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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2017, Publication : 106ème session CIT (2017)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Kazakhstan (Ratification: 2000)

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 2017-Kazakhstan-C087-Fr

Un représentant gouvernemental a indiqué que la loi de 2015 sur les syndicats et le Code du travail de 2015 visaient à renforcer les fondements de l’organisation du mouvement syndical et à en élargir le rôle de défenseur des droits et intérêts des travailleurs. La Constitution et la loi sur les syndicats interdisent à la fois l’ingérence illégale de l’Etat dans les affaires des associations publiques et tout acte qui empêche la constitution ou le fonctionnement d’un syndicat. La discrimination à l’égard d’un citoyen au motif de son affiliation à un syndicat est interdite au Kazakhstan. Les syndicats sont fondés sur l’égalité entre leurs membres. Tous les syndicats sont égaux devant la loi. Les syndicats opèrent en toute indépendance, adoptent leur propre règlement, décident de leur structure, définissent leurs priorités et forment leurs propres comités syndicaux. La législation prévoit que les syndicats agissent indépendamment des organes de l’Etat à tous les niveaux, ainsi que des employeurs et de leurs associations, et que ceux-ci ne les contrôlent pas et qu’ils ne sont pas tenus de leur rendre des comptes. Les syndicats ont le droit de travailler avec des syndicats internationaux et d’autres organisations de défense des droits et libertés des travailleurs et de conclure des accords de coopération. Il existe actuellement deux centrales syndicales nationales qui regroupent près de 3 millions de travailleurs, soit presque la moitié de tous les travailleurs employés du pays. De plus, le Kazakhstan compte 38 syndicats sectoriels, 23 syndicats régionaux et 404 syndicats locaux, ainsi que 20 000 organisations syndicales de premier degré. Quant à la suite actuellement donnée aux observations de la commission d’experts sur les conclusions de 2016 de la Commission de la Conférence, une feuille de route concernant l’élaboration d’un projet de loi a été adoptée et un groupe de travail spécial regroupant tous les partenaires sociaux a été formé pour améliorer la législation relative aux activités syndicales. Ce groupe a déjà formulé des propositions de modification de la législation en vigueur, conformes aux observations et conclusions de la Commission de la Conférence et de la commission d’experts. En septembre 2016, le Kazakhstan a accueilli une mission de contacts directs de l’OIT. Dans son rapport, la mission s’est félicitée du fait que le Kazakhstan était prêt à continuer de mettre la législation nationale en conformité avec la convention et a salué l’ouverture et la transparence du gouvernement au cours des discussions sur les problèmes soulevés. Elle a relevé les avancées positives en ce qui concerne les modifications de la loi sur les syndicats et du Code du travail proposées. Au cours de la mission de contacts directs et de la mission de la Confédération syndicale internationale (CSI) qui a suivi, des propositions nationales de modification de la législation ont été examinées. A ce jour, les mesures suivantes ont été prises. Premièrement, en ce qui concerne la procédure de constitution d’un syndicat, le groupe de travail, compte tenu de la pratique internationale et du nombre croissant de petites et moyennes entreprises dans le pays, a rédigé un projet de loi afin de réduire le nombre de membres fondateurs de dix à trois. Deuxièmement, en ce qui concerne la procédure d’enregistrement des syndicats, la législation en vigueur prévoit un processus en deux temps: 1) un premier enregistrement, dans les deux mois qui suivent sa constitution; et 2) une confirmation du statut de syndicat dans les six mois qui suivent l’enregistrement. Le groupe de travail a proposé de remplacer ce processus compliqué par un processus en un seul temps. Troisièmement, en ce qui concerne la restriction du droit de grève, le groupe de travail a proposé de modifier l’article 176 du Code du travail, qui interdit formellement les grèves dans les entreprises qui appartiennent à la catégorie des installations de production dangereuses, afin de permettre la grève dans ces entreprises, pour autant qu’un service minimum garantisse le fonctionnement ininterrompu de ces installations et la sécurité industrielle. Les conditions et critères utilisés pour classer une entreprise dans la catégorie des installations de production dangereuses sont énoncés aux articles 70 et 71 de la loi sur la protection civile. Toutes les modifications législatives proposées ont été approuvées par les associations nationales de syndicats et d’employeurs. Le 26 mai 2017, la commission interdépartementale sur les activités législatives, qui relève du gouvernement, a examiné et approuvé le cadre conceptuel d’un projet de loi. Un projet de loi est en cours d’élaboration avant soumission au Parlement. Le gouvernement prévoit également de se pencher sur la modification de la loi sur les syndicats, en ce qui concerne le système d’affiliation à un syndicat, ainsi que de la loi sur la Chambre nationale des entrepreneurs, en ce qui concerne la présence du gouvernement au sein de la Chambre. En septembre 2016, au cours de la mission de contacts directs, ainsi que début 2017, le gouvernement a demandé l’assistance technique du Bureau sur ce point. Il attend désormais sa réponse officielle pour commencer à examiner, avec l’appui du BIT, le deuxième train de modifications législatives. Il prendra toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que la législation nationale respecte toutes les dispositions de la convention.

