National Legislation on Labour and Social Rights
Global database on occupational safety and health legislation
Employment protection legislation database
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Informations écrites fournies par le gouvernement
En référence à votre lettre jointe à la liste préliminaire des cas individuels qui seront examinés à la 108e session de la Conférence internationale du Travail, dont le cas de l’application par l’Egypte de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
J’ai l’honneur de vous informer des mesures prises par le gouvernement pour donner suite aux commentaires formulés par la commission d’experts, en particulier après l’adoption de la nouvelle loi sur les syndicats et la tenue d’élections syndicales.
Premièrement: en ce qui concerne la réduction du nombre minimum requis de travailleurs pour constituer un syndicat et l’abolition des peines de prison imposées en cas d’infractions, nous avons soumis ces commentaires au Conseil supérieur du dialogue social, qui a approuvé la modification de la loi et en a informé le Conseil des ministres, le 22 mai 2019. Le Conseil des ministres a approuvé un projet de loi portant modification de certaines dispositions de la loi sur les syndicats et l’a communiqué au Parlement. Les modifications sont notamment les suivantes:
a) Réduction de 150 à 50 du nombre requis de travailleurs pour constituer un comité syndical; de 15 à 10 du nombre requis de comités syndicaux pour constituer un syndicat général; de 10 à 7 du nombre requis de syndicats généraux pour constituer une fédération; de 20 000 à 15 000 du nombre requis de travailleurs pour constituer un syndicat général; et de 200 000 à 150 000 du nombre requis de travailleurs pour constituer une fédération. Il convient de noter que, la population active en Egypte étant de plus de 30 millions de personnes, l’application de ces dispositions ne représente aucune difficulté dans la pratique.
b) Abolition des peines de prison prévues par la loi. La loi a été modifiée par le gouvernement pour remplacer les peines de prison par des amendes.
Deuxièmement: la commission d’experts souligne l’importance de garantir l’égalité de chances à toutes les organisations syndicales dans la nouvelle loi et dans la pratique, compte tenu en particulier du fait que, pendant longtemps, l’ancienne loi a imposé dans le système un monopole syndical.
– Le gouvernement affirme que la loi garantit l’égalité de traitement à toutes les organisations syndicales, en les mettant sur le même pied par le biais de processus de réconciliation et en leur accordant un statut juridique égal en ce qui concerne l’ensemble des droits, obligations, immunités et privilèges nécessaires pour exercer leurs activités syndicales.
– Dans la pratique, le gouvernement garantit l’égalité de traitement à toutes les organisations syndicales. Les anciens syndicats sont les plus représentatifs des travailleurs, et les syndicats modernes ont été admis au Conseil suprême du dialogue social. Le ministère de la Main-d’œuvre les invite à participer à tous les événements et activités organisés par des travailleurs, à assister aux réunions axées sur l’élaboration de plans nationaux dans le domaine du travail et à participer aux commémorations liées au travail telles que la Fête du travail, les jours fériés et les événements nationaux. Le ministère leur fournit aussi si nécessaire le soutien technique voulu.
– Le gouvernement se soucie tout particulièrement des organisations syndicales qui ne sont pas affiliées à la Fédération des syndicats égyptiens (ETUF) afin de promouvoir la culture de la liberté syndicale et d’assurer tous les travailleurs du fait que le gouvernement traite toutes les organisations de travailleurs sur un pied d’égalité et développe la confiance entre lui et les organisations syndicales.
– Les organisations syndicales modernes font partie de la délégation égyptienne officielle à la 108e session de la Conférence internationale du Travail.
Troisièmement: en ce qui concerne les communications que la commission a reçues de certaines organisations de travailleurs qui font état entre autres de la privation de la pratique des activités syndicales et de pressions exercées pour adhérer à l’ETUF, le gouvernement réaffirme que ces allégations ne sont pas précises et ne se fondent sur aucune preuve. Le gouvernement a invité ces organisations à donner des informations plus détaillées au sujet des questions qui les préoccupent afin que le ministère puisse les examiner et y apporter une solution, ce qui a été le cas pour certaines de ces questions. Toutefois, beaucoup de ces organisations ne l’ont pas fait à ce jour, et le ministère continue à les inviter à fournir des informations.
– Le ministère de la Main-d’œuvre a invité le bureau de l’OIT au Caire à envoyer un représentant du Bureau pour qu’il assiste aux réunions du ministère avec les organisations de travailleurs et leur fournisse l’appui technique nécessaire.
– Enfin, veuillez noter que le ministère de la Main-d’œuvre a mis en place un comité indépendant pour examiner les plaintes déposées par des organisations syndicales ou par des travailleurs qui souhaitent créer des organisations syndicales. Le ministère fait bon accueil aux commentaires ou communications qu’il reçoit et est pleinement disposé à les examiner en présence de représentants du bureau de l’OIT au Caire. Le ministère se félicite également de la poursuite du dialogue et de la coopération technique entre lui et le Bureau dans le but d’obtenir les meilleurs résultats.
Discussion par la commission
Représentant gouvernemental – Le gouvernement égyptien a toujours accueilli favorablement les propositions visant à modifier nos méthodes de travail à la lumière du document D.1. Néanmoins, nous espérons que de plus vastes modifications seront encore apportées. Nous avons déjà soulevé ce point à plusieurs occasions, entre autres points, car nous souhaitons parvenir à une meilleure équité et à une plus grande transparence pour améliorer encore les travaux du BIT. Ces propositions concernent, entre autres, les critères appliqués pour élaborer la liste des cas individuels. Selon nous, ces critères sont encore très ambigus et inéquitables. Nous souscrivons aussi à la nouvelle proposition de souligner les cas de progrès, entre autres propositions actuellement examinées.
Permettez-moi de vous dire que l’Egypte est l’un des plus anciens Membres de l’Organisation. Nous avons rejoint l’OIT en 1936. L’Egypte a ratifié 64 conventions du travail, dont les conventions fondamentales, et nous nous sommes toujours efforcés de présenter les rapports périodiques en temps voulu.
Les autorités politiques égyptiennes ont toujours fait fond sur les normes internationales du travail dans tous les domaines, notamment ceux de la santé et du travail pour ne citer que ceux-ci, nous ne comprenons donc pas très bien pourquoi l’Egypte figure sur cette liste; nous saisissons néanmoins cette occasion pour présenter quelques exemples des progrès que l’Egypte a accomplis dans l’application de la convention no 87.
La présente commission a déjà examiné le cas de l’Egypte et nous avons tenu compte de ses recommandations. Nous nous sommes employés à réviser notre législation dans ce domaine jusqu’en 2011, période à laquelle notre région est entrée dans une phase d’instabilité qui nous a contraints d’interrompre nos travaux. Nous avons malgré tout entamé l’élaboration d’un nouveau Code du travail, et un projet de nouveau Code du travail a vu le jour en avril 2017. Depuis lors, le BIT nous fournit une assistance technique. En effet, nous lui avons présenté le projet de nouveau Code du travail qui a donné lieu à des commentaires de sa part. Le texte a ensuite été révisé en tenant compte de ces commentaires, parce que l’Egypte a toujours respecté les conventions internationales du travail et qu’elle s’est toujours efforcée de veiller à l’application de toutes les conventions qu’elle a ratifiées. La nouvelle loi a été promulguée en 2017. Après de longues discussions avec le BIT, nous avons rencontré un représentant de l’Organisation à plusieurs reprises. La loi a été promulguée en 2017 et c’est alors que des manifestations ont été organisées pour protester contre cette loi. Celle-ci autorise l’existence de toutes les organisations syndicales, qu’elles soient nouvelles ou anciennes et qu’elles soient ou non conformes à la précédente loi; et ce parce que le gouvernement égyptien tient réellement à mettre en place une loi sur les syndicats qui protège tous les travailleurs et toutes les organisations syndicales afin de leur assurer le plein exercice du droit d’organisation.
Deuxièmement, nous avons promulgué la loi sur les élections syndicales. Les syndicats attendaient cette loi depuis plus de douze ans. Pourtant, le gouvernement égyptien a fait l’objet d’attaques par des organisations qui n’avaient rien à voir avec l’activité syndicale. Nous avons essayé à plusieurs reprises de déterminer les causes de ces accusations et de ces attaques. Certaines entités soutiennent qu’elles ont constitué un syndicat avec plus de 7 000 affiliés et que, bien qu’elles aient présenté à plusieurs reprises les documents nécessaires, elles n’ont toujours pas pu établir un seul comité syndical. L’entité dont je veux parler a refusé de présenter les documents demandés, et la personne en question a simplement accusé le gouvernement et l’Etat égyptien de ne pas respecter les textes internationaux.
Permettez-moi de dire devant cette auguste assemblée que la nouvelle loi en place réglemente plus favorablement les syndicats. Cette loi permet l’établissement de syndicats indépendants et de comités syndicaux. Elle bénéficie à plusieurs syndicats et organisations apparentées. Plus de 75 syndicats sont désormais légaux, alors qu’ils ne l’étaient pas en vertu de la précédente loi. Ces organisations coopèrent maintenant avec le gouvernement, en présentant tous les documents nécessaires et en attestant du nombre réel de membres syndicaux affiliés. Le gouvernement reçoit encore des documents de différentes entités, et quiconque souhaite former un syndicat de n’importe quel type peut présenter ces documents. D’ailleurs, le mois dernier, un nouveau syndicat a été créé. Il s’agit d’un syndicat général qui a présenté les documents nécessaires à la mise en place de ses comités syndicaux. Le mois dernier, ce syndicat a été créé car il a suivi l’intégralité de la procédure. Il est donc manifeste que le gouvernement égyptien vient en aide aux organisations syndicales et il est aujourd’hui fermement résolu à permettre la formation de syndicats réels et indépendants. Depuis plusieurs années maintenant, nous agissons dans un esprit de transparence et de crédibilité. En ce qui concerne les accusations portées contre le gouvernement, je laisserai à ceux qui les ont portées le soin de présenter les éléments qui ont motivé ces accusations. Selon les dires, la loi contient certains paragraphes susceptibles de restreindre les activités syndicales. Les dispositions en question ont été soumises au Conseil suprême et un groupe tripartite a été récemment formé pour examiner les différents amendements proposés. Le groupe tripartite a déjà présenté ses recommandations au Comité suprême pour le dialogue social récemment créé, et ses recommandations ont été approuvées en mai 2019. Le Parlement a approuvé ces amendements le 9 juin 2019.
Passons maintenant à la question de l’égalité des chances entre toutes les organisations syndicales. Le nouveau Code du travail a été élaboré en tenant compte des observations formulées par la commission à l’occasion de la mission de contacts directs en Egypte. Tous les syndicats qui étaient conformes à la loi sont désormais traités de la même façon que les syndicats qui ne l’étaient pas. Tous les syndicats, quelle que soit la loi en vertu de laquelle ils ont été créés, sont traités de la même manière, et je peux confirmer que le gouvernement traite toutes les organisations syndicales égyptiennes sur un pied d’égalité.
Nous avons aussi des éléments qui prouvent que toutes les organisations syndicales ont participé de manière juste et équitable aux élections qui se sont tenues, et ce sans tenir compte de l’appartenance ou non des candidats à la Fédération des syndicats égyptiens (ETUF) ou à d’autres syndicats. Tous les syndicats sont toujours invités aux manifestations syndicales, quelle que soit la fédération à laquelle ils appartiennent. Il existe aujourd’hui un certain nombre de syndicats indépendants en Egypte qui ne font pas partie de l’ETUF. Cela étant dit, l’ETUF est encore aujourd’hui l’organisation de travailleurs la plus représentative, ce qui est conforme à la convention; et, bien qu’elle soit l’organisation majoritaire, nous invitons d’autres organisations, quelles que soient leur taille et leur affiliation, à toutes les manifestations syndicales.
Nous avons à cœur de prendre toute mesure qui nous permettra d’appliquer pleinement cette convention et tous les instruments internationaux. Nous sommes prêts à coopérer avec le BIT pour respecter les conclusions de la présente commission et apporter les changements qui garantiront le plein respect des conventions internationales. Nous ne cessons d’insister sur l’importance du dialogue social. Nous respectons ce principe et nous demandons à cette commission d’examiner le mécanisme de traitement des plaintes en vigueur, sans tenir compte de la partie qui présente la plainte. Cette plainte doit s’accompagner de preuves, car nous ne pouvons pas examiner de questions sur de simples allégations ou réclamations non justifiées.
Je souhaiterais aussi que l’on tienne compte des Etats qui déploient d’importants efforts. Peut-être devrions-nous parfois remercier ces pays. Je pense que chacun sait ce que le gouvernement égyptien a réalisé ces trois dernières années. Et vous n’ignorez pas non plus les mesures prises par l’Egypte, s’agissant de la loi sur le travail, au cours de la récente période.
Nous ne ménageons aucun effort pour garantir la pleine conformité de notre législation avec les instruments nationaux et internationaux. Le gouvernement égyptien est déterminé à respecter tous les instruments internationaux.
Membres travailleurs – Le cas de l’Egypte revient de nouveau devant notre commission. Vous vous souviendrez que nous l’avons examiné lors de notre avant-dernière session et nous avons adopté à ce moment-là des conclusions très claires. Le fait que ce cas revienne à nouveau signifie qu’entre-temps la situation ne s’est malheureusement guère améliorée.
Certes, comme cela vient d’être mentionné par le gouvernement dans son discours, une nouvelle loi encadrant l’activité syndicale a été adoptée. Des modifications ont encore été proposées la semaine passée, soit après que l’Egypte a été placée sur la liste préliminaire. Pour ceux qui en douteraient encore, cela constitue une preuve évidente de l’efficacité des mécanismes de supervision de l’OIT. Manifestement, la perspective que le cas soit examiné par notre commission suscite l’enthousiasme et redouble les ardeurs. Malgré l’adoption de cette nouvelle loi, la législation égyptienne demeure incompatible avec la convention no 87. Cette non-conformité se vérifie sur plusieurs aspects, que nous allons détailler maintenant.
D’abord, sur le plan général, la nouvelle loi portant le numéro 213 se caractérise par une forte volonté d’organiser en détail tous les aspects de l’organisation syndicale. Une législation aussi détaillée n’est pas conforme à l’article 3 de la convention qui prévoit que «les organisations de travailleurs et d’employeurs ont le droit d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d’élire librement leurs représentants, d’organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leur programme d’action». Cet article précise également que les autorités publiques doivent s’abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l’exercice légal.
Sans être exhaustif, je me permets de citer à ce stade plusieurs dispositions qui illustrent cette incompatibilité. Commençons par l’article 5 de la loi qui prévoit qu’une organisation syndicale ne peut être fondée sur une base religieuse, idéologique, politique, partisane ou ethnique. Cette exigence va à l’encontre de l’article 2 de la convention qui garantit aux travailleurs le droit de constituer les organisations de leur choix. La liberté de choix implique de pouvoir fonder une organisation sur la base de l’un de ces critères et le droit des travailleurs de donner à leurs organisations l’orientation qu’ils souhaitent. Si toutes les organisations devaient suivre une seule et unique ligne sans aucune distinction, ce serait le règne de la pensée unique et l’absence de tout pluralisme syndical. Le fait qu’une organisation se donne une orientation bien précise ne signifie nullement qu’elle peut discriminer ses membres sur cette base. Elle affirme uniquement son identité et se distingue ainsi des autres organisations.
L’article 7 de la loi donne au ministre le droit de saisir le tribunal compétent en vue de dissoudre le conseil d’administration d’une organisation en cas de faute grave dans la gestion administrative ou financière. Ce faisant, la loi donne aux autorités le droit de contrôler la gestion des organisations, ce qui va à l’encontre de l’article 3 de la convention qui leur garantit le droit de gérer librement leurs activités. Si des erreurs ou des fautes graves devaient être commises, c’est aux seuls affiliés qu’il appartient de saisir la justice pour engager la responsabilité des administrateurs, pour peu bien évidemment qu’ils aient commis quelque chose de répréhensible.
Dans le même ordre d’idées, l’article 58 qui soumet la comptabilité des organisations à un contrôle de l’organe central de la comptabilité aussi représente une ingérence dans leur gestion. En effet, l’organe est une institution publique qui à la base est principalement chargée de contrôler les comptes publics, c’est-à-dire des organismes qui gèrent les deniers publics. On ne voit pas en quoi cet organe est habilité à contrôler la comptabilité des organisations syndicales qui ne gèrent pas de l’argent public. Rappelons à cet égard que la commission d’experts a eu l’occasion de préciser que le fait d’imposer un contrôle financier de la comptabilité par les autorités publiques n’est pas conforme à la convention.
L’article 41 de la loi prévoit une série de conditions d’éligibilité pour les dirigeants syndicaux. A nouveau, nous sommes contraints de constater que cette disposition ne respecte pas l’article 2 de la convention. Le fait, par exemple, d’exiger que le candidat au conseil d’administration doive disposer d’un diplôme, ne soit pas en congé sans solde ou ne soit pas un travailleur intérimaire constitue une ingérence dans la liberté d’élection des travailleurs.
J’attire particulièrement l’attention sur la condition relative à la réalisation du service militaire. En effet, étant donné que celui-ci ne s’applique qu’aux nationaux, cette condition implique de facto que les migrants ne peuvent pas prétendre aux fonctions de dirigeants syndicaux, ce qui à ce titre est également incompatible avec la convention, comme la commission d’experts a eu l’occasion de le rappeler à plusieurs reprises.
Nous observons par ailleurs que l’article 30 contient des dispositions très détaillées sur les compétences du conseil d’administration. L’article 35 décrit également de manière minutieuse la procédure d’élection des assemblées générales. Ces deux éléments sont des illustrations importantes de l’ingérence systématique des autorités qui fixent par voie législative l’essentiel du fonctionnement des organisations syndicales.
Certes, l’article 65 de la loi leur donne une autonomie quant au droit de rédiger leurs statuts et d’élire leurs représentants. Mais que reste-t-il de cette autonomie lorsque tous ces aspects sont réglés par la loi? Il en résulte que cette pseudo-garantie est en réalité tout à fait illusoire.
La commission d’experts relève dans son rapport que la législation prévoit toujours une limitation du droit de s’affilier à plusieurs syndicats. Contrairement à ce que prétend le gouvernement, cette disposition existe toujours dans la législation, puisqu’elle est reprise à l’article 21 de la nouvelle loi.
La commission d’experts dans son rapport a pointé le problème persistant que constitue le seuil de représentativité dans la législation égyptienne. La loi que j’ai commentée ici ne prévoit pas de modification à ce propos. Nous regrettons que ce point n’ait pas été solutionné lors de l’adoption de la loi no 213 alors que le gouvernement sait pertinemment que les exigences qu’il formule ne sont pas compatibles avec la convention. Nous apprenons néanmoins que des modifications sont actuellement en discussion sur ce point au sein du Parlement. Nous examinerons dans quelle mesure ces adaptations verront le jour ainsi que leur degré de conformité avec la convention.
La commission d’experts a par ailleurs relevé que la législation nationale prévoit toujours des peines d’emprisonnement et d’amendes pour une série d’infractions à la loi. Les modifications qui sont actuellement en discussion au Parlement semblent vouloir supprimer les peines d’emprisonnement, mais en aggravant néanmoins les peines d’amendes. Toutefois, il convient de rappeler que cela constitue également une peine pénale. Le fait de vouloir les aggraver illustre que l’intention est de retirer d’une main ce qu’on donne de l’autre. L’examen détaillé des dispositions dont le non-respect entraîne ces sanctions montre la volonté des autorités de mettre en place un arsenal visant à limiter la liberté syndicale.
A titre d’exemple, le non-respect de l’article 5 que j’ai déjà évoqué et qui concerne la constitution d’un syndicat sur une base politique, religieuse ou partisane est sanctionné pénalement. Il en va de même du non-respect de la procédure d’exclusion d’un membre du conseil d’administration qui donne lieu à une sanction pénale. Cette matière relève pourtant purement et simplement de l’autonomie syndicale.
Citons enfin l’article de la loi relatif aux moyens financiers des organisations. Cette disposition énumère une série de sources de financement et criminalise tout ce qui n’en relève pas. Or le principe est que tout est licite, sauf ce qui est interdit. La loi inverse ce principe en énumérant ce qui est permis, et tout ce qui n’est pas mentionné est par définition interdit et même criminalisé.
Notre commission n’est pas seulement chargée de vérifier la conformité des législations aux conventions, mais aussi d’examiner la conformité dans la pratique. A cet égard, nous devons constater que, comme le note la commission d’experts, de nombreux problèmes continuent à se poser. C’est ainsi que, dans le cadre de la mise en œuvre de la nouvelle loi, des élections syndicales ont eu lieu. Celles-ci furent malheureusement émaillées de nombreuses irrégularités.
En effet, malgré toutes ces imperfections, la nouvelle loi n’est pas correctement appliquée. Plusieurs organisations syndicales ne sont toujours pas enregistrées, soi-disant parce que leur dossier serait incomplet. En réalité, les autorités continuent dans les faits de faire preuve d’arbitraire dans l’enregistrement des organisations syndicales. Elles refusent de rencontrer les 29 organisations qui ont déposé plainte. D’autres collègues du groupe des travailleurs auront l’occasion d’y revenir en détails.
Avant de clore mon propos, force est de constater qu’en Egypte, que ce soit sur le plan légal et, comme nous le verrons également, sur le plan pratique, la situation reste encore éloignée des normes de l’OIT.
La nouvelle loi que nous avons commentée ici s’intitule «loi sur les organisations syndicales et sur la protection du droit syndical». En réalité, une appellation plus précise voudrait qu’on ajoute à cet intitulé «loi organisant la tutelle sur les organisations syndicales et entravant le droit syndical».
Or le but de l’Etat ne peut pas être de confisquer la liberté syndicale ou de la soumettre à une tutelle. Sa mission est au contraire de préserver et de développer les libertés fondamentales.
A cet égard, je souhaiterais partager avec vous une réflexion du philosophe Spinoza qui écrivait que «la fin de l’Etat n’est pas de faire passer les hommes de la condition d’êtres raisonnables à celle d’animaux ou d’automates. Au contraire, le but de l’Etat est de faire en sorte que les citoyens développent leur corps et leur esprit, fassent librement usage de leur raison pour qu’ils ne rivalisent pas entre eux de haine, de colère ou de ruse, pour qu’ils se supportent sans malveillance les uns les autres. La fin de l’Etat est donc en réalité la liberté.»
Membres employeurs – Je remercie le représentant gouvernemental pour sa présentation, et je suis particulièrement satisfaite d’entendre le gouvernement dire devant cette commission qu’il cherche à respecter pleinement les normes internationales du travail. Il est satisfaisant d’entendre le gouvernement dire qu’il est prêt à accepter les conclusions de la commission afin de garantir le plein respect des normes internationales du travail, et il est particulièrement satisfaisant de l’entendre réaffirmer son engagement à l’égard du dialogue social. C’est une façon très positive d’entamer cette conversation, et nous accueillons favorablement ces commentaires introductifs. Le cas de l’Egypte a été examiné pour la dernière fois par notre commission en 2017 et celle-ci avait alors appelé le gouvernement à accepter une mission de contacts directs. Cette mission avait pour objectif d’évaluer les progrès accomplis à la lumière des conclusions de la commission, lesquelles demandaient que le projet de loi sur les syndicats soit élaboré en conformité avec la convention no 87 et que tous les syndicats en Egypte puissent exercer leurs activités et élire leurs bureaux comme le prévoit la convention et fonctionner conformément à l’esprit de celle-ci, tant en droit que dans la pratique.
Le groupe des employeurs note avec satisfaction que la mission de contacts directs a eu lieu en novembre 2017 et qu’un certain nombre de recommandations ont été formulées à cette occasion. Nous notons également que le BIT a lancé en Egypte en juin 2017 un programme pilote intitulé «Better Work» qui a pour vocation de mettre en place par la suite la version complète de ce programme, pour autant que les conditions soient réunies, et cela n’était pas encore le cas en mars 2019 d’après ce que nous comprenons.
Le groupe des employeurs prend note des efforts positifs déployés par le gouvernement, en particulier ceux visant à promouvoir un environnement durablement propice aux entreprises, et il est encourageant de constater de tels efforts et progrès. Le groupe des employeurs invite le gouvernement à poursuivre le dialogue social à cet égard ainsi que ses efforts pour instaurer un environnement durablement propice aux entreprises, avec la coopération des partenaires sociaux.
Le groupe des employeurs doit néanmoins relever que, selon les observations de la commission d’experts, certains problèmes persistent en Egypte. Nous croyons comprendre qu’il est question en particulier du respect des obligations du gouvernement découlant de la convention, d’une part, et, d’autre part, du cadre législatif national qui réglemente les organisations syndicales en Egypte. Le groupe des employeurs croit aussi comprendre que la nouvelle loi sur les syndicats, adoptée en décembre 2017, suscite des préoccupations quant à sa compatibilité avec les obligations du gouvernement découlant de la convention.
La commission d’experts a fait part de ses préoccupations face aux obstacles que pose la nouvelle loi sur les syndicats à l’enregistrement de syndicats indépendants ou autonomes qui n’appartiennent pas à l’ETUF. Ces préoccupations ont été suscitées, entre autres, par des allégations indiquant l’impossibilité, pour certains syndicats, de s’enregistrer et d’élire leurs comités, des demandes injustifiées de documentation pour l’enregistrement, et des reports dans l’acceptation des demandes d’enregistrement et des retards dans la délivrance des certificats.
Le porte-parole du groupe des travailleurs a décrit dans les moindres détails les restrictions que ce groupe considère comme une ingérence dans le libre fonctionnement des syndicats. Le groupe des employeurs note avec intérêt que le gouvernement fait part de son intention d’établir cette nouvelle loi en l’adaptant aux prescriptions de la convention en matière d’enregistrement et d’élections.
Le groupe des employeurs souhaiterait donc rappeler à ce stade que, en vertu de la convention, les organisations de travailleurs et d’employeurs sont libres de constituer les organisations de leur choix et de s’y affilier, et la question dont nous sommes saisis aujourd’hui porte essentiellement sur la nécessité, pour le gouvernement, de respecter la liberté et l’autonomie des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités.
Le groupe des employeurs demande donc au gouvernement d’examiner attentivement ces questions importantes et de prendre sans délai des mesures pour réviser la loi sur les syndicats, entre autres, afin de régler immédiatement ces questions et de se pencher sur la réglementation indue des affaires et de l’organisation internes des syndicats. Nous demandons au gouvernement de faire état, à la session de 2019 de la commission d’experts, des progrès accomplis au regard de ces mesures.
Pour nous, c’est essentiellement cette question qu’il conviendra d’examiner entre toutes celles soulevées par la commission d’experts concernant le projet de Code du travail. Le groupe des employeurs ne se penchera pas sur l’interdiction des actions collectives puisque, selon nous, cette question ne relève pas des quatre points que nous devons examiner concernant ce cas.
Pour terminer, nous insistons sur la détermination du gouvernement à entretenir un dialogue social, à garantir le plein respect des obligations découlant de la convention et à régler les quelques questions qui font que notre commission constate toujours l’absence de conformité pleine et entière avec la convention. Nous attendons avec intérêt d’observer les progrès à cet égard ainsi que d’avoir toutes les informations concernant ces mesures.
Membre travailleur, Egypte – Nous remercions le BIT et la commission de l’intérêt qu’ils portent à la situation des travailleurs égyptiens et à la nécessité de leur garantir l’exercice de leurs droits syndicaux. Nous aurions préféré que les travailleurs égyptiens soient encouragés plutôt que de voir le cas de l’Egypte inscrit sur la liste des cas examinés par la commission cette année. Nous sommes membres de l’organisation la plus représentative de travailleurs, l’ETUF, et nous croyons fermement en la liberté syndicale. Les travailleurs sont les réels bénéficiaires de la nouvelle loi égyptienne sur les syndicats en ce que celle-ci est plus favorable aux syndicats que ne l’était la loi no 35 de 1976. Nous avons tous pâti de la loi no 35, en vertu de laquelle nous étions tous sous la tutelle de la fédération générale. La nouvelle loi a amélioré la situation des syndicats et nous pouvons désormais œuvrer pour assurer la liberté syndicale et l’application des conventions de l’OIT. Nous estimons que les travailleurs ont le droit à leur propre sécurité et le droit de se retirer des fédérations, dans le respect des normes de l’OIT dans la pratique. C’est notre organisation qui a demandé en premier lieu la modification de la loi no 35 de 1976, sur la base des observations de 2008. Nous pouvons retrouver ces faits dans le Compte rendu des travaux de la session de la commission de cette année-là. C’est nous qui avons demandé la modification de cette loi. La liberté syndicale a un rôle fondamental à jouer, en ce que c’est l’assurance que les investissements réalisés profiteront à notre pays et créeront de nouvelles opportunités d’emploi pour les travailleurs égyptiens. Dans ses conclusions sur l’Egypte, la commission d’experts fait part de ses préoccupations quant à l’entrave que constitue la nouvelle loi pour la constitution et l’enregistrement de nouveaux syndicats et indique que cette nouvelle loi n’est pas conforme à la convention. Pourtant, si l’on parle de restrictions à la liberté syndicale, il faut rappeler que le niveau de représentation a largement augmenté en 2017 par rapport à celui de 2008, cela démontrant clairement la conformité de la situation avec la convention, depuis la promulgation de la loi de 2017. La situation des syndicats s’est considérablement améliorée par rapport à celle qui prévalait avec la loi no 35 de 1976, puisque celle-ci conférait la représentativité aux organisations émanant des autorités. La loi a été modifiée en 2008 et la nouvelle loi est bien plus favorable aux syndicats que ne l’était la précédente. La nouvelle loi permet l’existence de syndicats à tous les niveaux. Elle permet aussi aux syndicats de présenter leurs listes et leurs statuts lors de leurs assemblées ainsi que d’organiser des élections libres sans aucune intervention de l’administration ni d’une représentation de haut niveau, ce qui a réglé les problèmes que posait la précédente législation. La nouvelle loi érige en délit l’exclusion de tout responsable par des moyens illégaux. Il existe une réelle liberté de s’affilier à un syndicat. Plusieurs articles prévoient l’enregistrement des syndicats par l’intermédiaire du Conseil suprême dans toutes les provinces, ce processus ayant été accepté par les travailleurs et approuvé par le gouvernement. Ces articles ont été renvoyés devant le Parlement et font actuellement l’objet d’un examen. Cela a également été accepté par la Commission du travail. Concernant les observations sur la loi du travail, un dialogue a eu cours et une nouvelle loi a été acceptée par le Conseil suprême. Les partenaires sociaux sont parvenus à un accord sur l’application pratique de la loi sur les syndicats. Il a aussi été décidé d’un commun accord d’organiser prochainement de nouvelles élections, ce qui permettra aux organisations syndicales qui n’ont pas été en mesure de régulariser leur situation jusque-là de le faire à l’avenir. Différents autres accords ont aussi été conclus. Une commission est en cours de mise en place pour traiter les plaintes relatives à la liberté syndicale. On peut donc conclure, au vu de ce qui précède et des résultats des dernières élections, que la situation s’est réellement améliorée avec la nouvelle loi: environ 1 500 nouveaux comités ont été constitués dont 145 n’auraient pas pu l’être en vertu de la loi no 35. De nouveaux syndicats ont été créés, en particulier dans les secteurs juridique et de la santé. Ceux-ci ont pu s’affiler à l’ETUF. Il en va de même pour une organisation du secteur du transport. Pour la liberté syndicale, c’est un nouveau chapitre qui s’ouvre. Pour ce qui est des fédérations, plusieurs fédérations ont été enregistrées, de nouvelles entités ont été créées sans aucune intervention des autorités et, dans certains cas, 80 pour cent des membres sont des femmes et des jeunes, ce qui témoigne d’une plus grande liberté dans tous les secteurs.
Nous estimons que les employeurs font preuve de coopération en faveur de la liberté syndicale, et cela nous donne l’assurance qu’employeurs et travailleurs parviendront à un accord qui permettra de réaliser tous les objectifs et de respecter les intérêts des uns et des autres; les travailleurs égyptiens pourront ainsi exercer leur droit et bénéficier de nouvelles opportunités d’emploi. Tout cela stimulera aussi l’économie, en conformité avec les deux conventions. Nous espérons que le BIT fournira une assistance technique pour nous aider à répondre aux attentes de tous les travailleurs égyptiens au travers de l’application des conventions. Nul doute qu’il s’agit là de signes très positifs. La nouvelle loi a apporté des modifications importantes, et d’autres modifications législatives sont encore à l’examen devant le Parlement. Par conséquent, nous espérons que cette commission prendra les mesures nécessaires et que les futures conclusions prendront en considération les progrès actuellement accomplis. Nous espérons également que l’Egypte sera retirée de la liste restreinte. Les travailleurs égyptiens sont les grands bénéficiaires de cette nouvelle loi. Nous convenons que certains articles pourraient être amendés en collaboration avec les employeurs. Cela nous aiderait à concrétiser ce que nous voulons pour les travailleurs égyptiens.
Membre employeur, Egypte – Je représente la Fédération des industries égyptiennes qui compte 60 000 employeurs. Nous sommes convaincus qu’une évolution très positive et progressive est en cours en matière de liberté syndicale. Et ce simplement parce que nous disposons désormais d’une nouvelle loi, cinquante ou soixante ans après la précédente. Cette loi est-elle parfaite? Pouvons-nous dire que nous avons en Egypte une liberté syndicale parfaite dans une situation parfaite? Evidemment non. La question est de savoir si nous sommes sur la bonne voie. Oui, assurément. Sommes-nous dans une situation très satisfaisante? Oui, mais nous avons évidemment tous besoin d’avancer main dans la main pour parvenir à notre objectif ultime et nous rapprocher d’une situation parfaite. A cet égard, nous saluons les efforts déployés par le ministre de la Main-d’œuvre pour mettre en place des mécanismes et des activités de dialogue social afin d’examiner et de négocier ensemble les nouveaux amendements.
Nous sommes aussi convaincus qu’il existe une volonté politique et une bonne volonté de la part des organisations d’employeurs. En quelques semaines, nous avons pu procéder à un nouvel examen législatif, ce qui signifie que, depuis deux ans, nous nous sommes attelés à la réglementation, et une nouvelle modification de la loi se trouve maintenant devant le Parlement égyptien, notamment pour faire suite à certaines recommandations de la commission d’experts.
Pourquoi sommes-nous dans cette situation? Simplement parce que nous ne pouvons pas passer brutalement d’un extrême à l’autre sans connaître une période de transition. C’est pourquoi nous pensons être sur la bonne voie. Après cinquante à soixante ans d’immobilisme, il est impossible de tout mettre en œuvre comme il faut depuis le début. Il est évident que toute nouvelle législation donne lieu à l’adhésion ou au rejet d’individus ou de parties. Grâce aux points de vue et aux recommandations de la commission d’experts, nous pouvons améliorer notre façon de faire. Encore une fois, il va de soi que nous ne sommes pas dans une situation parfaite. Nous nous efforçons d’améliorer la mise en œuvre des recommandations, et c’est pourquoi nous avons demandé à l’Organisation internationale des employeurs (OIE) de nous fournir l’appui technique nécessaire afin de mieux comprendre et mettre en œuvre correctement les recommandations de la commission d’experts.
Au lendemain de la révolution égyptienne, et suite à l’adoption de cette loi, nous sommes face à des défis politiques, sociaux et économiques. Nous avons besoin de temps pour trouver les solutions qui nous permettront de relever ces défis, faute de quoi nous connaîtrons le chaos. Les employeurs sont très satisfaits de la situation actuelle et, si nous n’avons pas encore atteint notre objectif ultime, nous sommes convaincus d’être sur la bonne voie.
Autre membre employeur, Egypte – Je n’ajouterai rien aux propos du représentant gouvernemental. Son intervention était complète. Mes collègues ont aussi fait de bonnes interventions, je vais donc brièvement exposer quelques idées.
La législation est l’expression de la Constitution, et la dernière Constitution de l’Egypte prévoit l’établissement de syndicats sans ingérence extérieure; par conséquent, une loi contraire à la Constitution doit être considérée comme nulle et non avenue. Ce principe est assez clair.
Quand le vice-président des travailleurs affirme que la loi prévoit qu’une organisation syndicale ne peut être fondée sur une base partisane, politique ou religieuse, la question que je me pose alors est de savoir si dans un secteur donné, le secteur de la production de pétrole par exemple, on pourrait disposer d’un syndicat pour les chrétiens, un autre pour les musulmans ou un syndicat appartenant à un parti politique ou à un autre. Selon moi, l’approche qui prévaut actuellement est rationnelle parce que les syndicats sont là pour servir les intérêts des travailleurs, non en tant que représentants d’un mouvement socialiste, capitaliste, musulman ou chrétien, ou de toute autre idéologie, mais en tant que syndicats de travailleurs. Nos syndicats ne peuvent donc être fondés sur de telles spécificités et il conviendrait de le reconnaître car ce serait, sinon, aller en dépit du bon sens.
Des peines de prison ont été évoquées. Là encore, c’est faire une interprétation contraire de la loi car, si des documents non conformes à la loi sont présentés, il est évident que la loi doit s’appliquer dans ce domaine.
En Egypte, la main-d’œuvre représente aujourd’hui 13 millions de personnes, 10 millions desquelles sont membres de syndicats. Dans le secteur informel, nous travaillons en collaboration avec la fédération des travailleurs et d’autres fédérations pour faire en sorte que les activités du secteur informel passent dans le secteur formel. Nous essayons de compter sur des organisations qui protègent les travailleurs et défendent leurs intérêts et non les intérêts des employeurs. Il se peut évidemment que les employeurs et les travailleurs aient parfois des avis contraires, mais les organisations en question protègent les intérêts des travailleurs. Si nous sommes en présence de 10 000 travailleurs avec cinq comités syndicaux différents et que chacun cherche à orienter les travailleurs, je ne pense pas que cela nous mène dans la bonne direction, alors que c’est le cas lorsqu’un seul comité syndical existe, mais c’est une autre question.
Sur la question des fonds publics, c’est la Cour des comptes qui supervise la gestion des fonds. Et l’objectif ici n’est pas de servir les intérêts du gouvernement, mais d’assurer un contrôle financier efficace. L’absence de contrôle risquerait d’entraîner une mauvaise utilisation des fonds, en toute infraction à la législation.
Les dispositions en question ont été établies pour servir les intérêts des membres des organisations syndicales. Il s’agit simplement d’un rapport comptable qui peut être présenté à la Cour des Comptes, lequel sert ensuite aux experts pour évaluer si les fonds servent effectivement les intérêts des travailleurs et des syndicats. Lorsqu’un comité est établi avec 100 ou 1 000 travailleurs qui paient leurs cotisations, cet argent doit être correctement géré. Il appartient au gouvernement de contrôler ces activités. Et il conviendrait de ne pas totalement les supprimer.
Membre gouvernementale, Sénégal – Le Sénégal salue les efforts entrepris par l’Egypte et présentés par le représentant de son gouvernement pour donner plein effet à la convention. Tout en réaffirmant son attachement aux idéaux et objectifs universels de l’OIT ainsi que la nécessité pour tout Etat Membre d’assurer le respect des droits et libertés syndicaux de tous les travailleurs, au sens de la convention, le Sénégal exhorte le gouvernement égyptien à poursuivre les progrès réalisés et les moyens importants déployés pour améliorer la situation de sa législation et de sa pratique nationales en matière de respect et de protection des droits syndicaux des travailleurs.
Le Sénégal invite le gouvernement égyptien à renforcer la coopération étroite avec le BIT en vue de donner plein effet à la convention.
Observatrice, Internationale des services publics (ISP) – Nous sommes très préoccupés par les conditions qu’impose la loi no 213 de 2017 sur l’organisation des syndicats et l’oppression qui règne depuis l’application de cette loi fin 2017. Nous saluons la décision du ministre d’adopter le projet de loi d’amendements proposé et qui doit encore être approuvé par le Parlement. Néanmoins, nous soutenons que ces amendements ne suffiront pas à corriger les déficiences ni à combler les insuffisances de la loi. Il s’agit là d’une évolution législative attendue de longue date qui confère aux syndicats indépendants le droit de s’organiser, mais cette loi étouffe encore une fois ce droit en imposant les mêmes ressorts de contrôle de l’Etat, menaçant ainsi l’existence même de syndicats indépendants puissants.
Les syndicats indépendants continuent de faire de réels efforts pour régulariser leur situation à la lumière des dispositions de la nouvelle loi, dans les délais qui leur sont impartis. Mais ces syndicats se heurtent à des pratiques répressives, en violation de la loi elle-même. Le gouvernement a refusé de régulariser de nombreuses organisations indépendantes (par exemple, Syndicat des services fiscaux pour l’immobilier, Syndicat des travailleurs de Telecom Egypt, Syndicat des travailleurs de la bibliothèque d’Alexandrie), n’a pas autorisé la mise en place de la plupart des syndicats indépendants créés après l’adoption de la loi (par exemple, Comité syndical des travailleurs de la société de confection de vêtements d’Alexandrie, Comité syndical des travailleurs de la société Leoni) et a aussi rejeté les statuts présentés par des syndicats, en forçant leurs membres à les remplacer par des directives émises par le ministère de la Main-d’œuvre.
Beaucoup de syndicats n’ont donc pas encore régularisé leur situation alors qu’ils remplissaient les conditions requises par la loi pour être enregistrés et qu’ils avaient présenté tous les documents nécessaires. La plupart de ces syndicats subissent des pressions récurrentes de différentes instances gouvernementales pour rejoindre les rangs de l’ETUF. Le droit fondamental des syndicats à régler leurs affaires et à élire librement leurs représentants est opprimé par le ministère de la Main-d’œuvre. Des instances gouvernementales interviennent dans différentes situations pour empêcher la tenue des assemblées générales des syndicats, et le ministère de la Main-d’œuvre refuse de reconnaître les décisions de l’assemblée générale, qu’il s’agisse de l’élection du conseil exécutif ou de décisions concernant d’autres questions. En conséquence de quoi le statut de beaucoup d’organisations syndicales est en suspens (par exemple, Comité syndical des pêcheurs de Damiette, Comité syndical des travailleurs de Suez et Comité syndical des services de transport à Qaluobia). Pourtant, ces six derniers mois, 29 organisations ont fait tout leur possible pour négocier avec le gouvernement. Elles se sont entretenues avec le ministère de la Main-d’œuvre, lui ont présenté leurs demandes et ont eu recours à différentes instances gouvernementales (Cabinet, ministère de l’Investissement et ministère du Commerce et de l’Industrie). Toutefois, ces entités n’avaient manifestement pas l’intention d’aller dans la même direction. En application de la nouvelle loi sur les syndicats, des élections syndicales ont eu lieu en 2018, mais il est difficile de savoir s’il s’agissait de véritables élections.
Membre gouvernementale, Zimbabwe – Le gouvernement du Zimbabwe tient à remercier le gouvernement égyptien d’avoir fait part à la commission des progrès actuellement accomplis pour combler les lacunes législatives relevées par la commission d’experts ainsi que des mesures pratiques faisant suite aux plaintes de certains syndicats qui concernaient le processus d’enregistrement des organisations de travailleurs. Il est satisfaisant de constater que la réforme de la législation du travail est en cours en Egypte. Il conviendrait donc de féliciter le gouvernement égyptien d’avoir présenté au Parlement égyptien, en mai 2019, un projet de loi visant à amender certaines dispositions de sa législation.
Le gouvernement égyptien a aussi fait part de son engagement à l’égard des organisations syndicales qui ont des difficultés à être enregistrées et à reconnaître les syndicats, tant en droit que dans la pratique. Ces engagements devraient aussi être salués, d’autant plus qu’ils sont sous le contrôle des fonctionnaires du bureau de l’OIT au Caire.
Enfin, nous appelons les fonctionnaires du BIT à continuer de collaborer avec le gouvernement égyptien et les syndicats de tous les secteurs. Le gouvernement égyptien a déclaré avec sincérité que les questions soulevées par la commission d’experts seraient réglées via un dialogue social.
