec l’assistance technique du BIT, a dispensé une formation au droit à la liberté syndicale, au droit d’organisation et au droit de négociation collective à un total de 50 personnes – agents chargés de répondre au 1543 (ligne téléphonique du ministère de l’Intérieur), conseillers du centre d’appels du ministère du Travail et de la Protection sociale et agents de la police nationale civile –, afin de les doter des outils nécessaires à l’application des mécanismes qui s’imposent pour garantir la sécurité des personnes associées aux syndicats au Guatemala.

Progrès relatifs au Protocole de mise en œuvre des mesures de sécurité immédiates et préventives en faveur des travailleurs syndiqués, des dirigeants, des cadres, des militants, des leaders syndicaux et des personnes liées à la défense des droits des travailleurs, ainsi qu’en ce qui concerne les lieux d’exercice de leurs activités. Les 23 février, 16 mars et 17 mai, le groupe de travail technique chargé des affaires syndicales s’est réuni avec les institutions concernées et le secteur syndical pour réviser le protocole de protection des syndicalistes. Le 23 février, il a décidé d’attendre les observations du secteur syndical pour en poursuivre la rédaction, observations qui ont été envoyées le 1er mars. La réunion du bureau du 17 mai 2016 a porté sur le projet de protocole du ministère de l’Intérieur, projet qui a été présenté, examiné et discuté. Les participants à la réunion ont décidé que les centrales syndicales présenteraient leurs commentaires et observations le 24 mai 2016 en vue de parvenir à un accord et de signer le protocole. Cependant, le 23 mai, le Movimiento Sindical y Popular Autónomo Guatemalteco et Sindicatos globales Guatemala ont envoyé une note dans laquelle ils indiquaient que le protocole avait été imposé et qu’il ne prenait pas en compte les demandes des syndicats mais que, si ces dernières l’étaient, ils seraient prêts à l’étudier, voire à l’approuver.

Compte tenu de ce qui précède, le gouvernement ouvre de nouveau l’espace permettant au secteur syndical de formuler ses commentaires et avis, afin que ce protocole puisse être adopté d’un commun accord. Il maintient le dialogue et les processus instaurés, tout en précisant qu’il n’a pas imposé ce protocole sans l’approbation du secteur syndical. Par l’intermédiaire du ministère de l’Intérieur, il envisage toujours la possibilité de la viabilité et de l’exécution du protocole.

Création d’une ligne budgétaire couvrant les dépenses des agents de la police nationale civile chargés de la protection des personnes. Il convient d’insister sur le fait qu’aucun individu bénéficiant d’un programme de protection n’a l’obligation de prendre en charge les coûts d’alimentation, de logement ou de toute autre nature concernant les agents affectés à sa protection. A l’heure actuelle, on examine le mécanisme qui doit être employé pour améliorer la situation économique des agents affectés à la Division chargée de la protection des personnes puisque le budget alloué à la police nationale civile et au ministère de l’Intérieur ne suffit pas à couvrir ces dépenses. Il est envisagé d’allouer une «prime de spécialité» à ces agents.

Réformes législatives. Un consultant chargé de rédiger un avant-projet de réforme du Code du travail en matière de liberté syndicale et de négociation collective a été recruté afin d’en aligner les dispositions sur la convention no 87 de l’OIT. Il est prévu de soumettre le projet de réforme au Congrès, fin septembre 2016, après consultation des travailleurs et des employeurs. Le ministère du Travail et de la Protection sociale s’est rapproché de la commission du travail du Congrès afin d’harmoniser la législation avec les normes internationales du travail, en commençant par la sensibilisation à l’importance des réformes du Code du travail, ce qui a permis de nouer une communication entre les deux instances et d’effectuer des analyses conjointes. En outre, à cet égard, un avant-projet de loi portant modification du Code du travail en matière d’application de sanctions administratives par l’Inspection générale du travail en cas d’infraction aux normes du travail a été rédigé. Il sera soumis aux partenaires sociaux dès que possible, avant d’être soumis au Congrès.

Registre syndical. Le ministère du Travail, par l’entremise de la Direction générale du travail, reçoit les demandes d’enregistrement de syndicats et de reconnaissance de la personnalité juridique. Le nombre d’organisations syndicales enregistrées a fortement augmenté: 52 organisations ont été inscrites au dernier trimestre de 2015 et 61 au premier trimestre de 2016.

Traitement et règlement des conflits par la Commission de traitement des conflits déférés à l’OIT en matière de liberté syndicale et de négociation collective. La Commission de traitement des conflits, mise en place en 2014, est actuellement saisie de dix-huit cas, dont neuf font l’objet d’une plainte au Comité de la liberté syndicale et neuf d’une plainte adressée à la commission, qui ont été analysés et étudiés par le médiateur et le secrétariat technique afin de déterminer ceux qui pouvaient être réglés par la commission. Des informations sur les résultats obtenus seront communiquées.

Campagne de sensibilisation à la liberté syndicale et à la négociation collective. La campagne de sensibilisation a été promue et diffusée. Elle a été traduite en maya, en kaqchikel et en quiché et diffusée sur les radios communautaires au niveau national, écoutées par plus de 8 millions de personnes. Elle passe par d’autres d’activités de promotion des droits à la liberté syndicale et à la négociation collective. Elle met l’accent sur les secteurs qui comptent un nombre réduit de syndicats, notamment celui des maquilas. Cette campagne est actuellement diffusée sur le site Internet et les réseaux sociaux de 14 institutions gouvernementales: 1) le Secrétariat à la planification et à la programmation de la Présidence; 2) le Secrétariat à la sécurité alimentaire et nutritionnelle; 3) le Secrétariat à la paix; 4) l’aviation civile; 5) le ministère de la Culture et des Sports; 6) le ministère de l’Economie; 7) le ministère de l’Agriculture et de l’Elevage; 8) le ministère du Développement social; 9) le ministère des Communications; 10) le ministère des Finances; 11) le ministère de l’Intérieur; 12) le ministère des Relations extérieures; 13) TGW Radio; et 14) la chaîne du gouvernement. En conclusion, il est important de mentionner que, outre ces efforts, le gouvernement central a soumis au Congrès une modification de la loi portant adoption du budget annuel qui renforce et augmente le financement du pouvoir judiciaire afin que ce dernier puisse traiter les affaires dont il est saisi et les affaires en cours, qu’il puisse faire reculer l’impunité et qu’il soit accessible. Cette mesure s’inscrit dans un processus de changements structurels que le gouvernement a fixé à brève, moyenne et longue échéance. A cette fin, en mai 2016, le dialogue national «Vers la réforme de la justice au Guatemala» a été lancé. Mené par les présidents de l’exécutif, du législatif et du judiciaire, il vise à renforcer la lutte contre l’impunité au Guatemala.