Les membres employeurs ont souligné que, malgré les orientations très claires de la Commission de la Conférence en 2016 et l’engagement du gouvernement, et nonobstant les préoccupations de longue date soulevées par la commission d’experts dans ses observations adoptées en 2006, 2007, 2008, 2010, 2011, 2014, 2015 et 2016, il semble que le gouvernement n’a toujours rien fait pour résoudre les problèmes graves liés à la liberté syndicale des organisations de travailleurs et d’employeurs, surtout la liberté de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier, sans autorisation préalable. Le fait que le gouvernement continue de ne pas faire en sorte que la loi de 2013 sur la Chambre nationale des entrepreneurs prévoie la pleine autonomie et indépendance des organisations d’employeurs, sans ingérence de la part du gouvernement, suscite une vive inquiétude. La création de la Chambre nationale des entrepreneurs, prévue par la loi, constitue un obstacle sérieux à la liberté d’association des organisations d’employeurs. Les entraves à la liberté et à l’indépendance des organisations d’employeurs générées par la période transitoire de cinq ans prévue par la loi, de même que le large éventail de fonctions et de responsabilités de la Chambre nationale des entrepreneurs, font naître des inquiétudes graves et persistantes. Un autre facteur de forte préoccupation est l’inaction du gouvernement qui ne modifie pas cette loi pour garantir la pleine autonomie et indépendance des organisations d’employeurs. Compte tenu des conclusions de la mission de contacts directs et de l’engagement du gouvernement à améliorer la situation, il faut que les autorités adoptent plusieurs mesures préliminaires afin de remédier immédiatement à la situation. Pour lever les obstacles à la liberté d’association des organisations d’employeurs, le gouvernement pourrait: 1) supprimer le mandat universel de la Chambre nationale des entrepreneurs afin de représenter les besoins des employeurs; et 2) supprimer la disposition de la loi sur la Chambre nationale des entrepreneurs portant sur l’accréditation des organisations d’employeurs par cette dernière, accréditation qui les place en situation de subordination à l’égard de la Chambre et qui permet à celle-ci de refuser de façon arbitraire l’accréditation d’une organisation d’employeurs. Les entraves à la liberté syndicale des organisations de travailleurs, au moment de leur enregistrement, suscitent aussi des préoccupations. Profondément attachés aux principes de la liberté syndicale et au droit des travailleurs et des employeurs de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier, les membres employeurs ont instamment demandé au gouvernement d’agir, avec l’assistance du BIT, pour répondre sans plus tarder aux préoccupations soulevées par la présente commission. Enfin, à la lumière des commentaires répétés de la commission d’experts sur ce cas, les membres employeurs ont rappelé qu’ils n’étaient pas d’accord avec la commission à propos de la convention no 87 et du droit de grève, et ont rappelé que «sa portée et les conditions de son exercice sont réglementées au niveau national» et qu’il n’y a pas de consensus sur ce point au sein de la Commission de la Conférence.

Les membres travailleurs ont rappelé que ce cas a été discuté lors la précédente session de la CIT et déclaré que la constante dégradation de la situation en matière de liberté syndicale au Kazakhstan est préoccupante. Le gouvernement ne semble pas avoir entendu les signaux forts envoyés par la Commission de la Conférence lors de sa précédente session. La mission de contacts directs qui s’est rendue dans le pays en septembre 2016 n’a pas permis de convaincre le gouvernement de mettre fin aux persécutions dont font encore l’objet certains leaders syndicaux. Certains signaux politiques positifs ont bien été envoyés mais ne se traduisent pas dans les faits. Ainsi, après avoir accordé l’enregistrement à la Confédération des syndicats indépendants (KNPRK) à l’issue d’une procédure d’enregistrement anormalement longue, le gouvernement a révoqué son enregistrement, rendant ainsi illégale et pénalement répréhensible toute activité syndicale de cette organisation. Le gouvernement procède en outre à des arrestations de leaders syndicaux, introduit des procédures judiciaires et prononce de lourdes peines à leur encontre. Ces pratiques d’intimidation visent à réduire à néant les capacités d’action des organisations syndicales. Ces faits graves ont fait l’objet d’une plainte devant le Comité de la liberté syndicale et démontrent l’ampleur du travail à réaliser pour la défense de la liberté syndicale. C’est tout l’objet de la convention qui n’est pas respecté dans le pays. Les manquements dans l’application de la convention ont pour la plupart déjà été abordés précédemment. En ce qui concerne l’interdiction faite au personnel pénitentiaire et aux sapeurs-pompiers de constituer ou d’adhérer à une organisation syndicale, le gouvernement affirme que seul le personnel qui a un statut de militaire ou de policier tombe sous cette interdiction. Il ne faudrait pas que le gouvernement use de cette justification afin de contourner et d’abuser de l’exception à la liberté de constitution et d’association reconnue pour la police et les forces armées. Les fonctions exercées par les pompiers et le personnel pénitentiaire ne justifient pas leur exclusion des droits et garanties prévus par la convention compte tenu du principe de l’interprétation restrictive des dérogations à la liberté de constituer des organisations, comme cela a été souligné dans l’étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales. S’il peut être accepté que la constitution d’une organisation syndicale fasse l’objet d’un enregistrement, ce dernier ne peut pas être la condition de l’exercice d’activités syndicales légitimes. Or, suite à l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur les syndicats, le Kazakhstan a imposé l’enregistrement ou le réenregistrement des organisations syndicales et considère les activités syndicales d’une organisation non enregistrée comme illégales. Or les procédures d’enregistrement sont parfois à ce point longues qu’elles portent atteinte à la liberté syndicale. Il convient néanmoins de saluer la volonté affichée du gouvernement de simplifier la procédure d’enregistrement, et il est à espérer que cette simplification garantira également une réelle liberté de constituer des organisations. En ce qui concerne l’obligation pour les organisations syndicales locales ou sectorielles de s’insérer dans la structure d’une organisation syndicale de niveau supérieur, il est fondamental de rappeler que les travailleurs ont le droit de décider librement et en toute autonomie de s’associer ou non à une structure syndicale de niveau supérieur ou en devenir membres. Les seuils pour la création de ces organisations de niveau supérieur sont actuellement trop élevés et constituent une entrave à leur constitution. Pour être conformes à la convention, ces seuils devraient être fixés à un niveau raisonnable. La loi sur la chambre nationale des entrepreneurs contient également des restrictions à la liberté d’association et d’organisation des organisations d’employeurs, ce qui contrevient à la convention. Ces différentes atteintes à la liberté syndicale mettent en péril l’une des valeurs fondatrices de l’OIT, à savoir le dialogue social. L’article 3 de la convention implique par ailleurs le droit des organisations d’organiser leur activité et de formuler leurs programmes d’action. Force est toutefois de constater que la législation nationale restreint cette liberté d’action pour un certain nombre d’organisations tombant sous la catégorie des organisations qui mènent des «activités industrielles dangereuses». Le caractère flou de cette notion et la possibilité pour une grande majorité des entreprises de déclarer leurs activités comme étant «industrielles dangereuses» ne permettent pas de déterminer avec précision quelles activités sont précisément visées par cette disposition. Cette incertitude implique, dans la pratique, que la plupart des actions menées par les syndicats peuvent être considérées comme illégales. Un leader syndical a été emprisonné et condamné, pour la première fois, sur base de l’article 402 du Code pénal qui réprime pénalement la poursuite d’une grève déclarée illégale par un tribunal. Il convient d’insister fortement sur le fait qu’un travailleur ayant participé à une action syndicale de manière pacifique n’a fait qu’exercer un droit essentiel et, par conséquent, ne doit pas être passible de sanctions pénales. De telles sanctions ne sont envisageables que si, à l’occasion de l’action syndicale, des violences contre les personnes ou les biens, ou d’autres infractions graves de droit pénal sont commises, et ce exclusivement en application des textes punissant de tels faits. La mise en place d’un service minimum doit être effectivement et exclusivement un service minimum et ne doit pas être un obstacle à toute liberté d’action syndicale. Il est également essentiel que les partenaires sociaux puissent participer à la définition du service minimum. Or la législation demeure contraire à ces principes et prévoit une interdiction pour les organisations syndicales d’accepter une aide financière directe d’organisations internationales. Les projets et activités de coopération conjoints seraient quant à eux tout à fait autorisés en pratique. Les informations transmises par la CSI font néanmoins état du refus des autorités d’enregistrer des organisations syndicales pour la seule raison de leur affiliation à des organisations syndicales internationales, sans qu’il ne soit question d’un financement direct. La législation n’est donc toujours pas conforme à l’article 5 de la convention. Comme observé par la commission d’experts, soumettre la réception de fonds en provenance de l’étranger à l’approbation des pouvoirs publics est contraire à la liberté d’organisation de la gestion du syndicat. Interdire purement et simplement la réception de financement d’organisations internationales est, de l’avis des membres travailleurs, également contraire à cette liberté d’organisation. Au vu des éléments abordés ici, le gouvernement est fermement appelé à cesser toute ingérence dans les affaires des organisations représentatives et à garantir l’indépendance et l’autonomie de ces organisations afin de garantir un dialogue social serein dans le pays.