Observateur, Confédération syndicale internationale (CSI) – Je tiens tout d’abord à indiquer que la Confédération syndicale arabe doit faire preuve de solidarité et défendre la liberté syndicale, et c’est pourquoi je prends la parole au nom de la Fédération syndicale démocratique égyptienne afin d’exposer les problèmes que rencontrent les militants syndicaux. La classe ouvrière fait face à de nombreux problèmes en Egypte, et c’est particulièrement vrai pour ceux qui sont affiliés à l’organisation syndicale démocratique égyptienne. Des mesures sont prises à notre encontre. Des fonctionnaires gouvernementaux qui travaillent avec le ministère du Travail entravent les activités syndicales, et ce même après l’approbation de la loi 2017 et son règlement d’application de 2018. Tout cela fait obstacle aux activités syndicales.
Notre syndicat émet des réserves en ce qui concerne cette loi. Malgré nos efforts pour parvenir à un accord acceptable pour toutes les parties, les représentants gouvernementaux ont finalement ignoré les amendements proposés, y compris en ce qui concerne le nombre minimum d’affiliés requis pour pouvoir constituer un syndicat ou un comité syndical.
Dans le préambule de la loi que j’ai déjà mentionnée, des dispositions prévoient l’indépendance des syndicats et nous pensions tous que la loi encouragerait l’indépendance des syndicats, leur conférerait un statut juridique particulier permettant à tout un chacun de s’y affilier ou de s’en retirer sans aucune intervention de l’administration. Malheureusement, dans la réalité, la situation est toute autre; le règlement du gouvernement a été élaboré de manière à mettre à mal les droits des travailleurs prévus par cette convention et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949. La loi est favorable aux travailleurs mais le règlement prime entièrement sur ses dispositions. Des interventions non écrites ont également eu lieu et, à l’évidence, cela transcende également l’effet de la nouvelle loi. Cette loi a aussi été violée à plusieurs reprises, par exemple par l’interprétation de l’article 24 qui permet aux fédérations syndicales créées en vertu de la précédente loi de conserver leur statut juridique.
Membre gouvernemental, Algérie – Le gouvernement égyptien nous a bien démontré qu’il avait la volonté politique d’appliquer les recommandations de la commission d’experts, de façon à ce que les lois soient mises en conformité avec les normes internationales en la matière.
La délégation algérienne a pris note des informations communiquées par l’Egypte de toutes les mesures qu’elle a adoptées et tient à exprimer sa satisfaction quant aux amendements proposés, notamment en matière de réduction du nombre de travailleurs requis pour former un comité syndical ou une fédération syndicale.
L’Algérie considère aussi qu’une collaboration accrue avec le Bureau international du Travail est essentielle pour accélérer la mise en œuvre du cadre juridique fixant les modalités d’exercice du droit syndical en Egypte.
Nous restons déterminés à soutenir l’Egypte dans la poursuite du dialogue et des consultations tripartites pour pouvoir donner pleinement effet à la convention. Nous appuyons les efforts de l’Egypte pour développer la culture de la liberté syndicale et du pluralisme syndical et nous remercions l’Egypte d’accepter l’hommage que nous tenons à rendre aux mesures et aux efforts déployés par ce gouvernement, et nous demandons à la commission de soutenir les réformes engagées par l’Egypte.
Membre travailleuse, Espagne – Le gouvernement égyptien prétend avoir modifié certaines dispositions de la loi no 213 de 2017 pour donner effet à la convention. Alors que personne ne sait quand ces dispositions entreront en vigueur ou même si le Parlement va réellement les promulguer, ce n’est pas, selon nous, un moyen suffisant d’obliger le gouvernement à remplir ses engagements vis-à-vis des normes dont l’application est examinée par la présente commission. La loi en question a été promulguée le 17 décembre 2017. Alors que le cadre législatif déjà en place n’était pas favorable aux syndicats égyptiens, le nouveau texte non seulement ne garantit pas le droit syndical mais le restreint encore davantage, voire le supprime presque complètement.
S’agissant de la lutte ouvrière de longue date en Egypte, on constate encore une fois que la loi impose à la classe ouvrière la tutelle de la fédération syndicale gouvernementale dont la nature est plus proche d’une institution gouvernementale que d’une organisation syndicale.
Dans ce contexte de répression évidente de la liberté syndicale en Egypte, les procédures dont nous débattons aujourd’hui manquent de crédibilité. A titre d’exemple, l’article 11 proposé initialement prévoyait un minimum de 50 membres pour pouvoir former un comité syndical; cependant, après avoir été examiné par le Parlement, le nombre minimum requis a été porté à 150 membres, et ce nombre a de nouveau été abaissé juste avant le début de la Conférence de 2019. S’il faut modifier les articles 11 et 12 de la loi, il faudrait aussi modifier les articles 21 et 54 ainsi que les dispositions du chapitre 10 de la loi (qui concerne les sanctions). Le volet pénal de la loi impose de graves peines de prison pour toutes sortes de violation.
Le mouvement syndical indépendant en Egypte est toujours opprimé et fait toujours face à l’arbitraire et à la privation de ses droits au regard de ses activités syndicales. L’entrée en vigueur de la loi est une violation même de la convention. Pourquoi réduire le nombre minimum requis pour former un syndicat alors que les syndicats qui remplissaient déjà cette exigence n’arrivaient pas à obtenir leur statut juridique ni à aller au bout des procédures? Pourquoi réduire le nombre minimum requis pour former un syndicat quand le gouvernement impose un statut type et contraint les syndicats à modifier les dispositions de leurs statuts au motif qu’ils ne sont pas conformes aux dispositions prévues par le ministère?
Il est regrettable de constater, une fois de plus, que la classe ouvrière égyptienne, après des décennies de lutte contre la répression dans le pays, ne peut toujours pas jouir de son droit à la liberté syndicale ni établir de syndicats indépendants ni obtenir de personnalité juridique. C’est une nouvelle période de répression qu’elle est en train de vivre.
En Egypte, aujourd’hui, toute activité en faveur des libertés démocratiques est réfrénée; militants, journalistes, universitaires, étudiants et syndicalistes, entre autres groupes, sont traqués et en définitive quiconque tente de défendre les libertés fondamentales dans le pays.
Membre gouvernemental, Ghana – Le Ghana tient à exprimer sa gratitude à la commission d’experts et à cette commission pour leurs travaux visant à faire respecter les normes par les Etats Membres. La liberté syndicale est un droit fondamental des travailleurs prévu par la convention, et le gouvernement égyptien a ratifié cette convention depuis 1957. Le gouvernement du Ghana soutient tout effort visant à assurer le respect mutuel, le dialogue social tripartite, la justice sociale et la coopération entre le gouvernement et ses partenaires sociaux. Nous espérons que le gouvernement égyptien et les représentants des travailleurs, ainsi que les employeurs, œuvreront dans un esprit cordial pour remplir leurs engagements, en conformité avec la convention. Le Ghana est d’avis que la priorité du gouvernement égyptien de revoir et de consolider la législation du travail, notamment la loi sur les syndicats, en consultation avec les partenaires sociaux et avec l’appui du BIT va dans la bonne direction. Fort de notre expérience pour ce qui est de garantir la liberté syndicale, la démocratisation et une plus grande participation des syndicats aux questions touchant les travailleurs, le gouvernement du Ghana encourage les partenaires sociaux à continuer sur la voie du dialogue social, avec l’appui du BIT. Nous demandons instamment au BIT de fournir au gouvernement égyptien l’appui technique dont il a besoin pour réformer sa législation et la mettre en conformité avec la convention. Nous sommes convaincus que le gouvernement égyptien pourra alors prendre les mesures nécessaires à la mise en conformité de sa législation et de sa pratique, en conformité avec les commentaires de la commission d’experts. Le gouvernement égyptien doit continuer à traiter les questions relatives au travail et à l’emploi à la lumière de ses obligations découlant de la convention, dans un respect mutuel.
Membre travailleuse, France – C’est à travers un cas concret évoqué comme cas d’école par Frontline Defenders que nous souhaitons illustrer les graves manquements auxquels se livre le gouvernement égyptien et la répression syndicale extrêmement dure qui règne dans ce pays.
En mai 2016, des centaines d’ouvriers de l’Alexandria Shipyard Company (chantier naval d’Alexandrie) ont organisé un sit-in illimité pour protester contre les bas salaires, qui selon eux étaient largement en dessous du salaire mensuel minimum national. Plus d’une vingtaine d’ouvriers ont été arrêtés et accusés d’être à l’origine de cette grève; ils ont été placés en détention pendant des mois et contraints à démissionner de leurs emplois. Près de deux ans plus tard, ils sont toujours jugés devant un tribunal militaire.
Lors du sit-in de mai 2016, les travailleurs d’Alexandria Shipyard affirmaient manifester en faveur d’un salaire minimum pour l’obtention de tenues et de matériel de sécurité que l’usine leur refusait, et contre une baisse de leur prime annuelle pour le Ramadan. Selon l’avocat des ouvriers, les responsables de l’armée ont décidé que les ouvriers employés dans une usine appartenant à l’armée n’avaient droit qu’à des primes alignées sur celles versées à d’autres employés du ministère de la Défense, renforçant ainsi leur traitement comme du personnel militaire. Les ouvriers ont employé une tactique syndicale classique: ils n’ont pas stoppé complètement la production, mais ils travaillaient et manifestaient par équipes. Des unités de la police militaire et des forces centrales de sécurité ont été déployées dans et autour du chantier naval, et la direction a décrété un blocage renforcé par l’armée afin d’empêcher les ouvriers d’entrer dans l’usine pour travailler. Les 2 300 personnes qui travaillent dans l’usine ont ainsi été suspendues indéfiniment.
Fin mai, les ouvriers se sont rendus au poste de police local pour porter plainte contre le blocage de la direction, cherchant à savoir pourquoi ils n’étaient pas autorisés à travailler. Au poste de police, ils ont appris que l’armée avait ouvert une enquête sur la participation présumée de 15 travailleurs au sit-in. Le parquet militaire a convoqué 26 ouvriers pour une enquête (l’affaire est classée 2759/2016). Parmi eux, six étaient connus pour avoir plaidé par le passé en faveur de réformes du travail dans l’usine. Quatorze des ouvriers convoqués se sont rendus au parquet pour l’enquête, où ils ont ensuite été placés en détention et interrogés.
Le parquet a refusé de libérer les ouvriers et a indiqué qu’ils seraient transférés vers les postes de police de leurs quartiers et libérés plus tard. Cependant, les ouvriers ont été détenus quatre jours ou plus. Le parquet militaire a accusé les ouvriers d’incitation à la grève et d’avoir perturbé le fonctionnement de l’entreprise. Il a accusé les ouvriers civils d’avoir violé l’article 124 du Code pénal égyptien, selon lequel les fonctionnaires qui s’abstiennent délibérément d’exercer leur devoir peuvent être emprisonnés ou condamnés à payer une amende. A ce jour, les 26 ouvriers sont toujours sans emploi, hors de prison et dans l’attente du verdict du tribunal militaire. Le verdict a été reporté plus de 30 fois en deux ans, et des centaines d’employés du chantier naval sont toujours interdits de pénétrer dans l’usine.
Il est temps que le gouvernement égyptien applique la convention. Il doit agir rapidement pour répondre à ces préoccupations fondamentales du groupe des travailleurs et de la communauté internationale.
Membre gouvernementale, Iraq – Nous tenons à remercier le gouvernement égyptien des efforts qu’il déploie pour appliquer la convention. Nous saluons ses efforts en ce qui concerne la nouvelle loi, applicable à tous les travailleurs égyptiens, quel que soit le type d’activités ou le secteur dans lequel ils travaillent. Cette loi prévoit de nombreux avantages, par exemple le respect du pluralisme syndical. Le gouvernement égyptien a fait fond sur les recommandations du BIT pour élaborer cette loi, avec la participation des partenaires sociaux. Il a également consulté la société civile. L’Egypte a respecté les recommandations de la commission d’experts. Compte étant tenu de ce qui précède, nous estimons que la loi, telle que modifiée, est parfaitement conforme aux normes internationales du travail. N’oublions pas non plus que la Magna Carta de l’Egypte, autrement dit la Constitution, prévoit la liberté syndicale et le droit d’organisation. Certes, c’est à Genève que l’OIT a son siège, mais c’est en Egypte que l’Organisation arabe du travail a le sien. Ces deux organisations sont apparentées, et c’est là l’assurance que l’Egypte ne peut échapper à ses obligations internationales. Bien au contraire, l’Egypte est fermement déterminée à respecter toutes les conventions internationales du travail.
Membre travailleur, Royaume-Uni – Je m’exprime au nom du Royaume-Uni et de la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF). Puisque la commission permet désormais aux gouvernements de présenter des documents additionnels et autres éléments de preuve pour examen par celle-ci, il est indispensable de tous nous tenir au courant des derniers événements. Malheureusement, dans le cas de l’Egypte, ces événements témoignent d’un climat de répression permanente de la liberté syndicale, et le gouvernement doit agir beaucoup plus énergiquement pour se conformer à la convention.
Le gouvernement indique qu’aucun exemple n’illustre les allégations des syndicats selon lesquelles ils subiraient des pressions lorsqu’ils critiquent ouvertement la politique gouvernementale ou qu’ils ne sont pas du même avis que les syndicats qui y sont favorables. C’est avec plaisir que nous présenterons quelques exemples.
Tout au long de 2018, le Syndicat égyptien des marins (ESU) a demandé l’enregistrement d’une antenne locale dans le port d’Alexandrie, et cette demande a été constamment refusée. Cette antenne a dû suspendre ses activités. Ce syndicat avait déjà été sérieusement affaibli par la loi no 213 de 2017, permettant au gouvernement de dissoudre pratiquement toute la structure de l’ESU, seules les antennes de Suez et Port-Saïd ayant été maintenues. Il conviendrait de prendre immédiatement des mesures pour rétablir les droits des travailleurs portuaires de constituer des syndicats de leur choix ou de s’y affilier, sans ingérence de l’Etat.
Nous faisons observer que les travailleurs portuaires ne font pas partie du groupe exclu de la convention; ils ne font pas partie non plus, selon toute interprétation raisonnable, de la police ni des forces armées.
L’année dernière, des travailleurs d’une usine de production de céramique et d’articles sanitaires ont participé à une grève pour revendiquer, entre autres choses, des congés payés, cette grève ayant été organisée sans tenir compte de la législation égyptienne du travail. Les revendications portaient aussi sur une augmentation du salaire annuel, une indemnisation en cas de travaux dangereux, l’accès aux soins de santé et un changement dans le processus électoral des comités syndicaux. En ce qui concerne ce dernier point, le fait qu’une société cherche à contrôler ce processus est en soi une violation de la convention.
Plutôt que de négocier, la société de céramique a fermé l’usine et a appelé la police, puis lui a donné toutes les coordonnées des travailleurs grévistes. Le 17 février 2018, sept travailleurs grévistes ont été arrêtés. Lors de cette arrestation, un travailleur a chuté de trois étages et s’est gravement blessé. Il a malgré tout été arrêté. Le 25 mai, les travailleurs ont été accusés d’incitation à la grève, le département du travail ayant rétrospectivement déclaré la grève illégale – en toute coïncidence –, juste à temps pour permettre de condamner les travailleurs à quinze jours de prison ce jour-là. Les travailleurs ont ensuite été contraints, via des négociations avec le ministère de la Main-d’œuvre, d’indiquer qu’ils allaient abandonner leurs revendications, en contrepartie de quoi la police a mis en fin aux poursuites d’autres grévistes. Dans le cadre de cet accord, le ministère a aussi contraint les travailleurs à signer un accord de renonciation à la grève.
Les fabricants de céramique et d’articles sanitaires ne font pas partie de la liste des services essentiels prévue par l’OIT.
Enfin, en avril 2018, les travailleurs d’une usine de biscuits sont entrés en conflit avec leur direction à propos de la répartition des bénéfices découlant d’une année productive et satisfaisante pour l’usine. Les travailleurs sont entrés en grève le 29 avril 2018 et, au bout de sept jours, les services de sécurité ont arrêté six travailleurs au motif qu’ils avaient organisé une protestation sans autorisation. La production de biscuits ne fait pas non plus partie de la liste des services essentiels de l’OIT.
Ces exemples sont bien la preuve que l’ingérence de l’Etat dans les activités syndicales perdure encore aujourd’hui et qu’il faut examiner les promesses de réforme en tenant compte du fait que le gouvernement et les forces de sécurité n’ont pas du tout changé de comportement.
Membre gouvernemental, Brésil – Le Brésil remercie le gouvernement égyptien d’avoir présenté les informations détaillées qu’examinera la commission. Le Brésil partage le point de vue de l’Egypte au regard de différents aspects du système de contrôle, et en particulier concernant les méthodes de travail de cette commission. Le fonctionnement de cette commission est loin de correspondre aux meilleures pratiques du système multilatéral. Il n’est ni transparent ni impartial ni objectif, n’est pas tripartite dans la maison du tripartisme et ne favorise pas le dialogue social dans la maison du dialogue social. L’absence de notification en temps utile et l’opacité qui entoure la sélection des cas et la négociation des conclusions freinent dans une large mesure nos efforts pour instaurer un dialogue constructif et examiner comme il se doit les informations soumises par les différentes parties.
La construction d’une OIT forte, efficace, légitime et apte à répondre aux défis du monde du travail et du multilatéralisme d’aujourd’hui est dans notre intérêt à tous, gouvernements, travailleurs et employeurs confondus. Cela passe par la coopération, le dialogue et le partenariat. Les informations communiquées par le gouvernement démontrent clairement les efforts qu’il consent pour le dialogue social ces dernières années, et les modifications de la loi sur les syndicats, approuvées par le Conseil des ministres le mois dernier, constituent une évolution prometteuse. Encore une fois, nous réaffirmons le point de vue du Brésil selon lequel toute question ou demande d’éclaircissements dans le cadre de cette commission ne devrait concerner que les normes clairement définies auxquelles souscrivent les gouvernements via un processus de ratification formel.
Le Bureau, la présente commission et l’OIT dans son ensemble devraient reconnaître le rôle important que jouent les gouvernements, les institutions et les organisations nationales dans l’interprétation des normes, afin de tenir compte des circonstances et des capacités nationales.
Membre travailleur, Belgique – Tout d’abord, je voudrais encore une fois attirer l’attention sur le corps mutilé de l’étudiant italien, Giulio Regeni, qui a été retrouvé il y a trois ans; il avait 28 ans et menait des recherches sur l’organisation des syndicats en Egypte. Nous examinons le cas de l’Egypte aujourd’hui parce qu’il s’agit des syndicats, de la liberté syndicale elle-même et de la protection du droit d’organisation.
Comme l’a indiqué la commission d’experts dans son rapport, le gouvernement assure qu’il continuera à travailler en toute transparence et en coopération avec le BIT afin de surmonter les défis auxquels est confrontée l’Egypte dans l’instauration d’une nouvelle liberté syndicale, liberté que le pays n’avait pas connue depuis longtemps. Mais il n’y a pas de liberté syndicale lorsque les travailleurs et les syndicalistes craignent d’être arrêtés, que des disparitions forcées se produisent dans le cadre d’une procédure devant un tribunal militaire, que des licenciements et différentes mesures disciplinaires sont imposées pour le seul exercice du droit à la grève et à constituer des syndicats indépendants. Qualifier ces actes de graves obstacles au plein exercice de la liberté syndicale de tous les travailleurs est un euphémisme. Plus grave encore, plusieurs infractions à la loi sur les syndicats sont passibles de peines de prison. Citons encore la terrible mise au secret qu’infligent les autorités égyptiennes aux prisonniers en tant que peine additionnelle et qui a été largement documentée par les organisations des droits de l’homme; cette nouvelle liberté syndicale dont parle le gouvernement est loin d’être une réalité sur le terrain et semble n’exister que sur le papier. A titre d’autre exemple du mépris total des autorités égyptiennes à l’égard des travailleurs et des syndicats, on peut citer la détention arbitraire de l’avocat spécialisé dans le droit du travail, Haytham Mohamdeen, qui a eu lieu le mois dernier; il avait été placé en liberté surveillée après des mois de détention arbitraire pour des motifs fallacieux d’incitation à des manifestations pacifiques contre les mesures d’austérité. Plutôt que d’intensifier la répression en procédant à une nouvelle vague de détentions arbitraires, les autorités devraient immédiatement garantir à leurs citoyens l’exercice pacifique de leur droit à la liberté syndicale et protéger le droit d’organisation.
Membre gouvernemental, Etat plurinational de Bolivie – L’Etat plurinational de Bolivie remercie le gouvernement égyptien d’avoir présenté les informations relatives à l’application de la convention. La liberté syndicale et la protection du droit syndical constituent l’un des piliers fondamentaux de l’Organisation internationale du Travail. C’est pourquoi la Bolivie reconnaît le droit des travailleurs et des travailleuses à constituer des syndicats, en application de la loi. Nous saluons donc la commission d’experts d’avoir accueilli favorablement l’adoption de la nouvelle loi sur les syndicats en Egypte, laquelle ne prévoit plus l’affiliation à une fédération syndicale unique mais permet aux organisations de s’affilier à d’autres fédérations, d’en constituer ou d’agir de manière autonome, comme l’indique le gouvernement égyptien.
Nous notons également que le gouvernement est prêt à aider les organisations qui n’ont pas pu régulariser leur situation à ce jour, afin qu’elles puissent être enregistrées conformément à la législation. Nous encourageons le gouvernement égyptien à continuer de prendre des mesures visant à promouvoir et à protéger le droit syndical.
Membre gouvernemental, Bahreïn – Je m’exprime au nom des gouvernements des pays arabes (Algérie, Bahreïn, Iraq, Jordanie, Koweït, Liban, Libye, Mauritanie, Maroc, Oman, Qatar, Arabie saoudite, Soudan, République arabe syrienne, Tunisie, Emirats arabes unis et Yémen). Le groupe des pays arabes de l’OIT félicite le gouvernement égyptien d’avoir déployé des efforts pour assurer la pleine application de la convention et mettre en œuvre également les recommandations de la commission. Ces deux dernières années, le gouvernement a mis en place un conseil pour le dialogue social auquel participent les partenaires sociaux, et un effort pour entretenir un très large dialogue social a été consenti. Des élections syndicales ont aussi été organisées en toute transparence. Tout cela démontre l’importance qu’attache l’Egypte à la convention et à la protection de la liberté syndicale. Nous encourageons l’Egypte à continuer de coopérer avec l’OIT. Les Etats Membres du groupe des pays arabes notent que les efforts déployés par l’Egypte sont très récents, les initiatives qu’il a prises étant toutes très récentes. Il faut donc laisser le temps à celles-ci de porter leurs fruits. Nous remercions l’Egypte pour tous les efforts consentis, et nous attirons l’attention en particulier sur la coopération efficiente qui a actuellement cours entre les partenaires sociaux pour assurer la stabilité de l’Egypte et de ses lieux de travail.
Membre gouvernemental, Ethiopie – Ma délégation prend dûment note des observations de la commission d’experts concernant l’application de la convention en droit et dans la pratique, dans lesquelles elle invite le gouvernement égyptien à fournir des informations. La commission a également appelé le gouvernement égyptien à prendre des mesures pour veiller à ce que tous les travailleurs jouissent pleinement de leur droit fondamental de s’organiser librement et, en particulier, pour garantir l’indépendance des syndicats et l’élimination de toutes les formes d’ingérence dans les organisations de travailleurs.
La commission a aussi demandé au gouvernement d’abaisser le nombre minimum de membres requis pour former un syndicat au niveau de l’entreprise, de manière à garantir le droit des travailleurs à constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier. Au vu de ce qui précède, le gouvernement égyptien a fourni les informations demandées relativement aux progrès accomplis pour donner pleinement effet à la convention, en tenant compte des observations de la commission.
Nous avons noté avec un vif intérêt que les dispositions pertinentes de l’actuelle loi sur les syndicats ont été amendées concernant les points suivants: nombre de travailleurs requis pour constituer un syndicat; nombre de syndicats requis pour constituer un syndicat général; et nombre de syndicats généraux requis pour constituer une fédération, entre autres choses. Le gouvernement égyptien nous a également indiqué que les amendements à la loi en question ont eu pour effet de supprimer les peines de prison qu’elle prévoyait, celle-ci n’imposant plus que des amendes aux syndicats pour pratiques illégales. On nous a également dit que le Cabinet des ministres a approuvé le projet de loi amendée, lequel a été présenté au Parlement pour adoption, ce qui selon nous est une étape positive.
Pour terminer, au vu des progrès accomplis par le gouvernement égyptien et des mesures louables qu’il a prises pour mettre sa législation nationale en conformité avec la convention, nous espérons que la commission tiendra compte de cette évolution dans ses conclusions.
Membre gouvernementale, Soudan – Nous remercions le représentant gouvernemental et sa délégation. Nous avons pris note des efforts déployés par le gouvernement et des mesures prises pour mettre la législation en conformité avec la convention. Il est indispensable d’appuyer les efforts du gouvernement afin qu’il puisse appliquer la loi amendée de 2017, mise en conformité à la demande de la commission. Grâce à cette loi, qui a supprimé les restrictions à la liberté syndicale, beaucoup de syndicats ont été créés. Les initiatives et les efforts du gouvernement vont encore plus loin. Nous avons entendu qu’il existe maintenant un organe chargé d’aider les syndicats et les fédérations à s’enregistrer et pour d’autres questions.
Le gouvernement a donc beaucoup progressé dans l’application de la convention. Nous saluons les initiatives du gouvernement égyptien et l’encourageons à solliciter l’assistance technique du BIT.
Représentant gouvernemental – Permettez-moi tout d’abord de remercier tous ceux qui ont participé à la discussion. Je tiens à remercier chacun d’entre eux pour leurs contributions positives. Nous souhaitons réellement parvenir aux meilleurs résultats possibles. Nous avons également pris note de tous les commentaires et nous allons en tenir compte.
Je tiens à dire en particulier qu’il n’y a pas un seul Etat dans le monde qui remplisse les critères et respecte les normes à 100 pour cent, ni en droit ni dans la pratique. Toutefois, certains pays sont mieux à même que d’autres de prendre des décisions, d’améliorer leur conformité avec les normes internationales, et nous répétons encore une fois que l’un de nos objectifs prioritaires est de nous conformer aux normes en vue de parvenir à la justice sociale, à la stabilité et à la paix.
Nous croyons en le développement du mouvement syndical égyptien, et nous sommes fiers des changements qui ont eu lieu, même s’ils sont encore insuffisants peut-être, mais nous pouvons dire que nous sommes sur la bonne voie.
A l’occasion de la mission de contacts directs de haut niveau, j’ai indiqué qu’il y a aujourd’hui en Egypte des chances que chacun peut saisir. Les syndicats peuvent désormais envisager de créer un mouvement syndical, après des années d’absence.
Différents points ont été soulevés sur lesquels je voudrais revenir. Par exemple, le représentant des travailleurs a dit que le gouvernement avait apporté certains amendements à la législation uniquement parce que nous étions inscrits sur la liste des cas examinés à cette commission. Ce n’est pas la réalité. Je souhaiterais rappeler qu’une mission de haut niveau du BIT s’est rendue en Egypte en août 2018 et que le Conseil supérieur pour le dialogue social s’est ensuite réuni le 9 octobre 2018. Cela était prévu et c’est ce qui avait été promis à la mission de haut niveau. Nous avons indiqué que des amendements seraient élaborés pour examen. Ceux-ci ont été examinés. Cet examen a été confié à un comité technique chargé d’améliorer ces amendements, lesquels ont ensuite été renvoyés au Conseil supérieur pour le dialogue social. En décembre 2018, nous avons envoyé une lettre faisant état de ces amendements. Ces changements ont été apportés pour nous permettre de remplir plus largement nos obligations internationales. Nous rejetons donc catégoriquement les propos selon lesquels des changements auraient été apportés à la dernière minute parce que nous étions inscrits sur la liste des cas.
Nous souhaitions amender la législation égyptienne afin d’en améliorer la conformité avec la convention, et ce à la demande de la commission d’experts. Le représentant du groupe des travailleurs a mentionné une série d’articles de la nouvelle loi. Sans entrer dans le détail, je peux vous dire qu’il y a des erreurs d’interprétation de ces dispositions. Quelqu’un a demandé au groupe des travailleurs de faire des commentaires et, ce faisant, il a fait une interprétation personnelle et déformée de ces dispositions.
Mais nous sommes ouverts à la discussion avec les travailleurs sur ce point et nous pouvons rectifier l’interprétation de ces dispositions, y compris de celles qui, selon eux, violent les dispositions de la convention. Nous souhaitions rétablir les choses et, si certaines dispositions sont contraires à la convention, nous pouvons facilement amender ces articles pour les mettre en conformité.
Plusieurs autres orateurs ont fait état de revendications ou d’allégations. La mission du BIT a pu constater par elle-même la situation réelle en Egypte. Prenons quelques exemples. Il y aurait une ingérence de l’Etat dans les élections syndicales. Ces élections se sont déroulées sous contrôle judiciaire, et personne ne s’est ingéré dans un quelconque processus électoral syndical.
C’est une première chose. La deuxième chose concerne l’allégation selon laquelle des travailleurs ont été arrêtés sur un chantier naval d’Alexandrie, puis détenus. En réalité, des manifestations, des perturbations et des confrontations ont eu lieu dans une société du port d’Alexandrie, et celle-ci a fait appel aux autorités, lesquelles se sont rendues sur place et ont pris des décisions conformes à la législation en vigueur.
D’autres allégations indiquent que nous faisons obstacle à la création de l’organisation des travailleurs égyptiens. J’ai déjà abordé le sujet à plusieurs reprises. J’en ai parlé avec vos collègues qui se sont rendus en Egypte, et cela à plusieurs occasions. Nous avons aussi débattu de la question hier, et je continue de réaffirmer notre position à l’égard du syndicat des travailleurs démocratiques égyptiens, lequel se félicite de compter plus de 700 000 affiliés. Nous nous sommes penchés sur la question avant l’adoption de la loi et donc avant d’avoir une législation sur les syndicats, et nous avons ensuite essayé, pendant la période de réconciliation, d’entrer en contact avec eux. Le problème est qu’aucun comité syndical ne nous a dit être affilié à cette confédération. Il semblerait donc que, malgré ses 700 000 affiliés, l’organisation n’ait pas été en mesure de fournir des documents justifiant l’affiliation d’un seul syndicat.
A l’occasion du centenaire de l’OIT, je me suis entretenu avec le président de cette confédération syndicale. Je lui ai demandé de nous fournir les documents pertinents et que l’on ferait valoir sa demande; notre ministère ne peut donc pas être accusé de bloquer l’enregistrement de cette organisation; néanmoins, nous n’avons pas eu de nouvelles, malgré nos diverses tentatives d’entrer en contact avec elle.
Par conséquent, comment ce syndicat peut-il prétendre avoir autant d’affiliés? Cette confédération prétend avoir des affiliés mais ne fournit la preuve d’aucune affiliation.
Nous souhaitons donc dire à cette commission que, conformément à la recommandation de la commission d’experts, une entité technique est en cours de mise en place pour examiner toutes les plaintes présentées par les syndicats, et nous examinons aussi la possibilité de créer de nouvelles organisations. Nous avons demandé au bureau de l’OIT au Caire qu’un représentant siège à ce comité technique afin de fournir l’appui nécessaire au traitement des demandes. Sur la question de M. Regeni, cette affaire est actuellement devant les tribunaux égyptiens. Les autorités égyptiennes et italiennes collaborent dans cette affaire. Je pense qu’il n’y a aucun fondement à examiner ce cas ici. Nous sommes là pour débattre de questions de travail. Nous aurions pu aussi évoquer des cas de travailleurs égyptiens qui ont été assassinés dans d’autres pays, mais nous ne l’avons pas fait car ce n’est pas l’endroit approprié.
Hier, certaines personnes ont demandé si nous allions réellement présenter des amendements et si nous avions de bonnes intentions. Je peux vous assurer que tout est fait comme il faut. Le Parlement a approuvé la législation. Les employeurs font partie des consultations en cours. Les employeurs font évidemment partie de ces consultations. Rappelons-nous que l’Egypte connaît une croissance économique et que nous avons dû modifier la législation en conséquence. C’est donc avec plaisir que nous répondrons à toute autre question. Nous avons pris des mesures pour nous adapter à l’évolution de la situation. Nous avons à cœur de coopérer avec le BIT et de continuer de bénéficier de son assistance technique.
Membres employeurs – Je tiens à remercier le représentant gouvernemental pour ses commentaires et tous ceux qui ont pris la parole pour participer à la discussion concernant ce cas.
De l’avis des employeurs, ce cas porte sur la question, plutôt restreinte, de savoir s’il y a des obstacles en droit et dans la pratique au fonctionnement libre et autonome des syndicats. Nous espérons donc que l’esprit dans lequel le gouvernement a présenté ses interventions témoigne d’un réel désir d’œuvrer de manière constructive avec les partenaires sociaux, les organisations d’employeurs et de travailleurs, au niveau national, pour faire évoluer la situation et tenter de régler certaines questions portées à son attention, ainsi que d’éliminer les obstacles en droit et dans la pratique à l’enregistrement des syndicats.
Les employeurs estiment que nous avons pu observer des progrès en la matière et qu’il s’agit là de développements très positifs; le groupe des employeurs est donc prêt à participer à ce processus.
Nous pensons donc qu’il conviendrait d’encourager le gouvernement à rester ouvert et à démontrer sa volonté d’entendre les préoccupations des parties prenantes sur ces aspects du cas, ainsi qu’à rester ouvert et à démontrer sa volonté d’éliminer les obstacles qui perdurent avec la nouvelle législation sur les syndicats.
Membres travailleurs – Je remercie d’abord toutes celles et ceux qui ont pris la parole pour illustrer les discordances qu’il y a quand même entre la description que fait le gouvernement et la réalité.
Le gouvernement égyptien n’est pas content d’être sur la liste. Mais, je peux le rassurer, je ne connais pas un seul gouvernement qui serait content d’être sur la liste. Pourtant, il apparaît clairement que les nombreuses dispositions de la nouvelle loi que j’ai mentionnées ne sont pas conformes à la convention. Il en résulte que la présence de l’Egypte sur la liste se justifie pleinement.
Le représentant des employeurs égyptiens a fait part de certaines réflexions qu’il convient de rencontrer. D’abord, concernant l’interdiction de fonder des syndicats sur une base religieuse, politique ou idéologique. L’honorable membre semble ignorer que, dans de nombreux pays dans le monde, il y a des syndicats socialistes, chrétiens, communistes et même libéraux. Votre serviteur est lui-même président d’un syndicat chrétien.
Cela ne veut pas dire qu’il n’y a que les chrétiens qui peuvent s’affilier à notre organisation puisque nous comptons parmi nos membres des affiliés de toutes les religions ainsi que des athées. Cela signifie simplement que les organisations ont le droit, sur la base de la convention, de donner à leur organisation la ligne idéologique qu’ils souhaitent sans devoir subir aucune ingérence. C’est ce qu’on appelle la liberté et le pluralisme.
Le deuxième point concerne le contrôle financier. L’organe central de comptabilité est une institution publique rattachée à la Présidence de la République et chargée de contrôler l’argent public. Contrairement à ce que soutient l’honorable membre, les cotisations syndicales n’en font pas partie. L’argent public est ce qui est prélevé sur une base obligatoire par voie d’impôt. Les cotisations syndicales sont payées sur une base volontaire suite à une affiliation à un syndicat. Ce n’est donc pas de l’argent public. Si on devait étendre ce raisonnement, toutes les sociétés commerciales devraient également être contrôlées sur cette base. Il s’agit donc d’un raisonnement absurde.
Ces éléments témoignent néanmoins d’une attitude paternaliste insupportable qui prétend connaître l’intérêt des travailleurs mieux qu’eux. On les traite comme des mineurs, des brutes ou des automates, des ignorants. Il semblerait que le gouvernement ait choisi d’appliquer la célèbre maxime de Di Lampedusa: tout changer pour que rien ne change.
En effet, il s’agit pour lui de persister à ne pas respecter la convention tout en faisant croire que les changements introduits garantissent la liberté syndicale. Le rôle du groupe des travailleurs est d’exercer un devoir de vigilance en brisant les miroirs aux alouettes.
Il ne suffit pas d’adopter une nouvelle loi pour garantir la liberté syndicale. Il faut encore et surtout que son contenu soit conforme en tous points à la convention. Dans mon discours d’introduction, j’ai fait de nombreuses références aux dispositions légales qui continuent à poser problème. Nous insistons notamment pour que l’article 5 qui interdit de fonder des syndicats basés sur les critères énumérés par cet article soit abrogé.
Il en va de même des dispositions qui donnent au ministre la possibilité d’initier une procédure de dissolution en cas de faute grave dans la gestion financière et administrative. Nous insistons sur le fait qu’il n’appartient pas aux autorités de fixer les conditions d’éligibilité pour les candidats dans les instances syndicales.
Dans le même ordre d’idées, le groupe des travailleurs invite le gouvernement à retirer les dispositions qui déterminent les compétences des conseils d’administration et qui réglementent l’élection des assemblées générales.
En outre, le problème persistant quant à l’impossibilité de s’affilier à plusieurs syndicats doit être résolu.
Enfin, nous invitons le gouvernement égyptien à abroger les dispositions prévoyant des sanctions pénales, en ce compris les amendes. On ne voit pas quel est l’intérêt de prévoir des sanctions pénales en cas de non-respect d’une procédure d’exclusion par exemple.
Nous invitons le gouvernement à inscrire toutes les organisations syndicales qui en ont fait la demande et de recevoir sans délai celles qui ont déposé des plaintes.
Nous demandons également au gouvernement de transmettre à la commission d’experts, pour septembre 2019, un rapport détaillé quant aux suites qu’il réservera aux demandes de notre commission.
Eu égard au fait que nous parlons de problèmes persistants depuis plusieurs années, que cela concerne un aspect fondamental qu’est la liberté syndicale, nous demandons par conséquent au gouvernement d’accepter qu’une mission de haut niveau se rende sur place.
Le cas de l’Egypte a été traité à plusieurs reprises par notre commission. A chaque fois, le gouvernement a choisi la voie des restrictions et des entraves de toutes sortes avec, à chaque fois, des résultats négatifs. Il est peut-être venu pour lui le moment d’essayer la voie du respect de la liberté syndicale, car toutes les autres mènent incontestablement à des impasses avec toutes les conséquences.
Conclusions de la commission
La commission a pris note des déclarations orales du représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.
La commission a noté que, en dépit de l’adoption de la loi sur les syndicats et du décret ministériel no 35, plusieurs divergences de longue date entre la législation nationale et les dispositions de la convention subsistent.
La commission a exprimé sa préoccupation par la persistance de restrictions imposées au droit des travailleurs de s’affilier à des organisations, fédérations et confédérations syndicales de leur choix et d’en constituer, et par l’ingérence continue du gouvernement dans les élections et les activités syndicales.
Prenant en compte la discussion qui a eu lieu, la commission demande au gouvernement de:
- s’assurer qu’aucun obstacle n’existe, en droit ou dans la pratique, à l’enregistrement des syndicats, conformément à la convention;
- agir avec célérité afin de traiter les demandes d’enregistrement de syndicats en suspens;
- s’assurer que tous les syndicats peuvent exercer leurs activités et élire leurs dirigeants en toute liberté, en droit et dans la pratique, conformément à la convention;
- modifier la loi sur les syndicats pour s’assurer que:
– le seuil minimum d’adhérents exigé au niveau de l’entreprise, de même que celui exigé pour la constitution de syndicats généraux et de confédérations syndicales, ne représente pas un obstacle au droit des travailleurs de constituer des organisations syndicales libres et indépendantes de leur choix et de s’y affilier;
– les travailleurs ne sont pas emprisonnés pour avoir exercé leurs droits prévus dans la convention;
- transmettre des copies du projet de Code du travail à la commission d’experts avant sa prochaine session de novembre 2019.
La commission invite le gouvernement à accepter l’assistance technique du BIT pour l’aider à mettre en œuvre ces recommandations. La commission prie instamment le gouvernement de rendre compte de ses progrès à la commission d’experts avant sa session de novembre 2019.
Représentant gouvernemental – Nous avons pris bonne note des conclusions de la commission et nous remercions tous ceux qui ont participé à la discussion. Nous accueillons favorablement les conclusions de la commission et nous tenons à lui assurer que, comme le ministre l’a longuement expliqué lors de la discussion du cas, le gouvernement de l’Egypte a modifié sa législation. Je constate que les suggestions formulées dans les conclusions sont en réalité déjà incluses dans les amendements que nous avons présentés au Parlement et sont actuellement examinées pour adoption. Une copie de cette nouvelle loi sera évidemment envoyée au secrétariat de l’OIT.
Le gouvernement s’emploie également à résoudre les problèmes des organisations syndicales qui souhaitent régulariser leur situation en leur apportant un soutien technique, et a demandé au bureau de l’OIT au Caire de participer à ce processus.
Un représentant gouvernemental a assuré à la commission que le gouvernement respecte pleinement toutes les obligations qu’il a contractées en ratifiant des conventions, y compris la convention dont l’application est à l’examen, qu’il a ratifiée en 1957. Compte tenu de l’importance de la liberté syndicale pour la réalisation de la paix et de la stabilité sociales, ainsi que pour des relations professionnelles équilibrées, le ministère de la Main-d’œuvre a publié une note qui garantit la liberté syndicale, qui accorde la personnalité juridique aux syndicats et qui définit les modalités de réception et de dépôt de leurs documents fondateurs. Ainsi, 1 800 syndicats ont été créés au niveau des entreprises, en plus des 63 syndicats généraux et 24 fédérations syndicales, qui n’appartiennent pas à la Fédération égyptienne des syndicats (ETUF). Ces organisations syndicales jouent leur rôle en défendant les droits et intérêts de leurs membres, en s’investissant dans la négociation collective et en concluant des conventions collectives, enregistrées et déposées au ministère. Cependant, les décisions de justice rendues par des juges administratifs et par des instances ordinaires, ainsi que les décisions du Conseil d’Etat ne tiennent pas compte de cette note du ministre de la Main-d’œuvre, car celle-ci ne peut primer la loi no 35 de 1976 sur les syndicats, qui ne reconnaît que les organisations syndicales établies conformément à ses dispositions. De plus, le Code civil, qui pose le cadre juridique général de l’ensemble de la législation du travail, ne reconnaît pas de personnalité morale autre que celle fixée par la loi et non par une décision ministérielle. Par conséquent, et malgré les bouleversements vécus depuis 2011, le gouvernement, depuis juin 2013, est pleinement déterminé à améliorer la situation et à rétablir l’état de choses, y compris en ce qui concerne les organisations syndicales. Il a donc pris des mesures pour adopter une loi en la matière. Le Président a ainsi lui-même instamment prié la Chambre des représentants d’accélérer l’adoption d’une législation du travail, y compris du projet de code du travail et du projet de loi sur les organisations syndicales, qui abrogeraient la loi no 35 de 1976 sur les syndicats, actuellement en vigueur, et annuleraient ainsi les décisions de justice susmentionnées. Même si la protection de la liberté syndicale est déjà consacrée dans la Constitution de 2014, la nouvelle loi a été rédigée en des termes explicites, avec l’expression «syndicats et fédérations» et non le terme «fédération», comme c’est le cas dans la loi en vigueur. La nouvelle loi est considérée comme complétant la Constitution car elle accorde indubitablement des protections et garanties supplémentaires; la Constitution même est inspirée des instruments internationaux des droits de l’homme et des conventions que l’Egypte a ratifiées, y compris la convention no 87. Ainsi, l’article 76 de la Constitution dispose que la constitution de syndicats et de fédérations sur la base de principes démocratiques est un droit garanti par la loi et que les syndicats et fédérations sont des personnes morales, qu’ils mènent librement leurs activités, qu’ils contribuent au renforcement des compétences de leurs membres, et qu’ils défendent les droits et protègent les intérêts de leurs membres. Il dispose également que l’Etat garantit l’indépendance des syndicats et des fédérations dont les organes directeurs ne peuvent être dissous que sur décision de justice. Sur la base de ces dispositions constitutionnelles et des conventions internationales ratifiées par l’Egypte, le gouvernement a élaboré un projet de loi en tenant dûment compte de tous les commentaires de la commission d’experts et du BIT sur la loi sur les syndicats actuellement en vigueur. Le 4 avril 2016, le ministre a publié le projet de loi en le soumettant au Conseil des ministres qui, après approbation, l’a transmis au Conseil d’Etat. Copie de la loi a été adressée au Directeur général du BIT afin d’obtenir l’avis du Bureau sur ses dispositions. Les commentaires formulés par le BIT ont été en partie intégrés au texte de loi lors de son examen par le Conseil d’Etat, tandis que des réponses ont été apportées à d’autres commentaires. En avril 2017, alors que la loi était en attente d’examen à la Chambre des représentants, le BIT a transmis une deuxième série de commentaires après avoir reçu la version finale de la loi. Le gouvernement a ensuite invité une délégation d’experts du Département des normes internationales du travail du BIT à se rendre au Caire, visite qui a été effectuée en mai 2017. Une discussion ouverte a alors eu lieu sur des commentaires techniques et un accord a été trouvé sur la modification de certaines dispositions de la loi, ce qui montre le sérieux de l’Egypte et sa hâte d’avancer.
