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Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Paraguay (Ratification: 1967)

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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2017, Publication : 106ème session CIT (2017)

 2017-Paraguay-C029-Fr

Un représentant gouvernemental a indiqué que l’administration du travail du pays a connu depuis 2013 une importante avancée institutionnelle avec la création du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale (ministère du Travail) qui poursuit des objectifs et missions propres en matière socioprofessionnelle. Ce nouveau ministère doit relever des défis quotidiens et assume la charge importante qu’est l’organisation d’une nouvelle entité à la hauteur des exigences élevées attendues, en s’engageant dans un processus de modernisation et de croissance, malgré les limites budgétaires. Il a mené de véritables avancées quant à l’application des normes en vigueur. Il a également suscité des modifications à la législation et à la réglementation en fonction des recommandations de la commission d’experts. De la même manière, le dialogue social sur plusieurs sujets a été renforcé grâce au Conseil consultatif tripartite, conformément aux dispositions de la loi no 5115/13 portant création du ministère du Travail. Le Paraguay a renforcé sa participation au sein de l’OIT, notamment en ce qui concerne le paiement de ses contributions, la présence de secteurs représentatifs à la Conférence, la soumission de rapports sur l’application des conventions et la réception de l’assistance technique du BIT. S’agissant du rapport de la commission d’experts, le gouvernement a développé, dans les rapports qu’il a envoyés ces dernières années, plusieurs sujets que cette commission a abordés cette année. Dans ces rapports, le gouvernement a exprimé la détermination de l’Etat de faire avancer la lutte contre le travail forcé et la prévention du travail forcé. L’adoption de la Stratégie nationale de prévention du travail forcé 2016-2020 par le décret no 6285 du 15 novembre 2016 est le fruit de nombreuses réunions tripartites avec les partenaires sociaux et d’ateliers sectoriels organisés en divers lieux du pays. Les visas de ce décret établissent que le pouvoir exécutif adopte cette stratégie au vu de l’existence d’un pan de la population qui, pour diverses raisons, se trouve en situation particulièrement vulnérable, ainsi qu’au vu des observations de la commission d’experts sur l’existence présumée de cas de servitude pour dettes dans la zone du Chaco paraguayen afin que, en coordination avec le ministère du Travail, des politiques d’Etat puissent être dessinées, essentiellement dans le but de définir des instruments et des mesures répondant à ce problème. Le premier objectif, à court terme, est la création d’un protocole de procédures pour le secteur public qui définisse les rôles, fonctions et responsabilités des services de l’Etat chargés d’exécuter la stratégie. L’objectif ultime est de coordonner l’action des organismes essentiels concernés par les cas qui pourraient survenir, notamment le ministère du Travail, le ministère public, la police nationale, le ministère de la Défense publique et le pouvoir judiciaire. A cet égard, un projet d’assistance technique du BIT est en cours d’élaboration en vue de présenter un protocole interinstitutionnel à la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé, pour soumission aux partenaires sociaux et au gouvernement. Cet instrument devrait être adopté et mis en œuvre en 2017 ou au début de 2018. Le BIT aide également le pays à mettre en place un module de formation des inspecteurs du travail en matière de travail forcé ainsi qu’à élaborer le plan d’action 2017-18 dans le cadre de la Stratégie nationale de prévention du travail forcé. En ce qui concerne les mesures adoptées pour renforcer l’unité technique de prévention et d’éradication du travail forcé de l’inspection du travail, de nouveaux inspecteurs du travail, titulaires d’un diplôme universitaire et formés par des experts du BIT en matière de contrôle et d’inspection du travail, ont été recrutés lors de concours publics. Même s’il convient de reconnaître que le nombre d’inspecteurs reste insuffisant, il est prévu de l’augmenter et d’améliorer la répartition géographique des inspecteurs, dans la mesure des possibilités budgétaires. S’agissant du manque d’infrastructures et de la présence moins importante de l’Etat dans la région du Chaco, l’orateur a indiqué qu’il s’agit d’une région très particulière puisqu’elle représente plus de 50 pour cent du territoire national et qu’elle compte à peine 350 000 habitants, dont 40 000 membres des peuples autochtones. Le seul service du ministère du Travail de la région se trouve à Teniente Irala Fernández. L’objectif à court terme est de rendre la Direction du travail opérationnelle à Filadelfia, localité plus proche des centres habités des peuples autochtones. A cet égard, le gouvernement finalise la signature d’un accord avec les autorités départementales de Boquerón pour qu’il installe les équipements de base. Une fois que la Direction du travail y sera installée, elle devra être dotée, à titre permanent, d’un nombre plus important de fonctionnaires et, si possible, de conseillers des ethnies autochtones. En ce qui concerne la nécessité que des décisions de justice soient rendues lorsque des pratiques de travail forcé ont été repérées, l’orateur a renvoyé aux rapports concernant l’application de la convention no 29 et de la convention (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, auxquels ont été joints des décisions de justice et des actes de procédure du ministère public relatifs à des cas de traite et à des situations de travail forcé. De plus, le BIT forme les juges sur les conventions ratifiées par le Paraguay. Cette formation mettra du temps à porter ses fruits. Par ailleurs, le nouveau Code d’application des peines contient des dispositions régissant le travail des détenus des établissements pénitentiaires et remplace la loi no 210 de 1970 sur les prisons, conformément aux éléments d’interprétation juridique des lois postérieures et des lois spéciales. La lutte contre le travail forcé est un défi que son pays relève de manière responsable, bien qu’elle dépende de la réalité géographique, démographique et budgétaire. L’avenir confirmera des avancées soutenues et ininterrompues en faveur du plein exercice des droits fondamentaux qui doivent être mieux protégés pour les groupes vulnérables, en particulier les peuples autochtones du Chaco paraguayen. A cette fin, l’OIT est un allié d’une valeur inestimable qui fournit une assistance importante au Paraguay, ce qui renforce l’espoir que le pays continuera à avancer sur la voie du fidèle respect de la convention no 29.

Les membres travailleurs ont souligné que, depuis 20 ans, la commission d’experts examine la question de la servitude pour dettes imposée à des travailleurs originaires de communautés autochtones au Paraguay. Ces pratiques ont été également constatées par diverses missions officielles de l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones et du Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones et par diverses études de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de différents syndicats paraguayens. L’OIT estime qu’au moins 8 000 travailleurs pourraient être victimes de travail forcé dans la région du Chaco paraguayen. Mais ce nombre pourrait être beaucoup plus élevé si l’on prend en compte les graves déficiences de l’inspection du travail, les infrastructures précaires, la grande superficie de la zone et l’indifférence des autorités. On peut considérer que les violations de la convention se produisent, au vu et au su des autorités, étant donné que le recours à la servitude pour dettes est une pratique habituelle dans les fermes d’élevage. Normalement, les travailleurs autochtones reçoivent un salaire très inférieur au salaire minimum et sont tenus de demander des crédits à leurs propres employeurs. Ces sommes servent généralement à construire des logements, à payer l’inscription à l’école ou simplement à acheter de la nourriture ou des vêtements. Cependant, en réalité, la majeure partie de leur salaire sert à payer leurs dettes, si bien qu’ils sont prisonniers de situations qui constituent un travail forcé. Autrefois, une grande partie des terres autochtones a été vendue à des spéculateurs étrangers, ce qui a forcé beaucoup de communautés autochtones à travailler pour les grandes exploitations agricoles. Actuellement, ces exploitations sont la seule source d’emplois au Chaco. Les hommes travaillent habituellement dans les fermes (récoltes ou élevage du bétail). Les tâches domestiques sont généralement effectuées par des femmes autochtones ou, parfois, par leurs enfants, au service des propriétaires de l’exploitation agricole. Les travailleuses domestiques autochtones sont constamment l’objet de violences de la part de leurs employeurs et, souvent, elles ne reçoivent pas de salaire et travaillent seulement en échange de logement et de nourriture. Dans le cas des enfants, la situation est encore pire. Au Paraguay, la pratique du criadazgo est courante. Il s’agit du travail que les enfants effectuent dans les exploitations comme commis en échange de la prise en charge de leurs besoins fondamentaux et d’un accès à l’éducation. Etant donné que ces enfants ne décident pas de leurs conditions d’emploi, ils sont en réalité soumis au travail forcé. Près de 47 000 mineurs, des filles pour la plupart, sont employés au Paraguay dans le service domestique dans le cadre de ce système. Cela représente, selon les chiffres d’un recensement officiel, 2,5 pour cent des enfants et adolescents du pays. Les membres travailleurs ont pris note de la création d’un bureau de la Direction du travail à Teniente Irala Fernández, dans le Chaco central. Néanmoins, ce bureau se trouve à 72 km de la ville de Filadelfia, capitale du département de Boquerón. Compte tenu que les travailleurs autochtones ne disposent pas de moyens de transport, ils ne peuvent pas s’y rendre à pied pour porter plainte. Ce bureau ne compte à l’heure actuelle qu’une seule employée, qui n’a pas la formation nécessaire et qui ne dispose pas d’un budget suffisant pour couvrir ses propres déplacements. En outre, le gouvernement n’a pas fourni d’informations aux syndicats sur les activités de ce bureau ni sur le nombre de réclamations portant sur le travail forcé reçues et examinées ni sur toute autre violation des droits au travail. Dans ce contexte, les violations ne sont pas dénoncées, et porter plainte peut avoir des conséquences néfastes pour les travailleurs. Les employeurs du Chaco ont l’habitude d’établir des listes noires, et la plupart des propriétaires exigent des références avant de confier des tâches dans leurs exploitations. Les travailleurs autochtones affirment que déposer une plainte liée au travail peut nuire à d’autres membres de leur groupe ethnique, ce qui met un terme à toutes les perspectives d’emploi pour l’ensemble de la communauté.

Quant aux inspections, le gouvernement a annoncé la création de la Direction du travail autochtone et de l’Unité technique de prévention et d’éradication du travail forcé, qui relève de l’inspection du travail, et qui seraient dotées de six inspecteurs du travail. Néanmoins, selon les syndicats paraguayens, ces organismes ont cessé de fonctionner peu de temps après leur création. Au cours de la brève période au cours de laquelle ces institutions ont fonctionné, elles n’ont jamais informé les partenaires sociaux sur les amendes imposées aux employeurs, les indemnisations accordées aux travailleurs ou le nombre de travailleurs suivant des cours de formation. En vertu de l’article 25 de la convention, des sanctions pénales doivent être imposées et appliquées strictement aux personnes considérées coupables d’avoir imposé ou utilisé le travail forcé. Néanmoins, la commission d’experts a demandé à plusieurs reprises au gouvernement de fournir des informations sur le nombre de cas dans lesquels les services d’inspection ont constaté que le Code du travail n’était pas respecté en ce qui concerne la protection du salaire et le fonctionnement des économats. A ce jour, ces informations n’ont pas été communiquées au BIT. En avril 2015, sur la base des conclusions de la Commission de la Conférence, une délégation du ministère du Travail, conduite par le ministre, s’est rendue dans la région du Chaco pour examiner les conditions de travail dans les exploitations agricoles. Elle n’a visité que certains centres de travail et, pendant toute la visite, a été accompagnée par des représentants des principales entreprises agricoles de la région. D’après les informations publiées sur la page Internet du gouvernement, le ministère du Travail a lancé un appel aux propriétaires des exploitations agricoles et aux représentants des entreprises, au cours d’une réunion qui s’est tenue dans le cadre de la visite, et a dit textuellement ce qui suit: «Nous ne soutenons pas les plaintes qui ont été transmises de manière intéressée au BIT à Genève, mais nous devons démontrer qu’il n’y a pas de travail forcé et nous voulons que vous nous aidiez. Nous devons prouver que telle est la situation.» Ainsi, on peut comprendre comment, au terme de sa visite, le ministre a fait des déclarations, largement diffusées dans la presse nationale, et affirmé que la mission n’avait pas pu constater l’existence de travail forcé dans la région du Chaco. La commission d’experts, dans son rapport publié en 2017, a noté avec une profonde préoccupation les difficultés de fonctionnement que connaissent les structures établies pour que les travailleurs autochtones victimes de travail forcé puissent exercer leurs droits ainsi que l’absence d’information sur les activités de ces structures. En outre, la commission d’experts a souligné que la législation nationale ne contient pas encore de dispositions suffisamment précises et adaptées aux circonstances nationales, raison pour laquelle les autorités compétentes ne peuvent pas poursuivre les auteurs de ces pratiques et dûment en sanctionner les auteurs. De fait, depuis 20 ans, aucune décision de justice n’a été rendue sur le travail forcé. Les membres travailleurs ont pris note de l’adoption, en 2016, avec l’assistance technique du BIT, de la Stratégie nationale de prévention du travail forcé. Toutefois, ils ont constaté avec préoccupation que les organisations syndicales n’avaient pas été suffisamment consultées lors de l’élaboration de cette stratégie ni informées des progrès réalisés à ce jour. De plus, cette stratégie ne contient pas de mesures concernant spécifiquement les communautés autochtones du Chaco et de la région orientale. Elle comporte une lacune considérable, celle de ne pas prévoir la répression du travail forcé et la sanction des responsables. Par ailleurs, elle ne fait pas non plus mention du renforcement institutionnel de l’inspection du travail et de la nécessaire coordination entre l’inspection et le ministère public. Ces éléments constituent une partie fondamentale de la convention et la commission d’experts les a relevés à plusieurs reprises. En ce qui concerne le travail en prison, malgré les multiples demandes de la commission d’experts, le gouvernement n’a pas encore modifié la loi sur les prisons en vertu de laquelle les personnes assujetties à des mesures de sûreté dans un établissement pénitentiaire sont également tenues de travailler en prison. En application de la loi actuelle, les personnes placées en détention provisoire sont tenues de travailler, ce qui constitue une violation manifeste de l’article 2 de la convention. Les membres travailleurs ont rappelé à nouveau que les organes de contrôle de l’OIT examinent ce cas depuis vingt ans. Ils ont également fait observer que le BIT a déjà fourni une assistance technique au Paraguay mais que, à l’évidence, le gouvernement n’a pas la volonté politique de procéder au changement nécessaire, en droit et dans la pratique, pour mettre un terme aux violations répétées de la convention. Des milliers de travailleurs, surtout autochtones, continuent d’être victimes de violations et sont soumis au travail forcé par des employeurs sans scrupules, avec la bénédiction du gouvernement. L’assistance technique qui a été apportée n’a pas suffi pour surmonter la méfiance qui existe entre la population du Chaco et le gouvernement. Enfin, étant donné la gravité du cas, les membres travailleurs ont recommandé au gouvernement de prendre des mesures plus fortes, en coopération avec le BIT et avec la participation de tous les acteurs intéressés sur le terrain.

Les membres employeurs ont rappelé que la commission a déjà examiné le cas présent à deux reprises. Sur la base des commentaires de la commission d’experts, ce cas couvre trois aspects. Le premier renvoie à la demande adressée au gouvernement pour qu’il adopte les mesures nécessaires, dans le cadre d’une action coordonnée et systématique, pour faire face à l’exploitation économique, en particulier la servitude pour dettes, que subissent certains travailleurs autochtones, notamment dans la région du Chaco. Sur ce point, les commentaires de la commission d’experts renvoient à une série de mesures qui prouvent la volonté politique du gouvernement de donner effet à ses demandes, telles que la création de la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé, la mise en place d’une sous-commission dans la région du Chaco, la création d’un bureau de la Direction du travail dans cette partie du pays et les activités réalisées conjointement avec le BIT. Les commentaires renvoient également à une série d’activités, dont certaines concernent spécifiquement des communautés autochtones, mais qui visent toutes à l’élaboration d’une stratégie nationale de prévention du travail forcé. Il convient de savoir si ces mesures ont porté leurs fruits. A cet égard, un élément encourageant peut être cité, à savoir l’information fournie par le gouvernement selon laquelle les rapports d’inspections effectuées en 2015 au Chaco n’établissent aucun cas de travail forcé, même s’ils font état de quelques infractions au droit du travail. En conséquence, partageant l’avis de la commission d’experts selon lequel le processus participatif a permis de mettre au point la Stratégie nationale de prévention du travail forcé, les membres employeurs expriment l’espoir que cette stratégie sera réellement appliquée dans la pratique. En deuxième lieu, la commission d’experts a demandé au gouvernement de renforcer les capacités des organes chargés de l’application de la loi et de compléter le cadre législatif de lutte contre le travail forcé, de sorte que les victimes puissent avoir accès à la justice. Ce point porte sur deux questions à la fois: l’application effective de la loi et les réformes du cadre législatif. Pour ce qui est de l’efficacité de l’application des sanctions, la commission d’experts a noté que l’inspection du travail a été renforcée grâce à l’embauche de 30 inspecteurs du travail, qui ont reçu une formation spécifique sur ces sujets. On notera également la création de nouveaux tribunaux dans la région du Chaco. Les membres employeurs ont estimé que ces mesures prouvent la volonté politique du gouvernement de donner effet à l’objectif de départ, à savoir la mise en œuvre d’une action coordonnée et systématique pour lutter contre l’exploitation économique, en particulier la servitude pour dettes qui affecte certains travailleurs autochtones, notamment dans la région du Chaco. C’est pourquoi, bien qu’ils estiment également qu’il n’y a pas suffisamment d’informations sur les activités menées par les structures qui permettent aux travailleurs autochtones victimes d’exploitation au travail d’exercer leurs droits, les membres employeurs ne sont pas d’accord avec la commission d’experts, qui conclut à des difficultés de fonctionnement de ces structures. En effet, une telle conclusion est basée uniquement sur les informations reçues des organisations syndicales alors qu’elle devrait être corroborée par de plus amples informations fournies par le gouvernement sur le fonctionnement de ces institutions. En ce qui concerne la nécessité de compléter le cadre législatif de lutte contre le travail forcé, les membres employeurs ont estimé que cette question ne fait pas l’objet de ce cas. Dans ces conditions, la recommandation devrait porter sur le lancement d’un processus de consultations tripartites qui permette de mener à bien la réforme législative requise. Pour ce qui est du troisième aspect, relatif au travail imposé aux personnes en détention provisoire, les membres employeurs partagent l’avis de la commission d’experts selon laquelle la norme autorisant le travail de personnes assujetties à des mesures de sûreté dans un établissement pénitentiaire n’est pas conforme à la convention. Il convient de noter toutefois que, comme le gouvernement l’a laissé entendre, cette norme n’a pas réellement besoin d’être abrogée puisqu’elle a été abrogée par une norme ultérieure pour cause d’incompatibilité. Les membres employeurs ont donc demandé au gouvernement d’apporter des éclaircissements sur ce point et de veiller à ce que tout travail effectué dans ces conditions soit interdit dans le pays.

La membre travailleuse du Paraguay a indiqué qu’elle salue les efforts déployés par le ministère du Travail pour promouvoir des politiques publiques en matière de travail, mais que ceux-ci restent insuffisants. Il est nécessaire de renforcer cette institution tant en termes d’effectifs que de ressources afin de pouvoir envisager une politique plus affirmée de promotion des droits fondamentaux, principalement dans le Chaco paraguayen. L’adoption de la Stratégie nationale de prévention du travail forcé est un point positif. Les centrales syndicales avaient participé à son élaboration ainsi qu’aux réunions de la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé consacrées à son développement. Les politiques et activités de lutte contre le travail forcé doivent être définies dans le cadre de cette stratégie. L’oratrice a souligné la vulnérabilité particulière de la population autochtone que l’Etat doit spécialement prendre en considération et protéger, d’autant plus que les caractéristiques de la région du Chaco permettent difficilement aux organisations syndicales d’être en contact avec elle. Les autochtones déposent leurs plaintes auprès de l’Institut national des affaires autochtones sans passer par les services du ministère du Travail. Le secteur syndical tient à continuer de contribuer à la défense des droits au travail et des droits syndicaux, sans discrimination. Le dialogue social mené avec les partenaires sociaux, dans le cadre de commissions tripartites compétentes, est le meilleur outil pour combattre le travail forcé. Plusieurs réunions tripartites ont été tenues sur la question, notamment en présence du BIT, afin d’élaborer un guide de traitement des cas de travail forcé.

Le membre employeur du Paraguay, prenant note des commentaires de la commission d’experts sur ce cas, a indiqué que la Fédération de la production, de l’industrie et du commerce (FEPRINCO) fait partie d’une instance de dialogue tripartite et de la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé. Il a indiqué que le secteur des employeurs paraguayens est fermement attaché à la convention et au dialogue tripartite et a signalé la création du Conseil consultatif tripartite, régi par le décret no 5159 de 2016. Il a fait référence à la participation de l’Union industrielle paraguayenne, de l’Association nationale des producteurs agricoles et de la Chambre nationale du commerce et des services du Paraguay dans la Campagne nationale pour la formalisation de l’économie et a indiqué que ces organismes sont les principaux contributeurs à l’assurance sociale obligatoire auprès de l’Institut de prévoyance sociale. Dix-neuf représentants de la FEPRINCO ont participé à des ateliers sur l’élaboration de la Stratégie nationale de prévention du travail forcé. L’orateur a exprimé qu’il était conscient des difficultés d’accéder à la région du Chaco. Les organisations d’employeurs ont participé, aux côtés du gouvernement et des communautés autochtones, aux visites effectuées dans la région pour montrer à quel point il est nécessaire d’adopter des mesures destinées à éviter le travail forcé des peuples autochtones. Enfin, il n’est pas normal que la commission ait été saisie de ce cas, étant donné que le gouvernement a adopté des mesures pour lutter contre le travail forcé. Il a demandé à la commission d’adopter une décision adaptée à la situation du pays en la matière.

Le membre gouvernemental du Panama, s’exprimant au nom du groupe des Etats d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), a pris note des informations fournies par le gouvernement ainsi que des commentaires de la commission d’experts qui soulignent l’engagement du gouvernement et son action efficace pour éradiquer le travail forcé. Il convient de souligner l’importance de l’adoption de la Stratégie nationale de prévention du travail forcé qui pose le cadre de la conception des politiques et des plans nationaux et locaux, étape importante de la lutte contre le travail forcé. Par ailleurs, ces dernières années, le pays a étroitement collaboré avec le BIT. Le ministère du Travail a effectué des visites et mené des inspections de façon continue dans la région du Chaco paraguayen sans détecter de cas de travail forcé. L’orateur a rappelé l’engagement du GRULAC en faveur de l’éradication du travail forcé et souligné la valeur de l’inspection du travail dans ce contexte. Il ne fait aucun doute que le gouvernement continuera de progresser dans la mise en œuvre de la convention, et l’OIT est invitée à poursuivre sa collaboration avec le pays pour réaliser cet objectif.

Le membre travailleur du Brésil a fait part de la solidarité des centrales syndicales brésiliennes envers les travailleurs paraguayens qui luttent contre le travail forcé et a rappelé que la commission avait déjà prié instamment le gouvernement paraguayen d’adopter des mesures contre les formes de travail forcé auxquelles certains travailleurs autochtones sont soumis, principalement dans la région du Chaco. Il est regrettable que le gouvernement continue de fermer les yeux sur l’exploitation des peuples autochtones alors qu’il a ratifié la convention il y a 59 ans. Le gouvernement continue d’enfreindre les droits de l’homme comme si les travailleurs étaient des choses et non des êtres humains. La dette du travailleur envers son employeur sert à dissimuler le travail forcé. Le travailleur devient l’otage de l’employeur qui le nourrit, l’habille, le loge et lui fournit des articles de toilette. A la fin du mois, le travailleur ne parvient pas à effacer sa dette. Souvent, la dette du travailleur retombe sur sa veuve et ses enfants qui doivent travailler pour la rembourser. Pour toutes ces raisons, l’OIT est invitée à adopter des mesures afin de veiller à ce que le gouvernement évite que ces violations ne persistent. Si le gouvernement devait continuer de contrevenir à la convention, d’autres voies pourraient être envisagées, comme le dépôt d’une plainte devant la Commission interaméricaine des droits de l’homme de l’Organisation des Etats américains.

