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Observation (CEACR) - adoptée 2016, publiée 106ème session CIT (2017)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Arabie saoudite (Ratification: 1978)
Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930 - Arabie saoudite (Ratification: 2021)

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La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 31 août 2016, ainsi que du rapport du gouvernement et de sa réponse aux observations de la CSI.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Vulnérabilité des travailleurs migrants à l’imposition de travail forcé. 1.   Travailleurs migrants. La commission note que les travailleurs migrants sont couverts par la loi sur le travail (décret royal no M/51 du 27 septembre 2005) en vertu de la partie III «Emploi des personnes non saoudiennes». Elle note également que, en vertu de l’article 74, un contrat de travail peut être résilié dans les cas suivants: i) avec l’accord des deux parties; ii) à la discrétion de l’une ou l’autre partie s’il s’agit d’un contrat à durée indéterminée; iii) le travailleur a atteint l’âge de la retraite; et iv) en cas de force majeure. En vertu de l’article 75, l’une ou l’autre partie peut résilier un contrat à durée indéterminée, moyennant un préavis écrit d’au moins trente jours avant la date de résiliation lorsque le travailleur perçoit une rémunération mensuelle, et d’au moins quinze jours dans les autres cas. La commission note également que, en vertu de l’article 81, un travailleur peut quitter son emploi sans préavis dans les cas suivants: i) manquement de l’employeur à ses obligations contractuelles essentielles; ii) fraude de l’employeur vis-à-vis des conditions de travail; et iii) pratiques abusives et violentes.
La commission prend note de l’indication du gouvernement dans son rapport selon laquelle la promulgation des décrets ministériels nos 166 et 4786 en 2015 vise à interdire et sanctionner les pratiques de confiscation de passeport par les employeurs. Le gouvernement indique aussi que 16 agences d’emploi agréées ont été mises en place dans tout le pays pour réglementer et surveiller le recrutement de travailleurs migrants et prévenir toute fraude pendant le processus de recrutement.
La commission note que dans ses observations la CSI indique que, en juillet 2016, plus de 10 000 citoyens indiens ont été bloqués en Arabie saoudite sans argent et sans nourriture. Ces travailleurs, dont la plupart travaillaient dans le secteur de la construction, n’avaient pas été payés depuis sept mois, et s’étaient vu confisquer leur passeport. Selon la CSI, le consulat indien à Jeddah a distribué de la nourriture aux travailleurs licenciés; le ministre indien des Affaires étrangères a dû se rendre dans le pays pour organiser le rapatriement de ces travailleurs en Inde, en demandant, pour ce faire, la délivrance de certificats à l’employeur et de permis de sortie au gouvernement. Enfin, selon la CSI, environ 8 000 travailleurs pakistanais et environ 20 000 travailleurs philippins sont dans la même situation. La CSI indique également que beaucoup de travailleurs migrants signent des contrats avec leur employeur, mais que nombre d’entre eux font état de conditions de travail très différentes de celles prévues dans le contrat, d’autres encore ne voyant jamais leur contrat de travail. En outre, la CSI indique que, en octobre 2015, 38 amendements à la loi sur le travail sont entrés en vigueur et que le ministère du Travail a adopté des directives prévoyant des amendes ou augmentant leur montant à l’encontre des employeurs qui commettent des infractions à la réglementation. Cela concerne, entre autres, la confiscation de passeport, le non-versement des salaires en temps voulu, et l’absence d’un exemplaire du contrat de travail remis au salarié. La CSI indique aussi que les amendements susmentionnés pourraient contribuer à protéger les travailleurs migrants, s’ils étaient correctement appliqués. La commission note que le gouvernement indique que, s’agissant de la situation des travailleurs migrants, en particulier les travailleurs indiens abandonnés dans le pays, plusieurs mesures ont été prises pour leur porter assistance. Des unités spéciales ont été mises en place dans toutes les régions du pays où les filiales des entreprises concernées gèrent la crise qui affecte les travailleurs. Les agents des unités spéciales gèrent les besoins de base, y compris la nourriture et les soins médicaux aux travailleurs sur le lieu de résidence. Le gouvernement indique également qu’il a pris en charge tous les frais de permis de séjour et de sortie exigés des travailleurs désireux de quitter le pays et que les amendes seront collectées auprès des entreprises concernées. En outre, le gouvernement indique que l’arrêté no 52958 de 2016 a établi le Programme de protection des salaires qui garantira aux travailleurs la perception de leurs salaires en temps voulu.