Toujours en mai 2017, le Président égyptien a instamment prié la Chambre des représentants d’adopter le texte de loi sur le travail en attente d’examen. Puis, le 28 mai 2017, la commission de la Chambre des représentants chargée des questions relatives au travail a finalisé le projet de code du travail, tandis qu’elle avait ouvert ses discussions sur le projet de loi sur les organisations syndicales le 23 mai 2017, en vue de le soumettre à la séance plénière du Parlement pour adoption. Le projet de loi sur les organisations syndicales a consacré le principe de la liberté d’association pour les syndicats et les fédérations, tout en garantissant leur nature démocratique et leur indépendance. Il consacre en particulier la liberté des travailleurs de créer des organisations syndicales et de s’y affilier ou de les quitter. Il retire la notion de fédération syndicale unique et dispose expressément que les autorités publiques doivent s’abstenir de toute ingérence qui pourrait restreindre ou compromettre l’exercice légitime de ces droits. De plus, il interdit la dissolution de syndicats ou de leurs organes directeurs, ou le blocage de leurs activités par les autorités administratives ou le ministère compétent. Il dispose également que les syndicats, quel que soit leur niveau, doivent être des personnes morales et supprime la structure hiérarchique unifiée. En ce qui concerne certaines dispositions spécifiques du projet de loi sur les organisations syndicales, les articles 1, 4 et 13 autorisent la création de plusieurs fédérations, garantissant ainsi la pluralité syndicale, et la liberté de s’affilier à tout syndicat ou fédération. Les articles 14, 16 et 17 portent abrogation des dispositions relatives à une structure unifiée. De plus, le projet de loi permettra à un syndicat de tisser ses propres liens s’il souhaite s’affilier à une organisation faîtière. Les articles 59, 60, 61 et 65 permettent aux fédérations syndicales d’établir leurs propres règles financières. Après soumission du projet de loi sur les organisations syndicales à la Chambre des représentants et après discussion avec le BIT sur les commentaires de la commission d’experts sur la loi sur les syndicats et sur les deux séries de commentaires transmis par le BIT sur le projet de loi, un accord a été trouvé. Déjà avant la Conférence, et lors de la rencontre avec les représentants de l’OIT au Caire, la tendance était à l’association des représentants des syndicats indépendants au dialogue social sur le projet de loi élaboré au ministère de la Main-d’œuvre ou à la commission de la Chambre des représentants chargée des questions relatives au travail. De plus, les présidents des fédérations syndicales égyptiennes (ETUF, Fédération égyptienne des syndicats indépendants, Union démocratique des travailleurs égyptiens) ont signé un document conjoint avec les dirigeants des organisations d’employeurs en Egypte dans lequel ils ont défini les dispositions convenues dans le projet de loi et affirmé qu’ils sont convaincus que le principe de liberté syndicale est l’élément fondamental de la stabilité des relations professionnelles en Egypte. En conclusion, l’orateur a tenu à souligner que: i) le projet de loi sur les organisations syndicales a franchi chaque stade du processus avec l’accord par consensus des partenaires sociaux et en coordination pleine et continue avec le BIT, en toute transparence et clarté, afin d’en garantir la compatibilité avec les normes internationales du travail; ii) la principale raison du retard de l’adoption de ce projet a été l’absence de parlement jusqu’à début 2016 et le fait que ce projet de loi ne peut pas être adopté par décret puisqu’il complète la Constitution; et iii) le ministère n’a pas gelé les activités ni les comptes des syndicats indépendants puisqu’il estime important de leur permettre d’adapter leur situation afin d’être couverts par la nouvelle loi. Les nouveaux syndicats continuent de conduire librement leurs activités, de défendre les droits des travailleurs, de mener des négociations collectives et de conclure des conventions collectives. Enfin, l’orateur a contesté le bien-fondé des motifs de l’inscription de l’Egypte sur la liste des cas individuels et des critères appliqués en la matière, tout en réaffirmant le sérieux du gouvernement et son souhait ardent de réaliser la justice sociale pour les travailleurs, ce qui est impossible sans liberté syndicale, à laquelle le gouvernement s’est engagé dans sa Constitution et les instruments internationaux ratifiés. La coopération actuelle avec l’OIT a permis de faire avancer les choses en très peu de temps et le gouvernement poursuivra sur cette voie, conformément à la Constitution égyptienne et aux instruments internationaux ratifiés.
Les membres employeurs ont accueilli avec satisfaction les informations fournies et se félicitent de la récente collaboration du gouvernement avec les partenaires sociaux et le BIT, ainsi que de l’intention déclarée de respecter l’engagement d’assurer le respect de la convention. A plusieurs reprises, la commission d’experts a formulé des commentaires sur le Code du travail no 12 de 2003 et pris note de l’élaboration d’un nouveau projet de code du travail ainsi que du dialogue social mené en la matière avec les organisations d’employeurs et de travailleurs. Les membres employeurs ont rappelé leur désaccord avec la position de la commission d’experts sur la convention no 87 en ce qui a trait au droit de grève. Ils ont rappelé la déclaration du groupe gouvernemental de mars 2015 selon laquelle la portée et les conditions d’exercice de ce droit sont réglementées au niveau national. Rappelant leur point de vue sur le sujet, ils soulignent qu’une action revendicative peut être réglementée au niveau national par le gouvernement en tenant compte des circonstances nationales. De plus, les membres employeurs ont fait référence à l’observation de la commission d’experts selon laquelle le projet de loi final sur les organisations syndicales, qui remplacera la loi sur les syndicats, sera bientôt achevé. Soulignant que les discussions sur le projet de loi sont en cours depuis 2011, la commission d’experts a réitéré ses commentaires sur la loi sur les syndicats, notamment en ce qui concerne le système de syndicat unique, le contrôle exercé par l’ETUF sur les autres syndicats et l’interdiction de s’affilier à plus d’un syndicat. Les membres employeurs ont noté avec intérêt les mesures prises à ce jour par le gouvernement, en particulier l’achèvement du projet de loi sur les organisations syndicales, en avril 2016, dans le cadre d’un dialogue social avec les organisations de travailleurs et d’employeurs. En août 2016, le BIT a adressé des commentaires techniques au gouvernement sur le projet de loi, qui avait été examiné par le Conseil d’Etat, commentaires qui avaient donné lieu à certains amendements. En avril 2017, une deuxième version du projet de loi a été soumise au BIT et une mission a été accueillie en mai 2017 pour discuter des commentaires techniques complémentaires du BIT. En juillet 2017, ce projet de loi sera présenté aux parties prenantes dans le cadre d’un dialogue social; il sera soumis au Parlement en octobre 2017. Les membres employeurs se sont dits encouragés par les mesures concrètes prises par le gouvernement qui illustrent son engagement en faveur du respect de la convention. Ils ont instamment prié le gouvernement de continuer à faire avancer la discussion afin de montrer les résultats tangibles que les efforts qu’il a déployés ont permis d’obtenir, et ont invité le gouvernement à continuer de travailler avec le BIT, en collaboration avec les partenaires sociaux, afin de s’assurer que les projets de loi soient conformes aux prescriptions énoncées dans la convention. Le gouvernement devrait fournir des informations actualisées sur toutes les mesures prises dans les délais prévus pour que la commission d’experts puisse les examiner.
Les membres travailleurs ont souligné que les engagements du gouvernement pris devant la commission en 2013 en faveur du respect de la liberté syndicale n’ont pas été suivis d’effets. Il est vrai que depuis cette date le pays a connu un changement de régime, mais cela ne saurait justifier l’inertie constatée depuis quatre ans, quand des syndicalistes attendent depuis si longtemps que leur pays se conforme à ses engagements internationaux en leur garantissant la liberté syndicale. A cela s’ajoute un contexte général peu favorable, le pays étant de nouveau en état d’urgence depuis le 9 avril, avec des conséquences importantes sur les libertés publiques. En outre, une nouvelle loi sur les organisations non gouvernementales (ONG) a été adoptée. Elle contient des dispositions qui durcissent drastiquement les modalités de leur constitution, ainsi que des sanctions pénales très sévères en cas de violation de la loi. Certaines déclarations du gouvernement laissent craindre que les principes de cette loi soient également appliqués aux syndicats. Plusieurs circulaires qui visent à limiter la liberté d’action des syndicats indépendants ont aussi été édictées. De plus, la commission d’experts mentionne dans son rapport qu’elle a pris connaissance de plusieurs allégations concernant des cas d’arrestation et de harcèlement de syndicalistes. Or, comme elle le rappelle au paragraphe 59 de son étude d’ensemble sur les conventions fondamentales, 2012, qui fait également référence à la résolution concernant les droits syndicaux et leurs relations avec les libertés civiles de 1970, en l’absence d’un ordre démocratique respectant les droits fondamentaux et les libertés publiques, la liberté syndicale ne peut se développer pleinement. Pour qu’il y ait une véritable liberté syndicale, il est indispensable que les droits suivants soient consacrés: i) le droit à la liberté et à la sûreté de la personne, ainsi qu’à la protection contre les arrestations et les détentions arbitraires; ii) la liberté d’opinion et d’expression, en particulier le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions, et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontière, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit; iii) la liberté de réunion; iv) le droit à un procès équitable par un tribunal indépendant et impartial; et v) le droit à la protection des biens des syndicats. Les organes de contrôle de l’OIT n’ont cessé de relever l’interdépendance entre les libertés publiques et les droits syndicaux, soulignant ainsi l’idée qu’un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut se développer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces de quelque nature que ce soit à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations. Le gouvernement est ainsi invité à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir toutes les dimensions de la liberté syndicale énumérées ci-dessus.
S’agissant des aspects législatifs, un projet de loi sur les syndicats est en cours d’élaboration et sera prochainement adopté. Une mission du BIT s’est récemment rendue dans le pays pour donner un avis technique sur ce projet de loi et pour discuter plus généralement de la liberté syndicale. Il convient d’être tout particulièrement vigilant sur les points suivants: i) le projet de loi contient, en son article 2, une disposition qui place la Fédération égyptienne des syndicats (ETUF), le seul syndicat réellement reconnu aujourd’hui, dans une situation plus favorable que les autres organisations syndicales. En effet, ce syndicat conservera sa personnalité juridique avec la nouvelle loi et ne devra accomplir que quelques démarches supplémentaires, tandis que les syndicats indépendants devront accomplir les nouvelles démarches afin d’obtenir la personnalité juridique. Pour prévenir cette différence de traitement entre organisations, la seule solution consiste à ce que les syndicats indépendants soient reconnus dès à présent; ii) sauf pour les exceptions admises à l’article 9 de la convention, la nouvelle loi ne doit pas contenir de dispositions constituant de fait, pour certains travailleurs, une interdiction de s’affilier à une organisation syndicale, en raison, par exemple, de la nationalité ou de la conviction politique. Il en va de même de l’interdiction de s’affilier à plusieurs syndicats; iii) le nouveau texte devra également veiller à ne contenir aucune disposition susceptible d’entraver l’organisation de la gestion et de l’activité des organisations syndicales, contrairement aux dispositions du projet de loi actuel qui prévoient des mesures de contrôle de la gestion financière exercées par la Confédération des syndicats. L’instauration d’un contrôle financier de la comptabilité exercé de manière systématique par les autorités publiques, même par l’entremise d’un organe tel qu’«une confédération des syndicats» ou de la Cour des comptes constitue une violation de la convention; iv) enfin, la nouvelle législation devra garantir aux organisations le droit d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs, à l’abri de toute ingérence des pouvoirs publics. Ce droit est garanti à l’article 3 de la convention et fait obstacle à ce que les autorités imposent des exigences qui vont au-delà des conditions de forme généralement admises telles que la nécessité de respecter la forme démocratique ou l’instauration d’un droit de recours aux affiliés. Ces différents éléments font l’objet d’observations dans le rapport de la commission d’experts. En tout état de cause, il serait utile que les remarques émises par le Bureau dans le cadre de son assistance technique soient jointes au projet de loi lors de son examen par le Parlement, afin qu’il en tienne compte. S’agissant des circulaires ministérielles évoquées plus haut, elles limitent la liberté d’action des syndicats indépendants. Ces circulaires interdisent de traiter avec ces syndicats et les privent également de la possibilité de percevoir les cotisations de leurs affiliés. Ceci illustre clairement l’ambiguïté que fait régner le gouvernement égyptien: d’un côté, il déclare vouloir respecter la convention et, de l’autre, il prend des mesures qui vont à l’encontre de celle-ci. En attendant que le nouveau texte entre en vigueur, les syndicats indépendants continuent à tomber sous le coup de ces mesures. Le gouvernement doit sans délai y mettre fin, étant donné que la nouvelle loi ne sera d’application que dans plusieurs mois. Il est urgent de permettre aux organisations syndicales indépendantes de pouvoir exercer librement leurs droits. L’Histoire enseigne que les institutions n’acquièrent de la stabilité que lorsqu’elles reposent sur la justice et sur le respect de la dignité humaine.
Le membre employeur de l’Egypte a indiqué qu’il ne partage pas l’avis des membres travailleurs. L’Egypte connaît la stabilité et la paix sociales, et il y a une bonne collaboration entre le gouvernement et les partenaires sociaux. Un accord a été signé avec les partenaires sociaux et soumis au BIT pour commentaires. La liberté syndicale ne va pas nécessairement de pair avec une prolifération de syndicats, qui entraînerait inévitablement des conflits. Il y a 1 000 syndicats et 26 fédérations qui comptent 5 millions de membres dans le pays. La liberté syndicale doit être garantie, mais sur une base claire et bien réglementée, afin de garantir la représentativité des syndicats. Le projet de loi sur les organisations syndicales garantit la liberté syndicale tant pour les travailleurs que pour les employeurs. Le pays est en train d’adopter une nouvelle législation après une période sans parlement. Le Parlement a repris ses travaux en 2016; cette loi ne peut être adoptée par décret présidentiel. L’Egypte a ratifié les conventions fondamentales de l’OIT et le gouvernement veille à leur respect. La Constitution égyptienne garantit le droit à la liberté syndicale et le tripartisme, et le gouvernement ne s’ingère pas dans les syndicats indépendants. La Constitution protège également le droit de grève. Des démarches doivent être prises avant la grève, mais, si elles sont suivies, elles constituent les seules conditions à respecter avant une grève. Tout en faisant part de son respect pour le travail de la commission d’experts, l’orateur a déclaré que la commission va parfois au-delà de son mandat lorsqu’elle traite du droit de grève et d’autres questions relevant de la convention. La commission d’experts doit se concentrer sur l’application de la convention. De plus amples informations et d’autres faits peuvent également être portés à l’attention de la Commission de la Conférence. Du point de vue de l’orateur, les membres travailleurs ont évoqué des faits inexacts. Enfin, lorsqu’un pays est inscrit sur la liste, cela suscite des réactions dans la société. La commission doit tenir compte de la situation politique et économique des pays concernés et définir des critères clairs de sélection des cas. On pourrait envisager que les membres employeurs et travailleurs du pays concerné donnent leur avis avant l’adoption de la liste.
Le membre travailleur de l’Egypte a rejeté l’idée selon laquelle l’état d’urgence a des effets sur les syndicats. Il a été adopté pour protéger les citoyens étant donné que des innocents ont été assassinés. Les partenaires sociaux participent effectivement au dialogue tripartite, comme l’a indiqué le gouvernement. Le retard pris dans l’élaboration du projet de loi sur les organisations syndicales et dans son adoption est dû aux difficultés politiques, sociales et économiques que connaît le pays depuis juin 2013. La commission doit se montrer compréhensive étant donné la situation du pays. Un nouveau président et un nouveau Parlement ont été élus. Plusieurs projets de loi ont été soumis au nouveau Parlement. Le dialogue entre l’ETUF et les syndicats indépendants, engagé le 23 mai 2017, a abouti à la signature d’une déclaration commune qui approuve le projet de loi sur les organisations syndicales. Le gouvernement et les employeurs ont été informés de cette déclaration. L’ETUF a pris l’initiative de négocier avec tous les syndicats, étant donné que le projet de loi sur les organisations syndicales constitue un enjeu majeur pour les travailleurs. L’ETUF a soumis au gouvernement un certain nombre de modifications du projet de loi qui ont été acceptées. Le gouvernement a envoyé le projet de loi au Parlement qui procède actuellement à son examen et l’inscrira à l’ordre du jour dans le courant de l’année. Ce projet de loi, de nature consensuelle, ouvre une nouvelle ère pour les relations professionnelles dans le pays. Il est temps de relancer les syndicats, dans le cadre de nombreuses réformes législatives qui ont besoin d’être harmonisées. Les syndicats égyptiens souhaitent former des dirigeants capables de relever ce défi et d’assurer la transition entre un système ancien et un système nouveau et moderne qui tienne compte de l’évolution des relations professionnelles. Les travailleurs égyptiens souhaitent lancer un nouveau mouvement, et des élections auront lieu pour constituer un nouveau syndicat. Un mémorandum d’accord a été signé entre l’ETUF, les syndicats indépendants, et la Fédération des employeurs. Cet accord bénéficie au pays tout entier, aux travailleurs et aux employeurs égyptiens. Le projet de loi a été discuté par les trois parties concernées et les travailleurs sont déterminés à veiller à ce que la loi adoptée garantisse la liberté syndicale, conformément à la convention et à la Constitution égyptienne. La commission est invitée à tenir compte dans ses conclusions des efforts réalisés par le gouvernement, et notamment des discussions tripartites qui ont été menées. Elle est également invitée à noter que le projet de code du travail aborde la question de la grève, question qui ne doit pas être réglementée par la législation relative aux syndicats. Le pays est confronté à des difficultés mais la situation s’améliore sur les plans politique, économique et social.
La membre gouvernementale de la Suisse a regretté l’absence d’effet donné par le gouvernement aux demandes répétées de mettre la loi sur les syndicats en conformité avec la convention et a souligné l’importance qui s’attache à l’indépendance des syndicats et à leur diversité. La pluralité syndicale assure une représentation de toutes les tendances. Exprimant l’espoir que le gouvernement mettra fin aux discriminations antisyndicales, l’oratrice l’a encouragé à modifier le Code du travail, en accord avec les partenaires sociaux, afin de mettre en œuvre les commentaires de la commission d’experts. Elle a également rappelé que la négociation collective doit pouvoir s’exercer à tous les niveaux et réitéré l’espoir que le gouvernement mettra rapidement la loi sur les syndicats en conformité avec la convention.
Un observateur, représentant la Confédération syndicale internationale (CSI), s’est dit préoccupé par le projet de loi sur les organisations syndicales proposé par le gouvernement, qui réprime la liberté syndicale et viole plusieurs dispositions de la convention. Bien que les informations fournies par le gouvernement constituent une avancée, le problème fondamental reste entier. Le projet de loi impose un modèle de syndicalisme qui est une réplique du modèle actuel. En particulier, l’article 13 prévoit trois types d’organisations syndicales: les comités syndicaux, les syndicats généraux et les fédérations nationales. Le projet de loi impose également des conditions en ce qui concerne le nombre de membres de l’organe délibérant, le nombre minimum de membres, les règles et procédures électorales, ainsi que les objectifs et les activités des syndicats. En outre, il établit une distinction entre l’ETUF et les autres syndicats. Si l’ETUF conserve sa personnalité juridique, les autres syndicats devront déposer une nouvelle demande d’enregistrement, ce qui contrevient aux articles 2 et 11 de la convention. La Cour constitutionnelle suprême d’Egypte et un tribunal administratif ont reconnu la liberté syndicale en tant que droit constitutionnel, ce qui implique le droit pour les syndicats d’établir leurs propres statuts et l’interdiction de l’ingérence du gouvernement ou de ses organes administratifs. Au lieu de se conformer aux décisions des tribunaux, le gouvernement s’est appuyé sur l’avis consultatif du Conseil d’Etat du 21 décembre 2016, qui ordonne au ministère de la Main-d’œuvre et de l’Immigration de ne pas enregistrer d’organisations syndicales indépendantes et qui a été largement utilisé pour attaquer des syndicats indépendants. Des employeurs et les autorités ont notamment ordonné à plusieurs syndicats de cesser leurs activités et de libérer leurs locaux; ils ne peuvent plus percevoir les cotisations mensuelles des travailleurs.
La membre gouvernementale de Cuba a pris note des informations fournies par le gouvernement selon lesquelles: i) le nouveau projet de loi sur les organisations syndicales tient compte des commentaires de la commission d’experts sur la nécessité de garantir que la législation nationale est conforme aux dispositions de la convention; et ii) la commission chargée des questions législatives, établie au sein du ministère de la Main-d’œuvre et de l’Immigration, a achevé l’élaboration d’un nouveau projet de code du travail, et des réunions ont lieu avec des organisations d’employeurs et de travailleurs ainsi qu’avec des organisations de la société civile pour l’examiner. Le gouvernement est invité à continuer de prendre des mesures pour respecter les engagements pris.
La membre travailleuse de l’Allemagne, s’exprimant également au nom des membres travailleurs de la Finlande, de la France, de l’Italie, de l’Espagne et de la Suède, a déclaré que les forces de sécurité en Egypte agissent avec la plus grande dureté. Malgré les représailles, des grèves locales ont récemment eu lieu. On peut citer comme exemples: une manifestation des travailleurs des chantiers navals, en mai 2016, à Alexandrie, au cours de laquelle 20 grévistes ont été arrêtés par la police militaire et présentés à un tribunal militaire; une grève des travailleurs de l’industrie chimique, en décembre 2016, au cours de laquelle 200 grévistes ont été arrêtés par la police, puis libérés après quelques heures; et une grève partielle du personnel infirmier dans un hôpital, en février 2017, au cours de laquelle 36 personnes ont été suspendues et visées par un mandat d’amener pour «obstruction au travail». Leur seule infraction est d’avoir tenté de s’organiser librement en dehors du système de contrôle de l’Etat et d’avoir exigé une augmentation de salaire pour supporter l’inflation croissante. De plus, l’orateur a souligné que l’ETUF, sous contrôle de l’Etat, est un prolongement du gouvernement, sous la supervision du ministre du Travail en matière d’organisation, de finances et de personnel. La CSI, la Confédération européenne des syndicats (CES) et la Confédération allemande des syndicats (DGB) n’ont pas coopéré avec l’ETUF, car elle n’est pas considérée comme un syndicat libre. Alors que l’ETUF jouit d’une situation de monopole garantie par l’Etat, la formation de syndicats libres et indépendants est systématiquement entravée. La législation prévue en matière d’enregistrement et de reconnaissance des syndicats va non seulement perpétuer la situation mais aussi l’exacerber. L’ETUF, déjà enregistrée, sera reconnue, alors que tous les autres syndicats seront privés de facto de leur droit d’exister en raison des conditions excessives fixées à leur création. L’oratrice a appelé le gouvernement à mettre fin aux obstacles que les syndicats libres rencontrent constamment, en droit et dans la pratique, et à parvenir à terme à respecter ses obligations en vertu de la convention.
Le membre gouvernemental de la République bolivarienne du Venezuela a félicité le gouvernement pour son engagement à continuer de respecter les conventions de l’OIT ratifiées. Dans son rapport de 2017, la commission d’experts a pris note avec intérêt du projet de loi final sur les organisations syndicales qui a été approuvé par le Conseil des ministres et soumis au Parlement pour adoption. L’orateur a accueilli avec satisfaction la déclaration du représentant gouvernemental selon laquelle les commentaires de la commission d’experts ont été pris en compte dans ce projet, et dit espérer qu’à l’avenir le gouvernement continuera à adopter des mesures pour respecter la convention en conservant l’esprit de pluralisme qui se manifeste même dans la participation de la délégation tripartite à la présente Conférence internationale du Travail. Par conséquent, la commission devrait tenir compte de la bonne volonté du gouvernement et des efforts qu’il déploie pour appliquer la convention. Enfin, il faut souhaiter que les conclusions de la commission seront objectives et équilibrées pour que le gouvernement puisse les examiner et en bénéficier dans le cadre de l’application de la convention.
Un observateur, représentant la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF), a rappelé la déclaration des membres travailleurs selon laquelle le projet de loi sur les organisations syndicales est bien loin de garantir le plein respect des droits de liberté syndicale. L’absence de consultations avec les syndicats indépendants lors de la rédaction du projet de loi a anéanti tout semblant de dialogue social véritable. Les nouvelles dispositions semblent garantir que les syndicats déjà reconnus continuent à bénéficier de cette reconnaissance, alors que les nouveaux syndicats indépendants doivent passer par un nouveau processus d’enregistrement. Il est impossible d’obtenir un réel pluralisme syndical avec de telles dispositions, en particulier compte tenu du coût élevé de l’affiliation prévu dans le projet proposé en matière de constitution de syndicats. Les membres de l’ITF en Egypte continuent à rencontrer des difficultés. Une lettre récemment adressée par les autorités a confirmé que les fonctionnaires du secteur public ne sont pas autorisés à traiter, financièrement ou administrativement, avec des syndicats, fédérations ou comités indépendants qui ne sont pas affiliés à l’unique fédération syndicale nationale reconnue. Elle précisait que les syndicats indépendants étaient illégaux en vertu de la loi sur les syndicats. Dans une lettre ultérieure, le ministre du Travail et l’Autorité des transports publics a demandé au ministre du Développement local de transmettre les instructions nécessaires à tous les secteurs qui sont sous sa responsabilité pour qu’ils refusent tout document officiel ou tout document d’identification nationale portant le sceau d’un syndicat indépendant. C’est pourquoi les membres de l’ITF font état de cas d’ingérence constante de l’Etat dans leurs activités qui les empêche de collecter les cotisations des membres et qui met en danger leur existence même. Le dirigeant de la Fédération des travailleurs portuaires s’est vu déduire cinq jours de salaire à cause d’un message posté sur les médias sociaux dans lequel il réclamait le rétablissement d’un supplément pécuniaire légal. De véritables syndicats représentant les vrais intérêts des travailleurs doivent pouvoir fonctionner en toute liberté. Le gouvernement est instamment prié de se conformer aux observations de la commission d’experts et de mettre sa législation en conformité avec la convention.
Le membre gouvernemental de la Mauritanie a déclaré que les informations fournies par le gouvernement prouvent qu’il y a des progrès malgré les défis politiques auxquels le pays est confronté. Suite aux élections législatives, le nouveau projet de loi sur les organisations syndicales a été établi en consultation avec les partenaires sociaux et soumis au BIT pour commentaire. En avril 2017, le gouvernement a envoyé au BIT la dernière version du projet de loi. En outre, selon la commission parlementaire, une autre série de consultations devrait se tenir en juillet 2017 et le projet de loi devrait être adopté en octobre 2017.
Une autre observatrice, représentant la Confédération syndicale internationale (CSI), a indiqué que le Congrès démocratique égyptien du travail a été créé le 28 janvier 2014 et qu’il a présenté sa demande d’enregistrement au ministère de la Main-d’œuvre et de l’Immigration. Toutefois, la circulaire no 6-4-2014 du Conseil des ministres demande à toutes les entités et administrations publiques de mettre un terme à la collaboration avec tout syndicat indépendant et de ne reconnaître que la confédération syndicale qui bénéficie du soutien du gouvernement. Toutes les informations à ce propos se trouvent dans la plainte adressée à l’OIT en 2013. De plus, nombre de syndicats indépendants ont été harcelés et des syndicalistes ont été persécutés ou menacés, par exemple les membres du syndicat maritime, condamnés par des tribunaux militaires dans l’affaire no 2759/2016. Enfin, au cours de la présente session de la Conférence internationale du Travail, 32 personnes ont été arrêtées et ont perdu leur droit à une rémunération pour avoir appelé à la grève.
Le membre gouvernemental de l’Algérie a accueilli avec satisfaction les informations fournies par le gouvernement sur les mesures prises pour veiller au respect de la convention, notamment l’élaboration d’un projet de loi sur les organisations syndicales, les consultations menées à ce propos avec les partenaires sociaux et la prise en considération des commentaires techniques du BIT. Toutes ces mesures montrent bien l’engagement du gouvernement. Avec son nouveau projet de loi, le gouvernement cherche à réduire les écarts entre la loi sur les syndicats et la convention, surtout en ce qui concerne les principes de non-ingérence dans les affaires internes des syndicats et de pluralisme syndical. Il convient d’encourager le gouvernement et les partenaires sociaux à poursuivre dans cette voie et à se prévaloir de l’assistance technique du BIT.
La membre gouvernementale du Soudan s’est déclarée satisfaite des importantes mesures adoptées par le gouvernement malgré la situation difficile du pays, confronté à des difficultés politiques. Le gouvernement a mené des réformes législatives, notamment avec la rédaction d’un projet de loi sur les organisations syndicales. Ce projet a été soumis au BIT pour commentaires. Il faut saluer le dialogue social que le gouvernement a entamé, dialogue qui traduit son respect de la liberté syndicale. La commission devrait tenir compte des mesures positives adoptées par le gouvernement.
Le membre employeur de l’Algérie a affirmé que le gouvernement, qui avait coopéré avec le BIT et fait d’énormes progrès en matière de réforme législative, devait être encouragé et soutenu. Il convient aussi d’appuyer les mesures prises par le gouvernement, en concertation avec les partenaires sociaux, afin de lever les points qui posaient problème dans le projet de loi sur les syndicats et mettre en place une législation conforme aux conventions de l’OIT ratifiées. Toutes les initiatives prises par les autorités égyptiennes sont des avancées importantes qui méritent soutien et encouragement.
Le membre gouvernemental de la Libye a indiqué que le gouvernement a apporté la preuve de sa détermination à appliquer pleinement la convention en modifiant sa législation sur les syndicats. Le nouveau projet de loi sur les organisations syndicales offre le cadre de protection adéquat pour les travailleurs, en particulier parce qu’il a été élaboré en collaboration avec le BIT. L’orateur s’est toutefois dit surpris par l’inscription de ce pays sur la liste des cas devant être examinés par la commission, étant donné les mesures positives que le gouvernement a déjà prises. Il a instamment prié la commission de tenir compte de la volonté du gouvernement de respecter pleinement la convention.
Le membre gouvernemental de la Fédération de Russie a exprimé sa profonde gratitude au représentant gouvernemental pour les informations exhaustives qu’il a fournies sur les mesures prises pour respecter pleinement les dispositions de la convention. Il s’est déclaré satisfait du dialogue social tripartite mené en Egypte. La coopération du gouvernement avec le BIT et les efforts déployés par celui-ci pour tenir compte des commentaires du BIT sur le projet de loi sur les syndicats ont été salués. Ils ont donné lieu à des progrès notables et visibles, malgré les multiples difficultés rencontrées par le gouvernement, et d’autres progrès seront certainement encore accomplis. Les débats de la commission doivent servir à saluer les efforts déployés par le gouvernement pour respecter les normes internationales du travail, en particulier dans le domaine de la liberté syndicale, et à les encourager.
La membre travailleuse de l’Italie, s’exprimant également au nom des membres travailleurs de la Belgique, de l’Espagne et du Royaume-Uni, a rappelé que le corps mutilé de Giulio Regeni a été retrouvé près du Caire le 3 février 2016. Agé de 28 ans et étudiant en sociologie à l’Université de Cambridge, ses travaux de recherche portaient sur l’organisation des syndicats en Egypte. Sa famille ne sait toujours pas qui est derrière son enlèvement et pourquoi il a été torturé et assassiné sans raison. Beaucoup d’incertitudes demeurent étant donné l’absence de coopération entre les autorités égyptiennes et italiennes. On sait que M. Regeni a été torturé pendant sept jours et qu’il est mort de mort lente. Le quotidien italien La Repubblica a révélé que des responsables de l’Agence nationale de sécurité sont directement impliqués dans ce meurtre. En conséquence, le Procureur de Rome a demandé au Procureur du Caire à pouvoir interroger ces agents. Sa demande est restée sans réponse. Ce cas n’est pas isolé. Au cours des trois dernières années, des organisations non gouvernementales ont signalé 1 124 assassinats, en plus des décès en détention, des cas de tortures, individuelles et collectives, de négligence médicale en cours de détention, et autres formes de violence exercée par l’Etat. Malgré les preuves du contraire, le gouvernement nie toute implication dans ces crimes et refuse de s’y intéresser. Le meurtre de Giulio Regeni révèle un grave déficit en Egypte, qui a aussi été le moteur du mouvement de la place Tahrir: le droit de l’homme fondamental des travailleurs à se syndiquer pour changer leur situation, se libérer et instaurer de manière pacifique une société plus juste. Le cas de M. Regeni est devenu un symbole pour tous les Italiens et le gouvernement doit savoir que justice sera faite.
Le membre gouvernemental du Ghana a rappelé que le gouvernement procède actuellement à l’examen d’un nouveau projet de législation. La plupart des parties prenantes, y compris les travailleurs, les employeurs, la société civile et l’OIT ont été associés à cet examen, dans lequel il a été tenu compte des commentaires formulés par la commission d’experts à propos du renforcement des dispositions de la liberté syndicale, de la garantie du pluralisme syndical et de la nécessité d’inscrire dans le nouveau projet de code du travail certaines catégories de travailleurs vulnérables, tels les travailleurs domestiques. L’orateur espère que le gouvernement progressera sans attendre dans cet examen afin de garantir l’application de la convention.
La membre gouvernementale du Zimbabwe a affirmé que l’exposé complet du gouvernement a aidé à faire la lumière sur ce cas. D’après les observations des employeurs et des travailleurs de l’Egypte, il est évident que les partenaires tripartites participent aux réformes en cours. Les parties concernées ont été consultées et approuvent le projet de loi sur les organisations syndicales. Par conséquent, les partenaires tripartites sont encouragés à poursuivre leur collaboration sur ce point. L’oratrice partage le point de vue du représentant gouvernemental qui met en doute les critères utilisés pour dresser la liste des cas de pays examinés par la commission. Le gouvernement a prouvé sa détermination et sa volonté de donner effet aux conventions ratifiées et de collaborer, en dépit des circonstances difficiles. Les membres employeurs et travailleurs de l’Egypte ont reconnu l’existence du dialogue social dans le pays. Le Bureau est appelé à continuer à fournir une assistance technique, qui permettra d’accélérer le processus de réforme du droit du travail.
Le membre travailleur de la République arabe syrienne a soutenu le projet de loi sur les organisations syndicales qui devrait bientôt être soumis au Parlement. Les commentaires du Bureau sur le projet de loi sont accueillis avec satisfaction et la commission est invitée à tenir compte de la situation complexe que l’Egypte a connue ces dernières années. Le BIT devrait continuer de fournir une assistance technique à des pays qui, comme l’Egypte, progressent concrètement vers le respect de la convention.
Le représentant gouvernemental a tenu à préciser, concernant les doutes exprimés par les membres travailleurs quant à certaines des réalisations mises en avant, que plusieurs commentaires portent apparemment sur la loi sur les syndicats, ou sur une précédente version du projet de loi sur les organisations syndicales, qui a été révisé depuis lors, à la lumière des commentaires du BIT. Il est important de rappeler que, depuis 2011, l’Egypte a subi de profonds bouleversements et qu’elle n’a pu progresser qu’une fois le calme revenu, depuis la mi-2013, grâce notamment à la tenue d’élections présidentielles, à l’adoption de la Constitution et à la reprise des travaux par la Chambre des représentants, l’organe chargé d’adopter les lois. Nombre d’interventions n’étaient apparemment fondées que sur des ouï-dire, et non sur une étude de la situation réelle. L’Egypte a bien avancé s’agissant du projet de loi sur les organisations syndicales destiné à remédier aux lacunes de la loi actuelle. Le nouveau texte, fondé sur la liberté syndicale, est le fruit d’une collaboration tripartite et a été approuvé dans de nombreux commentaires du BIT. Le projet de loi abolit toute distinction entre les différentes organisations syndicales, et le gouvernement doit prendre toutes les mesures nécessaires pour finaliser la loi afin de garantir la protection des syndicats. En réponse à la déclaration de la membre travailleuse de l’Italie, l’orateur a fait observer que le drame qu’elle a évoqué a également secoué la population égyptienne. Bien que la déclaration concerne un crime dont la commission n’a pas à se saisir, des procédures sont en cours entre le Procureur en Egypte et son homologue italien, et une réunion de coordination s’est tenue le 17 mai, à laquelle participait une équipe d’enquêteurs judiciaires de Rome. L’orateur mentionne également le cas d’un citoyen égyptien victime d’un crime en Italie, crime qui a donné lieu à l’ouverture d’enquêtes similaires, menées dans un même esprit de collaboration. Enfin, l’orateur a tenu à souligner que l’Egypte ne voit aucun obstacle à instaurer la liberté syndicale et entend adopter le projet de loi sur les organisations syndicales, avec l’appui et la coopération technique du BIT. Le gouvernement a mis en place des procédures pour établir, avant la fin de l’année, un système d’organisations syndicales libres et fortes. L’appui du BIT ces dernières années a contribué à multiplier les progrès réalisés, de manière transparente et ouverte. La loi sera adoptée et servira l’intérêt public, en pleine conformité avec sa Constitution et les conventions internationales ratifiées par l’Egypte.
Les membres travailleurs, tout en remerciant le représentant gouvernemental pour les explications et précisions apportées, ont réagi à certains points. Ils ne considèrent pas que l’émiettement du mouvement syndical soit une bonne chose, mais entre le syndicat unique (comme c’est le cas en Egypte actuellement) et l’émiettement dont a parlé le représentant gouvernemental, le chemin est long. Il est admis que sur la base de la convention des seuils de représentativité puissent être instaurés si ces seuils sont raisonnables, mais là n’est pas le débat. Les circulaires ministérielles déjà évoquées ont été édictées suite à l’avis du Conseil d’Etat. Cet avis considère qu’au titre de la législation actuelle les syndicats indépendants sont illégaux. Or, de l’aveu même du gouvernement, cette législation est contraire à la convention. Le gouvernement prétend que la législation en question a connu des modifications et que les remarques des membres travailleurs ne seraient plus valables. Il est toutefois regrettable qu’il n’ait pas jugé utile de transmettre à la présente commission le projet de texte dans sa dernière version, afin que ses membres soient pleinement éclairés. Le respect total et inconditionnel de la liberté syndicale implique de prendre des mesures concrètes pour respecter et faire respecter cette liberté: i) à court terme, il appartient au gouvernement de retirer les circulaires ministérielles qui reviennent à interdire les syndicats indépendants en pratique. Un Etat qui souhaite réellement garantir la liberté syndicale n’a pas besoin qu’une loi soit votée pour en assurer l’exercice. Il suffit de s’abstenir de prendre des mesures qui entraînent sa limitation; ii) à moyen terme, la loi en préparation devra être conforme à toutes les dispositions de la convention et remédier aux critiques concernant la législation actuelle. Plus particulièrement, cela implique que la nouvelle législation garantisse l’expression d’un pluralisme syndical, en veillant à ce qu’aucun syndicat ne puisse être favorisé au détriment des autres. En outre, elle devra garantir la liberté des travailleurs de s’affilier à l’organisation de leur choix, sans qu’aucun critère ou restriction non admis par la convention ne leur soient imposés. Le gouvernement devrait s’abstenir de prendre des dispositions ayant pour conséquence de porter atteinte à l’indépendance et à l’autonomie financière des organisations, telles que l’instauration d’un contrôle sur leur comptabilité. Il en va de même du respect du droit à l’élaboration des statuts et règlements administratifs, sans ingérence de la part des autorités. A cette fin, le gouvernement pourrait continuer à solliciter l’assistance technique du BIT. Enfin, compte tenu des différentes informations portées à la connaissance de la commission d’experts et relayées dans cette enceinte, une mission de contacts directs est fortement recommandée.
Les membres employeurs ont souligné leur engagement en faveur de la liberté syndicale qui concerne à la fois les organisations d’employeurs et de travailleurs. La liberté syndicale est la pierre angulaire de la démocratie et joue un rôle essentiel dans l’instauration d’un climat de relations professionnelles stables, propices aux investissements. Compte tenu de l’importance des problèmes soulevés, les débats de la commission ont permis de mieux comprendre le présent cas. Les membres employeurs ont accueilli avec satisfaction l’engagement du gouvernement, et les conclusions de la commission devraient se concentrer sur les modalités d’accompagnement en ce qui concerne la rédaction et l’adoption d’un projet de loi final sur les syndicats. Le gouvernement est invité à continuer d’associer les partenaires sociaux au dialogue social et à rendre compte de ses efforts à la commission d’experts pour qu’elle puisse prendre acte des progrès accomplis. Les membres employeurs ont dit soutenir les processus menés par le gouvernement, en collaboration avec le BIT, en ce qui concerne la finalisation du projet de loi sur les organisations syndicales en application de la convention.
Conclusions
La commission a pris note des informations que le représentant gouvernemental a fournies oralement et de la discussion qui a suivi.
La commission a regretté le nombre de divergences déjà anciennes entre la législation nationale et les dispositions de la convention. Elle a également regretté le fait que, malgré les demandes répétées de la commission d’experts, le gouvernement n’a pas communiqué copie du projet du code du travail ni du projet de loi sur les organisations syndicales et la protection du droit d’organisation.
Prenant en compte la discussion qui a eu lieu sur ce cas, la commission a prié le gouvernement de l’Egypte de:
- s’assurer que le projet de loi sur les organisations syndicales, qui se trouve actuellement devant la Chambre des représentants pour adoption, est conforme à la convention, en particulier en ce qui concerne les préoccupations liées à l’institutionnalisation d’un système de syndicat unique;
- communiquer copie de ce projet de législation à la commission d’experts;
- garantir que tous les syndicats en Egypte peuvent mener leurs activités et élire leurs dirigeants en toute liberté, en droit et dans la pratique, conformément à la convention.
La commission a prié le gouvernement d’accepter une mission de contacts directs de l’OIT pour évaluer les progrès accomplis à la lumière des conclusions susmentionnées, et a demandé que ces informations ainsi qu’un rapport détaillé du gouvernement soient communiqués à la commission d’experts pour examen à sa prochaine réunion en novembre 2017.
Le représentant gouvernemental a indiqué que son gouvernement s’opposait totalement et faisait objection à l’ensemble des conclusions puisqu’elles ne reflètent pas la discussion qui a eu lieu devant la commission et ne reflètent également pas la réalité. Il a demandé l’opinion du Conseiller juridique du Bureau sur la façon de procéder lorsqu’un gouvernement formule des objections sur les conclusions.
Le membre travailleur de l’Egypte a indiqué qu’il y avait une tentative de politiser les conclusions de la commission au détriment de l’Egypte. Les conclusions ne reflètent pas le fait qu’un projet de loi ait été présenté à la Chambre des représentants.
Le Conseiller juridique a indiqué que la question soulevée concernait la procédure à suivre pour l’adoption des conclusions de la commission sur les cas individuels lorsque le gouvernement concerné souhaite formuler des objections aux conclusions proposées. Il est important de rappeler que, en exerçant ses fonctions, la Commission de l’application des normes de la Conférence se base sur le Règlement de la Conférence internationale du Travail, mais a également développé ses propres méthodes de travail ainsi qu’une longue pratique au cours des années. Les conclusions sont élaborées afin de refléter le plus fidèlement possible les échanges et discussions ayant eu lieu sur la base d’un consensus. Il peut arriver, et il est en effet arrivé dans le passé, qu’un gouvernement exprime son désaccord avec les conclusions. Dans ces cas, le désaccord du gouvernement a toujours été fidèlement reflété dans le Compte rendu des travaux. Cette pratique régulière et de longue date a toujours donné satisfaction aux différents gouvernements puisque leurs objections ou désaccords ont été fidèlement reproduits.
