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Demande directe (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Panama (Ratification: 1966)
Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930 - Panama (Ratification: 2016)

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Rappelant que le Panama a ratifié le Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930, en novembre 2016, la commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans son rapport de 2019 sur les mesures prises pour mettre en œuvre la convention telle que complétée par le protocole. La commission prend également note des informations supplémentaires fournies par le gouvernement à la lumière de la décision adoptée par le Conseil d’administration à sa 338e session (juin 2020).
En outre, la commission prend note des observations de la Confédération nationale de l’unité syndicale indépendante (CONUSI), reçues le 28 septembre 2019, ainsi que de la réponse du gouvernement à ces observations, reçue le 27 novembre 2019. Elle note que la CONUSI a envoyé des observations supplémentaires le 30 septembre 2020. La commission note également la réponse du gouvernement à ces observations, reçue le 7 décembre 2020. Dans la mesure où cette réponse a été reçue trop tard pour pouvoir être examinée par la commission à sa présente session, la commission se propose de l’examiner ultérieurement.

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention et article 1, paragraphe 1, du protocole. Mesures efficaces pour lutter contre la traite des personnes.

1. Article 1, paragraphe 2, du protocole. Action systématique et coordonnée. Dans ses précédents commentaires, la commission a reconnu les actions entreprises par le gouvernement pour lutter contre la traite des personnes, à travers notamment l’adoption de la loi no 79 de 2011 sur la traite des personnes et activités connexes et son règlement d’application (décret exécutif no 303 de 2016). Elle a noté en particulier la mise en place d’un système de gestion coordonné de combat contre la traite, la création de la Commission nationale contre la traite des personnes (CNTdP), et l’adoption du premier Plan national contre la traite des personnes. La commission a demandé au gouvernement de poursuivre sur cette voie et de fournir des informations sur la mise en œuvre du Plan national et sur les mesures prises pour assurer une meilleure identification et protection des victimes, et répression de ce délit.
La commission note que, dans son rapport, le gouvernement confirme qu’il continue à déployer des efforts pour renforcer la politique de lutte contre la traite d’autant que le Panama est un pays d’origine, de transit et de destination des personnes victimes de traite à des fins d’exploitation sexuelle et de travail forcé. A cet égard, la commission prend note de l’adoption du Plan national d’action contre la traite des personnes pour la période 2017-2022 (décret exécutif no 125 du 17 avril 2018). Comme cela était le cas pour le précédent plan, les actions envisagées se développent autour de cinq axes stratégiques: prévention, sensibilisation et divulgation; assistance et protection des victimes; répression du délit; coopération internationale; et mise en œuvre, suivi et contrôle. Les cinq axes stratégiques incluent des lignes d’action avec des objectifs à atteindre, des indicateurs de gestion et la détermination des entités responsables. La commission note par ailleurs que le règlement d’application de la loi sur la traite prévoit l’élaboration d’un rapport annuel par le Secrétariat de la CNTdP sur l’état d’avancement de la mise en œuvre du Plan.
La commission note que, dans ses observations, la CONUSI reconnait les initiatives et les actions prises par le gouvernement pour lutter contre la traite mais considère que le gouvernement ne fournit pas d’informations concrètes sur les résultats obtenus.
La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur l’action développée par la Commission nationale contre la traite des personnes pour assurer une action systématique et coordonnée de l’ensemble des entités responsables dans la mise en œuvre du Plan national d’action contre la traite (2017 2022). Prière de fournir des informations sur les résultats obtenus dans le cadre du Plan, sur les rapports d’évaluation élaborés par la Commission nationale et sur les mesures prises ou envisagées pour surmonter les obstacles éventuellement identifiés en vue de l’adoption d’un nouveau plan. Enfin, la commission souhaiterait que le gouvernement indique la manière dont les organisations d’employeurs et de travailleurs sont consultées en ce qui concerne la mise en œuvre du Plan national, son évaluation et l’élaboration d’un nouveau plan.