En outre, devant la commission, une représentante gouvernementale a déclaré que son pays est déterminé à satisfaire aux obligations prévues par les conventions ratifiées. C’est ce qu’a déjà indiqué le Président du Guatemala dans le courrier qu’il a adressé au Directeur général du BIT en mars 2016 dans lequel il a souligné son engagement à respecter le Protocole d’accord et la feuille de route afin de résoudre les questions ayant trait à la convention no 87 contenues dans la plainte présentée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT. A sa 326e session, le Conseil d’administration a fait bon accueil à cette communication ainsi qu’au rapport présenté par le gouvernement dans lequel ce dernier énumère les progrès enregistrés au cours des premières semaines de son mandat. Les mesures prises entre mars et juin 2016 continueront d’être appliquées et seront présentées dans le rapport qui sera soumis à nouveau au Conseil d’administration en novembre 2016. Consciente du rôle des trois pouvoirs de l’Etat, l’oratrice a indiqué qu’elle est accompagnée par une délégation du Congrès de la République dirigée par le président de la Commission du travail. Un processus intense de coordination et de coopération a été entamé avec ces délégués afin de promouvoir l’adaptation de la législation aux normes internationales du travail, avec la participation des travailleurs et des employeurs. Les stratégies fixées par le gouvernement pour 2016-2020 comprennent: 1) lutter contre la corruption et moderniser l’Etat, renforcer l’inspection du travail en la rendant plus transparente et plus efficace; 2) garantir la sécurité alimentaire, la santé intégrale et l’éducation, en particulier en renforçant le système de santé et de sécurité au travail par des actions et des stratégies préventives et de protection des travailleurs. Il est prévu aussi de combattre et d’éliminer le travail des enfants au moyen du mécanisme qu’est la feuille de route pour faire du Guatemala un pays sans travail des enfants; 3) promouvoir le travail décent en actualisant et en définissant la politique nationale de l’emploi qui sera le cadre général d’initiatives, de plans et de programmes destinés à réduire le déficit de travail décent dans le pays, en diminuant la taille de l’économie informelle et en accroissant la compétitivité et le développement économique d’une manière générale; 4) lutter contre la pauvreté et l’extrême pauvreté; 5) assurer la sécurité nationale en créant des mécanismes pour créer les possibilités de travail décent dans le pays afin de prévenir les délits et d’éviter les migrations. Ces stratégies se fondent sur des principes essentiels comme le dialogue, le consensus et la participation des partenaires, la légalité et l’intégralité ainsi que sur une vision globale de la politique publique, priorité étant donné à la population la plus vulnérable, dont les femmes, les peuples indigènes, les migrants, les personnes âgées, les adolescents et les jeunes. En ce qui concerne l’application de la convention, en sa qualité de ministre, l’oratrice s’est réunie au ministère avec les centrales syndicales et le président a reçu les dirigeants syndicaux à plusieurs reprises. Voilà qui démontre que le gouvernement est résolu à instaurer la confiance, à promouvoir le dialogue et à définir en commun un ordre du jour. De plus, 61 syndicats ont été enregistrés au cours des premiers mois de 2016. Le gouvernement reconnaît les défis que pose la situation historique de violence qui existe dans le pays et qui met en péril également la vie des syndicalistes, situation qui requiert des changements profonds et structurels pour être résolue. A cette fin, l’initiative «Dialogue national: vers la réforme de la justice au Guatemala» a été lancée dans le but de renforcer la lutte contre l’impunité dans le pays.

Le commissaire de la CICIG et la procureure générale ont exprimé leur soutien total pour obtenir la condamnation des auteurs des faits délictueux et, à ce jour, 14 décisions de justice ont été prononcées. Des progrès ont également été enregistrés dans certaines enquêtes en cours qui sont examinées par le Comité de la liberté syndicale. En outre, l’oratrice s’est référée aux progrès faits dans le traitement de cas par la Commission de traitement des conflits. Par exemple, dans le cas de la municipalité de Masagua, Escuintla, on a élaboré les bases d’une convention pour le versement de 7 millions de quetzales à 41 travailleurs dont les salaires étaient dus, ce qui mettra un terme à un conflit de quatre ans. Tous ces résultats, limités en raison du contexte général du pays, montrent l’engagement de la présidence et du gouvernement. La ministre fait bon accueil à la proposition de la Directrice du Département des normes internationales du travail de se rendre dans le pays en juillet 2016. En conclusion, l’oratrice a affirmé à nouveau que le gouvernement est préoccupé par l’utilisation simultanée de mécanismes, ce qui a pour effet qu’ils traitent les mêmes allégations relatives à un pays, y compris la plainte contre son pays qu’examine actuellement le Conseil d’administration. L’oratrice a estimé que ces mécanismes font double emploi et, par conséquent, nuisent au fonctionnement et à la crédibilité des organes de contrôle de l’OIT.

Les membres travailleurs ont souligné que le cas du Guatemala a fait l’objet de 22 discussions par la commission au cours des vingt-cinq dernières années dans la mesure où il a systématiquement refusé de donner suite aux graves observations et conclusions formulées par les organes de contrôle de l’OIT et où les assassinats de syndicalistes se poursuivent dans une impunité presque totale. En septembre 2015, Mynor Rolando, un militant du syndicat des employés municipaux de Jalapa, injustement licencié et ayant obtenu une ordonnance de réintégration du tribunal du travail, a été tué par balle, comme neuf autres militants avant lui, alors qu’il attendait que le maire de la ville se conforme au jugement et verse les arriérés de salaire aux employés licenciés illégalement. Au lieu de cela, il a été pris pour cible et harcelé en raison de ses activités syndicales et du dépôt en 2013 d’une plainte auprès du Comité de la liberté syndicale, lequel avait exhorté le gouvernement à prendre les mesures nécessaires afin de garantir la sécurité des syndicalistes menacés. Le gouvernement ne fait pas état de mesures prises alors que la question de la violence et de l’impunité auxquelles sont confrontés les syndicalistes dans le pays est bien connue des organes de contrôle de l’OIT. Dans son rapport, la commission d’experts constate la «grave» absence de progrès sur ces questions, terme qui convient pour qualifier le fait que la quasi-totalité des auteurs et des instigateurs des 74 assassinats de dirigeants syndicaux et de syndicalistes jouissent de leur liberté en toute impunité. Plus inquiétant, le ministère public a remis en cause le mobile antisyndical de ces meurtres, tout en reconnaissant que les procédures d’enquête appropriées n’avaient pas été menées. Le gouvernement échoue à protéger les syndicalistes harcelés et menacés puisque les dirigeants syndicaux qui bénéficient d’une protection doivent régler les frais de repas et d’hébergement de leur garde du corps et choisissent parfois de renoncer à cette protection en raison de son coût. En dépit de la mise en place d’une ligne téléphonique afin de dénoncer ces actes de violence, il est clair que tous les risques n’ont pas été dûment évalués, et que de nombreuses menaces contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes n’ont donné lieu à aucune poursuite par le ministère public. Le gouvernement est, en outre, resté indifférent aux demandes répétées visant à obtenir la participation des syndicats à l’élaboration du protocole de mise en œuvre des mesures de sécurité. Il a, au contraire, mis les représentants des travailleurs devant le fait accompli en les convoquant dans des délais très courts afin de signer des projets auxquels ces derniers n’avaient jamais été associés.