Le représentant gouvernemental a remercié le Conseiller juridique de sa réponse. Le gouvernement est opposé aux conclusions, lesquelles sont inexactes et ne reflètent pas les faits. Elles ne contiennent aucune référence au nouveau projet de loi, bien qu’il ait été soumis au BIT à deux reprises, avant son dépôt devant le Parlement, et que le BIT ait fait part de ses commentaires en mai dernier. Les conclusions ne sont pas conformes à la réalité: rien n’est exact. L’orateur aurait accepté les conclusions si elles avaient reflété les événements qui se sont produits mais, comme leur contenu est matériellement erroné, il a déclaré qu’il devait s’y opposer.
Un autre représentant gouvernemental a indiqué que la question qu’il souhaitait soulever auprès du Conseiller juridique n’était pas liée à la pratique de la commission mais au fait que le président avait demandé aux membres de la commission s’ils avaient une objection avant l’adoption des conclusions. En cas d’objection, comme en l’espèce, la question est de savoir si le président peut poursuivre en déclarant que les conclusions ont été adoptées par consensus.
Le Conseiller juridique a répondu que le président peut poursuivre sur la base d’une large majorité en faveur de l’adoption de conclusions même lorsque des objections sont exprimées. Le principal devoir du président est de mener les discussions conformément au Règlement de la Conférence. Par conséquent, il peut procéder à l’adoption des conclusions malgré un désaccord légitimement exprimé par le gouvernement concerné, tant que toutes les déclarations et tous les faits sont fidèlement reflétés dans le Compte rendu des travaux.
Le membre travailleur de l’Egypte a indiqué qu’il ressort des conclusions que le BIT n’a pas reçu copie du projet de loi. Il s’est demandé comment cela était possible puisqu’un fonctionnaire du BIT s’est rendu dans le pays, a obtenu une copie du projet de loi sur lequel les partenaires sociaux s’étaient accordés et a fourni des commentaires sur ce texte. Dans les circonstances particulières dans lesquelles se trouve le pays, il est incompréhensible que la commission exprime une quelconque déception. Une législation, qui pourrait contribuer à la paix et ouvrir une nouvelle ère pour le peuple égyptien, a été élaborée avec les partenaires sociaux. Bien que les syndicats aient exprimé leur désaccord sur certains points, il existe un consensus général sur la question. Pourtant, là où le gouvernement espérait un soutien de la part de l’OIT, celle-ci a exprimé des regrets. Les conclusions suggèrent que la situation n’a pas évolué, alors que d’énormes progrès ont été accomplis grâce à un énorme travail. Les conclusions ne tiennent pas du tout compte de ces progrès.
Le président de la commission, tout en prenant note des interventions et en indiquant qu’elles seraient reflétées intégralement dans le Compte rendu des travaux de la Conférence, a demandé au gouvernement de contacter le secrétariat afin d’assurer le suivi de ce cas.
Le gouvernement a communiqué les informations écrites suivantes.
S’agissant de la publication de la Déclaration sur la liberté syndicale faisant suite à la révolution du 25 janvier 2011, le gouvernement fait part de sa volonté d’assurer le respect des normes internationales du travail relatives à la liberté syndicale. En conséquence, des efforts ont été déployés et de nombreuses mesures ont été prises afin de traiter les questions soulevées dans le domaine de la liberté syndicale. Le gouvernement met en particulier l’accent sur les éléments suivants. L’Egypte a organisé au Caire, en collaboration avec le BIT, l’atelier «Les perspectives de la liberté syndicale» qui s’est tenu le 9 avril 2013, ainsi que plusieurs sessions de dialogue avec la société civile, lesquelles ont débouché sur un large accord en vue de la création d’un comité national chargé d’un réexamen général de l’ensemble de la législation du travail pertinente. Le ministère de la Main-d’œuvre et de l’Immigration a invité toutes les parties prenantes concernées à participer à ce comité national, et notamment les représentants des travailleurs, les syndicats indépendants, la Fédération égyptienne des syndicats (ETVF), les employeurs, les organes gouvernementaux concernés, le ministère de la Justice, le Conseil de la Choura et les organisations de la société civile. Le comité national s’est réuni à dix reprises et a publié une recommandation finale demandant l’abrogation de la loi sur les syndicats no 35 de 1976 et son remplacement par le projet de loi préparé précédemment et discuté pendant la dernière session du parlement dissous, tel qu’amendé pour tenir compte des commentaires de la commission d’experts de l’OIT ainsi que d’autres conventions internationales du travail pertinentes ratifiées par l’Egypte. Après discussion et réexamen de chaque chapitre du nouveau projet de loi par le comité national, le texte a été soumis au Conseil des ministres qui l’a approuvé le 29 mai 2013. Il a ensuite été soumis au Conseil de la Choura, actuellement en charge des questions législatives, en vue de sa discussion et de son approbation. La session syndicale en cours, supposée s’achever le 27 mai 2013, a été prorogée pour une durée d’un an ou jusqu’à la promulgation de la nouvelle loi par le Conseil de la Choura, à la première de ces deux échéances. Cette mesure a été prise afin d’éviter une rupture et de permettre une discussion approfondie de la nouvelle loi sur la liberté syndicale. Les représentants des syndicats indépendants qui se sont récemment constitués ont pu participer librement à diverses activités, réunions et conférences internationales, notamment à la Conférence internationale du Travail, en 2011 et en 2012, ainsi qu’à l’actuelle 102e session de la CIT.
En outre, devant la commission, un représentant gouvernemental a fait part de l’étonnement de son gouvernement suite à l’observation de la commission d’experts concernant l’absence d’une législation sur les syndicats qui assure leur indépendance et leur liberté en Egypte, alors que la nouvelle Constitution prévoit ces garanties dans son article 53. Par ailleurs, les autorités ne peuvent pas dissoudre les syndicats, les fédérations et les coopératives, ou dissoudre leurs organes de direction à moins d’une décision judiciaire dans ce sens.
S’agissant des défis que pose l’application de la convention, il faut bien comprendre le contexte social et politique général qui prévaut en Egypte si l’on veut parvenir à des conclusions complètes et équilibrées. Le 25 janvier 2011, l’Egypte a été le théâtre d’une révolution contre un régime qui, pendant de nombreuses années, a bafoué les droits des Egyptiens, et notamment des travailleurs. Si la phase de transition politique est riche de possibilités pour la société, elle pose également d’importants défis. La difficulté la plus importante résulte de l’absence d’institutions législatives élues pendant plusieurs périodes consécutives, sans parler de leur dissolution par décisions judiciaires de la Cour constitutionnelle. L’Egypte a, de ce fait, pris du retard dans la révision globale de l’ensemble de sa législation destinée à la mettre en conformité avec la nouvelle Constitution.
Outre les informations écrites du gouvernement concernant certaines des mesures prises pour assurer le respect de la convention, dont le nouveau projet de loi sur la liberté syndicale, le gouvernement a informé régulièrement l’OIT de l’évolution du processus de façon à pouvoir bénéficier de son expertise technique. Alors que la Commission sur la main-d’œuvre et les migrations du Parlement avait complété l’examen du projet de loi, une décision judiciaire a dissous le Parlement, ce qui a retardé la promulgation de la loi. Cela étant, ce retard ne veut pas dire qu’il n’y a pas de liberté d’association et de pluralisme syndical en Egypte. Conformément à la Déclaration sur la liberté syndicale de mars 2011, il existe 13 fédérations générales indépendantes et 1 228 conseils de syndicats qui travaillent en toute liberté et en toute indépendance sans aucune ingérence de l’Etat. La commission d’experts s’est en outre dite satisfaite de certaines des mesures prises par l’Egypte au titre de la convention no 87, et a souligné le rôle que joue l’assistance technique à cet égard.
S’agissant des effets du retard pris dans la promulgation du projet de loi sur la liberté syndicale, l’orateur a attiré l’attention de la commission sur le fait que la délégation égyptienne qui participe à la Conférence est composée de six fédérations générales indépendantes, ce qui constitue un fait nouveau dans l’histoire de la participation des syndicats égyptiens aux conférences internationales. S’interrogeant sur l’objectif de la liberté syndicale, l’orateur a dit que, s’il s’agissait de la garantir, la nouvelle Constitution égyptienne fournissait plus de garanties que toute autre loi. Si l’objectif est de réguler les activités syndicales, cela a déjà fait l’objet de discussions entre toutes les parties, ainsi qu’avec le BIT. Le Conseil des ministres a déjà approuvé ce point, et la question est actuellement examinée par le Conseil de la Choura. Si l’objectif est de vérifier la pratique, l’orateur invite la Commission de la Conférence à s’adresser aux six fédérations présentes à la Conférence. L’Egypte n’a eu de cesse de s’acquitter de ses obligations juridiques en vertu des conventions internationales du travail, notamment la convention no 87. Son pays attendait donc un vote de confiance et des encouragements de la part de l’OIT afin de poursuivre sur le bon chemin. L’orateur a exprimé la profonde déception de son gouvernement de voir l’Egypte incluse dans la liste des cas individuels. Cela ne peut être dû qu’à l’absence d’informations justes et à une appréciation erronée de l’examen du cas de l’Egypte. L’orateur a renvoyé les membres de la Commission de la Conférence aux informations écrites fournies par son gouvernement qui contiennent des éléments qui ne figurent pas dans le rapport de la commission d’experts.
L’orateur a réaffirmé que son gouvernement était favorable à la réforme des travaux de la Commission de la Conférence afin de garantir transparence, objectivité et équilibre géographique de la liste annuelle de cas et d’éviter qu’elle ne devienne un moyen de rétorsion contre les pays qui souhaitent sincèrement progresser sur la voie des réformes en vue de protéger et de promouvoir les droits des travailleurs. Au vu de ce qui précède, l’orateur a demandé à la Commission de la Conférence d’envisager de retirer l’Egypte de la liste des cas individuels et de l’étudier à l’avenir comme cas de progrès.
Les membres employeurs ont fait remarquer que la dernière discussion de ce cas remonte à 2010 et qu’il y a lieu de tenir compte de la situation que connaît le pays. Le nouveau Parlement doit encore être élu et les élections devraient avoir lieu dans le courant de 2013. Ils rappellent que ce cas a pour origine les commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI) et non pas ceux d’un syndicat national et qu’il porte sur: i) la prédominance de la Fédération égyptienne des syndicats (ETUF); ii) l’emprisonnement de Kamal Abbas, un représentant du Centre des services aux syndicats et aux travailleurs; et iii) les dispositions de la loi no 35 de 1976 sur les syndicats et du Code du travail relatives à l’institutionnalisation d’un système de syndicat unique, aux contrôles sur les syndicats de base et aux restrictions à l’exercice du droit de grève et au recours à l’arbitrage obligatoire.
Les membres employeurs ont relevé que le gouvernement a pris plusieurs mesures, notamment en élaborant un nouveau Code général du travail qui sera soumis au Parlement après son élection, et dont le texte répond aux points soulevés par la CSI. Alors même que le projet de Code du travail n’a pas été adopté, les syndicats, y compris des syndicats qui ne sont pas affiliés à l’ETUF, ont commencé à proliférer dans le pays, ce qui incite les membres employeurs à penser eux aussi que le gouvernement n’exerce aucun contrôle sur les syndicats. S’agissant des restrictions que la législation en vigueur apporte aux droits syndicaux, et qui font l’objet du présent cas, les membres employeurs considèrent que celles-ci ne semblent pas être mises en pratique. La récente prolifération de syndicats a été source d’une grande confusion, et de nombreux syndicats, les nouveaux en particulier, ne comprennent pas leurs obligations; des grèves qui seraient déclarées illicites dans de nombreux systèmes juridiques seraient apparemment de pratique courante. Un tel état de choses n’est pas propice à l’harmonie sur le lieu de travail et compromet la stabilité et le bon fonctionnement des relations de travail. Le gouvernement provisoire devrait veiller à ce que ces activités soient rapidement, efficacement et spécifiquement encadrées par la législation nationale. Les membres employeurs réitèrent leur position suivant laquelle la convention no 87 ne peut constituer une source d’orientations pour ce qui est du droit de grève. S’agissant des allégations de traitement injustifié de responsables syndicaux, ils notent que le cas de M. Abbas a été pris en charge par l’ETUF elle-même et considèrent que le fait que le tribunal l’ait remis en liberté montre que justice a été rendue. Quant aux retards dans l’adoption du projet de code, les membres employeurs ont estimé que l’argument selon lequel il faudrait attendre l’élection du nouveau Parlement pourrait être vu comme un prétexte pour ne rien faire. Ils ont donc demandé instamment au gouvernement provisoire d’examiner au moins le projet de code au regard de sa conformité pleine et entière avec les obligations découlant des traités internationaux. Le gouvernement provisoire doit également redoubler d’efforts en vue d’une application rapide des lois, ce qui est conforme avec la convention et lui donne effet.
Finalement, les membres employeurs ont de nouveau estimé que ce cas semble avoir été examiné hors contexte. La pratique actuelle des syndicats qui démontre qu’il n’existe que peu voire aucune restriction à la liberté syndicale pourrait porter atteinte à l’ordre public, ce qui n’est pas le but de la liberté syndicale. Par conséquent, le projet de Code du travail doit être examiné sans délai et les membres employeurs partagent l’avis de la commission d’experts selon lequel les projets de loi doivent être soumis aux partenaires sociaux pour une meilleure évaluation de la situation. Si les nouvelles lois sont conformes à l’esprit et à la lettre de la convention, les membres employeurs seront alors disposés à les considérer comme un cas de progrès.
Les membres travailleurs, prenant en compte les commentaires de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) du 29 août 2012, les discussions de la semaine dernière sur le mandat de la commission d’experts ainsi que sur le lien entre la liberté syndicale et le droit de grève, souhaitent rappeler que la convention no 87 proclame le droit des travailleurs et des employeurs de constituer sans autorisation préalable les organisations de leur choix et de s’y affilier. Les organisations de travailleurs et d’employeurs s’organisent librement et ne peuvent être dissoutes ou suspendues par voie administrative. La liberté syndicale est un droit de l’homme qui constitue la condition préalable à des négociations collectives et à un dialogue social sains au profit des employeurs, des travailleurs et de la paix sociale. La Commission de la Conférence et le Comité de la liberté syndicale contribuent ensemble à résoudre les difficultés d’application de ce droit fondamental à travers le monde. Le groupe des travailleurs entend également souligner qu’il soutient pleinement la commission d’experts et la portée juridique de ses observations. Les membres travailleurs soutiennent que l’existence du droit de grève résulte de la lecture conjointe des articles 3 et 10 de la convention.
Les membres travailleurs ont rappelé que, à maintes reprises et pour la dernière fois en 2010, la Commission de la Conférence a mis en cause la loi no 35 de 1976 sur les syndicats, et ce pour les raisons suivantes: l’institutionnalisation d’un système de syndicat unique; le contrôle sur les organisations syndicales et sur les procédures de nomination et d’élection de leurs comités directeurs; le contrôle sur leur gestion financière; l’exigence d’une approbation préalable avant toute action collective; et enfin la possibilité de licencier sans justification des travailleurs agissant en dehors de la structure syndicale en place. Ils ont souligné que, depuis lors, le paysage syndical égyptien a considérablement évolué. Si l’ETUF continue d’être le syndicat dominant, d’autres fédérations ont émergé et ont mobilisé, entre 2004 et 2011, 1,7 million de travailleurs dans des actions collectives.
Toutefois, ont-ils souligné, l’ordre législatif n’a pas encore suivi l’évolution syndicale et sociétale, et l’ETUF semble avoir conservé le bénéfice du monopole étatique. C’est en tout cas ce que peut laisser penser la nouvelle Constitution adoptée en fin d’année dernière. Son article 53 dispose en effet qu’un seul syndicat sera reconnu par secteur ou par profession. Par ailleurs, de manière générale, la nouvelle Constitution protège mieux les droits des employeurs que ceux des travailleurs puisque les dispositions les concernant n’ont pas force obligatoire ni pour les employeurs ni pour l’Etat. Cette évolution des choses ne concorde pas avec les intentions exprimées par le gouvernement et telles que contenues dans la «Déclaration sur la liberté syndicale» de mars 2011 de respecter toutes les conventions ratifiées. De plus, la nouvelle loi sur la liberté syndicale tarde à être adoptée suite à des couacs politiques successifs. Récemment, le processus a cependant nettement repris avec la réalisation d’un atelier sur la liberté syndicale en collaboration avec le BIT, suivi par l’installation d’un comité national pour un réexamen de toute la législation en question. D’après les déclarations du gouvernement, les travaux de ce comité ont déjà débouché sur un accord pour substituer la loi no 35 sur les syndicats par un nouvel instrument législatif. Un projet de loi aurait été élaboré et amendé pour tenir compte des observations de la commission d’experts et, après avoir été approuvé par le Conseil des ministres, il serait actuellement soumis au Conseil de la Choura en charge des questions législatives. Les membres travailleurs souhaitent avec impatience une issue heureuse à cette histoire.
Un membre travailleur de l’Egypte a indiqué à la Commission de la Conférence que l’ETUF a fait l’objet, depuis l’élection de son nouveau conseil exécutif en novembre 2011, d’une série d’actes d’ingérences de la part des autorités publiques fondées sur la loi sur les syndicats. Ces deux dernières années, le gouvernement a suspendu l’élection de conseils exécutifs de plus de 500 organisations syndicales établies par l’ETUF au sein d’entreprises. Rappelant que la loi sur les syndicats impose également une restriction au droit des organisations syndicales de déterminer leurs statuts ainsi que leur règlement financier, l’orateur précise qu’il exprime son rejet vis-à-vis de toute forme d’ingérence du gouvernement et de tout contrôle administratif des organisations syndicales, ainsi que de la prise de contrôle du mouvement syndical par tout parti politique ou toute faction religieuse.
L’ETUF insiste actuellement auprès du gouvernement pour qu’il achève le nouveau projet de loi sur la liberté syndicale, avant de l’envoyer au BIT afin de vérifier sa conformité avec la convention. En ce qui concerne la ratification par l’Egypte du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels qui reconnaît le droit de grève, l’orateur fait remarquer combien il est important que ce droit soit protégé sans conditions, dans la mesure où il constitue également une garantie du droit d’organisation. Il ne s’agit pas d’une faveur accordée par les gouvernements ou les employeurs, pas plus qu’il ne s’agit d’un crime nécessitant une sanction. Récemment, les travailleurs égyptiens ont prouvé que le droit de grève est un moyen spontané de résistance pour les personnes dont les droits ont été bafoués ou qui sont victimes d’une injustice. Le membre travailleur exhorte les partenaires sociaux égyptiens à collaborer en vue de modifier le Code du travail et autres règlements pertinents afin de garantir le droit de grève et son exercice libre de toute menace, ainsi que le droit aux rassemblements et manifestations pacifiques. Rappelant que la commission d’experts s’est dite satisfaite de certaines mesures prises par le gouvernement, il sollicite l’assistance du BIT en vue de renforcer les capacités des organisations syndicales.
Le membre employeur de l’Egypte a considéré que certaines critiques adressées contre le gouvernement n’étaient pas équitables. Il a indiqué que le gouvernement a élaboré un nouveau projet de loi, adopté par le Cabinet des ministres, qui est en conformité avec la convention. Il convient de rappeler que, depuis février 2011, le pays vit une période de transition et qu’en l’absence de parlement il n’est pas possible de procéder à des réformes législatives. Même si le projet de loi n’a pu être adopté, son esprit est d’ores et déjà appliqué par le gouvernement comme le montrent la création d’un conseil tripartite et la présence de six organisations syndicales dans la délégation égyptienne à la présente Conférence internationale du Travail, ce qui constitue une situation sans précédent. Il a ensuite indiqué que les libertés, en particulier celles d’expression et d’association doivent bien sûr être respectées, ce qui ne doit pas empêcher dans le même temps que tous les acteurs veillent au soutien de l’économie. Il convient de garantir le respect des lois qui, elles-mêmes, doivent respecter les droits des citoyens.
Le membre employeur affirme qu’il aurait été avisé de montrer plus de patience envers l’Egypte à la fois pour les raisons déjà mentionnées mais aussi du fait des circonstances économiques difficiles que traverse le pays. Il ajoute que certains aspects des commentaires de la commission d’experts traitent de questions mineures qui peuvent être réglées de manière plus appropriée au niveau local. Il demande finalement que l’Egypte puisse bénéficier de programmes de coopération technique plus poussés au profit de toutes les parties.
Le membre gouvernemental de l’Inde a fait part de la satisfaction de son gouvernement concernant les mesures prises par le gouvernement d’Egypte pour garantir un plus grand respect de la convention, en dépit des problèmes que pose cette période de profonds changements. Il s’est félicité des délibérations en cours sur le nouveau projet de loi sur la liberté syndicale, qui est le fruit du dialogue social tripartite mené par le ministère de la Main-d’œuvre et des Migrations. La conférence organisée par le gouvernement en partenariat avec le BIT témoigne assurément de la volonté du gouvernement de se conformer à la convention. En particulier, il faut souligner et se féliciter de l’annulation de la loi provisoire sur les manifestations et les grèves sur le lieu de travail. Il a fait ressortir l’importance de la coopération technique du BIT ainsi que du soutien et de la coopération des Etats Membres pour aider le pays à mettre la convention en application.
Le membre gouvernemental de l’Algérie a constaté que le gouvernement égyptien a réaffirmé par écrit sa volonté d’assurer le respect des normes internationales du travail relatives à la liberté syndicale. Bien plus, l’Egypte a déjà pris des mesures adéquates pour que toutes les parties concernées puissent, dans le cadre d’un comité national, procéder à un examen général de l’ensemble de la législation du travail. A cet égard, son gouvernement félicite l’Egypte de cette approche inclusive qui contribuera au renforcement de la culture de la concertation et du dialogue social. Les évolutions institutionnelles, politiques et sociales qu’a connues le pays au cours des derniers mois ainsi que les mutations en cours vont très certainement avoir des répercussions positives sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical. L’orateur invite le gouvernement à prendre appui sur les expériences réussies à travers le monde afin d’être à la hauteur des attentes des partenaires sociaux et en harmonie avec la législation internationale du travail.
Un autre membre travailleur de l’Egypte a déclaré que les travailleurs égyptiens avaient été sévèrement réprimés sous le régime antérieur. Ceux-ci souhaitent se défaire des vestiges de l’ordre ancien et retrouver le dialogue social et la liberté syndicale. Les travailleurs égyptiens ont contribué au dialogue social après la révolution afin qu’un Code du travail garantissant les droits syndicaux soit adopté. L’orateur s’est dit troublé par l’absence de fonctionnement du pouvoir législatif et par les obstacles mis à l’adoption d’un nouveau code. Les travailleurs égyptiens sont désormais las d’un dialogue social qui est devenu futile et inutile. Si des mécanismes de règlement des différends existaient dans le pays, on ne connaîtrait pas la situation actuelle, qui se caractérise par une multitude de manifestations et de grèves. L’orateur a exprimé son désespoir quant au possible échec de la prochaine législature et au fait que l’adoption du code pourrait être encore repoussée. Il a dit qu’il avait passé trois années en prison à cause de ses activités syndicales. La situation actuelle en matière syndicale en Egypte est toujours caractérisée par un climat de violence, de brutalité, de détentions, actes contre lesquels le code permettrait d’accorder une protection.
Un autre membre travailleur de l’Egypte a indiqué que sa fédération représentait plus de 3 millions d’agriculteurs égyptiens et a souhaité que le BIT fasse preuve de plus de précision dans le maniement du nombre d’affiliés des différentes organisations syndicales du pays. Il a réclamé que soit adoptée une stratégie claire conduisant à l’adoption rapide du nouveau Code du travail et a demandé à tous les acteurs tripartites de pleinement coopérer à cet égard.
Le membre gouvernemental de l’Ouzbékistan a félicité le gouvernement pour les nombreuses mesures qu’il a prises pour appliquer la convention. Beaucoup de syndicats se sont créés pour protéger différentes catégories de travailleurs, et la présence de six organisations syndicales dans cette Commission de la Conférence témoigne de l’engagement du gouvernement pour la mise en œuvre de la convention. La liberté syndicale fait l’objet de nombreux projets de loi, et le processus de leur élaboration prévoit des consultations tripartites. Le gouvernement essaie d’éliminer les obstacles aux activités des syndicats indépendants et prend des mesures ciblées pour la mise en œuvre de la convention.
Un observateur représentant la Confédération syndicale internationale (CSI) a estimé que le dialogue social, tel que pratiqué par le gouvernement, n’est qu’une manœuvre, comme le montre l’absence de consultation à propos du projet de loi sur le Code du travail. Il a fait état d’abus commis à l’encontre de dirigeants syndicaux et a indiqué que, au cours de cette année, des travailleurs manifestant pacifiquement avaient fait l’objet de violentes attaques, dans certains cas par la police, dans d’autres par des employeurs. Par ailleurs, 15 travailleurs ont été arrêtés dans l’entreprise Petrojet et 11 autres ont été suspendus. Il a plaidé en faveur de la mise en conformité de la loi no 35 avec la convention, en adoptant le Code du travail, et a demandé au gouvernement de cesser de s’ingérer dans les affaires des syndicats.
Le membre gouvernemental de la Libye a estimé que le grand nombre de conventions de l’OIT que l’Egypte a ratifiées et le nombre de rapports que le pays a présentés démontrent clairement sa volonté d’appliquer ces instruments, ainsi que ses efforts pour traduire les dispositions des conventions dans sa législation nationale. Rappelant que le système politique de l’Egypte a connu d’importants changements, il a demandé au BIT de fournir une assistance technique pour aider le pays à mettre au point les réponses aux commentaires de la commission d’experts sur certaines conventions ratifiées.
Le membre travailleur de la Tunisie a regretté que le nouveau régime en Egypte n’ait changé qu’en apparence car, en réalité, il continue à utiliser les mêmes méthodes de répression et de harcèlement à l’encontre du mouvement syndical. En réponse à un nombre record de 3 817 actions de protestation, en 2012, le gouvernement a utilisé les mêmes pratiques abusives, telles que des licenciements, arrestations, violences physiques, menaces et déductions de salaire au lieu de changer les politiques économiques et sociales à l’origine des troubles. Depuis que la convention a été ratifiée en 1957, les lois du travail successives n’ont pas permis de donner pleinement effet au principe de la liberté syndicale puisqu’elles reconnaissent la prérogative du gouvernement de s’ingérer dans les activités syndicales et de contrôler le financement des syndicats. La loi no 35 de 1976 sur les syndicats est toujours en vigueur et le droit de grève qui est expressément reconnu par le Code du travail de 2003 ne peut s’exercer dans la pratique, en particulier suite à l’adoption de la loi no 96 de 2012 sur la protection de la révolution. L’orateur s’est félicité de l’organisation, le 9 avril 2013, d’un atelier sur les questions de liberté syndicale et de l’approbation du projet de loi sur la liberté syndicale par le Conseil des ministres le 29 mai 2013, et il a exprimé l’espoir que le gouvernement mette fin à toutes les formes d’abus contre les syndicats et leurs membres.
Le membre travailleur de la Libye a indiqué que la loi no 35 sur les syndicats empêche les syndicats d’organiser des élections et permet au gouvernement de s’ingérer dans les activités syndicales, ce qui est contraire aux dispositions de la convention. Il y a lieu de s’interroger sur la bonne volonté du gouvernement et sa soi-disant détermination à garantir les droits syndicaux, dans la mesure où la situation ne fait que s’aggraver. Il y a aujourd’hui quatre fois plus de grèves et de manifestations que sous le régime Moubarak. L’orateur a demandé pourquoi les syndicats ne peuvent toujours pas organiser d’élections ni adopter leurs statuts s’il existe un véritable mouvement syndical, comme le prétend le gouvernement. En outre, il est difficile de comprendre pourquoi le mandat du Conseil de la Choura a été prolongé alors qu’il devait normalement prendre fin en 2010. Par ailleurs, il est curieux de constater que le gouvernement peut organiser des élections présidentielles et parlementaires et prétend qu’il n’est pas possible d’organiser des élections syndicales. Le gouvernement devrait cesser de traiter les syndicats avec condescendance et devrait plutôt établir le cadre approprié qui permettra de garantir la conformité avec la convention.
Le membre gouvernemental de la Turquie s’est félicité des efforts déployés par le gouvernement pour adopter un nouveau projet de loi sur la liberté syndicale, dans le cadre d’une procédure basée sur le dialogue social, ce qui atteste de l’attachement du gouvernement au tripartisme. Il y a également lieu de se féliciter de la création de centaines de nouveaux syndicats et comités et de la participation des organisations et confédérations syndicales aux niveaux régional et international, ce qui démontre clairement que le droit à la liberté syndicale est exercé. Il ne fait aucun doute que le gouvernement a inauguré une nouvelle ère de démocratie dans le pays et qu’il redoublera d’efforts pour parvenir à la pleine conformité avec les normes internationales du travail.
La membre travailleuse de l’Italie, s’exprimant au nom des membres travailleurs de l’Allemagne, la Belgique, l’Espagne, la France, la Grèce, les Pays-Bas, la Pologne, la Roumanie, la Slovaquie et les pays nordiques, s’est dite profondément préoccupée par les violations de la convention en Egypte. En dépit des promesses d’aligner les dispositions de la loi sur les syndicats et du Code du travail sur celles de la convention, de reconnaître et de protéger le droit de former des organisations syndicales, le gouvernement n’a fait aucun progrès pour répondre aux observations de la commission d’experts. De sérieux efforts doivent être accomplis pour garantir la liberté syndicale et la formation de syndicats indépendants, ces éléments étant indispensables à toute société démocratique; au lieu de cela, le gouvernement a approuvé, en août 2012, une nouvelle loi d’urgence qui restreint les libertés publiques et réintroduit les tribunaux militaires, sous prétexte de combattre la violence. L’orateur a attiré l’attention sur l’article 52 de la nouvelle Constitution qui porte atteinte aux droits syndicaux, autorise un seul syndicat par secteur et confère des pouvoirs extraordinaires au gouvernement pour contrôler l’activité syndicale, y compris le droit de dissoudre des syndicats. En outre, des dispositions en faveur des droits des femmes ont été retirées de la Constitution. Aucun des 234 articles de la Constitution ne garantit clairement les droits des femmes et l’égalité entre hommes et femmes, et les dispositions contre le travail des enfants et le travail forcé sont si vagues qu’elles sont pratiquement dénuées de sens. En outre, les décisions judiciaires, comme la décision du 4 juin 2013 de la Cour pénale du Caire, en vertu de laquelle 43 travailleurs ont été condamnés, témoigne d’un système qui ne garantit pas la liberté syndicale et qui réprime les activités syndicales. Le gouvernement doit prendre rapidement des mesures pour traiter les préoccupations de base des travailleurs égyptiens et de la communauté internationale.
La membre gouvernementale de Sri Lanka a appuyé les déclarations précédentes soulignant que l’Egypte traverse une phase de transition et est confrontée à de nombreux défis. Il est important de comprendre la nature et la portée des transformations politiques et socio-économiques qui se produisent. Le gouvernement a pris des mesures afin de mieux honorer les obligations qu’il a contractées de par la convention, notamment le nouveau projet de loi sur la liberté syndicale, élaboré au terme d’un long dialogue social tripartite et avec l’aide du BIT, et qui a été soumis à l’approbation du Parlement. Il s’agit là d’un bon exemple de l’engagement et de la détermination du gouvernement à concrétiser la liberté syndicale, en droit comme dans la pratique. Le BIT doit continuer à fournir une assistance technique et une aide au renforcement des capacités en répondant aux besoins réels de l’Egypte et accorder plus de temps pour que le problème puisse être réglé de manière efficace.
Le membre travailleur du Bélarus a exprimé son soutien aux travailleurs égyptiens et a noté que le gouvernement a invité toutes les organisations de travailleurs et d’employeurs à s’impliquer dans les discussions sur le projet de loi sur la liberté syndicale. Ce nouveau texte de loi constitue un pas important pour la promotion des principes de liberté et de justice. La commission d’experts devrait noter avec satisfaction les mesures prises par le gouvernement pour assurer l’application de la convention, et l’assistance technique du BIT sera utile à cet égard.
Le membre gouvernemental de Bahreïn s’est dit conscient du fait que le gouvernement est confronté à des défis énormes, ce qui est courant dans des pays qui traversent des changements historiques. Quoi qu’il en soit, le gouvernement a pris toutes les mesures en son pouvoir pour mettre pleinement en œuvre les dispositions de la convention. L’Egypte a une longue tradition de liberté syndicale et fait figure de modèle pour d’autres pays de la région. La commission devrait prendre en considération tous les efforts consentis à ce jour et les défis auxquels l’Egypte est actuellement confrontée. L’orateur a exprimé l’espoir que les conclusions reflètent objectivement la situation.
Le membre travailleur du Bénin a exprimé son soutien aux travailleurs égyptiens qui luttent pour l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail et pour le maintien de leurs droits syndicaux. Le gouvernement dispose de la force publique et empêche les travailleurs d’exercer leurs droits, et notamment le droit de grève qui est pourtant un droit inaliénable. De même, il n’est pas acceptable que le gouvernement s’ingère dans les affaires internes des syndicats. La commission doit être attentive et exiger du gouvernement qu’il respecte ses engagements, applique pleinement la convention et traite de manière diligente les plaintes qui sont déposées par les syndicats.
Un autre observateur représentant la Confédération syndicale internationale (CSI) a rappelé que les syndicats qui ont combattu l’ancien régime sont maintenant réprimés et certains de leurs membres sont emprisonnés. Le gouvernement ne semble pas avoir tiré les leçons du passé et ne comprend pas qu’il ne peut y avoir de développement économique sans liberté. L’Egypte doit évoluer et donner l’exemple d’une société démocratique. L’orateur a demandé que cesse la répression du mouvement syndical et l’ingérence des employeurs dans les affaires syndicales, que les syndicats puissent travailler avec des représentants des employeurs élus, que les conventions collectives soient respectées, et qu’il soit mis fin à l’unicité syndicale prévue dans la Constitution.
La membre gouvernementale du Sénégal a salué l’ensemble des mesures prises par le gouvernement pendant cette période de transition caractérisée par de profondes mutations sur les plans politique, économique et social. Certains acquis méritent déjà d’être soulignés: le maintien du dialogue social, comme en atteste la tenue de consultations tripartites élargies; la concertation inclusive qui sous-tend l’élaboration de la nouvelle législation qui, selon le gouvernement sera en conformité avec les normes de l’OIT; et les avancées positives notées par la commission d’experts, comme par exemple le retrait de la loi provisoire sur les manifestations et les grèves sur le lieu de travail. Il convient d’encourager les partenaires sociaux à poursuivre inlassablement leur action dans le sens du respect des normes sociales et d’exhorter le gouvernement à poursuivre ses efforts en vue de la pleine application de la convention.
Un membre travailleur de Bahreïn a déclaré, au nom de la Fédération des syndicats libres de Bahreïn (BFLUF), qu’il n’est pas juste d’avoir inscrit l’Egypte sur la liste des cas. Le gouvernement a remis le pouvoir aux mains du peuple et les élus ont besoin de plus de temps pour obtenir des résultats. Le dialogue social conduit par le gouvernement a donné lieu à un nouveau projet de loi qui a été adressé au Conseil des ministres pour adoption. Pour ce qui est du mouvement syndical, il a prouvé sa maturité avec l’adoption en avril 2013 d’une déclaration par laquelle la Fédération égyptienne des syndicats (ETUF) s’est adressée aux confédérations syndicales internationales afin d’améliorer la collaboration. Il est par ailleurs confirmé que toutes les restrictions imposées à chacune des organisations ont été levées. En ce qui concerne les allégations relatives aux syndicats contrôlés par le gouvernement, l’orateur a souligné que le gouvernement ne devrait pas faire l’objet de critiques au seul motif que ces syndicats ne sont pas affiliés à la CSI. La commission devrait se tenir à l’écart de cette controverse et ne pas utiliser la discussion de ce cas pour faire pression sur les syndicats non affiliés.
La membre gouvernementale du Soudan du Sud a déclaré que, au lieu de traiter avec mépris tous les efforts qui sont faits, les travailleurs devraient essayer de mieux comprendre la situation que connaît actuellement l’Egypte en ce qui concerne la convention no 87. Ceci suppose un travail collectif pour aboutir à l’adoption de la nouvelle loi sur la liberté syndicale. Le gouvernement devrait rester ouvert au dialogue pacifique et examiner les observations de la commission d’experts afin d’assurer le respect des dispositions de la convention. Compte tenu des moments difficiles que connaît l’Egypte en ce moment, le BIT devrait continuer à offrir son assistance technique et aider au renforcement des capacités.
Le membre travailleur du Soudan a déclaré que les syndicats libres sont devenus une réalité depuis la révolution du 25 janvier 2011. Toutefois, du temps est encore nécessaire pour consolider et laisser mûrir les nouvelles expériences, et la législation relative aux droits syndicaux devrait s’appliquer dans le cadre d’un dialogue social et avec la participation de toutes les parties concernées.
Le membre gouvernemental de l’Iraq a rappelé que la situation en Egypte évolue rapidement et est très délicate. Il faut saluer le gouvernement pour sa détermination à faire face à tous les problèmes. Des éléments objectifs montrent que le gouvernement agit dans le respect de ses obligations constitutionnelles, y compris le respect du principe de la liberté syndicale. De nombreuses réunions ont eu lieu qui ont débouché sur l’adoption de la «Déclaration sur la liberté syndicale» de mars 2011, laquelle reconnaît la liberté d’établir des organisations syndicales, et a permis la création de nombreuses organisations syndicales, comités et fédérations.
Le représentant gouvernemental a remercié les orateurs qui ont participé à la discussion. Treize des 21 orateurs ont félicité le gouvernement pour ses efforts et lui ont transmis leurs encouragements. En réponse à la déclaration des membres travailleurs, il convient de préciser que l’article 53 de la Constitution, auquel les orateurs se sont référés, traite des syndicats professionnels et du droit à pratiquer une profession, tandis que la liberté syndicale est traitée seulement dans l’article 52. En ce qui concerne certaines déclarations qui font allusion à des lois d’urgence et à une dictature militaire, le représentant gouvernemental a précisé qu’il ne s’agit que de mauvaises interprétations qui ne correspondent pas à la réalité actuelle. Pour la première fois, l’Egypte a élu un président qui n’est pas issu de l’armée. Tout en insistant sur le fait qu’il est important de disposer d’informations à jour et correctes, l’orateur a fait remarquer que, si par le passé il existait des raisons suffisantes pour que la commission examine ce cas, la situation est aujourd’hui complètement différente. En effet, l’Egypte compte plus de 3 000 comités syndicaux, plus de 835 grèves ont été organisées et aucun travailleur ayant participé à ces grèves n’a été blessé.
Les membres employeurs ont souligné que ce cas est un cas difficile parce qu’il porte sur des questions relevant du passé. Le gouvernement a élaboré une nouvelle loi sur la liberté syndicale qui, apparemment, répond à des problèmes de longue date. Aux termes de la convention no 87, la liberté syndicale est une norme du travail ayant trait aux conditions de travail et pas une liberté fondamentale dont jouit chaque citoyen. Dès lors, il est important de replacer les choses dans leur contexte et de se demander si toutes les manifestations, quelles qu’elles soient, organisées par des groupes qualifiés de syndicats se rapportent à des questions liées aux conditions de travail. L’Egypte sort d’une phase de grandes difficultés, et la patience s’impose dans plusieurs domaines. Les employeurs sont frustrés face à la liberté incontrôlée des syndicats et, de leur côté, les syndicats ont besoin de temps pour mûrir. Le gouvernement a besoin d’une certaine marge de manœuvre, mais il doit aussi, dans une certaine mesure, rendre des comptes; l’absence de législation ne peut pas, à elle seule, dégager le gouvernement de ses obligations. Les membres employeurs ont instamment invité le gouvernement à accélérer la tenue d’élections syndicales.
Les membres travailleurs ont souligné qu’il existe des divergences importantes entre les dispositions de la convention et la législation du travail égyptienne, et en particulier parce que celle-ci consacre un système de syndicat unique. Depuis 2008, le gouvernent a pris des mesures pour mettre la législation en conformité avec la convention. Depuis 2011, ces mesures se sont accélérées: des fédérations syndicales indépendantes ont été reconnues et un projet de nouvelle loi sur la liberté syndicale a pu être élaboré dans le cadre d’un dialogue social tripartite. Les membres travailleurs ont insisté pour que ce projet soit examiné par le BIT avant d’être définitivement adopté par le Conseil de la Choura.
La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental ainsi que de la discussion qui a suivi.
La commission a observé que les commentaires de la commission d’experts concernent plusieurs divergences de longue date entre la législation du travail et les dispositions de la convention, notamment s’agissant de la loi no 35 de 1976 sur les syndicats, qui est basée sur un système de syndicat unique.
La commission a noté l’engagement du gouvernement à garantir la liberté syndicale dans le pays. Le représentant gouvernemental a mentionné qu’un atelier sur la liberté syndicale, organisé en avril 2013, en collaboration avec le BIT, a débouché sur un vaste accord pour l’établissement d’une commission nationale chargée de réviser l’ensemble de la législation du travail. La commission nationale a émis une recommandation définitive pour que la loi no 35 sur les syndicats soit abrogée et soit remplacée par le projet de loi sur la liberté syndicale qu’elle a examiné et soumis au Conseil des ministres. Ce projet a été approuvé, le 29 mai 2013, par le Conseil des ministres et soumis, pour examen et approbation, au Conseil de la Choura, qui est actuellement l’organe compétent en matière législative. D’autre part, les élections des organes de direction des syndicats au titre de la loi no 35 sont de nouveau reportées d’un an ou bien jusqu’à la promulgation de la nouvelle loi par le Conseil de la Choura, si cette date est antérieure. Enfin, le représentant gouvernemental a déclaré que les représentants des syndicats indépendants nouvellement constitués ont pu participer librement à diverses activités, réunions et conférences, à l’échelle nationale et internationale, y compris la Conférence internationale du Travail depuis 2011.
La commission n’a pas abordé le droit de grève dans ce cas, les employeurs n’étant pas d’accord avec le fait que la convention no 87 reconnaisse le droit de grève.
Tout en regrettant l’absence de résultat concret en dépit du fait que cela fait de nombreuses années que le gouvernement a été invité à mettre sa législation et sa pratique en conformité avec la convention, la commission a noté avec intérêt les récentes mesures positives que le gouvernement a prises à cet égard. La commission a donc exprimé le ferme espoir qu’une législation garantissant le plein respect des droits syndicaux des travailleurs et des employeurs serait adoptée dans un très proche avenir. Elle a demandé au gouvernement de communiquer au BIT une copie du projet de loi actuellement examiné par le Conseil de la Choura, et de veiller à ce que des consultations appropriées aient lieu avec les partenaires sociaux. La commission a exprimé le ferme espoir que, en attendant l’adoption de la loi sur la liberté syndicale, tel que le gouvernement s’y est engagé, tous les syndicats égyptiens puissent exercer leurs activités et élire librement leurs représentants conformément à la convention. La commission a encouragé le gouvernement à continuer de recourir aux activités d’assistance technique et de renforcement des capacités du BIT pour tous les partenaires sociaux. Elle lui a demandé de fournir un rapport détaillé à la commission d’experts à sa session de cette année, et exprimé le ferme espoir de constater dans le pays des progrès significatifs et concrets dans le respect des droits syndicaux, tant en droit que dans la pratique.
Le représentant gouvernemental a déclaré avoir écouté attentivement les conclusions, mais que son gouvernement ne communiquerait les commentaires par écrit à la présidente de la commission et au Bureau qu’après les avoir étudiées attentivement.