La commission rappelle que la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouvent les travailleurs migrants nécessite des mesures spécifiques leur permettant de faire valoir leurs droits, et que ces mesures doivent être efficacement appliquées dans la pratique. A cet égard, la commission prie instamment le gouvernement d’intensifier ses efforts pour veiller à ce que, dans la pratique, les travailleurs migrants ne soient pas soumis à des pratiques qui aggraveraient leur vulnérabilité, notamment en raison de la confiscation de leur passeport et de la substitution de leur contrat de travail. La commission prie également le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour permettre aux travailleurs migrants de s’adresser aux autorités compétentes et de chercher réparation en cas de violation de leurs droits ou d’abus, sans crainte de représailles. Elle prie également le gouvernement de communiquer des informations statistiques sur le nombre d’infractions aux conditions de travail des travailleurs migrants qui ont été récemment constatées et enregistrées par les inspecteurs du travail, et d’indiquer les sanctions appliquées pour ces infractions. Enfin, la commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises pour s’assurer que les travailleurs migrants qui sont victimes d’abus reçoivent une assistance psychologique, médicale et juridique, et de communiquer des informations sur le nombre de centres d’accueil existants en la matière, ainsi que sur le nombre de personnes qui bénéficient de cette assistance.
2. Travailleurs migrants domestiques. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté que les travailleurs migrants domestiques ne sont pas couverts par la loi sur le travail et que leur activité est réglementée par le décret no 310 du 7 septembre 2013 (règlement des travailleurs domestiques et catégories de travailleurs apparentées). La commission a également pris note, lors de la discussion sur l’application de la convention à la Commission de la Conférence en juin 2014, des différentes mesures prises récemment pour protéger les travailleurs migrants domestiques, exposées par le gouvernement. Elle a noté en outre que la Commission de la Conférence reconnaissait les différentes mesures prises par le gouvernement, mais que les membres employeurs et travailleurs soulignaient la nécessité de prendre d’autres mesures pour élaborer et mettre en œuvre une action efficace visant à identifier et éliminer les cas de travail forcé dans le pays. La commission a demandé au gouvernement de continuer à prendre des mesures pour protéger les travailleurs domestiques contre les pratiques abusives et les conditions de travail qui relèvent du travail forcé.
La commission prend note que le gouvernement indique dans son rapport que 37 commissions pour le règlement des différends au travail concernant les travailleurs domestiques ont été mises en place pour fournir une assistance aux travailleurs migrants domestiques. Le gouvernement indique également que différentes mesures ont été récemment prises pour promouvoir les droits des travailleurs migrants domestiques, consistant, entre autres, en la publication d’une brochure d’orientation sur leurs droits, la mise en place d’une ligne téléphonique d’assistance dans huit langues différentes pour fournir des informations et des conseils sur les droits des travailleurs domestiques, ainsi qu’en différentes mesures de sensibilisation à la question. En outre, plusieurs accords bilatéraux ont été signés avec les pays d’origine des travailleurs migrants domestiques, afin de renforcer la collaboration entre le pays et les ambassades et de fournir également une meilleure protection à cette catégorie de travailleurs.