La membre travailleuse de la République bolivarienne du Venezuela a exprimé la solidarité des syndicats vénézuéliens avec les centrales syndicales du Paraguay dans la lutte pour de meilleures conditions de vie et de travail pour la classe des travailleurs du pays. Le gouvernement doit renforcer le dialogue tripartite pour mettre fin au travail forcé auquel sont soumis les travailleurs autochtones, en particulier dans la région du Chaco.

Le membre gouvernemental du Mexique a souscrit à la déclaration du GRULAC. Il a relevé que la situation décrite est isolée et qu’il ne concerne que la région du Chaco. Il a exprimé sa satisfaction quant aux mesures adoptées par le gouvernement pour sanctionner les auteurs de ces actes. Il a encouragé le gouvernement à maintenir de telles mesures et à continuer de mener des actions en coordination avec le BIT aux fins de la bonne application de la convention.

Le membre travailleur de l’Argentine a indiqué que les travailleurs argentins jugent insuffisantes tant les explications fournies par le gouvernement que les mesures qu’il a prises. En effet, les stratégies et les plans élaborés par la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé et les structures mises en place n’ont pas reçu suffisamment de moyens pour éradiquer cette forme «d’esclavage moderne». En outre, la distance séparant les services de l’administration du travail des zones où se produit l’exploitation en question fait que les victimes ne peuvent pas y accéder facilement, ce qui explique le nombre peu élevé de plaintes déposées. Par ailleurs, l’orateur s’est associé aux recommandations de la commission d’experts à propos de la nécessité d’abroger la loi no 210 de 1970 sur les prisons et de s’assurer que les personnes détenues de manière préventive ne sont pas obligées de travailler en prison. Il est regrettable que l’esclavage moderne ne soit pas un phénomène isolé; au contraire, il est de plus en plus lié aux organisations mafieuses et à la criminalité organisée. Le fait que le travail forcé et les pratiques d’exploitation économique sous toutes leurs formes constituent une violation des droits de l’homme et attentent à la dignité humaine est reconnu internationalement. A ce propos, il faut souligner que le Paraguay n’a pas ratifié le protocole de 2014 sur le travail forcé et qu’il n’a pas prévu de peines sévères pour les auteurs de ces actes et qu’il ne les a pas non plus sanctionnés de l’une ou l’autre manière. Pour tous ces motifs, l’orateur a considéré que l’OIT devrait prendre des mesures afin de planifier une mission de longue durée en vue de mettre un terme à cette situation.

Un observateur représentant la Confédération syndicale internationale (CSI) a regretté que la commission soit obligée une fois de plus d’examiner la convention no 29 au Paraguay et que les décisions prises en 2013 n’aient pas suffi à empêcher que des milliers de travailleurs soient victimes de travail forcé. En effet, d’après les calculs des syndicats du pays et de la CSI, entre 30 et 35 000 personnes résidant dans les trois départements de la région du Chaco, ainsi que dans d’autres départements de la zone orientale du Paraguay, en majorité autochtones, auraient été victimes de pratiques abusives, notamment de travail forcé ou obligatoire, au sens de l’article 2, paragraphe 1, de la convention. Pareille ignominie et déchéance humaine tient à l’inaction des autorités publiques du Paraguay pour combattre de manière efficace l’imposition de travail forcé à des fins de profit personnel. Le rapport de la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones du 13 août 2015, relative à la situation des peuples autochtones au Paraguay, confirme que, si le pays dispose d’un cadre constitutionnel qui reconnaît les droits des peuples autochtones., ce cadre normatif ne s’est pas concrétisé par les mesures législatives, administratives et autres nécessaires à l’exercice des droits de l’homme par les peuples autochtones, en particulier les droits au travail et le droit de ne pas être contraint au travail forcé. Par conséquent, l’orateur a estimé, comme en témoigne le rapport de la commission d’experts sur le cas, et malgré les affirmations du gouvernement devant la Commission de la Conférence, que les déclarations de la CSI et des syndicats paraguayens sur les manquements dont il est fait état doivent être considérées comme véridiques. L’orateur a finalement rappelé que la commission d’experts a demandé que des sanctions pénales soient imposées et appliquées strictement aux personnes reconnues coupables d’avoir imposé du travail forcé et qu’elle a prié le gouvernement de fournir des informations sur les poursuites judiciaires engagées à l’encontre des personnes qui imposent du travail forcé, prenant note qu’aucune décision judiciaire n’a été rendue à cet égard.

Le membre travailleur de l’Uruguay a appuyé l’intervention des membres travailleurs de même que les interventions précédentes qui ont fait remarquer que le gouvernement est loin de se conformer à la convention. Il y aurait lieu de tenir compte, pour l’analyse de ce cas, de la Déclaration sociale adoptée par le MERCOSUR, organisation sous-régionale dont le Paraguay est membre. Le modèle économique du pays, basé sur l’agro-industrie, favorise les faits dénoncés. La situation dans ce pays a empiré depuis le dernier examen du cas, en 2013. Enfin, l’orateur a dénoncé l’absence de dialogue social au Paraguay.

Le représentant gouvernemental a indiqué que le gouvernement est déterminé à travailler avec les partenaires sociaux pour avancer dans la lutte contre le travail forcé. Prenant note de la discussion, il a toutefois réfuté certains commentaires qui sont hors contexte ou hors de propos. La mise en œuvre de la Stratégie nationale de prévention du travail forcé permettra une meilleure protection de tous les travailleurs du pays. En outre, il est important de renforcer l’inspection du travail et l’éducation afin de prévenir des infractions telles que la traite des personnes. Le gouvernement compte sur le dialogue social pour trouver des solutions comme, par exemple, dans le cadre de la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé ou d’autres instances de dialogue en matière de salaire minimum, d’éducation ou de santé. Il a engagé des consultations pour avancer sur ces questions. L’orateur a signalé que certaines centrales syndicales n’avaient pas participé au dialogue social et les a invitées à le faire. En ce qui concerne la question du travail forcé au Chaco, il a redit qu’il s’agit d’un territoire très vaste qui compte 40 000 membres des peuples autochtones. Ce territoire ne fait pas uniquement partie du Paraguay puisqu’il couvre également une partie de l’Argentine, du Brésil et de l’Etat plurinational de Bolivie, ce qui explique que les problématiques de la région soient traitées par tous ces pays. Le gouvernement aborde la question des peuples autochtones de manière globale, en associant plusieurs institutions, avec la coordination de l’Institut national des affaires autochtones. En ce qui concerne le criadazgo, en 2016, le gouvernement a élaboré et présenté un projet de loi criminalisant cette pratique et les pires formes du travail des enfants. Ce projet est actuellement soumis au Parlement pour examen. La législation nationale contient des définitions et les sanctions applicables au travail forcé, à la servitude pour dettes et au mariage servile, par exemple, dans la loi générale no 4788/12 contre la traite des personnes. Le ministère public a poursuivi des auteurs de telles pratiques et des jugements ont été rendus. Enfin, le gouvernement donnera suite aux commentaires des organes de contrôle en se prévalant du soutien continu du BIT en la matière.

Les membres employeurs ont noté avec intérêt les informations fournies par le gouvernement au sujet de l’institutionnalisation de ses actions pour réagir de manière coordonnée et systématique en cas de travail forcé, en particulier en ce qui concerne la servitude pour dettes dans la région du Chaco. Toutefois, des doutes subsistent quant à l’efficacité des mesures prises. Les membres employeurs ont exprimé l’espoir que ces mesures auront néanmoins des effets dans la pratique. A cet égard, ils estiment que le gouvernement doit fournir dans son prochain rapport à la commission d’experts, dû en 2017, des informations sur: 1) le fonctionnement de la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé ainsi que de la sous-commission de la région du Chaco; 2) les actions visant spécifiquement les communautés autochtones afin de prévenir les situations de travail forcé, en application de la Stratégie nationale de prévention du travail forcé 2016-2020; 3) le renforcement des capacités de l’inspection du travail; et 4) la validité de la loi no 210 de 1970 sur les prisons.

Les membres travailleurs ont regretté que, malgré les recommandations que les organes de contrôle de l’OIT formulent depuis vingt ans et l’assistance apportée, le Paraguay ne donne toujours pas pleinement effet aux dispositions de la convention. Les violations vont de l’incapacité de la part des autorités à recevoir les plaintes à des déficiences graves de l’inspection du travail, en passant par l’absence de sanctions pénales et des lacunes de la législation. Tous ces éléments combinés ont donné lieu à une culture où l’exploitation des travailleurs autochtones, hommes, femmes et enfants, est chose normale. Aucune information n’a été reçue sur le mémorandum d’entente tripartite signé en 2014. Les membres travailleurs ont pris note de l’assistance technique apportée par le BIT et de la Stratégie nationale de prévention du travail forcé. Pour autant, vu l’importance des défis et l’inaction persistante du gouvernement, l’envoi d’une mission de contacts directs de l’OIT s’impose. En outre, les membres travailleurs demandent instamment au gouvernement: 1) d’allouer des ressources humaines et matérielles suffisantes aux services du ministère du Travail dans la région du Chaco pour leur permettre de recevoir les plaintes des travailleurs et des informations faisant état de travail forcé, de prendre les mesures appropriées pour faire en sorte que, dans la pratique, les victimes puissent saisir les autorités judiciaires compétentes et qu’elles soient protégées; 2) de fournir à la commission d’experts des informations sur les actions judiciaires engagées à l’encontre des personnes qui imposent du travail forcé, sous forme de servitude pour dettes; et de s’assurer que la législation pénale nationale renferme des dispositions suffisamment précises et adaptées aux circonstances du pays pour que les autorités compétentes puissent engager des actions pénales ou poursuivre les auteurs de ces pratiques et les sanctionner; 3) de manière prioritaire, de renforcer les capacités de l’inspection du travail pour lui permettre de traiter efficacement les plaintes déposées, d’identifier les victimes et de restaurer leurs droits pour éviter qu’elles ne retombent dans des situations de travail forcé; 4) de réunir les partenaires sociaux, notamment les organisations les plus représentatives, pour qu’elles participent à la mise en œuvre de la Stratégie nationale de prévention du travail forcé, en garantissant, conformément aux dispositions de la convention (nº 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989, que les peuples autochtones soient consultés concernant toute mesure administrative ou législative susceptible de les toucher; le dialogue social doit être concret et pas uniquement formel; et 5) s’agissant de la nécessité de modifier la loi no 210 de 1970 sur les prisons, dans un souci de conformité avec la convention, de prendre les mesures nécessaires pour que la législation nationale soit conforme aux dispositions de la convention.

Conclusions

La commission a pris note de la déclaration orale du représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.

La commission a relevé qu’aucune décision de justice n’avait été rendue en matière de travail forcé sous forme notamment de servitude pour dettes.

Prenant en compte la discussion qui a eu lieu sur ce cas, la commission a instamment prié le gouvernement:

- d’allouer suffisamment de ressources matérielles et humaines aux services du ministère du Travail dans la région du Chaco afin qu’ils puissent recevoir les plaintes et les dénonciations de travailleurs pour travail forcé et prendre des mesures adéquates pour garantir que, dans la pratique, les victimes sont en mesure de s’adresser aux autorités judiciaires compétentes;

- de faire en sorte que des poursuites judiciaires soient engagées à l’encontre des personnes imposant du travail forcé sous forme de servitude pour dettes;

- de continuer à renforcer les capacités des inspecteurs du travail afin de leur permettre de traiter correctement les plaintes reçues, de repérer les victimes et de restaurer leurs droits pour éviter qu’elles ne retombent dans des situations de travail forcé;

- de continuer à associer les partenaires sociaux au processus d’adoption de la Stratégie nationale de prévention du travail forcé;

- d’élaborer des plans d’action régionaux et de prévoir des actions à mener en priorité pour faire connaître le problème du travail forcé, apporter une solution à la vulnérabilité des travailleurs autochtones et protéger les victimes identifiées;

- de veiller à ce que le droit pénal national contienne suffisamment de dispositions spécifiques pour permettre aux autorités compétentes d’engager des poursuites pénales à l’encontre des auteurs de ces pratiques.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 2013, Publication : 102ème session CIT (2013)

2013-Paraguay-C29-Fr

Une représentante gouvernementale s’est déclarée satisfaite que l’on ait noté avec intérêt les mesures adoptées dans le cadre de la mise en application de la convention no 29 et de la convention (nº 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989, et qu’ait été reconnu le processus d’élaboration d’une Stratégie nationale de prévention du travail forcé. Le travail forcé est considéré comme un crime dans le droit national; pour autant, pour en terminer avec ce fléau, les Etats doivent favoriser l’autonomisation des groupes vulnérables, notamment celle des peuples indigènes. Les particularités géographiques du Chaco paraguayen entravent les initiatives publiques, cette région représentant 60 pour cent du territoire national et à peine 2 pour cent de la population, qui se compose de plus d’une douzaine de peuples indigènes, de grandes colonies mennonites et de petits et grands producteurs, entre autres. Les progrès accomplis depuis la dernière réunion de la commission d’experts: la loi contre la traite des personnes (no 4788 du 13 décembre 2012) qui comprennent des définitions spécifiques de la traite des personnes, du travail forcé, de l’exploitation économique et des situations de servitude; la Stratégie nationale de prévention du travail forcé qui est en cours d’élaboration avec la participation active de syndicats, d’organisations d’employeurs et avec l’appui du programme d’action spécial de l’OIT pour combattre le travail forcé (SAP-FL); l’inscription et l’octroi de documents d’identité à plus de 6 000 autochtones dans le cadre du programme d’inscription au registre civil; la tenue d’ateliers de sensibilisation et de diffusion des normes relatives au travail forcé dans diverses localités de l’intérieur du pays, y compris dans la région du Chaco; la formation de 898 autochtones par le Service national de promotion professionnelle et de 325 autochtones par le Système national de formation professionnelle; et la formation de plus de 200 femmes à la pêche et au travail domestique par la Direction de la promotion sociale de la travailleuse. Ont été effectuées 78 inspections du travail dans la région du Chaco qui ont touché 62 entreprises et 808 travailleurs; dans ce cadre, les fonctionnaires qui sont intervenus n’ont décelé aucune situation relevant du travail forcé ni de la servitude pour dettes. Un processus de renforcement et de modernisation des services d’inspection du travail a été engagé avec l’appui du BIT. En ce qui concerne l’adoption de mesures législatives, une loi portant création d’un ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale est actuellement à l’étude à la Chambre des députés du Congrès national. Une loi organique pénitentiaire a été en partie adoptée par la Chambre des députés et est actuellement devant le Sénat.

Certaines des questions abordées par la commission d’experts dans son observation sur la convention no 29 ont été traitées par le gouvernement dans les rapports transmis en 2012, notamment dans le rapport relatif à la convention (nº 95) sur la protection du salaire, 1949, et à la convention no 169. Les observations formulées à propos du travail forcé ont été traitées par le gouvernement, avec la participation d’un grand nombre d’institutions publiques, de partenaires sociaux et d’organisations non gouvernementales (ONG). L’oratrice a précisé certains aspects mentionnés dans le rapport de la commission d’experts, à savoir: le fait d’avoir pris note de la plainte de la Centrale unitaire des travailleurs-Authentique (CUT-A) et de la Confédération syndicale internationale (CSI), en dépit du fait que le gouvernement n’a reçu qu’une plainte de la CUT-A; les réunions ordinaires tenues par la Commission nationale des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé, établie par la résolution no 230 de 2009; la création de la Commission technique pour la modernisation des processus administratifs d’inspection du travail; la création future d’une unité spécialisée d’inspecteurs pour la détection du travail forcé; les activités de diffusion et de sensibilisation sur les droits des travailleurs réalisées par la Direction régionale du travail du Chaco; la signature d’un accord de collaboration générale entre le ministère de la Justice et du Travail (MJT) et l’Association rurale du Paraguay (ARP), pour l’inscription et la délivrance de documents d’identité aux citoyens ainsi que la régularisation des travailleurs. Il est par ailleurs envisagé de créer une direction du travail indigène au sein du ministère, qui sera chargée de la coordination du système de médiation, des services d’inspection et de la formation des travailleurs, en tenant compte de la nécessité de consulter de manière préalable, libre et éclairée les peuples indigènes en ce qui concerne toutes les mesures en cours d’exécution et celles qui doivent être mises à exécution. L’oratrice a également réitéré la demande adressée aux centrales syndicales et aux ONG en vue d’identifier les établissements et les localités où auraient été décelées des situations de travail forcé, et ce afin de procéder aux vérifications qui s’imposent.

Les membres employeurs ont indiqué que nombre d’éléments contenus dans le rapport de la commission d’experts étaient des sujets de longue date qui avaient même fait que cette commission avait examiné ce cas au cours des années précédentes. Différents thèmes figurent dans les informations contenues dans le rapport, en particulier la situation au cours des années précédentes au Chaco. Même si des informations détaillées figurent dans le dernier rapport, en particulier sur le Programme national pour les peuples indigènes (PRONAPI) et les activités menées dans le cadre des visites d’inspection – au cours desquelles, comme l’a dit la représentante gouvernementale, aucune situation de travail forcé n’a été constatée –, il est évident que des amendes sont infligées en cas d’infraction à la législation du travail et que des infractions à cette législation sont commises. Il existe également un rapport d’une source externe, dont le BIT a eu connaissance, dans lequel il est indiqué que le travail forcé a cours au Paraguay. De même, les membres employeurs ont estimé que, même si le gouvernement a présenté des informations relativement complètes dans son dernier rapport, il existe des sujets sur lesquels le rapport de la commission d’experts appelle des explications complémentaires. En ce qui concerne les sanctions, des ajustements sont nécessaires aux niveaux administratif et pénal ainsi qu’en ce qui concerne le projet de loi pénitentiaire transmis au Congrès. Le gouvernement déploie des efforts pour se conformer à la demande de la commission d’experts ainsi que pour aligner sa législation avec l’esprit et la lettre de la convention. Toutefois, il est nécessaire d’approfondir les activités décrites dans les commentaires et, pour ce faire, l’offre d’assistance technique du BIT dans le cadre des programmes mis en œuvre peut constituer une mesure adéquate.

Les membres travailleurs ont indiqué que, depuis 1997, la commission d’experts formule régulièrement des commentaires concernant la servitude pour dettes dans les communautés indigènes du Chaco. Lors de l’examen de ce cas en 2008, la présente commission avait souligné la situation ingérable des paysans sans terre et leur grande vulnérabilité à la mendicité et à la prostitution, lorsqu’ils doivent quitter leurs terres en raison de la culture intensive du soja pour aller vivre en ville. La commission avait également souligné la situation des enfants exerçant des activités dangereuses, telles que la production de briques et de chaux ou la maçonnerie, et des activités dans l’économie informelle ainsi que les violences commises envers l’Organisation nationale des paysans (ONAC). La commission avait exprimé le ferme espoir que des mesures utiles seraient prises d’urgence, et le gouvernement avait sollicité l’assistance technique du BIT. L’élection du nouveau Président, qui avait annoncé une réforme agraire, une réforme de l’éducation et de la santé ainsi qu’un développement de la production pour mettre fin à la pauvreté et aux migrations forcées, avait en effet suscité l’espoir de voir la législation mise en conformité avec les normes de l’OIT. Une politique d’investissements étrangers transparents avait également été annoncée. Pourtant, la situation n’a pas évolué favorablement: les violations constatées pourraient relever tant de la convention no 29 que de la convention no 169 ou même de la convention (nº 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, ou encore d’autres conventions puisqu’il s’agit aussi de situations de discrimination. Soulignant les particularités du Paraguay en matière de migration, les membres travailleurs se sont référés au rapport du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles (avril 2012), attestant de nombreuses violations, et à celui du Comité contre la torture (novembre 2011) qui continuait à exprimer sa préoccupation quant à la persistance de situations d’exploitation au travail des peuples indigènes vivant au Paraguay. En outre, l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones a conclu, au terme d’une mission au Paraguay en 2009, qu’il existe un système de travail forcé dans la région du Chaco et émis des recommandations concernant notamment la servitude pour dettes et la question de la restitution des titres fonciers, qui est à l’origine de l’appauvrissement des communautés indigènes et de leur endettement. Les membres des communautés indigènes ont perdu leurs terres au profit de grandes entreprises agro-industrielles, et l’écosystème caractéristique de leurs terres ancestrales a quasiment disparu.

Les membres travailleurs ont toutefois indiqué que la Constitution du Paraguay reconnaît les droits des peuples autochtones de jouir de systèmes politiques, sociaux, économiques, culturels et religieux qui leur sont propres et que les langues indigènes sont protégées. De plus, une politique nationale des peuples indigènes a été adoptée, et l’Institut des peuples indigènes du Chaco a été créé. S’agissant de la pratique, l’orateur a décrit le système de travail auquel les membres des communautés indigènes sont soumis: transport vers des lieux de travail éloignés de leur communauté d’origine, absence de tout document établissant leurs conditions de travail, menaces de représailles en cas de dénonciation, absence de salaire dans certains cas, etc. Se référant au commentaire de la commission d’experts, les membres travailleurs ont rappelé les observations formulées par la CUT-A et la Centrale nationale des travailleurs (CNT) relatives au travail forcé dans les exploitations agricoles et les usines du Chaco et à l’absence de mesures de la part du gouvernement pour mettre fin à ces pratiques, et ont souligné que l’application de sanctions efficaces est un élément essentiel de la lutte contre le travail forcé. S’agissant du travail pénitentiaire, les membres travailleurs ont souligné que le gouvernement s’était engagé à modifier la loi pénitentiaire (loi no 210 de 1970), en vertu de laquelle les personnes soumises à des mesures de sûreté dans un établissement pénitentiaire ont l’obligation de travailler, dans le cadre de l’adoption d’un Code pénitentiaire puis d’un nouveau Code de procédure pénale. Il n’a fourni cependant aucune information sur l’état d’avancement de ces réformes. Une simple assistance technique ne suffira pas à dépasser la méfiance qui n’a pas manqué de s’installer entre les peuples du Chaco et le gouvernement; il faudra prévoir des mesures associant tous les acteurs sur le terrain. Les membres travailleurs ont déclaré que des mesures sévères devraient être envisagées.

Un membre travailleur du Paraguay a déclaré que les autorités sont parfaitement au courant des violations de la convention sur le travail forcé ainsi que de la convention relative aux peuples indigènes et tribaux. Quatre-vingt-quinze pour cent des terres du Paraguay appartiennent à de grandes exploitations, et le modèle de développement du pays, fondé sur les exportations de produits agricoles, s’est intensifié ces dernières années au détriment des peuples originaires. Le gouvernement a fourni peu, voire pas du tout, d’informations sur la question de la servitude pour dettes des communautés indigènes. Le membre travailleur a attiré l’attention sur le manque de volonté politique de l’Etat de prendre des mesures efficaces pour éradiquer le travail forcé. Le problème le plus grave du moment est l’expulsion des indigènes de la région du Chaco et le fait que les travailleurs s’endettent pour pouvoir se nourrir parce que ce sont les employeurs qui fixent les prix des denrées alimentaires. Le membre travailleur a souligné la situation particulièrement grave des femmes employées comme domestiques ainsi qu’une situation d’extrême pauvreté et d’indigence, en particulier dans les populations ethniques du Chaco, et il a insisté sur la nécessité d’un accord pour éradiquer le travail forcé dans le pays.