Le membre employeur du Kazakhstan a rappelé que les recommandations des organes de contrôle de l’OIT étaient contraignantes pour son pays puisque la législation prévoit que le droit international prime sur la législation nationale. A cet égard, il a remercié les partenaires sociaux et la Commission de la Conférence qui partagent le même objectif de rendre le monde meilleur. La Chambre nationale des entrepreneurs, à laquelle appartient l’orateur, participe activement à cet objectif, par exemple en établissant, en conformité avec les normes internationales, un concept de responsabilité sociale nationale des entreprises dans le domaine du travail, du développement socio-économique, de l’emploi et de la sécurité. La Chambre nationale des entrepreneurs, l’un des partenaires sociaux, a signé un accord tripartite général pour 2015-2017, 16 accords régionaux et 6 accords sectoriels (14 accords sectoriels sont en cours de rédaction). Elle partage la responsabilité de garantir la liberté du travail et l’emploi productif. Elle a examiné la question du respect de la convention et, à ce propos, il n’existe pas de cas d’ingérence du gouvernement dans les activités de la Chambre nationale des entrepreneurs ou de ses associations membres, la législation en vigueur interdisant toute intervention dans les activités d’organisations publiques. Sur les 53 membres que compte le comité directeur de la Chambre, seuls trois représentent le gouvernement. D’une certaine façon, le gouvernement dépend de la Chambre dans la mesure où aucune loi ne peut être adoptée sans son avis qualifié. Elle a été créée en s’appuyant sur l’expérience internationale et sa structure se fonde sur le modèle continental, surtout sur celui de la France, de l’Allemagne et d’autres Etats démocratiques. En application de la loi sur la Chambre nationale des entrepreneurs, le gouvernement a procédé au transfert d’une cinquantaine de ses fonctions à la Chambre nationale des entrepreneurs et à ses associations membres. Conformément aux recommandations de la commission et de la mission de contacts directs de 2016, la chambre a conseillé au gouvernement d’abroger la disposition lui attribuant trois sièges au comité directeur. Pour terminer, l’orateur a souligné que la Chambre nationale des entrepreneurs est une organisation indépendante et autonome qui s’efforce, avec l’assistance technique du BIT, de devenir, un jour, un exemple de strict respect des normes internationales.

Le membre travailleur du Kazakhstan a indiqué que des activités ont été menées pour donner suite aux commentaires de la commission d’experts. En particulier, dans le cadre des consultations avec le gouvernement, les partenaires sociaux, y compris la Fédération des syndicats de la République du Kazakhstan (FPRK), ont fait des propositions pour modifier la loi sur les syndicats. Sur cette base, un projet de loi portant modification de certaines dispositions législatives a été élaboré. D’après ce texte, le nombre minimum de membres requis pour fonder un syndicat sera réduit de dix à trois et la deuxième étape de la procédure d’enregistrement, qui concerne la confirmation du statut de syndicat, serait supprimée. La FPRK sait que deux organisations membres de la KNPRK n’ont pas été réenregistrées, tout comme trois organisations membres de la FPRK. En outre, compte tenu des commentaires de la commission d’experts sur le droit de grève, l’article 176 du Code du travail sera modifié de façon à prévoir les services minima dans les entreprises classées comme dangereuses afin de garantir la sécurité et de continuer à assurer le fonctionnement des installations principales. La FPRK et la Confédération du travail (KTK) ont activement participé à l’élaboration du Code du travail et de la loi sur les syndicats. Les textes de loi ont permis une réforme systémique des syndicats, ainsi que le renforcement et l’étendue du cadre du partenariat social. Les conventions collectives et les accords sectoriels, de par leur statut d’acte juridique, jouent un rôle essentiel dans la réglementation des relations professionnelles, la détermination des salaires décents, la garantie de conditions de travail sûres et l’augmentation des prestations sociales et des garanties. La FPRK est reconnaissante pour l’assistance technique que le BIT a fournie jusqu’à maintenant sous la forme de séminaires, de conférences et de cours d’été. La FPRK est préoccupée par la situation de MM. Yeleusinov et Kushakbaev, dirigeants syndicaux qui ont fait l’objet de sanctions pénales sévères. La FPRK et le KTK ont demandé au gouvernement de faire preuve de clémence à leur égard.