La commission note que, dans ses observations, la CSI indique qu’en vertu de l’article 7 de la loi sur le travail, telle que modifiée, «les travailleurs domestiques et apparentés» sont exclus de ces dispositions. Bien qu’une réglementation sur les travailleurs domestiques ait été adoptée en 2013, l’étendue de la protection accordée aux travailleurs domestiques n’est pas la même que celle dont bénéficient les autres travailleurs en Arabie saoudite. Ainsi, cette réglementation prévoit une durée journalière de travail de quinze heures (avec neuf heures de repos journalier) pour les travailleurs domestiques, alors que cette durée est de huit heures au maximum pour les autres travailleurs. Selon la CSI, le ministère du Travail a confirmé qu’un travailleur domestique ne peut pas quitter son emploi sans une raison valable. La CSI indique également que, en dépit des réformes récentes du travail, les travailleurs migrants domestiques ne bénéficieront pas de la protection prévue par ces réformes.
La commission rappelle l’importance de prendre des mesures efficaces pour assurer que le système d’emploi des travailleurs domestiques migrants ne place pas ceux-ci dans une situation de vulnérabilité accrue, en particulier lorsqu’ils font l’objet de pratiques abusives de la part de leur employeur, telles que la rétention du passeport, le non-paiement des salaires, la privation de liberté ainsi que des violences physiques et sexuelles. De telles pratiques risquent de transformer leur emploi en des situations pouvant relever du travail forcé. A cet égard, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en droit et dans la pratique, pour s’assurer que les travailleurs domestiques migrants sont pleinement protégés contre les pratiques abusives et les conditions pouvant relever du travail forcé.
3. Système de parrainage (kafala). La commission note, d’après les observations de la CSI, que le visa et le statut juridique d’un travailleur sont liés à l’employeur, qui doit s’acquitter des frais de recrutement des travailleurs et est responsable de la réalisation des examens médicaux et de l’obtention de la carte d’identité du travailleur. Le travailleur doit donc obtenir l’autorisation de l’employeur ou du parrain pour changer d’employeur ou quitter le pays. Selon la CSI, le système de visa de sortie obligatoire fait que certains travailleurs sont contraints de travailler pendant des mois ou des années après expiration de leur contrat parce que leur employeur ne leur délivre pas de permis de sortie. La commission prie le gouvernement d’indiquer la manière dont les travailleurs migrants, en particulier les travailleurs domestiques migrants, peuvent exercer dans la pratique leur droit à mettre fin librement à leur emploi afin de ne pas être soumis à des pratiques abusives pouvant découler du système de «parrainage» pour les visas. La commission prie également le gouvernement de communiquer des informations sur les modalités et la durée de la procédure pour changer d’employeur, et de communiquer des informations statistiques sur le nombre de transferts qui ont eu lieu récemment.
Article 25. Sanctions en cas de recours au travail forcé. Depuis un certain nombre d’années, la commission constate que le Code du travail ne contient aucune disposition spécifique interdisant le travail forcé. A cet égard, elle a noté que le gouvernement réitérait ses explications en invoquant l’article 61 du Code du travail, qui interdit aux employeurs d’exiger un travail sans verser de salaire. La commission a observé, à cet égard, que l’article 61 n’interdit pas le travail forcé de manière générale, mais prescrit simplement une obligation de rémunérer l’exécution de travaux dans le cadre d’une relation de travail normale. La commission note l’adoption du décret ministériel no 4786 de 2015 qui établit une grille des différentes catégories d’infractions et les sanctions correspondantes. La commission note que, en vertu de ce décret, les employeurs imposant le travail forcé à un travailleur sont condamnés à une amende de 15 000 rials seulement, amende multipliée en fonction du nombre de cas. La commission rappelle que, en vertu de l’article 25 de la convention, le fait d’exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sera passible de sanctions pénales. La commission prie donc instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que les personnes qui imposent un travail forcé ou obligatoire sont passibles de sanctions réellement efficaces et strictement appliquées. Elle prie le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises à cet égard.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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