Le membre employeur du Paraguay a souligné que la délégation des employeurs partage le point de vue exposé par le représentant gouvernemental et a souligné l’engagement des employeurs à contribuer à éliminer définitivement le travail forcé. Il a fait valoir que ce problème touche le Chaco paraguayen, une région importante et difficilement accessible qui compte peu d’habitants, dans laquelle les inspections et les contrôles sont rares, compte tenu du manque de ressources et de personnel. Les employeurs du pays soutiennent le projet de loi portant création d’un ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale dans l’objectif de régler ces problèmes et participent au travail tripartite fondé sur la loi no 4788 de décembre 2012 contre la traite des personnes. Il a indiqué que sur les 78 inspections réalisées aucune situation de travail forcé n’a été constatée, et a insisté sur le rôle de la formation technique du BIT pour parvenir à éliminer complètement cette pratique. Il a fait état des progrès réalisés dans l’application de politiques publiques grâce à la création du bureau régional dans la localité d’Irala Fernández, région du Chaco, mais il est d’avis qu’il faudrait créer d’autres bureaux encore. Il a aussi fait état du travail de sensibilisation portant sur la législation du travail et sur les questions de sécurité sociale, réalisé auprès de la Fédération de la production, de l’industrie et du commerce, en mettant en exergue les programmes de lutte contre le travail des enfants dans les plantations de canne à sucre et les usines de montage de matériel de construction mis en œuvre par l’Union industrielle paraguayenne (UIP) – membre de la fédération susmentionnée –, ainsi que de sa participation au groupe pour l’égalité des chances entre hommes et femmes dans l’emploi, avec l’appui du ministère de la Justice et du Travail. Il a aussi mentionné les programmes de responsabilité sociale de nombreuses entreprises et la sécurité juridique qui prévaut dans le pays et a exhorté les membres de la commission d’experts à constater par eux-mêmes les réalités du pays. Il a également réaffirmé la volonté des employeurs de collaborer avec les syndicats et les autorités nationales en vue de respecter pleinement les droits fondamentaux.

La membre gouvernementale de la Colombie, s’exprimant au nom des membres gouvernementaux de la commission qui sont membres du Groupe des Etats d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), a souligné que la commission d’experts a pris note des différentes mesures prises par le gouvernement pour prévenir le travail forcé, notamment la création en 2009 d’une Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé, dans le cadre de laquelle un plan d’action a été élaboré, qui comprend des mesures de sensibilisation, la formation des inspecteurs du travail et la mise en place d’un bureau de la Direction du travail dans la localité du Chaco central. Elle a réaffirmé l’engagement des pays du GRULAC à éliminer le travail forcé dans toute la région et a encouragé le gouvernement à poursuivre ses efforts en ce sens. Elle a aussi exprimé l’espoir que le BIT continuerait de fournir son assistance afin de donner pleinement effet à la convention.

Le membre travailleur du Brésil a rappelé que le problème du travail forcé n’est pas nouveau au Paraguay. Le phénomène de la servitude pour dettes dans la région du Chaco est évoqué dans les discussions de la commission d’experts depuis 1998. La plupart des indigènes travaillant dans la région du Chaco n’ont que des emplois temporaires, sont embauchés par des intermédiaires et transportés vers des lieux de travail éloignés de leurs communautés. Leurs contrats de travail sont des engagements verbaux, ce qui veut dire qu’en cas de rupture de contrat ils n’ont aucun moyen de recours adéquat et ne peuvent défendre leurs droits. Parmi les cas les plus graves figurent ceux constatés dans des fermes d’élevage où des travailleurs ont travaillé toute leur vie sans autre rémunération que le fait d’être nourris. Ces fermes utilisent aussi comme travailleuses domestiques des femmes dont la rémunération ne suffit pas à payer le transport les amenant de leur communauté. Ces fermes pratiquent aussi le travail des enfants. Le fait de ne disposer d’aucune terre est à la base de la vulnérabilité de ces peuples indigènes car 82 pour cent des terres du pays sont aux mains de 2 pour cent de propriétaires terriens. Le gouvernement a adopté des mesures de sensibilisation mais il est nécessaire de prendre des mesures pour combattre le travail forcé et protéger les victimes.

La membre travailleuse de la République bolivarienne du Venezuela a indiqué que son pays est vivement préoccupé par la situation des indigènes de la région du Chaco parce que le fait d’endetter une personne pour ensuite la contraindre à travailler contre sa volonté constitue une violation non seulement de la convention, mais aussi des droits humains les plus fondamentaux. Elle a ajouté que ce cas est d’autant plus grave qu’il s’agit de peuples indigènes du continent américain et qu’il constitue un grand retour en arrière du point de vue de la justice sociale inscrite dans le Préambule de la Constitution de l’OIT. Elle s’est demandé ce qui différencie l’esclavage de l’époque coloniale des pratiques inhumaines auxquelles sont soumis les travailleurs de la région du Chaco et leurs familles qui, souvent, travaillent exclusivement pour le gîte et le couvert. Elle a indiqué que la concentration des terres entre les mains des grands propriétaires accroît la vulnérabilité des peuples autochtones de la région et que la corruption empêche les pouvoirs publics de jouer correctement leur rôle et de restituer les terres ancestrales, ce qui favorise les violations à la convention. Les politiques font preuve de complaisance envers les propriétaires terriens et exploitants agricoles, une situation qui s’est encore aggravée avec le coup d’Etat et qui affecte en particulier les indigènes, les paysans, les ouvriers et les familles pauvres et vulnérables. L’oratrice a exhorté, au nom des travailleurs vénézuéliens, cette commission à prendre les mesures adéquates pour rétablir les droits des indigènes du Chaco soumis à des conditions de travail inhumaines.

Le membre travailleur des Etats-Unis a souligné que les entretiens menés par la Confédération syndicale internationale (CSI) au Paraguay en 2012 ont montré que de grands propriétaires terriens, en particulier de la communauté mennonite, ont été impliqués dans des cas de travail forcé, ce qu’ont confirmé des rapports émanant de l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones. La communauté mennonite est l’un des principaux entrepreneurs agricoles et a acquis de grands domaines fonciers dans le centre du Chaco. Cela a forcé les populations indigènes à vivre dans des zones de plus en plus restreintes et ne leur a laissé d’autre choix que celui de travailler comme ouvriers agricoles dans des exploitations appartenant aux communautés mennonites. Ces travailleurs, dont des femmes et des enfants, sont assujettis à des conditions de travail forcé. Le gouvernement a indiqué à l’OIT que les inspections effectuées dans de petites ou grandes exploitations agricoles n’ont pas permis d’identifier des situations de travail forcé. Toutefois, le gouvernement n’a jamais fourni de statistiques sur le nombre des cas dans lesquels des infractions au Code du travail ont été relevées, sur les amendes infligées à des employeurs ou sur les indemnisations versées à des travailleurs. Les institutions publiques, y compris les services d’inspection du travail et de santé, ne sont pas présentes dans plusieurs zones du centre du Chaco. Malgré plusieurs recommandations visant à ce que le gouvernement adopte un plan régional d’action pour lutter contre le travail forcé, rien n’a été fait à cet égard. Ce plan doit porter aussi sur la participation de la communauté mennonite. De plus, il faut une aide internationale pour la société civile paraguayenne et pour le gouvernement.

Un autre membre travailleur du Paraguay a indiqué que la situation des travailleurs au Paraguay a toujours fait l’objet d’observations de la commission d’experts et que le cas examiné aujourd’hui concerne l’une des pires formes de travail et d’exploitation. Il a fait état de la solidarité pleine et entière de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT) avec les travailleurs soumis au travail forcé et a demandé instamment au gouvernement de prendre des mesures plus radicales et plus efficaces pour que les services du ministère de la Justice et du Travail se rapprochent des zones les plus reculées du pays, où des compatriotes et des étrangers pourraient être victimes de cette pratique. Il a demandé l’appui des employeurs pour élaborer une feuille de route tripartite, qui permettra de prévenir et d’éliminer le travail forcé au Paraguay, et a souligné l’importance de la collaboration de tous les partenaires sociaux et du BIT. Le travail forcé touche non seulement les indigènes du Chaco mais aussi les populations de la zone de Caaguazú, Alto Paraná et Canindeyú.

La représentante gouvernementale a indiqué que son gouvernement a placé parmi 100 priorités la création d’un ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale. Cet organisme doit dépasser le caractère passager d’un gouvernement et s’inscrire dans la durée, d’autant plus que la commission d’experts et les centrales syndicales en ont recommandé la création. De plus, on a considéré nécessaire de créer la Direction du travail indigène et l’Unité spécialisée des inspecteurs chargés de détecter les cas de travail forcé, dans le cadre du ministère de la Justice et du Travail, une fois que les peuples indigènes auront été informés puis consultés librement. En ce qui concerne la lutte contre le travail forcé, l’oratrice a fait mention d’activités menées en collaboration avec le bureau local de l’OIT au Paraguay: i) une étude sur la législation en vigueur qui porte sur le travail forcé, en la comparant à la législation sur le travail des enfants; ii) des ateliers régionaux pour réunir des informations en vue de la stratégie nationale de prévention du travail forcé, l’accent étant mis sur la consultation préalable des peuples indigènes afin que ceux-ci puissent proposer la feuille de route la plus appropriée et la plus cohérente pour traiter cette question; à cette fin, des consultations auront lieu dans le Chaco central, dans le département de Itapúa, dans la localité de Juan Caballero et dans la capitale. Se tiendront aussi des ateliers spécifiques avec des représentants d’organisations indigènes, d’employeurs, de syndicats et de la société civile; iii) des réunions avec la directrice du Département des normes internationales du travail du BIT et avec les spécialistes du Bureau responsables des questions du travail forcé et des peuples indigènes et tribaux. L’oratrice a souligné certains résultats de son gouvernement, par exemple l’approbation par le pouvoir exécutif du décret portant sur le plan national des droits de l’homme, avec la participation de la société civile et en collaboration avec le Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme. Ont été organisés aussi divers cours de perfectionnement et de formation professionnelle afin que les intéressés, en particulier les jeunes en âge de travailler et les membres des communautés natives du Chaco et de la région orientale, puissent acquérir des capacités et des qualifications pour accéder à un travail décent. En outre a été réorganisée la commission chargée de faire appliquer les décisions de la Cour interaméricaine des droits de l’homme et de donner suite aux recommandations de la Commission interinstitutionnelle chargée d’appliquer les mesures nécessaires pour le respect des sentences internationales (CICSI); ainsi, la législation nationale sera adaptée de façon à trouver une solution effective pour que les terres ancestrales soient restituées aux communautés indigènes. Actuellement, la législation nationale ne prévoit pas de moyens de procédure permettant de restituer ces terres. Le gouvernement dispose de projets mais aussi d’instruments pour défendre les droits des travailleurs et prévenir le travail forcé, par exemple la loi no 4788 contre la traite des personnes et la convention (nº 189) sur les travailleuses et travailleurs domestiques, 2011, qui a été ratifiée. L’oratrice a réaffirmé l’engagement du gouvernement dans la lutte contre le travail forcé, en étroite collaboration avec les partenaires sociaux et l’OIT, et a demandé que l’OIT institue un bureau permanent au Paraguay afin de combattre fermement le travail forcé et d’améliorer les conditions de travail.

Les membres employeurs ont pris note de la bonne volonté du gouvernement pour surmonter les difficultés actuelles, en particulier l’adoption récente de mesures visant à éviter la traite, la poursuite du programme tripartite de prévention du travail forcé, les ateliers de sensibilisation des fonctionnaires et des peuples indigènes et le renforcement des capacités des travailleurs des secteurs de la pêche et des services domestiques. Ils ont également pris note du renforcement de l’inspection du travail dans la région du Chaco, en particulier dans la localité de Teniente Irala Fernández, et de la disposition – qui sera bientôt adoptée – relative à la création du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, qui comportera une division spéciale pour les peuples autochtones. Ils ont également pris note de la demande des travailleurs du Paraguay qui souhaitent que davantage de mesures visant à éviter le travail forcé soient adoptées et que l’on accorde un appui aux communautés autochtones, en particulier dans le secteur sucrier, en matière de travail domestique et dans l’élevage. Le gouvernement devrait appliquer un plan régional d’action pour renforcer la structure institutionnelle et s’appuyer sur les interlocuteurs sociaux afin d’offrir des possibilités aux peuples indigènes en vue d’éviter le travail forcé et le travail des enfants. Le gouvernement récemment élu devra continuer à recevoir l’assistance technique du BIT afin d’harmoniser pleinement la législation et la pratique nationales avec la convention. Les membres employeurs ont espéré que, dans son prochain rapport, le gouvernement pourra faire part des avancées réalisées. De même, ils ont demandé au Bureau de faire figurer des informations sur le Paraguay dans son rapport général sur la coopération technique dans le monde.

Les membres travailleurs ont indiqué qu’il y avait pour eux deux problèmes majeurs: la question de la servitude pour dettes et, plus largement, les problèmes qui touchent aux droits des peuples indigènes de la région du Chaco; ainsi que la question du travail des détenus et de la conformité de la loi no 210 avec la convention. En ce qui concerne ces deux points, ils ont déploré les manquements récurrents au respect des dispositions de la convention no 29 et l’inertie du gouvernement qui perdure. Les membres travailleurs ont demandé que l’assistance technique soit renforcée et élargie, en incluant toutes les parties intéressées, y compris les peuples indigènes qui forment une alliance avec les organisations syndicales. Cette assistance technique pourrait être utilement axée autour des quatre points suivants: élaborer un plan d’action régional tripartite en vue de renforcer les actions déjà entreprises mais qui sont insuffisantes du point de vue de la prévention, de la répression et de la protection des victimes du travail forcé et de servitude pour dettes; accroître les moyens de l’inspection du travail, particulièrement en relation avec le travail dans les exploitations agricoles; permettre que les autorités compétentes disposent des ressources matérielles et humaines suffisantes pour recevoir les plaintes des travailleurs et les dénonciations relatives au travail forcé; garantir, en relation avec l’application de la convention nº 169, des consultations des peuples indigènes sur les mesures administratives et législatives qui les affectent, en particulier à propos des questions territoriales et de sécurité sociale. Les membres travailleurs ont fait part de leur accord avec les membres employeurs pour inviter le gouvernement à préparer un rapport sur l’application de la convention et à le communiquer le plus vite possible.

Conclusions

La commission a pris note de la déclaration de la représentante gouvernementale ainsi que de la discussion qui a suivi. La commission a rappelé qu’elle avait discuté ce cas en 2008 et, en particulier, la situation des travailleurs indigènes du Chaco paraguayen qui sont piégés dans des situations de servitude pour dettes. La commission a noté que les questions en suspens portent sur la nécessité de prendre des mesures pour renforcer l’action des différentes entités engagées dans la lutte contre la servitude pour dettes dans la région du Chaco.

La commission a pris note des informations complètes fournies par la représentante gouvernementale qui décrivent les nombreuses mesures prises pour combattre la servitude pour dettes dans la région du Chaco, notamment la formulation d’une stratégie nationale de prévention du travail forcé et le développement d’activités de sensibilisation et de formation. Concernant la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouvent les travailleurs indigènes, la commission a pris note des informations fournies par la représentante gouvernementale au sujet des mesures prises pour lutter contre la pauvreté, y compris les cours de perfectionnement et de formation professionnels et le programme d’inscription au registre civil. Enfin, la commission a noté que le gouvernement s’emploierait à trouver une solution effective pour que les terres ancestrales soient restituées aux communautés indigènes.

La commission a également noté les sérieuses préoccupations exprimées par plusieurs orateurs au sujet de l’exploitation économique à laquelle continuent d’être soumis les travailleurs indigènes dans certains secteurs et, en particulier, dans l’agriculture. Par conséquent, la commission a exprimé le ferme espoir que le gouvernement prendra des mesures immédiates et efficaces dans le cadre d’une action coordonnée et systématique pour protéger les communautés indigènes du Chaco de l’imposition de travail forcé. La commission a souligné l’importance d’adopter un plan d’action régional tripartite qui définisse des priorités et des objectifs précis en ce qui concerne les mesures de prévention et de protection des victimes et qui identifie les entités responsables de la mise en œuvre de ces mesures.

Tout en estimant que les mesures adoptées pour lutter contre la pauvreté sont importantes, la commission a exprimé l’espoir que le gouvernement tiendra compte du fait que les programmes mis en œuvre doivent se fixer pour objectif de garantir l’indépendance économique des victimes de la servitude pour dettes et prévoir des mesures d’assistance et de réinsertion. La commission a prié le gouvernement de prendre des mesures pour améliorer la situation économique des catégories les plus vulnérables de la population, de manière à ce qu’elles puissent sortir du cercle vicieux de la dépendance.

En ce qui concerne la question des poursuites judiciaires engagées à l’encontre des personnes qui imposent du travail forcé, la commission a exprimé sa profonde préoccupation face au manque d’information au sujet des affaires soumises à la justice. La commission a instamment prié le gouvernement de prendre les mesures appropriées pour s’assurer que, dans la pratique, les victimes sont en mesure de recourir aux autorités judiciaires compétentes. A cet égard, la commission a rappelé qu’il est essentiel que la législation nationale contienne des dispositions suffisamment précises pour permettre aux autorités compétentes de poursuivre pénalement et punir les auteurs de ces pratiques. La commission a également exhorté le gouvernement à prendre des mesures pour renforcer la capacité des autorités publiques compétentes, en particulier l’inspection du travail, de manière à leur permettre de donner efficacement suite aux plaintes reçues, d’identifier les victimes et les réinstaurer dans leurs droits afin que ces dernières ne se retrouvent plus prises au piège de situations de travail forcé. A cet égard, la commission a souligné que, compte tenu des particularités géographiques de la région du Chaco, il est important de s’assurer que l’inspection du travail dispose des ressources adéquates pour atteindre les travailleurs dans les zones isolées.

En ce qui concerne la nécessité de mettre la loi pénitentiaire (loi no 210 de 1970) en conformité avec la convention, en garantissant que les prisonniers en attente de jugement et les personnes détenues sans avoir été jugées ne soient pas soumis à l’obligation de travailler en prison, la commission a exprimé le ferme espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires afin de s’assurer que, dans le cadre de l’adoption du nouveau code de procédure pénale, la législation nationale sera mise en conformité avec la convention.

Notant que le gouvernement a réaffirmé son engagement à mettre un terme à la servitude pour dettes dans les communautés indigènes du Chaco paraguayen ainsi que dans d’autres régions du pays susceptibles d’être touchées, la commission a exprimé l’espoir que la commission d’experts serait en mesure de constater les progrès tangibles accomplis lors de sa prochaine session en 2013. Elle a également demandé au Bureau de fournir une assistance technique renforcée et étendue qui inclut toutes les parties concernées, y compris les peuples indigènes.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 2008, Publication : 97ème session CIT (2008)

Un représentant gouvernemental a déclaré que son gouvernement accorde une importance capitale aux conventions de l’OIT et qu’il prend donc très au sérieux cette question qu’il aborde sur le mode tripartite dans le cadre d’activités conjointes intéressantes. A ce propos, grâce à l’assistance technique du BIT et à l’aide apportée par le programme de promotion de la Déclaration a été organisé en septembre 2007 un séminaire tripartite sur le thème «Droits fondamentaux du travail et travail forcé» pendant lequel il a été décidé de constituer une commission chargée d’étudier ce thème sous l’intitulé «Commission sur les droits fondamentaux au travail et sur la prévention du travail forcé» et d’inviter chaque institution et association professionnelle à désigner ses représentants par courrier officiel accompagné de la liste des personnes qui assisteront à sa réunion. Il a aussi été convenu que le nombre des représentants serait de six titulaires et leurs suppléants respectifs pour chaque secteur (employeurs, syndicats, gouvernement), compte non tenu des experts appelés à assister la commission, et que, une fois ces nominations reçues, la constitution formelle de la commission sera demandée par voie de décret du pouvoir exécutif, afin de lui donner force légale et d’éradiquer le travail forcé. Enfin, il a été convenu qu’une fois constituée la commission disposerait d’un délai de soixante jours à partir de sa mise en place pour élaborer un plan d’action sur son thème. Des informations seront fournies à ce sujet en septembre de cette année.

En octobre 2007, des courriers ont été envoyés à toutes les institutions publiques et aux principales associations d’employeurs et centrales syndicales pour les inviter à désigner leurs représentants respectifs, et des nominations ont été reçues de plusieurs institutions publiques et associations professionnelles. Toutefois, à ce jour, plusieurs d’entre elles n’ont toujours pas réagi. Le gouvernement voudrait que cette commission tripartite soit installée à bref délai afin de pouvoir progresser dans les autres conclusions du séminaire et il s’engage, à cet effet, à envoyer des rappels concernant la création de la commission.

Le Paraguay a ratifié la convention no 29 le 28 août 1967 et a progressivement adapté sa législation et sa pratique nationales pour s’y conformer, comme le constatent les rapports de la commission d’experts. De plus, au mois d’avril 2008 a eu lieu une journée de formation avec des représentants du ministère public (magistrats ayant dans leurs attributions l’enfance et l’adolescence, le travail et les questions pénales) à l’issue de laquelle a été formulée une proposition consistant à organiser d’autres formations et séminaires, ainsi qu’à mettre sur pied des activités conjointes et coordonnées entre le ministère de la Justice et du Travail et les services du Procureur général de la République pour lesquelles a été demandée l’aide du BIT. Le représentant gouvernemental a ajouté qu’il s’était récemment rendu dans la région du Chaco afin de vérifier personnellement ce qu’il advenait du bureau régional. Par la même occasion, contact a été pris avec les plus hautes autorités municipales possibles, avec lesquelles il a été convenu de désigner des personnalités locales en tant qu’agents de la Direction du travail du lieu et les fonctionnaires placés sous leur autorité, ceci afin d’éviter les déracinements. Le gouvernement a promis de nommer les personnes émargeant au budget du ministère de la Justice et du Travail et de collaborer à leur formation. A cette fin a été sollicitée l’assistance technique du BIT afin de pouvoir former comme il se doit les personnes qui assureront le fonctionnement du bureau régional. De plus, le représentant gouvernemental s’est référé aux caractéristiques de la population indigène et aux répercussions du travail forcé sur cette partie de la population.

En conclusion, il s’avère que le Paraguay consent des efforts pour remédier à la situation actuelle. S’il y a bien un problème, le gouvernement souhaite promouvoir des initiatives tripartites afin d’apporter remède aux problèmes qui se posent actuellement et, pour ce faire, pouvoir compter sur la collaboration des employeurs et des travailleurs, de même que sur la coopération technique internationale.

Les membres employeurs ont remercié le gouvernement pour sa déclaration. De manière générale, le cas a été examiné de manière trop légère par le gouvernement et la commission d’experts. Il est question de servitude pour dettes causée par la pauvreté qui, ainsi que l’a indiqué le gouvernement, touche davantage de personnes que les seuls peuples indigènes. Si l’on se réfère à la discussion sur l’application de la convention (no 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989, on pourrait croire que le problème ne touche qu’un faible pourcentage de la population. Cependant, il faut rappeler que l’économie informelle représente environ 60 pour cent de l’ensemble de l’économie. Les problèmes identifiés par la commission d’experts comme le versement de salaires inférieurs au minimum légal, la vente à prix excessifs des produits alimentaires disponibles, le versement partiel ou intégral des salaires en nature ne sont pas uniquement des problèmes touchant la population indigène du Chaco mais sont plus répandus. Le représentant gouvernemental s’est référé à la réunion impliquant les Nations Unies et le Programme d’action spécial de l’OIT pour combattre le travail forcé ainsi que des activités de formation et des consultations tripartites. Toutefois, il faut agir avec plus d’insistance. S’agissant de l’assistance technique du BIT mentionnée par le gouvernement, il reste beaucoup à faire. Une mission urgente de l’OIT devrait être menée de manière à identifier une stratégie d’ensemble. Les membres employeurs ont salué l’engagement du gouvernement à encourager une implication tripartite des mesures à prendre. Cependant, il existe un problème politique puisqu’un nouveau gouvernement devrait entrer en fonctions en août prochain. Des mesures doivent être prises rapidement pour assurer que le nouveau gouvernement traite ce problème de façon prioritaire. Plutôt que de simples tactiques, il est maintenant nécessaire d’élaborer une stratégie d’ensemble pleinement soutenue par le nouveau gouvernement et les partenaires sociaux.

Les membres travailleurs ont indiqué que la commission examine le cas du Paraguay sous l’angle de la convention no 29. Cependant, elle aurait pu aussi les examiner sous l’angle de la convention no 87, la convention no 111, la convention no 169 ou la convention no 182.