Une représentante gouvernementale a déclaré que l’observation de la commission d’experts, qui contient des commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI) de l’année 2008 et fait état d’allégations concernant un événement qui se serait produit le 6 avril 2008, reprend des allégations qui ont déjà été examinées par la Commission de la Conférence en 2008 et auxquelles le gouvernement s’est déjà opposé car il n’y avait pas d’informations précises. Le gouvernement a fourni des explications, la discussion a eu lieu et s’est conclue par l’adoption de recommandations, y compris une invitation à accepter une mission d’assistance technique du BIT. La mission a eu lieu en avril 2009. Suite à cette mission, un séminaire tripartite, auquel les partenaires sociaux, des organes nationaux compétents, des ONG et des fonctionnaires du BIT ont participé, s’est tenu en avril 2010. Le séminaire a centré ses travaux sur la promotion du dialogue social et avait pour but d’assurer la conformité de la législation nationale avec les dispositions de la convention. Il a permis des échanges de vues sur les principes et les pratiques de divers syndicats, les capacités institutionnelles nécessaires pour exercer le droit de négociation collective et le rôle du gouvernement et des partenaires sociaux en matière de promotion d’une culture de dialogue social, ainsi que sur les mesures pratiques à prendre.
Suite au séminaire d’avril 2010 et après consultation du BIT, une commission tripartite a été mise en place. Cette commission est chargée de compiler et d’examiner les textes proposés en vue de modifier la législation nationale et ses travaux devraient être bientôt finalisés, en collaboration avec le BIT. En outre, l’oratrice a souligné l’importance du projet du BIT intitulé «promouvoir les principes et droits fondamentaux au travail et le dialogue social» mené en Egypte, qui contribue à renforcer les capacités institutionnelles des partenaires sociaux à long terme et à améliorer les relations professionnelles et ainsi, à mettre en oeuvre les recommandations de 2008 de la Commission de la Conférence.
Réaffirmant l’engagement de l’Egypte de respecter pleinement les normes internationales du travail, l’oratrice a exprimé l’espoir que les discussions au sein de cette commission aboutiraient à une recommandation positive qui tiendrait compte des mesures prises par le gouvernement.
La protection et le bien-être des travailleurs sont des priorités et des objectifs au plus haut niveau de l’Etat. Ils sont reflétés dans le programme de travail du gouvernement, conformément à l’appel lancé par le Président de revoir et de développer les relations professionnelles, ainsi que des mécanismes en vue d’atteindre un équilibre entre les droits et les devoirs de tous les partenaires sociaux, partie intégrante des échanges démocratiques à tous les niveaux de la société. La protection et le bien-être des travailleurs doit continuer à être un devoir national pour lequel il faut se battre et qu’il faut respecter.
Les membres employeurs ont fait remarquer qu’avant la discussion de 2008, ce cas n’avait plus été examiné depuis deux décennies. Lors des discussions de la commission en 2008, le gouvernement avait été prié de répondre aux allégations formulées par la CSI en 2007. Bien que le gouvernement ait fourni une quantité importante d’informations pour examen par la commission d’experts, les membres employeurs ont demandé que ces informations soient également fournies par écrit. Le gouvernement a communiqué des informations à propos du séminaire tenu en 2010, à la suite duquel une commission d’experts tripartite a été mise en place avec l’aide du BIT. Il faut espérer que le gouvernement sera en mesure de préciser ses objectifs et de répondre aux questions soulevées par la commission d’experts s’agissant des divergences existant entre la loi no 35 de 1976 sur les syndicats et la convention no 87. Les principales divergences portent en particulier sur l’institutionnalisation d’un système de syndicat unique, du fait que plusieurs articles de la loi no 35 empêchent toute possibilité de pluralisme syndical, pourtant prévu à l’article 2 de la convention. En outre, la loi no 35 attribue aux syndicats de niveau supérieur le contrôle sur les procédures de nomination et d’élection des syndicats de base. Ceci constitue une violation de l’article 3 de la convention, qui reconnaît aux syndicats le droit absolu d’élaborer leurs statuts et règlements, d’élire librement leurs représentants, d’organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leur programme. De plus, la commission d’experts a fait remarquer que la loi no 35 permet l’ingérence du gouvernement dans la gestion financière indépendante des syndicats. S’agissant du droit de grève, les membres employeurs ont rappelé que la convention no 87 ne prévoit pas expressément le droit de grève. Tout au plus, elle se réfère à un droit général à la grève qui ne peut être réglé en détail en vertu de la convention. Les gouvernements peuvent réglementer ce droit en fonction de leurs besoins et des circonstances. Ce pouvoir discrétionnaire appelle toutefois une réserve, dans la mesure où il faut que les droits humains et les libertés civiles des personnes participant à une action collective soient respectés. Le gouvernement doit fournir un rapport sur les allégations communiquées au Bureau par la CSI en précisant le calendrier législatif nécessaire pour le redressement de toutes les questions soulevées.
Les membres travailleurs ont déclaré que la commission est appelée à examiner à nouveau ce cas, qui a déjà été discuté en 2008. Bien qu’ayant ratifié la convention no 87 depuis plus d’un demi-siècle, l’Egypte persiste à refuser de modifier sa législation afin de la mettre en conformité avec la convention.
La commission d’experts fait état de nombreuses violations de la liberté syndicale dans le pays et met en lumière, à partir de faits irréfutables, des situations montrant l’obstination du gouvernement à ne pas mettre en oeuvre la convention. Elle mentionne notamment la répression violente par la police d’une manifestation de travailleurs en 2008, même si ces faits semblent contestés par le gouvernement. La commission d’experts insiste sur l’importance de mener une enquête judiciaire indépendante, afin d’établir les responsabilités et de fixer les sanctions à l’encontre des coupables, et sur la nécessité d’adopter des mesures de prévention pour éviter que de telles situations ne se reproduisent. Selon la commission d’experts, d’après des sources dignes de foi, les droits des travailleurs continuent d’être bafoués dans les zones économiques spéciales, dans lesquelles les conditions de travail sont insupportables (longues heures de travail, faibles rémunérations et faibles normes de sécurité), et les militants syndicaux peuvent difficilement agir en raison des restrictions imposées à la négociation collective et de l’interdiction des grèves. La plupart des travailleurs de la 10e zone de Ramadan City sont obligés de signer par avance une lettre de démission lors de leur embauche, ce qui permet aux employeurs de les licencier à leur gré.
Depuis de nombreuses années, la commission d’experts mentionne l’existence de divergences importantes entre la législation nationale et la convention: le droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier est gravement restreint; la loi instaure un système d’unicité syndicale; l’autorisation de mener des activités n’est accordée qu’aux syndicats qui s’affilient à l’une des 23 fédérations industrielles affiliées à la seule centrale syndicale reconnue légalement. La législation offre surtout aux entreprises la possibilité de licencier sans justification des travailleurs qui agissent en dehors de la structure syndicale en place. Si l’unité syndicale est importante, elle ne devrait cependant pas être imposée par le biais d’une législation instaurant un monopole syndical. En raison de l’institutionnalisation d’un système d’unicité syndicale en vertu de la loi no 35 de 1976, modifiée par la loi no 12 de 1995 (art. 7, 13, 14, 17 et 52; 41, 42 et 43), le gouvernement a mis sous contrôle judiciaire de nombreux syndicats représentant des groupes professionnels (médecins, ingénieurs, avocats, pharmaciens). Ce contrôle s’exerce sur les organisations syndicales au plus haut niveau, à travers une mainmise sur les procédures de nomination et d’élection aux comités directeurs, en violation de l’article 3 de la convention. La commission d’experts mentionne des cas graves et des actes d’ingérence, tels que la tentative du gouvernement de contrôler les candidats aux élections syndicales et d’en empêcher certains de se présenter à ces élections. Par ailleurs, la loi prévoit le contrôle de la gestion des organisations de travailleurs par la Confédération des syndicats, aucune indépendance financière n’étant par conséquent accordée aux syndicats. Les organisations syndicales de base doivent en outre verser un certain pourcentage de leurs recettes aux organisations nationales de niveau supérieur. Cette décision de rétrocession des cotisations relève normalement du conseil d’administration des organisations et ne devrait pas être imposée par la loi.
Les membres travailleurs ont souligné que la législation permet également la destitution des membres du comité national exécutif d’un syndicat qui provoquerait des arrêts de travail ou de l’absentéisme dans un service public ou un service d’intérêt collectif. En ce qui concerne le droit de grève, la commission d’experts a rappelé la nécessité de modifier l’article 192 du Code du travail qui requiert l’approbation préalable de la Confédération des syndicats avant l’organisation de mouvements de grève et prévoit que le préavis de grève doit en spécifier la durée. Elle a également précisé que l’article 69, paragraphe 9, du Code du travail, qui prévoit que les travailleurs qui participent à une grève et contreviennent à l’article 192 peuvent être licenciés, constitue une violation de la convention no 87. Les membres travailleurs ont aussi tenu à souligner que les restrictions au droit de grève et le recours à l’arbitrage obligatoire dans des services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme, ainsi que les sanctions prévues à l’article 194 du Code du travail, constituent également des violations de la convention.
Les membres travailleurs ont rappelé que la mission d’assistance technique qui s’est rendue dans le pays en avril 2009 a abouti à la signature d’un protocole d’accord entre les partenaires sociaux, selon lequel les parties s’engagent à participer à un séminaire tripartite afin d’analyser les questions soulevées par l’application de la convention, d’étudier des expériences comparables d’autres pays et de formuler des propositions. Or, bien que la représentante gouvernementale ait indiqué que ce séminaire avait eu lieu en avril 2010, les membres travailleurs ont insisté sur le fait qu’ils ne disposaient d’aucune information permettant de confirmer les déclarations de la ministre.
Les membres travailleurs ont instamment prié le gouvernement de modifier la législation du travail afin de mettre un terme à l’institutionnalisation d’un système d’unicité syndicale qui exclut la possibilité de constituer différentes fédérations de syndicats, indépendantes de la Confédération des syndicats. Les membres travailleurs ont instamment prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier le Code du travail de manière à assurer que: 1) aucune restriction au droit des travailleurs de s’organiser librement ne soit permise ni favorisée; 2) toute ingérence dans la définition des procédures électorales soit interdite; 3) aucune obligation légale de spécifier à l’avance la durée d’une grève ne soit prévue; 4) les travailleurs participant à une grève dont la durée n’a pas été préalablement spécifiée ne soient pas sanctionnés; 5) les articles 179, 187, 193 et 194 soient abrogés. Enfin, des mesures immédiates pour garantir les droits des travailleurs et prendre en charge les préoccupations du monde du travail doivent être prises. Le membre travailleur de l’Egypte a déclaré qu’un désaccord de longue date ne doit pas conduire à l’abandon du dialogue. Cela est valable pour tous les syndicats. La plupart des informations contenues dans le rapport de la commission d’experts relatives aux divergences entre les dispositions de cette convention et la pratique nationale, et en particulier celles qui concernent les meurtres et le placement en détention de travailleurs, n’ont pas été confirmées ou ne correspondent pas à la réalité. Ces informations proviennent probablement de sources discutables. Ainsi que la commission d’experts le confirme, la Constitution de l’Egypte et la législation nationale prévoient l’indépendance des syndicats sans aucune ingérence extérieure. Comme la mission du BIT l’a indiqué, en Egypte, les syndicats ont été en mesure d’initier les changements nécessaires pour assurer l’application des normes internationales du travail. En ce qui concerne la législation relative à l’affiliation syndicale et au droit de grève, le projet de loi concerné avait été soumis au BIT pour examen en 1994 et n’avait fait l’objet d’aucun commentaire. L’unité syndicale constitue une force qu’il faut préserver. Alors que l’existence de divers syndicats dans un secteur dans un pays donné peut être justifiée, la division en matière syndicale ne bénéficie en général pas aux travailleurs. La Confédération des syndicats, fondée en 1898, regroupe 23 syndicats nationaux et plus de 2 000 comités. Elle a récemment signé d’importants accords avec les employeurs qui veulent licencier des travailleurs. La mission du BIT en a reçu copie. L’orateur a exprimé l’espoir que l’on permettrait à la Confédération des syndicats égyptiens de poursuivre ses efforts incessants.
Le membre employeur de l’Egypte s’est dit surpris que l’Egypte ait été inscrite sur la liste des cas à examiner par la commission, car le gouvernement a déjà pris d’importantes mesures. Au nombre de ces mesures figurent la mission d’assistance technique du BIT de 2009, qui a abouti à un protocole d’accord en vue de l’organisation d’un atelier tripartite sur la liberté syndicale, qui s’est déroulé en avril 2010. L’atelier tripartite a permis des discussions et des résultats positifs et a abouti à la recommandation de mettre sur pied un comité tripartite. En réponse aux remarques formulées par le membre travailleur de l’Egypte, l’orateur a déclaré que les travailleurs égyptiens bénéficient d’une protection et ont des droits. Les allégations des membres travailleurs selon lesquelles la majorité des travailleurs de la zone de Tenth Ramadan City ont dû signer des lettres de démission avant d’être embauchés sont fausses. L’orateur a invité toute mission à l’effet de vérifier ces faits. En Egypte, les travailleurs ont le droit de faire grève à condition de donner un préavis. Certains travailleurs ont fait grève sans préavis, ce qui n’est pas acceptable. L’examen de ce cas ne se justifie pas, car les données et informations disponibles montrent que le gouvernement respecte les obligations qui lui incombent en vertu de la convention. En Egypte, la situation est positive, et l’examen de ce cas engendre des tensions inutiles entre les partenaires sociaux. Ce cas aurait dû être supprimé de la liste.
La membre gouvernementale du Liban a souligné qu’il convenait de prendre en considération la situation et la culture spécifiques de chaque pays. La représentante gouvernementale a montré que son gouvernement a tout mis en oeuvre pour rectifier les manquements identifiés. Il ne faut pas passer sous silence les efforts qui ont ainsi été déployés en vue de mettre la législation nationale en conformité avec la convention no 87.
La membre travailleuse de l’Espagne a fait observer que l’article 56 de la Constitution égyptienne garantit le droit de créer des syndicats. Or il n’existe en Egypte qu’une seule centrale syndicale légalement reconnue, sous l’égide de laquelle tous les syndicats doivent opérer, ce qui a pour effet de rendre difficile à la fois l’affiliation syndicale et la représentation syndicale. Le droit de constituer des syndicats, comme celui de s’y affilier, se trouve fortement restreint. La loi no 35 de 1976, modifiée par la loi no 12 de 1995, institutionnalise le système de syndicat unique, et la teneur de cette loi préoccupe les travailleurs car ce sont eux qui en subissent les conséquences. Cette loi confère à la Confédération générale des syndicats un pouvoir quasi absolu et, indirectement, à travers un syndicat unique, le gouvernement contrôle les procédures de création et d’enregistrement des syndicats, ainsi que les procédures de désignation ou d’élection de leurs dirigeants. Par ailleurs, il existe des organisations dont l’objectif est de défendre les droits des travailleurs et des travailleuses, d’améliorer leurs conditions de travail et de promouvoir le dialogue social et un syndicalisme indépendant, mais les membres de ces organisations sont victimes de persécution et de harcèlement sous différentes formes. De même, des manoeuvres ont été entreprises en vue de faire obstacle à l’activité d’un syndicat indépendant officiellement créé en avril 2009, le premier syndicat indépendant apparu en Egypte depuis plus de 50 ans, en marge de la Confédération générale des syndicats. A ce sujet, le président de ce nouveau syndicat, M. Kamal Abu Eita, a déclaré, au cours d’un séminaire international qui s’est tenu au Caire, que son organisation continue de faire l’objet d’une campagne de harcèlement dirigée contre ses membres. Imposer par la loi un syndicat unique n’est pas la voie de la démocratie et ce n’est pas par ce moyen que l’on parvient à réaliser l’unité des travailleurs. L’unité passe par la discussion des objectifs et leur acceptation par tous les travailleurs, y compris lorsque ceux-ci sont organisés au sein de plusieurs syndicats. En conclusion, l’oratrice a appelé le gouvernement à adopter et mettre en oeuvre les instruments adéquats, de telle sorte que les travailleurs égyptiens puissent jouir, de manière effective et réelle, du droit de s’organiser librement au sein des syndicats qu’ils décident eux-mêmes de créer.
Le membre gouvernemental de l’Inde a noté les mesures proactives prises par le gouvernement de l’Egypte pour donner suite aux conclusions adoptées par cette commission en 2008. Une mission d’assistance technique s’est rendue dans le pays en 2009 et un atelier tripartite a été organisé en 2010. Il convient d’encourager cette approche participative. L’orateur s’est réjoui de voir les prochaines mesures que le gouvernement prendra avec l’assistance technique du BIT.
La membre travailleuse de la République de Corée s’est déclaré préoccupée par les restrictions au droit syndical et au droit de grève des travailleurs. Il existe des divergences très marquées entre les principes posés dans la convention et la législation nationale. Le système de syndicat unique et la condition d’approbation préalable par la Confédération générale des syndicats pour l’organisation d’une grève suscitent des inquiétudes. Le Code du travail de 2003 impose plusieurs restrictions au droit de grève, mais il ne s’agit là que de quelques exemples illustrant la manière dont le gouvernement empêche les travailleurs de recourir à la grève en tant que moyen de négociation collective. Dans le secteur privé, les travailleurs n’ont aucune structure chargée de les aider à s’organiser et doivent s’organiser eux-mêmes, sans protection légale. Il faudrait prévoir une base légale afin que l’ensemble des travailleurs puissent bénéficier des droits découlant des conventions de l’OIT qui ont été ratifiées. Dans un contexte de crise sociale et économique aiguë, dans lequel les travailleurs luttent pour obtenir de meilleures conditions de travail et se battent en raison de salaires bas et impayés, il importe de modifier le Code du travail et la loi sur les syndicats. La mission d’assistance technique du BIT est un bon début, mais il faut maintenant rendre les lois conformes à la convention.
Le membre gouvernemental du Bélarus a souligné qu’il ne fallait pas ignorer les mesures positives adoptées par le gouvernement de l’Egypte. De nombreuses questions importantes ont été abordées lors de l’atelier tripartite qui s’est tenu en avril 2010. Il s’agit là d’une manifestation claire de la volonté du gouvernement d’aller de l’avant, avec l’assistance du BIT. Les actions positives se poursuivent, et les résultats attendus finiront par être atteints. L’esprit de coopération dont le gouvernement fait preuve doit être reconnu.
Le membre travailleur de la Malaisie a souligné une série de problèmes qui entravent la négociation collective en Egypte. Le système de syndicat unique empêche les travailleurs de désigner les représentants de leur choix. Avec la privatisation croissante, les travailleurs se retrouvent sans aucune organisation pour défendre leurs intérêts, puisque le seul syndicat légalement reconnu n’est pas bien établi dans le secteur privé. En outre, la négociation collective n’est pas autorisée dans le secteur public, où le gouvernement a fixé unilatéralement les salaires et les autres modalités et conditions d’emploi. Selon le Code du travail de 2003, une convention collective n’est valable que si elle est conforme à la loi sur l’ordre public et à «l’éthique générale», un concept qui n’a jamais été défini par le gouvernement, comme l’avait demandé la commission d’experts. En plus des limitations légales au droit de grève, les droits fondamentaux des travailleurs sont compromis par l’utilisation des forces de sécurité dans les conflits du travail. Les enquêteurs chargés de la sécurité de l’Etat sont intervenus à maintes reprises dans des conflits du travail, y compris en l’absence de motif légitime sur le plan de la sécurité. Enfin, l’orateur a évoqué la grève organisée par le comité syndical dans une entreprise de textile de la zone économique spéciale de Mahalla Al-Kubra, et la dissolution subséquente du comité, comme autre exemple de limitation grave des droits syndicaux. De toute évidence, les travailleurs sont confrontés à de sérieuses limitations aux droits qui leur sont garantis par la convention no 87, et le gouvernement doit mettre sa législation en conformité avec les conventions de l’OIT qu’il a ratifiées.
Le membre gouvernemental du Soudan s’est félicité de la coopération entre le gouvernement de l’Egypte et le BIT. Au cours d’une mission d’assistance technique, des représentants du BIT ont rencontré de nombreux parlementaires égyptiens. L’orateur a loué les efforts déployés par le gouvernement, plus particulièrement en ce qui concerne les amendements législatifs qui ont fait l’objet d’un accord et ont été soumis au BIT et au parlement.
En réponse aux demandes de clarification formulées par les membres travailleurs au cours de la discussion, la représentante du Secrétaire général a indiqué qu’une mission du BIT s’était effectivement rendue en Egypte les 25 et 26 avril 2010. Au cours de cette mission, un atelier d’une journée s’est tenu sur le thème de la liberté syndicale et du développement. Tous les acteurs étaient présents ce jour-là et il y a eu un vif débat sur le pluralisme syndical. Au cours de la deuxième journée, des réunions de suivi sur les mesures à entreprendre ont été tenues. En ce qui concerne la question de savoir si le gouvernement a répondu aux observations communiquées par la Confédération syndicale internationale (CSI) le 29 août 2009 en vertu de l’article 23 de la Constitution de l’OIT, au sujet de la violente répression d’une manifestation de travailleurs qui aurait eu lieu les 6 et 7 avril 2008, l’oratrice a déclaré que, dans ses conclusions de 2008, la commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations complètes en réponse aux allégations d’agressions violentes contre des syndicalistes dans le prochain rapport qu’il soumettrait à la commission d’experts. La commission d’experts a également demandé au gouvernement de fournir des informations à ce sujet.
La représentante gouvernementale a remercié la représentante du Secrétaire général pour les précisions qu’elle a apportées. Elle a indiqué que les membres travailleurs s’étaient basés, dans leur déclaration, sur des informations inexactes. Pourquoi ont-ils mis en doute les indications de la représentante gouvernementale selon lesquelles l’atelier tripartite avait effectivement eu lieu? L’Egypte est l’un des premiers Etats à avoir ratifié la convention no 87. Elle a toujours manifesté sa confiance envers l’Organisation et cette confiance est réciproque. Un membre travailleur a également affirmé que le Code du travail n’avait pas été modifié depuis les années cinquante, alors qu’il a été modifié pour la dernière fois en 2003, après dix ans de débats. Le parlement qui l’a approuvé est d’ailleurs composé pour moitié de représentants des travailleurs. L’oratrice a exprimé son respect envers la CSI, tout en s’étonnant de constater que celle-ci a obtenu des informations de la part d’organisations non gouvernementales illégales qui bénéficient de fonds en provenance de l’étranger, ne sont pas liées au mouvement des travailleurs et cherchent à déstabiliser le pays. Elle a indiqué que, depuis le mois de novembre 2008, elle avait rencontré à cinq reprises des fonctionnaires du Département des normes du BIT, en leur transmettant à chaque fois toutes les informations disponibles au sujet des questions devant être résolues en Egypte. Il a été affirmé que la plupart des travailleurs étaient victimes d’oppression. Et pourtant, 140 conventions collectives, dont 138 au niveau des entreprises, ont été conclues. Plusieurs pays connaissent un système de syndicat unique. En Egypte, tel n’est pas le cas, il s’agit d’un système présentant une nature spécifique. La représentante gouvernementale a déclaré que, depuis son entrée en fonctions en tant que ministre du Travail, en 2005, elle a oeuvré, avec le reste du gouvernement, pour la promotion de la liberté syndicale. De progrès considérables ont été accomplis: le mouvement syndical a acquis une grande autonomie, les dernières élections syndicales ont été libres et des informations ont été communiquées au BIT à ce sujet. En conclusion, la représentante gouvernementale a demandé que toutes les informations fournies par son gouvernement soient mises à la disposition des organes compétents de l’Organisation. Elle a exprimé l’espoir que la commission tiendrait compte du statut historique de l’Egypte et des mesures prises par le gouvernement pour promouvoir les normes internationales du travail en coopération avec le BIT.
Les membres travailleurs ont remercié la représentante gouvernementale pour les informations qu’elle a communiquées, tout en regrettant que celles-ci n’aient pas été transmises avant la présente séance de la commission. En réponse à un point soulevé par la représentante gouvernementale, ils ont précisé que le rapport de la commission d’experts constitue leur principale source d’informations. D’autres informations proviennent de la CSI dont ils sont membres et qui examine la situation dans les différents pays. Faisant suite à la déclaration du membre employeur de l’Egypte, ils ont rappelé que la liste des cas devant être examinés par cette commission avait fait l’objet d’un accord entre les représentants des employeurs et des travailleurs. Les membres travailleurs ont également pris note des informations fournies par la représentante du Secrétaire général, tout en précisant que, dans leur déclaration liminaire, ils avaient reconnu que l’atelier tripartite avait effectivement eu lieu. Les membres travailleurs constituent un groupe uni qui souhaite que les droits syndicaux soient respectés en Egypte. Or l’unicité syndicale constitue une violation de la convention. Chaque travailleur doit avoir le droit de s’affilier à l’organisation de son choix. La situation d’unicité syndicale est aussi le moyen de refuser aux travailleurs le droit d’organiser des élections syndicales comme ils l’entendent. La situation de monopole syndical ne résulte pas du libre choix des travailleurs mais de la loi, et il est important que le gouvernement accepte les conclusions de l’atelier qui s’est tenu sous l’égide du BIT et effectue les modifications législatives nécessaires, conformément aux commentaires de la commission d’experts.
La promotion de la négociation collective et de relations professionnelles saines est tout aussi importante que le dialogue social auquel se réfère le gouvernement et nécessite un cadre juridique approprié. Des conflits, sous la forme d’actions professionnelles et de grèves, sont normaux dans un contexte de relations professionnelles saines; les restrictions légales au droit de grève doivent être abrogées. Il en va de même en ce qui concerne l’arbitrage obligatoire dans les services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme. La représentante gouvernementale n’a pas fait état des mesures concrètes que le gouvernement a l’intention de prendre pour modifier sa législation à cet égard.
Les membres travailleurs ont demandé au gouvernement d’adopter sans délai un plan d’action afin de rendre sa législation et sa pratique conformes à la convention no 87. Ils ont demandé avec insistance que le système d’unicité syndicale, qui est en flagrante contradiction avec la liberté syndicale, soit modifié afin de permettre l’existence et le rôle actif d’autres organisations de travailleurs dans le dialogue social à tous les niveaux. Comme dans les autres pays, c’est aux organisations syndicales de décider si elles veulent ou non s’unir. Les membres travailleurs ont également demandé que la loi sur les syndicats, et le Code du travail soient modifiés sur les différents points soulevés dans le commentaire de la commission d’experts, et que le gouvernement fournisse un rapport sur l’application de la convention pour la prochaine session de la commission d’experts. Le gouvernement n’a pas encore manifesté de réelle volonté de régler les problèmes qui se posent et les membres travailleurs suivront de très près l’évolution de la situation, comme doit également le faire le BIT. Les travailleurs se trouvent dans une situation difficile et doivent avoir le droit de s’organiser. En conclusion, les membres travailleurs ont souligné que seul le respect de la convention no 87 devait guider la discussion.
Les membres employeurs ont félicité le gouvernement pour avoir fait le nécessaire afin de résoudre les questions d’ordre législatif soulevées par la commission d’experts, tout en regrettant que ce processus ait pris deux ans. Le gouvernement n’a pas remis en question le fait que ces questions doivent être réglées, comme le montre la création du comité tripartite qui a été chargé d’entreprendre ce travail. Le gouvernement est conscient que la liberté syndicale constitue une pierre angulaire de l’OIT. La convention no 87 est une convention fondamentale et il n’est pas acceptable de s’y conformer en partie seulement. Les discussions et consultations tripartites sont également essentielles, mais ne remplacent pas la liberté syndicale. Par conséquent, afin d’assurer cette conformité, le comité tripartite doit traiter deux aspects fondamentaux de la convention: premièrement, le pluralisme syndical requis par la convention et, deuxièmement, la liberté pour les syndicats de fixer leurs règles et de déterminer leur structure organisationnelle sans ingérence du gouvernement. Ces obligations ont été acceptées au moment de la ratification de la convention. Il convient donc que le comité tripartite progresse rapidement et qu’il formule des propositions sur le plan législatif d’ici à la fin de l’année. Ces dernières devront être transmises au BIT, en vue de s’assurer de leur conformité à la convention.
La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental et de la discussion qui a fait suite.
La commission a noté que les commentaires de la commission d’experts portaient sur un certain nombre de divergences déjà anciennes entre les dispositions de la convention et la législation du travail, notamment le cadre légal instituant un système de syndicat unique.
La commission a pris note des indications données par le gouvernement sur les mesures prises par ce dernier depuis 2008, c’est-à-dire depuis la dernière fois que ce cas a été examiné par la présente commission. La représentante gouvernementale a pris note, en particulier, du protocole d’accord tripartite signé par le gouvernement et les principaux partenaires sociaux en avril 2009, ainsi que de la tenue en avril dernier d’un atelier ouvert à tous les partenaires sur la liberté syndicale. Elle a noté que le gouvernement prévoit de procéder à une révision de la législation avec l’assistance du BIT, en vue de la rendre pleinement conforme à la convention; que, dans cette optique, un comité d’experts tripartite a été chargé d’examiner les lois; et que le gouvernement portera à la connaissance de la commission d’experts les progrès réalisés à cet égard.
La commission, tout en prenant acte des mesures prises récemment par le gouvernement, a néanmoins regretté qu’aucun progrès tangible n’ait encore été accompli en vue de mettre la législation en pleine conformité avec la convention sur ces aspects fondamentaux. Encouragée de constater que le gouvernement reconnaît aujourd’hui ces problèmes toujours non résolus par rapport à l’application de la convention, la commission le prie à nouveau instamment de persévérer dans la voie des importantes réformes démocratiques auxquelles il se réfère et qui doivent nécessairement inclure le respect plein et entier de la liberté syndicale.
La commission a exprimé le ferme espoir que le gouvernement se fixera un programme accéléré garantissant que des initiatives tangibles seront prises dans un très proche avenir, afin que la législation soit modifiée de manière à garantir que tous les travailleurs puissent constituer librement les organisations de leur choix et puissent librement s’affilier à de telles organisations, et à garantir aussi que soient éliminées toutes les formes d’ingérence des pouvoirs publics dans les activités des organisations de travailleurs, notamment l’inscription dans la législation de l’autorité d’un syndicat unique. La commission a demandé que le gouvernement communique d’ici à la fin de cette année au BIT, pour avis quant à leur conformité par rapport à la convention, les propositions d’amendement indispensables, notamment les propositions d’amendement de la loi sur les syndicats. Elle a demandé en outre que le gouvernement communique par écrit, en vue de la session de la commission d’experts de cette année, des informations détaillées sur toutes les mesures prises à cet égard, de même que sur les actes de violence allégués par la Confédération syndicale internationale.
La représentante gouvernementale a estimé que, d’une manière générale, les critiques formulées à l’égard du système syndical égyptien résultent d’une certaine méconnaissance de la situation syndicale dans le pays. Le gouvernement est attaché au respect des conventions internationales du travail. L’Egypte a ratifié 61 conventions internationales du travail. Lorsque les pouvoirs publics ont engagé la réforme du Code du travail, c’était à la fois pour tenir compte des critiques émises par la commission d’experts et pour que la législation tienne compte de l’évolution de l’économie mondiale. Ce processus qui a duré dix ans a largement associé les partenaires sociaux. Les nouvelles dispositions prévoient ainsi qu’en matière de médiation le médiateur est toujours désigné par les employeurs et par les travailleurs, et que l’arbitrage n’intervient qu’en cas d’échec de la médiation. Avec la nouvelle législation, les grèves pacifiques sont parfaitement légales; les partenaires sociaux sont pleinement associés dans le dialogue social, y compris sous des formes novatrices telles que les ateliers ou les séminaires. Le bon fonctionnement du dialogue social est illustré par le fait qu’en 2007 plus de 80 conventions collectives ont été ratifiées. La liberté de revendication des travailleurs est illustrée par le nombre des manifestations (grèves, sit-in) qui ont lieu dans les entreprises. En règle générale, elles finissent par être résolues pacifiquement à la table des négociations. Un projet concernant le dialogue social est actuellement en cours, avec l’assistance technique du BIT.
En réponse aux critiques de la commission d’experts concernant les ingérences supposées du gouvernement dans les affaires syndicales, la représentante gouvernementale a déclaré que les élections se sont déroulées conformément aux règles fixées par les syndicats dans leurs assemblées générales - règles dont le détail sera communiqué à la commission d’experts -, que toutes les candidatures ont été enregistrées sous supervision légale et que, dans le cadre de ce cycle d’élections, plus de 18 000 travailleurs ont été élus dans les instances représentatives de l’ensemble des entreprises et établissements du pays. Sur ce nombre, plus de 8 000 sont de jeunes syndicalistes et, notamment, plus de 1 000 sont des femmes syndicalistes. De plus, 23 nouvelles organisations syndicales ont vu le jour; le conseil central de la Confédération des syndicats a lui aussi procédé à ses élections générales, renouvelant ainsi 70 pour cent de ses instances. Naturellement, un processus d’une telle ampleur, qui a mobilisé plus de 4 millions de travailleurs, a suscité des rivalités et des incidents, lesquels ont nécessité l’intervention des forces de l’ordre, mais on ne saurait présenter cette intervention comme une ingérence du gouvernement dans des affaires syndicales. Le principe de l’unicité syndicale reflète la solidarité des travailleurs, et le pluralisme syndical ne peut conduire qu’au fractionnement du mouvement syndical et, par suite, à l’assujettissement du mouvement syndical au monde politique. L’existence d’une seule et unique organisation syndicale concrétise l’unité des objectifs de la classe ouvrière. Quand il existe une pluralité de syndicats, il s’ensuit automatiquement des scissions et un affaiblissement du syndicalisme. Le système du syndicat unique permet au mouvement syndical de fonctionner démocratiquement. Au gré des mutations de l’économie, le mouvement syndical évoluera lui aussi. Concrètement, il existe en Egypte 23 organisations syndicales générales, qui élaborent leurs règles de fonctionnement au niveau régional avant de les adopter en assemblée générale.
S’agissant des allégations selon lesquelles des membres des instances dirigeantes de syndicats auraient été démis de leurs fonctions pour avoir participé à des sit-in, sur la base des dispositions de l’article 70 du Code du travail, l’oratrice a indiqué que l’article en question n’envisage aucunement de telles sanctions. En ce qui concerne l’article 14 du Code du travail, qui impose aux adhérents d’un syndicat d’obtenir l’accord préalable de la Confédération des syndicats pour pouvoir déclencher une grève, cette règle, dont le bien-fondé n’est pas à mettre en cause, découle de ce que la grève est un instrument particulièrement puissant et qu’il est légitime que la confédération en contrôle l’usage par les syndicats. Le nouveau Code du travail réglemente le recours à la grève et aux autres formes d’action revendicative dans un sens qui préserve les intérêts de la population. L’article 194 du nouveau code interdit la grève dans les services publics essentiels, où elle aurait un impact direct sur la sécurité. Dans ces services publics, si un conflit ne peut pas être réglé par voie de négociation, il est réglé par voie d’arbitrage. Lorsqu’employeurs et travailleurs n’acceptent pas les recommandations du médiateur, ils sont libres de recourir à l’arbitrage. Le contrôle exercé par la Confédération des syndicats sur la gestion financière des syndicats obéit à des règles techniques, qui sont dictées par un souci de transparence dans la comptabilité de ces organismes.
Les membres travailleurs ont remarqué que la ministre du Travail provient du mouvement syndical et a participé aux séances du Conseil d’administration, elle est bien au courant que la liberté d’organisation ne peut être accordée partiellement, de façon sélective ou sous le contrôle de l’Etat. Depuis plusieurs années, les commentaires de la commission d’experts font référence à une série de divergences entre la convention et la législation nationale. Le droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier est gravement restreint par la législation égyptienne. La loi prévoit l’institutionnalisation d’un système d’unicité syndicale, un nombre minimum de membres requis d’au moins 50 travailleurs au sein d’une même entreprise, l’autorisation de mener des activités aux seuls syndicats qui joignent une des 23 fédérations industrielles affiliées à la seule centrale syndicale reconnue légalement, la Confédération des syndicats, ainsi que la possibilité de licencier sans justification des travailleurs qui agissent en dehors de la structure syndicale en place. Si l’unité des syndicats est importante, elle ne devrait cependant pas être imposée par le biais d’une législation qui instaure un monopole, cette décision revenant plutôt aux organisations syndicales elles-mêmes.
L’article 3 de la convention prévoit que chaque organisation de travailleurs peut élire librement ses représentants. Le 17 mai 2006, les forces de sécurité ont empêché des ingénieurs d’assister à l’assemblée générale du Syndicat des ingénieurs afin de voter lors des élections syndicales. Divers autres actes d’ingérence ont été dénoncés comme la tentative par le gouvernement de contrôler les candidats aux élections syndicales et empêcher certains d’entre eux de se présenter à ces élections. La commission d’experts a dû souligner une fois de plus que les procédures de nomination et d’élection au bureau d’un syndicat devraient être déterminées par les organisations concernées, sans intervention des autorités publiques ou de l’unique centrale syndicale désignée par la loi.
Les membres travailleurs ont souhaité illustrer par un exemple quelques problèmes récents relatifs à la liberté d’association rencontrés en Egypte. En 2007, plusieurs branches locales du Centre des services des syndicats et des travailleurs (CTUWS) ont dû cesser leurs activités à la suite de décisions administratives. Le CTUWS est une organisation indépendante de la société civile qui assiste les travailleurs dans la défense de leurs droits, surveille les élections syndicales, fournit une aide juridique et demande le retrait des barrières administratives pour se présenter candidat aux élections syndicales. En avril 2007, le siège du CTUWS au Caire a été encerclé et attaqué par les forces de sécurité aidées et l’organisation a également été obligée de cesser ses activités par une décision administrative. Le 12 octobre suivant, le coordinateur général du CTUWS et son avocat ont été condamnés à une année d’emprisonnement par une cour égyptienne, violant ainsi la liberté d’expression garantie par la Constitution égyptienne. Finalement, le 30 mars 2008, le tribunal administratif a décidé de renverser la décision du gouvernement d’empêcher le CTUWS de mener ses activités.
La législation actuelle ne permet pas l’indépendance financière des syndicats et prévoit le contrôle par la Confédération des syndicats de la gestion des organisations de travailleurs. Les organisations syndicales de base doivent verser un certain pourcentage de leurs recettes aux organisations nationales de niveau supérieur. Bien que les revenus des organisations syndicales provenant des cotisations des travailleurs puissent en effet être distribués par l’entremise d’un syndicat, cette décision relève du conseil d’administration des organisations et ne devrait pas être imposée par la loi. En vertu de l’article 3 de la convention, les organisations de travailleurs ont le droit de décider de leur structure administrative et de leur gestion financière sans ingérence des autorités publiques, et notamment de permettre aux organisations de travailleurs de s’affilier librement.
En ce qui concerne le droit de grève, la commission d’experts a prié instamment le gouvernement d’amender l’article 192 du Code du travail qui prévoit l’accord préalable de la Confédération des syndicats pour l’organisation d’une grève. Elle a rappelé que toute restriction du droit de grève ne devrait concerner que les fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat, ou les services essentiels au sens strict du terme. L’article 192 prévoit également que le préavis de grève doit en spécifier la durée. La commission d’experts a déjà considéré que cette disposition impérative d’indiquer la durée de la grève constitue une restriction au droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités. De plus, le paragraphe 9 de l’article 69 du nouveau Code du travail, qui prévoit que les travailleurs qui participent à la grève contreviennent à l’article 192 et peuvent être licenciés, est contraire à la convention. Les sanctions pour exercice du droit de grève ne sont possibles que dans les seuls cas prévus par la convention. Les travailleurs qui participent à une grève légale ne devraient pas être sanctionnés au motif que la durée de la grève n’a pas été préalablement spécifiée.
Les grèves des travailleurs dans la plus grande usine textile appartenant à l’Etat à Mahalla al Korba ainsi que leur refus d’obtempérer à la décision de déférer certains travailleurs au procureur général méritent également l’attention de cette commission. Leur lutte a été soutenue par la Confédération syndicale internationale (CSI) et le Conseil général de la Confédération internationale des syndicats arabes (CISA) qui ont demandé l’arrêt des mesures de représailles contre les travailleurs et le respect des droits des travailleurs. Grâce aux négociations entre le président de la Confédération des syndicats, le président du Syndicat général des travailleurs du vêtement et du textile, le président des industries textiles et la compagnie, la contestation a finalement abouti à une entente positive. Une autre intervention violente de la police contre des manifestants a récemment eu lieu dans la ville industrielle de Mahalla al Korba. La police a utilisé de véritables balles pour réprimer les manifestations contre les faibles salaires et les prix élevés des aliments de base. Le ministère de l’Intérieur a fait une déclaration enjoignant à tous les citoyens de ne pas participer à la grève. Dans l’usine de l’entreprise textile Mirs Spinning and Weaving Company une grève a été annulée après que des agents de sécurité ont entouré les lieux puis y ont pénétré.
Malheureusement, le gouvernement n’a pas encore entrepris de procéder aux amendements législatifs requis par la commission d’experts depuis plusieurs années. Les membres travailleurs ont prié instamment le gouvernement d’amender la législation du travail afin de mettre un terme à l’institutionnalisation d’un système d’unicité syndicale qui exclut la possibilité de former différentes fédérations de syndicats, indépendantes de la Confédération des syndicats. Le gouvernement devrait également prendre les mesures nécessaires pour amender le Code du travail de manière à s’assurer: que la législation nationale ne permette aucune ingérence dans le droit de s’organiser librement ni dans la définition des procédures électorales; qu’il n’y ait aucune obligation légale pour les travailleurs de spécifier à l’avance la durée d’une grève; et que les travailleurs qui participent à une grève légale ne soient pas pénalisés au motif que le préavis de grève n’en spécifiait pas la durée. Le gouvernement devrait en outre prendre des mesures immédiates pour garantir le droit de grève aux catégories de travailleurs qui en sont présentement exclues par le Code du travail.
Les membres travailleurs ont également appuyé la démarche de la commission d’experts tendant à ce que le gouvernement modifie d’urgence la législation se rapportant aux éléments suivants: la révocation du comité exécutif d’un syndicat qui avait provoqué un arrêt de travail dans des services publics ou reconnus d’intérêt public; l’obligation faite à tout syndicat d’obtenir l’accord préalable de la confédération pour pouvoir recourir à la grève; les restrictions affectant le droit de grève dans des services publics qui ne sont pas des services essentiels au sens strict du terme; les sanctions prévues en cas d’infraction à l’article 69(9) du nouveau Code du travail. Les membres travailleurs ont demandé au gouvernement de respecter la convention et les recommandations de la commission d’experts, en particulier pour assurer l’indépendance des organisations syndicales, le droit des travailleurs de s’affilier aux organisations de leur choix, l’élimination de l’ingérence dans les élections syndicales et la gestion de leurs affaires financières et tout autre forme d’ingérence, ainsi que le droit de grève. L’assistance technique du BIT pourrait aider le gouvernement à amender sa législation nationale en ce sens.
Les membres employeurs ont pris note que l’observation de la commission d’experts en dépit de sa concision soulevait des questions graves. La loi no 35 telle qu’amendée semble poser problème. La convention requiert le respect du pluralisme syndical. Toutefois, plusieurs articles de la loi imposent l’institutionnalisation d’un système d’unicité syndicale qui contrevient à l’article 2 de la convention. La loi entrave également le droit des organisations syndicales de niveau supérieur d’élaborer leur propre procédure électorale, ce qui est contraire à l’article 3 de la convention. De même, le gouvernement s’ingère dans l’indépendance financière des organisations syndicales. Par conséquent, le gouvernement est prié de procéder aux amendements législatifs qui s’imposent pour remédier à la situation.
En ce qui concerne le droit de grève, les membres employeurs reconnaissent l’existence d’un droit de grève général, mais l’Etat jouit d’un droit discrétionnaire pour le réglementer en fonction de ses besoins et selon ses conditions. Toutefois, durant une grève, les droits de l’homme et les libertés civiles des individus impliqués doivent être respectés. En conclusion, le gouvernement est prié de fournir un rapport complet sur les problèmes identifiés. L’assistance technique du BIT s’avère également nécessaire dans ce cas.
Le membre employeur de l’Egypte a déclaré qu’en tant que résident de la ville de Mahalla il a été témoin des récentes grèves et qu’il peut donc affirmer que les forces de l’ordre ne sont intervenues qu’après avoir été attaquées à coups de pierres et de cocktails Molotov par les manifestants qui avaient brûlé des écoles et d’autres bâtiments publics, causant ainsi des dégâts considérables. Les employeurs égyptiens sont attachés aux droits de l’homme, à la démocratie et à la liberté d’expression, mais ces droits doivent être exercés dans le cadre du respect de la loi et de l’ordre public. En outre, les lois et règlements ne peuvent pas être les mêmes partout; ils doivent tenir compte des spécificités culturelles.
