National Legislation on Labour and Social Rights
Global database on occupational safety and health legislation
Employment protection legislation database
Afficher en : Anglais - Espagnol
Informations écrites fournies par le gouvernement
Une mission de haut niveau du BIT s’est déplacée en Algérie du 21 au 23 mai 2019, dans le cadre de la mise en œuvre des conclusions de la 107e session (juin 2018) de la Commission de l’application des normes internationales.
L’acceptation de l’Algérie du déplacement de cette mission de haut niveau du BIT est un signe fort qui témoigne de l’intérêt qu’elle accorde à la promotion et la mise en œuvre des conventions internationales de l’OIT.
L’Algérie a indiqué à plusieurs reprises qu’elle a toujours veillé à renforcer et adapter son dispositif législatif en vigueur en conformité avec les conventions de l’OIT et aux recommandations émises par les organes de contrôle de l’OIT.
Dans le contexte des réformes législatives, une nouvelle démarche a été adoptée et qui consiste à dissocier du projet du Code du travail la loi no 90-14 du 2 juin 1990, modifiée et complétée, relative aux modalités d’exercice du droit syndical. Cette démarche visera un gain de temps dans les procédures d’adoption, compte tenu du nombre de dispositions qu’elle comporte au regard de celle d’un Code du travail qui regroupe plusieurs textes, et que la concertation sur une seule loi est de nature à permettre d’arriver facilement à un consensus.
Les modifications vont porter sur les dispositions de l’article 4 de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 précitée, de telle sorte qu’elle prendra en charge les conclusions de la commission d’experts et la levée de toute contrainte dans la constitution des fédérations et confédérations, quel que soit le secteur d’activité que couvrent les syndicats.
De même, les modifications porteront sur les dispositions de l’article 6 de la loi précitée et qui seront rédigées en conformité avec la convention internationale du travail no 87, en tenant compte des expériences internationales en matière de nationalité de travailleurs dans la création d’une organisation syndicale, dans le respect de la convention no 111 concernant la discrimination (emploi et profession).
Par ailleurs, les dispositions relatives à la protection des délégués syndicaux seront renforcées afin de permettre aux délégués syndicaux un renforcement de la liberté d’exercice du droit syndical.
A cet effet, le projet d’amendement de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 susvisée sera soumis à la concertation sociale avec toutes les organisations syndicales d’employeurs et de travailleurs. Ce projet de loi sera prioritaire conformément aux procédures établies en la matière.
Le calendrier d’examen de ce projet de loi sera communiqué au Bureau international du Travail en tenant compte de la situation actuelle que connaît l’Algérie.
S’agissant de l’enregistrement des syndicats dans la pratique, il convient d’indiquer que le gouvernement a engagé depuis le 3 avril 2019 un processus à l’effet de procéder au traitement des dossiers des demandes d’enregistrement des organisations syndicales.
Dans ce cadre, le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale a saisi les concernés, en vue de leur demander de compléter les dossiers soit par des pièces administratives manquantes ou par la levée des observations déjà formulées. Un calendrier de rencontres a été élaboré et mis en œuvre et il se poursuit.
Des séances de travail ont été tenues et des clarifications ont été données par rapport aux dossiers administratifs des membres fondateurs ou au statut de l’organisation syndicale.
Ces mesures ont abouti à l’enregistrement de 11 nouvelles organisations syndicales, dont une (1) d’employeurs, ce qui porte le nombre d’organisations syndicales enregistrées à 75 syndicats de travailleurs et 42 syndicats d’employeurs, soit au total 117 syndicats, alors que le nombre était de 101 syndicats en juin 2018.
Par ailleurs, et s’agissant des syndicats cités dans le rapport de la commission d’experts, il est nécessaire d’apporter les éléments d’information suivants.
Concernant le SAAA, le SAATT et le SESS: après les communiqués diffusés dans les organes d’information et auxquels ils n’ont pas répondu, les concernés ont été invités par courrier à se rapprocher du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, à l’effet de les informer sur les mesures prises par le gouvernement.
Le gouvernement utilisera tous les moyens pour prendre attache avec les intéressés à l’effet de les accompagner dans la mise en conformité de leurs dossiers.
En ce qui concerne le dossier de la CGATA (Confédération générale autonome des travailleurs en Algérie), le gouvernement avait indiqué que son président n’a pas la qualité de salarié. Par ailleurs, ce projet de confédération ne regroupe aucune organisation syndicale enregistrée.
S’agissant des allégations de violation de la convention no 87 de la Confédération syndicale des forces productives (COSYFOP), du Syndicat national du secteur de l’industrie (SNSI) et du Syndicat national des travailleurs de l’énergie (SNT Energie), le gouvernement avait donné toutes les informations et documents qui réfutent les allégations émanant des personnes qui se sont accaparées du statut de syndicats enregistrés sans respect des dispositions légales et statutaires en matière de règles de convocations des organes délibérants de ces syndicats et sans la présence d’aucun membre ou adhérent de ces syndicats.
Pour ce qui est des cas de réintégration des agents de l’administration, dont le licenciement relevait d’une discrimination antisyndicale, le gouvernement a remis une situation, à travers sa délégation, lors des travaux de la commission en juin 2018. Cette situation connaît une évolution significative, à travers le suivi de ces cas avec les institutions et entreprises concernées. Ce suivi a permis le règlement de 83 sur les 86 cas recensés, et les éléments d’information détaillés ont été communiqués à la mission de haut niveau.
Le nombre total de travailleurs concernés est de 86 travailleurs, répartis sur différents secteurs (57 travailleurs réintégrés, 9 travailleurs indemnisés, 1 cas mis à la retraite, 12 en voie de régularisation, 3 licenciés pour fautes professionnelles et pénales, 3 cas pendants devant les juridictions compétentes, et 1 cas ne figure pas dans les effectifs de l’enseignement supérieur). Soit un total de 83 réglés.
Par ailleurs, le gouvernement tient à préciser que le traitement des dossiers de constitution des syndicats ci-après (le Syndicat national autonome des travailleurs de la fabrication et transformation du papier et de l’emballage, le Syndicat national autonome des travailleurs de la manufacture du bois et dérivés et le Syndicat national autonome des travailleurs de l’EUREST Algérie) a révélé que la compétence territoriale de ces organisations syndicales est à caractère local (wilaya ou communale). Par conséquent, leur enregistrement, conformément aux dispositions de l’article 10 de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 susvisée, peut se faire au niveau de la wilaya (département) siège et de la commune. A cet effet, les intéressés ont été informés et saisis dans ce sens.
Le gouvernement a rappelé que le SNATEGS a été dissous volontairement par ses membres fondateurs à l’unanimité lors d’une assemblée générale tenue le 17 octobre 2017, en présence d’un huissier de justice qui a dressé un procès-verbal, à cet effet. Le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale a été rendu destinataire de ce procès-verbal et a pris acte, le Bureau international du Travail ayant été rendu destinataire d’un dossier complet. Ce dossier a été remis à la mission qui s’est déplacée à Alger.
Dans ce cadre, il convient d’indiquer que le Conseil d’Etat a débouté M. Mellal Raouf dans l’affaire de la dissolution volontaire du SNATEGS (arrêt Conseil d’Etat no 18/2436 du 19 juillet 2018). Par ailleurs, le ministère de la Justice qu’aucun jugement n’a été rendu affirmant que M. Mellal Raouf dispose de la qualité de président.
Le gouvernement affirme en ce qui concerne les allégations sur les actes d’intimidation et de violence à l’égard des travailleurs et de leurs organisations syndicales que les travailleurs et leurs organisations syndicales exercent librement les droits et les libertés que leur reconnaissent la Constitution et le droit de manifestation pacifique dans le respect de l’ordre public.
Enfin, il est important de noter que l’Algérie a reçu la mission de haut niveau sur la base des termes de référence proposés par le BIT et que toutes les conditions de déroulement de cette mission ont été réunies, que ce soit avec les secteurs et administrations ou avec les partenaires socio-économiques.
Discussion par la commission
Représentant gouvernemental – Je puis vous assurer, Monsieur le Président, que ma délégation ne ménagera aucun effort pour vous faciliter la tâche dans la conduite des débats dans un climat constructif empreint de sérénité et contribuer activement au renforcement du mécanisme de contrôle de notre Organisation pour une application juste des conventions internationales du travail.
Permettez-moi d’exprimer l’étonnement de mon gouvernement de voir l’Algérie inscrite sur la liste des cas individuels, même si c’est avec un grand plaisir que nous rencontrons nos amis travailleurs, employeurs et délégués gouvernementaux du monde entier dans cet espace très important qu’est la commission.
Lors de la 107e session de la Conférence en juin 2018, la commission avait fait des recommandations relatives à l’application par notre pays de la convention. Elle a demandé à engager de larges consultations avec les partenaires économiques et sociaux autour du projet de Code du travail, de revoir certaines dispositions de la loi no 90-14 relatives notamment à la constitution de fédérations et de confédérations, la reconnaissance du droit sans discrimination à la constitution de syndicats, de veiller à un exercice de la liberté syndicale sans contrainte et, enfin, de fournir des explications concernant la réintégration de travailleurs syndicalistes licenciés et la dissolution du Syndicat national autonome des travailleurs de l’électricité et du gaz (SNATEGS).
La commission a en outre décidé de l’envoi d’une mission de haut niveau pour faire rapport sur l’évolution de la mise en œuvre des recommandations de la commission. L’acceptation par mon pays de la mission de haut niveau constitue un signe fort de l’attachement du gouvernement algérien à la promotion des principes et droits fondamentaux au travail et des normes internationales du travail, tel qu’il a été affirmé par le BIT qui a d’ailleurs exprimé son appréciation des efforts de l’Algérie à cet égard. La préparation du déplacement de la mission ainsi que le déroulement de ces travaux ont été organisés dans des conditions parfaites. Cela prouve et confirme tout l’engagement de mon pays dans la mise en œuvre des décisions à travers des contacts permanents et de haut niveau pour examiner et étudier conjointement la meilleure approche de mise en œuvre des conclusions de l’honorable commission.
Je reviens aux questions, observations et recommandations posées et formulées par la commission. Ainsi, concernant l’évolution et le bilan tiré depuis la dernière session, il convient de rappeler les points suivants: la commission avait demandé l’acceptation de la mission de haut niveau, elle a été acceptée et a eu lieu; cette mission devait travailler en toute liberté; cela a été le cas et cela a été relevé dans le rapport de la mission qui a exprimé sa gratitude aux hautes autorités algériennes pour l’accueil et la coopération tout au long du séjour; des termes de référence ont été établis par le Bureau, et mon pays a donné son accord sans aucune réserve aussi bien pour les entretiens avec les départements ministériels proposés qu’avec les organisations syndicales de travailleurs et d’employeurs. Aucune entrave ou difficulté n’a été enregistrée, et le rapport le souligne, précisant que toutes les conditions ont été réunies, ayant permis un bon déroulement de la mission.
La mission de haut niveau a rappelé l’importance du processus de réforme législative en cours en Algérie en matière de renforcement du pluralisme syndical, et le gouvernement n’a en effet jamais négligé les recommandations de la commission d’experts.
Dans ce cadre, nous réitérons à l’honorable commission les informations communiquées à la mission de haut niveau relatives à la mise en place par le gouvernement d’une nouvelle démarche pour faire aboutir les amendements demandés, notamment par rapport à certaines dispositions de la loi no 90-14 relatives aux modalités d’exercice du droit syndical.
Cette démarche consiste à dissocier les modifications demandées à ladite loi du processus global de finalisation du Code du travail, ce qui aura pour effet un gain de temps en matière de procédure de son adoption, du fait qu’il ne s’agira que de certaines dispositions d’une seule loi au lieu de l’examen portant adoption d’un document aussi important qu’un Code du travail qui englobe plus de 750 articles.
Dans le cadre de cette approche, est déjà engagée la révision des dispositions de l’article 4 de la loi no 90-14 en vue de prendre en charge les recommandations de la commission d’experts en matière de création de «fédérations» ou de «confédérations», permettant ainsi une clarification des dispositions de l’article 4 par rapport à l’article 2 de la même loi.
Pour ce qui est de l’article 6, son amendement visera à permettre aux travailleurs étrangers de constituer des organisations syndicales de leur choix et de s’y affilier, et nous sommes disponibles pour tirer profit de toute expérience internationale disponible au niveau du BIT en la matière.