Le membre gouvernemental de Malte, s’exprimant au nom de l’Union européenne (UE) et de ses Etats membres, ainsi que du Monténégro, de la Bosnie-Herzégovine et de la Norvège, s’est dit fermement convaincu que le respect des conventions de l’OIT est essentiel à la stabilité socio-économique de tout pays et qu’un environnement propice au dialogue et à la confiance entre employeurs, travailleurs et gouvernements contribue à jeter les bases d’une croissance solide et durable et de sociétés inclusives. L’UE s’emploie activement à promouvoir la ratification et la mise en œuvre universelles des normes fondamentales du travail dans le cadre du plan d’action en faveur des droits de l’homme et de la démocratie, adopté en juillet 2015. L’orateur a salué l’accord de coopération et de partenariat renforcé entre l’UE et le Kazakhstan, qui comprend la ferme volonté de donner réellement effet aux conventions fondamentales de l’OIT. Cette commission a examiné ce cas en 2016 et demandé au gouvernement, à cette occasion, de modifier la loi sur les syndicats, qui limite le droit des travailleurs de constituer les syndicats de leur choix et d’y adhérer, ainsi que des dispositions du Code du travail, de la Constitution et du Code pénal. L’orateur a salué le fait qu’une mission de contacts directs de l’OIT se soit rendue au Kazakhstan. Cependant, il s’est déclaré profondément préoccupé par les faits récents survenus dans le pays au sujet des syndicats, notamment la radiation de la KNPRK, ainsi que l’emprisonnement de deux dirigeants syndicaux. Le groupe auquel l’orateur appartient a demandé au gouvernement de faire en sorte que les syndicalistes puissent exercer leurs droits sans entraves, comme le prévoit la convention. A cet égard, le Kazakhstan doit prendre des mesures efficaces pour veiller à ce que le droit des travailleurs d’établir les organisations de leur choix, et de s’y affilier, soit pleinement respecté, et en particulier modifier la loi sur les syndicats. L’orateur a encouragé le gouvernement à envisager de suspendre toute procédure de radiation tant que la loi n’a pas été modifiée, et de veiller à ce que les syndicalistes puissent exercer leurs droits sans entraves. Il a relevé avec intérêt que le gouvernement avait l’intention de modifier le Code du travail en ce qui concerne le droit de grève et exprimé l’espoir que le gouvernement prendrait les mesures voulues pour modifier le Code du travail et le Code pénal en consultation avec les partenaires sociaux, de façon à garantir le plein respect du droit de grève dans le pays. Le gouvernement a également été encouragé à prendre les mesures nécessaires correspondant aux commentaires de la commission d’experts, à savoir: 1) autoriser les organisations de travailleurs et d’employeurs à recevoir l’aide financière d’organisations internationales de travailleurs et d’employeurs; et 2) garantir l’autonomie et l’indépendance d’organisations d’employeurs libres et indépendantes au Kazakhstan, en modifiant la loi sur la Chambre nationale des entrepreneurs. Le gouvernement est en outre encouragé à poursuivre sa coopération avec le BIT, afin de mener à bien les réformes nécessaires et d’appliquer les conventions de l’OIT. Enfin, l’orateur a indiqué que le groupe auquel il appartient est pleinement attaché à la coopération et au partenariat avec le Kazakhstan.

Un observateur représentant la Confédération syndicale internationale (CSI) a déclaré représenter la KNPRK, récemment dissoute, malgré une grève de la faim de certains de ses membres de deux semaines que les tribunaux ont jugée illégale et qui a été interrompue par la police. Des amendes de 12 000 euros ont été infligées pour les dommages provoqués par la grève, et, le 20 janvier 2017, M. Amin Yeleusinov, président du Syndicat des travailleurs pétroliers de la Oil Construction Company (OCC), ainsi que M. Nurbek Kushakbaev, vice-président de la KNPRK, ont été arrêtés et poursuivis au pénal. Tous deux ont été condamnés respectivement à deux ans et à deux ans et demi d’emprisonnement, à la suite de quoi toutes activités syndicales leur seront interdites. M. Kushakbaev a été condamné pour avoir appelé à une grève illégale. Mme Larisa Kharkova, présidente de la KNPRK, a elle aussi fait l’objet de poursuites pénales, accompagnées d’une menace d’emprisonnement. La commission doit adopter des conclusions sur les mesures à prendre pour rétablir les droits fondamentaux dans le monde du travail, pour chaque employé et chaque organisation du Kazakhstan.

Le membre gouvernemental des Etats-Unis a rappelé que, ces deux dernières années, la commission a examiné l’application de la convention par le Kazakhstan, et prié le gouvernement de modifier sa législation, y compris les dispositions spécifiques fixant de lourdes règles d’enregistrement des syndicats et entravant la liberté et le fonctionnement de syndicats indépendants. S’il est vrai que des mesures positives ont été prises par le gouvernement pour renforcer son engagement envers le BIT, il a relevé que des cas graves de non-respect de la convention sont encore à déplorer, tout en saluant l’envoi d’une mission de contacts directs en 2016. A cet égard, il a rappelé que, en janvier 2017, la commission d’experts a redit qu’il était nécessaire de modifier certaines dispositions de la loi sur les syndicats et de la loi sur la Chambre nationale des entrepreneurs, afin de garantir pleinement l’autonomie et l’indépendance des organisations d’employeurs. L’orateur se déclare très préoccupé par: la dissolution du principal syndicat indépendant du pays, à savoir la KNPRK; les accusations portées à l’encontre de Mme Kharkova, présidente de la KNPRK; et l’emprisonnement de deux militants syndicaux, MM. Yeleusinov et Kushakbaev, apparemment au motif, pour l’un comme pour l’autre, d’avoir exercé leurs droits fondamentaux de travailleurs. Le gouvernement est instamment prié de prendre les mesures nécessaires en faveur de la liberté syndicale, et, plus spécifiquement: i) d’apporter les modifications nécessaires à la législation du travail, conformément aux recommandations des organes de contrôle de l’OIT; et ii) d’autoriser toutes les organisations de travailleurs et d’employeurs, en particulier la KNPRK, à s’enregistrer et à fonctionner en conformité avec les obligations internationales du Kazakhstan; et iii) d’abandonner les poursuites et de libérer les fonctionnaires et les militants qui ont été arrêtés et emprisonnés pour avoir exercé leur droit à la liberté syndicale. Espérant une résolution rapide de ces problèmes, l’orateur a encouragé le gouvernement à se prévaloir le plus rapidement possible de la coopération technique du BIT dans ce sens.