2. Article 2 du protocole. Prévention. Alinéas a) et b). Sensibilisation et données. La commission prend note des informations détaillées communiquées par le gouvernement sur les nombreuses campagnes de sensibilisation réalisées ainsi que sur les activités de formation destinées à renforcer les capacités institutionnelles. Le gouvernement indique également qu’à des fins statistiques, la Table thématique sur la traite des personnes a proposé la création d’un système permettant de mieux articuler l’action des acteurs intervenant dans la prévention et la répression de la traite des personnes en vue de renforcer la méthodologie utilisée lors des procédures d’enregistrement, de collecte et de traitement des données statistiques en la matière. La commission observe que sous la rubrique coordination et échange d’informations statistiques entre les autorités concernées, le Plan national prévoit l’établissement d’un système intégré de statistiques sur la traite des personnes. Le Plan national prévoit également la réalisation d’une cartographie (mapeo) des victimes et de leur profil ainsi que des routes et des modus operandi de la traite. Compte tenu de l’importance de disposer de données fiables sur les caractéristiques et l’étendue de la traite afin de pouvoir orienter au mieux les politiques, la commission espère que le gouvernement pourra fournir des informations sur l’établissement du système intégré de statistiques sur la traite des personnes et la cartographie des victimes et, le cas échéant, transmettre les données collectées.
Alinéa c). Renforcement des services d’inspection. La commission note que le Plan national prévoit la réalisation de visites d’inspection du travail conjointes, intégrant des fonctionnaires du ministère du Travail, du service national de la migration et des forces de sécurité, en vue de détecter des situations de traite à des fins d’exploitation au travail. La commission prie le gouvernement de fournir davantage d’informations sur les mesures prises pour renforcer les capacités des services d’inspection à la prévention et à la détection des cas de traite des personnes à des fins d’exploitation au travail, ainsi que sur les visites d’inspection du travail conjointes menées à cette fin, telles que prévues dans le Plan national.
Alinéa d). Protection des travailleurs migrants au cours du processus de recrutement. La commission note que, dans ses observations, la CONUSI se réfère à la situation de nombreux travailleurs migrants dont le statut migratoire n’est pas régularisé et qui ne disposent pas de permis de travail. Ils ne bénéficient pas des garanties de la législation du travail et beaucoup se retrouvent piégés dans des situations relevant du travail forcé dans le secteur de la prostitution, le secteur informel ou formel. La CONUSI indique par ailleurs que l’on ne dispose pas de données sur les sanctions appliquées à ceux qui emploient des travailleurs qui ne sont pas titulaires de permis de travail. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour contrôler le processus de recrutement et les conditions d’emploi des travailleurs migrants afin de les protéger contre les abus et éviter qu’ils ne se retrouvent dans des situations relevant du travail forcé.
Alinéa e). Appui à la diligence raisonnable des entreprises. La commission observe que le Plan national prévoit, sous l’axe stratégique prévention, la réalisation d’une alliance stratégique avec le secteur employeur et industriel afin que celui-ci s’engage dans la prévention et la lutte contre la traite des personnes à des fins d’exploitation au travail. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur la mise en œuvre de cette alliance et en particulier sur les accords signés avec le secteur des entreprises privées et de l’industrie et les activités développées, comme prévu dans le Plan national.
3. Article 3 du protocole. Identification et protection des victimes. La commission prend note de la création en 2017 de l’Unité d’identification et d’assistance des victimes (UIA) qui a notamment pour fonction de déterminer la qualité de victime de traite dans les cas qui lui sont rapportés et de réaliser les interventions d’urgence requises pour garantir la protection et l’assistance des victimes. En 2018, l’UIA a enregistré 54 victimes potentielles de traite dont 17 ont été confirmées (identification définitive). Entre août 2019 et septembre 2020, 55 victimes ont été accueillies et une assistance a été prodiguée à 46 d’entre elles. Ces victimes provenaient en majorité de Colombie et du Venezuela. Par ailleurs, le gouvernement indique qu’en janvier 2019 le protocole d’action pour la détection, l’identification, l’assistance et la protection des victimes de traite des personnes a été adopté. Il s’agit d’un outil technique qui établit des directives afin de favoriser une action coordonnée des différentes institutions intervenant dans l’identification et l’assistance des victimes. En ce qui concerne les mesures de protection des victimes, le gouvernement indique que celles-ci recouvrent trois phases (la phase de récupération couvrant les 90 premiers jours, le plan d’intervention immédiate, et la phase d’intégration) et qu’une équipe technique d’évaluation, composée de travailleurs sociaux et de psychologues, a été établie en janvier 2019 pour définir les mesures comprises dans ces phases. En outre, un nouveau terrain devrait être prochainement alloué pour la construction du premier centre d’accueil temporaire pour victimes de traite, tel que prévu dans le Plan national. Enfin, la commission note que les décrets no 7 du 8 janvier 2019 et n°21 du 28 mai 2019 permettent aux personnes identifiées comme victimes de traite de bénéficier d’un permis temporaire humanitaire de protection valable un an et pouvant être prolongé jusqu’à 6 ans. Ce permis ouvre le droit à un permis de travail temporaire (en novembre 2019, 9 personnes avaient bénéficié d’un permis temporaire humanitaire). La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations détaillées sur le nombre et les caractéristiques des personnes identifiées comme victimes de la traite, tant à des fins d’exploitation sexuelle que d’exploitation au travail, ainsi que sur la nature de la protection qui leur a été accordée (assistance médicale et psychologique, assistance légale, attribution de permis de séjour et de travail, programmes de réinsertion, etc.). Prière également d’indiquer les mesures prises en vue de la construction du centre d’accueil temporaire pour les victimes de traite.