Concernant le projet de Code du travail, mon pays s’attache à une approche inclusive permettant d’aboutir au consensus recherché entre les différents partenaires et le gouvernement. Ce souci est d’autant plus légitime pour tous les partenaires eu égard à l’importance et à l’impact de ce code sur le monde du travail. Par ailleurs, et il est important de le rappeler, aucune difficulté de gestion des relations socioprofessionnelles dans le monde du travail n’est signalée, sachant que l’Algérie dispose d’un corpus législatif et réglementaire depuis 1990 et n’enregistre donc pas de vide juridique en matière de réglementation du travail.
D’ailleurs, les partenaires socio-économiques de mon pays avaient expliqué en juin 2018 qu’ils étaient d’accord avec la démarche initiée par le gouvernement pour la finalisation de ce code.
Enfin, il est important de souligner que la réglementation en vigueur depuis 1990 est conforme aux grands principes des conventions. Elle nécessite néanmoins une mise à jour après plusieurs années de mise en œuvre et à la lumière des amendements proposés par le BIT, dont la prise en charge se poursuivra en étroite concertation avec l’ensemble des partenaires socio-économiques.
S’agissant de l’enregistrement des organisations syndicales, et comme signalé à la mission de haut niveau, des aménagements et/ou amendements seront proposés dans les textes portant sur l’exercice du droit syndical afin de donner plus d’effectivité aux droits et de les consolider. La mission avait proposé de mettre à notre disposition quelques expériences internationales en la matière. Cela nous permettra de disposer d’exemples concrets sur lesquels nous nous baserons.
Par ailleurs, et conformément à de nouvelles mesures décidées par le gouvernement en avril dernier portant sur l’accélération des procédures d’enregistrement, il a été engagé l’enregistrement de 20 nouveaux syndicats, dont 13 organisations syndicales de travailleurs et 7 organisations syndicales d’employeurs, sachant que le nombre total d’organisations syndicales enregistrées à aujourd’hui est de 121 contre 101 en juin 2018. Il importe de signaler que cette opération d’enregistrement des syndicats constitue une avancée et un progrès importants et a touché des organisations réparties aussi bien dans le secteur de l’administration que dans le secteur économique.
Concernant le SNATEGS, toutes les précisions ont été transmises, appuyées des pièces prouvant l’autodissolution de ce syndicat par ses propres membres fondateurs en présence d’un huissier de justice et sans interférence aucune de l’administration.
De prétendues entraves à l’exercice du droit syndical et des actes d’intimidation ont été évoqués. A ce titre, il est important de souligner que les organisations syndicales exercent librement les droits et libertés que leur reconnaissent la Constitution et le droit de manifestation pacifique dans le respect de l’ordre public.
D’ailleurs, il en est pour preuve les manifestations organisées par des corporations ou la population qui se déroulent dans mon pays dans un cadre pacifique loin de toute entrave, et cela est repris au niveau international comme étant un exemple.
Concernant les dossiers relatifs à des licenciements de travailleurs ou de syndicalistes, des mesures ont été prises. Le nombre de travailleurs concernés était de 86. Aujourd’hui, il a été procédé au règlement de 83 cas, et les données les concernant sont reprises dans le rapport de la mission de haut niveau qui a eu des entretiens à ce sujet avec les secteurs concernés, y compris avec le ministère de la Justice. Nous poursuivrons le traitement des cas restants et nous sommes ouverts à toute documentation et expérience internationale émanant du BIT, tel que proposé par la mission de haut niveau pour renforcer et améliorer la gestion de ce type de situations.
Enfin, mon pays réitère son attachement envers les libertés fondamentales du travail définies par les conventions internationales en la matière. Il veillera à la défense et à la poursuite de la promotion du droit syndical.
S’agissant du volet relatif au dialogue social, les activités quotidiennes en matière de négociation et d’adoption d’instruments de gestion des relations de travail entre les partenaires sociaux (employeurs et travailleurs) font ressortir qu’il a été procédé à ce jour à la signature de 18 588 accords collectifs, 3 841 conventions collectives au niveau des entreprises, 82 conventions collectives et 167 accords collectifs au niveau des branches.
Par ailleurs, les pactes et accords tripartites au niveau national, qui ont couronné des rencontres de dialogue et de concertation sociales entre le gouvernement et les partenaires économiques et sociaux, ont permis de mener les différents programmes ayant touché le monde du travail, de renforcer la protection sociale ainsi que le dialogue social et d’œuvrer à la mise en place d’une concertation permanente.
Ce constat démontre que la liberté syndicale dans mon pays s’exerce normalement, et que l’Algérie est attachée aux droits de l’homme, au respect des conventions et normes internationales, à la promotion du dialogue social et au partage d’expériences réussies et bonnes pratiques à l’échelle internationale.
En conclusion, nous estimons que les explications et informations que je viens de donner et de présenter à l’honorable commission montrent de manière concrète la volonté du gouvernement d’améliorer les procédures, de renforcer la protection du droit syndical avec une accélération de la modification de la loi no 90-14 et une meilleure prise en charge des cas individuels. Tout cela s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre des recommandations de la session de juin 2018.
A ce titre, je vous informe, par la même occasion, que le gouvernement s’engage à régulariser, à court terme, toutes les demandes d’enregistrement à des syndicats introduites auprès de l’administration.
Je demande donc à la commission de prendre en considération ces avancées et progrès ainsi que les projets et programmes prévus qui seront concrétisés en droite ligne avec la nouvelle dynamique engagée par mon pays. Je le répète, les projets et programmes prévus qui seront concrétisés en droite ligne avec la nouvelle dynamique engagée par mon pays et je souligne, à cet égard, que les préoccupations de la commission sont également celles du gouvernement qui veillera à les faire aboutir.
Membres travailleurs – Depuis notre dernière session, un vent de liberté et d’espoir a soufflé sur l’Algérie. Il a amené avec lui un certain de nombre de changements, mais surtout des promesses pour l’avenir. Le pays connaît actuellement une phase de transition et notre souhait est de voir les aspirations légitimes de la population se réaliser très prochainement.
C’est dans ce contexte que le gouvernement algérien a fini par accepter que la mission de contact de haut niveau recommandée par notre commission l’année dernière puisse avoir lieu. Le rapport issu de la mission actualise et précise certains constats, mais permet également de mettre en évidence de nouveaux éléments très inquiétants.
Il importe de reprendre les différents aspects.
Concernant le nouveau Code du travail qui est au stade de projet depuis 2011, c’est-à-dire depuis plus de huit ans, il n’a toujours pas été adopté. Il ressort même du rapport de la mission qu’aucune concertation n’a eu lieu avec les représentants des employeurs et des travailleurs depuis 2017. Nous apprenons néanmoins que le gouvernement souhaite changer de méthode en procédant d’abord à une révision de certaines dispositions de l’avant-projet de Code du travail considérées comme prioritaires. La réforme se poursuivra plus largement dans un second temps. Il faut bien évidemment s’assurer que cette nouvelle méthode aidera effectivement à engranger des résultats rapidement.
En tout état de cause, elle ne peut servir de prétexte pour repousser la réforme des parties qui ne seront pas révisées aux calendes grecques. Le processus dure depuis suffisamment de temps, et les travailleurs algériens n’ont plus le temps d’attendre encore huit ans supplémentaires.
Nous devons continuer à déplorer qu’aucune amélioration n’a été enregistrée concernant l’article 6 de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 qui limite le droit de fonder une organisation syndicale aux personnes de nationalité algérienne, d’origine ou acquise, depuis au moins dix ans.
Comme le rappelle la commission d’experts dans son étude d’ensemble consacrée aux conventions fondamentales, ceci implique que tous ceux qui séjournent sur le territoire d’un Etat, qu’ils aient ou non un permis de résidence, bénéficient des droits syndicaux prévus par la convention, sans aucune différence fondée sur la nationalité.
Aucun changement n’a non plus été enregistré concernant les dispositions qui ont pour effet de limiter la constitution des fédérations et confédérations.
Nous notons que, dans les informations communiquées par le gouvernement, celui-ci s’engage à effectuer les adaptations nécessaires sur ces points. Cela constitue une avancée, mais nous souhaitons que le gouvernement passe du registre des paroles à celui des actes.
A ce propos, le rapport de la mission relève que, tout comme pour certaines parties de l’avant-projet du Code du travail, le gouvernement va s’atteler prioritairement à la modification de la loi no 90-14. Toutefois, un engagement de cette nature ne suffit pas. Comme le suggère la mission, il est nécessaire qu’il soit couplé à un calendrier précis qui fixe les différentes étapes, et ce en impliquant les représentants des employeurs et des travailleurs.
Nous notons à cet égard l’engagement pris par le gouvernement de communiquer au Bureau un calendrier des travaux. Nous insistons pour que le gouvernement n’utilise pas cette option comme une nouvelle manœuvre dilatoire.
La mission a également relevé un problème que le groupe des travailleurs n’a pas cessé de dénoncer au sein de cette commission. Il s’avère en effet que le gouvernement fait preuve d’arbitraire dans ses décisions d’enregistrement des organisations syndicales. C’est ainsi que certaines confédérations se voient refuser l’enregistrement au motif qu’elles ont des affiliés de plusieurs secteurs, alors que d’autres se trouvant dans la même situation sont bien enregistrées. Il appartient au gouvernement d’adopter une position cohérente en procédant à l’enregistrement des organisations regroupant plusieurs branches, professions ou secteurs et de procéder si nécessaire à une adaptation de la loi.
Un autre problème fondamental qui a également été pointé par la mission concerne l’application de certaines dispositions qui ont pour conséquence de limiter dans les faits la liberté syndicale. Cela concerne l’absence d’une protection efficace contre le licenciement et la discrimination syndicale, mais aussi la difficulté à obtenir une réintégration en cas de décision judiciaire favorable. Mais cela concerne également la limitation de l’accès aux fonctions syndicales en exigeant la qualité de salarié pour exercer ces fonctions.
Cette situation pose deux problèmes majeurs de compatibilité avec la convention. D’une part, le licenciement d’un responsable syndical lui fait perdre cette qualité, ce qui laisse la voie ouverte à une ingérence de l’employeur dans le fonctionnement de l’organisation syndicale. D’autre part, et plus largement, cette exigence constitue également une ingérence par les autorités dans le fonctionnement des organisations syndicales qui, en vertu de la convention, ont le droit de choisir librement leurs représentants.
Nous devons constater avec regret que le gouvernement ne semble absolument pas avoir pris conscience du problème puisque, dans les informations qu’il a communiquées à notre commission, il indique que la CGATA ne pouvait être enregistrée car son président n’a pas la qualité de salarié. Nous invitons le gouvernement à profiter de la révision de la loi annoncée pour remédier à cet aspect en supprimant cette condition.
Le gouvernement confirme par ailleurs son refus de reconnaître certaines organisations au motif que celles-ci se seraient accaparées le statut de syndicats enregistrés sans respect des dispositions légales et statutaires. Il s’agit d’une preuve supplémentaire de l’ingérence pratiquée par le gouvernement dans les affaires internes des syndicats, puisqu’il s’arroge le droit de décider de ce qui est conforme aux statuts d’une organisation et ce qui ne l’est pas.
En outre, le gouvernement prétend avoir demandé à des organisations d’actualiser leur dossier, mais la procédure prend énormément de temps. A titre d’exemple, le Syndicat des enseignants du supérieur (SESS) attend depuis le 10 avril que lui soit délivrée la preuve de l’enregistrement.
Comme le mentionne la commission d’experts dans son rapport, l’enregistrement des syndicats dans la pratique continue toujours de susciter d’autres problèmes. Il s’agit en l’occurrence des délais particulièrement longs pour l’enregistrement des syndicats ou des refus sans motif des autorités d’enregistrer les syndicats autonomes, et ce depuis de nombreuses années. Nous venons de voir une illustration concrète de ce phénomène.
La mission a également relevé ce point et a pu s’apercevoir que, dans de nombreux cas, les décisions de refus sont lapidaires, non motivées et par conséquent arbitraires. Rappelons qu’aux termes de l’article 2 de la convention la constitution d’une organisation syndicale ne peut pas être soumise à une autorisation préalable. Précisons au passage qu’en raison de cette non-reconnaissance de plusieurs organisations celles-ci sont exclues de la participation aux structures et consultations tripartites si bien qu’elles n’ont pas été consultées sur les différentes réformes et révisions.
Comme le rappelle la commission d’experts dans son étude d’ensemble sur les conventions fondamentales, l’accomplissement de certaines formalités préalables à l’enregistrement n’est compatible avec la convention qu’à deux conditions:
– qu’il ne donne pas aux autorités un pouvoir discrétionnaire pour refuser la constitution d’une organisation;
– que cette exigence ne constitue pas un obstacle tel qu’elle aboutit en fait à une interdiction pure et simple.
