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Observation (CEACR) - adoptée 2021, publiée 110ème session CIT (2022)

Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 - Algérie (Ratification: 1969)

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Article 1 a) de la convention. Imposition de peines de prison comportant l’obligation de travailler en tant que sanction de l’expression d’opinions politiques ou de la manifestation d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. Loi relative aux associations. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté qu’en vertu de la législation en vigueur, un travail pénitentiaire peut être imposé dans le cadre d’une peine d’emprisonnement (article 2 de l’arrêté interministériel du 26 juin 1983 portant modalités d’utilisation de la main-d’œuvre pénitentiaire par l’Office national des travaux éducatifs et article 96 de la loi no 05-04 du 6 février 2005 portant Code de l’organisation pénitentiaire et de la réinsertion sociale des détenus). La commission a noté qu’aux termes de l’article 39 de la loi no 12-06 du 12 janvier 2012 relative aux associations, une association peut faire l’objet d’une suspension d’activité ou d’une dissolution «en cas d’ingérence dans les affaires internes du pays ou d’atteinte à la souveraineté nationale». En outre, selon l’article 46 de cette même loi, «tout membre ou dirigeant d’une association non encore enregistrée ou agréée, suspendue ou dissoute, qui continue à activer en son nom», est passible d’une amende et d’une peine d’emprisonnement de trois à six mois. La commission a relevé les informations du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme de 2017 selon lesquelles les organisations de la société civile avaient été soumises à de sévères restrictions après l’adoption de la loi no 12-06 relative aux associations. La commission a prié le gouvernement de prendre des mesures pour s’assurer que les dispositions de la loi no 12-06 relative aux associations ne puissent pas être utilisées pour sanctionner à une peine d’emprisonnement (qui comporte une obligation du travailler) les personnes qui, à travers l’exercice de leur droit d’association, expriment des opinions politiques ou s’opposent à l’ordre politique, économique et social établi.
Le gouvernement indique dans son rapport que l’article 39 de la loi no 12-06 relative aux associations prévoit une peine administrative non pénale en cas d’ingérence dans les affaires internes du pays et que les actes punissables n’ont aucun lien avec les orientations ou opinons politiques. De même, les sanctions énoncées à l’article 46 sont prononcées lorsque les personnes continuent à d’être actives au sein d’une association non enregistrées, dissoute ou suspendue, ce qui n’a pas non plus de relation avec l’expression des opinions et orientations politiques. Par ailleurs, le gouvernement souligne que la peine infligée aux contrevenants est l’emprisonnement (en plus de l’amende) et non l’obligation des détenus à effectuer des travaux forcés ou obligatoires. Il ajoute que la peine de travail forcé ou obligatoire ne figure pas dans la liste des peines prévues par la législation algérienne en tant que sanction pour les infractions en général. Le gouvernement indique en outre que le travail par un détenu est conditionné à son consentement préalable, et que tout détenu souhaitant travailler doit adresser une demande au juge de l’application des peines.
La commission prend note de ces informations. Elle constate cependant qu’en vertu des dispositions de l’article 2 de l’arrêté interministériel du 26 juin 1983, dans le cadre de la rééducation, de la formation et de la promotion sociale des détenus, «les détenus sont tenus à un travail utile», compatible avec leur santé, l’ordre, la discipline et la sécurité. Par ailleurs, l’article 96 de la loi no 05-04 du 6 février 2005 portant Code de l’organisation pénitentiaire et de la réinsertion sociale des détenus prévoit que «le détenu peut être chargé, par le directeur de l’établissement pénitentiaire, d’un travail utile». Comme elle l’a indiqué précédemment, la commission considère que le caractère volontaire du travail pénitentiaire ne ressort pas du libellé de ces dispositions qui au contraire permettent d’imposer un travail aux personnes qui ont été condamnées à une peine de prison. La commission considère en outre que même si, dans la pratique, le travail pénitentiaire est volontaire, il serait souhaitable d’apporter les modifications en ce sens dans la législation afin d’éviter toute ambiguïté juridique.