S’agissant des élections, l’orateur a indiqué qu’en sa qualité de représentant de la Chambre de commerce et d’industrie égyptienne il n’avait jamais été témoin d’ingérence de la part du gouvernement dans les élections. Ceci dit, une forte concurrence entre les syndicats a récemment soulevé des contestations quant à la légitimité de certaines élections. Le nombre des grèves a récemment augmenté et la société égyptienne n’est pas habituée à ce type d’événement. Suite à ces grèves, plusieurs entreprises ont conclu des accords avec les syndicats et versé les salaires des travailleurs conformément aux accords négociés. Le droit de grève est garanti à tous les travailleurs, mais les grèves ne sont pas censées être utilisées pour intimider, piller ni brûler. Il convient enfin de souligner que les organisations d’employeurs de l’Egypte sont fermement attachées au dialogue social et sont en constantes consultations avec le gouvernement et les travailleurs, car ils attachent une importance particulière à leurs partenaires, ceux-ci devant jouer un rôle spécifique dans ce processus.
Le membre travailleur de l’Egypte a indiqué avoir demandé la parole afin de répondre à certains commentaires portant atteinte à la dignité du mouvement syndical égyptien qui a plus d’un siècle d’existence. Les dernières élections syndicales se sont déroulées conformément aux procédures applicables, dans une atmosphère démocratique et sans ingérence du gouvernement. Ces élections ont donné lieu à des changements de l’ordre de 40 à 60 pour cent dans les instances dirigeantes syndicales. Ces changements constituent à eux seuls une réponse éloquente à ceux qui accusent les syndicats de monopoliser l’action syndicale. Un monopole ne peut pas exister là où le mouvement syndical est renouvelé tous les cinq ans par des élections, dans le respect de la convention. Dans la défense des intérêts de leurs membres, les organisations d’employeurs et de travailleurs jouissent depuis les années vingt du pluralisme et de la démocratie. Les travailleurs eux-mêmes ont pris conscience de ce que leurs intérêts ne peuvent être défendus de manière efficace que grâce à la solidarité, et leur volonté s’est reflétée dans la législation et dans les statuts de leurs syndicats. En outre, toute évolution du statu quo doit venir du mouvement syndical du pays, en tenant compte des spécificités culturelles. En Egypte, il n’existe aucune restriction à s’affilier ou à se désaffilier d’un syndicat dans quelque secteur que ce soit. Le rôle de la Confédération des syndicats au sujet des statuts des syndicats est d’établir un modèle de statut pouvant servir de cadre de référence aux syndicats lors de la rédaction de leur propre statut. Ce statut diffère pour les 23 organisations syndicales pour tenir compte de leurs spécificités. Les membres employeurs ont reconnu le rôle joué par la Fédération des travailleurs du textile et par le président de la Confédération des syndicats dans la résolution de la grève dans la ville de El Mahalla. Ceci montre que les relations tripartites et la coopération fonctionnent bien en Egypte.
Enfin, l’orateur a souligné que le coordinateur général du CTUWS n’a jamais été un syndicaliste. Il a créé un centre qui fournit des services aux travailleurs, mais qui n’est en aucune façon un syndicat. Il s’agit plutôt d’une simple initiative individuelle sous la forme d’un établissement commercial. Il est étonnant que le présent forum international ait pris la peine d’aborder ce point.
Le membre gouvernemental du Qatar a indiqué avoir écouté attentivement les informations détaillées fournies par le représentant gouvernemental et exprimé l’espoir que la commission examinera ces informations et en fera bon usage.
Le membre gouvernemental du Maroc a souligné qu’il est important que les travailleurs puissent pleinement jouir de leurs droits syndicaux non seulement dans l’intérêt des travailleurs eux-mêmes, mais également celui des partenaires sociaux. La convention, qui est une référence en ce qui concerne les droits des travailleurs, peut également avoir un impact sur le développement économique et social des Etats. Toutefois, les changements doivent émaner de l’intérieur d’une société. La représentante gouvernementale de l’Egypte s’est référée aux efforts déployés dans son pays afin de s’adapter aux conditions économiques mondiales. Le gouvernement travaille d’arrache-pied afin d’assurer le développement social et de résoudre au mieux les conflits du travail. Le Code du travail de 2003 a été adopté pour encadrer ce processus et de gros efforts ont été accomplis afin de sensibiliser les partenaires au dialogue social et d’améliorer les relations de travail. Ces efforts ont commencé à porter leurs fruits, ce qui est très important pour le développement futur des relations professionnelles. Toutes ces mesures ne pourront qu’établir un climat favorable afin de surmonter les divergences existant entre la législation nationale et la convention. Il convient de saluer les efforts du gouvernement, notamment en raison du fait que celui-ci s’engage pour la paix au Proche-Orient et qu’il joue un rôle prépondérant dans les travaux de l’Organisation arabe du Travail. Par conséquent, la commission devrait examiner les informations fournies et tenir compte des opinions exprimées par le gouvernement.
Le membre gouvernemental de la Tunisie a souligné que la législation égyptienne, notamment le Code du travail de 2003, est conforme aux normes internationales du travail et que sa mise en œuvre dépend notablement du développement du tripartisme et du dialogue social. Des résultats encourageants ont d’ailleurs été obtenus en la matière à travers l’élaboration en 2006 des bases et des principes du dialogue social comme fondement de la justice sociale, l’importance accordée à un dialogue social utile et serein et l’organisation de cycles de formation destinés aux partenaires sociaux. Il convient de souligner l’ouverture du gouvernement au dialogue et de soutenir ses efforts pour se conformer à la convention.
Le membre gouvernemental du Soudan a indiqué que son gouvernement accorde une importance spéciale à la coopération avec la Commission de la Conférence. La représentante gouvernementale de l’Egypte a montré que l’action de son gouvernement est compatible avec les commentaires de la commission d’experts. Le gouvernement est prêt à accepter l’assistance technique et à en tirer avantage. Il a accompli des efforts intenses pour parvenir à un accord et résoudre ainsi les conflits. L’Egypte, pays avec une longue histoire chargée de civilisation, est actuellement confrontée à de nouvelles expériences et a besoin de temps pour choisir le modèle qui s’adapte le mieux à ses conditions. Le changement doit se faire graduellement de manière à ce que les partenaires sociaux puissent en récolter des bénéfices. L’orateur a conclu en déclarant que l’Egypte n’aurait pas dû figurer sur la liste des cas.
Le membre gouvernemental du Bélarus s’est réjoui de l’intention du gouvernement de rendre, dans le cadre du dialogue social, la législation conforme à la convention. L’intention du gouvernement d’œuvrer au développement de la confiance entre les partenaires sociaux par le biais du dialogue social a été démontrée par l’organisation de séminaires relatifs à un large éventail de questions comme les réformes économiques et l’amélioration des conditions de travail. En outre, la dynamique positive du nombre de femmes syndicalistes résulte de l’effort du gouvernement à promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes. Il est important de continuer le dialogue avec le gouvernement.
Le membre gouvernemental des Emirats arabes unis s’est associé à la déclaration du membre gouvernemental du Qatar. Les questions soulevées par la commission d’experts ne concernent pas des violations fondamentales de la convention et peuvent être réglées grâce à la coopération technique entre le BIT et le gouvernement. L’orateur a loué le gouvernement de l’Egypte qui s’est montré ouvert aux commentaires formulés par la commission d’experts et a fait part de sa volonté de continuer à coopérer avec l’OIT. Il convient d’espérer que le gouvernement prendra toutes les mesures possibles pour mettre en œuvre toutes les dispositions de la convention, à travers le dialogue avec les partenaires sociaux.
Le membre gouvernemental de la Jamahiriya arabe libyenne a déclaré que son gouvernement a un profond respect pour les commentaires de la commission d’experts. La représentante gouvernementale de l’Egypte a donné de nombreuses explications et informations en réponse aux commentaires de la commission d’experts et a également fourni des informations détaillées sur les événements qui ont eu lieu dans la ville de Mahalla et qui ont démontré que le droit de grève est garanti en Egypte. Les grèves doivent se dérouler conformément à la loi. Ces événements ont été réglés de manière démocratique et conformément à la loi, par une décision du système judiciaire indépendant. Les informations fournies devront être prises en compte lorsque les conclusions sur cas seront préparées.
La présence de la ministre du Travail de l’Egypte en personne témoigne de la valeur que le pays accorde à la mise en œuvre des conventions de l’OIT. Dans sa déclaration, la ministre s’est référée aux dispositions du Code du travail relatives au système d’unicité syndicale et aux aspects bénéfiques de ce système pour les travailleurs. Elle a ajouté que des grèves se sont produites à différents niveaux, tout en expliquant les conditions qui déterminent les grèves. Elle a également expliqué les procédures d’élection des membres des conseils exécutifs des syndicats, et précisé que ces procédures se déroulent sous la supervision de la justice, toute ingérence étant interdite. De nouveaux dirigeants ont été élus, dont des femmes (40 pour cent), avec dans certains cas une proportion atteignant 70 pour cent. Les forces de sécurité ne pénètrent dans les bureaux électoraux que pour y assurer l’ordre. Leur rôle est de garantir la sécurité mais ils ne s’ingèrent jamais dans les élections syndicales. La ministre a clairement expliqué les diverses étapes de la négociation et de quelle manière les conflits sociaux sont résolus, notamment à travers la conciliation et l’arbitrage. Cette information doit être prise en compte dans la rédaction des conclusions de la commission.
La membre gouvernementale de Cuba a salué les efforts déployés par le gouvernement égyptien pour rechercher à travers le dialogue social des alternatives adéquates permettant d’affronter les défis économiques et sociaux posés par la mondialisation. En outre, ce gouvernement soutient le dialogue entre employeurs et travailleurs et organise des formations destinées à mieux préparer les partenaires sociaux afin qu’ils entreprennent des réformes économiques qui profitent aux travailleurs et assurent le respect de leurs droits fondamentaux. La commission devrait donc prendre bonne note des explications fournies par le gouvernement.
La membre gouvernementale de la Chine a déclaré avoir pris note des informations fournies par le gouvernement notamment en ce qui concerne la législation adoptée pour donner effet à la convention ainsi que les mesures prises pour promouvoir le dialogue social. L’OIT doit continuer à coopérer avec le gouvernement pour assurer le plein respect de la convention.
Le membre gouvernemental de la Fédération de Russie a observé que le gouvernement a pris des mesures spéciales afin de s’acquitter de ses obligations internationales en ce qui concerne les droits des travailleurs. La solution aux problèmes soulevés par la commission d’experts se trouve dans des négociations tripartites au niveau national et dans une coopération entre le gouvernement et l’OIT. L’orateur a demandé à toutes les parties concernées de continuer le dialogue et au BIT de fournir, si nécessaire, une assistance technique.
La représentante gouvernementale de l’Egypte a remercié tous ceux qui ont pris la parole au cours de cette importante discussion. Elle a assuré la commission qu’ayant été elle-même syndicaliste elle ne tolérerait aucune violation des droits syndicaux dans son pays et qu’elle chercherait des solutions pour remédier aux divergences entre la législation nationale et les conventions internationales. Elle a souhaité répondre aux commentaires faits par les membres employeurs et travailleurs qui ont apparemment été préparés avant d’avoir entendu la déclaration du gouvernement, espérant ainsi que les membres travailleurs réexamineraient leur position. En Egypte, le droit des travailleurs de s’affilier ou de se désaffilier d’un syndicat n’est pas strictement limité. Les statuts de base des syndicats déterminent les règles et procédures relatives à l’affiliation, tant que le travailleur est encore en activité. La loi sur les syndicats garantit pleinement la liberté des travailleurs de s’affilier ou de ne pas s’affilier à un syndicat. Il n’est dès lors pas question de limitation.
En ce qui concerne le problème de l’unicité syndicale, l’oratrice a pleinement soutenu le fait que cette unicité devrait venir de l’organisation syndicale elle-même, et ne pas être décidée par la loi ou l’autorité administrative. La réglementation du statut de base des organisations syndicales reflète le désir des travailleurs eux-mêmes qui ont choisi une structure syndicale pyramidale, basée sur l’unicité, comme indiqué dans la loi actuelle sur les syndicats. Les choses pourraient évoluer à l’avenir à mesure que le pays se développera, et le dialogue tripartite se poursuit dans ce domaine.
En ce qui concerne les procédures régissant la nomination et l’élection des membres des syndicats, qui selon la commission d’experts devraient être décidées par les syndicats eux-mêmes et non pas par l’autorité publique, par l’organe directeur d’une centrale unique ou par la loi, l’oratrice a précisé que le gouvernement n’intervient pas dans le choix des représentants syndicaux au cours des élections qui se produisent dans un contexte de totale liberté. Le problème soulevé par la commission d’experts a été résolu au cours d’une réunion de l’assemblée générale de la Confédération des syndicats qui s’est tenue le 18 octobre 2006. L’oratrice s’est engagée à fournir à la commission d’experts, copies du procès-verbal de la réunion et du modèle de réglementation du statut de base des organisations syndicales, preuves supplémentaires de la bonne volonté de son gouvernement.
En ce qui concerne le groupe de professionnels représentant les ingénieurs, cette entité spécifique est une organisation professionnelle, et non un syndicat. Celle-ci a uniquement été mise en place afin de défendre les intérêts spécifiques de ses membres. Aucune personne ne s’est vue interdire l’entrée de la salle de réunion de cette entité, pour autant qu’elle en soit membre, l’entrée étant seulement refusée aux non-membres. La présence des forces de police à l’extérieur du bâtiment était uniquement destinée à assurer la sécurité et la protection des individus et des entreprises, et non pas à intervenir dans une quelconque réunion.
Concernant la fermeture du Centre d’assistance aux syndicats (CTUWS) et de ses locaux à El Mahalla, Nagaa Hamadi et Helwan, celui-ci n’a pas été fermé en raison de ses activités syndicales, mais parce que les conditions d’octroi de la licence d’organisation non gouvernementale prévues par les dispositions de la loi no 84 de 2002 sur les organisations non gouvernementales n’avaient pas été respectées. Une décision judiciaire a été rendue ordonnant l’annulation de sa fermeture. Des pourparlers sont en cours entre les représentants du centre et le ministère de la Solidarité sociale afin de réviser son statut et d’assurer sa conformité avec la loi sur les organisations non gouvernementales.
En ce qui concerne les grèves à El Mahalla, celles-ci ont eu lieu dans la ville de El Mahalla al Korba le 6 avril 2008, et non pas dans une usine. Des actes de vandalisme ont été commis par des personnes pour des motifs étrangers à la promotion des intérêts professionnels. Plus de 27 000 travailleurs de l’entreprise de El Mahalla n’ont pas fait grève, étant engagés dans des négociations avec la direction, sous les auspices du ministère. Les personnes qui ont fait grève ont reçu leur salaire sans aucune retenue même durant la période de grève, bien que le code prévoie des déductions correspondant à cette durée, ceci à la discrétion du gouvernement et en raison du respect qu’il porte aux travailleurs et à leurs droits. L’oratrice a souligné que les événements d’avril à El Mahalla étaient destinés à saccager la ville et ne correspondaient en aucun cas à un appel à la grève par les travailleurs.
Elle a conclu en soulignant l’importance de la consultation et de la collaboration avec les partenaires sociaux au sein du Conseil consultatif du travail, qui a été mis en place sur la base du Code du travail. Elle a assuré à la Commission de la Conférence que les commentaires de la commission d’experts seront soumis au Conseil consultatif du travail afin de prendre les mesures nécessaires pour réviser le Code du travail ainsi que la loi sur les syndicats, et les mettre en conformité avec les dispositions de la convention.
Les membres travailleurs ont remercié la ministre du Travail pour les informations fournies et rappelé que l’Egypte a ratifié la convention voici cinquante et un ans. Considérant le nombre d’années écoulées depuis lors, il est temps pour le gouvernement de rendre conforme sa législation aux exigences de la convention. Un grand nombre des représentants des divers gouvernements intervenus afin de soutenir le gouvernement de l’Egypte proviennent de pays qui, eux-mêmes, ne font pas pleinement respecter les principes de la liberté syndicale ainsi que les droits des travailleurs. En fait, l’application de cette convention par certains de ces pays doit également être discutée par cette commission. Les membres travailleurs ont noté les remarques faites par le gouvernement et observé que la ministre du Travail est une ancienne collègue issue des rangs des travailleurs. Il convient d’espérer que le gouvernement accomplira de bonne foi et promptement les engagements pris devant la commission.
Le point essentiel ici est la liberté de s’affilier à un syndicat et non au syndicat unique établi par la loi. La législation ne respectera pas la convention aussi longtemps que les travailleurs n’auront pas la liberté de rejoindre d’autres syndicats que ce syndicat unique. La situation d’unicité syndicale est aussi responsable du refus d’accorder aux travailleurs le droit d’organiser des élections syndicales comme ils l’entendent. La situation de monopole syndical ne résulte pas du libre choix des travailleurs mais de la loi, et le gouvernement doit effectuer les modifications législatives nécessaires, conformément aux commentaires de la commission d’experts.
La promotion de la négociation collective et de relations professionnelles saines est tout aussi importante que le dialogue social auquel se réfère le gouvernement et nécessite un cadre juridique approprié. Des conflits, sous la forme d’actions professionnelles et de grèves, sont normaux dans un contexte de relations professionnelles saines. Le droit de grève doit être garanti aux travailleurs égyptiens et il est nécessaire, pour cela, d’abroger les restrictions à ce droit posées par l’article 192 du Code du travail ainsi que l’imposition de l’arbitrage obligatoire dans les services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme.
Le Centre pour des services aux syndicats et aux travailleurs (CTUWS) est reconnu par des organisations internationales respectées, y compris la CSI et la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH), et une levée du monopole lui permettrait de devenir un syndicat à part entière plutôt qu’une association.
De nombreuses ONG, y compris Amnesty International et la CSI, disposent de témoignages visuels de l’utilisation par la police antiémeute de balles réelles lors de la grève de El Mahalla al Korba. Même lorsqu’une grève prend une tournure violente cela n’autorise pas les autorités à réagir en usant du même degré, voire d’un degré supérieur, de violence.
Les membres travailleurs ont accepté la proposition du gouvernement de réunir un organe tripartite sur les sujets discutés et réitéré le ferme espoir que les modifications législatives nécessaires seraient introduites bientôt, notamment en ce qui concerne la situation de monopole syndical, le contrôle par les organisations de niveau supérieur des procédures des élections syndicales, le contrôle par la Confédération des syndicats de la gestion financière des syndicats et le droit de grève.
Les membres employeurs ont remercié la ministre pour le caractère complet de sa réponse. Cette convention est une convention fondamentale et une pierre angulaire de l’OIT. Le respect de cette convention ne doit pas dépendre d’un processus évolutif; il ne saurait y avoir de concessions ou de demi-mesures afin d’assurer le respect de ses dispositions. Le dialogue social et le tripartisme constituent une deuxième pierre angulaire de l’OIT. Néanmoins, l’existence d’un dialogue social et d’un consensus ne saurait justifier de s’écarter des exigences de la convention. Ce cas concerne deux aspects fondamentaux de la convention. D’une part, la situation de monopole syndical est en contradiction avec l’exigence que de multiples syndicats puissent exister et prospérer et, d’autre part, les syndicats doivent être en mesure d’établir leurs propres règles internes et de se gérer sans interférences de la part du gouvernement.
Les Etats ayant ratifié la convention doivent en remplir pleinement les obligations qui en découlent. A cet égard, l’assistance technique sous la forme d’une mission du BIT est nécessaire. Le gouvernement doit indiquer s’il est prêt à accepter une telle mission et fournir un rapport répondant pleinement aux allégations de la CSI ainsi qu’aux commentaires de la commission d’experts.
La représentante gouvernementale de l’Egypte a déclaré que, même si son gouvernement est prêt à coopérer dans tous les domaines et accueille favorablement toute assistance offerte, il suit un calendrier précis. Elle ne peut, dès lors, pas promettre que la législation pourra être révisée si rapidement. Il n’est pas certain que des amendements à la législation pourront être soumis au parlement avant la fin de la présente législature et il n’est pas possible de promettre la promulgation desdits amendements d’ici l’année prochaine. La révision de la législation et la préparation des modifications nécessaires requièrent plus de temps.
La représentante gouvernementale de l’Egypte a réaffirmé l’engagement de son gouvernement à appliquer les normes. Concernant l’assistance du BIT mentionnée dans les conclusions, une telle assistance est déjà en cours dans son pays en matière de dialogue social, et il n’est donc pas nécessaire de fournir une aide additionnelle concernant le sujet discuté. Ce dont le pays a besoin, c’est d’une assistance en matière de formation des syndicalistes et des travailleurs. Il est à espérer que l’Egypte sera toujours en mesure de remplir ses obligations en vertu des conventions de l’OIT.
La commission a pris note de la déclaration de la représentante gouvernementale et de la discussion qui a suivi.
La commission a observé que les commentaires de la commission d’experts concernent des allégations graves d’ingérence du gouvernement et d’interventions violentes de la part des forces de sécurité à l’encontre de syndicalistes lors d’élections syndicales, ainsi qu’un certain nombre de divergences entre la législation et les dispositions de la convention, en particulier en ce qui concerne l’institutionnalisation par diverses mesures d’un système de syndicat unique.
La commission a noté la déclaration du gouvernement selon laquelle les modifications du Code du travail sont le résultat d’intenses discussions avec les partenaires sociaux. En outre, un projet sur le dialogue social est actuellement en préparation avec l’assistance du BIT. La représentante gouvernementale a insisté sur le fait qu’il n’y a pas d’ingérence dans les élections syndicales qui se tiennent en accord avec les statuts de ces organisations, sauf dans les cas où il est nécessaire de résoudre de façon pacifique des conflits internes. Néanmoins, la représentante gouvernementale a donné l’assurance à la commission que tous les commentaires de la commission d’experts seront sérieusement pris en compte dans le cadre du Comité national tripartite de consultation.
La commission a noté avec une profonde préoccupation certains éléments de la déclaration de la représentante gouvernementale qui semble témoigner d’une absence d’engagement envers les principes fondamentaux consacrés par la convention, singulièrement le principe fondamental de créer et de joindre des organisations de son choix, et ce même hors du cadre syndical existant. Elle a regretté qu’aucun progrès n’ait été réalisé sur ces questions fondamentales de la ratification de la convention depuis plus de cinquante ans. Elle a exprimé également sa préoccupation suite aux déclarations de plusieurs orateurs relatives à des violations graves et persistantes de la convention. A cet égard, la commission a rappelé que les libertés civiles et les droits fondamentaux doivent être respectés lors des grèves. La commission a demandé au gouvernement de mettre pleinement en œuvre la décision du tribunal administratif afin que le Centre d’assistance aux syndicats puisse mener ses activités librement. La commission a encouragé le gouvernement à poursuivre son important chemin vers les réformes démocratiques dans lequel il s’est engagé pour le pays.
La commission a prié instamment le gouvernement de prendre des mesures concrètes dans un avenir proche pour garantir que tous les travailleurs puissent bénéficier de leur droit fondamental de s’associer librement et, en particulier, de garantir l’indépendance des organisations syndicales et l’élimination de toutes les formes d’ingérence au sein de celles-ci. La commission a invité le gouvernement à accepter une mission d’assistance technique du BIT et s’est félicitée de la bonne volonté du gouvernement à cet égard. Elle a demandé au gouvernement de fournir, lors de son prochain rapport dû, des informations détaillées à la commission d’experts sur les mesures prises pour mettre la législation et la pratique en conformité avec les dispositions de la convention, ainsi que des informations complètes en réponse aux allégations de violentes attaques à l’encontre de syndicalistes et d’actes d’ingérence dans le fonctionnement interne de syndicats.
Le gouvernement a communiqué les informations suivantes:
Le gouvernement rappelle que dans ses commentaires antérieurs il a déjà indiqué qu'une commission technique mixte composée de représentants du gouvernement et de la Confédération des syndicats égyptiens a été constituée en vue d'étudier la question de l'amendement des articles de la loi no 35 de 1976 dans sa teneur modifiée et de la loi no 137 de 1981, que la commission d'experts estime être contraires aux dispositions de la convention. La commission poursuit ses travaux. Le gouvernement réitère également ses déclarations antérieures selon lesquelles, avant toute modification à l'une ou l'autre des deux lois susvisées, les propositions de la commission d'amendement seront soumises aux parties concernées, en particulier aux comités syndicaux, au nombre de 1995, en tant qu'organisations les plus représentatives des travailleurs. Ces comités formulent leurs observations au sujet des propositions qui sont ensuite soumises aux syndicats généraux au nombre de 23, avant d'être transmises au comité directeur de la confédération.
Le gouvernement estime qu'il faut laisser le temps à ces syndicats d'examiner les propositions en question et de donner leur avis à leur sujet. Il ajoute que certaines personnes estiment qu'il conviendrait de modifier la totalité de chacune des deux lois susvisées afin de combler les lacunes existant en matière de libertés syndicales ou dans d'autres domaines, ce qui nécessiterait plus de temps. Selon le gouvernement, quand les parties concernées et les syndicats auront formulé leur avis au sujet des propositions de la commission d'amendement des deux lois susvisées, celle-ci recueillera et coordonnera leurs propositions avant d'élaborer un projet qui regroupera les modifications proposées et sera soumis pour adoption au Conseil du peuple, la plus haute autorité législative du pays.
Par ailleurs, le gouvernement déclare que l'Egypte, sous la présidence de Mohamed Hosni Moubarak, connaît des transformations importantes et radicales sur la voie de la démocratie et de la liberté politique, que les dernières élections du Conseil du peuple se sont déroulées en avril 1987 et qu'un grand nombre de partis politiques de toutes tendances y ont participé. Selon le gouvernement, cette liberté et cette démocratie politique auront sans aucun doute des effets positifs sur l'organisation syndicale, sur le régime des relations de travail et sur la classe ouvrière. Il en est ainsi de la protection contre les mesures de licenciement arbitraire qui a créé un sentiment de sécurité chez les travailleurs, réduisant au minimum le nombre ou la durée des différends collectifs. Les syndicats de travailleurs recherchent le dialogue avec l'administration et recourent aux procédures de conciliation dans les différends collectifs. Le gouvernement n'est donc pas d'accord avec l'interprétation que donne la commission d'experts des articles 93 à 106 du Code du travail (loi no 137 de 1981 concernant le règlement des différends collectifs du travail). II estime, à la lumière des résultats de l'application pratique, que le mécanisme d'arbitrage a permis aux travailleurs, dans la grande majorité des cas, de faire valoir leurs droits.
En ce qui concerne la grève des chemins de fer, qui s'est produite en Egypte les 7 et 8 juillet 1986, l'ordre de grève des conducteurs avait été lancé par l'Association des travailleurs des chemins de fer sans que le Syndicat des chemins de fer ou la Confédération des syndicats égyptiens en aient eu connaissance. Des perturbations en ont résulté pour des millions d'Egyptiens qui utilisent principalement les chemins de fer pour se rendre à leur travail. Ceux-ci représentent le principal moyen de transport en Egypte. Leur réseau s'étend sur la longueur du Nil et la majorité de la population est concentrée dans le delta. L'arrêt d'un service vital tel que les chemins de fer a constitué une menace pour la sécurité des citoyens. Son arrêt brutal a interrompu le transport du blé à partir des ports égyptiens vers les minoteries existant dans tous les gouvernorats du pays; il a également interrompu le transport des médicaments et des diverses denrées alimentaires importées. La grève a été menée par des fonctionnaires de l'Etat et a représenté un danger pour la vie, la santé et la sécurité des citoyens et une menace pour les intérêts économiques du pays. C'est ce qui a amené l'Etat à intervenir et à déférer les conducteurs devant la justice. Les prévenus ont été relâchés dès la première audience du tribunal; le 14 avril 1987, ils ont tous été acquittés par un jugement du Tribunal suprême de sûreté de l'Etat.
Nous voudrions enfin rassurer la commission sur le souci de l'Egypte d'appliquer les conventions sur la liberté syndicale ratifiées par elle, qui garantissent aux travailleurs le droit à la grève pacifique.
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Articles 2 et 3 de la convention. Dans ses précédents commentaires, la commission avait soulevé plusieurs points concernant le droit des travailleurs de s’affilier aux organisations de leur choix et le droit de grève. Elle avait notamment prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de:
– modifier l’article 19(f) de la loi no 35 sur les syndicats, 1976, tel qu’amendé par la loi no 12 de 1995, afin que tous les travailleurs qui le souhaitent puissent s’affilier à plus d’une organisation pour pouvoir défendre leurs intérêts professionnels, dans les cas où ils exerceraient plus d’une profession;
– garantir que les catégories de travailleurs exclus du champ d’application du Code du travail (fonctionnaires des organismes publics qui n’exercent pas de fonctions d’autorité au nom de l’Etat, y compris les administrations publiques locales et les autorités publiques; domestiques et travailleurs assimilés; et travailleurs membres de la famille de l’employeur et à la charge de ce dernier) jouissent du droit de grève;
– modifier l’article 192 du Code du travail afin qu’il n’y ait pas d’obligation légale pour les organisations de travailleurs de préciser la durée de la grève;
– modifier l’article 69(9) du Code du travail pour garantir que les travailleurs ayant participé à une grève légale ne soient pas punis au motif que le préavis de grève n’en précise pas la durée.
La commission note que le gouvernement indique dans son rapport que l’ordonnance no 69 de 2010, édictée par le ministre de la Main-d’œuvre et des Migrations, porte sur la constitution d’un comité technique préparatoire composé d’experts juridiques, chargé de réexaminer le Code du travail no 12 de 2003 et la loi no 35 de 1976 sur les syndicats, telle qu’amendée à ce jour, afin d’assurer leur conformité avec les normes internationales du travail. La commission note en outre qu’en application de l’ordonnance no 69 les experts juridiques devront présenter un rapport d’ici à la fin de l’année, qui sera ensuite soumis pour discussion à une réunion tripartite devant convenir des versions finales des deux lois. La commission demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que, au cours de ce réexamen, il soit dûment tenu compte des commentaires de la commission sur les questions susmentionnées, et elle veut croire que les amendements proposés seront communiqués au Bureau dans un proche avenir pour avis quant à leur conformité avec la convention.
La commission prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur les progrès accomplis sur ces questions qui font l’objet de commentaires depuis de nombreuses années.
Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que la mission d’assistance technique du BIT d’avril 2009, qui avait été demandée par la Commission de l’application des normes de la Conférence, avait débouché sur la conclusion d’un protocole d’accord par lequel les partenaires sociaux et le gouvernement s’étaient engagés à participer à un séminaire tripartite à organiser par l’OIT afin d’analyser les questions soulevées par l’application de la convention dans le pays, d’étudier les expériences comparables d’autres pays et de formuler des propositions sur les mesures qui devraient être adoptées pour faire suite aux commentaires de la commission. La commission se félicite de ce qu’un atelier tripartite sur le dialogue social, la liberté syndicale et le développement se soit tenu le 26 avril 2010, avec la participation du BIT, pour régler un certain nombre de divergences entre la législation, la pratique et la convention. La commission espère que la tenue de cet atelier sera un premier pas important pour traiter des questions qui font l’objet de commentaires depuis de nombreuses années.
La commission prend note de la discussion qui a eu lieu au cours de la réunion de la Commission de l’application des normes de la Conférence, en juin 2010, sur l’application de la convention. Elle prend note en particulier des indications du gouvernement selon lesquelles il a été prévu d’entreprendre, avec l’assistance du BIT, un réexamen de la législation pour la mettre en pleine conformité avec la convention. Elle note également que la Commission de la Conférence a exprimé le ferme espoir que le gouvernement élabore un programme accéléré permettant l’adoption de mesures concrètes, dans un proche avenir, pour amender la législation afin de garantir que tous les travailleurs puissent librement constituer l’organisation de leur choix et y adhérer, et que toutes les formes d’ingérence gouvernementale dans les activités d’organisations de travailleurs soient éliminées, y compris la référence législative à l’autorité d’un seul syndicat. Enfin, la commission note que la Commission de la Conférence a demandé au gouvernement de communiquer au BIT, d’ici la fin de l’année, les propositions d’amendement nécessaires, en particulier à la loi sur les syndicats, pour avis quant à leur conformité avec la convention. La commission note avec regret que le gouvernement n’a pas encore transmis de projet d’amendement à ce sujet.
La commission rappelle que, depuis un certain nombre d’années, ses commentaires concernent les divergences entre la convention et la législation nationale, notamment la loi sur les syndicats no 35 de 1976 dans sa teneur modifiée par la loi no 12 de 1995, et le Code du travail no 12 de 2003, sur les points suivants:
– l’institutionnalisation d’un système d’unicité syndicale, en vertu de la loi no 35 de 1976 (dans sa teneur modifiée par la loi no 12 de 1995), en particulier les articles 7, 13, 14, 17 et 52;
– le contrôle institué par la loi sur les organisations syndicales du plus haut niveau, en particulier la Confédération générale des syndicats, sur les procédures de nomination et d’élection aux comités directeurs des organisations syndicales, en vertu des articles 41, 42 et 43 de la loi no 35 (dans sa teneur modifiée par la loi no 12);
– le contrôle exercé par la Confédération générale des syndicats sur la gestion financière des syndicats, en vertu des articles 62 et 65 de la loi no 35 (dans sa teneur modifiée par la loi no 12);
– la destitution des membres du comité exécutif d’un syndicat qui a provoqué des arrêts de travail ou de l’absentéisme dans un service public ou un service d’intérêt collectif (art. 70(2)(b) de la loi no 35 de 1976);
– l’approbation préalable par la Confédération générale des syndicats pour l’organisation de mouvements de grève, en vertu de l’article 14(i) de la même loi;
– les restrictions au droit de grève et le recours à l’arbitrage obligatoire dans des services qui ne sont pas des services essentiels au sens strict du terme (art. 179, 187, 193 et 194 du Code du travail); et
– les sanctions prévues en cas d’infraction à l’article 194 du Code du travail (art. 69, paragr. 9, du code).
La commission note que le gouvernement indique dans son rapport que l’ordonnance no 69 de 2010, qui porte sur la création d’un comité technique préparatoire composé d’experts juridiques chargés de réexaminer le Code du travail no 12 de 2003 et la loi no 35 de 1976 sur les syndicats, telle qu’amendée à ce jour, a été édictée par le ministre de la Main-d’œuvre et des Migrations afin d’assurer la conformité de ces instruments avec les normes internationales du travail. La commission note également qu’en vertu de l’ordonnance no 69, les experts juridiques doivent présenter un rapport à la fin de l’année, qui est ensuite soumis pour discussion à une réunion tripartite chargée de convenir des versions finales des deux lois. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que, au cours de ce réexamen, il soit dûment tenu compte des commentaires de la commission sur les questions susmentionnées et elle veut croire que les amendements proposés seront communiqués au BIT dans un proche avenir, pour avis quant à leur conformité avec la convention.
Enfin, et comme la Commission de la Conférence l’a spécifiquement demandé à sa réunion de juin 2010, la commission note avec regret que le gouvernement n’a pas encore communiqué ses observations sur les commentaires de 2009 soumis par la CSI au sujet de la violente répression, par la police, d’une manifestation de travailleurs dans la ville de Mahalla en avril 2008 qui s’est soldée par le décès de six travailleurs et la détention de 500 personnes, dont trois syndicalistes, et la commission le prie de le faire dans son prochain rapport.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
La commission avait précédemment soulevé plusieurs points concernant le droit des travailleurs de s’affilier aux organisations de leur choix et le droit de grève (articles 2 et 3 de la convention). La commission avait notamment prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de:
– modifier l’article 19(f) de la loi no 35 sur les syndicats, 1976, telle que modifiée par la loi no 12 de 1995, afin que tous les travailleurs qui le souhaitent puissent s’affilier à plus d’une organisation pour pouvoir défendre leurs intérêts professionnels, dans les cas où ils exerceraient plus d’une profession;
– garantir que les catégories de travailleurs exclues du champ d’application du Code du travail (fonctionnaires des organismes publics qui n’exercent pas de fonctions d’autorité au nom de l’Etat, y compris les administrations publiques locales et les autorités publiques; domestiques et travailleurs assimilés; et travailleurs membres de la famille de l’employeur et à la charge de ce dernier) jouissent du droit de grève;
– modifier l’article 69(9) du Code du travail pour garantir que les travailleurs ayant participé à une grève légale ne soient pas punis au motif que le préavis de grève ne précise pas la durée.
La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle, suite à la discussion qui s’est tenue à la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2008, une mission d’assistance technique s’est rendue dans le pays en avril 2009. Le gouvernement indique en outre qu’à l’issue de la mission les représentants des partenaires sociaux et le gouvernement ont élaboré une plate-forme d’entente dans laquelle ils ont convenu de participer à un séminaire tripartite organisé par le bureau sous-régional de l’OIT afin de discuter des défis pour l’Egypte dans l’application de la convention, d’étudier les expériences des autres Etats Membres et de formuler des propositions sur les étapes suivantes en tenant compte des commentaires de la commission. Dans ces circonstances, la commission exprime l’espoir que le séminaire se tiendra très prochainement et que des mesures seront prises pour rendre la législation conforme à la convention. La commission prie le gouvernement d’indiquer tout fait nouveau à cet égard.
Rappelant qu’elle formule des commentaires sur ces questions législatives depuis des années, la commission exprime l’espoir que le gouvernement sera en mesure d’indiquer dans son prochain rapport les progrès accomplis en ce qui concerne ces modifications, et lui rappelle qu’il peut faire appel à l’assistance technique du Bureau pour élaborer la législation.
La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) en date du 29 août 2009, qui se réfèrent à des questions déjà soulevées par la commission, ainsi qu’à la répression violente par la police d’une manifestation de travailleurs les 6 et 7 avril 2008, ayant entraîné la mort de six travailleurs et le placement en détention de 500 personnes, parmi lesquelles trois syndicalistes qui ont été maintenus en détention 54 jours. La commission rappelle à cet égard que, lorsque se sont déroulés des troubles ayant entraîné des pertes de vies humaines et des blessures graves, l’institution d’une enquête judiciaire indépendante est une méthode particulièrement appropriée pour établir clairement les faits, déterminer les responsabilités, sanctionner les coupables et prévenir la répétition de tels actes et que l’arrestation ou la mise en détention de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes, même pour une période courte, en raison de l’exercice d’activités légitimes et sans qu’aucun délit ne leur soit imputé au sens qu’il existe un mandat judiciaire constitue une violation grave des principes de la liberté syndicale (voir étude d’ensemble de 1994, Liberté syndicale et négociation collective, paragr. 29 et 31). La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires à cet égard.
La commission a pris note de la discussion relative à l’application de la convention qui a eu lieu en juin 2008 à la Commission de l’application des normes de la Conférence. Elle note en particulier que le gouvernement a indiqué à cette occasion, suite aux observations de la CSI de 2007, que: 1) les élections se sont déroulées conformément aux règles établies par les syndicats dans leurs assemblées générales; 2) toutes les candidatures avaient été enregistrées sous contrôle légal et, dans le cadre de ce cycle d’élections, plus de 18 000 travailleurs ont été élus dans les instances représentatives des entreprises et établissements du pays; 3) 23 nouvelles organisations syndicales ont été constituées; 4) le Conseil central de la Confédération des syndicats a lui-même tenu ses élections, renouvelant 70 pour cent de ses instances; 5) un processus de cette ampleur, qui a mobilisé plus de 4 millions de travailleurs, a inévitablement engendré des rivalités et des incidents, qui ont nécessité l’intervention des forces de l’ordre, interventions qui ne peuvent pas être présentées comme des actes d’ingérence du gouvernement. La commission note également que le gouvernement a indiqué que ses commentaires sur l’application de la convention seront transmis au Conseil consultatif du travail en vue de prendre les mesures nécessaires pour la révision du Code du travail et de la loi sur les syndicats, de manière à rendre ces instruments conformes à la convention. La commission note que la Commission de la Conférence a demandé au gouvernement d’accepter une mission d’assistance technique et s’est félicitée des bonnes dispositions manifestées par le gouvernement à ce sujet.
La commission note que la mission d’assistance technique demandée par la Commission de l’application des normes de la Conférence s’est rendue en Egypte du 20 au 23 avril 2009.
La commission rappelle que, depuis un certain nombre d’années, ses commentaires concernent également un certain nombre de divergences entre la convention et la législation nationale, notamment la loi sur les syndicats no 35 de 1976 dans sa teneur modifiée par la loi no 12 de 1995 et le Code du travail no 12 de 2003, sur les points suivants:
– la destitution des membres du comité exécutif d’un syndicat qui provoquerait des arrêts de travail ou l’absentéisme dans un service public ou un service d’intérêt collectif (art. 70(2)(b) de la loi no 35 de 1976);
La commission note à cet égard que le gouvernement a annoncé que, au terme de la mission d’assistance technique susmentionnée, il a signé avec les partenaires sociaux un protocole d’accord par lequel les parties s’engagent à participer à un séminaire tripartite qui sera organisé par le bureau sous-régional de l’OIT afin d’analyser les questions soulevées par l’application de la convention et pour étudier des expériences comparables d’autres pays et formuler des propositions sur les mesures qui devraient être adoptées pour faire suite aux commentaires de la commission. La commission considère que la tenue de ce séminaire est un premier pas important pour traiter des questions qui font l’objet de commentaires depuis de nombreuses années. La commission exprime l’espoir que le séminaire en question sera mené dans un proche avenir et que les commentaires seront examinés par cette instance. En outre, la commission espère que les mesures nécessaires seront prises par suite de cette activité afin de rendre la législation conforme à la convention. Elle prie le gouvernement de fournir des informations dans son prochain rapport sur les mesures prises à cet égard.
La commission prend note du rapport du gouvernement.
La commission avait soulevé précédemment plusieurs points concernant le droit des travailleurs de s’affilier aux organisations de leur choix et le droit de grève (articles 2 et 3 de la convention). A cet égard, la commission note que le rapport du gouvernement ne répond pas en détail à ces questions. Elle espère que, dans son prochain rapport, il répondra pleinement à propos des points précédemment soulevés, qui sont les suivants:
– Article 2. La commission demande au gouvernement de modifier l’article 19(f) de la loi no 35 de 1976 sur les syndicats, telle que modifiée par la loi no 12 de 1995, afin que tous les travailleurs qui le souhaitent puissent s’affilier à plus d’une organisation pour pouvoir défendre leurs intérêts professionnels, dans les cas où ils exerceraient plus d’une profession.
– Article 3. La commission demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que les catégories de travailleurs exclues du champ d’application du Code du travail (fonctionnaires des organismes publics, y compris les administrations publiques locales et les autorités publiques; domestiques et catégories assimilées; et travailleurs membres de la famille de l’employeur et à la charge de ce dernier) jouissent du droit de grève.
– La commission demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 192 du Code du travail afin que la loi n’oblige pas les organisations de travailleurs à préciser la durée de la grève.
– La commission demande au gouvernement de modifier l’article 69(9) du Code du travail pour que les travailleurs ayant participé à une grève licite ne soient pas punis au motif que le préavis de grève n’en précisait pas la durée.
La commission prend note du rapport du gouvernement et de sa réponse aux commentaires que la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), désormais Confédération syndicale internationale (CSI), a transmis en 2006 sur l’application de la convention. Elle prend note aussi des commentaires de la CSI dans une communication en date du 28 août 2007. Ils portent principalement sur les questions que la commission a soulevées, ainsi que sur des actes d’ingérence du gouvernement dans des élections syndicales, et sur l’intervention violente des forces de sécurité contre des syndicalistes qui participaient à ces élections. La commission demande au gouvernement de transmettre ses observations au sujet des allégations de la CSI.
La commission rappelle que, depuis des années, ses commentaires ont trait aux divergences entre la convention et la législation nationale, par exemple la loi no 35 de 1976 relative aux syndicats, telle que modifiée par la loi no 12 de 1995, et le Code du travail no 12 de 2003, en ce qui concerne les points suivants.