La membre travailleuse de la France a déclaré que les militants syndicalistes indépendants au Kazakhstan sont constamment harcelés, intimidés et persécutés. Ils sont soumis à des interrogatoires de police, placés sous surveillance et arrêtés au motif de leur activité syndicale. En 2011, la police a mis fin dans le sang à une grève de plusieurs mois à Janaozen, faisant 17 morts et de nombreux blessés. Sept syndicalistes indépendants avaient alors été emprisonnés au motif d’avoir exercé leur droit fondamental de grève. Des dizaines de personnes avaient alors été inculpées et leurs procès s’étaient déroulés dans un climat de tension extrême. Depuis lors, le climat répressif s’est intensifié et on constate une attaque organisée et systématique des syndicats. Des responsables syndicaux du secteur pétrolier, y compris Amin Eleusinov, représentant syndical dans la compagnie pétrolière LLL, et Nurbek Kushakbaev, vice-président de la KNPRK, ont été récemment arrêtés parfois pour avoir simplement mentionné dans un discours la possibilité d’une grève. L’article 24 de la Constitution nationale reconnaît pourtant le droit de grève. L’accès au procès a été refusé aux journalistes et aucun élément formel d’enquête n’a été trouvé. Il s’est avéré par la suite que lesdits responsables avaient été placés sous écoute téléphonique depuis 2015. Leurs conditions de détention sont inhumaines: placement en quarantaine pendant un mois entier; interdiction de s’asseoir sur un lit ou de s’allonger, ceci aux fins d’user psychologiquement le détenu en vue d’obtenir une fausse confession visant à casser le mouvement syndical. La présidente de la KNPRK, Larisa Kharkova, a subi des interrogatoires policiers quotidiens et a été mise sous surveillance sur des bases fallacieuses, impactant de facto le temps de son activité syndicale et sa liberté de mouvement. Le 7 avril 2017, le vice-président de la KNPRK a été condamné à deux ans et demi de prison et frappé de deux années de plus d’interdiction de toute activité publique à sa sortie de prison, ainsi qu’à une amende équivalente à 75 000 euros et à environ 2 400 euros de frais de justice. Ces cas ne sont malheureusement qu’une poignée d’exemples. Le Comité de la liberté syndicale a alerté sur le fait que ces méthodes constituent une attaque sérieuse contre les droits syndicaux et une infraction sérieuse à la liberté syndicale. Le Kazakhstan doit immédiatement mettre fin à ce climat antisyndical, respecter ses engagements internationaux et mettre en œuvre les recommandations de l’OIT en matière de liberté syndicale. L’oratrice a conclu en demandant la libération immédiate des syndicalistes arrêtés dans le cadre de leur activité syndicale ainsi que l’arrêt des poursuites judiciaires à leur encontre et l’annulation de leur condamnation. Ce cas est très grave et demande une attention spéciale.

La membre gouvernementale de Cuba, accueillant avec satisfaction les informations fournies par le gouvernement, a indiqué que le rapport de la commission d’experts mentionne l’élaboration d’un projet de loi qui vise à améliorer les relations sociales liées aux activités syndicales, conformément à la convention. Ce rapport indique que le pluralisme syndical existe dans le pays, ce qui témoigne de la volonté du gouvernement d’appliquer la convention. Par ailleurs, comme l’a suggéré la mission de contacts directs, il est nécessaire d’apporter l’assistance technique que requiert le gouvernement.

Une observatrice, représentant IndustriALL Global Union, a indiqué que le Kazakhstan reste un pays où le respect des droits syndicaux et des droits de l’homme posent problème. L’évolution récente de la situation dans le pays montre comment les autorités du pays compromettent la capacité des travailleurs à s’organiser et à négocier collectivement pour faire valoir leurs droits, en dépit du fait qu’outre la ratification des conventions de l’OIT, la Constitution du Kazakhstan consacre le droit à la liberté syndicale et le droit de grève. Après le massacre de Janaozen en 2014, le Kazakhstan a adopté une nouvelle loi sur les syndicats. La commission d’experts a fait observer à plusieurs reprises que cette loi limitait le libre exercice du droit de constituer des organisations et de s’y affilier et le droit des travailleurs de décider librement s’ils veulent s’associer à une structure syndicale de niveau supérieur ou en devenir membres. Après l’adoption de cette loi, l’enregistrement de la KNPRK a été annulé et les travailleurs ont vu leurs organisations démantelées pour des raisons obscures et non justifiées. Les syndicats au niveau sectoriel ont été également soumis à des procédures d’enregistrement longues et fastidieuses. Lorsque des syndicalistes et des travailleurs de la Oil Construction Company ont organisé une manifestation pacifique de grande envergure, notamment une grève de la faim, contre la dissolution du syndicat de leur choix, les autorités locales et la direction ont réprimé la manifestation. Le président du Syndicat des travailleurs de la Oil Construction Company, M. Yeleusinov, et un inspecteur du travail, M. Kushakbaev, ont été arrêtés le 20 janvier 2017. Le 7 avril, M. Kushakbaev a été condamné à deux ans et demi d’emprisonnement dans un centre de rééducation par le travail pour ses appels à la grève. Le juge a par ailleurs fait droit à la demande de la Oil Construction Company, réclamant 25 millions de tenges (80 000 dollars E.-U.) de dommages-intérêts à M. Kushakbaev, pour de soi-disant préjudices que la grève de la faim des travailleurs aurait causé à la compagnie, alors qu’il n’y a eu aucune interruption du travail. M. Yeleusinov a été condamné à deux ans d’emprisonnement et devra rembourser 8 millions de tenges (plus de 25 000 dollars E.-U.). Après sa libération, il lui sera interdit de mener toute activité civile ou syndicale pendant cinq ans. Dans le même temps, la direction de la Oil Construction Company a procédé au licenciement massif des employés ayant pris part aux manifestations. Cette société fait partie de KazMunaiGas, la plus grosse compagnie pétrolière et gazière d’Etat au Kazakhstan, tristement célèbre pour son implication dans le massacre de Janaozen. L’oratrice s’est dite profondément préoccupée par la répression dont sont victimes les syndicalistes. Il s’agit là de violations flagrantes des conventions de l’OIT sur la liberté syndicale. Les décisions de justice susmentionnées, fondées sur les actions engagées par l’employeur, constituent un dangereux précédent d’une criminalisation accrue des activités syndicales au Kazakhstan. L’OIT et la communauté internationale doivent accorder une attention particulière à l’intensification de la répression des syndicats.

Le membre gouvernemental du Turkménistan a salué les mesures législatives prises par le gouvernement pour remplir les obligations internationales qui lui incombent en vertu des conventions ratifiées. Le gouvernement collabore avec le BIT de manière constructive, notamment grâce aux consultations avec ses experts, afin de créer des conditions lui permettant de se conformer aux dispositions de la convention.