Aucun progrès n’a par ailleurs été accompli dans la mise en œuvre de nombreux autres éléments clés de la feuille de route convenue avec l’OIT. Cela fait vingt-cinq ans que le Guatemala est prié de modifier des dispositions du Code du travail, car elles sont contraires au droit fondamental de la liberté syndicale, mais le gouvernement actuel semble choisir de suivre la même voie que celle prise par ceux l’ayant précédé en ne modifiant pas: l’article 215 c) du Code du travail qui exige la majorité absolue des travailleurs d’un secteur donné pour pouvoir constituer un syndicat de branche; les articles 220 et 223 qui prévoient l’obligation d’être d’origine guatémaltèque et de travailler dans l’entreprise ou dans le secteur économique concerné pour pouvoir être élu dirigeant syndical; l’article 241 qui prévoit que, pour être licite, une grève doit être déclarée non pas par la majorité des votants, mais par la majorité des travailleurs; ou en ne garantissant pas aux différentes catégories de travailleurs du secteur public la protection prévue par la convention. Les propositions formulées par les syndicats nationaux, pourtant conformes aux observations de la commission d’experts, ont également été ignorées, et il convient d’espérer que les organisations d’employeurs joueront également un rôle plus constructif en faveur de la réalisation de cet objectif commun. Certains signes encourageants avaient pourtant incité à l’optimisme, comme l’abandon du décret sur les salaires minima différenciés, qui visait à fixer un salaire inférieur pour les travailleurs des municipalités les plus pauvres du pays, et le ministère du Travail avait commencé à prendre des mesures afin de traiter les demandes d’enregistrement des syndicats. Les membres travailleurs s’était également félicité du lancement de la campagne de sensibilisation sur la liberté syndicale, mais celle-ci reste d’une envergure très modeste, aucun média de masse n’ayant été utilisé pour atteindre la société dans son ensemble. Cependant, dans les faits, pendant qu’il promeut la liberté syndicale, le gouvernement stigmatise la négociation collective pour les syndicats du secteur public et a rendu publique une liste des accords collectifs conclus avec différentes institutions étatiques prétendument préjudiciables au budget de l’Etat. Il est inacceptable de faire porter aux travailleurs et aux accords collectifs la responsabilité de plusieurs décennies de mauvaise gestion financière et de corruption. Les membres travailleurs ont conclu en soulignant que, malgré les efforts importants qui ont été accomplis, la situation reste extrêmement grave et que tous les acteurs doivent redoubler d’efforts pour garantir une mise en œuvre de la feuille de route dans les plus brefs délais.

Les membres employeurs ont indiqué que ce cas est celui qui a été examiné le plus grand nombre de fois dans toute l’histoire de la commission. A cet égard, ils se sont dits préoccupés par le fait que ce cas soit examiné simultanément par plusieurs organes de contrôle et se sont interrogés sur le fonctionnement de ces mécanismes. Le gouvernement a communiqué des informations sur les mesures prises pour donner suite à la feuille de route mise en place avec les partenaires sociaux. On observe un meilleur fonctionnement du dialogue social. On observe également que des progrès ont été accomplis depuis l’examen de la commission d’experts. Il convient de souligner que des échanges ont lieu entre le Président et la ministre du Travail, et les travailleurs, ainsi qu’entre la CICIG et le procureur général et le ministère public pour faire la lumière sur les cas de violence. Néanmoins, il est regrettable qu’il n’y ait pas un plus grand nombre de cas élucidés à ce jour. Il faut prendre des mesures à cet égard, ainsi que pour garantir une meilleure protection des syndicalistes menacés. Il n’est pas acceptable que ces personnes doivent assurer elles-mêmes leur protection, car elles doivent y consacrer des ressources. En ce qui concerne les questions législatives, en particulier concernant l’obligation d’être guatémaltèque pour être dirigeant syndical, il faut parvenir à un équilibre entre les droits syndicaux et la souveraineté de l’Etat. En outre, il convient de souligner l’augmentation du nombre d’enregistrements de syndicats; la commission tripartite semble progresser dans ses travaux et les employeurs et les travailleurs ont présenté différents projets de réforme du Code du travail devant le Congrès. La Commission de traitement des conflits constitue un excellent mécanisme, mais elle doit parvenir à de meilleurs résultats. Dans ce contexte, il conviendrait de donner la priorité au dialogue à l’intérieur du pays. Les membres employeurs ont rejeté l’idée d’examiner l’application de la convention d’un point de vue sectoriel, en particulier dans les maquilas, puisque la convention ne le prévoit pas. En outre, ils ont mentionné le projet de coopération conclu avec l’Union européenne, mais ont indiqué que le gouvernement doit préciser si ce projet prévoit de financer le maintien en poste du représentant du Directeur général du BIT dans le pays.

Le membre travailleur du Guatemala a fait remarquer que, en dépit des efforts de l’OIT, les autorités ne tiennent pas leurs promesses et les violations systématiques de la convention se poursuivent. Les syndicalistes font toujours l’objet de contraintes, de menaces, de persécutions, d’intimidation, de discrimination et de licenciements massifs injustifiés. La situation est une des plus graves au monde, comme le montre l’édition 2016 du «Rapport annuel des violations des droits syndicaux» de la Confédération syndicale internationale (CSI), et les organisations syndicales ont dénoncé les assassinats de 74 dirigeants syndicaux, dont 18 depuis janvier 2013. Le recours au licenciement antisyndical est lui aussi une pratique habituelle. Les autorités n’enquêtent pas, ne recherchent pas la vérité, ne condamnent pas les coupables et n’obligent pas non plus les entreprises à réintégrer les syndicalistes alors que des jugements définitifs l’exigent. Les organes de contrôle de l’OIT ont dénoncé une nouvelle fois la gravité de la situation et, dans le cadre de l’accord de libre-échange CAFTA-RD, le gouvernement américain a demandé la constitution d’un comité d’arbitrage pour statuer sur des violations réitérées des droits au travail, en soulignant la situation de la liberté syndicale et de la négociation collective. Les organes techniques et la Commission de traitement des conflits n’ont pas donné les résultats espérés. Chose importante, malgré la présence du bureau du représentant du Directeur général du BIT au Guatemala, aucun progrès n’est constaté quant aux promesses faites par l’Etat dans le cadre de la feuille de route. Alors que la campagne de sensibilisation a démarré sur un mode minimaliste, se déroule en parallèle une campagne publique contre la négociation collective à l’initiative du gouvernement et du procureur général de la nation, avec la remise en question de nombreuses conventions collectives et des poursuites contre les travailleurs qui participent aux négociations. Les mesures que prend le gouvernement et celles qu’il ne prend pas témoignent de son manque d’intérêt pour la recherche d’une solution à la gravité de cette situation. Le gouvernement a la possibilité historique de mettre réellement en œuvre la feuille de route, mais, si cette situation de non-respect persiste, les syndicats, tout en proposant leur soutien pour concrétiser les promesses faites, insisteront sur la nécessité de constituer une commission d’enquête.