La situation des paysans du pays est très grave. D’une part, des paysans sont forcés de quitter leurs terres qui sont réquisitionnées par les grands propriétaires ou multinationales, par exemple pour la culture intensive du soja. De ce fait, les paysans se retrouvent au chômage et, par conséquent, vivent dans la misère ou sont confrontés à des problèmes de délinquance, de violence ou de non-scolarisation. D’autre part, des paysans sont également maintenus dans des situations de servitude par et pour dettes, lesquelles sont fort fréquentes dans les communautés indigènes des grandes fermes du Chaco.

Depuis 1997, la commission d’experts formule des commentaires sur ces situations de servitude pour dettes dans le pays, situations qui ont été abondamment documentées, notamment par un rapport du BIT de 2005, réalisé dans le cadre de la coopération technique, et des rapports de l’ONG «Anti Slavery International» de 2006.

La servitude pour dettes se manifeste sous plusieurs formes au Paraguay. Les paysans perçoivent un salaire inférieur au minimum légal, c’est-à-dire un salaire symbolique. Parfois, ils ne perçoivent aucun salaire. Les femmes, quant à elles, perçoivent encore moins que les hommes. De plus, il est courant que le salaire soit versé après trois ou quatre mois de travail. Ainsi, les paysans se retrouvent dans l’obligation de s’approvisionner dans les magasins de la plantation pour laquelle ils travaillent, où les prix sont excessifs. Il est également courant que le salaire soit versé en nature ou avec d’autres produits de base, tels qu’avec du savon ou des cierges. Ces produits sont très chers et de pauvre qualité. Cette combinaison du salaire trop bas, du prix trop élevé et du paiement des travailleurs en nature conduit à l’endettement des travailleurs, ce qui les oblige à rester travailler dans les plantations, tout comme leur famille, dont leurs enfants qui ne reçoivent aucune éducation. Les longues heures de travail, le peu de jours de congés, les restrictions imposées pour quitter les plantations et l’analphabétisme fort élevé réduisent grandement les alternatives des travailleurs.

Selon le rapport du BIT de 2005, le nombre de personnes en situations de servitude pour dettes est estimé à 8 000. Le gouvernement est responsable de ces situations. Le Code du travail dispose que sont nuls les accords qui fixent un salaire inférieur au minimum légal et qui entraînent l’obligation directe ou indirecte d’acquérir des biens de consommation dans les magasins, commerces ou lieux déterminés par l’employeur. Le code prévoit également que le paiement peut se faire en nature à hauteur de 30 pour cent du salaire, et les prix des articles vendus doivent correspondre à ceux pratiqués dans le village le plus près de l’établissement.

En mars 2005, le ministère de la Justice et du Travail a organisé trois séminaires séparément avec les employeurs, les syndicats et l’inspection du travail. Suite à ces séminaires, le gouvernement s’est engagé à publier le rapport du BIT en langue guarani et à installer un bureau de l’inspection du travail dans la région du Chaco. Cependant, la traduction du rapport n’a pas encore été faite et, six mois après leur nomination, deux inspecteurs du travail ont démissionné en raison du manque d’aide de la part de la capitale.

En septembre 2007, suite à un séminaire tripartite, une commission tripartite sur les principes fondamentaux au travail et sur la prévention du travail forcé devait être créée. Une fois établie, cette commission devait disposer de 60 jours pour développer un plan d’action. Toutefois, cette commission n’a jamais été créée, pas plus que la commission interinstitutionnelle et multisectorielle chargée d’assurer le suivi de la question. Ces derniers temps, la situation a empiré. Le 24 mai dernier, M. Eloy Villalba, dirigeant du mouvement syndical paysan, a été tué chez lui, devant ses enfants, pour avoir osé promouvoir la réforme agraire et dénoncer la corruption de certains hommes politiques. Cette violence contre les syndicalistes en dit long sur la situation au Paraguay.

Un membre travailleur du Paraguay a remercié la commission pour l’examen de ce cas qui revêt une grande importance pour tout le mouvement syndical de son pays. Il faut éliminer le fléau du travail forcé non seulement dans son pays, mais aussi dans le reste du monde. Au Paraguay, de nombreuses communautés indigènes vivent dans les campagnes sans être propriétaires de leurs terres et sont contraintes de survivre sur de petits lopins arides le long de routes et de chemins. Beaucoup de membres de ces communautés sont dépourvus du minimum vital. Lorsqu’ils travaillent dans les exploitations agricoles voisines, ils sont exploités, souvent sans percevoir de salaire, et soumis à un traitement inhumain. Ceux qui quittent la campagne pour les villes sont obligés de recourir à la mendicité et à la prostitution. Le travail forcé est bel et bien une réalité dans son pays et ses principales victimes sont les indigènes et les enfants qui, dans diverses régions du pays, sont employés à la fabrication de briques, de tuiles et d’autres produits. Il s’agit là de violations flagrantes, non seulement de la convention no 29, mais aussi en particulier des conventions nos 138 et 182 ainsi que du Code du travail. Il faut espérer que les choses pourront évoluer grâce à l’assistance technique du BIT et l’action conjointe des autorités gouvernementales, des parlementaires et d’une justice qui doit regagner sa crédibilité en appliquant les lois comme il se doit, sans privilégier les intérêts des puissants.

Il est fondamental d’obtenir un renforcement de l’assistance technique du BIT. L’orateur a proposé la création d’une commission tripartite stable, composée de représentants du gouvernement, des employeurs et des travailleurs, qui se donne un programme de travail réaliste comportant, entre autres, une campagne de communication et de sensibilisation sur les conventions fondamentales de l’OIT.

Un autre membre travailleur du Paraguay a déclaré, se référant à l’application de la convention no 29 au Paraguay, que les violations dont sont victimes les communautés aborigènes et indigènes, les paysans et les travailleurs du secteur des transports, du commerce et autres sont également liées aux violations des conventions fondamentales nos 182, 138, 87 et 98. Ceci dans la mesure où les enfants des travailleurs aborigènes et des paysans sont obligés de travailler dès leur plus jeune âge, comme par exemple dans les fours à chaux et les entreprises artisanales de briques du Chaco sans qu’il leur soit permis de s’organiser, ce qui constitue une violation des dispositions de la convention no 98. Ils ne bénéficient pas non plus de conventions collectives du travail; ils subissent des violences et, comme dit la chanson «Vale moroti», ce qui signifie «chèque en blanc», ils ne perçoivent jamais de salaires et restent toujours redevables pour la nourriture. L’écrivain Roa Bastos a décrit ce qui se passe depuis le siècle dernier en relatant la vie des travailleurs dénommés «mensu» qui, trompés, sont embauchés pour travailler dans les prairies du Alto Paraná pour ne jamais revenir, ceux qui peuvent s’échapper vivants sont très chanceux.

Les indigènes sont forcés à abandonner leur habitat naturel, comme les paysans leurs terres, menacés par des pseudo-investisseurs qui envahissent les terres pour cultiver le soja culture qui rapporte énormément d’argent, mais dont les grands bénéfices ne restent pas dans le pays pour son développement. Ils utilisent indistinctement des pesticides agricoles, endommageant l’environnement et, pire encore, portant préjudice à la vie des travailleurs paysans et indigènes. Nombre d’entre eux ont perdu la vie et d’autres connaissent de graves problèmes de santé irréversibles. Ces pesticides agricoles sont distribués par l’entreprise multinationale Monsanto, sans aucun contrôle. L’entreprise Sexta Mon a acheté des milliers d’hectares de terre dans la localité de Puerto Casado Chaco, population comprise, celle-ci subissant toute sorte de mauvais traitements avec la complicité des autorités actuelles. Les familles indigènes et paysannes qui abandonnent leurs terres arrivent perdues dans les grandes villes; elles subissent la violence et finissent dans l’alcoolisme, les drogues et la prostitution, et sont abandonnées par l’Etat.

Au Paraguay, pays de 406 752 km², il est impossible de comprendre ou d’expliquer que plus de 300 000 familles paysannes et indigènes ne peuvent accéder à une parcelle de terre où vivre et travailler en paix. A l’heure actuelle, plus de 2 000 travailleurs sont poursuivis en justice en raison de leur lutte pour une réforme agraire globale et plus de 100 personnes sont décédées au cours de la période de transition qui dure depuis déjà dix-neuf ans, suite à la chute de la dictature sanguinaire du général Alfredo Stroessner. M. Eloy Villalba de l’Organisation nationale paysanne (ONAC), filiale de la CNT, qui accompagnait la lutte des paysans et aborigènes dans leurs terres d’établissement, a été assassiné à son domicile, en présence de sa famille, le 24 mai dernier.

Le peuple paraguayen a dit stop à la corruption, à l’impunité et à la violation des droits de l’homme à l’occasion des élections du 20 avril en élisant M. Fernando Lugo comme Président de la nation, lequel entrera en fonctions le 15 août prochain. Le 1er mai dernier, après avoir écouté les réclamations des travailleurs, il a annoncé que la priorité de son gouvernement serait la réforme agraire globale, l’éducation, la santé et la réactivation de la production pour mettre fin aux exclusions, à la pauvreté extrême et à la migration forcée. M. Lugo a également déclaré que le pays possède des ressources naturelles et sera ouvert à la communauté internationale pour des investissements sains et transparents et pour construire un nouveau Paraguay pour tous.

Au nom de la Coordination des syndicats du Paraguay, les organisations membres du Conseil des travailleurs du Cono Sur et la Coordination des syndicats du Cono Sur avec la Confédération syndicale des travailleurs des Amériques (CSA) et la Confédération syndicale internationale, l’orateur a réaffirmé l’engagement de son pays à lutter pour construire un monde meilleur, en paix et dans le respect de la justice sociale. Pour conclure, il a demandé la coopération effective du BIT, son accompagnement et son appui technique dans la nouvelle étape qui débutera pour son pays le 15 août prochain.

Le membre travailleur du Brésil, s’exprimant au nom des travailleurs du MERCOSUR, a déclaré qu’au cours des dix-huit dernières années la commission d’experts a émis 12 commentaires à propos du travail forcé au Paraguay, en particulier sur les populations indigènes de la région du Chaco. On ne peut que déplorer l’absence de progrès. En effet, le travail forcé se propage dans tout le pays et s’étend à d’autres secteurs de l’économie. La forme de travail forcé la plus répandue dans ce pays est la servitude pour dettes.

Le BIT fournit déjà une assistance technique au Paraguay, mais il faudrait aussi sensibiliser la population, et surtout les employeurs, à ce problème. A titre d’exemple, il faut mentionner les propos tenus sur les ondes par le directeur de l’association rurale du Paraguay, qui a déclaré que, si on donne de l’argent aux indigènes, la première chose qu’ils font est de se saouler et que la première femme de mœurs faciles venue va leur soutirer jusqu’à leur dernier sou, ce qui explique la coutume consistant à les payer en denrées alimentaires et en vêtements. Ces propos sont racistes, machistes et préhistoriques. C’est pourquoi il faut insister sur le fait que, pour lutter contre le travail forcé, il est essentiel d’en reconnaître l’existence, mais il faut aussi la volonté du gouvernement et de la société civile, en particulier des employeurs. Il est fondamental que le BIT poursuive et renouvelle son assistance technique.

Le Président élu semble davantage déterminé à lutter contre le travail forcé. Dans ces circonstances, il faudra donner suite aux recommandations de la commission d’experts par le biais du dialogue social et d’accords avec les partenaires sociaux. Si elle en avait la possibilité, la société civile pourrait appuyer cette lutte contre le travail forcé. Mais les résultats de ces activités sont tributaires de l’intervention de l’Etat, parce que c’est lui qui doit rechercher, juger et punir ceux qui recourent au travail forcé et, pour cela, il est impératif de prévoir les ressources budgétaires qui permettront de combattre le travail forcé en dotant les ministères concernés de moyens humains, matériels et techniques. En conclusion, il faut souligner la nécessité de mettre en place des politiques sociales qui mettent l’accent sur l’alphabétisation et la création d’emplois, puisque la cause profonde du travail servile est l’immense pauvreté dont souffre une grande partie de la population du Paraguay.

Le représentant gouvernemental du Paraguay a indiqué avoir pris note de toutes les interventions - certaines très critiques - et a signalé qu’elles seront prises en compte pour poursuivre le travail en vue de l’éradication du travail forcé. Il y a un consensus pour poursuivre le travail de concert avec les partenaires sociaux, afin d’aider le nouveau gouvernement à faire face aux problèmes existants. Enfin, il a assuré qu’il transmettrait aux autorités les observations et préoccupations exprimées lors du débat, et exprimé l’espoir que son pays continuera de bénéficier de l’appui du BIT.

Les membres employeurs ont remercié le représentant gouvernemental mais ont souligné que son intervention donnait l’impression que le problème était très lointain. Même l’observation de la commission d’experts semble adopter une vue trop étroite du problème. L’intervention du membre travailleur du Paraguay a donné des indices sur l’ampleur du problème qui affecte l’économie dans son ensemble. Il est essentiel que le rapport soumis à la commission d’experts par le gouvernement contienne des réponses aux questions posées dans son observation au sujet des exactions de travail forcé et de l’article 39 de la loi no 210 de 1970 selon lequel les détenus ont l’obligation de travailler. Il est à noter que le gouvernement est disposé à bénéficier de l’assistance technique du BIT. Cependant, compte tenu de l’entrée prochaine en fonctions du nouveau gouvernement, les conclusions de la Commission de la Conférence devraient accorder au Bureau une marge de manœuvre suffisante pour qu’il accorde l’assistance technique au moment où cela sera le plus efficace.

Les membres travailleurs ont rappelé la part de responsabilité du gouvernement dans la persistance, dans le pays, des situations de servitude pour dettes. Il faut toutefois prendre en considération qu’une importante transition politique est en cours. En effet, un gouvernement démocratique et progressiste a été élu et le nouveau Président, M. Fernando Lugo, entrera en fonctions le 15 août prochain. Dès lors, ce nouveau gouvernement devra assumer le passé et s’engager à: adopter des politiques publiques visant à supprimer les illégalités existantes; établir des mécanismes de contrôle de l’application de la législation nationale; établir un partenariat efficace et utile avec les partenaires sociaux; adopter une réforme agraire; créer un ministère du Travail et de la Sécurité sociale - et non pas un ministère de la Justice et du Travail; et, enfin, accepter l’assistance technique du BIT.

Conclusions

La commission a pris note des informations communiquées oralement par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.

La commission a noté que, dans son observation, la commission d’experts fait état de pratiques de servitude pour dettes dans les communautés indigènes du Chaco et dans d’autres régions du pays, pratiques qui constituent une grave violation de la convention.

S’agissant de la mise en place du bureau de l’inspection et de la Commission nationale tripartite sur les principes fondamentaux au travail et sur la prévention du travail forcé, la commission a observé que ces instances ne fonctionnent pas et qu’aucun progrès n’a été enregistré quant à leur action.

La commission a noté que le représentant gouvernemental a déclaré qu’une action conjointe des travailleurs, des employeurs et du gouvernement est indispensable pour trouver une solution au problème, et qu’un nouveau gouvernement entrera en fonction au mois d’août prochain. La commission a noté en outre qu’en ce qui concerne la Commission nationale tripartite sur les principes fondamentaux au travail et sur la prévention du travail forcé cette instance sera constituée à brève échéance et qu’en ce qui concerne le fonctionnement de l’office régional le gouvernement sollicite la coopération de l’OIT pour la formation des personnes qui en seront responsables, et que cet office relèvera du ministère de la Justice et du Travail. La commission se réjouit de ce que le gouvernement a décidé d’inclure la question du travail forcé dans les communautés indigènes parmi ses priorités.

La commission a pris note avec préoccupation des conditions de travail forcé auxquelles ces communautés sont soumises, ainsi que du non-respect à leur égard des dispositions de la législation nationale qui régissent le niveau de rémunération et les modalités de son paiement, dispositions dont le respect aurait prévenu les pratiques de travail forcé en cause. La commission a également noté l’existence dans l’ensemble du secteur particulièrement étendu de l’économie informelle de conditions déterminant l’apparition du travail forcé.

La commission a également pris note des conséquences que peut avoir pour ces travailleurs leur situation de paysans sans terre, de même que de la situation de vulnérabilité dans laquelle ils se trouvent lorsqu’ils subissent un déplacement vers les villes, où ils se trouvent alors réduits à la mendicité et parfois à la prostitution, de tels déplacements étant la conséquence de la culture intensive du soja, pratiquée sur des terres sur lesquelles ces communautés indigènes sont établies.

La commission a noté avec préoccupation que cette situation concerne également les enfants, embauchés eux aussi dans des activités dangereuses comme la production de briques, la production de chaux et la maçonnerie, et dans d’autres activités relevant du secteur de l’économie informelle. La commission a également pris note de la violence exercée contre l’Organisation nationale paysanne (ONAC).

La commission a exprimé le ferme espoir que les mesures qui s’imposent seront prises d’urgence pour mettre un terme à la servitude pour dettes dans les communautés indigènes du Chaco paraguayen et dans les autres régions du pays où ce système aurait encore cours, de sorte que la convention soit respectée. Enfin, elle a noté que le gouvernement souhaite bénéficier de l’assistance technique du Bureau.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. Traite des personnes. 1- Cadre institutionnel de prévention et de répression de la traite des personnes. Dans ses commentaires précédents, la commission a noté les mesures prises pour consolider le cadre institutionnel de lutte contre la traite des personnes et a notamment souligné les actions adoptées par la Table interinstitutionnelle pour la prévention et la lutte contre la traite des personnes, la Direction générale de lutte contre la traite des femmes, créée au sein du ministère de la Femme, et l’Unité spécialisée contre la traite des personnes et l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents (UFETESI). Elle a prié le gouvernement de continuer à renforcer les moyens et les capacités des autorités compétentes afin de pouvoir identifier les cas de traite des personnes à des fins d’exploitation au travail ou d’exploitation sexuelle, et de fournir des informations sur l’adoption du Plan national pour la prévention et le combat de la traite des personnes.
Dans son rapport, le gouvernement indique que la Table interinstitutionnelle pour la prévention et la lutte contre la traite des personnes dans la République du Paraguay a procédé à l’approbation technique du Plan national pour la prévention et le combat de la traite des personnes. La commission observe que, d’après les informations disponibles sur le site officiel du ministère des Relations extérieures, un atelier de validation du plan, réunissant une majorité des membres de la Table interinstitutionnelle, a eu lieu en août 2020 et a unanimement adopté le texte présenté.
La commission prend également note des informations détaillées sur les interventions de l’Unité chargée de la traite des personnes et de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents du ministère public destinées à former les autorités compétentes (procureurs, juges, policiers, inspecteurs du travail, fonctionnaires des services de migration) et à porter secours aux victimes de la traite des personnes. De plus, la commission note que le ministère public dispose d’un système de recueil des plaintes et d’un Manuel de procédures opérationnelles qui aborde des thèmes tels que la reconnaissance des victimes, l’aide aux victimes, l’enregistrement des cas et l’évaluation des risques. En 2018, 110 plaintes pour traite des personnes, 201 plaintes pour pornographie et 51 plaintes pour proxénétisme ont été enregistrées, et 15 condamnations ont été prononcées. De janvier à juin 2019, l’Unité a reçu 68 plaintes pour traite des personnes, 9 plaintes pour pornographie et 63 plaintes pour proxénétisme.
La commission exprime l’espoir que le Plan national pour la prévention et le combat de la traite des personnes sera adopté dans les plus brefs délais et prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures que les entités compétentes ont adoptées en vue de sa mise en œuvre effective. À cet égard, la commission prie le gouvernement d’indiquer si l’autorité chargée de coordonner l’application du plan évalue régulièrement les progrès accomplis et les difficultés rencontrées. Elle le prie également de continuer de fournir des informations sur les activités de sensibilisation menées et les formations prodiguées, ainsi que sur les dénonciations de cas de traite des personnes, les poursuites judiciaires en cours et les sanctions imposées.
2- Protection des victimes. La commission prend note des informations relatives à la prise en charge des victimes de traite des personnes par l’UFETESI ainsi que par le ministère de la Femme qui apporte une assistance complète (protection, soutien psychologique, assistance sociale et juridique) et un soutien continu aux victimes par l’intermédiaire de son centre de référence et de son centre d’accueil transitoire. Elle note qu’en 2018, le Service technique de soutien de l’UFETESI a fourni une assistance à 110 victimes, dont 95 femmes et 15 hommes. Depuis 2017, l’UFETESI, grâce au Fonds pour la prise en charge immédiate des victimes de la traite des personnes, applique le Plan de prise en charge immédiate des victimes et leur fournit des denrées alimentaires et prévoit le paiement d’analyses médicales ou d’études, le versement d’indemnités (pour les victimes étrangères), le paiement d’un logement dans un hôtel (comme mesure de sécurité et lorsque les victimes sont des hommes), un soutien à des microentreprises, etc. À des fins de réinsertion sociale et professionnelle des victimes de la traite, le gouvernement a appuyé la création de microentreprises pour les victimes prises en charge par le ministère de la Femme. Ainsi, depuis 2016, le ministère du Développement social intègre à ses programmes sociaux des femmes victimes de la traite dans le cadre d’une assistance directe, en tant que soutien à la réinsertion familiale, sociale et communautaire. Le gouvernement fait également référence au Guide des services pour les victimes de la traite des personnes qui constitue un outil destiné au personnel judiciaire et comprend un inventaire des services demandés par les victimes et une analyse des services disponibles dans le pays, par départements.
La commission note que, dans ses observations, la Centrale unitaire des travailleurs Authentique (CUT-A) indique que les dispositifs de prise en charge des victimes de la traite sont exclusivement destinés aux femmes et aux filles, et négligent le fait que les victimes peuvent être des hommes, des personnes indigènes des deux sexes, des transgenres, etc.
La commission prend note des actions menées par les différentes entités gouvernementales pour prendre en charge les victimes de la traite des personnes et encourage le gouvernement à poursuivre ses efforts à cet égard en adoptant des mesures spécifiques pour soutenir les hommes et les personnes LGBTI victimes de la traite des personnes à des fins d’exploitation au travail ou d’exploitation sexuelle. La commission prie le gouvernement de fournir des informations à ce sujet et d’indiquer de quelle façon les entités coordonnent leurs efforts entre elles. La commission prie en outre le gouvernement de transmettre une copie du Guide des services pour les victimes de la traite des personnes destiné au personnel judiciaire.
Article 2, paragraphe 2 c). Travail pénitentiaire. La commission a noté que les personnes condamnées à une peine de prison doivent accomplir le travail qui leur était assigné. Conformément aux articles 138 et 139 du Code d’exécution des peines, sans préjudice de cette obligation, le détenu n’est pas forcé de travailler, mais le refus injustifié de travailler est considéré comme une infraction au règlement et a une incidence négative sur l’évaluation de son comportement. Le travail peut être organisé par l’administration, sous la forme d’une entité décentralisée, par l’intermédiaire d’une entreprise mixte ou privée, être exécuté pour le compte propre du détenu ou dans le cadre d’un système de coopérative. Quand le travail est organisé par l’intermédiaire d’une entreprise mixte ou privée, la rémunération du détenu correspond au niveau des salaires versés sur le marché du travail libre. La commission prie à nouveau le gouvernement d’indiquer si, et le cas échéant de quelle manière, les entreprises mixtes ou privées participent à l’organisation du travail des détenus, à l’intérieur ou à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire. Elle le prie également de préciser comment, dans la pratique, est obtenu de la part des prisonniers leur consentement libre et éclairé au travail pour des entreprises privées et mixtes.