4. Article 4 du protocole. Accès à des mécanismes de recours et de réparation. La commission rappelle que la loi de 2011 prévoit, en plus de l’assistance juridique et de la représentation légale gratuites, que les juridictions qui prononcent des condamnations pour délit de traite doivent également ordonner l’indemnisation de la victime (art. 38 et suivants). Le retour de la victime dans son pays d’origine ou son absence lors du procès n’auront pas d’incidence sur son droit à recevoir une indemnisation. La CNTdP qui est chargée d’apporter cette assistance juridique doit constituer un fonds pour l’assistance des victimes de traite et pour cela réserver 25 pour cent de son budget. Le gouvernement précise que, compte tenu de la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouvent les victimes de traite, celles-ci bénéficient du «service de défense publique». Il leur appartient de décider, sur la base des informations fournies par ce service, si elles se constituent ou non en partie plaignante «querellante» dans le cadre du procès pénal. Dans les faits, toutes les victimes de traite ont bénéficié des services de la «Defensoria» de la victime de l’institution judiciaire. S’agissant du Fonds pour l’assistance des victimes, le gouvernement précise que l’Unité d’administration du fonds a entrepris un examen des décisions de justice ayant ordonné la confiscation et la saisie des biens provenant du crime de traite afin de récolter les ressources pour le fonds. Enfin, la commission note l’indication du gouvernement selon laquelle, pour la première fois en septembre 2020, un tribunal a ordonné, au moment du prononcé de la décision de condamnation pour crime de traite des personnes à des fins d’exploitation au travail, l’indemnisation de la victime pour réparation du préjudice subi.
La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les cas dans lesquels les juridictions ont ordonné l’indemnisation des victimes ainsi que sur les mesures d’exécution prises pour mettre en œuvre ces décisions. La commission prie également le gouvernement d’indiquer les mesures prises pour inciter les victimes à faire valoir leurs droits, y compris à indemnisation, et à porter plainte contre les auteurs, dans le contexte du système accusatoire pénal. Prière également d’indiquer comment les victimes qui ne portent pas plainte ou qui retournent dans leur pays sont indemnisées.
5. Article 25 de la convention et article 1, paragraphe 1, du protocole. Sanctions. En réponse aux précédents commentaires de la commission sur le fonctionnement du système répressif des délits de traite des personnes, le gouvernement indique que, entre 2014 et 2018, plus de 250 victimes ont été libérées, 22 réseaux ont été démantelés, 75 personnes ont fait l’objet de poursuites judiciaires et 18 ont été condamnées. En 2018, sur les 8 décisions de justice prononcées, toutes concernaient des cas de traite des personnes à des fins d’exploitation sexuelle. En 2019, sur les 10 décisions prononcées, huit ont abouti à des condamnations et l’une d’entre elles a imposé la plus forte sanction jamais prononcée, à savoir 25 ans de prison. Le gouvernement indique également que, fin 2019, l’organe judiciaire a élaboré le Protocole d’action judiciaire de la traite des personnes. Ce protocole décrit les procédures et étapes pour permettre à l’ensemble des officiers de justice d’aborder efficacement les procédures visant à élucider ce délit. La commission prie le gouvernement de continuer à mener des activités de sensibilisation et de formation des acteurs de la chaine pénale et des autres institutions compétentes pour assurer l’identification et la répression des pratiques de traite, tant à des fins d’exploitation sexuelle que d’exploitation au travail. Prière également de continuer à fournir des informations sur les procédures judiciaires engagées dans les affaires de traite, les décisions de justices prononcées et les sanctions imposées, ainsi que sur les procédures visant à confisquer et saisir les biens des auteurs.
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