Le membre employeur du Guatemala a appelé l’attention de la commission sur le recours simultané des mécanismes de contrôle. En effet, les faits auxquels le cas fait référence font partie d’une plainte déposée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT, qui est actuellement examinée par le Conseil d’administration. Par ailleurs, des progrès sont accomplis dans le pays en ce qui concerne les questions traitées par la commission d’experts depuis plusieurs années. Pour ce qui est des assassinats de dirigeants syndicaux et de syndicalistes qui ont lieu depuis plusieurs années, il convient de nouveau d’exprimer l’indignation devant ces faits et de demander qu’ils soient élucidés et que les coupables soient punis. En même temps, il faut se satisfaire du fait que les institutions aient été renforcées, tant le ministère public – organe chargé des poursuites pénales – avec l’appui de la CICIG, que le pouvoir judiciaire. Si des condamnations ont récemment été prononcées dans certains cas faisant l’objet de plaintes, celles-ci demeurent rares. Les domaines d’enquête ne doivent pas se limiter aux causes antisyndicales dans la mesure où le Guatemala est un pays qui enregistre des records de violence. Cependant, l’orateur a exprimé son désaccord avec le fait qu’il existe un climat de violence antisyndicale. De la même manière, il est regrettable que les travailleurs se refusent à intégrer les employeurs au groupe de coordination interinstitutions qui s’intéresse à cette thématique, ce qui permettrait d’accéder à l’information et de contribuer à la recherche de solutions à une thématique aussi complexe. Tous les efforts visant à renforcer les institutions du pays en vue de résoudre les affaires avec la collaboration du ministère public et de la CICIG, d’établir des tribunaux spéciaux pour traiter sans délai les infractions visant des syndicalistes et d’adopter les mesures nécessaires pour la protection des syndicalistes et des dirigeants syndicaux qui se sentent menacés du fait de l’exercice de leurs fonctions doivent être soutenus. En ce qui concerne la non-conformité de certaines dispositions du Code du travail et de la Constitution politique avec la convention, le processus de consultations en vue de la réforme proposée a débuté fin 2015 avec les commentaires que les employeurs ont présentés aux travailleurs qui, à leur tour, ont présenté un projet très complet reprenant la proposition. Il faut espérer que le gouvernement réussisse, avec l’appui d’un expert indépendant mandaté par le BIT, à soumettre sous peu à la commission tripartite un document final qui pourra, après discussion, être adressé au Congrès. En outre, il convient de relever la campagne de sensibilisation en matière de liberté syndicale approuvée de manière tripartite ainsi que les travaux de la Commission de traitement des conflits. Les employeurs prennent part à cette commission qu’ils considèrent comme le meilleur système de règlement des différends. Il serait souhaitable de compter sur le même engagement et la même participation des travailleurs dans cette instance et dans d’autres instances bipartites et tripartites. En conclusion, l’orateur a rappelé que les employeurs apprécient le travail du Bureau dans le pays, en particulier le travail du représentant du Directeur général au Guatemala.

Le membre gouvernemental des Pays-Bas, s’exprimant au nom de l’UE et de ses Etats membres, ainsi que de l’ex-République yougoslave de Macédoine, la Norvège et de la République de Moldova, a réaffirmé l’engagement des pays précédemment cités envers la promotion d’une ratification universelle et d’une application efficace des conventions fondamentales de l’OIT. Ces Etats attachent une importance particulière à tous les droits de l’homme, y compris la liberté syndicale, et reconnaissent le rôle capital joué par l’OIT dans l’élaboration, la promotion et le contrôle de l’application des normes internationales du travail. L’UE et ses Etats membres ont suivi de près les discussions et ont exprimé leurs points de vue sur le cas du Guatemala lors du Conseil d’administration en ce qui concerne l’exécution de la feuille de route de 2013 et ses indicateurs. Il convient d’accueillir favorablement l’engagement ferme du nouveau gouvernement du Guatemala d’adopter les actions nécessaires pour permettre la pleine application de la convention, de même que les mesures positives récemment prises à cet égard. Il convient également de saluer la plus grande coopération avec le BIT et l’orateur invite le gouvernement à redoubler ses efforts, avec l’aide du BIT et en consultation avec les partenaires sociaux, dans les domaines prioritaires qui suivent. D’abord, il est nécessaire de protéger les représentants syndicaux et de combattre la violence dont ils sont victimes, au même titre que l’impunité. Malgré quelques mesures adoptées par le gouvernement dans ce domaine, l’impunité persiste; il est donc crucial de veiller au suivi approprié des affaires d’assassinats de responsables et de membres syndicaux, ainsi qu’au jugement et à la condamnation rapides des auteurs. Il est également essentiel et urgent d’assurer une meilleure protection des représentants syndicaux menacés. Ensuite, avec l’assistance du BIT, des réformes législatives doivent être entreprises pour rendre la législation conforme à la convention. Enfin, tout en saluant la hausse significative de syndicats enregistrés au cours du second semestre de 2015, l’orateur a invité le gouvernement à prendre des mesures supplémentaires pour permettre l’inscription sans entrave des organisations syndicales. L’UE et ses Etats membres sont prêts à continuer de soutenir le Guatemala dans ses efforts de respecter la convention.

Le membre gouvernemental du Mexique, s’exprimant également au nom du groupe des Etats d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), a salué la volonté politique que le nouveau gouvernement a exprimée au cours des premiers mois de son entrée en fonctions. Ainsi, il a montré les signes d’un engagement à garantir les droits syndicaux, y compris le droit d’organisation, et de la création d’emplois décents dans le pays, en coordination avec le BIT. Cet engagement a pris la forme d’une lettre que le Président a adressée au Directeur général du BIT, lettre qui a été soumise au Conseil d’administration, en mars 2016, pour examen. Le gouvernement devrait redoubler d’efforts pour éclaircir les faits survenus à l’endroit de dirigeants syndicaux et octroyer les garanties nécessaires pour protéger la liberté syndicale. De la même manière, il faut noter les mesures que le nouveau gouvernement a prises pour faire avancer la mise en œuvre de la feuille de route et du calendrier présentés à la 326e session du Conseil d’administration, en mars 2016. Au cours de cette session, le Conseil a instamment prié le gouvernement de prendre sans délai toutes les mesures nécessaires à la pleine application des indicateurs clés et de la feuille de route, y compris les points prioritaires qui requièrent encore des mesures complémentaires urgentes, reporté à sa 328e session (novembre 2016) la décision d’envisager la désignation d’une commission d’enquête, et invité la communauté internationale à allouer les ressources nécessaires pour que le bureau du représentant du Directeur général du BIT au Guatemala renforce son appui aux mandants tripartites en application du mémorandum d’accord et de la feuille de route. L’orateur a demandé à tous les secteurs de continuer à travailler conjointement à la mise en œuvre des mesures adoptées de manière tripartite, et de celles qui le seront, en vue de parvenir à des solutions durables et à la pleine application de la convention dans le pays. Le respect des droits fondamentaux au travail, en particulier la liberté syndicale et la négociation collective, est un élément essentiel à la réalisation du travail décent. L’orateur a soutenu le travail effectué par le bureau du représentant du Directeur général du BIT au Guatemala et l’assistance technique qu’il prête à cette fin et demandé qu’une assistance technique continue d’être apportée afin de mettre entièrement en œuvre la feuille de route au Guatemala. En conclusion, l’orateur a redit sa préoccupation face à l’utilisation simultanée de mécanismes de contrôle pour des allégations concernant un pays dont le Conseil d’administration a déjà été saisi. Le double emploi des mécanismes risque de fragiliser le fonctionnement des organes de contrôle de l’OIT.

Le membre gouvernemental du Panama a reconnu les efforts fournis par le gouvernement concernant le traitement des procédures pénales et le soutien apporté à la Commission de traitement des conflits ainsi que son engagement en ce qui concerne l’exécution de la feuille de route et du calendrier d’exécution, comme indiqué lors de la 326e session du Conseil d’administration en mars 2016. Il a souligné également la précieuse assistance technique du BIT en ce qui concerne les réformes législatives recommandées. D’autre part, l’orateur a exprimé sa préoccupation au sujet de la duplication de l’examen de la situation par les divers organes de contrôle. De plus, le gouvernement du Panama, dans sa condition de président provisoire du Conseil des ministres d’Amérique centrale et de la République dominicaine, réitère sa préoccupation au sujet de l’intégration du Guatemala et de deux autres pays de la région, le Honduras et El Salvador, dans la liste des cas individuels devant être examinés par la commission. Il manque encore des critères de sélection objectifs et transparents, et il semble que la commission n’apprécie pas à sa juste valeur tout le soutien apporté par le BIT aux pays de la région.