Article 2 de la convention. Institutionnalisation d’un système d’unicité syndicale, en vertu de la loi no 35 de 1976 (telle que modifiée par la loi no 12 de 1995), en particulier les articles 7, 13, 14, 17 et 52. La commission prend note de l’indication du gouvernement, à savoir que la structure syndicale a été choisie par les travailleurs, lesquels se sont rendu compte que des structures syndicales disparates sont inefficaces et ne constituent pas un groupe de pression conforme à leurs intérêts. Dans ces conditions, la commission rappelle à nouveau que la loi no 35 et en particulier ses articles 7, 13, 14, 17 et 52 ne sont pas conformes à l’article 2 de la convention étant donné que l’unicité syndicale imposée directement ou indirectement par la loi est en contradiction avec les normes expresses de la convention (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 91). La commission demande au gouvernement de modifier les articles 7, 13, 14, 17 et 52 de la loi no 35 de 1976 (telle que modifiée par la loi no 12 de 1995) afin de garantir le droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s’y affilier à tous les niveaux en dehors de la structure syndicale en place.
Article 3. La législation prévoit que les organisations syndicales de niveau supérieur, en particulier la Confédération des syndicats, exercent un contrôle sur la procédure de nomination et d’élection aux comités directeurs des organisations syndicales (art. 41, 42 et 43 de la loi no 35, telle que modifiée par la loi no 12). La commission rappelle que les procédures de nomination et d’élection au bureau d’un syndicat devraient être fixées par les réglementations de l’organisation concernée, sans intervention des autorités publiques ou de la seule centrale syndicale désignée par la loi. Les dispositions législatives peuvent exiger, d’une manière compatible avec la convention, que les organisations précisent dans leurs statuts et règlements la procédure de nomination de leurs organes exécutifs, et des règles garantissant le bon déroulement des élections. Si toutefois un contrôle est jugé nécessaire, il devrait être effectué par une autorité judiciaire (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 114 et 115). Enfin, la commission souligne que toute destitution ou suspension des dirigeants syndicaux qui ne résultent pas d’une décision interne du syndicat, d’un vote des adhérents ou d’une procédure judiciaire régulière constituent une grave ingérence dans l’exercice des fonctions syndicales auxquelles les dirigeants ont été librement élus par les membres de leurs syndicats. Les dispositions législatives permettant la désignation d’administrateurs provisoires par l’organe directeur d’une centrale unique sont incompatibles avec la convention. Les mesures de cet ordre devraient n’être possibles que par voie judiciaire (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 122 et 123). La commission exprime donc le ferme espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour modifier la législation afin que chaque organisation de travailleurs puisse élire librement ses représentants, conformément à l’article 3 de la convention. La commission demande au gouvernement de la tenir informée des mesures prises ou envisagées à cet égard.
Contrôle de la Confédération des syndicats sur la gestion financière des syndicats (art. 62 et 65 de la loi no 35, telle que modifiée par la loi no 12). La commission prend note de l’indication du gouvernement, à savoir que la structure financière en place ne va à l’encontre d’aucune convention internationale ou législation, et est la principale source de financement des syndicats à l’échelle internationale. La commission rappelle qu’elle avait précédemment insisté sur le droit des organisations de travailleurs d’organiser leur gestion en dehors de toute intervention des autorités publiques, et que ce droit comprend notamment l’autonomie et l’indépendance financière. La faculté de contrôle donnée en vertu de la loi à une organisation centrale unique constitue une ingérence dans le libre fonctionnement des organisations de travailleurs, ce qui est contraire à l’article 3. La commission demande donc de nouveau au gouvernement de faire le nécessaire pour que l’article 62, qui prévoit que la confédération détermine le règlement financier des syndicats et impose aux organisations syndicales de base de verser un certain pourcentage de leurs recettes aux organisations de niveau supérieur, et pour que l’article 65, qui dispose que la confédération contrôle toutes les activités syndicales, soient modifiés afin que chaque organisation de travailleurs ait le droit d’organiser sa propre gestion, y compris financière, sans ingérence, conformément à l’article 3 de la convention.
Droit de grève. La commission prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle les grèves sont interdites dans les entreprises ayant un rôle stratégique, disposition légitime et nécessaire pour protéger la sûreté et la sécurité publiques; le gouvernement ajoute que les restrictions législatives à l’exercice de la grève visent de façon analogue à garantir la sécurité publique et la prospérité économique du pays. A cet égard, la commission rappelle que toute restriction ou limitation du droit de grève ne devrait concerner que les fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat, ou les services essentiels au sens strict du terme (c’est-à-dire ceux dont l’interruption mettrait en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne). Dans ces conditions, la commission demande de nouveau au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier la législation en ce qui concerne:
– la déchéance du comité exécutif d’un syndicat qui provoquerait des arrêts de travail ou l’absentéisme dans un service public ou dans des services communautaires (art. 70(2)(b) de la loi no 35 de 1976);
– l’accord préalable de la Confédération des syndicats pour l’organisation d’une grève (art. 14(i) de la même loi);
– les restrictions au droit de grève et le recours à l’arbitrage obligatoire dans les services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme (art. 179, 187, 193 et 194 du Code du travail); et
– les sanctions en cas d’infraction à l’article 194 du Code du travail (art. 69(9) du code).
La commission adresse également une demande directe au gouvernement.
La commission prend note des commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), en date du 10 août 2006, portant en grande partie sur les questions en suspens en matière de législation et d’application pratique de la convention, qui sont actuellement à l’étude, ainsi que sur les différentes restrictions à l’exercice des droits syndicaux, en particulier du droit de grève. La commission prend note de la récente communication du gouvernement répondant aux commentaires de la CISL.
La commission examinera les commentaires de la CISL et la réponse du gouvernement à sa prochaine session, et demande au gouvernement de communiquer pour sa prochaine session de novembre-décembre 2007, conformément à la procédure habituelle de présentation des rapports, ses observations sur l’ensemble des questions mentionnées dans sa précédente observation de 2005 (voir observation de 2005, 76e session).
Article 2 de la convention. Dans ses commentaires précédents, la commission avait demandé au gouvernement de modifier l’article 19(f) de la loi no 35 de 1976 sur les syndicats, telle que modifiée par la loi no 12 de 1995, afin que tous les travailleurs, qui le souhaitent, puissent s’affilier à plus d’une organisation pour pouvoir défendre leurs intérêts professionnels, dans les cas où ils exerceraient plusieurs professions. Dans son rapport, le gouvernement indique que dans la pratique les travailleurs peuvent choisir d’être affiliés simultanément à plusieurs syndicats et organisations professionnelles. La commission prie le gouvernement d’adapter sa législation en conséquence, de telle sorte que la législation comme la pratique nationales soient en pleine conformité avec l’article 2 de la convention.
Article 3. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur les conditions du recours à l’arbitrage en cas de conflits collectifs dans le contexte des zones économiques spéciales. Le gouvernement indiquant dans son rapport que les dispositions applicables à cet égard sont celles du Code du travail de 2003, la commission prie le gouvernement de se référer au contenu de ses observations sur ce point.
Par ailleurs, la commission avait noté que certaines catégories de travailleurs exclues du champ d’application du Code du travail ne bénéficient pas ipso facto du droit de grève tel que régi par le code (fonctionnaires des organismes publics, y compris les administrations publiques locales et les autorités publiques; domestiques et catégories assimilées, et travailleurs membres de la famille de l’employeur et à la charge de ce dernier). Dans son rapport, le gouvernement indique que: 1) les travailleurs domestiques ne sont pas organisés dans le pays; 2) la question du droit de grève ne constitue pas un enjeu pour les travailleurs membres de la famille de l’employeur; et 3) les fonctionnaires des organismes publics, y compris les administrations publiques locales, relèvent des exceptions autorisées par la convention puisqu’ils correspondent à la catégorie des fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat. A cet égard, la commission rappelle que le droit de grève peut être restreint, voire interdit, dans la fonction publique, uniquement pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat, dans les services essentiels au sens strict du terme, ou encore en situation de crise nationale aiguë. Dans ces conditions, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que les travailleurs qui ne relèvent pas de ces cas de figure puissent bénéficier du droit de grève.
La commission avait aussi noté que, conformément à l’article 192 du nouveau Code du travail, le préavis de grève doit préciser la durée de celle-ci. La commission note que, selon le gouvernement, la précision demandée semble liée à des questions de versement des salaires pour toute la période de la grève. La commission n’en réitère pas moins que la mention obligatoire de la durée de la grève restreint le droit des organisations de travailleurs d’organiser librement leur activité et de formuler leur programme d’action, contrairement à ce que prévoit l’article 3. Elle demande donc à nouveau au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 192 afin que la loi n’oblige pas les organisations de travailleurs à préciser la durée de la grève.
La commission avait enfin noté qu’en vertu de l’article 69(9) du nouveau Code du travail les travailleurs ayant participé à une grève allant à l’encontre de l’article 192 peuvent être licenciés pour faute grave. Dans son rapport, le gouvernement indique que les sanctions en cause sont la conséquence d’une infraction aux procédures légales de recours à la grève. A cet égard, la commission rappelle que la grève ne devrait pouvoir faire l’objet de sanctions que lorsque son interdiction est conforme aux dispositions de la convention. Elle demande donc à nouveau au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les travailleurs ayant participé à une grève licite ne soient pas punis au motif que le préavis de grève n’en précisait pas la durée.
La commission demande à nouveau au gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les mesures prises pour mettre l’ensemble de la législation susmentionnée en conformité avec les exigences posées par les articles 2 et 3 de la convention. Elle porte à l’attention du gouvernement que le Bureau est à sa disposition pour toute assistance dont il pourrait avoir besoin dans la formulation de sa législation.
La commission prend note du rapport du gouvernement. Elle rappelle que ses commentaires font état depuis plusieurs années de divergences entre la convention et la législation nationale sur les points suivants:
– l’institutionnalisation d’un système d’unicité syndicale, en vertu de la loi no 35 de 1976 (telle que modifiée par la loi no 12 de 1995), en particulier les articles 7, 13, 14, 17 et 52;
– la législation qui prévoit que les organisations syndicales faîtières, en particulier la Confédération des syndicats, exercent un contrôle sur la procédure de nomination et d’élection aux comités directeurs des organisations syndicales (art. 41, 42 et 43 de la loi no 35 (telle que modifiée par la loi no 12));
– le contrôle de la Confédération des syndicats sur la gestion financière des syndicats (art. 62 et 65 de la même loi);
– la déchéance du comité exécutif d’un syndicat qui provoquerait des arrêts de travail ou l’absentéisme dans un service public ou dans des services collectifs (art. 70(2)(b) de la loi susmentionnée);
– les restrictions au droit de grève et la question du recours à l’arbitrage obligatoire dans les services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme (art. 179, 187, 193 et 194 du Code du travail);
A cet égard, la commission prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle l’ensemble des commentaires de la commission sera pris en compte dans le cadre d’une révision de la législation. La commission exprime le ferme espoir que le prochain rapport du gouvernement permettra de constater des progrès substantiels sur les différents points énumérés ci-dessus. Elle rappelle au gouvernement qu’il lui est loisible de recourir dans cette optique à l’assistance technique du Bureau.
La commission adresse aussi une demande directe au gouvernement.
Se référant à son observation, la commission prend note du rapport du gouvernement et du nouveau Code du travail no 12 de 2003.
Article 2 de la convention. Dans ses commentaires précédents, la commission avait demandé au gouvernement de modifier l’article 19(f) de la loi no 35 de 1976 sur les syndicats, telle que modifiée par la loi no 12 de 1995, afin que tous les travailleurs qui le souhaitent puissent s’affilier à plus d’une organisation pour pouvoir défendre leurs intérêts professionnels, dans les cas où ils exerceraient plusieurs professions. Le gouvernement rappelle que la législation égyptienne n’interdit pas aux travailleurs d’être affiliés simultanément à plusieurs syndicats et organisations professionnelles. Cela étant, en Egypte, les syndicats jugent inappropriées les doubles affiliations. Le gouvernement souligne que les travailleurs bénéficient toujours des avantages obtenus par les syndicats, en particulier dans le cadre de conventions collectives, qu’ils soient membres ou non d’un syndicat. La commission rappelle que, conformément à l’article 2 de la convention, les travailleurs ont le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix. La commission estime que cette question est liée à l’importance de garantir que les travailleurs qui occupent plus d’un emploi puissent, s’ils le souhaitent, s’affilier à plus d’un syndicat pour défendre leurs intérêts professionnels dans chacune de leur catégorie d’emploi ou profession. Rappelant qu’aux termes de l’article 19(f) susmentionné un travailleur ne peut pas être membre d’un syndicat général, même s’il occupe plusieurs professions, la commission demande au gouvernement d’indiquer la manière dont il est possible, dans les faits, de conjuguer plusieurs affiliations syndicales, possibilité dont le rapport fait état.
Article 3. La commission note que, conformément à l’article 28 de la loi no 83 de 2003, portant promulgation de la loi sur les zones économiques spéciales, et en l’absence de dispositions spéciales dans la loi en question, la législation du travail s’applique aux relations de travail dans ces zones. Par ailleurs, le chapitre 4 de cette loi prévoit l’établissement d’un centre de règlement des conflits qui s’occupera en particulier, par la conciliation, des conflits collectifs du travail. La commission note aussi qu’en vertu de l’article 52 l’autorité de la zone peut recourir à l’arbitrage, quelle que soit la nature du conflit. Rappelant que toute restriction au droit de grève, voire son interdiction, devrait se limiter aux services essentiels au sens strict du terme, la commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les conditions dans lesquelles les autorités peuvent recourir à un arbitrage en cas de conflits collectifs, compte étant tenu en particulier du droit qu’ont les travailleurs de recourir à l’action collective pour défendre leurs intérêts professionnels, conformément à l’article 3 de la convention.
La commission note qu’en vertu de l’article 4 du nouveau Code du travail les catégories suivantes de travailleurs sont exclues de son champ d’application: 1) les fonctionnaires des organismes publics, y compris les administrations publiques locales et les autorités publiques; 2) les domestiques et les catégories assimilées; 3) les travailleurs membres de la famille de l’employeur et à la charge de ce dernier. Ces travailleurs, conformément à l’article 2 de la loi no 35 sur les syndicats (telle que modifiée par la loi no 12 de 1995) ont le droit de s’organiser. Toutefois, étant exclus du champ d’application du Code du travail, ils ne bénéficient pas du droit de grève tel que régi par le code. La commission rappelle que seuls peuvent être privés du droit de grève les fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat ou les travailleurs qui assurent des services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire ceux dont l’interruption mettrait en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans l’ensemble ou dans une partie de la population. La commission demande au gouvernement d’indiquer comment il garantit le droit de grève aux catégories de travailleurs mentionnés à l’article 4, à l’exception des fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat et des travailleurs qui assurent des services essentiels au sens strict du terme.
La commission note que, conformément à l’article 192 du nouveau Code du travail, le préavis de grève doit préciser la durée de celle-ci. La commission estime que la mention obligatoire de la durée de la grève restreint le droit des organisations de travailleurs d’organiser librement leur activité et de formuler leur programme d’action, contrairement à ce que prévoit l’article 3. La commission demande donc au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 192 afin que la loi n’oblige pas les organisations de travailleurs à préciser la durée de la grève.
La commission note qu’en vertu de l’article 69(9) du nouveau Code du travail les travailleurs ayant participéà une grève qui va à l’encontre de l’article 192 peuvent être licenciés pour faute grave. Rappelant que la grève ne devrait pouvoir faire l’objet de sanctions que lorsque son interdiction est conforme aux dispositions de la convention, la commission demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les travailleurs ayant participéà une grève licite ne soient pas punis au motif que le préavis de grève n’en précisait pas la durée.
La commission prend note du rapport du gouvernement. A cet égard, elle prend note en particulier du: 1) nouveau Code du travail no 12 de 2003, et de 2) la réponse du gouvernement à propos de ses commentaires précédents, réponse qui a été rédigée en collaboration avec un comité tripartite.
Tout d’abord, la commission rappelle que les divergences entre la convention et la législation nationale - la loi no 35 de 1976 sur les syndicats, telle que modifiée par la loi no 12 de 1995, et l’ancien Code du travail, tel que modifié par la loi no 137 de 1981 - portent sur les points suivants:
- l’institutionnalisation d’un système d’unicité syndicale, en vertu de la loi no 35 (telle que modifiée par la loi no 12), en particulier les articles 7, 13, 14, 17 et 52;
- la législation qui prévoit que les organisations syndicales faîtières, en particulier la Confédération des syndicats, exercent un contrôle sur la procédure de nomination et d’élection aux comités directeurs des organisations syndicales (art. 41, 42 et 43 de la loi no 35 (telle que modifiée par la loi no 12));
- le contrôle de la Confédération des syndicats sur la gestion financière des syndicats (art. 62 et 65 de la même loi);
- la déchéance du comité exécutif d’un syndicat qui provoquerait des arrêts de travail ou l’absentéisme dans un service public ou dans des services collectifs (art. 70 (2)(b) de la loi susmentionnée);
- l’accord préalable de la Confédération des syndicats pour l’organisation d’une grève (art. 14(i) de la même loi);
- un arbitrage obligatoire à la demande de l’une des parties dans les services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme (art. 93 à 106 de l’ancien Code du travail (tel que modifié par la loi no 137)).
Articles 2, 5 et 6 de la convention. Dans ses commentaires précédents, la commission avait de nouveau demandé au gouvernement de veiller à ce que la loi no 35 soit modifiée pour que tous les travailleurs qui le souhaitent aient le droit de constituer des organisations professionnelles en dehors de la structure syndicale existante. Le gouvernement réaffirme que, au fil des années, le mouvement égyptien du travail a cherchéà protéger les syndicats contre la fragmentation, qui l’avait affaibli dans le passé, tout en préservant leur indépendance vis-à-vis des pouvoirs publics et des partis politiques. La commission prend dûment note de cette information mais rappelle que la loi no 35, en particulier ses articles 7, 13, 14, 17 et 52, ne sont pas conformes à l’article 2 de la convention, étant donné que l’unicité syndicale imposée directement ou indirectement par la loi est en contradiction avec les normes expresses de la convention (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 91). Dans son rapport de 2002, le gouvernement a fait état de l’institution d’une commission tripartite chargée de réviser la loi no 35 en tenant compte des observations formulées ces dernières années par la commission. La commission demande au gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport si cette commission a étéétablie et, d’une façon plus générale, de la tenir informée des mesures prises ou envisagées pour modifier la loi no 35 afin que les travailleurs jouissent du droit de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s’y affilier, conformément à l’article 2.
Article 3. La commission rappelle que, dans son commentaire précédent, elle avait noté que l’article 41 de la loi no 35 prévoit que la date et la procédure concernant la nomination et l’élection aux comités directeurs des organisations syndicales doivent être déterminées par une décision du ministre compétent, avec l’approbation de la Confédération générale des syndicats. L’article 42 prescrit la manière de pourvoir les postes vacants et permet aussi à la Confédération générale de déterminer les conditions et les modalités d’une éventuelle dissolution des comités directeurs en cas de réduction du nombre des affiliés. L’article 43 prévoit que si, pour quelque motif que ce soit, le nombre des membres des comités directeurs diminue au point de représenter moins de la moitié du nombre total, le comité directeur doit être dissout et que l’organe exécutif de l’organisation syndicale faîtière en assumera momentanément les fonctions. Dans son rapport, le gouvernement indique qu’il revient au syndicat de décider de l’organisation des élections. Le ministre de la Main-d’œuvre et des Migrations a un simple rôle d’organisation et de procédure. Il prévoit un mécanisme officiel pour garantir que l’entreprise satisfera à son obligation d’organiser les élections et que les élections se tiendront dans les conditions requises d’impartialité et de neutralité. Dans ces conditions, la commission rappelle que les procédures de désignation et d’élection aux comités directeurs syndicaux devraient être fixées par le règlement de l’organisation intéressée, sans ingérence des pouvoirs publics, ou par l’organisation syndicale centrale unique désignée par la loi. A propos de la remarque du gouvernement selon laquelle les élections devraient se tenir en toute impartialité et neutralité, la commission souligne que des dispositions législatives peuvent obliger, d’une façon compatible avec la convention, les organisations à préciser dans leurs statuts et règlements la procédure de désignation de leurs organes exécutifs, et des règles garantissant la bonne tenue des élections. Si, toutefois, un contrôle est jugé nécessaire, il devrait être effectué par une autorité judiciaire (voir étude d’ensemble, op. cit, paragr. 114 et 115). Enfin, la commission souligne que toute destitution ou suspension des dirigeants syndicaux qui ne résulte pas d’une décision interne du syndicat, d’un vote des adhérents ou d’une procédure judiciaire régulière constitue une grave ingérence dans l’exercice des fonctions syndicales pour lesquelles les dirigeants ont été librement élus par les membres de leur syndicat. Les dispositions législatives permettant la désignation d’administrateurs provisoires par l’organisation centrale unique sont incompatibles avec la convention. Les mesures de cet ordre devraient n’être possibles que par voie judiciaire (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 122 et 123). La commission exprime donc le ferme espoir que le gouvernement procèdera aux modifications nécessaires pour que toutes les organisations de travailleurs puissent élire librement leurs représentants, conformément à l’article 3 de la convention. La commission demande au gouvernement de la tenir informée des mesures prises ou envisagées à cet égard.
Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que l’article 62 de la loi no 35 prévoit que la Confédération générale des syndicats détermine les règlements financiers des syndicats et impose aux organisations syndicales de base de verser un certain pourcentage de leurs recettes aux organisations de niveau supérieur, et que l’article 65 prévoit que la confédération contrôle tous les aspects des activités financières des syndicats. La commission rappelle que le droit des organisations de travailleurs d’organiser leur gestion en dehors de toute intervention des autorités publiques comprend notamment l’autonomie et l’indépendance financière. La faculté de contrôle donnée en vertu de la loi à l’organisation centrale unique constitue une ingérence dans le libre fonctionnement des organisations de travailleurs, ce qui est contraire à l’article 3. Dans le cas où un contrôle de ce type serait mis en place, il devrait être décidé par l’ensemble des organisations intéressées, conformément à leurs statuts respectifs, et correspondre au libre choix des organisations de base de s’affilier à des organisations faîtières. De plus, les législations qui visent à protéger le droit des membres et à assurer les conditions d’une gestion honnête et efficace peuvent prévoir, d’une manière conforme à la convention, que les statuts syndicaux devront contenir des dispositions sur l’utilisation des fonds, la gestion financière interne, etc. (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 124). La commission demande donc au gouvernement de la tenir informée des mesures prises ou envisagées pour modifier les articles 62 et 65 afin que les organisations de travailleurs aient le droit d’organiser sans ingérence leur gestion, y compris leurs activités financières, conformément à l’article 3.
A propos de l’article 70(2)(b) de la loi no 35, qui autorise le Procureur général à demander à une instance pénale la déchéance du comité exécutif d’un syndicat qui aurait provoqué des arrêts de travail ou l’absentéisme dans un service public, le gouvernement indique que cette disposition s’applique aux entreprises qui assurent des services vitaux dans lesquels une grève pourrait mettre en danger la vie et la sécurité de l’ensemble de la société. La commission rappelle qu’elle a toujours considéré que toute restriction ou limitation du droit de grève devrait se limiter aux fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat ou qui assurent des services essentiels dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 158 et 159). La commission estime que le domaine d’activité des entreprises visé par l’article 70(2)(b) va au-delà de cette définition. Cela étant, elle rappelle que, afin d’éviter des dommages irréversibles ou exagérément disproportionnés par rapport aux intérêts professionnels des parties au différend, ainsi que des dommages causés à des tiers, à savoir les usagers ou les consommateurs qui subissent les effets économiques des conflits collectifs, les autorités pourraient établir un régime de service minimum dans les autres services d’utilité publique plutôt que d’interdire purement et simplement la grève (voir étude d’ensemble op. cit., paragr. 160). La commission demande donc au gouvernement d’indiquer les mesures prises ou envisagées pour modifier l’article 70(2)(b), en tenant compte des principes susmentionnés.
La commission note que l’article 193 du nouveau Code du travail interdit aux travailleurs d’annoncer une grève, ou d’y prendre part, pendant la médiation ou l’arbitrage. La commission note aussi qu’il existe deux sortes de procédures d’arbitrage: 1) l’arbitrage privé auquel les parties peuvent recourir sur la base d’un accord mutuel, sauf en cas de différend dans une entreprise vitale et stratégique (art. 191); et 2) l’arbitrage prévu par la loi qui peut être imposé par l’une des parties (art. 179), conformément à l’article 187, cette procédure débouche sur une sentence qui équivaut à une décision de la Cour d’appel. La commission rappelle que le droit de grève des organisations de travailleurs ne peut être interdit ou restreint - en particulier par un arbitrage obligatoire imposé par l’une des parties - qu’en cas de différend dans des services essentiels au sens strict du terme, à savoir des services dont l’interruption mettrait en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne, dans l’ensemble ou une partie de la population, ou en cas de crise nationale grave. La commission demande donc au gouvernement de modifier l’article 193 du Code du travail, lu conjointement avec les articles 179 et 187, afin de garantir que l’arbitrage obligatoire imposé par l’une des parties ne restreindra le droit des organisations de travailleurs qu’en cas de services essentiels au sens strict du terme ou de crise nationale grave.
La commission note que l’article 194 du nouveau Code du travail interdit la grève dans les établissements vitaux et stratégiques, et que c’est un décret du Premier ministre qui déterminera quels sont ces établissements. Compte tenu des observations qui précèdent sur les restrictions au droit de grève, la commission ne doute pas que, dans ce décret ministériel, le gouvernement se limitera aux établissements qui assurent des services essentiels au sens strict du terme. Elle demande au gouvernement de la tenir informée à cet égard et de lui communiquer copie du décret.
La commission note que, en vertu de l’article 69.9 du nouveau Code du travail, un travailleur peut être licencié pour faute grave s’il a participéà une grève allant à l’encontre de l’article 194. Rappelant que les sanctions visant la participation à une grève ne devraient être possibles que lorsque l’interdiction de la grève est conforme aux principes de la liberté syndicale, la commission espère que, compte tenu des observations formulées à propos de l’article 194, les travailleurs ayant participéà une grève licite ne seront pas sanctionnés. Elle demande au gouvernement de la tenir informée de tout exemple concret d’application de l’article 69.9 en cas d’infraction à l’article 194.
Articles 3 et 10. Au sujet de l’article 14(i) de la loi no 35 en vertu duquel la Confédération des syndicats est habilitée à approuver l’organisation d’une grève par des travailleurs, le gouvernement indique que la confédération, conformément à ses responsabilités, est le syndicat qui regroupe l’ensemble des travailleurs du secteur intéresséà l’échelle nationale, et la partie responsable du fonds de financement des grèves; il est donc naturel qu’elle puisse se prononcer sur l’organisation d’une grève, étant donné toutes les conséquences financières, et sur le plan de la solidarité, que la grève peut avoir pour l’ensemble des travailleurs du secteur. Par ailleurs, si la confédération ne pouvait pas s’exprimer à ce sujet, cela favoriserait les employeurs qui préfèrent traiter avec les travailleurs de l’entreprise et le comité syndical, et limiter la confrontation, plutôt qu’aboutir à une confrontation avec le syndicat général et les travailleurs du secteur intéressé. La commission rappelle que l’obligation prévue par la loi d’obtenir l’approbation de la confédération pour organiser une grève n’est pas conforme à la convention puisqu’elle prive les organisations de base du droit d’organiser leur activité et de formuler leur programme d’action de façon indépendante, y compris du droit de décider d’appeler à la grève. Les conditions requises pour l’exercice du droit de grève devraient être inscrites dans les statuts et règles des organisations intéressées, lesquelles peuvent choisir de subordonner l’appel à la grève à l’approbation de l’organisation centrale à laquelle elles sont affiliées. De nouveau, la commission demande instamment au gouvernement de modifier la législation pour la rendre conforme à l’article 3 de la convention, afin que les organisations de base aient le droit d’organiser leur activité sans que la loi n’impose une autorisation préalable de la confédération. Elle demande au gouvernement de la tenir informée des mesures prises ou envisagées à cet égard.
Article 2 de la convention. La commission avait précédemment demandé au gouvernement de modifier l’article 19 f)de la loi no 12 de 1995 afin que tous les travailleurs qui le désirent puissent s’affilier à plus d’une organisation pour défendre leurs intérêts professionnels dans les cas où ils exerceraient plusieurs professions. A ce propos, la commission avait rappelé qu’en vertu de l’article 2 de la convention les travailleurs ont le droit de s’affilier à des organisations de leur choix sans autorisation préalable, et cela afin de garantir à ceux qui exercent plusieurs professions la possibilité de s’affilier à une organisation pour défendre leurs intérêts professionnels dans chacune des catégories d’emploi ou de profession qu’ils exercent. Etant donné que le rapport du gouvernement ne contient aucune réponse précise sur ce point, la commission prie à nouveau le gouvernement de modifier sa législation afin que les travailleurs puissent s’affilier, s’ils le souhaitent, à plus d’une organisation pour défendre leurs intérêts professionnels lorsqu’ils exercent plus d’une profession.
La commission prend note du rapport du gouvernement. Elle note en particulier la déclaration du gouvernement selon laquelle le ministre du Travail a décidé d’instituer une commission tripartite chargée de réviser la loi no 35 de 1976 sur les syndicats ainsi que le projet de Code du travail en tenant compte des observations formulées ces dernières années par la commission.
La commission rappelle que ses commentaires précédents portaient sur les points suivants.
1. Articles 2, 5 et 6 de la convention. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de modifier les articles 7, 13 et 52 de la loi no 35 de 1976, et les articles 14, 16, 17 et 41 de la loi no 12 de 1995, afin de garantir à tous les travailleurs qui le souhaitent le droit de constituer des organisations professionnelles en dehors de la structure syndicale existante. La commission avait rappeléà ce propos l’importance qu’elle attache au droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix en précisant que ce droit était violé lorsque la loi établissait un monopole syndical et que le fait que le mouvement syndical préfère un système unifié ne suffisait pas pour justifier un monopole établi par la loi. La commission prie à nouveau instamment le gouvernement de veiller à ce que les articles 7, 13 et 52 de la loi no 35 de 1976 ainsi que les articles 14, 16, 17 et 41 de la loi no 12 de 1995 soient modifiés afin que tous les travailleurs qui le souhaitent aient le droit de constituer des organisations professionnelles à tous les niveaux, en dehors de la structure syndicale établie et prie le gouvernement de la tenir informée de l’état d’avancement de la révision de la législation du travail, entreprise par la commission tripartite susmentionnée.
2. Article 3. La commission rappelle que ses commentaires précédents portaient sur les articles 41 et 42 de la loi no 12 de 1995. Elle avait noté qu’en vertu de l’article 41 la date et la procédure concernant la nomination et l’élection aux comités directeurs des organisations syndicales doivent être déterminées par une décision du ministre compétent, avec l’approbation de la Confédération générale des syndicats. L’article 42 prescrit la manière de pourvoir les postes vacants et permet aussi à la confédération générale de déterminer les conditions et les modalités d’une éventuelle dissolution des comités directeurs en cas de réduction du nombre des affiliés. A ce sujet, la commission rappelle que les procédures régissant la désignation d’élection des candidats et d’élection aux fonctions syndicales devraient être établies par les statuts de l’organisation concernée et non par la loi ni par une centrale syndicale unique désignée par la loi. La commission exprime donc le ferme espoir que le gouvernement procédera aux modifications nécessaires pour assurer que chaque organisation de travailleurs puisse avoir le choix d’élire librement ses représentants conformément àl’article 3 de la convention.
En ce qui concerne les articles 62 et 65, la commission avait rappelé qu’il est contraire à l’article 3 d’habiliter la centrale syndicale unique expressément désignée par la loi à exercer un contrôle financier. Elle prie à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que l’article 62, qui prévoit que la confédération détermine les règlements financiers des syndicats et impose aux organisations syndicales de base de verser un certain pourcentage de leurs recettes aux organisations de niveau supérieur, et l’article 65, énonçant que la confédération contrôle toutes les activités syndicales, soient modifiés afin que chaque organisation de travailleurs ait le droit d’organiser sa propre gestion, y compris financière sans ingérence, conformément à l’article 3.
3. Articles 3 et 10. La commission formule des commentaires depuis plusieurs années sur les dispositions suivantes:
i) articles 93 à 106 du Code du travail, tels que modifiés par la loi no 137 de 1981, imposant un arbitrage obligatoire à la demande de l’une des parties dans les services autres que ceux qui sont essentiels au sens strict du terme;
ii) article 70(2)(b) de la loi no 35 de 1976 qui autorise le Procureur général à demander à une instance pénale la déchéance du comité exécutif d’un syndicat ayant provoqué des arrêts de travail ou de l’absentéisme dans un service public;
iii) article 14(i) de la loi no 12 de 1995 qui prescrit que la Confédération générale doit donner son accord pour l’organisation d’une grève.
La commission note à ce propos que le gouvernement mentionne à nouveau un projet de Code du travail. Elle espère que ce Code sera adopté dans un proche avenir et qu’il sera parfaitement conforme aux dispositions de la convention. Elle prie le gouvernement de lui transmettre une copie du nouveau projet de Code du travail dès qu’il sera adopté.
En outre, une demande concernant certains points est adressée directement au gouvernement.
La commission note le rapport du gouvernement.
La commission avait prié le gouvernement de modifier l’article 19(f) de la loi no 12 de 1995 afin que tous les travailleurs qui le désirent puissent s’affilier à plus d’une organisation pour défendre leurs intérêts professionnels dans les cas où ils exerceraient plusieurs professions. La commission note les informations contenues dans le rapport du gouvernement selon lesquelles celui-ci estime peu probable qu’un travailleur puisse faire partie d’un syndicat général alors qu’il exerce en même temps une autre activité en dehors de la classification professionnelle. Le gouvernement ajoute que même si un travailleur exerçait plus d’une activité sur plusieurs lieux de travail, dans ce cas, il aurait une occupation qui ne sort pas du cadre de la classification professionnelle du syndicat général auquel il fait partie. Par conséquent, il resterait membre d’un seul et même syndicat.
Tout en notant les explications du gouvernement, la commission rappelle qu’en vertu de l’article 2 de la convention les travailleurs ont le droit de s’affilier à des organisations de leur choix sans autorisation préalable. De l’avis de la commission, cette question a trait à l’importance de garantir à ceux qui exercent plusieurs professions la possibilité de s’affilier à une organisation pour défendre leurs intérêts professionnels dans chacune des catégories d’emploi ou de profession qu’ils exercent. La commission prie donc de nouveau le gouvernement de modifier sa législation afin que les travailleurs puissent s’affilier à plus d’une organisation pour défendre leurs intérêts professionnels, s’ils le souhaitent, lorsqu’ils exercent plus d’une profession.
La commission note le rapport du gouvernement. Elle rappelle que ses commentaires antérieurs portaient sur les points suivants.
1. Articles 2, 5 et 6 de la convention. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de veiller à ce que soient modifiés les articles 7, 13 et 52 de la loi no 35 de 1976, et les articles 14, 16, 17 et 41 de la loi no 12 de 1995, afin de garantir à tous les travailleurs qui le souhaitent le droit de constituer des organisations professionnelles en dehors de la structure syndicale existante. La commission note les informations contenues dans le rapport du gouvernement selon lesquelles l’article 7 susmentionné prévoit que «la structure syndicale est établie de manière pyramidale sur la base de l’unité syndicale». Dans son rapport, le gouvernement souligne que l’unité syndicale émane de la volonté des travailleurs et ne leur est point imposée.
Concernant l’article 13 de la loi no 35 de 1976, le gouvernement indique dans son rapport que cette disposition établit une classification des groupes professionnels pour des industries similaires ou liées les unes aux autres ou ayant un produit commun, à condition que chaque groupe de composants similaires ait le droit de constituer un seul syndicat général unique au niveau de la République. Il semble que les travailleurs aient le droit de s’affilier aux organisations énumérées dans la législation et de les quitter, comme le gouvernement l’indique, mais qu’ils n’ont pas le droit de constituer une organisation ou de s’y affilier en dehors de la structure syndicale établie. La commission rappelle à cet égard l’importance du droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix, droit qui est violé lorsque la loi maintient un monopole syndical.
En ce qui concerne le droit, évoqué par le gouvernement dans un rapport précédent, pour la Confédération générale des syndicats de constituer des organisations syndicales, la commission avait rappelé l’importance primordiale qu’elle attache au droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier au sens de l’article 2. En outre, le fait que le mouvement syndical préfère un système unifié ne suffit pas pour justifier un monopole établi par la loi. La commission réitère que, même dans le cas où une unification du mouvement syndical a eu à un moment donné les préférences de tous les travailleurs, ceux-ci doivent toujours pouvoir conserver le libre choix de créer, s’ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure établie (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 96). En conséquence, la commission prie instamment le gouvernement, une fois de plus, de veiller à ce que les articles 7, 13 et 52 de la loi no 35 de 1976 et les articles 14, 16, 17 et 41 de la loi no 12 de 1995 soient modifiés, afin que tous les travailleurs qui le souhaitent aient le droit de constituer des organisations syndicales, à tous les niveaux, en dehors de la structure syndicale établie, et prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les mesures prises ou envisagées à cet égard.
2. Article 3. La commission rappelle que ses commentaires précédents portaient sur les articles 41 et 42 de la loi no 12 de 1995. Elle rappelle également que les procédures de sélection de candidats et d’élection aux fonctions syndicales devraient être établies par les statuts de l’organisation concernée, et non par la loi ni par une centrale syndicale unique déterminées par la législation. La commission note les informations fournies par le gouvernement dans son rapport selon lesquelles le rôle de la Confédération générale des syndicats se borne à fixer les dates d’élections et les procédures de sélection de candidats, ce qui constitue purement un travail d’organisation ne concernant pas l’autorité de confédération ou le contrôle des organisations syndicales. Le gouvernement ajoute que les procédures de sélection de candidats et d’élections aux fonctions syndicales doivent être déterminées par des règles spécifiques aux organisations syndicales et non par la loi ou par une organisation syndicale centrale unique appuyée par la loi. La commission rappelle néanmoins que l’article 41 précité prévoit que la date et la procédure concernant la nomination et l’élection aux comités directeurs des organisations syndicales doivent être déterminées par une décision du ministre compétent, avec l’approbation de la Confédération générale des syndicats. L’article 42 prescrit la manière de pourvoir aux vacances et permet aussi à la Confédération générale de déterminer les conditions et modalités d’une éventuelle dissolution des comités dans le cas de réduction du nombre des affiliés. Elle exprime le ferme espoir que le gouvernement procédera à des modifications pour assurer que chaque organisation de travailleurs puisse avoir le choix d’élire librement ses représentants en conformité avec l’article 3 de la convention.
En ce qui concerne les articles 62 et 65, la commission note que, selon le gouvernement, le contrôle financier se confine aux organisations générales et à la Confédération générale des syndicats. La commission rappelle qu’il est contraire à l’article 3 d’habiliter la Centrale syndicale unique expressément désignée dans la loi à exercer un contrôle financier. Elle prie encore à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que l’article 62, qui prévoit que la confédération déterminera les règlements financiers des syndicats et impose aux organisations syndicales de base de verser un certain pourcentage de leurs revenus aux organisations de niveau supérieur, et l’article 65 de la loi no 12 de 1995 qui indique que la confédération contrôlera toute activité des syndicats soient modifiés afin que chaque organisation de travailleurs ait le droit d’organiser sa propre gestion, y compris ses activités financières, conformément à l’article 3.
3. Articles 3 et 10. La commission note que les informations indiquées dans le rapport du gouvernement sont les mêmes que celles fournies lors de son précédent rapport. La commission se voit donc obligée de rappeler sa préoccupation à l’égard des dispositions suivantes:
i) les articles 93 à 106 du Code du travail, tels que modifiés par la loi no 137 de 1981, qui prévoient l’arbitrage obligatoire à la demande de l’une des parties dans les services autres que ceux qui sont essentiels au sens strict du terme;
ii) l’article 70(2)(b) de la loi no 35 de 1976 qui autorise le Procureur général à demander à une instance pénale la déchéance du comité exécutif d’un syndicat ayant provoqué des arrêts de travail ou de l’absentéisme dans un service public;
iii) l’article 14(i) de la loi no 12 de 1995 qui prescrit que la Confédération générale doit donner son accord pour l’organisation d’une grève.
S’agissant des articles 93 à 106 du Code du travail, la commission avait noté dans ses commentaires antérieurs que le gouvernement avait évoqué un projet de nouveau Code du travail instaurant un système de médiation en cas de conflits du travail, lequel peut ensuite donner lieu à un arbitrage à la demande des deux parties. Une nouvelle instance d’arbitrage tripartite allait également être créée par le projet. La commission prie le gouvernement de communiquer copie des articles du projet du nouveau Code du travail mentionnés par le gouvernement et d’indiquer les progrès intervenus dans l’adoption de ce texte.
En ce qui concerne l’article 70(2)(b) de la loi no 35 de 1976, qui prévoit la dissolution du comité exécutif d’un syndicat ayant provoqué des arrêts de travail ou de l’absentéisme dans un service public, le gouvernement réitère que cet article se limite aux entreprises fournissant des services de caractère général, des équipements publics ou des prestations répondant aux besoins de la population. La commission rappelle qu’elle a toujours estimé que toute restriction ou limitation au droit de grève ne devrait concerner que les fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat ou les services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire ceux dont l’interruption mettrait en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 158 et 159), et elle considère que le champ des entreprises couvert par l’article 70(2)(b) va au delà de cette définition. Elle rappelle, en revanche, qu’afin d’éviter des dommages irréversibles ou exagérément disproportionnés par rapport aux intérêts professionnels des parties au différend, ainsi que les dommages causés à des tiers, à savoir les usagers ou les consommateurs qui subissent les effets économiques des conflits collectifs, les autorités pourraient établir un régime de service minimum dans les autres services d’utilité publique plutôt que d’interdire purement et simplement la grève (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 160). La commission prie donc le gouvernement d’indiquer les mesures pour que l’article 70(2)(b) soit modifié en tenant compte de ces principes.
Enfin, s’agissant de l’article 14(i) de la loi no 12 de 1995, la commission note les informations fournies dans le rapport du gouvernement selon lesquelles la Confédération générale est habilitée à approuver l’organisation d’une grève par les travailleurs. Le gouvernement ajoute que cette prérogative soutient et renforce la mission syndicale. A cet égard, la commission rappelle que l’approbation nécessaire de la Confédération générale pour organiser une grève n’est pas conforme à la convention puisqu’elle dénie aux organisations de base le droit d’organiser de manière autonome leurs activités et programmes d’action, y compris de décider de l’opportunité d’une grève. La commission prie de nouveau instamment le gouvernement de modifier la législation afin de la rendre conforme à l’article 3 de la convention, de sorte que les organisations de base aient le droit d’organiser toutes leurs activités quelles qu’elles soient sans imposition législative d’une autorisation préalable de la Confédération générale.
La commission note que le rapport du gouvernement n’apporte pas de réponse à ses commentaires précédents. Elle veut encore espérer que le prochain rapport contiendra des informations complètes sur les questions suivantes.
La commission avait prié le gouvernement de modifier l’article 19(f) de la loi no12 de 1995 afin que tous les travailleurs qui le désirent puissent s’affilier à plus d’une organisation pour défendre leurs intérêts professionnels dans les cas où ils exerceraient plusieurs professions. La commission rappelle qu’en vertu de l’article 2 de la convention les travailleurs ont le droit de s’affilier à des organisations de leur choix sans autorisation préalable. De l’avis de la commission, cette question ne concerne pas la question de l’unité syndicale mais elle a plutôt trait à l’importance de garantir à ceux qui exercent plusieurs professions la possibilité de s’affilier à une organisation pour défendre leurs intérêts professionnels dans chacune des catégories d’emploi ou de profession qu’ils exercent. La commission prie donc de nouveau le gouvernement de modifier sa législation afin que les travailleurs puissent s’affilier à plus d’une organisation pour défendre leurs intérêts professionnels, s’ils le souhaitent, lorsqu’ils exercent plus d’une profession.