La situation en Algérie est en fait l’illustration de ces deux cas de figure: les autorités ont un pouvoir discrétionnaire pour refuser l’enregistrement, et le non-enregistrement est similaire à une interdiction. En effet, sans enregistrement, l’organisation syndicale n’est pas reconnue et, donc, pas consultée. Elle ne dispose pas des droits les plus élémentaires comme celui d’ouvrir un compte bancaire ou louer un local.
De plus, il est piquant de constater que les organisations non reconnues sont celles qui ont eu recours aux organes de l’OIT pour défendre leurs droits. Des poursuites ont d’ailleurs été intentées contre une organisation et un responsable syndical sur la base d’éléments contenus dans une plainte adressée au Comité de la liberté syndicale.
Il y a lieu d’observer que le gouvernement persiste et signe quant à la dissolution du SNATEGS. Il maintient que celui-ci a fait l’objet d’une dissolution volontaire et feint d’ignorer que des décisions de justice ont été rendues statuant sur l’identité des responsables de l’organisation et que ce ne sont pas les vrais responsables qui ont procédé à la dissolution.
Au passage, nous ne pouvons que nous étonner face à la facilité avec laquelle un syndicat peut être dissout, alors que sa constitution et son enregistrement nécessitent de nombreuses formalités et un temps très long.
Nous invitons le gouvernement algérien à garantir la sécurité et les libertés fondamentales de tous les syndicalistes, et en particulier de ceux qui ont répondu et rencontré la mission.
Nous l’invitons également à cesser de recourir aux pratiques du clonage et à la création de syndicats fictifs. Ce genre de pratique nuit à la crédibilité du gouvernement qui prétend pourtant vouloir rétablir la confiance avec l’OIT et ses organes de contrôle.
J’ai évoqué, il y a un instant, le problème de la discrimination syndicale et la question de la réintégration. La mission de haut niveau a pu constater à travers des cas concrets à quel point il est difficile pour un responsable syndical licencié d’obtenir sa réintégration. Nous observons que les syndicalistes membres des organisations pas encore enregistrées se font licencier. Etant donné que, en vertu de la législation actuelle, non conforme à la convention, il faut être salarié ou fonctionnaire pour être responsable syndical, ces personnes perdent de facto leur qualité de syndicaliste ce qui rend impossible leur réintégration.
Par ailleurs, dans plusieurs cas, des responsables syndicaux qui obtiennent des décisions judiciaires de réintégration ont à faire à des employeurs qui refusent d’exécuter les décisions. Dans d’autres cas, les travailleurs sont réintégrés mais à condition de cesser leurs activités syndicales. Ils sont donc l’objet d’un chantage qui leur impose de choisir entre le gagne-pain et leurs droits syndicaux. A cet égard, le rapport de la mission observe qu’en dehors des syndicats reconnus la liberté d’organisation n’est dans les faits pas garantie.
Au moment de conclure, nous ne pouvons que déplorer à nouveau le gouffre qui sépare la situation en Algérie des principes et fondements de l’OIT. Toutefois et contrairement aux sessions précédentes, nous avons cette fois-ci des raisons d’espérer que des changements importants pourront être introduits prochainement, et ce en dépit de la mauvaise volonté dont fait preuve le gouvernement. Jusqu’il y a peu, beaucoup de choses qui paraissaient inconcevables dans le pays sont devenues réalité. Le chemin est toutefois encore long, et seule la détermination de la population sera décisive. La nôtre sera en tout cas intacte pour défendre les droits syndicaux des travailleurs et créer les conditions d’un avenir meilleur.
Membres employeurs – J’aimerais remercier le délégué gouvernemental pour les exposés qu’il nous a présentés aujourd’hui. Mon groupe souhaite commencer sa présentation en rappelant que ce cas a été traité en 2014, 2015, 2017 et, tout récemment, en 2018. Il porte principalement sur les questions concernant les obstacles à la création d’organisations ouvrières, y compris l’enregistrement, en droit et en pratique, de syndicats en Algérie. Lors des précédents examens du présent cas, le gouvernement n’a cessé d’indiquer que ces questions seraient traitées dans le cadre d’un nouveau Code du travail. Le groupe des employeurs est heureux de constater que, suite aux conclusions de la commission de 2018, le gouvernement a accepté l’organisation d’une mission de haut niveau qui, comme l’a indiqué le groupe des travailleurs, s’est tenue en mai 2019. Se félicitant du fait que la mission ait eu lieu, les employeurs sont d’avis que des travaux doivent maintenant être effectués afin de lui donner suite. Nous nous félicitons également des commentaires formulés ce jour par le gouvernement au sujet de la mission de haut niveau, qui prouve l’engagement de ce dernier à respecter pleinement les normes internationales du travail, de même que sa volonté d’engager une prise de contact de haut niveau et une collaboration avec l’OIT. Les employeurs sont également encouragés d’entendre que le gouvernement est prêt à modifier le Code du travail, en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives. Nous nous félicitons également des commentaires que le gouvernement a formulés ce jour, en particulier au sujet des efforts qu’il a déployés pour mettre à exécution les conclusions de 2018 de la commission. En conséquence, force est de constater que, dans l’ensemble, de nombreuses mesures positives peuvent être relevées à propos du présent cas. Nous partageons l’avis du porte-parole des travailleurs selon lequel nous sommes encouragés par la situation, que plusieurs changements ont eu lieu, et que le futur semble prometteur. Cependant, et les employeurs le font bien remarquer, c’est avec un optimisme mesuré que nous faisons ces déclarations. Les employeurs notent que le gouvernement s’est engagé à réviser le Code du travail, qui en est au stade de la rédaction, mais nous devons aussi être prudents car ce processus est en cours depuis 2011. Le groupe des employeurs note avec préoccupation qu’aucune consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives n’a eu lieu en Algérie depuis 2017. Clairement, cet état de fait doit changer. D’après les informations fournies par le gouvernement, nous comprenons que les réformes juridiques consistent en des réformes de la loi du 2 juin 1990, que des efforts visant à renforcer les dispositions concernant spécifiquement la protection des syndicats ont été déployés et qu’un calendrier d’élaboration du projet de loi a été communiqué au BIT sous forme d’un plan de travail. Nous comprenons également que le gouvernement s’engage à consulter, dans le cadre de ce plan de travail, les organisations de travailleurs et d’employeurs. De plus, selon certaines des mesures qui ont été prises depuis le 3 avril 2019, le gouvernement a lancé un processus d’enregistrement des syndicats, qui ont permis 11 nouvelles inscriptions d’organisations syndicales, et également d’une organisation d’employeurs. Nous comprenons aussi que le gouvernement s’est engagé à collaborer avec les parties concernées au sujet du Syndicat autonome des avocats en Algérie (SAAA), du Syndicat autonome algérien des travailleurs du transport (SAAT) et du Syndicat des enseignants du supérieur (SESS). Nous comprenons enfin que le gouvernement a fourni des informations et des documents concernant les allégations de la Confédération syndicale des forces productives (COSYFOP), l’Union nationale algérienne du secteur de l’industrie et le Syndicat algérien des travailleurs de l’énergie. Nous prenons donc note de ces efforts et encourageons leur poursuite. En conséquence, le groupe des employeurs note que le gouvernement doit saisir l’opportunité qui lui est ainsi offerte pour réaffirmer son engagement à prendre toutes les mesures nécessaires pour mener à bien la réforme du Code du travail, et ce, sans plus attendre. Il devrait aussi réaffirmer son engagement à réaliser au plus vite ce processus en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives.
Membre travailleuse, Algérie – Afin de contribuer à dresser un tableau clair des pratiques à l’égard des syndicats en Algérie, notamment dans le contexte de la convention qui nous occupe, je voudrais apporter les précisions suivantes.
La pluralité syndicale a été reconnue depuis les événements de 1988 et a été prévue dans la Constitution de 1989. Une loi sur la liberté syndicale a été adoptée en 1990, ce qui a débouché sur la création d’un certain nombre de syndicats dans plusieurs secteurs, notamment dans le secteur public. Des documents à l’appui existent toujours. L’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) a présenté un document concernant la création d’un certain nombre de syndicats. Il y a plus de 60 syndicats en Algérie, et il ne fait aucun doute que la mission du BIT qui s’est rendue en Algérie récemment dispose de toute la documentation attestant de ces faits. Récemment, 20 syndicats supplémentaires ont été enregistrés, qui s’ajoutent donc à ce nombre.
En ce qui concerne la discussion sur la liberté syndicale, nous ne pouvons pas nier que la pluralité syndicale est une réalité en Algérie, ce dont a témoigné l’UGTA. S’il y avait une politique défavorable aux syndicats, le nombre de syndicats en Algérie ne serait pas aussi élevé et les prisons auraient été remplies de syndicalistes.
Sur la base des informations présentées par l’UGTA, nous pouvons affirmer que les syndicats sont parfaitement libres de participer à des consultations tripartites. L’UGTA a été fondée en 1956 au moment de la révolution de libération nationale, elle a donc une qualité qui lui permet de participer à des négociations tripartites dans tous les secteurs de l’économie et des services. Par conséquent, nous nous demandons si tous les employeurs et les travailleurs font participer leurs syndicats à ce niveau de dialogue tripartite indépendamment de leur niveau de représentation. Tous ces syndicats qui existent dans la fonction publique participent aussi à ces dialogues tripartites qui sont organisés par secteur conformément au Code du travail algérien.
La mission tripartite a rencontré un certain nombre de syndicalistes dissidents qui ont quitté l’UGTA. Elle les a écoutés longuement, et c’est un élément important dans l’histoire de notre mouvement syndical qui a été le théâtre du martyre de 400 militants syndicalistes, avec à leur tête leur secrétaire général. La logique nous impose à nous interroger sur les tâches de cette mission et si elle pouvait s’ingérer dans les affaires intérieures des syndicats.
Il n’existe pas de syndicat aujourd’hui qui ne soit pas témoin de telles ingérences. La question est de savoir si ces ingérences vont prendre fin, et c’est d’ailleurs un élément qui a été communiqué par la mission tripartite, ce qui nous amène à nous interroger sur les intentions véritables de ceux qui essaient d’utiliser les structures de l’OIT, qui célèbre cette année son centenaire, en utilisant le droit pour défendre le mensonge.
C’est pourquoi l’UGTA, en tant qu’organisation qui a une très longue histoire honnête, demande la réévaluation de la question et de se conformer aux faits en tant que tels, et non comme certains veulent les présenter pour atteindre des objectifs non déclarés et qui vont à l’encontre des intérêts du mouvement syndical algérien et d’autres pays du monde.
L’Algérie aujourd’hui est le témoin de manifestations pacifiques qui appellent au changement. Cela a également été constaté par la mission tripartite qui s’est rendue en Algérie, qui a salué la bonne foi du gouvernement pour honorer ses engagements, y compris l’approbation de l’enregistrement de 20 syndicats récemment. L’Algérie se retrouve tout de même inscrite sur la liste des cas individuels.
Or l’Algérie d’hier n’est pas celle d’après la date du 22 février. L’Algérie d’aujourd’hui recherche la stabilité pour protéger les intérêts des travailleurs.
Membre employeur, Algérie – Au nom de la délégation des employeurs publics d’Algérie, je tiens à confirmer la disponibilité de notre organisation et son attachement aux principes des instances internationales et notamment de l’OIT. Notre pays a adhéré aux principales recommandations, notamment en ratifiant les huit conventions principales.
Nous notons avec satisfaction des progrès enregistrés au plan social par mon pays, des choses restent cependant à concrétiser. Nous attirons l’attention de votre auguste assemblée sur les efforts et les actions déjà concrétisées, et nous vous demandons de tenir compte des engagements pris par notre gouvernement et de noter notamment la proposition de la mise en place d’un calendrier de mise en œuvre de ces recommandations.
Nous vous remercions de l’aide de votre Organisation, notamment par l’envoi d’une délégation de haut niveau qui nous a permis d’envisager un avenir meilleur, notamment par le développement du dialogue social à travers le tripartisme dont mon pays fit une ligne de conduite. Nous insistons sur les progrès enregistrés et demandons par la même occasion de tenir compte des mutations politiques qui se déroulent dans notre pays et qui nous semblent de bonne augure pour un avenir meilleur, tant au plan économique que social.