La membre travailleuse des Etats-Unis a rappelé que des milliers de travailleurs dans l’industrie du pétrole et du gaz au Kazakhstan se sont mis en grève pour protester contre des conditions de travail dangereuses et de faibles rémunérations. En décembre 2011, les grèves ont été brutalement réprimées par les forces de l’ordre du pays qui ont ouvert le feu sur des manifestants non armés, et engagé des poursuites pénales contre les grévistes. Six ans plus tard, il est toujours extrêmement dangereux d’exercer le droit de grève au Kazakhstan, un droit garanti par la Constitution. Le Code du travail de 2015, s’il reconnaît le droit de grève, en limite largement l’exercice. Dans beaucoup de branches, les travailleurs n’ont pas le droit de faire grève. Selon un rapport récent de Human Rights Watch, les tribunaux du Kazakhstan déclarent généralement l’illégalité des grèves et il est extrêmement difficile, voire impossible, pour les travailleurs de se soumettre aux exigences démesurées pour pouvoir faire grève légalement. Par exemple, avant de faire grève, les travailleurs doivent engager une procédure fastidieuse de médiation auprès de leur employeur. Dans un cas au moins, une entreprise a mis unilatéralement fin au processus de médiation, sans en avoir la responsabilité, malgré les plaintes déposées par le syndicat devant les autorités. En revanche, les travailleurs et les dirigeants syndicaux font face à de lourdes responsabilités lorsqu’ils entament illégalement une grève. Selon le Code pénal de 2014, «les appels à poursuivre une grève déclarée illégale par un tribunal» constituent une infraction pénale. Ce délit est passible d’une peine de prison allant jusqu’à trois ans. Les tribunaux ont aussi imposé aux grévistes des amendes administratives importantes, pouvant aller jusqu’à 33 pour cent du salaire annuel moyen. En outre, le Code du travail autorise les employeurs à punir les travailleurs ayant participé à une grève illégale, avant même que la grève n’ait été déclarée illégale par un tribunal. En janvier 2017, environ 300 salariés d’une compagnie pétrolière ont entamé une grève de la faim pour protester contre la dissolution de la KNPRK, ordonnée par le tribunal. Les travailleurs ont averti à l’avance les autorités municipales et ont continué à faire leur travail. Toutefois, la compagnie a demandé à un tribunal de déclarer l’illégalité de la grève. Le tribunal a profité des amendements apportés au Code de procédure civile en 2016, qui fixent des délais extrêmement courts à l’examen des cas de grèves illégales. En deux jours à peine, le tribunal a déclaré l’illégalité de la grève de la faim. Les grévistes ont été détenus et des amendes importantes leur ont été imposées. Le tribunal a ensuite décidé que les grévistes devaient rembourser à la compagnie les pertes soi-disant occasionnées par la grève, ce qui a généré d’autres amendes importantes. Des dirigeants syndicaux ont aussi été arrêtés, condamnés et emprisonnés en raison de cette grève. Ces dirigeants sont toujours en prison. Les limites actuellement imposées par le Kazakhstan à la grève et la criminalisation de la participation à une grève sont contraires à la convention, et doivent être corrigées.

La membre gouvernementale de la Suisse a déclaré que son gouvernement soutient la déclaration faite par l’UE et rappelé que l’indépendance, l’autonomie et la liberté des partenaires sociaux sont essentielles pour réaliser un dialogue social effectif et pour contribuer au développement économique et social. En droit et dans la pratique, toute restriction au droit des travailleurs et des employeurs de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier constitue une mesure préoccupante. La liberté de s’organiser et de s’affilier s’applique à tous les niveaux de structure syndicale et la Suisse encourage le gouvernement à suivre les recommandations de la commission en vue de garantir la liberté syndicale en droit et dans la pratique.

Un observateur représentant l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) a rappelé que la question de la liberté syndicale se pose avec grande acuité depuis plusieurs années au Kazakhstan et qu’elle doit être abordée sous l’angle du climat général que connaît le pays depuis 2011, avec la fin du conflit du travail le plus long de l’ère postsoviétique qu’a connu la ville de Janaozen, et qui a fait de nombreux blessés ainsi que des morts parmi les travailleurs du pétrole qui réclamaient une hausse de leurs rémunérations. Si le gouvernement avait respecté la convention, cette grève ne se serait pas achevée par des actes de provocation et par l’utilisation de la force armée, mais par la signature d’un accord. Les services du procureur de la République ont reconnu que la police avait commis un abus d’autorité et fait un usage illégal de ses armes, qui ont entraîné morts et blessés. Une enquête a conclu à la culpabilité de plusieurs policiers qui se sont livrés à des passages à tabac, policiers qui ont été déférés à la justice. Il ne pourra y avoir de liberté syndicale au Kazakhstan tant que ces événements n’auront pas fait l’objet d’une évaluation claire par l’Etat, tant que la légitimité des revendications et des actions des travailleurs du pétrole n’aura pas été reconnue et tant que les condamnations prononcées contre les syndicalistes n’auront pas été annulées. L’affirmation du principe de la liberté syndicale n’est pas seulement un moyen d’améliorer les conditions de travail, c’est aussi un moyen d’assurer la paix et un préalable à de nouveaux progrès. Or le gouvernement refuse de se conformer aux dispositions de la convention. La réforme de la législation du travail qui a suivi les événements de Janaozen a été conçue pour limiter davantage les droits des travailleurs et fermer toute possibilité d’action aux syndicats indépendants qui échappent à la mainmise de l’Etat. Il ne faut pas oublier ceux qui ont tenté de concrétiser ce droit à Janaozen pendant sept longs mois en 2011, ceux qui sont morts pour ce droit et ceux qui attendent toujours l’annulation de leurs condamnations et le rétablissement de la justice. Les procédures pénales qui ont été diligentées récemment et les récentes arrestations de dirigeants syndicaux, les pressions sans précédent qui s’exercent sur eux et sur leurs familles pour obtenir des aveux sur des chefs d’accusation fabriqués de toutes pièces vont dans le sens de la ligne générale arrêtée par les autorités en 2011. L’orateur a conclu en indiquant qu’il s’agit là d’une répression systématique et à grande échelle, qui se poursuit depuis plus de six ans et qui affecte des milliers et des dizaines de milliers de travailleurs.