Un observateur représentant l’Internationale des services publics a mentionné les menaces de mort dont font l’objet de nombreux dirigeants syndicaux et les mesures de protection dont ils bénéficient. Cette protection est le fruit d’initiatives prises par les syndicalistes et de la solidarité internationale. Pour autant, ces mesures représentent une charge financière étant donné que les syndicalistes doivent prendre en charge la nourriture et le transport des personnes assurant leur protection. Ce qui oblige dans certains cas des syndicalistes à renoncer à cette protection. Ces faits témoignent de l’existence d’un problème structurel qui empêche l’exercice de la liberté syndicale. S’agissant du secteur public, la gravité de la situation décrite par la commission d’experts est toujours d’actualité. Notamment, aucun progrès n’est enregistré dans les enquêtes ouvertes pour menaces de mort; une campagne délibérée a été orchestrée pour abolir la négociation collective dans le secteur public où 19 conventions collectives sont en cours de renégociation. Dans d’autres cas est alléguée l’inconstitutionnalité de certaines conventions collectives. Des moyens de communication sont également utilisés contre la liberté syndicale. Les syndicats qui ont signé des conventions collectives font l’objet d’attaques. En outre, des licenciements antisyndicaux ont toujours lieu, l’enregistrement des syndicats est toujours interdit et un dirigeant syndical a été arrêté. D’autre part, il a indiqué ignorer l’initiative visant à réformer le Code du travail en matière de liberté syndicale. Cela fait des années que l’on propose, en vain, l’instauration d’un dialogue bipartite pour le secteur public pour résoudre ces problèmes et plusieurs autres. Il a déclaré que les travailleurs sont ouverts au dialogue, avec un soutien international, pour mettre fin aux attaques dont fait l’objet le syndicalisme dans le secteur public et les services publics. Il faut s’attaquer de manière urgente à la corruption, aux investissements publics et à leur financement, au travail décent et restaurer la légitimité sociale du syndicalisme dans le secteur public.

Le membre travailleur de la Colombie a indiqué que le fait même que le cas présent soit examiné depuis tant d’années est la preuve qu’il s’agit d’un des cas les plus manifestes, les plus persistants et les plus systématiques de violation de la liberté syndicale. Dans ses commentaires, la commission d’experts faisait état de: 1) la nécessité d’enquêtes et de condamnations pour atteinte à la vie et à l’intégrité des dirigeants syndicaux et des syndicalistes; 2) la protection des dirigeants syndicaux et des syndicalistes par des mesures réelles et efficaces; 3) la mise au point d’une législation conforme aux dispositions de la convention encourageant et garantissant l’existence et le maintien des organisations syndicales sans qu’il y ait ingérence injustifiée de la part des employeurs et de l’Etat. Il a ajouté que cette situation est semblable à celle de son pays. Il s’agit de cas de violation continue de la liberté syndicale. Ces cas ne sont pas des faits isolés, et le traitement des violations s’inscrit dans une structure juridique et institutionnelle mise en place pour répondre à l’augmentation des organisations syndicales. Il s’agit de mettre en place un plan ambitieux visant à instaurer la liberté syndicale, dont les caractéristiques seraient les suivantes: qu’il ait un impact réel sur le terrain; qu’il soit appliqué afin de réduire le nombre de cas de violation de la liberté syndicale; qu’il encourage le droit à l’organisation syndicale; et qu’il permette de remédier à l’impunité pour crimes perpétrés à l’encontre de syndicalistes. Si l’on en croit les organisations syndicales du Guatemala, il n’y a eu aucun progrès notable dans les enquêtes sur les actes de violence commis contre des syndicalistes. Les mesures de protection que le gouvernement affirme avoir prises sont inefficaces. Pour conclure, l’orateur a exprimé l’espoir que la commission fixera des délais contraignants et définira des éléments précis qui permettent de résoudre les problèmes identifiés.

Le membre employeur du Mexique a déploré la violence dont sont victimes les syndicalistes, mais a fait valoir que cela s’inscrit dans le climat de violence généralisée qui règne dans le pays. Il faut appuyer les mesures qui visent à rechercher des solutions à ces problèmes. Il a toutefois regretté que le cas soit examiné de manière simultanée par plusieurs organes de contrôle et a estimé que cela n’aide pas à régler les problèmes.

La membre gouvernementale du Canada s’est référée à plusieurs points soulevés par la commission d’experts dans ses commentaires et à la procédure relative à la plainte présentée en vertu de l’article 26, notamment les mesures préconisées dans la feuille de route. Elle a exprimé son ferme soutien à la finalisation de la feuille de route et a appelé le gouvernement du Guatemala à faire tout son possible pour démontrer des progrès dans la mise en œuvre de réformes législatives. Son gouvernement s’est dit troublé par les allégations d’actes de violence graves commis sur des dirigeants syndicaux, dont fait état le rapport de la commission d’experts. Elle a demandé que des mesures visant à ouvrir des enquêtes, entamer des poursuites judiciaires et assurer la protection soient prises sans délai pour que s’exercent librement les droits syndicaux. Réaffirmant l’engagement de son gouvernement à respecter les droits de l’homme au moyen de l’application pleine et entière des instruments relatifs aux droits de l’homme, comme la convention no 87, elle a demandé instamment au gouvernement du Guatemala de traduire en des actes concrets son engagement à appliquer et à respecter ces normes.

Le membre travailleur de l’Espagne, s’exprimant au nom des organisations syndicales Union générale des travailleurs (UGT) et Commissions ouvrières (CCOO), a estimé que le Guatemala constitue l’exemple le plus manifeste de violation systématique des droits fondamentaux et d’inobservation du principe de bonne foi qui doit régir l’application des traités internationaux. L’orateur a déploré l’absence de progrès concernant un cas que la commission a examiné à 18 reprises au cours des vingt-cinq dernières années. Au-delà des formes les plus extrêmes de violence à l’encontre du mouvement syndical et l’impunité, on dénombre également de nombreuses autres violations de la liberté syndicale, par exemple la criminalisation des activités syndicales, l’inefficacité du système judiciaire et de l’inspection du travail et l’absence de protection contre les actes d’intimidation, d’ingérence ou de discrimination antisyndicale. Alors que d’un côté est menée une timide campagne de sensibilisation sur la liberté syndicale, de l’autre des mesures condamnables continuent à être prises pour décourager l’affiliation syndicale telles que des menaces, intimidations, persécution et licenciements de syndicalistes. Le droit de négociation collective est également compromis par le fait que les services du procureur général entament des procédures pénales contre les conventions collectives négociées avec des institutions de l’Etat et le secteur municipal. Dans ce contexte, l’orateur a invité le gouvernement à mettre un terme aux faits suivants: les restrictions à la constitution d’organisations et au droit d’élire librement les dirigeants syndicaux; les restrictions au droit des organisations d’organiser librement leur activité, par exemple la possibilité d’imposer un arbitrage obligatoire dans les transports publics, l’imposition de sanctions, y compris pénales, en cas de grève des fonctionnaires ou de travailleurs de certaines entreprises, ou d’autres actes de protestation syndicale; le déni, dans la pratique, des droits syndicaux aux nombreux travailleurs du secteur public engagés en vertu du poste budgétaire 029; les restrictions au droit de grève; le retard intentionnel dans la réintégration des syndicalistes licenciés; et les restrictions à la négociation collective dans le secteur public et dans celui des maquilas.