Je tenais à apporter cette précision pour effectivement dire qu’il n’y a pas que le côté observation des mesures à prendre, il y a aussi le fait qu’il y a des progrès notables, notamment par les mutations d’ordre politique qui se passent actuellement dans mon pays.
Membre gouvernementale, Sénégal – Nous voudrions remercier la délégation algérienne pour les réponses qu’elle a fournies aux préoccupations exprimées dans le rapport de la commission d’experts concernant l’application de la convention. Le Sénégal salue l’ensemble des mesures entreprises dernièrement par l’Algérie dans le contexte actuel caractérisé par de profondes transformations aux plans politique, économique et social malgré cette période de transition particulièrement sensible qu’elle traverse.
Au demeurant, certains acquis qui nous paraissent fondamentaux méritent d’être soulignés: l’acceptation par l’Algérie d’une mission de haut niveau du BIT, qui s’est tenue du 21 au 23 mai 2019; l’engagement pris par le gouvernement de conformer la législation nationale aux normes de l’OIT et la concertation qui sous-tend l’élaboration de la législation nationale; et le dialogue social qui semble être instauré au sein du pays comme en attestent les consultations tripartites et élargies.
En définitive, le Sénégal encourage l’Algérie à continuer ses efforts louables en vue de la mise en œuvre de la convention pour parvenir, à chaque fois que de besoin, à des réformes consensuelles garantissant une stabilité économique et sociale.
Enfin, le gouvernement du Sénégal exhorte le Bureau à continuer d’apporter son soutien aux parties prenantes pour qu’elles privilégient, au niveau national, un dialogue social inclusif et un tripartisme productif préservant l’intérêt supérieur du pays.
Membre travailleuse, Espagne – Voilà un an que, dans cette même salle, le rapport de l’Union européenne (UE), du 6 avril 2018, sur l’état des relations entre l’UE et l’Algérie en vertu de la politique européenne de voisinage était traité. Ce traité rappelle au point 3 que les syndicats autonomes algériens rencontrent des difficultés à s’enregistrer ou à se réunir, malgré le fait que la convention a bien été ratifiée par l’Algérie. Au point 6, il est indiqué que la promotion du dialogue social, en particulier grâce au développement de syndicats autonomes, devrait elle aussi faire partie des améliorations à apporter à l’environnement économique et au marché du travail.
Depuis l’évocation de ces principes il y a un an déjà, nous constatons que la répression à l’encontre des syndicats indépendants reste une constante en Algérie, qui se traduit par des licenciements arbitraires, la suspension de dirigeants syndicaux et la répression brutale de manifestations pacifiques. Ainsi le montrent les éditions successives de l’indice des droits dans le monde publiées par la Confédération syndicale internationale (CSI).
L’Algérie d’il y a un an n’est pas celle que nous connaissons aujourd’hui. C’est là un élément que la présente commission ne peut oublier. Durant des mois, le peuple algérien, accompagné des organisations syndicales autonomes, est descendu massivement dans la rue pour manifester contre le cinquième mandat de M. Bouteflika, dans un contexte de fortes mobilisations étudiantes et d’autres secteurs de la société algérienne. Au début de ces mobilisations, et avec un mouvement syndical qui n’a toujours pas été légalisé, le président de la CGATA, M. Rachid Malaoui, qui est aujourd’hui présent parmi nous à Genève, affirmait que l’Algérie se trouvait à la croisée de chemins et qu’il en était de même de son mouvement syndical.
C’est dans ce contexte tourmenté, tant politiquement que socialement, qu’a eu lieu en Algérie, en mai dernier, la mission de haut niveau de OIT, accompagnée de multiples restrictions sans logique; malgré cela, nous nous félicitons de la recommandation adressée au gouvernement algérien dans le rapport établi à la suite de cette mission importante de l’OIT, le priant de procéder de toute urgence à l’enregistrement de la CGATA, du Syndicat algérien des fonctionnaires de l’administration publique (SAFAP) et du SESS, et de leur donner les moyens nécessaires à cette procédure. La CGATA n’a pas encore obtenu son enregistrement officiel en Algérie, ses chefs syndicaux et ses membres ayant été harcelés à plusieurs reprises.
Le gouvernement continue à utiliser les mêmes méthodes de licenciement arbitraire pour empêcher le travail syndical, en utilisant l’argument du manque d’enregistrements d’organisations. Nous avons tous vu comment le peuple algérien a décidé ces derniers mois de retrouver sa place, son honneur et sa dignité.
Les résultats des débats de la présente commission devraient être à la hauteur de la dignité du peuple algérien qui lutte pour ses libertés démocratiques; ils devraient obliger le gouvernement algérien à se conformer à la convention, et éviter qu’en 2020 nous nous retrouvions à nouveau dans cette même salle pour constater que rien n’a changé.
Membre gouvernemental, Burkina Faso – Mon pays réaffirme son attachement aux principes et valeurs véhiculés par la convention. La question de la défense de la liberté syndicale est une préoccupation fondamentale de notre Organisation. En effet, de la Constitution de 1919 à la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail de 1998, en passant par la Déclaration de Philadelphie de 1944, l’OIT a fait de la promotion de la liberté syndicale son cheval de bataille.
Le gouvernement algérien est interpellé par notre commission au sujet de la mise en œuvre, en droit et en pratique, de certaines dispositions pertinentes de la convention qu’il a ratifiée en 1962. La délégation de mon pays note avec satisfaction les informations utiles fournies par le gouvernement algérien à travers les différents efforts consentis par ce pays frère pour donner plein effet aux principes contenus dans la convention. Il est heureux de constater que, sur toutes les questions soulevées par la commission d’experts, l’Algérie a déjà initié des concertations, apporté certaines réponses et manifesté sa volonté d’apporter les corrections nécessaires pour assurer une pleine application de la convention sur le terrain. C’est pourquoi nous encourageons le gouvernement algérien à poursuivre ses efforts et à solliciter l’assistance du BIT dans le cadre des réformes envisagées.
Observateur, IndustriALL Global Union – Je suis heureux et honoré de vous parler au nom d’IndustriALL. En effet, mes collègues de la Confédération syndicale des forces productives (COSYFOP) et moi-même avons rencontré la mission de contact de haut niveau en mai. Ce que nous avons vécu après les conclusions de la commission de 2018 fut horrible. Il y a eu des condamnations, des emprisonnements et des arrestations. Moi-même, j’ai été brutalement arrêté le 23 avril 2019 et j’ai subi une torture psychologique et physique au poste de police. J’ai été dénudé et menotté, on m’a fait asseoir sur une chaise en fer pour m’interroger sur mes activités syndicales. J’ai pu constater que, chaque fois qu’il y a eu des conclusions rendues par la commission, il y a eu plus de répressions et de menaces à l’égard de mes camarades et moi-même pour nous pousser à accepter la dissolution administrative du syndicat SNATEG par ordonnance no 296 du 16 mai 2017 du ministère du Travail.
Par ailleurs, lors de la discussion de ce cas par la commission, en 2017, le représentant gouvernemental a déclaré qu’aucune ordonnance administrative n’avait été prononcée pour retirer l’enregistrement du SNATEG le 16 mai 2017, et ce même représentant gouvernemental réitère aujourd’hui qu’il a obtenu gain de cause au sujet de l’annulation de cette ordonnance, cette dernière ne devrait pas exister.
S’agissant de la dissolution volontaire prétendue, et à la suite de la perte de tous les procès contre nous par M. Boukhlafa Abdallah, le ministère du Travail a déposé plainte contre moi pour usurpation de fonction, en avril. Le ministère a usé de son influence pour obtenir une condamnation contre moi. Quant à la COSYFOP, inscrite auprès du ministère du Travail sous le no 30/1991, le ministère a déclaré que les organes de la COSYFOP ont été convoqués de façon illégale.
Or je veux vous confirmer aujourd’hui qu’il n’existe aucun conflit interne que le gouvernement algérien peut utiliser contre la COSYFOP pour la décrédibiliser. Nous ne demandons pas au gouvernement algérien de nous enregistrer ou bien de nous offrir des facilités. Ce que nous lui demandons, c’est de mettre un terme à cette oppression contre les syndicats, à ces pratiques arbitraires qui entravent la protection du droit syndical et la liberté syndicale. La mission de contact de haut niveau en avait appelé au gouvernement pour qu’il mette un terme aux pratiques d’oppression, en particulier avec les syndicats et les personnes qui ont rencontré la mission. C’est pourquoi j’aimerais vous informer qu’un de nos camarades, Mounit Batraoui, qui a rencontré la mission de haut niveau, fait aujourd’hui l’objet d’intimidation et de harcèlement. D’autre part, les syndicalistes licenciés n’ont pas été réintégrés et le site Web de la COSYFOP a été censuré. Il convient de rappeler au gouvernement que le ministère du Travail est un partenaire des syndicats et non pas un supérieur hiérarchique ou un juge qui décide de la légitimité des congrès ou des élections, d’autant plus que la loi interdit à l’administration de s’ingérer dans les affaires internes des syndicats.
Membre gouvernemental, République bolivarienne du Venezuela – La République bolivarienne du Venezuela se félicite de l’information détaillée fournie par le représentant du gouvernement algérien au sujet de la conformité avec la convention. Nous sommes conscients des progrès accomplis dans le domaine de la liberté syndicale et de la protection du droit syndical.
Il convient de rappeler que, lors de la dernière session de la commission, nous avons fait part de notre préoccupation devant le fait que, dans le présent cas, des plaintes provenant de personnes ou d’organisations n’appartenant pas au monde du travail ont été examinées, ce qui n’est pas approprié, et l’est encore moins quand ces plaintes ont une connotation politique. Nous devons garder à l’esprit la situation que traverse actuellement l’Algérie. Le fait que le gouvernement algérien ait accepté une mission de haut niveau de l’OIT, qui a eu lieu dans le pays du 21 au 23 mai 2019, n’a pas de prix en ce qu’il prouve l’intérêt du gouvernement à collaborer avec les mécanismes de contrôle de cette Organisation.
Il serait bon que la présente commission tienne compte du fait que le gouvernement tente de réformer et d’adapter son cadre législatif afin de le rendre conforme aux conventions de l’OIT, ainsi qu’aux recommandations élaborées par la commission d’experts.
Nous saluons le gouvernement algérien et l’encourageons à poursuivre les amendements législatifs qu’il a prévus concernant les fédérations et les confédérations syndicales, la nationalité des travailleurs lors de la création de syndicats et la protection des délégués syndicaux dans le cadre, entre autres, de leurs droits syndicaux.
Nous espérons que les conclusions de la présente commission, qui seront le fruit de nos discussions, soient objectives et équilibrées, ce qui, sans aucun doute, permettra au gouvernement algérien de les examiner et de les évaluer dans le cadre de ses efforts visant à donner effet à la convention.
Membre travailleur, Congo – Je prends la parole au nom des travailleurs du Congo ainsi que de ceux de l’Organisation syndicale des travailleurs de l’Afrique centrale (OSTAC) sur le cas de l’Algérie, concernant la convention no 87, ratifiée par l’Algérie en 1962.
Après avoir entendu et compris le fond de l’intervention du représentant du gouvernement algérien, nous pouvons noter que l’Algérie a ratifié huit conventions fondamentales, et à la suite de la mission de haut niveau du BIT qui a été effectuée du 21 au 23 mai de cette année et des échanges qui se sont ensuivis sur les réformes législatives concernant les textes de loi qui ont fait que l’Algérie est interpellée par notre commission, il y a lieu donc de croire que les démarches engagées pour modifier et compléter certaines dispositions du Code du travail (loi no 90-14 du 2 juin 1990) sont, en réalité, une avancée à saluer. Ainsi, le projet d’amendement de cette loi, qui sera soumis à la concertation sociale avec toutes les organisations syndicales d’employeurs et de travailleurs, peut être là aussi un signe fort qui puisse faire que, désormais, l’Algérie soit en phase avec les dispositions de la convention. On sent alors que les choses bougent positivement en Algérie, et la volonté des autorités en charge du travail et de l’emploi est en réalité de mise.
La réalisation de la mission de haut niveau du BIT a eu lieu sur la base des termes de référence proposés par le BIT. Donnons alors la chance et du temps à l’Algérie pour se conformer aux dispositions de la convention et pour que soient réintégrés les travailleurs licenciés dont le processus est très avancé, à en croire les informations données ou communiquées par le gouvernement.