Observation (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 106e session, juin 2017)

La commission prend note de la discussion qui a eu lieu en juin 2017 au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail (ci-après, la Commission de la Conférence). La commission prend note du rapport du gouvernement, reçu en 2019, ainsi que des observations de l’Organisation internationale des employeurs (OIE), reçues le 1er septembre 2017; des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 1er septembre 2017 et le 9 septembre 2019; des observations de la Centrale unitaire des travailleurs Authentique (CUT-A), reçues le 2 septembre 2017 et le 30 août 2019; et des observations de la Centrale nationale des travailleurs (CNT), reçues le 26 août 2019.
Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. 1. Cadre institutionnel de lutte contre le travail forcé. Dans ses commentaires précédents, la commission a estimé que l’adoption de la Stratégie nationale de prévention du travail forcé 2016-2020 (décret no 6285 du 15 novembre 2016) constituait un pas important dans la lutte contre le travail forcé. Elle a prié le gouvernement d’adopter les mesures nécessaires pour que cette stratégie soit effectivement mise en œuvre, en particulier dans les régions et les secteurs où des indices de travail forcé ont été identifiés, et pour assurer une plus forte sensibilisation à la question du travail forcé. La commission note que, dans ses conclusions, la Commission de la Conférence a prié le gouvernement de continuer à associer les partenaires sociaux au processus d’adoption de la Stratégie nationale de prévention du travail forcé; et d’élaborer des plans d’action régionaux et de prévoir des actions à mener en priorité pour faire connaître le problème du travail forcé et protéger les victimes identifiées.
La commission prend note que, dans son rapport, le gouvernement indique que le décret no 7865 du 12 octobre 2017 met en place la Commission nationale des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé (CONTRAFOR), qui relève du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale (MTESS) et remplace la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé. Des représentants de 14 ministères, de l’Institut paraguayen de l’indigène (INDI) et du Conseil des peuples indigènes du Chaco, ainsi que des représentants d’organisations d’employeurs et de travailleurs participent aux travaux de cette commission. La principale mission de la CONTRAFOR est de coordonner les politiques publiques de prévention et d’éradication du travail forcé à l’échelle nationale et, plus spécifiquement, de définir les processus de mise en œuvre de la Stratégie nationale de prévention du travail forcé 2016-2020 et de suggérer des ajustements pertinents. La commission salue également l’adoption, par l’intermédiaire de la CONTRAFOR, du Plan de prévention et d’éradication du travail forcé 2017-2019. Celui-ci s’articule autour de trois domaines: i) la réalisation d’une étude diagnostique de la situation du travail forcé; ii) la coordination interinstitutionnelle et tripartite (dont la coordination des actions pour la mise en œuvre de la stratégie et le renforcement de l’inspection du travail pour pouvoir donner effectivement suite aux plaintes et aux dénonciations); et iii) la sensibilisation de la société au problème du travail forcé et les actions pour lui assurer une plus grande visibilité. Le plan prévoit également que la Commission de suivi et d’évaluation, qui inclut des représentants des partenaires sociaux, rédige tous les ans un rapport sur les progrès accomplis et la réalisation des objectifs établis afin d’apporter les ajustements nécessaires et de coordonner la conception du prochain plan d’action.
La commission observe que, dans son rapport de 2018 sur sa mission au Paraguay, la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les formes contemporaines d’esclavage a félicité le gouvernement pour l’évolution positive du développement d’un cadre juridique et institutionnel national de lutte contre les formes modernes d’esclavage et a également estimé que la plus grande prise de conscience de la société des différentes formes d’exploitation était une avancée positive (A/HRC/39/52/Add.1, paragr. 18).
La commission salue les efforts déployés par le gouvernement pour renforcer le cadre institutionnel de lutte contre le travail forcé et l’encourage vivement à continuer de prendre des mesures pour mettre en œuvre intégralement la Stratégie nationale de prévention du travail forcé et le Plan d’action pour la prévention et l’éradication du travail forcé au Paraguay pour la période 2017-2019. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les résultats obtenus, y compris des informations spécifiques sur les rôles des différentes institutions responsables de leur mise en œuvre, les mécanismes de coordination interinstitutionnelle, l’adoption de plans régionaux, les rapports annuels de la Commission de suivi et d’évaluation, et l’étude diagnostique de la situation du travail forcé, en précisant les facteurs qui ont été identifiés comme favorisant l’imposition de travail forcé. La commission le prie également de fournir des informations sur le processus d’élaboration et d’adoption de la deuxième Stratégie nationale de prévention du travail forcé et encourage le gouvernement à promouvoir le dialogue tripartite dans toutes ses actions de lutte contre le travail forcé.
2. Exploitation au travail des travailleurs indigènes du Chaco. Depuis quelques années, la commission prie instamment le gouvernement de prendre des mesures pour mettre fin à l’exploitation économique, et en particulier à la servitude pour dettes, de certains travailleurs indigènes de la région du Chaco. Elle a insisté sur la nécessité de renforcer la présence de l’État dans cette région pour identifier les victimes et mener à bien les enquêtes relatives aux plaintes déposées. À cet égard, la commission a pris note de la mise en place d’un bureau de la Direction du travail dans la localité de Teniente Irala Fernández (Chaco central), du recrutement de 30 inspecteurs du travail au niveau national, de la création de nouveaux tribunaux dans le Chaco (compétents y compris en matière de droit du travail) et de la mise en place de la sous-commission de la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé dans la région du Chaco. La commission note que la Commission de la Conférence a également prié le gouvernement d’allouer suffisamment de ressources matérielles et humaines aux services du ministère du Travail dans la région du Chaco afin qu’ils puissent recevoir les plaintes et les dénonciations de travailleurs pour travail forcé et de prendre des mesures adéquates pour garantir que, dans la pratique, les victimes sont en mesure de s’adresser aux autorités judiciaires compétentes.
Dans son rapport, le gouvernement se réfère à la conclusion, en juillet 2017, d’une convention-cadre de coopération interinstitutionnelle entre le MTESS et les autorités du département de Boquerón pour appuyer les actions du ministère dans la région du Chaco en vue notamment de faciliter l’accès de toute personne appartenant à un peuple indigène aux canaux d’information et aux mécanismes de plainte. C’est ainsi qu’en mars 2018, un bureau de la Direction du travail pour les peuples autochtones a été créé dans la ville de Filadelfia, dans le département de Boquerón (Chaco). Depuis lors, le bureau a été renforcé; il dispose désormais d’un mécanisme de réclamation accessible aux travailleurs, il sensibilise les populations indigènes à leurs droits et les conseille. Le gouvernement indique également que des campagnes de sensibilisation ont été menées en faveur du travail décent dans le Chaco paraguayen (Chaco paraguayo, con trabajo decente) et des ateliers de formation ont été organisés pour la population du Chaco sur ses droits au travail dans différentes langues (espagnol, guaraní, enxet, sanapaná, nivaclé, ayoreo, toba qom, allemand et dialecte mennonite), ainsi que pour le secteur privé et les agents de la fonction publique. Il précise également que depuis 2018, il a entrepris de consolider le Bureau régional du MTESS dans le Chaco et a notamment mené les actions suivantes: l’élaboration d’une liste des institutions publiques des trois districts de Boquerón (Filadelfia, Mariscal Estigarribia et Loma Plata) avec lesquelles le Bureau régional entretient des relations suivies; l’élaboration d’une liste des communautés indigènes dans chaque district; et l’organisation du Bureau pour recevoir et conseiller les travailleurs et les employeurs, et leur offrir un service de médiation. En janvier 2019, 117 personnes en tout avaient été conseillées par le MTESS dans la ville de Filadelfia.
La commission note que, dans ses observations, la CSI indique que le Bureau de Filadelfia ne dispose pas des ressources administratives minimales lui permettant de fonctionner ni de l’autonomie nécessaire pour vérifier sur le terrain d’éventuelles irrégularités. La CSI signale que le gouvernement n’a fourni aucune information aux organisations syndicales relatives aux activités du Bureau et au nombre de plaintes pour travail forcé ou autres formes de violation des droits au travail reçues et traitées. De son côté, la CUT-A indique que le Bureau de Filadelfia ne dispose pas d’un personnel formé pour «monter un dossier» et réunir les éléments de preuve ni pour mener les entretiens avec des victimes potentielles. La CUT-A ajoute qu’elle ne dispose d’aucune information sur les résultats d’éventuelles interventions menées ni par conséquent sur l’imposition de sanctions exemplaires.
La commission note que, dans son rapport, la Rapporteuse spéciale des Nations Unies observe que, selon les informations reçues, les coopératives et les exploitations agricoles (estancias) respectent généralement la législation nationale et le degré de conformité s’est récemment amélioré dans la région du Chaco. Toutefois, elle indique qu’elle demeure préoccupée par les cas de travail forcé et de servitude sur des lieux de travail plus petits et dans des estancias plus isolées et moins accessibles, ainsi que par des pratiques de travail qu’elle considère comme de l’exploitation (paragraphe 50).
La commission encourage le gouvernement à intensifier ses efforts pour faciliter l’accès des travailleurs indigènes aux mécanismes administratifs et judiciaires pour dénoncer des situations de travail forcé en tenant compte de leur situation géographique, linguistique et culturelle, ainsi que de leur niveau d’éducation. À cet égard, la Commission prie le gouvernement de continuer à prendre des mesures pour assurer la présence d’inspecteurs dans les zones les plus reculées du Chaco où sont occupés les travailleurs indigènes en indiquant le nombre actuel d’inspecteurs pour cette région, ainsi que leur répartition géographique, le nombre d’inspections effectuées, de plaintes reçues et de sanctions administratives et pénales imposées, ainsi que la manière dont le ministère du Travail coopère avec le ministère public et la police lors d’enquêtes sur des cas de travail forcé. En outre, la commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures adoptées pour protéger les travailleurs qui ont dénoncé leur situation de victimes de travail forcé, les prendre en charge et leur fournir une assistance. La commission prie également le gouvernement d’indiquer de quelle façon le MTESS collabore avec l’Institut paraguayen de l’indigène (INDI) pour identifier et résoudre les problèmes que rencontrent les peuples indigènes de la région du Chaco et qui les rendent vulnérables à l’imposition de travail forcé.
3. Article 25. Application de sanctions pénales. La commission a précédemment noté qu’aucune procédure judiciaire n’avait été engagée ni aucune sanction imposée aux auteurs de travail forcé (servitude pour dettes ou autres pratiques impliquant du travail forcé). À l’instar de la Commission de la Conférence, la commission a prié le gouvernement de prendre les mesures appropriées pour que la législation nationale incrimine le travail forcé à travers des dispositions suffisamment précises et adaptées aux circonstances nationales pour que les autorités compétentes puissent poursuivre pénalement les auteurs de ces pratiques. Le gouvernement indique qu’il a rédigé un avant-projet de loi qui incrimine le travail forcé et prévoit une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement ou une amende pour «toute personne qui, par la force ou la menace, contraint une autre d’effectuer un travail ou de fournir un service, même moyennant rétribution». Le projet prévoit également une liste de circonstances aggravantes qui sont passibles d’une peine pouvant aller jusqu’à dix ans de prison, dont le fait de soumettre la victime à une situation d’esclavage ou de servitude ou à une situation dégradante qui va à l’encontre de sa condition humaine, ou lorsque la victime est sans défense ou se trouve en situation de vulnérabilité. La commission prend également note de l’adoption du Guide tripartite et interinstitutionnel d’intervention en cas de travail forcé qui contient des indicateurs du travail forcé et propose des méthodes d’intervention en cas de dénonciation de travail forcé, tant du point de vue du droit du travail que de celui du droit pénal. Il y est clairement énoncé que le ministère public doit agir de sa propre initiative lorsqu’aucune plainte n’a été déposée mais que la situation de travail forcé est connue.
La commission note que la sanction prévue en l’absence de circonstances aggravantes, c’est-à-dire une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement ou une amende, ne revêt pas un caractère suffisamment dissuasif. En effet, la commission a déjà indiqué que «lorsque la sanction prévue consiste en une amende ou une peine de prison de très courte durée [...] elle ne saurait constituer une sanction efficace compte tenu de la gravité de l’infraction et du caractère dissuasif que les sanctions doivent revêtir» (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 319). Tout en saluant l’élaboration d’un projet de loi qui incrimine le travail forcé et prévoit les sanctions applicables, la commission veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour revoir ledit projet de loi afin que l’imposition du travail forcé soit passible de sanctions pénales réellement efficaces et revêtant un caractère suffisamment dissuasif. La commission veut également croire que ce projet sera adopté dans les plus brefs délais et prie le gouvernement de communiquer des informations sur les actions de sensibilisation menées et les formations organisées pour promouvoir la connaissance et l’utilisation de ce texte par les autorités compétentes. La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur les poursuites judiciaires engagées contre les personnes qui imposent du travail forcé et leurs résultats.
Article 2, paragraphe 2 c). Travail obligatoire des personnes placées en détention préventive. Depuis de nombreuses années, la commission souligne la nécessité de modifier la loi pénitentiaire (loi no 210 de 1970, art. 10 lu conjointement avec l’art. 39) qui prévoit le travail obligatoire pour les personnes soumises à des mesures de sureté privatives de liberté. La commission a prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour abroger formellement les dispositions de la loi. La commission prend note que le gouvernement indique qu’en 2017, il a présenté une proposition pour abroger formellement l’article 39 de la loi pénitentiaire pour rendre la législation nationale conforme aux dispositions de la convention. La proposition a été transmise à la présidence de la République qui devait ensuite la faire suivre au Congrès national. La présidence a renvoyé la proposition au MTESS accompagnée de l’avis juridique A.J./2017/Nº 1073 du 16 juillet 2018 recommandant l’obtention de l’opinion juridique du ministère de la Justice sur le projet présenté. La commission prie le gouvernement de continuer de prendre les mesures nécessaires pour parvenir rapidement à l’approbation du projet de loi abrogeant l’article 39 de la loi pénitentiaire (loi no 210/70) et de fournir des informations à cet égard.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2016, publiée 106ème session CIT (2017)

Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. Traite des personnes. Cadre législatif et institutionnel. La commission a précédemment noté les mesures prises pour consolider le cadre législatif et institutionnel de lutte contre la traite des personnes, notamment à travers l’adoption de la loi intégrale contre la traite des personnes (loi no 4788/12); la Table interinstitutionnelle pour la prévention et la lutte contre la traite des personnes, entité coordinatrice devant impulser la politique nationale dans ce domaine et sa mise en œuvre; l’action menée par l’Unité spécialisée du ministère public contre la traite des personnes et l’exploitation sexuelle des enfants (UFETESI); et la création d’un Fonds national d’investissement de prévention et d’assistance aux victimes.
La commission note que, dans son rapport, le gouvernement se réfère aux ateliers de validation du Plan national pour la prévention et le combat de la traite qui ont eu lieu avec les différents acteurs qui intègrent la Table interinstitutionnelle. Il indique également que le ministère public a élaboré un manuel de procédures opérationnelles pour les affaires de traite et d’exploitation sexuelle des enfants et a formé les fonctionnaires concernés. En outre, l’UFETESI a mis en place sur son site Internet un système de plainte en ligne sûr garantissant la confidentialité des plaignants, et cette unité organise régulièrement des ateliers de formation et de sensibilisation. La commission note, d’après les statistiques et informations détaillées fournies par le gouvernement sur les procédures judiciaires et les décisions de justice prononcées dans les affaires de traite des personnes, qu’en 2014 l’UFETESI a investigué 66 cas qui ont donné lieu à la condamnation de 13 personnes dans le cadre de 10 procès. En 2015, des investigations ont concerné 68 affaires avec la condamnation de 14 personnes au cours de 9 procès. Le nombre des victimes libérées s’est élevé à 85 en 2014 et 86 en 2015. Depuis 2015, les juges qui prononcent les condamnations des auteurs de ce crime statuent également sur l’indemnisation que les condamnés doivent verser aux victimes, conformément à la loi de 2012.
La commission prend note de ces informations et prie le gouvernement de continuer à développer les activités de formation et à renforcer les moyens et les capacités des autorités compétentes afin qu’elles soient en mesure d’identifier les cas de traite des personnes, que cette traite soit interne ou internationale, à des fins d’exploitation au travail ou d’exploitation sexuelle. La commission espère que le Plan national pour la prévention et le combat de la traite sera adopté et que le gouvernement fournira des informations sur sa mise en œuvre. Prière de continuer à fournir des informations statistiques sur les procédures judiciaires en cours et les sanctions prononcées contre ceux qui se livrent à la traite des personnes.
Mesures de prévention et de protection des victimes. La commission a demandé au gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour mettre en œuvre les programmes de protection et d’assistance aux victimes prévus dans la loi intégrale contre la traite des personnes de 2012. La commission note les informations du gouvernement concernant les activités développées par la Direction générale de lutte contre la traite des femmes, créée au sein du ministère de la Femme, qui a pour fonctions principales d’élaborer des stratégies de prévention, de porter les plaintes devant les juridictions et d’assister les victimes. La protection des victimes s’opère à travers trois structures: un centre de référence qui apporte aux femmes victimes de traite une assistance sociale, psychologique et juridique; un refuge qui accueille temporairement les femmes victimes; et un programme de réinsertion sociale. Cette direction a également lancé une campagne de communication «Les fausses promesses existent, la traite des personnes aussi». La commission note que dans son rapport sur la traite des femmes et adolescentes à des fins d’exploitation sexuelle, publié en 2014, le ministère public souligne que, s’il est possible de détecter des cas de traite des personnes à des fins diverses et à travers différentes modalités, les cas de traite transnationale à des fins d’exploitation sexuelle prédominent largement, le Paraguay étant un pays d’origine pour les victimes. La commission encourage le gouvernement à renforcer les activités de sensibilisation au phénomène de la traite destinée aux victimes potentielles en ciblant les zones dont elles sont originaires et les endroits où agissent les agents qui les recrutent. Prière également de fournir des informations sur les mesures prises pour assister les victimes qui sont de retour sur le territoire national afin de leur permettre de se réinsérer et d’éviter leur revictimisation, ainsi que sur les activités développées par le Fonds national d’investissement de prévention et d’assistance aux victimes.
Article 2, paragraphe 2 c). Travail pénitentiaire. La commission note l’adoption du nouveau Code d’exécution des peines (loi no 5162/14). Elle relève que les personnes condamnées à une peine de prison ont le devoir de réaliser le travail qui leur sera assigné. Sans préjudice de cette obligation, le détenu ne sera pas forcé de travailler, mais le refus injustifié de travailler sera considéré comme une infraction au règlement et aura une incidence négative sur l’évaluation de son comportement (art. 138-139). Le travail sera rémunéré, et l’organisation du travail pénitentiaire répond aux normes établies par la législation du travail en vigueur. Il peut être organisé par l’administration, à travers une entité décentralisée, une entreprise mixte ou privée, être exécuté pour le compte propre du détenu ou à travers un système de coopérative. Quand le travail est organisé par une entreprise mixte ou privée, la rémunération du détenu correspond au niveau des salaires versés sur le marché du travail libre. La commission prie le gouvernement d’indiquer si, et le cas échéant de quelle manière, les entreprises mixtes ou privées sont associées à l’organisation du travail des détenus, à l’intérieur ou à l’extérieur de la prison. Prière de préciser comment dans la pratique le consentement libre et éclairé des prisonniers au travail pour les entreprises privées et mixtes est formellement obtenu.

Observation (CEACR) - adoptée 2016, publiée 106ème session CIT (2017)