>Le membre travailleur de la Norvège, s’exprimant au nom des syndicats des pays nordiques, a exprimé sa vive inquiétude quant au manque de progrès quant à la modification de la loi sur les syndicats, bien que la commission ait demandé au gouvernement de la mettre en pleine conformité avec la convention en 2015 et 2016. A cet égard, certaines dispositions de la loi rendent l’exercice des droits syndicaux difficile et les formalités prévues par la loi visent à retarder et à décourager la création de syndicats. L’orateur a instamment prié le gouvernement de garantir, tant en droit que dans la pratique, le droit des travailleurs de former librement des organisations syndicales, d’y adhérer et d’organiser leurs activités sans ingérence de la part des autorités publiques. Il l’a également instamment prié d’appliquer les recommandations de la commission de modifier la loi afin qu’elle soit conforme à la convention.

La membre gouvernementale du Canada, tout en reconnaissant les progrès réalisés par le Kazakhstan depuis son indépendance en matière de développement de l’économie et d’amélioration du niveau de vie de sa population, a relevé avec une vive inquiétude les observations de la commission d’experts. Pour la troisième année consécutive, il est demandé au gouvernement de se présenter devant la Commission de la Conférence pour parler de son application de la convention. Au vu des difficultés considérables que rencontre l’exercice du droit à la liberté syndicale, y compris les difficultés liées à la procédure d’enregistrement des syndicats, l’oratrice a instamment prié le gouvernement de résister aux pressions exercées pour qu’il restreigne les droits et libertés individuels et de prendre des mesures concrètes visant à protéger les droits du travail en modifiant et en mettant en œuvre une législation du travail conforme aux normes de l’OIT, y compris à la convention no 87. Elle a encouragé le gouvernement à solliciter l’assistance technique du Bureau sur ce point. Le Canada demeure déterminé à travailler dans ce but avec le gouvernement, en tant que partenaire.

Le membre travailleur du Honduras s’est dit préoccupé par la situation au Kazakhstan où des violations de la convention continuent d’être commises, et plus particulièrement par la criminalisation du droit de grève. Il a souligné que le BIT devrait se pencher sur la situation dans ce pays pour que cessent les violations des droits des travailleurs et a encouragé le gouvernement à faire en sorte que des accords soient conclus entre tous les secteurs de façon à rétablir la paix et l’harmonie.

Le membre travailleur de la Fédération de Russie a indiqué que l’aggravation de la situation des travailleurs dans les pays voisins constitue parfois un exemple pour son gouvernement. Nombre de ces Etats, y compris la République du Kazakhstan, font partie, comme la Fédération de Russie, de la Communauté économique eurasiatique unique, où l’harmonisation des législations des pays membres est en cours. En 2016, des préoccupations ont été exprimées au sujet de la procédure d’enregistrement des syndicats au Kazakhstan, qui est délibérément compliquée. L’attention de la Commission de la Conférence a été appelée sur la non-conformité de certaines dispositions de la législation nationale avec les conventions fondamentales de l’OIT. L’orateur a également demandé au gouvernement de s’efforcer d’harmoniser les textes de loi réglementant les activités des syndicats avec les dispositions de la convention. Hélas, ces préoccupations sont justifiées. Au cours de l’année écoulée, la situation s’est fortement dégradée. En fait, la KNPRK, l’une des centrales syndicales nationales, affiliée à la CSI, a déjà été démantelée. Des organes de l’Etat ont exercé des pressions directes et systématiques sur des syndicalistes et des dirigeants syndicaux, notamment en arrêtant certains d’entre eux alors qu’ils menaient leurs activités syndicales légitimes. MM. Yeleusinov et Kushakbaev ont été arrêtés et traduits en justice. Malgré les chefs d’accusation officiels, leur incarcération est en réalité directement liée à leurs activités syndicales légitimes. Mme Kharkova fait l’objet de poursuites pénales fondées sur des motifs farfelus et encourt une peine de prison. De telles mesures sont utilisées pour éviter le développement d’un mouvement syndical indépendant au Kazakhstan et empêcher les travailleurs de tenter de défendre collectivement leurs droits au travail, ainsi que leurs droits sociaux et économiques. En 2011, les autorités kazakhes ont tiré lors d’une manifestation pacifique organisée par les travailleurs de la société transnationale pétrolière et gazière à Janaozen, faisant 16 morts et conduisant à la détention de dizaines de manifestants. L’orateur a profondément regretté que le gouvernement n’ait pas assumé sa responsabilité dans cet événement et qu’il ait continué à dédaigner ses propres obligations internationales. Il a demandé à la commission d’envisager d’inclure ce cas dans un paragraphe spécial de son rapport.

Le représentant gouvernemental a remercié les participants pour l’attention accordée à la déclaration du gouvernement, pour les commentaires exprimés ainsi que pour les appels et souhaits formulés. Le gouvernement regrette que les événements évoqués par de nombreux intervenants se soient produits et comprend les préoccupations qui ont été exprimées à ce sujet. En réponse aux questions soulevées pendant la discussion, six associations syndicales se sont malheureusement vu retirer leur accréditation sur décision des tribunaux: la KNPRK, dirigée par Mme Kharkova, ses deux syndicats de branche, un syndicat de branche de la FPRK, un autre de la KTK, et un syndicat indépendant du nom de «Travail décent». Le motif de leur radiation est le même dans les six cas: aucun n’a confirmé son statut dans le délai fixé de six mois. Ils n’avaient qu’à compter dans leurs rangs au moins une organisation affiliée dans 9 des 16 régions du pays. Malheureusement, ils n’ont pas réussi à obtenir ce soutien des travailleurs. Tandis que le gouvernement travaille à l’abolition de la procédure d’enregistrement en deux étapes, 467 associations syndicales ont suivi cette procédure avec succès. Le gouvernement et le ministère du Travail ont toujours entretenu de bonnes relations de travail avec la KNPRK. Celle-ci a toujours participé activement à tous les groupes de travail chargés de l’élaboration de l’actuelle loi sur les syndicats et de ses amendements. Sa présidente, Mme Kharkova, a régulièrement participé aux réunions de la commission tripartite républicaine, la plus haute instance tripartite du pays, et a été une des signataires de l’accord général de partenariat social conclu entre le gouvernement, les syndicats et les associations d’employeurs pour la période 2015-2017. En outre, lors de la visite de la mission de la CSI au Kazakhstan, en août 2016, destinée à discuter de l’adhésion de la KNPRK à la CSI, le gouvernement a appuyé la KNPRK. C’est pourquoi le ministère du Travail regrette cette situation et a procédé à une série de consultations avec les autorités judiciaires à ce sujet. Le ministère du Travail est prêt à fournir son aide, avec les autorités judiciaires, pour permettre aux syndicats de se réenregistrer, pour autant qu’ils le souhaitent. A ce jour, deux de ces six syndicats ont passé la première étape de la procédure d’enregistrement. S’agissant du financement des syndicats, bien que la Constitution interdise le financement direct des syndicats par des organisations internationales (par exemple par le paiement des salaires ou l’achat de voitures ou de bureaux), rien n’interdit à des syndicats de participer à des projets internationaux ou à des activités internationales (telles que séminaires, conférences, etc.), conjointement ou avec l’assistance d’organisations internationales de travailleurs. Toutes les associations syndicales ont toujours reçu ce genre d’aide. S’agissant des poursuites intentées contre trois dirigeants syndicaux, bien qu’il comprenne les préoccupations qui se sont exprimées, en sa qualité de représentant de l’exécutif, l’orateur n’est pas habilité à commenter des décisions de justice. Il a donné l’assurance que son gouvernement continuera à améliorer la législation et la pratique sur la base des commentaires et des demandes exprimés pendant la discussion.