La commission note par ailleurs que le Comité des droits de l’homme des Nations Unies, dans ses observations finales de 2018, s’inquiète des allégations nombreuses faisant état du refus de l’administration d’accepter les statuts d’organisations déjà existantes mis en conformité avec la loi, pratique limitant les libertés des associations et exposant les membres à de lourdes sanctions pour activité non autorisée (CCPR/C/DZA/CO/4, paragr. 47). La commission souligne que l’article 46 de la loi no 12-06 du 12 janvier 2012 prévoit que si un membre d’une association non encore enregistrée ou agréée, suspendue ou dissoute (par exemple en vertu de l’article 39 de la loi) continue à être actif, il est passible d’une peine d’emprisonnement de trois à six mois. La commission rappelle que parmi les activités qui, en vertu de l’article 1 a), de la convention, ne doivent pas faire l’objet d’une sanction impliquant un travail obligatoire, figurent celles qui s’exercent dans le cadre de la liberté d’exprimer des opinions politiques ou idéologiques, ainsi que de divers autres droits généralement reconnus. Au nombre de ceux-ci figurent les droits d’association et de réunion par lesquels les citoyens cherchent à faire connaître et accepter leur opinion (voir le paragraphe 302 de l’Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales).
Par conséquent, la commission prie une nouvelle fois le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que les personnes qui, à travers l’exercice de leur droit d’association, expriment des opinions politiques ou s’opposent pacifiquement à l’ordre politique, économique ou social établi ne puissent pas faire l’objet de peines de prison, sur la base de l’article 46 de la loi no° 12-06 relative aux associations. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’application pratique de l’article 46 de la loi no 12 06, en précisant le nombre de poursuites engagées au titre de cette disposition, les faits reprochés et le type de sanctions imposées.
Article 1 d). Sanctions imposées pour participation à une grève. Dans ses précédents commentaires, la commission s’est référée à la loi no 90-02 du 6 février 1990, modifiée et complétée, relative à la prévention et au règlement des conflits collectifs de travail et à l’exercice du droit de grève, qui prévoit des restrictions à l’exercice du droit de grève. Elle a relevé que les articles 37 et 38 de ladite loi établissent la liste des services essentiels dans lesquels un service minimum obligatoire doit être maintenu, et que l’article 55, alinéa 1, prévoit une peine d’emprisonnement (dans le cadre de laquelle un travail pénitentiaire peut être imposé) de huit jours à deux mois et/ou une amende pour quiconque a amené ou tenté d’amener, maintenu ou tenté de maintenir une grève contraire aux dispositions de cette loi, même sans violences ou voies de fait contre les personnes ou contre les biens. La commission a prié le gouvernement de prendre les mesures propres à garantir qu’aucun travailleur ne puisse être condamné à une peine de prison pour avoir participé pacifiquement à une grève, et de communiquer des informations sur l’application pratique de l’article 55, alinéa 1, de la loi no 90-02.
Le gouvernement indique que les travailleurs qui participent de manière pacifique à une grève et dans le respect des procédures légales ne sont pas visées par l’article 55, alinéa 1, de la loi no 90-02. Il précise que les dispositions de cet article ont pour but de garantir la concertation collective entre l’employeur et les représentants des travailleurs. La concertation est obligatoire lorsqu’un différend collectif de travail survient entre l’employeur et les représentants des travailleurs. La commission prend note de ces informations. À cet égard, la commission souligne que, indépendamment du caractère légal de la grève, toute sanction imposée devrait être proportionnée à la gravité de la faute commise, et les autorités devraient exclure le recours à des mesures d’emprisonnement comportant un travail pénitentiaire obligatoire contre ceux qui organisent une grève ou y participent pacifiquement. La commission prie par conséquent instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires tant en droit qu’en pratique pour s’assurer qu’aucun travailleur participant pacifiquement à une grève ne puisse se voir infliger une peine d’emprisonnement aux termes de laquelle un travail pénitentiaire pourrait lui être imposé. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les progrès réalisés à ce sujet.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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