En outre, la commission rappelle que, conformément à l’article 2 de la convention, la liberté syndicale devrait être garantie non seulement aux employeurs et aux travailleurs du secteur privé, mais aussi aux fonctionnaires et au personnel des entreprises publiques, ainsi qu’aux travailleurs de secteurs nationalisés. Les personnes de ces catégories devraient être autorisées à défendre leurs intérêts dans des syndicats. A cet égard, la commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport s’il existe des dispositions dans la loi qui garantissent le droit syndical des fonctionnaires et, dans l’affirmative, de lui adresser les textes pertinents.
La commission souligne que, bien que la convention garantisse le droit de se syndiquer aux travailleurs de la fonction publique, le droit de grève qui est son corollaire peut être restreint ou interdit. De l’avis de la commission, une définition trop extensive de la notion de fonctionnaire est susceptible d’aboutir à une limitation très large, voire à une interdiction, du droit de grève pour ces travailleurs, la notion de fonctionnaire variant considérablement d’un pays à un autre. Par conséquent, la commission estime que l’interdiction du droit de grève dans la fonction publique devrait se limiter aux fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat (voir étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 156 à 158). Elle prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les dispositions légales qui garantissent le droit de grève aux fonctionnaires qui n’exercent pas des fonctions d’autorité au nom de l’Etat.
La commission note que le rapport du gouvernement n’apporte pas de réponse à ses commentaires précédents. Elle note également que la Fédération des syndicats égyptiens et la Fédération des industries égyptiennes ont pris note du rapport du gouvernement et n’ont fait aucun commentaire. La commission veut encore espérer que, dans son prochain rapport, le gouvernement apportera des informations complètes sur les divergences qui existent entre la législation nationale et les garanties consacrées par la convention.
1. Article 2 de la convention. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de veiller à ce que soient modifiés les articles 7, 13 et 52 de la loi no35 de 1976, et 14, 16, 17 et 41 de la loi no12 de 1995, afin de garantir à tous les travailleurs qui le souhaitent le droit de constituer des organisations professionnelles en dehors de la structure syndicale existante. En outre, la commission avait rappeléà cet égard l’importance du droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix, droit qui est violé lorsque la loi maintient un monopole syndical; les travailleurs ont le droit de s’affilier aux organisations énumérées dans la législation et de les quitter, mais ils n’ont pas le droit de constituer une organisation en dehors de la structure syndicale établie ou de s’y affilier. En ce qui concerne le droit, évoqué par le gouvernement dans un rapport précédent, pour la Confédération générale des syndicats de constituer des organisations syndicales, la commission avait rappelé l’importance primordiale qu’elle attache au droit des travailleurs de constituer des organisations et de s’y affilier au sens de l’article 2. En outre, le fait que le mouvement syndical préfère un système unifié ne suffit pas pour justifier un monopole établi par la loi. La commission avait réitéré que, même dans le cas où une unification du mouvement syndical a eu à un moment donné les préférences de tous les travailleurs, ceux-ci doivent toujours pouvoir conserver le libre choix de créer, s’ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure établie (voir l’étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 96). C’est pourquoi la commission avait prié instamment le gouvernement de veiller à ce que les articles 7, 13 et 52 de la loi no35 de 1976 et les articles 14, 16, 17 et 41 de la loi no12 de 1995 soient modifiés afin que tous les travailleurs qui le souhaitent aient le droit de constituer des organisations syndicales en dehors de la structure syndicale établie, conformément à l’article 2.
2. Article 3. Dans ses commentaires précédents concernant la loi no 12 de 1995, la commission avait souligné la nécessité de modifier: i) les articles 41 et 42, afin de retirer à la Confédération générale des syndicats la faculté de contrôler les procédures de sélection des candidats et d’élection aux fonctions syndicales; ii) les articles 62 et 65, afin que les organisations de travailleurs aient le droit d’organiser leur gestion, y compris leurs activités financières, sans l’intervention des autorités publiques. La commission rappelle que les procédures de sélection des candidats et d’élection aux fonctions syndicales devraient être établies par les statuts de l’organisation, et non par la loi, ou par la centrale syndicale unique, en vertu de la législation. Elle prie donc de nouveau instamment le gouvernement de prendre des mesures pour que les articles 41 et 42 de la loi no12 de 1995 soient modifiés.
En ce qui concerne l’article 65, le gouvernement avait confirmé dans un rapport précédent que la procédure de contrôle financier était du ressort de la confédération, ce qui, estimait-il, constituait une amélioration par rapport à l’ancienne disposition qui confiait ce contrôle au ministère de l’Emploi et de la Formation. La commission considère qu’il est contraire à l’article 3 d’habiliter la centrale syndicale unique expressément désignée dans la loi à exercer un contrôle financier. Elle prie encore à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que l’article 62, qui impose aux organisations syndicales de base de verser un certain pourcentage de leurs revenus aux organisations de niveau supérieur, et l’article 65 de la loi no12 de 1995 soient modifiés afin que les organisations de travailleurs aient le droit d’organiser leur gestion, y compris leurs activités financières, conformément à l’article 3.
3. Articles 3 et 10. Dans ses commentaires précédents, la commission avait exprimé sa préoccupation à l’égard des dispositions suivantes:
ii) l’article 70(b) de la loi no35 de 1976 qui autorise le Procureur général à demander à une instance pénale la déchéance du comité exécutif d’un syndicat ayant provoqué des arrêts de travail ou de l’absentéisme dans un service public;
iii) l’article 14(i) de la loi no12 de 1995 qui prescrit que l’Union générale doit donner son accord pour l’organisation d’une grève.
La commission avait noté avec intérêt que le gouvernement, dans un rapport précédent, avait évoqué un projet de nouveau Code du travail instaurant un système de médiation en cas de conflits du travail, lequel peut ensuite donner lieu à un arbitrage à la demande des deux parties. Une nouvelle instance d’arbitrage tripartite avait également été créée. La commission prie de nouveau le gouvernement de communiquer copie des articles du nouveau Code du travail qui modifient ou abrogent les articles 93 à 106 du Code du travail.
En ce qui concerne l’article 70(b) de la loi no35 de 1976, le gouvernement avait indiqué dans un rapport précédent que cet article était conforme à la convention puisqu’il se limite aux entreprises fournissant des services de caractère général, des équipements publics ou des prestations répondant aux besoins de la population. La commission rappelle qu’elle a toujours estimé que toute restriction ou limitation au droit de grève ne devrait concerner que les fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat ou les services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire ceux dont l’interruption mettrait en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 158 et 159). Elle prie donc une fois encore le gouvernement de prendre des mesures pour que l’article 70(b) soit modifié en conséquence.
Enfin, s’agissant de l’article 14(i) de la loi no12 de 1995, la commission avait noté que la législation prévoit que l’Union générale est habilitée à "approuver" l’organisation d’une grève par les travailleurs et que la recherche d’un tel consentement, même de nature administrative, n’est pas conforme à la convention puisqu’elle dénie aux organisations de base le droit d’organiser une grève sans l’autorisation de l’Union générale. La commission prie de nouveau instamment le gouvernement de modifier la législation afin de la rendre conforme aux principes de la liberté syndicale, de sorte que les organisations de base aient le droit d’organiser une grève sans autorisation préalable de l’Union générale.
La commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans son rapport.
Dans ses rapports précédents, la commission priait le gouvernement de modifier l'article 19(f) de la loi no 12 de 1995 afin que tous les travailleurs qui le désirent puissent s'affilier à plus d'une organisation pour défendre leurs intérêts professionnels dans les cas où ils exercent plusieurs professions. En réponse, le gouvernement déclare d'une manière générale que les lois no 35 de 1976 et no 12 de 1995 ont été promulguées afin de répondre aux souhaits et aspirations des travailleurs. Il ajoute plus précisément que l'unité et la force du mouvement syndical seraient affectés si les travailleurs avaient le droit de s'affilier à plus d'un syndicat. La commission rappelle qu'en vertu de l'article 2 de la convention, les travailleurs ont le droit de s'affilier à des organisations de leur choix, sans autorisation préalable. La commission est d'avis que cette question ne concerne pas l'unité syndicale, mais plutôt l'importance de garantir à ceux qui exercent plusieurs professions la possibilité de s'affilier à une organisation pour défendre leurs intérêts professionnels dans chacune des catégories d'emploi ou profession qu'ils exercent. La commission prie le gouvernement d'envisager de modifier sa législation afin que les travailleurs puissent, s'ils le souhaitent, s'affilier à plus d'une organisation pour défendre leurs intérêts professionnels lorsqu'ils exercent plus d'une profession.
La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement. Elle note également, comme elle le fait depuis plusieurs années, que le gouvernement n'a pas encore remédié aux divergences que la législation présente avec la convention concernant l'obligation de garantir le droit, pour les travailleurs, de constituer des organisations de leur choix et, pour ces organisations, d'élire librement leurs représentants, d'organiser leur gestion et leur activité.
1. Article 2 de la convention. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de modifier les articles 7, 13 et 52 de la loi no 35 de 1976, et 14, 16, 17 et 41 de la loi no 12 de 1995, afin de garantir à tous les travailleurs qui le souhaitent le droit de constituer des organisations professionnelles en dehors de la structure syndicale existante.
Dans son rapport, le gouvernement déclare que l'article 13 de la loi no 35 de 1976 est compatible avec la convention puisque cet article prévoit la formation, sur une base nationale, d'une centrale syndicale unique de "travailleurs et d'apprentis appartenant à des catégories professionnelles ou des branches similaires, connexes ou liées au même type de production". Il ajoute que les travailleurs ont le droit de s'affilier aux syndicats à tous les échelons, en vertu de l'article 7 de ladite loi, tel que modifié par la loi no 1 de 1981, qui prévoit que "la structure syndicale est établie de manière pyramidale sur la base de l'unité syndicale" et qui énumère les organisations syndicales en question. La loi en vigueur habilite la Confédération générale des syndicats égyptiens à élaborer les statuts et règlements concernant la constitution des syndicats, sans intervention des autorités publiques. Le gouvernement souligne enfin que les travailleurs sont libres de s'affilier à ces organisations ou de s'en retirer, que le mouvement syndical en Egypte préfère l'unité syndicale, que le pluralisme syndical, particulièrement au niveau de l'entreprise, engendrerait des conflits et affaiblirait le mouvement syndical, et qu'il en serait de même si les travailleurs étaient autorisés à s'affilier à plus d'une organisation.
La commission rappelle à cet égard l'importance du droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix, droit qui est violé lorsque la législation institutionnalise un monopole syndical; même si les travailleurs ont le droit de s'affilier ou de se retirer des organisations énumérées dans la législation, ils n'ont pas le droit de constituer et de s'affilier à une organisation en dehors de la structure syndicale existante. En ce qui concerne le droit, évoqué par le gouvernement, pour la Confédération générale des syndicats égyptiens, de constituer des organisations, la commission rappelle l'importance primordiale qu'elle attache au droit des travailleurs de constituer des organisations et de s'y affilier au sens de l'article 2. En outre, le fait que le mouvement syndical ait une préférence pour un système unitaire ne suffit pas pour justifier un monopole de droit. La commission réitère que, même dans le cas où une unification du mouvement syndical a eu à un moment donné les préférences de tous les travailleurs, ceux-ci doivent toujours pouvoir conserver le libre choix de créer, s'ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure établie (voir l'étude d'ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 96). C'est pourquoi la commission prie instamment le gouvernement de veiller à ce que les articles 7, 13 et 52 de la loi no 35 de 1976 et les articles 14, 16, 17 et 41 de la loi no 12 de 1995 soient modifiés, afin que tous les travailleurs qui le souhaitent aient le droit de constituer des organisations syndicales en dehors de la structure syndicale établie, conformément à l'article 2.
2. Article 3. Dans ses commentaires précédents concernant la loi no 12 de 1995, la commission souligne la nécessité de modifier: i) les articles 41 et 42, afin de retirer à la Confédération générale des syndicats égyptiens le pouvoir de contrôler les procédures de désignation et d'élection aux fonctions syndicales; ii) les articles 62 et 65, afin que les organisations de travailleurs aient le droit d'organiser leur gestion, y compris leurs gestions financières, sans intervention des autorités publiques.
En ce qui concerne les articles 41 et 42, le gouvernement déclare que le rôle de la confédération se limite à l'établissement du calendrier électoral et des procédures de sélection des candidats, ce rôle étant de nature administrative et non de contrôle. Le gouvernement ajoute que la confédération représente le mouvement syndical au niveau national et qu'elle a pour vocation de le diriger. La commission réaffirme que les procédures de sélection des candidats et d'élection aux fonctions syndicales devraient être établies par les statuts des organisations et non par la loi, ou par la centrale syndicale unique, en vertu de la législation. Elle prie donc le gouvernement de prendre des mesures pour que les articles 41 et 42 de la loi no 12 de 1995 soient modifiés.
En ce qui concerne l'article 65, le gouvernement confirme que la procédure de contrôle financier est du ressort de la confédération, ce qui constitue une amélioration sensible par rapport à l'ancienne disposition qui confiait ce contrôle au ministère de l'Emploi et de la Formation. La commission réitère cependant son avis selon lequel il est contraire à l'article 3 d'habiliter l'organisation centrale unique expressément désignée par la loi à exercer un contrôle financier sur les syndicats de base. Elle prie à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que l'article 62, qui impose aux organisations syndicales de base de verser un certain pourcentage de leurs recettes aux organisations de niveau supérieur, et l'article 65 de la loi no 12 de 1995 soient modifiés, afin que les organisations de base des travailleurs aient le droit d'organiser leur gestion, y compris leurs gestions financières, conformément à l'article 3.
3. Articles 3 et 10. Dans ses commentaires précédents, la commission avait exprimé sa préoccupation à l'égard des dispositions suivantes.
i) les articles 93 à 106 du Code du travail, tel que modifié par la loi no 137 de 1981, prévoyant l'arbitrage obligatoire à la demande de l'une des parties dans les services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme;
ii) l'article 70(b) de la loi no 35 de 1976 autorisant le Procureur général à demander à une instance pénale la déchéance du comité exécutif d'un syndicat ayant provoqué des arrêts de travail ou de l'absentéisme dans un service public;
iii) l'article 14(i) de la loi no 12 de 1995 prescrivant que l'Union générale doit donner son accord pour l'organisation d'une grève.
La commission note avec intérêt que le gouvernement évoque un projet de nouveau Code du travail instaurant un système de médiation en cas de conflit de travail, qui peut ensuite donner lieu à un arbitrage à la demande des deux parties. Une nouvelle instance d'arbitrage tripartite est également créée. La commission prie le gouvernement de communiquer copie des articles du nouveau Code du travail qui modifient ou abrogent les articles 93 à 106 du Code du travail.
En ce qui concerne l'article 70(b) de la loi no 35 de 1976, le gouvernement indique que cet article est conforme à la convention puisqu'il se limite aux entreprises assurant des services de caractère général, des prestations de caractère public ou une prestation spécifique répondant aux besoins du public. La commission estime que toute restriction ou limitation au droit de grève ne devrait concerner que les fonctionnaires exerçant des fonctions d'autorité au nom de l'Etat, ou les services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire ceux dont l'interruption mettrait en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne (voir étude d'ensemble, op. cit., paragr. 158-159). Elle prie le gouvernement de prendre des mesures pour que l'article 70(b) soit modifié en conséquence.
Enfin, s'agissant des commentaires précédents de la commission concernant l'article 14(i) de la loi no 12 de 1995, le gouvernement déclare que le consentement de l'Union générale à une grève est de nature à renforcer le comité syndical. Selon le gouvernement, l'obtention de ce consentement n'est qu'une formalité réglementaire visant à organiser la grève, et ne vise pas à chercher à en obtenir le consentement ou le refus. La commission rappelle toutefois que la législation prévoit clairement que l'Union générale est habilitée à "approuver" l'organisation d'une grève par les travailleurs, et que la recherche d'un tel consentement, même de nature administrative, n'est pas conforme avec la convention, puisqu'elle dénie aux organisations de base le droit d'organiser une grève sans l'autorisation de l'Union générale. La commission prie le gouvernement de modifier la législation afin de la rendre conforme aux principes de la liberté syndicale, de sorte que les organisations de base aient le droit d'organiser une grève sans autorisation préalable de l'Union générale.
La commission adresse également au gouvernement une demande directe.
La commission a pris note de l'entrée en vigueur de la loi no 12 du 30 mars 1995, qui porte modification de certaines dispositions de la loi no 35 de 1976 sur les syndicats.
1. La commission note que l'article 14(i) de la loi no 12 de 1995 prévoit que le syndicat général doit "d'approuver l'organisation d'une action de grève par les travailleurs conformément aux règles énoncées par la loi sur le travail". La commission rappelle que le droit de grève est l'un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations, à tous les niveaux, pour promouvoir et défendre leurs intérêts économiques et sociaux. Elle prie donc le gouvernement de veiller à ce que cette disposition soit modifiée afin que les organisations de base puissent déclarer la grève sans avoir besoin de demander l'autorisation du syndicat général.
2. La commission note qu'en vertu de l'article 19(f) de l'instrument précité, les travailleurs n'ont pas le droit d'être membres de plus d'un syndicat général même s'ils exercent plus d'une profession. Elle appelle l'attention du gouvernement sur le fait qu'aux termes de l'article 2 de la convention les travailleurs ont le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s'affilier à ces organisations. Elle prie en conséquence le gouvernement de prendre les mesures appropriées pour modifier cette disposition afin que les travailleurs aient la possibilité de s'affilier, s'ils le désirent, à plus d'une organisation de défense de leurs intérêts professionnels lorsqu'ils exercent plusieurs activités professionnelles.
La commission a pris note des informations communiquées par le gouvernement dans son rapport ainsi que de l'entrée en vigueur, le 30 mars 1995, de la loi no 12 de 1995 portant modification de certaines dispositions de la loi no 35 de 1976 sur les syndicats. Elle note avec regret que cette nouvelle législation continue à présenter un certain nombre de divergences par rapport aux dispositions de la convention, en ce qui concerne l'obligation de garantir que les travailleurs aient le droit de constituer des organisations de leur choix et que les organisations de travailleurs puissent élire librement leurs représentants et organiser leur gestion et leur activité.
1. Articles 2 et 3 de la convention. Dans ses précédents commentaires, la commission avait rappelé la nécessité de modifier:
i) les dispositions de la loi no 35 de 1976 sur les syndicats qui institutionnalisent un système d'unicité syndicale (art. 7, 13, 14, 16, 17, 41, 52 et 65);
ii) les dispositions qui instaurent un contrôle de la Confédération égyptienne des syndicats sur la procédure de nomination et d'élection aux comités directeurs des organisations syndicales (art. 41);
iii) les dispositions qui permettent à cette confédération d'exercer un contrôle sur la gestion financière des syndicats (art. 62 et 65).
i) Le gouvernement déclare dans son rapport que la plupart des dispositions précitées, exceptés les articles 7 et 13, ont été modifiées par la loi no 12 de 1995. Il ajoute que ces articles 7 et 13 de la loi no 35 de 1976 n'ont pas été modifiés parce que les syndicats eux-mêmes estiment que le mouvement syndical doit être organisé selon le principe d'un syndicat unique et sur une base hiérarchique. La commission rappelle néanmoins que la convention no 87 implique que le pluralisme reste possible dans tous les cas. La loi ne devrait donc pas institutionnaliser un monopole de fait; même dans le cas où une unification du mouvement syndical a eu, à un moment donné, les préférences de tous les travailleurs, ceux-ci doivent toujours pouvoir conserver le libre choix de créer, s'ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure établie. En outre, les droits des travailleurs ne souhaitant pas s'intégrer dans les organisations ou la centrale existante doivent également être protégés (voir étude d'ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 96). La commission a également le regret de constater que les autres dispositions faisant l'objet de ses commentaires depuis des années, à savoir les articles 14, 16, 17 et 41, n'ont pas été modifiés de manière significative par la loi no 12 de 1995, tandis que l'article 52 n'a pas été modifié du tout.
La commission prie donc le gouvernement de veiller à ce que les articles 7, 13 et 52 de la loi no 35 de 1976, ainsi que les articles 14, 16, 17 et 41 de la loi no 12 de 1995 soient modifiés afin que tous les travailleurs aient le droit de constituer, s'ils le désirent, des organisations professionnelles en dehors des structures syndicales existantes, conformément à l'article 2 de la convention.
ii) La commission note que les nouveaux articles 41 et 42 de la loi no 12 de 1995 continuent de permettre à la Confédération égyptienne des syndicats d'exercer un contrôle sur les procédures de désignation et d'élection aux fonctions syndicales. La commission considère que les dispositions qui permettent le contrôle des autorités administratives ou de la centrale syndicale unique sur le déroulement des opérations électorales, par exemple l'approbation des élections ou de leurs résultats, sont contraires aux principes de la liberté syndicale (voir étude d'ensemble, op. cit., paragr. 115). Elle est d'avis que, pour que la législation soit conforme à l'article 3 de la convention, les procédures de désignation et d'élection aux fonctions syndicales doivent être fixées par les statuts des organisations et non par la loi. Elle prie donc le gouvernement de prendre des mesures pour que les articles 41 et 42 de la loi no 12 de 1995 soient modifiés dans le sens de ses commentaires.
iii) La commission constate avec regret que les articles 62 et 65 de la loi no 35 de 1976 n'ont pas été très sensiblement modifiés par la loi no 12 de 1995. Le nouvel article 62 de la loi no 12 de 1995 énonce encore l'obligation, pour les syndicats de base, de verser un certain pourcentage de leurs recettes aux organisations de niveau supérieur. De plus, le nouvel article 65 dispose notamment que "... la Confédération des syndicats exerce un contrôle financier unique sur les organisations syndicales et, à cette fin, peut requérir l'assistance des organes du ministère de la Main-d'oeuvre et de l'Emploi". La commission rappelle une fois de plus au gouvernement que les dispositions précitées, selon lesquelles une certaine proportion des fonds syndicaux doit être versée aux organisations de niveau supérieur et l'organisation centrale unique est expressément désignée par la loi pour exercer un contrôle financier, sont contraires à l'article 3 de la convention. Elle prie donc le gouvernement de prendre les mesures appropriées pour que les articles 62 et 65 de la loi no 12 de 1995 soient modifiés afin que les organisations de travailleurs aient le droit d'organiser leur gestion, y compris leurs activités financières, sans intervention des autorités publiques.
2. Articles 3 et 10. Dans ses précédents commentaires, la commission évoquait la nécessité d'abroger ou de modifier les articles 93 à 106 du Code du travail, tel que modifié par la loi no 137 du 6 août 1981, qui concernent l'arbitrage obligatoire à la demande d'une partie en dehors des services essentiels au sens strict du terme, et l'article 70(b) de la loi no 35 de 1976, qui concerne les pouvoirs du Procureur général de requérir d'une cour pénale la déchéance du comité exécutif d'un syndicat ayant provoqué un abandon de travail ou l'absentéisme dans un service public.
Le gouvernement déclare dans son rapport que les commentaires de la commission ont été pris en considération dans le cadre de l'élaboration du nouveau Code du travail. La commission exprime l'espoir que les restrictions ou les interdictions au droit de grève que le nouveau Code du travail contiendra ne viseront que les fonctionnaires exerçant des fonctions d'autorité au nom de l'Etat ou les services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire ceux dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne (voir étude d'ensemble, op. cit., paragr. 158 et 159). La commission prie le gouvernement de communiquer copie, avec son prochain rapport, des dispositions du nouveau Code du travail qui abrogent ou modifient les articles 93 à 106 du Code du travail, tel que modifié par la loi no 137 du 6 août 1981, et l'article 70(b) de la loi no 35 de 1976.
La commission adresse par ailleurs une demande directe au gouvernement sur certains autres points.
La commission a pris note des informations fournies par le gouvernement dans son rapport.
Articles 2 et 3 de la convention. Se référant à ses commentaires antérieurs sur la nécessité d'abroger ou de modifier les dispositions de la loi no 35 de 1976 sur les syndicats telle que modifiée par la loi no 1 de 1981 qui institutionnalisent un système d'unicité syndicale (art. 7, 13, 14, 16, 17, 41, 52 et 65) et qui établissent un contrôle exercé par la Confédération égyptienne des syndicats sur la procédure de nomination et d'élection aux comités directeurs des organisations syndicales et sur leur gestion financière (art. 41 et 62) contrairement aux articles 2 et 3 de la convention, la commission note les informations fournies par le gouvernement dans son rapport selon lesquelles la loi en question est en cours de révision par les personnes qui ont un intérêt réel, à savoir les syndicats ouvriers, sans ingérence de la part du gouvernement. Le gouvernement ajoute que la commission chargée de préparer ces amendements a été informée des commentaires de la commission. La commission exprime le ferme espoir que les modifications envisagées garantiront à tous les travailleurs et à tous les employeurs le droit de créer, s'ils le désirent, des organisations syndicales en dehors de la structure syndicale existante ainsi qu'aux organisations de travailleurs le droit d'élire librement leurs représentants et de gérer financièrement leurs activités sans ingérence des pouvoirs publics.
Articles 3 et 10. La commission rappelle que ses commentaires antérieurs portaient sur la nécessité d'abroger ou de modifier les articles 93 à 106 du Code du travail, tel que modifié par la loi no 137 du 6 août 1981, sur l'arbitrage obligatoire à la demande d'une partie au-delà des services essentiels au sens strict du terme et de l'article 70 b) de la loi no 35 de 1976 sur les pouvoirs du Procureur général de demander au tribunal criminel la dissolution du comité directeur d'un syndicat ayant provoqué un abandon de travail ou l'absentéisme dans un service public. La commission espère que toutes les restrictions, voire les interdictions, au droit de recourir à la grève contenues dans la législation seront limitées aux fonctionnaires qui exercent une fonction d'autorité au nom de l'Etat ou aux services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire aux services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la santé ou la sécurité de la personne (voir Etude d'ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 158 et 159).
La commission demande au gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport les mesures prises pour mettre l'ensemble de sa législation en conformité avec les exigences de la convention.
Se référant à ses commentaires antérieurs relatifs aux restrictions à la possibilité d'être candidat ou d'être nommé aux postes de président ou de membre des comités directeurs des organisations ou fédérations syndicales, la commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans son rapport d'après lesquelles l'article 4 de la loi no 95 de 1980 sur la protection des valeurs ne s'applique qu'à l'égard des individus ayant été condamnés pour i) avoir appelé à un rejet des lois divines; ii) avoir incité les jeunes à l'inconduite en les invitant à se libérer des valeurs religieuses ou de la fidélité à la patrie; et iii) avoir publié ou diffusé des nouvelles, des informations ou des rumeurs mensongères, tendancieuses ou comportant une propagande provocante.
La commission prie le gouvernement de communiquer dans ses futurs rapports des informations sur l'application dans la pratique de cet article.
1. La commission observe avec regret que, malgré les assurances données par le gouvernement dans son précédent rapport selon lesquelles il procédait à la révision de la législation nationale et que des réunions avaient été organisées à ce propos avec de hauts fonctionnaires du BIT en vue de mettre sa législation en conformité avec les exigences de la convention, le gouvernement se borne à réitérer les commentaires et informations fournis antérieurement.
Dans ces conditions, la commission ne peut que rappeler que, depuis plusieurs années, ses commentaires portent sur la nécessité d'abroger ou de modifier les dispositions législatives suivantes:
a) les articles 7, 13, 14, 16, 17, 31, 41, 52 et 65 de la loi no 35 de 1976 sur les syndicats dans sa teneur modifiée par la loi no 1 de 1981, qui institutionnalisent un système d'unicité syndicale, contrairement à l'article 2 de la convention qui dispose que les travailleurs et les employeurs, sans distinction d'aucune sorte, ont le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s'affilier à ces organisations, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces dernières. La commission rappelle en outre que les travailleurs doivent pouvoir créer, s'ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure syndicale existante;
b) les articles 41 et 62 de la même loi, sur le contrôle exercé par la Confédération égyptienne des syndicats sur la procédure de nomination et d'élection aux comités directeurs des organisations syndicales et sur leur gestion financière, contrairement à l'article 3 qui prévoit que les organisations de travailleurs et d'employeurs ont le droit d'élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d'élire librement leurs représentants et d'organiser leur gestion;
c) les articles 93 à 106 du Code du travail, tel que modifié par la loi no 137 du 6 août 1981, sur l'arbitrage obligatoire à la demande d'une partie au-delà des services essentiels au sens strict du terme, et l'article 70 b) de la loi no 35 de 1976, sur les pouvoirs du Procureur général de demander au tribunal criminel la dissolution du comité directeur d'un syndicat ayant provoqué un abandon du travail ou l'absentéisme dans un service public, contrairement au droit des travailleurs et de leurs organisations d'organiser leurs activités et de formuler leur programme d'action pour la défense de leurs intérêts économiques, sociaux et professionnels, y compris par le recours à la grève, sans entrave de la part des pouvoirs publics, conformément aux principes contenus dans les articles 3 et 10. A cet égard, la commission a pris connaissance avec intérêt du texte du projet de Code du travail dont l'article 183 prévoit qu'un différend ne peut être soumis à l'arbitrage qu'à la demande des deux parties. Observant toutefois que l'article 182 du projet dispose qu'un différend survenu dans un établissement fournissant des "services vitaux" (qui seront déterminés par le Premier ministre en vertu de l'article 199, alinéa 2, du projet) oû la grève est interdite, peut toujours être soumis à l'arbitrage à la demande d'une seule des parties, la commission rappelle que toutes restrictions, voire interdictions, au droit de recourir à la grève devraient se limiter aux fonctionnaires qui exercent une autorité au nom de l'Etat ou aux services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire les services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne (voir Etude d'ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 158 et 159).
2. La commission relève par ailleurs que la loi sur "les garanties démocratiques" dans les unions professionnelles, adoptée le 17 février 1993, réglemente de manière trop détaillée le droit des syndicats d'élire librement leurs représentants (par exemple durée des mandats, contrôle des élections, quorum). Elle rappelle qu'il conviendrait de laisser aux statuts des syndicats le soin de réglementer les procédures d'élection, et que la loi devrait se limiter à garantir le respect des règles démocratiques.
3. La commission demande au gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport les mesures prises pour mettre l'ensemble de la législation susmentionnée en conformité avec les exigences de la convention.
4. La commission adresse en outre au gouvernement une demande directe au sujet de la loi no 95 de 1980 sur "la protection des valeurs".
La commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans son rapport ainsi que du texte de la loi du 17 février 1993 sur les syndicats professionnels. Ce texte ayant été reçu par le Bureau alors même qu'elle siégeait, la commission se propose d'en examiner le contenu à sa prochaine session.
La commission rappelle que les divergences existant entre la législation nationale et la convention portent sur les points suivants:
- articles 7, 13, 14, 16, 17, 31, 41, 52 et 65 de la loi no 35 de 1976 sur les syndicats dans sa teneur modifiée par la loi no 1 de 1981 qui institutionnalisent un système d'unicité syndicale;
- articles 41 et 62 de la même loi relatifs au contrôle exercé par la Confédération égyptienne des syndicats sur la procédure de nomination et d'élection aux comités directeurs des organisations syndicales et sur leur gestion financière;
- articles 93 à 106 du Code du travail tel que modifié par la loi no 137 du 6 août 1981 sur l'arbitrage obligatoire à la demande d'une partie au-delà des services essentiels au sens strict du terme, à savoir ceux dont l'interruption risque de mettre en danger, dans toute ou partie de la population, la vie, la santé ou la sécurité de la personne;
- article 70 b) de la loi no 35 de 1976 sur les pouvoirs du procureur général de destituer le comité directeur d'un syndicat ayant provoqué un abandon du travail ou l'absentéisme dans un service public;
- article 4 de la loi no 95 de 1980 sur la protection des valeurs permettant d'interdire, pour une période allant de six mois à cinq ans, la possibilité d'être candidat ou d'être nommé aux postes de président ou de membre des comités directeurs des organisations ou fédérations syndicales.
La commission prend bonne note des informations fournies par le gouvernement dans son rapport selon lesquelles il procède actuellement à la révision de la législation nationale. La commission note également que des réunions ont été organisées à ce propos avec de hauts fonctionnaires du BIT dans le cadre de l'examen des modifications structurelles, du développement du secteur public, de la promotion du secteur privé et de la participation de l'OIT à l'examen de la possibilité d'unifier la législation du travail et de la mettre en conformité avec les conventions et recommandations internationales du travail.
Le gouvernement indique que le ministère de la Main-d'oeuvre et de la Formation a constitué des groupes de travail pour le réexamen des conventions ratifiées en matière de protection de la main-d'oeuvre afin d'assurer leur stricte application et d'éviter que des observations ne soient formulées par la commission à leur sujet.
La commission exprime le ferme espoir que lesdits groupes de travail, en s'inspirant des commentaires qu'elle formule depuis de nombreuses années, s'efforceront d'adopter dans les meilleurs délais les dispositions nécessaires pour garantir à tous les travailleurs le droit de créer, s'ils le désirent, des organisations syndicales en dehors de la structure syndicale existante ainsi qu'aux organisations de travailleurs le droit d'élire librement leurs représentants et de gérer financièrement leurs activités sans ingérence des pouvoirs publics et pour circonscrire les limitations au droit de grève allant au-delà des restrictions compatibles avec les principes de la liberté syndicale.
[Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé pour la période se terminant le 30 juin 1993.]
Se référant à sa demande directe antérieure concernant la loi no 95 de 1980 sur la protection des valeurs, qui permet d'interdire, pour une période allant de six mois à cinq ans, la possibilité d'être candidat ou d'être nommé aux postes de président ou de membre des comités directeurs des organisations ou fédérations syndicales, la commission note, d'après le rapport du gouvernement, qu'il s'agit d'un moyen de sauvegarder la Constitution et les lois visant à protéger les droits du peuple, ses valeurs religieuses, les fondements politiques, économiques, sociaux et moraux et donc l'unité nationale et la paix sociale.
La commission prie à nouveau le gouvernermement de fournir dans ses prochains rapports des informations sur l'application pratique de ces dispositions, et l'invite notamment à fournir le texte de tout jugement rendu en application de la loi no 95 de 1980.
La commission a pris note des informations communiquées par le gouvernement dans son rapport. Elle rappelle que ses commentaires portent depuis de nombreuses années sur les questions suivantes:
1. Unicité syndicale consacrée par la loi. La commission a fait observer à plusieurs reprises que les articles 7, 13, 14, 16, 17, 31, 41, 52 et 65 de la loi no 35 de 1976 telle qu'amendée institutionnalisent un système d'unicité syndicale contrairement à l'article 2 de la convention. Dans son rapport, le gouvernement indique que ces dispositions législatives sont actuellement en cours d'examen en collaboration avec la Confédération égyptienne des syndicats en vue d'évaluer leur degré de conformité avec la convention.
La commission prend bonne note de ces indications mais rappelle que les dispositions en question sont contraires à l'article 2 de la convention, dont le principe n'est pas de prendre position en faveur de l'unicité ou du pluralisme syndical. Ce dernier doit cependant être possible dans tous les cas et la législation doit garantir aux travailleurs le droit de créer, s'ils le désirent, des syndicats en dehors de la structure existante. La commission veut croire qu'à la suite de l'examen susmentionné, le gouvernement adoptera les dispositions nécessaires pour mettre sa législation en conformité avec la convention, et le prie d'indiquer dans son prochain rapport les mesures prises en ce sens.
2. Réglementation de la gestion interne et des activités des syndicats. Se référant à son observation antérieure sur le contrôle exercé par la Confédération égyptienne des syndicats sur la procédure de nomination et d'élection aux comités directeurs des organisations syndicales (art. 41 de la loi no 35 de 1976) et sur la gestion financière desdites organisations (art. 62 de la même loi), la commission note que des consultations se déroulent actuellement avec les responsables de la confédération et que le gouvernement communiquera prochainement sa réponse à ce sujet.
La commission rappelle qu'aux termes de l'article 3 de la convention, la législation devrait laisser aux statuts des organisations syndicales à tous les niveaux le soin de traiter de ces matières, et invite le gouvernement à lui communiquer rapidement sa réponse à cet égard, une fois achevées les consultations.
3. Arbitrage obligatoire à la demande d'une seule partie et larges pouvoirs du procureur de destituer le comité directeur d'un syndicat qui aurait provoqué un abandon de travail dans les services publics non essentiels. Se référant à ses commentaires antérieurs sur l'arbitrage obligatoire à la demande d'une partie (art. 93-106 du Code du travail, modifié par la loi no 137 du 6 août 1981) et sur les pouvoirs du procureur général de destituer le comité directeur d'un syndicat ayant provoqué un abandon du travail ou l'absentéisme dans un service public (art. 70 b) de la loi no 35 de 1976), la commission observe que, selon le gouvernement, le droit de grève est garanti par la législation et est organisé de manière à ne pas porter atteinte à la sécurité du pays, en particulier dans les cas où la grève a pour effet de porter préjudice aux intérêts vitaux économiques du pays. Le gouvernement ajoute qu'à son avis ceci est admis par la commission et conforme à la lettre et l'esprit de la convention.
Sur ce dernier point, la commission doit également renvoyer le gouvernement aux commentaires qu'elle a formulés à maintes reprises, et rappeler que le droit de grève est un des moyens essentiels dont doivent disposer les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et défendre leurs intérêts économiques et sociaux (article 10 de la convention) et organiser leurs activités (article 3). Les limitations, voire les interdictions à son exercice, ne sont compatibles avec la convention qu'en ce qui concerne les fonctionnaires agissant en tant qu'organe de la puissance publique et dans les services essentiels au sens strict du terme (et non dans les services publics en général) si l'interruption des services due à la grève risque de mettre en danger, dans tout ou partie de la population, la vie, la santé ou la sécurité de la personne.
La commission prie donc instamment le gouvernement d'adopter des dispositions afin de mettre sa législation en conformité avec la convention, et d'indiquer dans son prochain rapport les mesures prises à cet égard.
La commission a pris connaissance de la loi no 95 de 1980 sur la protection des valeurs. Elle note en particulier que, parmi d'autres organisations ou institutions, les organisations syndicales sont tenues de protéger et de soutenir les valeurs fondamentales de la nation qui sont consacrées dans la Constitution et la législation visant à sauvegarder les droits et valeurs religieuses du peuple, les fondements politiques, économiques, sociaux et moraux, le caractère authentique de la famille égyptienne avec ce que cela comporte de valeurs et de traditions, l'unité nationale et la paix sociale. A cette fin, tout individu reconnu coupable de ne pas avoir respecté ces valeurs fondamentales sera, nonobstant toute condamnation pénale ou administrative, condamné pour une période de six mois à cinq ans à une interdiction d'être candidat ou d'être nommé aux postes de président ou de membres des comités directeurs des organisations ou fédérations syndicales (art. 1, 2 et 4(2) de la loi no 95 de 1980).
La commission attire l'attention du gouvernement sur le fait que, lorsque la loi interdit à une personne d'exercer des fonctions syndicales en raison d'une condamnation pour une activité qui par sa nature ne mettrait pas en cause son intégrité et ne saurait constituer un risque véritable pour l'exercice de fonctions syndicales, le droit des organisations syndicales d'élire leurs représentants en toute liberté, conformément à l'article 3 de la convention, n'est pas respecté (voir les paragraphes 161 à 164 de l'Etude d'ensemble de 1983 sur la liberté syndicale et la négociation collective).
La commission saurait gré au gouvernement de bien vouloir préciser quelles dispositions de la législation nationale et quel type de comportement sont visés par les articles susmentionnés de la loi no 95 de 1980, et de fournir des informations sur l'application pratique de ces dispositions; en particulier, elle invite le gouvernement à communiquer le texte de tout jugement rendu en application de la loi no 95 de 1980.
La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement dans son rapport et des modifications introduites dans le projet d'amendement à la loi no 35 de 1976 sur les syndicats qui, sur certains points, vont dans le sens d'une meilleure application de la convention.
1. Unicité syndicale consacrée par la loi. La commission avait observé, dans ses observations précédentes, que les articles 7, 13, 14, 16, 17, 31, 41, 52 et 65 de la loi no 35 de 1976 telle qu'amendée institutionnalisaient un système d'unicité syndicale contrairement à l'article 2 de la convention. La commission note que le projet de révision législative prévoit des modifications aux articles 13, 14, 31, 41 et 52 dans le sens d'une plus grande autonomie des comités syndicaux et des syndicats généraux vis-à-vis de la Confédération égyptienne des syndicats, organe supérieur de la structure syndicale. Toutefois, le gouvernement indique à nouveau que le principe de l'unicité syndicale, consacré par les articles 7, 16, 17, 65, sera maintenu dans la mesure où ce mode d'organisation représente la volonté des travailleurs et correspond aux besoins de nombreux pays dont les pays en développement auxquels l'Egypte appartient.
A cet égard, la commission se doit de rappeler que le principe de la convention n'est pas de prendre position en faveur soit de l'unicité syndicale, soit du pluralisme syndical; la convention implique cependant que ce pluralisme soit possible dans tous les cas. En conséquence, il convient que la législation garantisse aux travailleurs la possibilité de créer dans l'avenir, s'ils le désirent, des syndicats en dehors de la structure syndicale existante. La commission veut croire que le gouvernement poursuivra l'examen de la législation nationale en vue de modifier les dispositions ci-dessus mentionnées, conformément aux principes garantis par la convention.
2. Réglementation de la gestion interne et des activités des syndicats. S'agissant des dispositions de la loi no 35 de 1976 relatives à la réglementation de la gestion interne et de l'activité des syndicats et dont la commission a relevé les divergences avec les principes énoncés à l'article 3 de la convention, la commission note que les modifications envisagées aux articles 23 (exclusion des chômeurs et des retraités du droit de se syndiquer) et 36 c) de la loi no 35 de 1976 (obligation d'avoir été membre d'une organisation syndicale pendant un an pour être élu dirigeant) vont dans le sens de ses commentaires.
En ce qui concerne le contrôle exercé par la Confédération égyptienne des syndicats sur la procédure de nomination et d'élection aux comités directeurs des organisations syndicales (art. 41 de la loi no 35 de 1976) et sur la gestion financière desdites organisations (art. 62 de la loi no 35 de 1976), il est envisagé de confier ce pouvoir à l'assemblée générale de la Confédération égyptienne des syndicats au motif que celle-ci représente en réalité tous les syndicats des travailleurs.
Tout en prenant note de ce changement envisagé, la commission est d'avis que cette modification ne satisfait pas pleinement aux exigences de l'article 3 de la convention qui consacre le libre exercice par les organisations syndicales du droit d'organiser leur gestion. La commission demande au gouvernement de laisser aux statuts des syndicats le soin de traiter de ces matières.
3. Arbitrage obligatoire et larges pouvoirs du procureur de destituer un comité directeur d'un syndicat qui aurait provoqué un abandon de travail. Dans ses observations précédentes, la commission avait relevé que la procédure de règlement des conflits prévue aux articles 93 à 106 du Code du travail, modifiés par la loi no 137 du 6 août 1981, en accordant à l'une des parties en cause, dont l'employeur, la possibilité de recourir à la conciliation et à l'arbitrage obligatoire risquait de conduire à une restriction du droit de grève.
Elle avait également noté que l'article 70 b) de la loi no 35 de 1976 permet à un tribunal criminel, sur demande du procureur général, de dissoudre le comité directeur d'une organisation syndicale qui aurait provoqué un abandon du travail ou l'absentéisme délibéré dans un service public ou répondant à un besoin public.
Dans son rapport, le gouvernement indique que le droit de grève est garanti par la loi et a été réglementé de manière à ne pas porter atteinte à la sécurité et à la stabilité économique du pays.
La commission rappelle, à cet égard, que le droit de grève est un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leur organisation pour promouvoir et défendre leurs intérêts économiques et sociaux (article 10 de la convention) et pour organiser leur activité (article 3 de la convention). La commission veut croire que des mesures seront prises afin de garantir à tous les travailleurs le plein exercice de ce droit sous réserve des interdictions qui peuvent être prononcées à l'égard des fonctionnaires agissant en temps qu'organe de la puissance publique et dans les services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire lorsque l'interruption des activités due à la grève risque de mettre en danger dans tout ou partie de la population la vie, la santé ou la sécurité de la personne.
4. La commission demande au gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport les mesures prises pour mettre sa législation en conformité avec la convention.