Membre gouvernementale, Etats-Unis – En 2018, la commission s’est dite préoccupée par le niveau des progrès que le gouvernement a accomplis pour traiter la situation de la liberté d’association en Algérie, dans la mesure où cela fait plus de dix ans que cette question est débattue dans l’ensemble du système de contrôle de l’OIT.
La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que les travailleurs et les employeurs sont à l’abri d’actes d’intimidation pour instaurer un processus transparent d’enregistrement des syndicats, qui est conforme aux normes internationales du travail. A cet égard, nous notons que le gouvernement a accepté la tenue, en mai 2019, d’une mission de haut niveau dans le pays. Nous accueillons favorablement cette décision et attendons avec intérêt de pouvoir examiner en détail le rapport de mission.
Pour l’heure, nous prions instamment le gouvernement de poursuivre la mise en œuvre des conclusions de la commission de 2018, à savoir, en particulier:
- veiller à ce que l’enregistrement des syndicats, en droit et en pratique, soit conforme à la convention;
- traiter les demandes d’enregistrement des syndicats en suspens qui répondent aux conditions fixées par la loi et permettre le fonctionnement libre des syndicats;
- assurer que le nouveau projet de Code du travail est adopté en consultation avec les partenaires sociaux, spécialement les plus représentatifs;
- modifier l’article 4 de la loi no 90-14 afin de lever tout obstacle à la constitution de fédérations et de confédérations de leur choix;
- modifier l’article 6 de la loi no 90-14 afin que soit reconnu à tous les travailleurs, sans distinction de nationalité, le droit de constituer une organisation syndicale;
- fournir de plus amples informations sur la réintégration rapide des fonctionnaires du gouvernement, qui ont été licenciés sur la base d’une discrimination antisyndicale.
Membre gouvernemental, Egypte – Nous avons écouté avec une grande attention la déclaration du gouvernement indiquant qu’il a bien tenu compte des recommandations de la commission d’experts. Nous avons le sentiment que la situation en Algérie est positive et que le pays se trouve aujourd’hui à une croisée des chemins. Nous devons tenir compte des efforts faits par le gouvernement, qui participe toujours au dialogue social, malgré les difficultés que rencontre notre pays frère. Nous sommes confiants du fait que le gouvernement algérien saura créer un environnement positif. Il a bien l’intention de travailler sur le dialogue social et de veiller à ce que le pluralisme syndical existe bien dans le pays.
En 1990, la loi a été révisée, cette révision étant toujours en cours aujourd’hui. Nous avons le sentiment que ce pays mérite des encouragements et nous nous devons de le féliciter, tout en veillant à ce qu’il puisse aller de l’avant. La situation est prometteuse; nous devons accorder plus de temps à l’Algérie.
Membre gouvernemental, République arabe syrienne – Nous avons lu et écouté avec une grande attention la déclaration faite par le gouvernement algérien. Nous avons le sentiment que les efforts entrepris sont importants et que l’avenir est prometteur. Des mesures ont été prises pour permettre au gouvernement algérien de répondre aux recommandations de la commission d’experts, de manière à respecter pleinement la convention. Des réformes en profondeur et sérieuses sont en cours actuellement en Algérie. La mission de haut niveau de l’OIT en Algérie nous semble avoir été un succès et tous ces efforts que le gouvernement déploie sont positifs. Rappelons aussi que le droit au travail et la non-discrimination ou la non-différentiation entre les travailleurs algériens et les travailleurs étrangers sont autant d’éléments qui ont été pris en considération. Le gouvernement algérien fait des efforts importants pour adopter les réformes. La mission de haut niveau a été accueillie chaleureusement en Algérie. C’est pour cette raison que nous estimons que le gouvernement algérien devrait être considéré comme étant digne de mériter notre confiance. Il a besoin de plus de temps et le contexte est difficile, malgré l’assistance technique apportée par le BIT.
Observatrice, Internationale des services publics (ISP) – Le gouvernement algérien s’entête à ne pas adopter les mesures nécessaires. Par exemple, les greffiers de la fédération de la justice du SNAPAP ont fait l’objet de licenciements arbitraires et injustes à la suite d’une grève générale, sans percevoir à ce jour d’indemnisation pour le préjudice subi ni versement de leurs salaires. De même, le coordinateur national du SESS a été arrêté arbitrairement le 13 juillet 2016 puis innocenté, étant donné que le dossier était vide. Voilà autant d’intimidations dont nous sommes victimes.
Par ailleurs, après la création de la section du SNAPAP au sein de de l’Université de Belgaid, le président de l’université a fait pression sur les délégués pour qu’ils se retirent de la section et a entamé des procédures judiciaires en référé pour empêcher la création d’une section syndicale. Une plainte a été déposée à l’encontre du responsable de la coordination de Wilaya, M. Salim Mecheri, et ainsi décapiter le syndicat.
Par ailleurs, MM. Mellal Raouf, Kouafi Abdel Kader, Ben Zein Suleiman, Suleimani Mohammed Amin Zakariya Benhadad ont été condamnés à des peines d’emprisonnement à cause de leur déclaration à la presse. Cela s’applique aussi au Syndicat national autonome des travailleurs de l’électricité et du gaz. Nous sommes traînés en justice, et ce malgré les droits dont nous devrions bénéficier.
S’agissant de l’enregistrement de la CGATA, nous avons entendu le ministre, mais sachez que le gouvernement algérien, les employeurs et bien d’autres ont fait des déclarations erronées lors de chaque session de la commission. En effet, le ministère du Travail refuse d’enregistrer un certain nombre de syndicats, et cela prouve à nouveau l’entêtement de ce gouvernement. Ce gouvernement méprise les recommandations de la commission d’experts, et cela s’applique à la CGATA et à bon nombre d’autres syndicats, celui des enseignants du supérieur, le SESS, par exemple. C’est pourquoi je me demande et je vous demande s’il y a une véritable liberté syndicale. Le ministre donne des listes de syndicats qui n’existent pas sur le terrain, et je l’exhorte à nous donner les noms de leurs dirigeants. Je pense quant à moi que ces syndicats n’existent pas. Il s’agit de syndicats fantômes.
Membre gouvernemental, Mauritanie – Nous félicitons la délégation algérienne pour son rapport exhaustif et pertinent relatif à la mise en œuvre de la convention. Nous saluons le fait que l’Algérie ait accueilli la mission de haut niveau du BIT, ce qui traduit sa volonté de coopérer de manière constructive avec l’OIT pour la mise en œuvre de ses conventions internationales.
Le rapport présenté par l’Algérie indique, sur toutes les questions soulevées, que les autorités ont apporté des réponses satisfaisantes et pris les mesures appropriées, conformément aux conventions pertinentes de l’OIT et aux recommandations de ses organes de contrôle. En conclusion, eu égard à la situation particulière que traverse l’Algérie, il est souhaitable que tous ses partenaires l’accompagnent de manière constructive en reconnaissant ses efforts dans le respect de toutes les recommandations de l’OIT et de la prévention de la paix sociale.
Membre travailleur, Argentine – La Centrale des travailleurs de l’Argentine (CTA Autonome) s’associe aux autres camarades. Elle demande au gouvernement algérien d’appliquer immédiatement les recommandations de la mission de l’OIT et de procéder à l’enregistrement immédiat et inconditionnel de la CGATA ainsi que d’autres syndicats indépendants.
Le rapport des experts prend note avec préoccupation de la revendication de la CSI et de la CGATA, selon laquelle neuf organisations syndicales ayant demandé à être enregistrées ont dû abandonner, en raison de pétitions provenant des autorités et du temps qui s’est écoulé sans qu’elles aient pu parvenir à leur enregistrement.
Nous souhaitons rappeler au gouvernement algérien que la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail, 1998, stipule clairement que les droits fondamentaux comme ceux qui figurent dans la convention doivent être respectés par tous les Etats Membres de l’Organisation, même s’ils ne l’ont pas ratifiée, et encore plus dans le présent cas, puisque l’Algérie l’a ratifiée en 1962.
Dans ce sens, l’enregistrement récent de 11 nouvelles organisations syndicales du gouvernement montre que celui-ci accorde l’enregistrement seulement à des organisations qui ne présentent pas de plainte, ce qui prouve le peu de respect que le gouvernement algérien a envers l’OIT et ses recommandations.
En outre, nous rappelons au gouvernement que l’exercice d’activités syndicales légitimes et le droit syndical ne devraient pas dépendre de l’enregistrement officiel de ces organisations. Dans ce contexte, nous rappelons que la convention stipule, dans son article 12, que les travailleurs et les employeurs, sans distinction d’aucune sorte, ont le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix.
De même, nous dénonçons ouvertement la répression brutale de la police dans le cadre des manifestations de rue qui ont eu lieu quelques jours avant l’arrivée de la mission de haut niveau de l’OIT, et la détention de nos camarades syndicalistes. Cela aggrave la situation, puisque, en plus de l’atteinte à la liberté syndicale, il y a eu dans ce cas violation des libertés publiques qui sont la condition préalable nécessaire à l’existence de la liberté syndicale.
En outre, nous dénonçons les menaces récentes prononcés par le ministre du Travail algérien, M. Mourad Zemali, envers les chefs syndicaux indépendants de la CGATA et ses membres quelques jours après l’arrivée de la mission de l’OIT, les accusant d’être derrière la «stigmatisation» du gouvernement algérien devant la commission.
Le manque de respect des autorités algériennes à l’égard des conventions qui ont été ratifiées nous paraît évident quand nous entendons le gouvernement promettre qu’il modifiera l’article 4 du Code du travail sans définir pour cela un cadre temporel clair.
Considérant que ce même Code du travail stagne pour ces raisons depuis plus de vingt ans, nous comptons sur la présente commission pour demander instamment au gouvernement algérien d’apporter de toute urgence les modifications qui s’imposent.
Membre gouvernementale, Egypte – J’aimerais tout d’abord remercier le chef de la délégation algérienne pour les informations importantes qu’il nous a fournies aujourd’hui. Ces informations portaient sur les mesures prises par le gouvernement pour chercher à assurer l’application de la convention.
Nous sommes convaincus que les réformes entreprises en Algérie, que ce soit dans la législation en cours ou dans d’autres domaines, méritent d’être bien comprises et respectées. Nous sommes également d’avis que cet ensemble de réformes est conforme à l’esprit et à la nature de la convention. Je tiens à noter en outre que l’Algérie a réservé un bon accueil à la mission de haut niveau de l’OIT qui a eu lieu plus tôt cette année, et le gouvernement nous a déclaré qu’il travaillait actuellement pour adapter les structures dans le pays afin de les rendre pleinement conformes aux termes de la convention.
Nous prenons note également de la réforme administrative en cours, qui est très profonde. Nous avons été informés du travail que le gouvernement effectue actuellement et nous nous en félicitons. Nous sommes aussi heureux de constater que le gouvernement algérien est fermement déterminé à œuvrer en faveur de la justice sociale et de la paix. Le représentant de l’Algérie a clairement indiqué que la réforme est en cours et qu’elle est conforme aux recommandations formulées par la commission d’experts au sujet des dispositions de la convention.
Il a aussi été dit que le syndicalisme est actuellement encouragé dans le pays et qu’il ne fait l’objet d’aucune entrave. C’est pour cela que le gouvernement cherche à mettre pleinement en œuvre la convention qui a été ratifiée. Nous savons qu’un calendrier a été préparé et qu’il a été transmis au Bureau. Tout ceci montre bien que l’Algérie cherche sérieusement à assumer ses responsabilités en termes de dialogue social et qu’elle a bien l’intention de le faire.
Nous accueillons favorablement ce qui a été fait à ce jour, de même que les travaux actuellement en cours afin de eiller à ce que chacun jouisse pleinement de la liberté d’association dans le pays. Nous remercions le gouvernement de l’Algérie pour tout ce qu’il fait et pour le sérieux avec lequel il accomplit les réformes actuelles, et nous sommes convaincus que celles-ci donneront des résultats riches et positifs.
Observateur, Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) – Nous déplorons et dénonçons l’instrumentalisation permanente des syndicats clonés de notre affilié le Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique (SNAPAP).
Dans ses conclusions, la mission de haut niveau a spécifiquement cité le clonage, la création des organisations fictives bidons, sans nombre, sans légitimité, comme faisant partie des pratiques antisyndicales systématiquement déployées par le gouvernement algérien.
Chaque fois que le SNAPAP constitue une section dans une administration donnée, les services de sûreté, avec l’aide de l’administration locale, font pression sur les délégués pour leur signifier l’interdiction d’adhérer à une autre organisation syndicale que le SNAPAP cloné, sous peine de représailles. La sûreté nationale a de nouveau fait pression sur le propriétaire du nouveau siège du SNAPAP afin qu’il résilie le bail.