Le membre employeur du Panama a déclaré que l’OIT a une attitude contradictoire vis-à-vis de pays qui cherchent à résoudre leurs conflits par le dialogue social tripartite. D’un côté, depuis plus de dix ans, l’OIT promeut la création d’instances de dialogue tripartite dans les Etats Membres afin de traiter et de résoudre à l’échelle nationale les désaccords au moyen du dialogue et de la négociation entre les partenaires sociaux. A cet égard, l’orateur a souligné qu’il a été démontré que cette méthodologie constitue le moyen approprié pour résoudre les conflits, comme l’illustre l’expérience des instances de dialogue tripartite de la Colombie et du Panama. Le gouvernement, avec l’appui de l’OIT, a décidé de suivre cette voie en créant une instance de dialogue tripartite et en élaborant une feuille de route pour résoudre les conflits et répondre aux plaintes soumises à l’OIT. D’un autre côté, inscrire dans la liste de cas que la commission doit examiner les pays qui suivent cette voie est non seulement décevant, mais donne le message que cela ne vaut pas la peine de faire le nécessaire pour créer les instances de dialogue tripartite. A cet égard, l’orateur a souligné que, au contraire, l’OIT devrait redoubler d’efforts au moyen de l’assistance technique pour que, dans les pays qui les mettent en place, les instances de dialogue tripartite aient le succès nécessaire.

Le membre travailleur des Etats-Unis a signalé que, si un nombre croissant d’Etats Membres de l’OIT ratifient des accords commerciaux incluant des engagements à respecter les conventions de l’OIT et les déclarations qui y sont liées, il a noté avec inquiétude la réticence et l’inefficacité des gouvernements à recourir aux instruments de l’OIT mentionnés, destinés à protéger les droits des travailleurs dans le cadre d’accords commerciaux. Le Guatemala et les Etats-Unis figurent parmi ces gouvernements. L’Accord de libre-échange avec la République dominicaine et l’Amérique centrale (CAFTA-DR) a pris effet entre les Etats-Unis et le Guatemala en 2006. Le traité requiert des parties qu’elles reconnaissent et protègent la liberté syndicale et d’autres droits inclus dans la Déclaration de l’OIT de 1998 relative aux principes et droits fondamentaux au travail. Si le fait que les Etats-Unis n’ont pas ratifié la plupart des conventions fondamentales au cœur de la Déclaration est en soi un problème, le Guatemala les a de son côté ratifiées, mais persiste à ne pas se conformer à la convention actuellement examinée, tout en continuant pourtant de profiter des avantages commerciaux découlant du CAFTA-DR. L’année dernière, devant cette même commission, des informations ont été communiquées sur le parcours tortueux que les travailleurs guatémaltèques ont parcouru pendant sept ans pour entamer la procédure de règlement des différends prévue par le CAFTA-DR. Il y a un an, la commission d’arbitrage a entendu les arguments des parties, lesquelles concernaient, dans leur quasi-totalité, la convention. Depuis le début de l’arbitrage, les travailleurs guatémaltèques sont confrontés à de nouveaux retards. Le premier rapport de la Commission de traitement des conflits est désormais prévu plus tard dans le mois, soit plus de huit années après que le gouvernement des Etats-Unis a reçu la requête des travailleurs. Les travailleurs guatémaltèques ont apporté la preuve de nombreuses violations de la convention, y compris des tentatives de corruption de dirigeants syndicaux pour qu’ils quittent leur emploi et pour convaincre les salariés de ne pas adhérer à un syndicat, le renvoi de travailleurs à cause de leur affiliation syndicale ou pour ne pas avoir dissout le syndicat, la non-application de lois pertinentes et l’absence d’enquêtes, de poursuites et de sanctions contre les auteurs d’infractions à la liberté syndicale. Les violations se sont poursuivies alors que la requête des travailleurs était en cours d’examen et, pendant ces huit années, 61 dirigeants et membres syndicaux ont été assassinés. La grande majorité des auteurs et tous les instigateurs de meurtres de responsables et de membres syndicaux n’ont pas été appréhendés. A différentes occasions, l’OIT a clairement établi la connexion entre la violence antisyndicale et la capacité d’exercer la liberté syndicale. Si le personnel du bureau du représentant américain au commerce a suggéré aux dirigeants du mouvement syndical des Etats-Unis que, assassiner ou agresser un syndicaliste n’était pas une infraction aux normes du travail dans le traité commercial avec le Guatemala, l’OIT a depuis longtemps été claire sur le sujet: la violence antisyndicale constitue bien une violation de la convention.

La membre gouvernementale des Etats-Unis, se référant aux informations que le gouvernement a fournis à la commission, a salué le fait que le gouvernement aborde la situation sous un nouvel angle et qu’il s’engage à résoudre les problèmes déjà anciens dans ce domaine. Elle s’est dite convaincue que le gouvernement octroiera au ministère du Travail les ressources et les outils d’application nécessaires à la mise en œuvre des mesures qui s’imposent pour protéger les travailleurs contre toutes les formes de discrimination antisyndicale et garantir que la législation prévoit toutes les voies de recours nécessaires en cas d’atteinte à la liberté syndicale. Les sujets de vive préoccupation soumis aujourd’hui à la commission sont indéniables et examinés depuis de nombreuses années. Il a été pris note des nouvelles procédures établies par le gouvernement pour améliorer les enquêtes menées sur les assassinats de syndicalistes. Bien que l’instauration de ces procédures constitue une avancée importante, la persistance d’un niveau élevé d’impunité demeure un sujet de profonde préoccupation. Le gouvernement est invité à renforcer l’application de ces procédures, à continuer de coopérer avec la CICIG, et à renforcer cette coopération, ainsi qu’à apporter des ressources supplémentaires aux enquêtes menées et aux poursuites engagées en cas de violences et de menaces à l’endroit de syndicalistes. Les efforts récemment déployés par le ministère du Travail en vue de réduire l’arriéré d’enregistrement de syndicats ont été salués. Ils devraient être institutionnalisés afin d’entraîner une modification du système, ce qui permettrait d’accélérer l’enregistrement des syndicats et des conventions collectives conclues. Le taux très faible d’enregistrement de syndicats et de conventions collectives dans le secteur des maquilas et les problèmes récents survenus dans le secteur public constituent néanmoins des sujets particuliers de préoccupation. Le fait que le gouvernement a demandé l’appui du BIT pour mieux faire connaître les normes internationales du travail aux membres du pouvoir judiciaire constitue une avancée positive. A ce jour, cependant, la formation dispensée ne s’est pas traduite par une meilleure application des décisions des tribunaux du travail concernant les victimes de licenciements antisyndicaux. Le gouvernement a été instamment prié de se pencher immédiatement sur cette question et de prendre toutes les mesures nécessaires, y compris d’engager des poursuites pénales, pour parvenir au plein respect de ces décisions, en particulier celles qui imposent la réintégration des travailleurs concernés, dans les délais prévus par la loi. De la même manière, la récente demande d’assistance technique que le Guatemala a adressée au BIT en vue d’élaborer des lois conformes aux recommandations des organes de contrôle de l’OIT est saluée. L’oratrice a exprimé l’espoir que des projets de loi seront adoptés dans les meilleurs délais afin de résoudre les incompatibilités entre certaines dispositions législatives et la convention soulevées par la commission d’experts. Elle a également exprimé l’espoir qu’un projet de loi portera sur le rétablissement de l’autorité directe du ministère du Travail en matière de sanctions. Le gouvernement a été instamment prié de tirer pleinement parti de l’assistance technique du BIT et de saisir cette opportunité pour garantir le respect des droits des travailleurs au Guatemala en adoptant des dispositions juridiques supplémentaires ainsi qu’en améliorant de façon tangible l’application de la législation du travail et en allouant les ressources nécessaires pour ce faire.