Les membres travailleurs ont fermement encouragé le gouvernement à mettre fin aux différents manquements concernant la manière dont il est donné effet à la convention comme le fait de priver les organisations syndicales du choix de la structure qu’elles adoptent, et demandé au gouvernement de modifier la législation et la pratique en vue de: procéder à l’enregistrement de la KNPRK et de ses organisations membres dans les plus brefs délais; abandonner de manière inconditionnelle toutes les charges qui pèsent sur les leaders d’organisations syndicales et leurs membres qui organisent et participent à des actions syndicales pacifiques; respecter l’interprétation restrictive des dérogations à la liberté de constituer et d’adhérer à des organisations syndicales et permettre aux juges, pompiers et agents pénitentiaires de former et de rejoindre des organisations syndicales; retirer les critères restrictifs et les procédures d’enregistrement qui limitent la liberté syndicale; respecter l’indépendance et l’autonomie des organisations syndicales et mettre un terme à l’affiliation obligatoire d’un syndicat sectoriel, territorial ou local à un syndicat formé à un niveau supérieur; réduire le seuil d’affiliation qui permet de constituer une organisation représentative; respecter la liberté d’organisation de la gestion des organisations représentatives et lever l’interdiction de recevoir une aide financière d’organisations internationales de travailleurs ou d’employeurs; s’assurer que le service minimum est effectivement et exclusivement un service minimum et que les organisations de travailleurs peuvent participer à la définition de ce service; et clarifier quelles sont les organisations qui effectuent des «activités industrielles dangereuses» pour lesquelles les actions sont illégales. Pour mettre en œuvre ces recommandations, les membres travailleurs ont exhorté le gouvernement à accepter de recevoir une mission tripartite de haut niveau.

Les membres employeurs ont remercié le gouvernement pour les informations fournies et l’ont instamment prié: 1) de veiller à ce que les nouveaux textes de loi prévoient le droit des travailleurs de créer des organisations et de s’y affilier, et à ce que les procédures d’enregistrement des syndicats soient simplifiées; 2) de supprimer le mandat global de la Chambre nationale des entrepreneurs en tant que représentante des intérêts de tous les employeurs et d’abroger les dispositions de la loi sur la Chambre nationale des entrepreneurs concernant l’accréditation des organisations d’employeurs par la Chambre, de façon à ce que les droits à la liberté syndicale des organisations d’employeurs soient respectés; et 3) de permettre aux syndicats et aux organisations d’employeurs de tirer pleinement parti des projets et activités de coopération menés conjointement avec des organisations internationales et d’y participer. Enfin, les membres employeurs ont encouragé le gouvernement à accueillir une mission tripartite de haut niveau afin de s’assurer de la réalisation de ces objectifs.

Conclusions

La commission a pris note des déclarations orales du représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.

La commission a pris note des graves problèmes suscités par ce cas concernant cette convention fondamentale et qui ont trait en particulier à la révocation de l’enregistrement de la KNPRK librement constituée, ainsi qu’à l’atteinte à la liberté d’association des employeurs par le biais de la loi sur la Chambre nationale des entrepreneurs (CNE). La commission a également pris note des sérieux obstacles mis à la création d’organisations syndicales sans autorisation préalable en droit comme dans la pratique. La commission a exprimé sa préoccupation devant l’absence persistante de progrès depuis la dernière discussion de ce cas par la commission, en juin 2016, malgré l’envoi d’une mission de contacts directs dans le pays en septembre 2016.

Prenant en compte la discussion qui a eu lieu sur ce cas, la commission a prié le gouvernement du Kazakhstan de:

- modifier les dispositions de la loi sur les syndicats de 2014 d’une manière conforme à la convention, s’agissant des restrictions excessives imposées à la structure des syndicats qui limitent le droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier;

- modifier les dispositions de la loi sur la Chambre nationale des entrepreneurs de telle sorte que soit assurée sans plus de délai l’autonomie et l’indépendance totales des organisations libres et indépendantes d’employeurs. Doivent être en particulier supprimées les dispositions relatives au mandat global de la CNE par lequel elle représente les employeurs et accrédite leurs organisations;

- permettre aux syndicats et aux organisations d’employeurs de bénéficier des activités et projets de coopération menées conjointement avec des organisations internationales et d’y participer;

- modifier la législation en supprimant l’interdiction pour les organisations nationales de travailleurs et d’employeurs de recevoir une aide financière d’organisations internationales;

- prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que la KNPRK et ses affiliés soient en mesure d’exercer pleinement leurs droits syndicaux et jouissent de l’autonomie et de l’indépendance nécessaires pour s’acquitter de leur mandat et représenter leurs mandants;

- modifier la législation pour permettre aux juges, aux pompiers et au personnel pénitentiaire de constituer une organisation de travailleurs et de s’y affilier;

- veiller à ce qu’il soit rapidement donné suite aux demandes d’enregistrement de syndicats et qu’elles ne soient pas rejetées à moins de ne pas remplir les critères clairs et objectifs définis dans la loi;

La commission prie le gouvernement de solliciter activement l’assistance technique du BIT pour s’atteler à ces sujets.

Le gouvernement devrait accepter une mission tripartite de haut niveau avant la prochaine Conférence internationale du Travail afin d’évaluer les progrès réalisés pour donner effet à ces conclusions.

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