Le SNAPAP a déjà été obligé de quitter le précédent siège national, vu les pressions exercées sur le précédent propriétaire des lieux et vu que le syndicat a vécu plusieurs mois sans électricité, suite à la décision prise par le SONELGAZ, société publique de gaz et d’électricité, de couper l’électricité, et cela en plein hiver. L’affaire est jusqu’à présent devant la justice.
L’UITA soutient fortement les recommandations de la mission, et nous demandons la mise en œuvre de mesures urgentes et concrètes afin que les travailleuses et travailleurs algériens puissent exercer leurs droits fondamentaux dans un environnement exempt d’ingérence et d’intimidations, et là je cite le rapport.
Membre gouvernemental, Turquie – Nous souhaiterions remercier le gouvernement algérien pour la réponse détaillée qu’il a fournie. De plus, nous nous félicitons de la volonté du gouvernement d’entreprendre un dialogue social et de fournir de plus amples informations à ce sujet. Nous prenons bonne note des efforts de l’Algérie pour travailler étroitement avec l’OIT dans divers domaines. En tant que Membre de l’OIT, l’Algérie a ratifié 42 conventions, y compris toutes les recommandations fondamentales et trois recommandations prioritaires. La Constitution algérienne et sa législation nationale du travail consacrent le droit d’organisation et de grève pour tous les citoyens. Le gouvernement algérien s’engage aussi à résoudre les problèmes ayant trait aux relations professionnelles et aux conditions de travail dans le pays. Il nous semble bon de mentionner que les mesures prises par le gouvernement algérien afin d’enrichir le dialogue social prouvent la volonté et l’engagement du gouvernement de poursuivre ses efforts afin d’améliorer encore les conditions de la liberté d’association et la protection des droits syndicaux.
L’Algérie a accepté la visite de la mission de haut niveau en mai 2019. Elle s’efforce à renforcer son cadre législatif actuel et à l’adapter afin d’en assurer la conformité avec les normes de l’OIT. Nous encourageons le gouvernement algérien à continuer à prendre d’autres mesures à cet égard. Nous pensons que, dans le cadre du mécanisme de dialogue social, les modifications relatives à la liberté d’association que le gouvernement algérien a apportées récemment encourageront les droits et libertés des syndicats. Pour ces raisons, nous nous joignons à la demande priant la commission de tenir compte de tous les efforts faits par l’Algérie en consultation avec les partenaires sociaux.
Nous pensons que l’Algérie continuera à travailler avec l’OIT et les partenaires sociaux dans l’esprit d’une coopération constructive, en ce qui concerne l’OIT et les normes internationales du travail et se soumettra à son obligation de faire rapport et de respecter les conventions de l’OIT qu’elle a ratifiées.
Membre gouvernemental, Zimbabwe – Le Zimbabwe prend la parole afin de remercier pour leurs interventions le gouvernement algérien, le porte-parole du groupe des travailleurs et celui du groupe des employeurs, ainsi que d’autres délégués. La délégation du Zimbabwe prend note des documents fournis par la commission d’experts à propos de l’Algérie et des questions qui y sont posées au sujet du non-respect de la convention. Elle note avec satisfaction que le gouvernement de l’Algérie a entrepris de vastes réformes destinées à respecter à la fois la convention et les commentaires de la commission d’experts. Nous sommes conscients que la réforme législative est un processus et que, en tant que tel, il convient de donner du temps à l’Algérie pour effectuer les changements nécessaires de la législation. De plus, nous notons que le gouvernement de l’Algérie a répondu aux commentaires formulés par la commission d’experts au sujet de l’enregistrement des syndicats. L’Algérie indique dans son rapport avoir enregistré 75 syndicats de travailleurs et 42 syndicats d’employeurs depuis la révision de la loi. Il s’agit là d’un signe positif qui montre que l’Algérie souhaite collaborer avec l’OIT, les syndicats de travailleurs et les syndicats d’employeurs, et qu’elle est prête pour cela. Il s’agit de trouver une solution qui s’inscrive dans la durée aux questions soulevées par la commission d’experts. Sur la base des présentations soumises par le gouvernement algérien, la délégation du Zimbabwe constate avec satisfaction les exemples positifs et les progrès accomplis par le pays pour se conformer à la recommandation de la commission d’experts. Nous estimons que le gouvernement de l’Algérie a répondu positivement et en détail aux questions spécifiques soulevées par la commission d’experts. A cet égard, la délégation du Zimbabwe prie instamment le BIT de continuer à offrir son assistance technique au gouvernement de l’Algérie dans tous les efforts qu’il déploie en vue de se conformer à la convention et aux observations de la commission d’experts.
Membre gouvernemental, Brésil – Le Brésil remercie le gouvernement algérien pour sa présentation d’informations détaillées pour examen par la présente commission et pour les informations préliminaires qu’il a fournies sur le cas, qui figurent sur la page Internet de la commission. Le Brésil note que ce cas a été porté à maintes reprises à l’attention de la commission. Cette exposition excessive ne contribue pas à promouvoir les objectifs contenus dans les conventions de l’OIT. C’est plutôt un examen universel dans lequel tous les gouvernements de toutes les régions du monde, qu’elles soient développées ou en développement, seraient appelés à se présenter périodiquement devant la commission qui servirait de façon plus convaincante et plus crédible les objectifs universels des conventions fondamentales de l’OIT. Ces quelques dernières années, l’Algérie a été placée dans la liste courte en 2014, 2015, 2017, 2018, et maintenant à nouveau en 2019 (cinq fois en six ans – et chaque fois à propos de la convention no 87). Le cas de l’Algérie est à nouveau un exemple de la pratique regrettable, qui consiste à pointer du doigt les pays en développement.
Des rapports qui ne sont pas rendus à temps, l’opacité dans la sélection des cas et la négociation des conclusions portent sérieusement atteinte aux efforts que nous déployons pour construire un dialogue constructif et porter le soin qu’elles méritent aux présentations des parties. Il est dans notre intérêt à tous – les gouvernements, les travailleurs et les employeurs – que l’OIT soit forte, effective et légitime et qu’elle soit adaptée aux défis actuels du monde du travail de même qu’au multilatéralisme. Ceci devrait, et peut être atteint par le biais de la coopération, du dialogue et du partenariat.
Le Brésil a pris bonne note de la volonté du gouvernement algérien de coopérer avec l’OIT, comme le montrent les présentations qu’il a faites à cette commission, et son engagement envers elle, de même que les efforts évidents qu’il déploie pour adhérer aux normes internationales du travail et réviser, selon les besoins, sa législation nationale.
Le Brésil répète que seules des normes bien définies, adoptées par les gouvernements par le biais d’un processus officiel de ratification, devraient motiver toute question ou toute demande de clarification adressée à la commission. Le Bureau, la présente commission et l’ensemble de l’OIT devraient reconnaître le rôle important que jouent les gouvernements, les institutions et les organisations nationales dans l’interprétation des normes afin de les adapter aux circonstances et aux moyens nationaux.
Observateur, Confédération syndicale internationale (CSI) – Je m’exprime au nom de la CGATA à laquelle le SESS est affilié. La CGATA rappelle à la commission que l’Algérie vit une période de forte instabilité politique, car depuis le 22 février le peuple sort par millions chaque semaine pour exiger une seconde République. Aussi, nous considérons que les représentants du gouvernement ici présents n’ont aucune légitimité pour le peuple algérien.
De plus, la centrale syndicale UGTA, qui a toujours joué le rôle de syndicat du pouvoir, est décriée par ses militants qui n’arrêtent pas de faire des rassemblements pour exiger sa restitution aux vrais syndicalistes. Son secrétaire général a été empêché de sortir du territoire national vu la décision du pouvoir réel en Algérie, c’est-à-dire l’armée, de griller quelques fusibles coupables de prédation dans notre pays pour tenter vainement de calmer le peuple algérien.
Concernant maintenant les recommandations de la commission d’experts et le non-respect de la convention, nous soulignons que la mission de haut niveau est venue dans une période d’instabilité politique. Toute la crédibilité de cette institution qu’est le BIT, et surtout la commission, est en jeu, car la mission de haut niveau a bien mis en évidence que ce sont les organisations syndicales ayant porté plainte qui voient leur enregistrement refusé. D’ailleurs, la mission recommande au gouvernement de procéder d’urgence à l’enregistrement de la CGATA et du SESS.
Cette visite a montré que le nombre d’organisations syndicales à qui a été refusé l’enregistrement est important, ce qui indique que bon nombre d’organisations syndicales ont eu peur de faire appel au BIT au vu de la répression que la CGATA et son affilié, le SESS, ont vécue. De même, un autre des affiliés, en l’occurrence le SNAPAP, a subi le clonage qui a été dénoncé maintes fois ici.
Non seulement il n’y a eu aucune avancée en matière de consultation des partenaires sociaux sur le projet de Code du travail, mais les autorités viennent d’inventer un nouveau procédé pour la fuite en avant, en disant que certains articles seront corrigés sans revoir tout le Code du travail. Ainsi, on a attendu près de dix-huit ans le Code du travail annoncé, car la première plainte date de 2001. Maintenant, c’est une nouvelle procédure qui doit être engagée pour on ne sait encore combien d’années. De même, il faut noter que les délégués syndicaux licenciés n’ont pas été réintégrés malgré les promesses.
Nous faisons confiance à la commission pour nous rétablir dans nos droits. Nous demandons la mise en œuvre immédiate et non conditionnelle des recommandations de la commission. Nous demandons que soit dégagé un calendrier strict pour l’enregistrement de la CGATA et du SESS ainsi que pour la réintégration des délégués syndicaux licenciés et l’amendement du Code du travail.
Membre gouvernementale, Namibie – Monsieur le Président, la Namibie accueille favorablement les informations fournies par le représentant du gouvernement de l’Algérie sur la mise en œuvre de la convention. La Namibie prend note avec satisfaction de la visite de la mission de haut niveau de l’OIT, qui a eu lieu du 21 au 23 mai 2019. Les participants à cette mission ont pu rencontrer certains départements ministériels et partenaires sociaux, et regrouper des documents ainsi que des données sur la situation des syndicats.
De plus, le gouvernement de la République de Namibie note que le gouvernement algérien est toujours engagé à donner effet aux commentaires de la commission d’experts au sujet des réformes législatives. L’augmentation des enregistrements de syndicats, qui sont passés de 101 en juin 2018 à 121 en juin de cette année, selon le rapport présenté par l’Algérie, est une indication selon laquelle l’enregistrement des syndicats en Algérie est conforme à la convention, en droit et en pratique. C’est pourquoi nous appelons l’OIT à continuer à fournir une assistance technique à l’Algérie. Enfin, la présente commission devrait noter dans ses conclusions les progrès accomplis par le gouvernement algérien.
Membre gouvernementale, Soudan – La délégation du Soudan aimerait remercier le représentant gouvernemental pour les informations qu’il a fournies concernant le respect des prescriptions de la convention, que l’Algérie a ratifiée en 1962.
De l’avis de ma délégation, le gouvernement algérien a fait de gros efforts pour faciliter les travaux de la mission de haut niveau ainsi que pour mettre en application les réformes. Ceci mérite des félicitations car le pays traverse des moments difficiles. Le gouvernement de l’Algérie s’est engagé à respecter pleinement la convention no 87, et le nombre de syndicats enregistrés a beaucoup augmenté en un an. Monsieur le Président, nous sommes d’avis que le gouvernement de l’Algérie doit recevoir de l’aide pour mener à bien ses réformes et mérite en cela de recevoir une assistance technique.
Membre gouvernemental, Mali – Suivant les arguments développés par le ministre algérien du Travail, il est important pour le gouvernement du Mali de lui apporter son soutien total. Toutefois, nous l’invitons à poursuivre et à renforcer les efforts entrepris, dans le sens de l’apaisement du climat social.
Membre gouvernementale, Cuba – Ma délégation confirme à nouveau l’importance qu’il y a à continuer de promouvoir le tripartisme et le dialogue social dans chaque pays, de façon à régler les différences pouvant apparaître dans le monde du travail et favoriser une meilleure protection des droits des travailleurs et des libertés syndicales, ce qui doit être un objectif permanent pour tous.