La membre travailleuse de l’Italie, rappelant la présence répétée de ce cas devant la commission ainsi que le grand nombre de cas concernant le Guatemala examinés par le Comité de la liberté syndicale, a déclaré que des mesures efficaces et concrètes doivent être prises de manière urgente. Aussi choquant que soit le nombre de meurtres et d’actes de violence dont sont victimes les syndicalistes, rien ne peut donner une idée réelle de ce que vivent chaque jour les travailleurs au Guatemala depuis vingt-cinq ans. Face à ce climat de violence générale, le gouvernement fait preuve d’une immobilité et d’une inaction croissante, ce qui aggrave la situation, car les atteintes au droit pénal et au droit du travail ne sont jamais punies, les auteurs des crimes se trouvant confortés par le climat d’impunité et par l’absence d’Etat de droit. La communauté internationale en matière de travail doit agir car les droits énoncés dans la convention sont bafoués tous les jours depuis plus de vingt ans. En conclusion, l’oratrice a appelé de ses vœux: l’établissement sans tarder d’une commission d’enquête; la mise en place par le ministère public d’une politique d’enquête intégrée permettant la modernisation des techniques d’enquête appliquées aux actes de violence contre les syndicalistes; une vaste coopération entre le ministère public et la CICIG pour punir les actes de violence commis contre des syndicalistes; et un plan de protection en faveur des travailleurs victimes de violence antisyndicale afin de les protéger de toute atteinte à leur intégrité personnelle.

La membre gouvernementale de la République dominicaine a déclaré que son gouvernement souscrit aux déclarations du GRULAC et à celles du gouvernement du Panama. Exprimant son soutien à la ministre du Travail du Guatemala, elle a reconnu la volonté et les efforts déployés par le gouvernement visant à réaliser l’objectif d’un travail décent, du dialogue social et du respect de la liberté syndicale, conformément aux engagements pris au titre des conventions de l’OIT. Elle a demandé que le BIT appuie le travail de la Commission de traitement des conflits afin que cette dernière puisse donner de bons résultats.

La représentante gouvernementale a indiqué une nouvelle fois que le ministère public a officiellement formulé une accusation et a ouvert une procédure à l’encontre de l’auteur du meurtre de M. Mynor Rolando, et que les autorités publiques sont bien décidées à poursuivre leurs travaux afin de tirer au clair les circonstances de ce meurtre et des autres meurtres de membres du mouvement syndical. Elle a indiqué que, en lien avec les organisations syndicales, des alternatives budgétaires sont actuellement recherchées pour que l’on puisse garantir le paiement des salaires aux agents de la Police nationale civile nommés pour assurer la protection des personnes. Pour ce qui est des accords collectifs du secteur public, elle a reconnu que le gouvernement doit faire face actuellement à une série de défis mais que les partenaires sociaux devraient aussi prendre leur part de responsabilité, de manière à ce que ces défis soient relevés dans le cadre d’une stratégie commune. La représente gouvernementale a déclaré que la corruption au Guatemala touche également les organisations syndicales, bien que les agissements de quelques-uns ne doivent pas nuire à l’ensemble du mouvement syndical. C’est pourquoi elle a invité les partenaires sociaux à se fonder sur la réalité du pays afin de prendre part aux efforts déployés conjointement en vue de déterminer la route qu’il convient de suivre pour le bien du pays. Elle a partagé les préoccupations que le membre syndical du Guatemala a exprimées au sujet du niveau de violence très élevé qui affecte le pays. Il s’agit cependant d’une réalité très enracinée qu’il est impossible de changer du jour au lendemain et qui requiert la participation de tous et de toutes. A cet égard, elle a à nouveau affirmé l’engagement total du gouvernement dans la lutte contre l’impunité. Pour ce qui est du protocole de protection des syndicalistes, les organisations syndicales ne sont pas sans savoir qu’une table ronde technique a été constituée avec le ministère de l’Intérieur, au sein de laquelle des discussions ont eu lieu pendant plusieurs mois au sujet du contenu de ce protocole. Bien qu’aucun consensus n’ait pu être trouvé faute de maturité et d’objectivité, le gouvernement a décidé, malgré certaines expressions et certaines attitudes peu respectueuses de la part des travailleurs, de laisser ce champ de discussion ouvert dans l’espoir encore présent que les organisations syndicales fournissent des contributions. La représentante gouvernementale s’est référée ensuite à la décision du gouvernement de décentraliser les démarches administratives relatives au registre des organisations syndicales, facilitant ainsi les démarches des usagers et évitant l’intervention de tierces personnes qui effectueraient ces démarches moyennant des frais inutiles. La représente gouvernementale a ajouté que son action a pour ligne de conduite permanente le respect de la loi, ce qui suppose que celle-ci s’applique à tous de manière égale. A cet égard, le processus de licenciement du syndicaliste Erick Colmenares, qui a débuté en 2014 sous un précédent gouvernement, s’est déroulé dans le respect de l’ensemble de la procédure judiciaire applicable en la matière et s’est conclu par une autorisation de licenciement qui a été accordée par l’organe judiciaire supérieur du Guatemala. Sur cette base, elle a prié les organisations syndicales de soutenir le respect des lois. Quant aux réformes législatives requises, la représentante gouvernementale a répété que la nomination d’un expert en vue d’entreprendre la préparation d’un projet de loi s’inscrit dans le cadre de l’assistance technique apportée par le BIT. Ensuite, après avoir fait état de certaines initiatives qui ont déjà été portées à la connaissance de la Commission tripartite des affaires internationales du travail, elle a donné la parole au président de la Commission du travail du Congrès du Guatemala. Selon le député, la volonté politique de réformer la législation du travail est bien présente au congrès, et sa commission est pleinement disposée à collaborer avec la commission tripartite et avec le BIT.