La commission prend note du rapport du gouvernement ainsi que des observations de la Centrale unitaire des travailleurs-Authentique (CUT-A) et de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues respectivement les 1er juillet et 31 août 2016.
Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. Travail forcé des travailleurs indigènes. La commission a précédemment fermement encouragé le gouvernement à continuer de prendre les mesures nécessaires, dans le cadre d’une action coordonnée et systématique, pour répondre à l’exploitation économique et en particulier la servitude pour dettes à laquelle continuent d’être soumis certains travailleurs indigènes, notamment dans la région du Chaco. La commission a noté l’adoption de plusieurs mesures qui témoignaient de l’engagement du gouvernement à traiter ce problème. Elle a noté en particulier l’action menée par la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé et la création d’une sous-commission dans la région du Chaco; l’établissement d’un bureau de la Direction du travail dans la localité de Teniente Irala Fernandez (Chaco central); les activités menées en collaboration avec le Bureau international du Travail en vue de l’élaboration de la stratégie nationale de prévention du travail forcé; et la création au sein de l’inspection du travail d’une unité technique de prévention et d’éradication du travail forcé. La commission a demandé au gouvernement de s’assurer que ces différentes structures sont dotées des moyens adéquats pour mener des contrôles appropriés dans les régions concernées, identifier les victimes et enquêter sur les plaintes reçues, et de s’assurer que la stratégie nationale de prévention du travail forcé est adoptée.
La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique que la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé s’est réunie en juillet et décembre 2015 en vue de l’élaboration d’un projet de stratégie nationale de prévention du travail forcé. Pour alimenter ce processus, le ministère du Travail a mené plusieurs ateliers, certains tripartites et d’autres destinés spécifiquement aux représentants des communautés indigènes, des organisations de travailleurs ou des organisations d’employeurs. A cet égard, le gouvernement communique un projet de stratégie pour 2016 2020 qui a été adopté le 15 novembre 2016 (décret no 6285). La commission observe que cette stratégie adopte une approche orientée vers les résultats et constitue le cadre pour la formulation des politiques et plans régionaux et locaux. Elle énonce trois objectifs principaux: éduquer et sensibiliser aux situations de travail forcé; élaborer et mettre en œuvre un système intégral de prévention, détection et élimination du travail forcé ainsi que de protection des victimes; diminuer la vulnérabilité de la population au travail forcé. A ce sujet, la CSI indique que les organisations de travailleurs n’ont pas été suffisamment consultées lors de l’élaboration de la stratégie. La CUT-A considère que la stratégie est générale et ne contient pas d’actions spécifiques en particulier par rapport aux communautés indigènes du Chaco et de la région orientale. En outre, les objectifs stratégiques n’intègrent pas un volet comprenant la répression et la sanction des auteurs. Pour la CUT-A, la stratégie devrait faire référence au renforcement institutionnel de l’inspection du travail et au besoin de coordination entre l’inspection et le ministère public.
La commission reconnaît que le processus participatif ayant amené à l’élaboration de la stratégie nationale de prévention du travail forcé constitue un pas important dans la lutte contre le travail forcé, et prie instamment le gouvernement d’intensifier ses efforts pour que la stratégie soit effectivement mise en œuvre, en particulier dans les régions où l’Etat est peu présent et où des indices de travail forcé ont été identifiés (Chaco et région orientale). Cet objectif pourrait être atteint notamment à travers l’adoption de plans d’action régionaux. La commission prie le gouvernement d’indiquer les actions prioritaires qui ont été définies et les mesures prises pour accroître la sensibilisation au travail forcé; répondre à la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouvent les travailleurs indigènes; et protéger les victimes qui auraient été identifiées. La commission renvoie également le gouvernement aux commentaires qu’elle formule sous la convention (nº 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989.
Application de sanctions efficaces. La commission a précédemment insisté sur la nécessité de renforcer les capacités des organes chargés de faire appliquer la loi et de compléter le cadre législatif de lutte contre le travail forcé afin que les victimes puissent effectivement accéder à la justice et que les personnes qui imposent du travail forcé soient sanctionnées. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle les effectifs de l’inspection du travail ont été renforcés en 2015 sur l’ensemble du territoire avec le recrutement de 30 inspecteurs du travail ayant reçu une formation sur les droits fondamentaux au travail, dont le travail forcé. En avril 2015, une délégation du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale s’est rendue dans la région du Chaco paraguayen pour examiner les conditions de travail dans les exploitations agricoles. En outre, au cours du deuxième semestre 2015, des visites d’inspection ont également eu lieu dans cette région, au terme desquelles l’inspection a constaté certaines violations du droit du travail, mais n’a pas identifié de cas de travail forcé. Le gouvernement ajoute que, depuis mars 2015, des nouveaux tribunaux ont été installés dans la région du Chaco paraguayen avec la désignation de juges compétents en matière pénale, civile, commerciale et du travail.
La commission note que, dans leurs observations, la CUT-A et la CSI se réfèrent au manque de moyens et aux difficultés de fonctionnement du bureau de la Direction du travail installé dans le Chaco central. Ce bureau étant trop éloigné de la capitale départementale, les travailleurs indigènes se trouvent pratiquement dans l’impossibilité de s’y rendre pour dénoncer les violations dont ils seraient victimes. Les organisations syndicales indiquent également que, dans la pratique, la Direction du travail indigène et l’Unité technique de prévention et d’éradication du travail forcé de l’inspection du travail ne sont pas en mesure de fonctionner. En outre, la CUT-A réfute l’affirmation selon laquelle il n’y a pas de travail forcé au Paraguay, et fait part de sa préoccupation face au fait que les travailleurs qui sont victimes d’exploitation ou de servitude pour dettes ne disposent pas dans la pratique d’un mécanisme effectif pour dénoncer leur situation et garantissant leur anonymat vis-à-vis des employeurs. A cet égard, la CUT-A remarque que la visite menée par la délégation du ministère du Travail en 2015 dans la région du Chaco a fait l’objet de publicité et incluait des employeurs. S’agissant des visites d’inspection menées dans les exploitations agricoles et de l’absence de cas de servitude pour dettes détectés, la CUT-A considère que des éléments liés à l’existence de mécanismes d’endettement et à des irrégularités dans le paiement des salaires n’ont pas été suffisamment examinés. Enfin, la CUT-A évoque la question des prix élevés pratiqués par les employeurs dans les économats dans lesquels les travailleurs n’ont d’autre choix que d’acheter leurs biens de première nécessité ainsi que les déductions pratiquées sur leurs salaires.
La commission relève avec une profonde préoccupation les difficultés de fonctionnement auxquelles sont confrontées les structures mises en place pour permettre aux travailleurs indigènes qui seraient victimes d’exploitation au travail de faire valoir leurs droits ainsi que le manque d’informations sur les activités que ces structures mènent. Compte tenu des particularités géographiques du pays et de la grande pauvreté dans laquelle se trouvent certaines communautés, la commission rappelle qu’il est indispensable que le gouvernement continue de renforcer la présence de l’Etat dans les régions concernées, en dotant les acteurs chargés de faire appliquer la loi des moyens pour identifier les situations de travail forcé et protéger les personnes les plus vulnérables. Par conséquent, la commission prie le gouvernement de fournir des informations concrètes sur les moyens et les actions menées par l’Unité technique de prévention et d’éradication du travail forcé de l’inspection du travail, la sous-commission de la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé établie dans la région du Chaco, et le bureau de la Direction du travail dans la localité de Teniente Irala Fernandez.
Rappelant que, en vertu de l’article 25 de la convention des sanctions pénales doivent être imposées et strictement appliquées aux personnes reconnues coupables d’avoir imposé du travail forcé, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les poursuites judiciaires engagées à l’encontre des personnes qui imposent du travail forcé, sous forme de servitude pour dettes ou autres. Notant l’absence de décisions de justice rendues à cet égard, la commission espère que le gouvernement ne manquera pas de s’assurer que la législation pénale nationale contient des dispositions suffisamment précises et adaptées aux circonstances nationales pour que les autorités compétentes puissent poursuivre pénalement les auteurs de ces pratiques et les sanctionner.
Article 2, paragraphe 2 c). Travail imposé aux prisonniers en détention préventive. Depuis de nombreuses années, la commission souligne la nécessité de modifier la loi pénitentiaire (loi no 210 de 1970), aux termes de laquelle les personnes soumises à des mesures de sûreté dans un établissement pénitentiaire ont également l’obligation de travailler en prison (article 39 lu conjointement avec l’article 10 de la loi). Or, en vertu de l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention, seuls les détenus qui ont fait l’objet d’une condamnation judiciaire peuvent être soumis à l’obligation de travailler. A cet égard, le gouvernement se réfère à l’adoption du nouveau Code d’exécution des peines (loi no 5162/14). La commission observe que ce code réglemente l’exécution des sanctions pénales prononcées par les juridictions et qu’il ne contient pas de dispositions concernant les mesures de sûreté qui seraient imposées avant un jugement. La commission relève néanmoins que le nouveau Code d’exécution des peines n’abroge pas la loi pénitentiaire no 210 de 1970. Par conséquent, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour abroger formellement les dispositions précitées de la loi no 210 de 1970 et pour s’assurer que les personnes qui font l’objet d’une mesure de sûreté dans un établissement pénitentiaire ne sont pas soumises à l’obligation de travailler en prison.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. Traite des personnes. 1. Renforcement du cadre législatif et application effective de la loi. Se référant à ses précédents commentaires, la commission prend dûment note de l’adoption de la loi intégrale contre la traite des personnes (loi no 4788 du 13 décembre 2012) qui consolide le cadre législatif déjà existant et prévoit le renforcement du cadre institutionnel, notamment afin d’assurer un régime de protection renforcé pour les victimes. La loi incrimine la traite des personnes aux fins d’exploitation sexuelle et dans le but de soumettre une personne à un régime de servitude, à un mariage forcé, à un travail forcé, à l’esclavage ou toute pratique analogue, en définissant l’ensemble de ces pratiques. Elle prévoit la possibilité pour les autorités d’utiliser des moyens d’investigation spéciaux et facilite la participation des victimes aux procédures judiciaires. La commission note également qu’il existe au sein du ministère de l’Intérieur et du ministère public des divisions spécialisées dans la lutte contre la traite des personnes qui travaillent en étroite collaboration.
La commission espère que cette nouvelle loi contribuera à combattre de manière plus efficace la traite des personnes. Elle constate à cet égard que le gouvernement ne fournit aucune information dans son rapport sur le nombre de procédures judiciaires engagées dans les affaires de traite des personnes ni sur les sanctions qui auraient été prononcées à l’encontre des coupables, sur la base de la législation précédemment applicable. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour continuer à sensibiliser et former les forces de l’ordre, les autorités de poursuite et les autorités judiciaires à la traite des personnes, tant à des fins d’exploitation sexuelle que d’exploitation au travail, et pour renforcer leurs moyens afin qu’elles soient en mesure d’identifier les victimes, de mener les enquêtes appropriées et d’initier les procédures judiciaires. Prière de fournir des informations statistiques sur les procédures en cours et les sanctions prononcées.
2. Mesures de prévention et de protection des victimes. La commission note que la nouvelle loi réaffirme que la Table interinstitutionnelle pour la prévention et la lutte contre la traite des personnes est l’entité coordinatrice qui doit impulser la Politique nationale pour la prévention et la lutte contre la traite des personnes et contrôler sa mise en œuvre, ainsi que celle des plans adoptés aux niveaux départemental et municipal. La loi prévoit à cette fin l’adoption de programmes opérationnels ainsi que la création d’un fonds national d’investissement de prévention et d’assistance aux victimes, dont les ressources doivent être prévues dans la loi budgétaire annuelle de la nation. La commission espère que la Table interinstitutionnelle pour la prévention et la lutte contre la traite des personnes sera dotée des moyens nécessaires pour élaborer la Politique nationale pour la prévention et la lutte contre la traite des personnes, pour contrôler sa mise en œuvre aux niveaux national, départemental et municipal, et pour assurer la coordination de cette politique. Prière de fournir des informations sur les activités menées à cette fin, les obstacles rencontrés et les mesures prises pour les surmonter.
S’agissant de la protection des victimes, la commission note que la loi contient un titre spécial visant à renforcer l’assistance qui doit leur être apportée. La loi prévoit en particulier l’élaboration de directives pour l’identification des victimes, la mise en place de programmes d’assistance immédiate et à moyen terme, l’octroi d’une période de réflexion et de récupération et de permis de séjour, l’impossibilité de poursuivre les victimes pour des infractions commises qui seraient en lien direct avec leur situation et la possibilité pour le juge de se prononcer sur l’indemnisation des victimes lors du procès pénal. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour mettre en œuvre les programmes de protection et d’assistance aux victimes prévus aux articles 30 à 43 de la loi intégrale contre la traite des personnes (loi no 4788 de 2012). Prière d’indiquer le nombre de victimes qui ont bénéficié de ces programmes.

Observation (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

Suivi donné aux conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 102e session, juin 2013)

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Servitude pour dettes des communautés indigènes du Chaco. La commission a précédemment noté que le gouvernement avait pris un certain nombre de mesures pour répondre à la situation de nombreux travailleurs indigènes dans les exploitations agricoles du Chaco paraguayen, qui sont victimes de servitude pour dettes. Elle a noté en particulier les activités de sensibilisation et de formation menées par la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé ainsi que l’institution d’une sous-commission dans la région du Chaco, ayant notamment pour mandat de recevoir les plaintes concernant les violations des droits du travail et de préparer un plan d’action régional sur les droits fondamentaux et la prévention du travail forcé; la mise en place d’un bureau de la Direction du travail dans la localité de Teniente Irala Fernandez (Chaco central); les activités de secours menées dans le cadre du Programme national pour les peuples indigènes (PRONAPI). La commission a souligné la nécessité de renforcer l’action des différentes entités engagées dans la lutte contre la servitude pour dettes dans la région du Chaco pour aboutir à une action systématique, proportionnelle à la gravité du problème.
La commission note que, lors de la discussion de l’application de la convention au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2013, le gouvernement a réaffirmé son engagement à mettre un terme à la servitude pour dettes dans les communautés indigènes du Chaco paraguayen ainsi que dans d’autres régions du pays susceptibles d’être touchées. Elle observe que lors de cette discussion ont été évoquées les difficultés liées aux particularités géographiques du Chaco paraguayen qui peuvent entraver les initiatives publiques, à la pauvreté extrême dans laquelle se trouve certaines communautés et leur endettement, aux revendications par rapport à la restitution des terres et à la faiblesse de la présence des services de l’Etat. La commission note les mesures suivantes prises par le gouvernement pour surmonter ces difficultés:
  • -la création au sein de l’inspection du travail d’une unité technique de prévention et d’éradication du travail forcé, qui est intégrée par six inspecteurs du travail et dont les fonctions sont notamment d’investiguer in situ les plaintes relatives au travail forcé, d’identifier les victimes, les protéger et les orienter, et d’assurer une meilleure coordination avec les autres organes compétents (résolution no 1042 du 13 août 2013);
  • -la création de la Direction du travail indigène au sein du ministère, qui sera chargée de la coordination du système de médiation, des services d’inspection et de la formation des travailleurs (résolution no 642 du 29 juillet 2013);
  • -les activités menées en collaboration avec le Bureau international du Travail en vue de l’élaboration de la stratégie nationale de prévention du travail forcé, avec la participation des organisations de travailleurs et d’employeurs et en consultation avec des peuples indigènes. A cette fin, une série d’ateliers ont été organisés et d’autres sont prévus dans plusieurs régions (notamment le Chaco central, le département de Itapúa, la localité de Juan Caballero) pour que les communautés indigènes puissent proposer la feuille de route la plus appropriée et la plus cohérente pour traiter cette question;
  • -les activités de formation des juges et des inspecteurs du travail. S’agissant de ces derniers, les ateliers visent à apporter une meilleure connaissance de la législation, des procédures d’intervention, des actions de prévention et de lutte contre le travail forcé;
  • -les cours de perfectionnement et de formation professionnelle en faveur des jeunes travailleurs des communautés du Chaco;
  • -les activités de sensibilisation sur les droits des travailleurs réalisées par la Direction régionale du travail du Chaco.
La commission prend note de ces mesures et encourage fermement le gouvernement à poursuivre sur cette voie. A cet égard, elle espère que le Bureau pourra continuer à fournir une assistance technique au gouvernement. La commission rappelle que, face aux préoccupations exprimées lors de la discussion de ce cas au sujet de l’exploitation économique à laquelle continuent d’être soumis les travailleurs indigènes dans certains secteurs, et en particulier dans l’agriculture, la Commission de la Conférence a exprimé le ferme espoir que le gouvernement prendrait des mesures immédiates et efficaces dans le cadre d’une action coordonnée et systématique pour éradiquer toute forme de travail forcé imposé aux communautés indigènes du Chaco et des autres régions du pays susceptibles d’être concernées. Par conséquent, la commission veut croire que le gouvernement ne manquera pas de prendre les mesures nécessaires afin:
  • -d’adopter la stratégie nationale de prévention du travail forcé ainsi que le plan d’action régional tripartite pour le Chaco et de veiller à ce qu’ils définissent des priorités et des objectifs précis en ce qui concerne les mesures de prévention et de protection des victimes et qu’ils identifient les entités responsables de leur mise en œuvre;
  • -de s’assurer que les mesures prises dans le cadre de cette stratégie apporteront des réponses à la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouvent les travailleurs indigènes, de manière à les protéger contre les mécanismes d’endettement qui conduisent à la servitude pour dettes. La commission renvoie également le gouvernement aux commentaires qu’elle formule sous la convention (no 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989;
  • -de doter la nouvelle unité technique de prévention et d’éradication du travail forcé, créée au sein de l’inspection du travail, ainsi que la Direction du travail de la localité de Teniente Irala Fernandez, des ressources et moyens matériels appropriés pour enquêter sur les plaintes reçues, mener des contrôles inopinés, y compris dans les zones reculées, identifier les victimes et infliger les sanctions administratives appropriées;
  • -de protéger les victimes identifiées et leur apporter une assistance appropriée afin qu’elles puissent se réinsérer et obtenir réparation pour le préjudice qu’elles ont subi.
La commission exprime le ferme espoir que le gouvernement fournira des informations sur les mesures prises à cette fin et qu’elles permettront de constater que des progrès tangibles ont été réalisés.
Article 25. Application de sanctions efficaces. a) Sanctions pénales. Tout comme la Commission de la Conférence, la commission exprime une nouvelle fois sa préoccupation face au manque d’informations au sujet des affaires soumises à la justice concernant des pratiques de travail forcé. La commission rappelle qu’en vertu de l’article 25 de la convention des sanctions pénales doivent être imposées et strictement appliquées aux personnes reconnues coupables d’avoir imposé du travail forcé. A cet égard, il est essentiel que la législation nationale contienne des dispositions suffisamment précises pour permettre aux autorités compétentes de poursuivre pénalement et punir les personnes qui imposent du travail forcé. La commission note que le gouvernement indique que la question de l’ajustement de la législation nationale est actuellement à l’étude, avec l’assistance du BIT. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour, d’une part, sensibiliser les autorités de police et le ministère public à la problématique de la servitude pour dettes et renforcer leur coopération avec l’inspection du travail à cet égard et pour, d’autre part, s’assurer que les victimes sont en mesure de recourir aux autorités compétentes. Compte tenu de l’absence de procédures judiciaires engagées, la commission espère que le gouvernement ne manquera pas de poursuivre l’examen de la législation actuellement en vigueur et de prendre les mesures appropriées pour que la législation nationale contienne des dispositions suffisamment précises et adaptées aux circonstances nationales pour que les autorités compétentes puissent poursuivre pénalement les auteurs de ces pratiques et les sanctionner.
b) Sanctions administratives. Rappelant la nécessité de renforcer les contrôles de l’inspection du travail, la commission prie à nouveau le gouvernement d’indiquer le nombre d’infractions constatées par les services d’inspection aux articles 47, 176 et 231 du Code du travail relatifs à la protection du salaire, y compris en ce qui concerne le respect du salaire minimum et le fonctionnement des économats. Prière de préciser les amendes infligées aux employeurs et les indemnisations accordées aux travailleurs. En outre, la commission renvoie aux commentaires formulés sur l’application de la convention (no 95) sur la protection du salaire, 1949.
Article 2, paragraphe 2 c). Travail imposé aux prisonniers en détention préventive. Depuis de nombreuses années, la commission souligne la nécessité de modifier la loi pénitentiaire (loi no 210 de 1970), aux termes de laquelle les personnes soumises à des mesures de sûreté dans un établissement pénitentiaire ont également l’obligation de travailler en prison (art. 39 lu conjointement avec l’article 10 de la loi). La commission a rappelé à cet égard qu’en vertu de l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention seuls les détenus qui ont fait l’objet d’une condamnation judiciaire peuvent être soumis à l’obligation de travailler.
La commission note que, lors de la discussion au sein de la Commission de la Conférence, la représentante gouvernementale a indiqué qu’une loi organique pénitentiaire avait été en partie adoptée par la Chambre des députés et était en cours d’examen par le Sénat. Dans la mesure où cette question fait l’objet de ses commentaires depuis de nombreuses années, et la commission ayant constaté qu’une grande majorité des personnes détenues n’ont pas fait l’objet d’une décision de justice, elle prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires en vue de l’adoption du projet de loi organique pénitentiaire dans les plus brefs délais, de manière à garantir que les personnes qui font l’objet d’une mesure de sûreté dans un établissement pénitentiaire ne sont pas soumises à l’obligation de travailler en prison.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. Traite des personnes. 1. Renforcement du cadre législatif et application effective de la loi. Se référant à ses précédents commentaires, la commission note que, suite à l’adoption de la loi no 3.340 du 16 juillet 2008, l’article 129 du Code pénal a été modifié. Elle relève avec intérêt que les alinéas b) et c) de l’article 129 définissent de manière détaillée les éléments constitutifs de la traite des personnes, tant aux fins de leur exploitation sexuelle que de leur exploitation au travail, et prévoient des peines de prison pouvant aller jusqu’à douze ans. La commission note par ailleurs que le gouvernement indique qu’un projet de loi sur la traite des personnes est à l’étude, qui couvre les volets de la prévention et de la répression de la traite ainsi que celui de la protection et de la réinsertion des victimes.
La commission relève que le gouvernement fait état de la création au sein du ministère de l’Intérieur d’une division de la traite des personnes et des délits connexes qui est en charge de mener des enquêtes et suivre les cas de traite en étroite collaboration avec le ministère public (Fiscalia). Ce dernier a lui-même institué une unité spéciale de lutte contre la traite, composée de fonctionnaires spécialisés, pour faire avancer les procédures judiciaires. La commission note cependant que le gouvernement ne fournit aucune information dans son rapport sur le nombre de procédures judiciaires engagées dans les affaires de traite des personnes ni sur les sanctions qui auraient été prononcées à l’encontre des coupables. A cet égard, la commission observe que, lors de la discussion de l’application de la convention (nº 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, en juin 2011, la Commission de l’application des normes de la Conférence a fait part de sa préoccupation face aux difficultés d’application de la législation contre la traite et aux allégations de complicité de certains fonctionnaires gouvernementaux. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour renforcer les moyens dont disposent les autorités de poursuite et les autorités judiciaires afin que celles-ci soient en mesure d’identifier les victimes de la traite, tant à des fins de leur exploitation sexuelle que de leur exploitation au travail, de mener les enquêtes appropriées et d’initier les procédures judiciaires sur la base de l’article 129, alinéas b) et c), du Code pénal. Prière de fournir des informations statistiques sur les jugements et les sanctions prononcées. La commission prie également le gouvernement d’indiquer si le projet de loi auquel il s’est référé a été adopté et de fournir des informations sur la manière dont celui-ci contribue à lutter plus efficacement contre la traite des personnes. Par ailleurs, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour s’assurer que les enquêtes sont effectivement diligentées dans les cas de complicité de fonctionnaires dans les affaires de traite.
2. Mesures de prévention et de protection des victimes. La commission note les informations fournies par le gouvernement sur les activités développées par la Table interinstitutionnelle de prévention de la traite des personnes, organe chargé de coordonner la prévention et la lutte contre la traite des personnes, tant au niveau national que départemental, ainsi que par la Direction de prévention et d’assistance aux victimes de la traite. Elle relève en particulier l’établissement d’un centre d’accueil transitoire pour les victimes de la traite; la mise en place par la Direction des statistiques, des enquêtes et du recensement d’un système de collecte de données concernant la traite; l’organisation par la Direction de l’appui aux communautés paraguayennes à l’étranger du ministère des Affaires étrangères d’une série d’ateliers destinés à sensibiliser les travailleurs migrants aux risques de discrimination, d’exploitation et d’abus dont ils peuvent être victimes; les activités développées en coopération avec les pays du MERCOSUR. Le gouvernement fournit également des statistiques sur le nombre de victimes de la traite qui ont été rapatriées sur le territoire paraguayen avec le concours des autorités consulaires. La commission prie le gouvernement de continuer à communiquer des informations sur les activités menées par les différents organes qui interviennent dans la lutte contre la traite des personnes et d’indiquer les mesures prises par la Table interinstitutionnelle de prévention de la traite des personnes pour assurer la coordination et l’efficacité des actions menées tant au niveau de la prévention que de la protection des victimes. Prière d’indiquer si un plan d’action national a été adopté. Dans la mesure où le Paraguay est principalement un pays d’origine et de transit de la traite des personnes, la commission considère qu’il est indispensable de renforcer les activités de sensibilisation et les programmes d’assistance aux victimes qui reviennent sur le territoire national afin de leur permettre de pouvoir se réinsérer, et prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