En conséquence, nous encourageons le gouvernement algérien à poursuivre les efforts qu’il a déployés à cette fin, de même que nous reconnaissons les mesures prises jusqu’alors. Nous formons des vœux pour que la législation qui protège ces droits continue à être renforcée. Nous insistons également sur la nécessité de continuer à promouvoir, dans le cadre de l’OIT, les mesures et les programmes qui encouragent l’assistance technique dans les pays, tout en offrant aux gouvernements l’espace dont ils ont besoin pour prendre des mesures visant à relever les défis auxquels le monde du travail est confronté, dans un esprit de coopération et d’échange.
Membre gouvernementale, Liban – Après la prise en compte des informations que nous a fournies le gouvernement algérien dans sa réponse détaillée et complète pour ce qui est de la mise en œuvre des normes de la convention, nous félicitons le gouvernement algérien pour les grands efforts consentis et pour toutes les mesures entreprises soit sur le plan de la législation, soit sur le plan des réformes déjà entamées et des mesures pratiques qui sont actuellement mises en œuvre.
Nous félicitons et nous incitons le gouvernement algérien à renforcer le dialogue tripartite avec les partenaires sociaux. Nous exhortons le gouvernement algérien à mener des consultations avec les syndicats des travailleurs dans le cadre de la réforme du Code du travail pour qu’il soit conforme aux conventions internationales.
Nous exhortons par ailleurs le Bureau international du Travail à renforcer la coopération avec le gouvernement algérien, et ce pour fournir plus encore de coopération technique pour consolider les progrès déjà enregistrés.
Membre gouvernemental, Ethiopie – L’Ethiopie souhaiterait remercier le gouvernement de l’Algérie pour les informations qu’il a fournies. Le rapport de ce gouvernement indique, nous l’avons entendu, qu’il s’attache à modifier les projets de loi pertinents, en consultation avec les partenaires sociaux, et que le calendrier prévu pour l’examen de ces projets sera communiqué au Bureau de l’OIT. Nous sommes également informés par le gouvernement de l’Algérie qu’il existe un environnement propice aux travailleurs pour qu’ils s’organisent en syndicats de leur choix et qu’ils exercent librement leurs droits, conformément à la convention.
Le gouvernement de l’Algérie indique en outre qu’il accepte la visite de la mission de haut niveau de l’OIT et qu’il est ouvert à l’accueillir, ce qui, de notre point de vue, est un signe de l’intérêt qu’il porte à la promotion et à l’application de la convention. D’après ce qui précède, ma délégation est convaincue que les progrès accomplis en Algérie sont conformes aux recommandations de la commission. Compte tenu des progrès accomplis et des changements qui ont lieu actuellement en Algérie visant à rendre la législation nationale conforme à la convention, compte tenu également de l’environnement positif qui prévaut grâce auquel les syndicats peuvent exercer leurs droits, nous encourageons le gouvernement algérien à redoubler d’efforts en vue de travailler en collaboration étroite avec les partenaires sociaux dans l’idée de promouvoir le dialogue social, et d’affirmer son engagement à la mise en œuvre totale, en droit et en pratique, de la convention. A cet égard, nous attendons avec impatience le soutien technique du BIT.
Membre gouvernementale, Niger – Le Niger félicite le gouvernement algérien pour les informations détaillées fournies suite aux observations de la commission d’experts. Le Niger salue également la volonté affichée de l’Algérie de collaborer avec les organes de contrôle de l’OIT en accueillant la mission de haut niveau après la 107e session de la Conférence internationale du Travail. Malgré la situation que traverse ce pays, il faut noter que des efforts considérables ont été enregistrés dans la mise à niveau de la convention.
Pour pérenniser ces efforts, le BIT doit continuer à assister les mandants tripartites algériens à aller de l’avant. Enfin, nous rendons hommage à l’ensemble des efforts et progrès enregistrés dans la mise en œuvre de la convention et encourageons les mandants algériens à continuer dans ce sens.
Représentant gouvernemental – C’est avec un grand plaisir que je reprends la parole pour remercier tous les intervenants, aussi bien gouvernementaux, travailleurs et employeurs, ceux qui ont soutenu mon pays, ceux qui ont demandé des précisions ou ceux qui ont demandé à ce que des efforts soient faits. Je souhaiterais également remercier la mission de haut niveau qui s’est déplacée à Alger et qui a réussi à garantir une neutralité dans son rapport. Il était de mon devoir et du devoir de mon gouvernement de le préciser.
Nous avons pris note des questions et des interrogations ainsi que des propositions. Ainsi, tout en rappelant et en soulignant encore une fois l’engagement du gouvernement à prendre en charge dans le cadre d’un processus rapide et organisé en relation avec la nouvelle dynamique du pays, les résultats atteints à ce jour, depuis la dernière session de l’année 2018, permettent de relever des résultats concrets.
Une démarche a été engagée, notamment avec le démarrage de la révision de la loi no 90-14 – je dis bien que la démarche a été engagée –, le règlement de la quasi-totalité des cas individuels de licenciement (83 sur 86), un engagement pour une poursuite de la large concertation sur le Code du travail, qui sera complète. J’ai dit dans ma communication que les dispositions des articles 6 et 4 seront prises en charge. C’est un engagement.
Concernant l’enregistrement des syndicats, l’engagement a été pris et il traitera l’ensemble des dossiers introduits.
Nous poursuivrons notre coopération avec le BIT pour aboutir et faire aboutir tous ces chantiers et projets. La disponibilité du gouvernement algérien est totale, et nous veillerons à faire aboutir ces programmes pour atteindre les objectifs attendus. Ce ne sont pas des promesses, mais des engagements, et nous avons abordé explicitement, comme je viens de le dire, les articles portant sur les fédérations, les confédérations et sur la nationalité pour créer une organisation syndicale.
Nous sommes en train de regarder l’avenir, et le bilan qui a été présenté a commencé à donner des fruits. La liste des organisations syndicales qui ont été enregistrées a été portée à la connaissance de la mission de contacts directs, et nous pouvons remettre aujourd’hui, séance tenante, la liste des organisations syndicales qui concernent aussi bien l’administration que le secteur économique, ainsi que tout élément d’information nécessaire.
Nous avons accepté la mission de haut niveau, alors que certains qui ont demandé cette mission en 2017 et 2018 ont refusé de la rencontrer en 2019. Il faudrait s’interroger sur une telle attitude. Je laisse la commission faire son interprétation en toute liberté.
Le gouvernement marque encore une fois toute sa disponibilité et son respect à l’OIT pour aller de l’avant, et nous veillerons ensemble à faire aboutir les objectifs attendus, tout en soulignant que le gouvernement algérien protège tous ses citoyens, sans exception, et que ceux qui se sont présentés en victimes voyagent à l’intérieur comme à l’extérieur, et ils sont même dans cette salle. Il n’y a pas de répression.
Je voudrais en conclusion que nous veillions ensemble à renforcer cette coopération avec l’OIT pour terminer ces programmes, et je demande à ce qu’il y ait une justice dans l’approche portant sur l’examen du cas.
Membres employeurs – Le groupe des employeurs a pris note avec soin des présentations du gouvernement. Il attend avec impatience qu’elles soient étudiées plus en détail, et que soit procédée en même temps une analyse approfondie du rapport de la mission de haut niveau. Nous avons aussi pris note avec soin de la discussion qui a eu lieu ce jour au sein de notre commission et nous nous félicitons de la participation active de ceux qui se sont exprimés.
Le groupe des employeurs félicite le gouvernement pour sa volonté de travailler en faveur du respect des obligations du gouvernement conformément à la convention, suite à la mission de haut niveau, et apprécie tout particulièrement la volonté du gouvernement d’agir rapidement. C’est pourquoi le groupe des employeurs saisit cette occasion pour encourager le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires pour achever sans plus attendre cette réforme et, en formulant cette recommandation, nous encourageons le gouvernement à procéder à ce travail dans des délais précis. Du point de vue des employeurs, ce processus de réforme devrait s’accompagner de consultations de bonne foi des organisations nationales d’employeurs et de travailleurs, et dans un esprit d’engagement au dialogue social en cours dans le pays.
Membres travailleurs – Mes remerciements aux délégués qui ont participé à cette discussion pour leur apport. Cela fait maintenant plusieurs années que le gouvernement algérien promet d’adapter la législation pour la rendre conforme à la convention, et le groupe des travailleurs demande au gouvernement de transmettre au Bureau, dans les plus brefs délais, un calendrier précis reprenant les étapes de la réforme prioritaire de la loi no 90-14 et de l’avant-projet de Code du travail.
Nous invitons également le gouvernement à saisir l’occasion de cette réforme pour introduire une série de modifications. Nous insistons en particulier sur les éléments suivants: premièrement, adopter des dispositions qui garantissent une protection efficace contre le licenciement et la discrimination syndicale; deuxièmement, assurer une réintégration rapide des délégués syndicaux suite à une décision judiciaire favorable; et, troisièmement, supprimer la condition exigeant la qualité de salarié pour pouvoir exercer des fonctions syndicales.
Ces éléments ne sont pas exhaustifs et nous appelons le gouvernement à mettre en œuvre l’ensemble des recommandations figurant dans le rapport de la mission de haut niveau.
En outre, nous invitons le gouvernement à procéder à l’enregistrement de l’ensemble des organisations syndicales qui sont en attente d’une reconnaissance et en particulier le SESS, la CGATA et le SNAPAP.
Nous demandons enfin au gouvernement d’adresser un rapport détaillé à la commission d’experts contenant les projets de réforme afin que la commission puisse les examiner lors de sa prochaine session en novembre.
L’Algérie est à un carrefour important de son histoire, et personne ne peut prédire le sens qu’elle empruntera. Il est essentiel de saisir cette opportunité pour jeter les bases d’une société fondée sur la liberté et écrire une histoire faite d’égalité et de dignité. En somme, il s’agit de semer la justice pour récolter la paix.
Conclusions de la commission
La commission a pris note des déclarations verbales du gouvernement et de la discussion qui a suivi.
La commission a noté positivement que le gouvernement a accepté une mission de haut niveau en mai 2019. La commission a exprimé sa préoccupation devant la persistance des restrictions au droit des travailleurs de constituer des organisations, fédérations et confédérations syndicales de leur choix et de s’y affilier et a noté avec préoccupation l’absence continue de progrès tangibles dans la mise en conformité de la législation avec la convention.
Prenant en compte l’exposé du gouvernement et la discussion qui a suivi, la commission prie instamment le gouvernement de:
- s’assurer que l’enregistrement des syndicats est, en droit comme dans la pratique, conforme à la convention no 87;
- traiter les demandes en suspens d’enregistrement de syndicats libres et indépendants qui répondent aux conditions énoncées dans la loi et permettre aux syndicats de se constituer et fonctionner librement;
- revoir la décision de dissoudre le syndicat SNATEGS;
- fournir systématiquement et promptement aux organisations syndicales toutes les informations détaillées et nécessaires pour leur permettre de prendre des mesures correctives ou de remplir des formalités supplémentaires en vue de leur enregistrement;
- modifier l’article 4 de la loi no 90-14 afin d’éliminer les obstacles à la constitution par des travailleurs d’organisations, de fédérations et de confédérations de leur choix, indépendamment du secteur auquel elles appartiennent;
- modifier l’article 6 de la loi no 90-14 afin de reconnaître le droit de tous les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations syndicales;
- prendre toutes les mesures appropriées pour s’assurer que, quelle que soit l’affiliation syndicale, le droit à la liberté syndicale peut être exercé dans des conditions normales de respect des libertés publiques et dans un climat exempt de violence, de pression et de menaces;
- s’assurer des droits à l’impartialité de l’enquête et à la régularité de la procédure afin de garantir la primauté du droit;
- réintégrer les agents de l’administration destitués sur la base d’une discrimination antisyndicale, lorsque cela se justifie;
- s’assurer que le nouveau projet de Code du travail est adopté sans autre délai et est conforme au texte de la convention no 87.
Prenant note de la récente mission de haut niveau du BIT qui s’est rendue dans le pays, la commission prie instamment le gouvernement de mettre en œuvre intégralement les recommandations formulées et de rendre compte des progrès accomplis à la commission d’experts avant sa prochaine session de novembre 2019.
Représentant gouvernemental – Ma délégation prend note des conclusions de la commission. Elle réitère son engagement pour donner suite aux recommandations de la commission d’experts. Il y a eu des progrès, et le gouvernement poursuivra son travail dans ce sens. Des plannings seront établis et permettront d’avoir toute la visibilité nécessaire sur les actions qui seront engagées à court terme et celles qui demanderont des démarches en vue de mener de larges concertations avec l’ensemble des partenaires sociaux, comme relevé lors des débats. La mise en œuvre des conclusions de la mission de haut niveau et les progrès et avancées seront portés à la connaissance de la commission avant novembre 2019, comme relevé dans les décisions.