Les membres travailleurs ont souligné que ce nouvel examen du cas du Guatemala découle de l’absence persistante de mise en œuvre par le gouvernement des conclusions adoptées tant par cette commission que par d’autres organes de contrôle de l’OIT. Le Guatemala reste l’un des pays les plus dangereux au monde pour les syndicalistes. Le Conseil d’administration a tenté d’engager un dialogue constructif avec le gouvernement afin de trouver des solutions pratiques à des violations extrêmement graves. Cependant, la réalité est que ces violations graves se poursuivent sans relâche et sans sanction significative, créant une situation d’impunité quasi totale. La commission d’experts a reflété dans ses commentaires la gravité de la situation et qualifié l’absence de progrès comme «tragique». Les membres travailleurs ne manqueront pas de mener toutes les actions possibles, à l’OIT ou ailleurs, afin de mettre fin à la violence et l’impunité. Les membres travailleurs ont pris note des indications du gouvernement concernant un petit nombre de jugements rendus, menant à des condamnations ou des acquittements. Cependant, il est inacceptable que tous les auteurs, tant matériels qu’intellectuels, des 74 meurtres de syndicalistes, soient toujours en liberté en toute impunité. En outre, il est particulièrement troublant d’entendre que la motivation antisyndicale de ces meurtres a été mise en doute. En laissant dire que ces crimes sont dus au climat général de violence dans le pays, le gouvernement évite sa propre responsabilité et contribue ainsi à perpétuer l’impunité. Les membres travailleurs ont ensuite souligné que, une fois de plus, le gouvernement n’a pas pris les mesures nécessaires pour modifier la législation nationale afin de la mettre en conformité avec les conventions nos 87 et 98, suivant les observations de la commission d’experts. A cet égard, les organisations syndicales du Guatemala ont présenté une série de propositions d’amendement à la législation suivant strictement les recommandations de la commission d’experts, mais ces propositions ont été ignorées. Les membres travailleurs ont ensuite indiqué que, s’ils se félicitent qu’un certain nombre de syndicats aient finalement été enregistrés, il est regrettable que peu de progrès aient été réalisés pour combattre les obstacles à l’enregistrement. Ils ont également déploré les tentatives évidentes de stigmatiser les conventions collectives dans le secteur public, ce qui consiste à faire porter la responsabilité de l’état désastreux de l’économie et de la mauvaise gestion financière du budget national sur les travailleurs du secteur public. Les membres travailleurs ont finalement exhorté le gouvernement à: fournir une protection rapide et efficace pour tous les dirigeants et membres des syndicats qui sont en situation de risque, en augmentant le budget alloué aux programmes de protection en faveur des membres du mouvement syndical afin que ceux-ci ne doivent pas financer personnellement les coûts associés à leur protection; présenter au congrès un projet de loi, au plus tard en septembre 2016, basé sur les commentaires de la commission d’experts, assurant ainsi la conformité de la législation nationale avec les conventions nos 87 et 98; éliminer les différents obstacles législatifs à la liberté de constituer des syndicats et, en consultation avec les partenaires sociaux, et avec l’appui du représentant spécial du Directeur général du BIT au Guatemala, revoir la procédure de traitement des demandes d’enregistrement des syndicats; et diffuser massivement dans les médias la campagne de sensibilisation sur la liberté syndicale, et cesser immédiatement de stigmatiser et dénigrer à travers ces mêmes médias les conventions collectives en vigueur dans le secteur public.

Les membres employeurs ont souligné les progrès importants qui ont été accomplis dans le cadre du présent cas, notamment l’appui que le BIT a fourni au gouvernement pour mettre en œuvre des mesures positives concernant le règlement des différends et l’enregistrement de nouvelles organisations syndicales. Cependant, des mesures doivent encore être prises en ce qui concerne certains thèmes, tels que les enquêtes sur les homicides de militants syndicaux, l’élucidation de ces homicides et la condamnation des responsables, les études de risque relatives à la protection des syndicalistes et l’adoption de réformes législatives. S’agissant de ce dernier thème, les membres employeurs ont formulé deux réserves aux commentaires de la commission d’experts. La première réserve a trait à la portée de la convention en ce qui concerne la grève. Rappelant que la position des employeurs n’a pas changé sur ce point, les membres employeurs ne soutiennent pas la demande de réformes législatives dans ce domaine. La deuxième réserve porte sur la demande adressée par la commission d’experts afin de supprimer la disposition interdisant aux étrangers ou aux personnes qui ne sont pas d’origine guatémaltèque de faire partie des comités directeurs des organisations syndicales. Selon les membres employeurs, le gouvernement doit exercer pleinement sa souveraineté dans l’octroi de ce droit ou non. Par ailleurs, les membres employeurs ont exprimé le souhait que des progrès soient faits dans la coordination de la Commission de traitement des conflits, grâce à la désignation d’une personne qui jouisse de la confiance et de la reconnaissance des parties et qui puisse trouver des solutions aux problèmes. En outre, ils ont relevé avec intérêt la campagne massive de sensibilisation concernant la liberté syndicale et la négociation collective. Les membres employeurs ont affirmé que, dans la mesure où l’application de la convention fera l’objet d’une analyse – dont on espère qu’elle sera source de grands progrès – par le Conseil d’administration en novembre 2016, il est important que le représentant spécial du Directeur général au Guatemala puisse déployer son action de manière large afin d’approfondir le dialogue social. Compte tenu de ce qui a été précédemment exprimé, les conclusions concernant le présent cas devraient: souligner la nécessité de renforcer l’engagement du ministère public dans les cas d’assassinats de syndicalistes; encourager le congrès à adopter les réformes législatives pertinentes, compte tenu des réserves formulées ci-dessus; prendre note de la campagne publique de sensibilisation et appeler à ce qu’elle se déroule avec plus de fluidité; encourager la Commission de traitement des conflits à obtenir des résultats positifs; et insister sur la nécessité de mettre effectivement en œuvre les mesures prévues dans la feuille de route.

Conclusions

La commission a pris note des informations fournies par la représentante gouvernementale, en présence de représentants du Congrès, et de la discussion qui a suivi sur les points soulevés par la commission d’experts.

La commission a noté avec intérêt la campagne nationale de sensibilisation en matière de liberté syndicale qui est en train d’être appuyée par le représentant spécial du Directeur général.

Prenant en compte la discussion qui a eu lieu sur ce cas, la commission a prié instamment le gouvernement:

  • - d’enquêter, avec le concours du ministère public, sur tous les actes de violence commis contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes, afin de déterminer les responsabilités et de sanctionner les coupables, en prenant pleinement compte, dans les enquêtes, comme une des hypothèses, les activités syndicales des victimes;
  • - d’offrir une protection rapide et efficace à tous les dirigeants syndicaux et syndicalistes menacés, en augmentant le budget consacré aux dispositifs pour la protection des syndicalistes de sorte que les personnes protégées ne doivent supporter personnellement aucun frais liés à ces dispositifs;
  • - de soumettre au Parlement, avant septembre 2016, un projet de loi régissant le nombre de travailleurs nécessaires pour constituer un syndicat et les catégories de travailleurs dans le secteur public, afin de mettre la législation nationale en conformité avec la convention no 87;
  • - de supprimer les différents obstacles législatifs à la libre constitution d’organisations syndicales et de réviser, en consultation avec les partenaires sociaux et avec l’appui du représentant spécial du Directeur général, le traitement des demandes d’enregistrement;
  • - d’assurer la diffusion, dans les grands médias du pays, de la campagne sur la liberté syndicale et la négociation collective, qui est appuyée par le représentant spécial du Directeur général, et de veiller à ce que les conventions collectives en vigueur dans le secteur public ne soient en aucun cas stigmatisées;
  • - de continuer à soutenir les travaux de la Commission de traitement des conflits déférés à l’OIT en matière de liberté syndicale et de négociation collective;
  • - de continuer à prendre les mesures nécessaires pour mettre pleinement en œuvre la feuille de route qui a été adoptée le 17 octobre 2013, en consultation avec les partenaires sociaux.

La représentante gouvernementale a pris note des conclusions de la commission et a indiqué que l’Etat s’engage à respecter le cadre normatif de l’OIT. Il est important de travailler en coordination avec les partenaires sociaux, en faisant preuve d’objectivité et de maturité, pour progresser sur ce point.

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