La commission prend note du rapport du gouvernement et de ses annexes ainsi que des observations formulées par la Confédération syndicale internationale (CSI) et par la Centrale nationale des travailleurs (CNT) en date du 31 août 2011, qui ont été transmises au gouvernement respectivement les 6 et 15 septembre 2011.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Servitude pour dettes des communautés indigènes du Chaco. Depuis de nombreuses années, les commentaires de la commission portent sur la situation de nombreux travailleurs indigènes dans les exploitations agricoles du Chaco paraguayen, qui sont victimes de servitude pour dettes. Sur la base de plusieurs observations communiquées par les organisations de travailleurs, de la discussion de ce cas par la Commission de l’application des normes de la Conférence en 2008 et du rapport Servitude pour dettes et marginalisation dans le Chaco paraguayen – préparé dans le cadre de l’assistance technique apportée au Paraguay par le Programme d’action spécial de l’OIT pour combattre le travail forcé (SAP-FL) –, la commission a exprimé sa préoccupation face aux mécanismes qui conduisent à l’endettement des travailleurs indigènes qui se retrouvent piégés dans des situations relevant du travail forcé. Elle a également souligné que le fait que ces travailleurs ne disposent d’aucune terre accroît leur vulnérabilité.
Dans ses précédents commentaires, la commission a noté que le gouvernement avait pris un certain nombre de mesures et notamment la création de la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé (résolution no 230 du 27 mars 2009) qui a élaboré un plan d’action comprenant des activités de sensibilisation et une activité de formation des inspecteurs du travail; la mise en place d’un bureau de la Direction du travail dans la localité de Teniente Irala Fernandez (Chaco central); l’adoption avec l’assistance du BIT du Programme national pour le travail décent, dont l’éradication du travail forcé constitue un volet important. La commission a souligné que ces mesures constituaient un premier pas, mais qu’elles devaient être renforcées et aboutir à une action systématique, proportionnelle à la gravité du problème.
Dans son dernier rapport, le gouvernement se réfère aux activités de secours menées dans le cadre du Programme national pour les peuples indigènes (PRONAPI). Ce programme a également établi un questionnaire destiné à collecter des données sur les conditions de vie des communautés indigènes. Le gouvernement énumère un certain nombre d’activités de sensibilisation menées en 2009 et 2011 par la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé ainsi que des activités de formation pour les inspecteurs du travail, les organisations de travailleurs et d’employeurs. Cette commission a institué en juillet 2011 une sous-commission dans la région du Chaco qui a notamment pour mandat de recevoir les plaintes concernant les violations des droits du travail, de promouvoir la diffusion des droits fondamentaux au travail et de préparer un plan d’action régional sur les droits fondamentaux et la prévention du travail forcé. La sous-commission s’est réunie deux fois en 2011. Le gouvernement indique également que, jusqu’en mai 2011, le ministère de la Justice et du Travail a effectué plus de 50 visites d’inspection dans les exploitations agricoles du Chaco et qu’aucune situation de travail forcé n’a été détectée. Des procès-verbaux ont été dressés et des amendes imposées pour violations de la législation du travail concernant l’enregistrement des travailleurs et le paiement des salaires.
La commission note les observations de la Centrale unitaire des travailleurs – Authentique (CUT-A) transmises par la CSI. La CUT-A, se basant sur des entretiens menés avec des représentants des organisations indigènes du Chaco, souligne que le problème du travail forcé dans les exploitations agricoles et usines du Chaco persiste, et que l’Etat n’a pas mis en œuvre des mesures efficaces pour éliminer ces pratiques. Le syndicat insiste sur la marginalisation des communautés indigènes qui sont oubliées par l’Etat; le système d’endettement permanent dans lequel les grandes entreprises agricoles maintiennent les travailleurs appartenant à ces communautés, les empêchant ainsi de chercher des alternatives; les discriminations dont sont victimes ces travailleurs qui reçoivent systématiquement des salaires inférieurs aux autres travailleurs et, dans de nombreux cas, ne parviennent pas à percevoir la moitié du salaire minimum; la corruption qui empêche les autorités publiques d’exercer correctement leurs fonctions – y compris de traiter des plaintes – et fait également obstacle à la restitution des terres ancestrales; et l’insuffisance des moyens dont dispose le ministère de la Justice et du Travail pour protéger les communautés indigènes.
La commission prend note de l’ensemble de ces informations. Elle relève que les activités développées jusqu’à présent par la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé relèvent principalement de la sensibilisation et que celles menées dans le cadre du PRONAPI ont trait à l’autosuffisance alimentaire. La commission encourage fermement le gouvernement à poursuivre ses efforts en vue de lutter contre le travail forcé des travailleurs indigènes du Chaco. Elle espère que les mesures seront prises pour permettre à la sous-commission des droits fondamentaux et de la prévention du travail forcé dans la région du Chaco d’adopter un plan d’action régional qui permettra de renforcer l’action des différentes entités impliquées dans cette lutte, tant du point de vue de la prévention que de la répression et de la protection des victimes. Elle prie le gouvernement de s’assurer que ce plan réponde à la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouvent les travailleurs indigènes de manière à les protéger contre les mécanismes d’endettement qui conduisent à la servitude pour dettes. La commission renvoie également le gouvernement aux commentaires qu’elle formule sous la convention (nº 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989.
La commission note qu’un certain nombre de visites d’inspection ont déjà été accomplies dans la région du Chaco et qu’aucune d’entre elles n’a constaté de situation relevant du travail forcé. La commission observe cependant que, dans leurs observations, tant la CSI que la CNT et la CUT-A confirment la persistance du travail forcé dans la région du Chaco. La commission insiste sur la nécessité de renforcer l’inspection du travail, et notamment le bureau de la Direction du travail dans la localité de Teniente Irala Fernandez, ainsi que la Sous-commission des droits fondamentaux dans la région du Chaco qui a notamment pour mandat de recevoir les plaintes concernant les violations des droits du travail. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que ces entités disposent des ressources matérielles et du personnel adéquates et ont accès à des formations appropriées, afin d’identifier les victimes et leur permettre de faire valoir leurs droits; traiter de manière efficace les plaintes reçues et réaliser les enquêtes pertinentes; et pour se déplacer de manière rapide et efficace dans les zones à risque.
Article 25. Application de sanctions efficaces. La commission souligne que l’application effective de sanctions en cas de violation de la législation du travail est un élément essentiel de la lutte contre le travail forcé, dans la mesure où le travail forcé se caractérise par la réunion de plusieurs infractions à la législation du travail, qui doivent être sanctionnées en tant que telles. En outre, prises dans leur ensemble, ces violations du droit du travail concourent à la réalisation de situations relevant du travail forcé, qui doivent elles-mêmes être criminalisées et sanctionnées pénalement.
a) Sanctions administratives. La commission prie une nouvelle fois le gouvernement de communiquer des informations sur le nombre de cas dans lesquels les services d’inspection ont constaté la violation des articles 47, 176 et 231 du Code du travail relatifs à la protection du salaire, y compris en ce qui concerne le respect du salaire minimum et le fonctionnement des économats. Prière de fournir des informations sur les amendes infligées aux employeurs et sur les indemnisations accordées aux travailleurs. La commission renvoie à cet égard aux commentaires formulés sur l’application de la convention (nº 95) sur la protection du salaire, 1949.
b) Sanctions pénales. Se référant à ses précédents commentaires, la commission note que le gouvernement indique dans son rapport qu’aucune plainte n’a été déposée pour travail forcé. La commission rappelle qu’en vertu de l’article 25 de la convention des sanctions pénales doivent être imposées et strictement appliquées aux personnes reconnues coupables d’avoir imposé du travail forcé. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour sensibiliser le ministère public à la problématique de la servitude pour dettes et pour renforcer sa coopération avec l’inspection du travail à cet égard. La commission prie également le gouvernement d’indiquer les dispositions de la législation pénale qui peuvent être utilisées pour initier des poursuites judiciaires à l’encontre des personnes qui imposent du travail forcé et, le cas échéant, de s’assurer que la législation nationale contient des dispositions suffisamment précises pour que les autorités compétentes puissent poursuivre pénalement et sanctionner les auteurs de ces pratiques.
Article 2, paragraphe 2 c). Travail imposé aux prisonniers en détention préventive. Depuis de nombreuses années, la commission souligne la nécessité de modifier la loi pénitentiaire (loi no 210 de 1970) aux termes de laquelle les personnes soumises à des mesures de sûreté dans un établissement pénitentiaire ont également l’obligation de travailler en prison (article 39 lu conjointement avec l’article 10 de la loi). La commission a rappelé à cet égard qu’en vertu de l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention seuls les détenus qui ont fait l’objet d’une condamnation judicaire peuvent être soumis à l’obligation de travailler. La commission observe que, par le passé, le gouvernement a indiqué que les dispositions de la loi pénitentiaire seraient modifiées ou abrogées d’abord dans le cadre de l’adoption d’un Code pénitentiaire puis du nouveau Code de procédure pénale. La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement ne fournit aucune information sur l’état d’avancement de l’adoption d’un nouveau code de procédure pénale. Il communique copie du règlement interne de l’unité pénitentiaire Esperanza qui ne reçoit que des personnes condamnées. Dans la mesure où cette question fait l’objet des commentaires de la commission depuis de nombreuses années, la commission veut croire que le gouvernement ne manquera pas de prendre les mesures nécessaires pour mettre la législation nationale en conformité avec la convention, en s’assurant que les prisonniers en attente de jugement ou les personnes détenues sans avoir été jugées ne sont pas soumis à l’obligation de travailler en prison. La commission insiste d’autant plus sur la nécessité de modifier la loi pénitentiaire de 1970 que, d’après les informations disponibles sur le site Internet du ministère du Travail et de la Justice, sur 6 146 personnes privées de liberté, seulement 1 772 ont fait l’objet d’une décision de justice.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2009, publiée 99ème session CIT (2010)

Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. Traite des personnes. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement se réfère à l’article 129 du Code pénal qui prévoit que quiconque en recourant à la force, à la menace d’un mal considérable ou à la tromperie, conduit une autre personne en dehors du territoire national ou l’introduit sur le territoire national et, en utilisant sa vulnérabilité, l’incite à la prostitution est passible d’une peine de prison. Le gouvernement indique que la procédure pénale est initiée par le ministère public (procureur général de l’Etat).

La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur l’application de l’article 129 du Code pénal en précisant le nombre de cas qui ont été dénoncés auprès du ministère public, le nombre de ceux qui ont donné lieu à une procédure judicaire et, le cas échéant, prière de communiquer copie des décisions de justice prononcées.

Observation (CEACR) - adoptée 2009, publiée 99ème session CIT (2010)

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention.Servitude pour dettes des communautés indigènes du Chaco.

Dans sa précédente observation, la commission a une nouvelle fois exprimé sa préoccupation face aux situations de servitude pour dettes qui sévissent dans les communautés indigènes du Chaco. La commission a pris note du rapport Servitude pour dettes et marginalisation dans le Chaco paraguayen élaboré dans le cadre de la coopération technique proposée par le projet «Travail forcé, discrimination et réduction de la pauvreté dans les communautés indigènes» menée par le Programme d’action spécial de l’OIT pour combattre le travail forcé (SAP-FL). Sur la base des recherches menées, le rapport confirme l’existence de pratiques de travail forcé et précise qu’un ensemble d’éléments conduit à la situation de travail forcé dans laquelle se trouvent de nombreux travailleurs indigènes dans les exploitations du Chaco: les travailleurs perçoivent des salaires inférieurs au minimum légal; ils disposent d’une quantité insuffisante de nourriture, et les produits alimentaires disponibles dans les plantations sont vendus à des prix excessifs du fait que les travailleurs n’ont accès à aucun autre marché et ne disposent pas d’autres sources de subsistance (pêche et chasse); les salaires sont partiellement ou intégralement versés en nature. Tout ceci conduit à l’endettement du travailleur, ce qui l’oblige, et dans de nombreux cas également sa famille, à rester travailler dans l’exploitation. Ce rapport a été validé lors de séminaires réalisés séparément avec les organisations d’employeurs et de travailleurs ainsi qu’avec les services de l’inspection du travail.

La commission a également pris note des commentaires formulés par la Confédération syndicale internationale (CSI) au sujet de la violation de l’article 47 du Code du travail selon lequel sont nuls les accords qui fixent un salaire inférieur au minimum légal et qui entraînent l’obligation directe ou indirecte d’acquérir des biens de consommation dans les magasins, commerces ou lieux déterminés par l’employeur. Selon les articles 231 et 176 du Code du travail, le paiement peut se faire en nature à hauteur de 30 pour cent du salaire, et les prix des articles vendus doivent correspondre à ceux pratiqués dans le village le plus près de l’établissement. La CSI a allégué que ces dispositions ne sont pas respectées dans la pratique, favorisant ainsi les conditions de l’endettement qui conduit à des situations de travail forcé auxquelles sont soumis les travailleurs indigènes du Chaco.

La commission a souligné que la servitude pour dettes relève du travail forcé tel que défini par la convention et constitue une grave violation de cette dernière. Elle a demandé au gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour combattre les pratiques au terme desquelles du travail forcé est imposé aux travailleurs indigènes du Chaco.

La commission prend note de la discussion qui a eu lieu au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence en 2008 et, en particulier, les conclusions de cette discussion dans lesquelles la Commission de la Conférence a fait part de sa préoccupation face aux conséquences que peut avoir pour ces travailleurs leur situation de paysans sans terre et face à leur situation de vulnérabilité. Elle a considéré que les mesures requises devaient être prises de toute urgence.

Mesures prises par le gouvernement

Programme par pays pour le travail décent. La commission note que, suite à une initiative tripartite, le gouvernement a souscrit avec l’OIT un programme par pays pour le travail décent dont l’un des objectifs est d’améliorer la mise en œuvre des normes internationales du travail à travers les programmes pour l’éradication du travail forcé et des pires formes du travail des enfants, le renforcement de l’inspection du travail et l’adéquation des lois nationales avec les conventions de l’OIT ratifiées.

Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé.Plan d’action relatif au travail forcé. La commission note que le ministère de la Justice et du Travail, par la résolution no 230 de mars 2009, a établi la Commission des droits fondamentaux au travail et de la prévention du travail forcé. Le plan d’action élaboré par cette commission comprend, en plus des activités de sensibilisation des travailleurs et des employeurs, une campagne radiodiffusée de sensibilisation de la société dans son ensemble d’une durée d’un mois, ainsi qu’une activité de formation des inspecteurs du travail suivie de visites dans les établissements agricoles. Est également envisagée une recherche sur le thème des femmes indigènes et la discrimination. Par ailleurs, un bureau de la Direction du travail dans la localité de Teniente Irala Fernandez dans le Chaco a été créé.

La commission prend dûment note des actions entreprises par le gouvernement en vue de l’éradication des pratiques de travail forcé au sein des communautés indigènes du Chaco. Toutefois, si les mesures prises jusqu’alors constituent un premier pas, elles doivent être renforcées et aboutir à une action systématique, proportionnelle à la gravité du problème, si l’on souhaite y apporter une solution.

La commission espère que le gouvernement fournira des informations sur le mandat et le fonctionnement du bureau de Teniente Irala Fernandez, sur les mécanismes prévus pour recevoir les dénonciations de travail forcé (procédures, autorités compétentes, assistance juridique). Etant donné le rôle fondamental joué par les services de l’inspection du travail dans la lutte contre le travail forcé, la commission espère que le gouvernement communiquera des informations au sujet des activités menées par ces services et des mesures prises pour les renforcer.

La commission espère également que le gouvernement communiquera des informations sur le nombre de cas dans lesquels les services d’inspection ont constaté la violation des articles 47, 176 et 231 du Code du travail et elle renvoie aux commentaires formulés sur l’application de la convention (nº 95) sur la protection du salaire, 1949, ainsi que la convention (nº 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989.

Article 25.Sanctions pour exaction de travail forcé. La commission rappelle que, en vertu de l’article 25 de la convention, des sanctions pénales devront être imposées et strictement appliquées aux personnes qui auront été reconnues coupables d’avoir imposé du travail forcé. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour assurer l’application de l’article 25 de la convention, en communiquant des informations sur les dispositions de la législation nationale qui permettent de sanctionner les personnes qui imposent du travail forcé, ainsi que des copies des décisions de justice pertinentes.

Article 2, paragraphe 2 c).Travail imposé aux prisonniers en détention préventive. La commission note que le gouvernement n’a pas communiqué les informations demandées au sujet de la modification de l’article 39 de la loi no 210 de 1970 selon lequel les détenus ont l’obligation de travailler. L’article 10 de cette loi considère comme détenu non seulement la personne condamnée mais également celle soumise à des mesures de sûreté dans un établissement pénitentiaire. La commission a rappelé que les détenus qui n’ont pas fait l’objet d’une condamnation ne doivent pas être soumis à l’obligation de réaliser un quelconque travail.

La commission avait pris note de l’avant-projet de Code de procédure pénale, communiqué par le gouvernement avec son rapport de 2006. Les articles 127, 68 et 69 de ce projet, lus conjointement, prévoyaient l’obligation de travailler pour les détenus, définis comme toute personne condamnée à une peine privative de liberté suite à la décision définitive prononcée par le tribunal compétent. Si ces dispositions étaient adoptées, elles permettraient de donner effet à l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention, selon lequel un travail ou un service ne peut être exigé d’un individu qu’en vertu d’une condamnation prononcée par une décision de justice. La commission avait cependant relevé que l’article 34 de l’avant-projet prévoyait que «les dispositions relatives aux conditions de vie et aux normes de conduite du Titre III s’appliqueront aux prévenus dans la mesure où elles sont compatibles avec leur condition de prévenu, elles ne contredisent pas la présomption d’innocence et elles se révèlent plus avantageuses et utiles pour protéger la personnalité du prévenu». A cet égard, la commission avait constaté que les dispositions relatives au travail obligatoire des détenus sont comprises dans le Titre III, chapitre 7. Ces dernières pourraient donc en vertu de l’article 34 être applicables aux prévenus. Il serait par conséquent nécessaire, pour éliminer la possibilité d’imposer un travail aux personnes qui se trouvent en détention préventive, que cela soit expressément interdit, sous la réserve que le prévenu puisse travailler s’il le demande.

La commission espère que le gouvernement pourra dans son prochain rapport indiquer que la législation a été mise en conformité avec la convention et fournir une copie du Code de procédure pénale, dès qu’il aura été adopté.

Observation (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Servitude pour dettes des communautés indigènes du Chaco. Dans les commentaires qu’elle formule depuis 1997, la commission exprime sa préoccupation face aux situations de servitude pour dettes qui sévissent dans les communautés indigènes du Chaco. La commission a considéré que la servitude pour dettes constitue une grave violation de la convention.

La commission prend note des commentaires formulés en août 2006 par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), désormais la Confédération syndicale internationale (CSI). La CSI se réfère à des pratiques de travail forcé dans le Chaco, dont l’existence a été confirmée dans le rapport: Servitude pour dettes et marginalisation dans le Chaco paraguayen. L’enquête reprise dans le rapport a été réalisée dans le cadre de la coopération technique dispensée par le projet dénommé «Travail forcé, discrimination et réduction de la pauvreté dans les communautés indigènes» mené par le Programme d’action spécial de l’OIT pour combattre le travail forcé (SAP-FL).

Le rapport confirme l’existence de pratiques de travail forcé et précise qu’un ensemble d’éléments conduit à la situation de travail forcé dans laquelle se trouvent de nombreux travailleurs indigènes dans les exploitations du Chaco. Les travailleurs perçoivent des salaires inférieurs au minimum légal; ils disposent d’une quantité insuffisante de nourriture, et les produits alimentaires disponibles dans les plantations sont vendus à des prix excessifs du fait que les travailleurs n’ont accès à aucun autre marché et ne disposent pas d’autres sources de subsistance (pêche et chasse); les salaires sont partiellement ou intégralement versés en nature. Tout ceci conduit à l’endettement du travailleur, ce qui l’oblige, et dans de nombreux cas également sa famille, à rester travailler dans l’exploitation.

La CSI se réfère également à la violation de l’article 47 du Code du travail selon lequel sont nuls les accords qui fixent un salaire inférieur au minimum légal et qui entraînent l’obligation directe ou indirecte d’acquérir des biens de consommation dans les magasins, commerces ou lieux déterminés par l’employeur. Selon les articles 231 et 176 du Code du travail, le paiement peut se faire en nature à hauteur de 30 pour cent du salaire, et les prix des articles vendus doivent correspondre à ceux pratiqués dans le village le plus près de l’établissement. La CSI allègue que ces dispositions ne sont pas respectées dans la pratique, favorisant ainsi les conditions de l’endettement qui débouche sur les situations de travail forcé auxquelles sont soumis les travailleurs indigènes du Chaco.

Ce rapport a été validé lors de séminaires réalisés séparément avec les organisations d’employeurs et de travailleurs ainsi qu’avec les services de l’inspection du travail. A la suite, les ministères du Travail et de la Justice ont créé un bureau de l’inspection du travail à Mariscal Etigarriba dans la région du Chaco, en mars 2006. Cependant, la commission a pris connaissance des informations disponibles dans le cadre du Programme d’action spécial de l’OIT pour combattre le travail forcé, selon lesquelles le travail des deux inspecteurs nommés dans ce bureau est difficile et ces derniers ont semble-t-il récemment démissionné en raison du manque d’appui reçu de la capitale.

La commission prend également note des conclusions du séminaire tripartite de septembre 2007 relatives à la nécessité pour le gouvernement d’instituer par décret une Commission tripartite sur les principes fondamentaux au travail et sur la prévention du travail forcé, composée de six représentants de chaque groupe: employeurs, travailleurs et gouvernement. Une fois établie, cette commission disposerait de soixante jours pour développer un plan d’action.

Dans son rapport de 2006, le gouvernement s’est référé au rapport susmentionné, aux trois séminaires réalisés avec les différents partenaires sociaux, et il a également indiqué que la création d’une Commission nationale interinstitutionnelle et multisectorielle chargée d’assurer le suivi de cette question était prévue. La commission note que le rapport du gouvernement communiqué en septembre 2007 ne contient aucune information à cet égard.

La commission constate la convergence des allégations qu’elle examine depuis 1997 relatives à la servitude pour dettes à laquelle sont soumis les travailleurs indigènes de la région du Chaco paraguayen. La commission relève que la législation du travail contient des dispositions qui, si elles étaient appliquées, contribueraient à éviter l’endettement qui contraint les travailleurs à continuer de travailler pour payer leur dette. Elle note également qu’actuellement les actions entreprises pour combattre cette pratique semblent être à l’arrêt.

La commission espère que le gouvernement communiquera dans son prochain rapport des informations sur les différentes mesures prises ou envisagées pour combattre les pratiques aux termes desquelles du travail forcé est imposé aux travailleurs indigènes du Chaco, et en particulier sur:

–           le fonctionnement du bureau de l’inspection de Mariscal Estigarriba, en fournissant copie des rapports d’inspection établis par ce bureau; et

–           la création de la Commission nationale tripartite sur les principes fondamentaux au travail et sur la prévention du travail forcé, son fonctionnement et, le cas échéant, prière de communiquer copie du plan d’action qui aurait été adopté.

Article 25. Sanctions pour exaction de travail forcé. La commission rappelle qu’en vertu de l’article 25 des sanctions pénales devront être infligées et strictement appliquées aux personnes qui auront été reconnues coupables d’avoir imposé du travail forcé. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour assurer l’application de l’article 25 de la convention, en joignant copie des décisions de justice pertinentes.

Article 2, paragraphe 2 c). Travail imposé aux prisonniers en détention préventive. Dans ses précédents commentaires, la commission s’est référée à l’article 39 de la loi no 210 de 1970 selon lequel les détenus ont l’obligation de travailler. L’article 10 de cette loi considère comme détenu non seulement la personne condamnée, mais également celle soumise à des mesures de sûreté dans un établissement pénitentiaire. La commission a précédemment rappelé que les détenus qui n’ont pas fait l’objet d’une condamnation ne doivent pas être soumis à l’obligation de réaliser un quelconque travail.

La commission prend note de l’avant-projet de Code de procédure pénale, communiqué par le gouvernement avec son rapport de 2006. Les articles 127, 68 et 69 de ce projet, lus conjointement, prévoient l’obligation de travailler pour les détenus, définis comme toute personne condamnée à une peine privative de liberté suite à la décision définitive prononcée par le tribunal compétent. Si ces dispositions étaient adoptées, elles permettraient de donner effet à l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention, selon lequel un travail ou un service ne peut être exigé d’un individu qu’en vertu d’une condamnation prononcée par une décision de justice. La commission relève cependant que l’article 34 de l’avant-projet prévoit que «les dispositions relatives aux conditions de vie et aux normes de conduite du Titre III s’appliqueront aux prévenus dans la mesure où elles sont compatibles avec leur condition de prévenu, elles ne contredisent pas la présomption d’innocence et elles se révèlent plus avantageuses et utiles pour protéger la personnalité du prévenu». A cet égard, la commission constate que les dispositions relatives au travail obligatoire des détenus sont comprises dans le Titre III, chapitre 7. Ces dernières pourraient donc en vertu de l’article 34 être applicables aux prévenus. Il serait par conséquent nécessaire, pour éliminer la possibilité d’imposer un travail aux personnes qui se trouvent en détention préventive, que cela soit expressément interdit, sous la réserve que le prévenu puisse travailler s’il le sollicite.

La commission espère que le gouvernement pourra dans son prochain rapport indiquer que la législation a été mise en conformité avec la convention et fournir une copie du Code de procédure pénale, dès qu’il aura été adopté.

Observation (CEACR) - adoptée 2005, publiée 95ème session CIT (2006)

La commission note avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente, qui portait sur les points suivants:

1. Articles 1 et 2, paragraphe 1, de la convention. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait exprimé sa préoccupation face à l’existence de situations de servitude pour dettes dans les communautés indigènes du Chaco. La commission a noté que le gouvernement a fourni une copie des communications qu’il a adressées au ministère de l’Intérieur, au Procureur général de l’Etat, à la Cour suprême de justice et aux Chambres des députés et des sénateurs ainsi qu’à la Fédération de la production, de l’industrie et du commerce (FEPRINCO) et à l’Association rurale du Paraguay (ARP), organisation d’employeurs représentative des propriétaires de domaines agricoles situés dans le Chaco. Dans ces communications, le ministère de la Justice et du Travail a demandé «que toutes les informations disponibles sur ces allégations lui soient fournies dans les plus brefs délais».

La commission a noté d’après le rapport que, le Procureur général de l’Etat est conscient de la problématique des conditions de travail dans lesquelles se trouvent certaines communautés indigènes du Chaco et du fait que l’inspection des domaines du Chaco devrait être menée de toute urgence. Le gouvernement a également indiqué que le ministère de la Justice et du Travail a prévu de réaliser cette inspection.

La commission a considéré que la servitude pour dettes constitue une grave violation de la convention. Elle veut croire que le gouvernement fournira des informations sur les résultats de l’inspection menée dans les domaines du Chaco, qu’il prendra toutes les mesures nécessaires pour protéger les travailleurs indigènes de cette région contre la servitude pour dettes et qu’il fournira des informations sur les progrès obtenus à cette fin.

2. Article 2, paragraphe 2 c). Dans ses précédents commentaires, la commission s’est référée à l’article 39 de la loi no 210 de 1970 selon lequel les prisonniers ont l’obligation de travailler. L’article 10 de cette loi considère comme prisonnier non seulement la personne condamnée, mais également celle soumise à des mesures de sûreté dans un établissement pénitentiaire. La commission a précédemment signalé que, selon l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention, un travail ou un service ne peut être exigé d’un individu que comme conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire. Les détenus qui n’ont pas fait l’objet d’une condamnation ne doivent pas être obligés de réaliser un quelconque travail.

Dans son rapport, le gouvernement a réitéré les informations selon lesquelles le nouveau Code pénitentiaire, actuellement à l’étude, remplacerait la loi no 210 de 1970. La commission prie le gouvernement de communiquer copie du Code pénitentiaire dès son adoption.

La commission espère que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un très proche avenir.

Observation (CEACR) - adoptée 2004, publiée 93ème session CIT (2005)

La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente, qui portait sur les points suivants:

1. Articles 1 et 2, paragraphe 1, de la convention. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait exprimé sa préoccupation face à l’existence de situations de servitude pour dettes dans les communautés indigènes du Chaco. La commission a noté que le gouvernement a fourni une copie des communications qu’il a adressées au ministère de l’Intérieur, au Procureur général de l’Etat, à la Cour suprême de justice et aux Chambres des députés et des sénateurs ainsi qu’à la Fédération de la production, de l’industrie et du commerce (FEPRINCO) et à l’Association rurale du Paraguay (ARP), organisation d’employeurs représentative des propriétaires de domaines agricoles situés dans le Chaco. Dans ces communications, le ministère de la Justice et du Travail a demandé«que toutes les informations disponibles sur ces allégations lui soient fournies dans les plus brefs délais».

La commission a noté d’après le rapport que, le Procureur général de l’Etat est conscient de la problématique des conditions de travail dans lesquelles se trouvent certaines communautés indigènes du Chaco et du fait que l’inspection des domaines du Chaco devrait être menée de toute urgence. Le gouvernement a également indiqué que le ministère de la Justice et du Travail a prévu de réaliser cette inspection.

La commission a considéré que la servitude pour dettes constitue une grave violation de la convention. Elle veut croire que le gouvernement fournira des informations sur les résultats de l’inspection menée dans les domaines du Chaco, qu’il prendra toutes les mesures nécessaires pour protéger les travailleurs indigènes de cette région contre la servitude pour dettes et qu’il fournira des informations sur les progrès obtenus à cette fin.

2. Article 2, paragraphe 2 c). Dans ses précédents commentaires, la commission s’est référée à l’article 39 de la loi no 210 de 1970 selon lequel les prisonniers ont l’obligation de travailler. L’article 10 de cette loi considère comme prisonnier non seulement la personne condamnée, mais également celle soumise à des mesures de sûreté dans un établissement pénitentiaire. La commission a précédemment signalé que, selon l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention, un travail ou un service ne peut être exigé d’un individu que comme conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire. Les détenus qui n’ont pas fait l’objet d’une condamnation ne doivent pas être obligés de réaliser un quelconque travail.

Dans son rapport, le gouvernement a réitéré les informations selon lesquelles le nouveau Code pénitentiaire, actuellement à l’étude, remplacerait la loi no 210 de 1970. La commission prie le gouvernement de communiquer copie du Code pénitentiaire dès son adoption.

La commission espère que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires.

Observation (CEACR) - adoptée 2003, publiée 92ème session CIT (2004)

La commission note le rapport détaillé fourni par le gouvernement ainsi que ses annexes.

1. Articles 1 et 2, paragraphe 1, de la convention. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait exprimé sa préoccupation face à l’existence de situations de servitude pour dettes dans les communautés indigènes du Chaco. La commission note que le gouvernement a fourni avec son rapport une copie des communications qu’il a adressées au ministère de l’Intérieur, au Procureur général de l’Etat, à la Cour suprême de justice et aux Chambres des députés et des sénateurs ainsi qu’à la Fédération de la production, de l’industrie et du commerce (FEPRINCO) et à l’Association rurale du Paraguay (ARP), organisation d’employeurs représentative des propriétaires de domaines agricoles situés dans le Chaco. Dans ces communications, le ministère de la Justice et du Travail a demandé«que toutes les informations disponibles sur ces allégations lui soient fournies dans les plus brefs délais».

La commission note d’après le rapport que, le Procureur général de l’Etat est conscient de la problématique des conditions de travail dans lesquelles se trouvent certaines communautés indigènes du Chaco et du fait que l’inspection des domaines du Chaco devrait être menée de toute urgence. Le gouvernement indique également que le ministère de la Justice et du Travail a prévu de réaliser cette inspection.

La commission considère que la servitude pour dettes constitue une grave violation de la convention. Elle veut croire que le gouvernement fournira des informations sur les résultats de l’inspection menée dans les domaines du Chaco, qu’il prendra toutes les mesures nécessaires pour protéger les travailleurs indigènes de cette région contre la servitude pour dettes et qu’il fournira des informations sur les progrès obtenus à cette fin.

2. Article 2, paragraphe 2 c). Dans ses précédents commentaires, la commission s’est référée à l’article 39 de la loi no 210 de 1970 selon lequel les prisonniers ont l’obligation de travailler. L’article 10 de cette loi considère comme prisonnier non seulement la personne condamnée, mais également celle soumise à des mesures de sûreté dans un établissement pénitentiaire. La commission a précédemment signalé que, selon l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention, un travail ou un service ne peut être exigé d’un individu que comme conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire. Les détenus qui n’ont pas fait l’objet d’une condamnation ne doivent pas être obligés de réaliser un quelconque travail.

Dans son rapport, le gouvernement réitère les informations selon lesquelles le nouveau Code pénitentiaire, actuellement à l’étude, remplacera la loi no 210 de 1970. La commission prie le gouvernement de communiquer copie du Code pénitentiaire dès son adoption.

3. La commission a également pris note des informations détaillées que le gouvernement a fournies en réponse à l’observation générale sur la privatisation des prisons et le travail pénitentiaire. La commission note à ce sujet avec intérêt qu’une disposition du projet de Code pénitentiaire prévoit l’interdiction de la privatisation du système pénitentiaire.

Observation (CEACR) - adoptée 1999, publiée 88ème session CIT (2000)

La commission prend note du rapport du gouvernement et des documents qui y sont joints.

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. 1. Les observations précédentes de la commission se rapportaient à l'article 39 de la loi no 210 de 1970, qui rend le travail obligatoire pour tous les détenus, et à l'article 10 de cette loi qui définit le détenu non seulement comme la personne condamnée mais aussi comme celle faisant l'objet de mesures de sécurité dans un établissement pénitentiaire. La commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans son rapport selon lesquelles, en vertu de l'article 40 du Code pénal, seuls les condamnés sont tenus de travailler, et un projet de loi sur le régime pénitentiaire qui vise à modifier la loi no 210 de 1970 est en cours d'examen.

La commission rappelle à nouveau que, conformément à l'article 2, paragraphe 2 c), de la convention, un travail ou service ne peut être exigé des prisonniers qu'en conséquence d'une condamnation prononcée par une décision judiciaire, et que les personnes détenues qui n'ont pas été condamnées ne doivent pas être obligées d'effectuer quelque travail que ce soit.

La commission exprime à nouveau l'espoir que les mesures nécessaires seront enfin prises pour remédier à cette incompatibilité persistante entre la législation et l'article 2, paragraphe 2 c), de la convention, et que le gouvernement l'informera sur toute mesure adoptée à cet égard.

2. Dans son observation antérieure, la commission avait pris note des commentaires communiqués en octobre 1997 par la Confédération mondiale du travail (CMT).

Dans ses commentaires, la CMT, se fondant sur les informations contenues dans la publication de Anti-Slavery International sur les peuples réduits en esclavage dans les années quatre-vingt-dix, fait état de situations de servitude pour dettes dans les communautés indigènes du Chaco. Les salaires des travailleurs indigènes de certaines haciendas du Chaco sont, dans beaucoup de cas, inférieurs à la moitié du salaire minimum prévu par la loi. Les travailleurs se voient donc obligés d'acheter à crédit et à des prix excessifs, dans les magasins des haciendas, les aliments de base et les produits de première nécessité. A la fin du mois, leurs dettes dépassent le montant de leur salaire. Selon ces allégations, même dans les haciendas qui versent des salaires plus élevés, les travailleurs ne perçoivent pas de salaire en raison des dettes qu'ils ont contractées.

Les commentaires de la CMT ont été transmis en novembre 1997 au gouvernement pour que celui-ci formule les observations qu'il jugerait nécessaires. La commission note que, dans son rapport communiqué en novembre 1999, le gouvernement indique qu'il ne dispose pas d'informations à propos des questions évoquées dans la communication de la CMT.

La commission note que les allégations susmentionnées font état de situations de servitude pour dettes et elle fait observer que ces pratiques vont à l'encontre de la convention, laquelle interdit le travail forcé et garantit la protection de la liberté des travailleurs.

La commission prie le gouvernement de mener une enquête sur ces graves allégations et de fournir des informations sur toutes mesures prises ou envisagées pour éliminer de telles pratiques et assurer le respect de la convention.

Observation (CEACR) - adoptée 1998, publiée 87ème session CIT (1999)

Articles 1, paragraphe 1, et 2, paragraphe 1, de la convention. 1. Les observations précédentes de la commission se rapportaient à l'article 39 de la loi no 210 de 1970, qui rend le travail obligatoire pour tous les détenus: en vertu de l'article 2, paragraphe 2 c), de la convention, il ne peut être exigé un travail ou un service des prisonniers et détenus qu'en conséquence d'une condamnation prononcée par une décision judiciaire. Dans son rapport parvenu en juin 1997, le gouvernement a réitéré que le Parlement national n'avait pas encore adopté de texte législatif assurant le respect de la convention sur ce point. Etant donné que le rapport du gouvernement n'a pas été reçu en 1998, la commission exprime à nouveau l'espoir que les mesures nécessaires pour remédier à cette incompatibilité persistante seront enfin prises et que le gouvernement rendra compte également de la situation pratique à cet égard, particulièrement en ce qui concerne les personnes en détention provisoire.

2. La commission prend note des informations communiquées par la Confédération mondiale du travail (CMT), en novembre 1997. Les informations transmises concernent les circonstances et les conditions de travail des personnes indigènes, notamment dans les haciendas. Selon ces informations, les travailleurs d'origine indigène seraient largement assujettis dans les exploitations agricoles à un cycle de travail pour rembourser des dettes à l'égard des magasins propres à ces haciendas, cet endettement s'accumulant en vertu de l'achat d'aliments et autres commodités de base à des prix exorbitants. De surcroît, les salaires, souvent, soit ne sont pas versés, soit sont versés à la fin d'un contrat, de sorte que l'endettement est le seul moyen de survie, et le travail forcé est le seul moyen de rembourser ces dettes. Selon ces informations, les personnes indigènes seraient particulièrement maltraitées dans les haciendas.

3. La commission note que cette situation ne paraît pas conforme aux articles 1, paragraphe 1, et 2, paragraphe 1, de la convention, étant donné qu'elle implique l'exaction du travail sous la menace d'une peine. La commission exprime l'espoir que le gouvernement communiquera ses observations et transmettra toutes autres informations en réponse aux commentaires de la commission à la lumière des observations communiquées par la CMT. La commission soulève également ces questions dans le cadre de la convention (no 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989, que le Paraguay a ratifiée mais pour laquelle il n'a pas envoyé de rapport non plus.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1996, publiée 85ème session CIT (1997)

La commission note que le rapport n'a pas été reçu. Elle espère qu'un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu'il contiendra des informations complètes sur le point suivant soulevé dans sa précédente demande directe:

En ce qui concerne l'article 68 de la loi no 847 du 19 décembre 1980 (Statut des personnels militaires) qui déclare non recevable la demande de démission formulée a) "alors que le demandeur n'a pas accompli son contrat de service", et b) "dans une situation d'état de siège, auquel cas le commandant en chef décide de sa recevabilité", la commission prie depuis 1987 le gouvernement de communiquer le texte des dispositions visant la durée des engagements de service et la définition des critères et délais à satisfaire pour qu'une demande de démission soit recevable, en cas de siège, en incluant les textes des règlements ou instructions applicables.

Observation (CEACR) - adoptée 1996, publiée 85ème session CIT (1997)

La commission note que le rapport du gouvernement n'a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente sur les points suivants.

Article 2, paragraphe 2 c), de la convention. La commission se réfère depuis vingt ans à l'article 39 de la loi no 210 de 1970 sur le régime pénitentiaire, qui est contraire à cette disposition de la convention du fait qu'il dispose que "le travail est obligatoire pour le prisonnier", l'article 10 de cette loi définissant le prisonnier non seulement comme la personne condamnée, mais aussi comme celle faisant l'objet d'une mesure de sécurité dans un établissement carcéral. Depuis 1977, le gouvernement fait état d'un projet de loi tendant à modifier l'article 39 de la loi no 210. Dans son observation antérieure, la commission a exprimé l'espoir que les mesures nécessaires seraient prises sans délai pour assurer le respect de la convention sur ce point, qui fait l'objet de ses commentaires depuis de nombreuses années, et a prié le gouvernement de communiquer un rapport détaillé à ce sujet. Dans son rapport reçu en 1995, le gouvernement déclare qu'"aucune modification n'est intervenue dans ce domaine". La commission espère que le gouvernement ne différera plus l'adoption des mesures nécessaires pour assurer le respect de la convention.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1995, publiée 82ème session CIT (1995)

En ce qui concerne l'article 68 de la loi no 847 du 19 décembre 1980 (Statut des personnels militaires) qui déclare non recevable la demande de démission formulée a) "alors que le demandeur n'a pas accompli son contrat de service" et b) "dans une situation d'état de siège, auquel cas le commandant en chef décide de sa recevabilité", la commission prie depuis 1987 le gouvernement de communiquer le texte des dispositions visant la durée des engagements de service et la définition des critères et délais à satisfaire pour qu'une demande de démission soit recevable, en cas de siège, en incluant les textes des règlements ou instructions applicables.

La commission constate qu'une fois de plus le rapport du gouvernement ne contient pas les informations demandées, et elle exprime l'espoir qu'il les communiquera dans son prochain rapport, pour lui permettre de juger du respect de la convention sur ce point.

Observation (CEACR) - adoptée 1995, publiée 82ème session CIT (1995)

Article 2, paragraphe 2 c), de la convention. La commission se réfère depuis vingt ans à l'article 39 de la loi no 210 de 1970 sur le régime pénitentiaire, qui est contraire à cette disposition de la convention du fait qu'il dispose que "le travail est obligatoire pour le prisonnier", l'article 10 de cette loi définissant le prisonnier non seulement comme la personne condamnée, mais aussi comme celle faisant l'objet d'une mesure de sécurité dans un établissement carcéral.

Depuis 1977, le gouvernement fait état d'un projet de loi tendant à modifier l'article 39 de la loi no 210.

Dans son observation antérieure, la commission a exprimé l'espoir que les mesures nécessaires seraient prises sans délai pour assurer le respect de la convention sur ce point, qui fait l'objet de ses commentaires depuis de nombreuses années, et a prié le gouvernement de communiquer un rapport détaillé à ce sujet.

Dans son rapport, le gouvernement déclare qu'"aucune modification n'est intervenue dans ce domaine".

La commission espère que le gouvernement ne différera plus l'adoption des mesures nécessaires pour assurer le respect de la convention.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1994, publiée 81ème session CIT (1994)

En ce qui concerne l'article 68 de la loi no 847 du 19 décembre 1980 (Statut des personnels militaires), qui déclare non recevable la demande de démission formulée a) "alors que le demandeur n'a pas accompli son contrat de service" et b) "dans une situation d'état de siège, auquel cas le commandant en chef décide de sa recevabilité", la commission demande depuis 1987 au gouvernement de communiquer le texte des dispositions fixant la durée des engagements de service et la définition des critères et délais à satisfaire pour qu'une demande de démission soit recevable, en cas d'état de siège, en incluant les textes des règlements ou instructions applicables.

La commission constate qu'une fois de plus le rapport du gouvernement ne contient pas les informations demandées et elle exprime l'espoir qu'il les communiquera dans son prochain rapport, pour lui permettre de juger du respect de la convention sur ce point.

Observation (CEACR) - adoptée 1994, publiée 81ème session CIT (1994)

Article 2, paragraphe 2 c), de la convention. La commission se réfère depuis vingt ans à l'article 39 de la loi no 210 de 1970 sur le régime pénitentiaire, qui est contraire à cette disposition de la convention du fait qu'il dispose que "le travail est obligatoire pour le prisonnier", l'article 10 de cette loi définissant le prisonnier non seulement comme la personne condamnée, mais aussi comme celle faisant l'objet d'une mesure de sécurité dans un établissement carcéral.

Depuis 1977, le gouvernement fait état d'un projet de loi tendant à modifier l'article 39 de la loi no 210 et il indique dans son plus récent rapport que ce projet n'a toujours pas été adopté.

La commission rappelle une fois de plus que la convention dispose que le travail ne peut être imposé qu'aux prisonniers condamnés, les prisonniers en attente de jugement ou les personnes détenues sans avoir été jugées ne devant travailler que si elles le désirent, sur une base strictement volontaire (paragraphe 90 de l'Etude d'ensemble sur l'abolition du travail forcé).

La commission souhaite que le gouvernement prenne sans délai les mesures nécessaires pour assurer le respect de la convention sur ce point, qui fait l'objet de ses commentaires depuis de nombreuses années.

[Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé pour la période se terminant le 30 juin 1994.]

Demande directe (CEACR) - adoptée 1993, publiée 80ème session CIT (1993)

Dans sa demande directe antérieure, la commission avait noté que, en vertu de l'article 68 de la loi no 847 du 19 décembre 1980 portant statut du personnel militaire, il est donné suite à une demande de quitter le service, sauf dans les cas suivants: a) lorsque la période d'engagement de l'intéressé n'est pas achevée; b) en état de guerre; c) en état d'urgence nationale; d) en état de siège, auquel cas il appartient au commandant en chef de rendre sa décision; et) lorsque l'intéressé purge une peine ou est assujetti à une sanction disciplinaire; f) s'il fait l'objet d'un procès.

La commission avait prié le gouvernement de fournir le texte des dispositions établissant la durée possible d'une période d'engagement. Se référant au cas visé à l'article 68 d) susvisé, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur les critères et délais à respecter par le commandant en chef en décidant d'une demande de démission, y compris le texte de tous règlements ou instructions applicables.

Etant donné qu'une fois de plus le rapport du gouvernement ne contient pas l'information demandée, la commission espère que celle-ci sera communiquée dans le prochain rapport.

Observation (CEACR) - adoptée 1993, publiée 80ème session CIT (1993)

Article 2, paragraphe 2 c), de la convention. Dans ses commentaires formulés depuis de nombreuses années, la commission a noté que l'article 39 de la loi no 210 de 1970 sur le régime pénitentiaire est contraire à la convention puisqu'il déclare que "le travail sera obligatoire pour le détenu", alors que l'article 10 de la même loi qualifie de détenu non seulement la personne condamnée, mais aussi celle qui est soumise à des mesures de sécurité dans un établissement pénitentiaire.

La commission avait pris note du projet de loi, élaboré en 1977, tendant à modifier cet article, aux termes duquel seront exemptés de l'obligation de travailler les détenus qui n'ont pas fait l'objet d'une condamnation et les condamnés pour délits politiques qui n'ont pas été reconnus coupables d'actes de violence.

La commission note les indications données par le gouvernement dans son rapport, selon lesquelles ce projet n'a pas encore été adopté.

Elle espère que le gouvernement prendra sans tarder les mesures voulues pour assurer le respect de la convention sur ce point et qu'il fournira, dans son prochain rapport, des informations sur les progrès accomplis dans ce sens.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1992, publiée 79ème session CIT (1992)

Dans sa demande directe antérieure, la commission avait noté que, en vertu de l'article 68 de la loi no 847 du 19 décembre 1980 portant statut du personnel militaire, il est donné suite à une demande de quitter le service, sauf dans les cas suivants: a) lorsque la période d'engagement de l'intéressé n'est pas achevée; b) en état de guerre; c) en état d'urgence nationale; d) en état de siège, auquel cas il appartient au commandant en chef de rendre sa décision; e) lorsque l'intéressé purge une peine ou est assujetti à une sanction disciplinaire; f) s'il fait l'objet d'un procès.

La commission avait prié le gouvernement de fournir le texte des dispositions établissant la durée possible d'une période d'engagement. Se référant au cas visé à l'article 68 d) susvisé, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur les critères et délais à respecter par le commandant en chef en décidant d'une demande de démission, y compris le texte de tous règlements ou instructions applicables.

Etant donné qu'une fois de plus le rapport du gouvernement ne contient pas l'information demandée, la commission espère que celle-ci sera communiquée dans le prochain rapport.

Observation (CEACR) - adoptée 1992, publiée 79ème session CIT (1992)

Article 2, paragraphe 2 c), de la convention. Dans ses commentaires formulés depuis de nombreuses années, la commission avait noté que l'article 39 de la loi no 210 de 1970 sur le régime pénitentiaire est contraire à la convention puisqu'il déclare que "le travail sera obligatoire pour le détenu", alors que l'article 10 de la même loi qualifie de détenu non seulement la personne condamnée, mais aussi celle qui est soumise à des mesures de sécurité dans un établissement pénitentiaire.

La commission avait pris note du projet de loi, élaboré en 1977, tendant à modifier cet article, aux termes duquel seront exemptés de l'obligation de travailler les détenus qui n'ont pas fait l'objet d'une condamnation et les condamnés pour délits politiques qui n'ont pas été reconnus coupables d'actes de violence.

La commission note les indications données par le gouvernement dans son rapport, selon lesquelles ce projet n'a pas encore été adopté.

Elle espère que le gouvernement prendra sans tarder les mesures voulues pour assurer le respect de la convention sur ce point et qu'il l'informera, dans son prochain rapport, des progrès accomplis dans ce sens.

[Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé pour la période se terminant le 30 juin 1992.]

Demande directe (CEACR) - adoptée 1990, publiée 77ème session CIT (1990)

Dans sa demande directe antérieure, la commission avait noté que, en vertu de l'article 68 de la loi no 847 du 19 décembre 1980 portant statut du personnel militaire, il est donné suite à une demande de quitter le service, sauf dans les cas suivants: a) lorsque la période d'engagement de l'intéressé n'est pas achevée; b) en état de guerre; c) en état d'urgence nationale; d) en état de siège, auquel cas il appartient au commandant en chef de rendre sa décision; e) lorsque l'intéressé purge une peine ou est assujetti à une sanction disciplinaire; f) s'il fait l'objet de poursuites.

La commission avait prié le gouvernement de fournir le texte des dispositions établissant la durée possible d'une période d'engagement. Se référant au cas visé à l'article 68 d) susvisé, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur les critères et délais à respecter par le commandant en chef en décidant d'une demande de démission, y compris le texte de tous règlements ou instructions applicables.

Etant donné que le rapport du gouvernement ne contient pas l'information demandée, la commission espère que celle-ci sera communiquée dans le prochain rapport.

Observation (CEACR) - adoptée 1990, publiée 77ème session CIT (1990)

Article 2, paragraphe 2 c), de la convention. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait signalé que l'article 39 de la loi no 210 de 1970 sur le régime pénitentiaire est contraire à la convention puisqu'il déclare que "le travail sera obligatoire pour le détenu", alors que l'article 10 de la même loi qualifie de détenu non seulement la personne condamnée mais aussi celle qui est soumise à des mesures de sécurité dans un établissement pénitentiaire.

La commission a pris note du projet de loi tendant à modifier cet article, aux termes duquel seront exemptés de l'obligation de travailler les détenus qui n'ont pas fait l'objet d'une condamnation et les condamnés pour délits politiques qui n'ont pas été reconnus coupables d'actes de violence.

La commission note les indications données par le gouvernement dans son rapport, selon lesquelles ce projet n'a pas encore été adopté. Elle espère qu'il le sera le plus rapidement possible, de façon que la législation nationale soit mise en conformité avec la convention sur ce point.

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