Le gouvernement a communiqué les informations écrites ci-après.
Demandes de réintégration des travailleurs licenciés
La législation nationale prévoit des procédures de prévention et de règlement des conflits individuels de travail. La loi no 90-04 du 6 février 1990, modifiée et complétée, relative au règlement des conflits individuels de travail, a fixé des procédures de règlement des conflits individuels de travail que chaque travailleur et chaque employeur doivent respecter.
A ce titre, les cas des travailleurs nommément cités dans les conclusions de la 106e session de la Conférence internationale du Travail ont suivi les procédures prévues par la loi précitée quel que soit le sort du règlement auquel a abouti leur conflit individuel.
Dans ce cadre, il est nécessaire de rappeler que le gouvernement a toujours répondu aux demandes des organes compétents de l’OIT. A ce titre, et après vérification, il a été relevé que, sur les 86 travailleurs, 76 situations de travailleurs ont été réglées ou sont en cours de règlement. Les affaires sont devant les juridictions compétentes dans six cas et des demandes sont en cours d’exécution dans trois cas.
S’agissant de la situation de huit des dix travailleurs qui demeure, deux travailleurs ont été révoqués après accomplissement de l’ensemble des procédures légales et réglementaires, pour absences irrégulières et non-respect du règlement intérieur de l’entreprise, et trois travailleurs ont été licenciés pour fautes professionnelle graves.
A ce titre, le gouvernement observe que l’examen des dossiers des travailleurs a révélé qu’à aucun moment il n’a été constaté qu’il s’agit de sanction pour motifs d’exercice syndical, mais pour des raisons de fautes professionnelles prévues par la loi et le règlement intérieur des entreprises. Ces travailleurs ont usé de tous les recours prévus par la loi en matière de règlement des conflits individuels de travail, de la tentative de conciliation auprès des services de l’inspection du travail aux juridictions compétentes. Ainsi, la quasi-totalité des travailleurs nommément cités dans les conclusions de la 106e session sont en activité, excepté M. Benyahia Habib (SNAPAP-CGATA) de l’Université de Tiaret qui est à la retraite. Par ailleurs, il a été relevé que, parmi ces travailleurs, M. Arab Haddak (SNAPAP-CGATA) a été promu au grade d’agent d’administration.
S’agissant des fonctionnaires greffiers, ils sont en position d’activité. Le gouvernement joint toutes les pièces qui concernent la situation de tous les travailleurs cités dans les conclusions par l’organisme employeur.
Cas no 3210 devant le Comité de la liberté syndicale
Le gouvernement avait transmis toutes les informations sur la plainte devant le Comité de la liberté syndicale présentée par le Syndicat national autonome des travailleurs de l’électricité et du gaz (SNATEGS) (cas no 3210), à travers une communication du 18 décembre 2017, dans lequel il a été porté à la connaissance du BIT la dissolution volontaire du SNATEGS (copie jointe), ainsi que le procès-verbal de la dissolution volontaire du syndicat. Par ailleurs, par une communication du 5 mai 2018 relative au cas no 3210, le gouvernement avait demandé que ce cas soit clos.
Achèvement de la réforme du Code du travail
S’agissant de la demande relative au parachèvement de la réforme du Code du travail, le gouvernement avait fourni toutes les informations sur le processus d’élaboration du Code du travail, et il ne ménagera aucun effort dans le cadre de la concertation avec ses partenaires économiques et sociaux pour produire un Code du travail consensuel qui renforcera les acquis résultant de l’expérience de la mise en œuvre des lois sociales en vigueur et répondra aux attentes des acteurs de la vie économique.
Enregistrement des syndicats
En ce qui concerne le dossier d’enregistrement du présumé Syndicat algérien autonome des travailleurs des transports (SAATT), le dossier présenté ne répond pas aux conditions prévues par les dispositions de la loi, notamment son article 2. Il a été relevé des imprécisions dans la détermination de la catégorie professionnelle couverte par le statut. Ce dernier n’a pas inséré les dispositions que doit contenir le statut et qui sont énoncées aux dispositions de l’article 21 de la loi. Les intéressés n’ont pas répondu ni demandé des précisions sur leur dossier.
Pour ce qui est du dossier du Syndicat autonome des avocats en Algérie (SAAVA), le gouvernement rappelle que toute demande de constitution d’une organisation syndicale est soumise à un examen de conformité du dossier à la loi. A ce titre, il a été relevé de l’examen du statut du présumé syndicat des catégories de personnes qui ont qualité de travailleurs salariés et qualité d’employeurs. La législation nationale fait la distinction entre un syndicat de travailleurs salariés et un syndicat d’employeurs. La réponse a été notifiée aux intéressés les invitant à se conformer aux dispositions de la loi; à ce jour, les concernés n’ont pas mis leur dossier en conformité avec les dispositions de la loi.
S’agissant du dossier de la CGATA, en sus des informations déjà fournies par le représentant du gouvernement lors de la 106e session de la Conférence internationale du Travail en juin 2017, le prétendu président de la CGATA n’est issu d’aucun syndicat légalement enregistré et ne représente aucune organisation syndicale. Le gouvernement avait également informé l’OIT par envoi du 22 septembre 2013 (ci-joint une copie) que M. Malaoui Rachid a été révoqué de son poste de travail en respect des procédures légales et réglementaires pour abandon de poste pour absences irrégulières. Cette situation a fait perdre la qualité de salarié à ce dernier.
En Algérie, les organisations syndicales représentatives jouissent de prérogatives qui leur permettent notamment de négocier et de conclure des accords, et les conventions collectives d’avoir un local au sein de l’organisme employeur, un tableau d’affichage dans des lieux appropriés pour ses adhérents, un détachement au service de son organisation syndicale durant le mandat du syndicaliste. La participation des représentants de travailleurs à travers les délégués syndicaux est une condition légale dans la négociation des conditions d’emploi et de travail en vue de conclure les conventions et accords collectifs de travail. Les représentants des travailleurs au sein des commissions d’entreprise ou des commissions d’unité sont désignés par la structure syndicale la plus représentative ou, à défaut, par le comité de participation. Dans le cas où il n’existe ni structure syndicale ni comité de participation, ils sont élus par le collectif des travailleurs. Les représentants des travailleurs sont obligatoirement associés à toute décision concernant la mise en place de l’activité de médecine du travail au sein de l’organisme employeur. De même, les organisations syndicales représentatives de travailleurs et d’employeurs sont représentées par douze (12) représentants des travailleurs et douze (12) représentants des employeurs dans le Conseil national d’hygiène et de sécurité et de médecine du travail.
Par ailleurs et dans le cadre de la prévention et du règlement des conflits collectifs de travail et de l’exercice du droit de grève, les représentants des travailleurs tiennent des réunions périodique avec les employeurs en vue d’examiner en commun la situation des relations socioprofessionnelles et des conditions générales de travail au sein de l’organisme employeur. Au niveau national, l’Algérie a acquis une grande expérience dans le dialogue social, à travers les rencontres tripartites qui regroupent le gouvernement et les organisations syndicales représentatives d’employeurs et de travailleurs. Ces espaces de concertation et de négociation ont abouti à des accords portant sur la vie économique et sociale, à la signature de pactes économiques et sociaux, ainsi qu’à la création d’institutions et autres, ci-joint une synthèse sur les rencontres tripartites et bipartites.
Cas des travailleurs cités nominativement dans les conclusions de la 106e session de la Conférence internationale du Travail (juin 2017) -- [Tableau non inclus - Consultable dans le CRP 9B(Rev.): https://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---ed_norm/---relconf/documents/meetingdocument/wcms_632920.pdf#page=46]
En outre, devant la commission, un représentant gouvernemental a marqué son étonnement de voir une fois de plus l’Algérie parmi les cas examinés par la Commission de la Conférence et a regretté un refus récurrent de reconnaître les progrès réalisés dans son pays dans la protection des libertés et des droits humains au travail. La ratification de 60 conventions de l’OIT, dont les huit fondamentales, pour la plupart dès l’indépendance du pays en 1962, montre l’attachement de l’Algérie à asseoir son développement économique et social sur les principes des conventions et traités internationaux. En outre, la Constitution nationale réserve une place importante aux libertés et aux droits reconnus à tous les citoyens dans le monde du travail, notamment la liberté syndicale et le droit de grève. Le gouvernement a fourni, en 2015 et 2017, toutes les informations requises sur des cas précis ou sur le Code du travail. L’année passée, lors de l’examen de ce cas, parmi les 32 interventions des membres de la commission, 26 ont appuyé les progrès réalisés par le gouvernement. Ne pas tenir compte de cette réalité constitue un déni des règles démocratiques. Rappelant que toute activité s’exerce dans le respect de la légalité, comme prescrit à l’article 8, paragraphe 2, de la convention, l’orateur a réitéré sa déclaration de l’année passée à la commission au sujet du Syndicat autonome des travailleurs du gaz et de l’électricité (SNATEGS), à savoir que ladite organisation syndicale fonctionnait normalement et que ses membres ont décidé de sa dissolution volontaire, cela conformément aux dispositions législatives et réglementaires du travail ainsi qu’à son statut. Les autorités ont simplement pris acte de cette dissolution en octobre 2017. S’agissant des cas de travailleurs cités dans les allégations, l’orateur s’est référé aux informations détaillées fournies par le gouvernement par écrit à cet égard et a indiqué que sur 86 cas répertoriés, 76 ont été réglés par une réintégration au poste de travail, par une réaffectation à un autre poste de travail, ou encore par un départ à la retraite à l’initiative du travailleur concerné. S’agissant des allégations dénonçant les violences policières lors de manifestations, il est rappelé que le gouvernement veille à la sécurité et au bien-être des citoyens et à la sauvegarde des biens. Ainsi, l’intervention des services de la police n’est justifiée que par la nécessité de préserver l’ordre public. Cette intervention s’effectue en outre conformément à la loi et en respectant les pratiques internationales. Cependant, comme il est admis de manière globale dans tous les pays qui disposent d’une réglementation encadrant les réunions et les manifestations, toute action menée en dehors du cadre prévu par la loi ne saurait être autorisée. Rappelant que la finalisation du projet de Code du travail nécessite non seulement un travail de réflexion approfondie avec les partenaires sociaux, mais aussi de recueillir l’adhésion des acteurs du monde du travail, l’orateur a réitéré la volonté du gouvernement d’achever ce travail dans le cadre de consultations tripartites. Il faut cependant accepter que, pour en assurer la réussite, un tel processus prend du temps. Il est aussi rappelé que plus de 70 pour cent des commentaires du Bureau sur le projet de texte initial ont été pris en compte par le gouvernement.
Le paysage syndical de l’Algérie est composé de 101 organisations représentatives, dont 65 organisations de travailleurs qui se sont organisées en toute liberté conformément à la loi. A cet égard, les formalités d’enregistrement des organisations syndicales sont prévues par la loi. Les cas signalés de constitution d’organisations syndicales, telles que la Confédération générale autonome des travailleurs en Algérie (CGATA), le Syndicat autonome des avocats en Algérie (SAAA) ou encore le Syndicat algérien des travailleurs des transports (SATT), ont fait l’objet d’observations de la part de l’administration, dans le souci de respecter les dispositions légales, transmises aux membres fondateurs afin qu’ils clarifient certaines questions concernant notamment le double statut des membres fondateurs ou encore l’absence d’un statut de salarié. Les retards pour régler les dossiers concernés incombent aux demandeurs. En conséquence, l’encadrement légal de l’enregistrement des syndicats ne saurait être assimilé à une intervention de l’autorité publique de nature à limiter ou à entraver l’exercice du droit syndical. Par ailleurs, la législation en vigueur s’inscrit totalement dans le cadre des normes internationales qui visent la promotion de la négociation collective, et aux termes desquelles des mesures adaptées aux circonstances nationales sont prises pour favoriser le dialogue social et la négociation collective. A titre indicatif, il a été enregistré à ce jour 82 conventions collectives de branche, 167 accords collectifs de branche et 3 817 conventions collectives ont été conclues au niveau de l’entreprise, auxquelles il faut ajouter 17 238 accords collectifs d’entreprises. Ainsi, le dialogue social est une pratique réelle et concrète en Algérie comme en attestent les rencontres tripartites et bipartites périodiques sur les questions économiques, sociales et de développement. En outre, le gouvernement et les partenaires économiques et sociaux ont signé un Pacte national économique et social ainsi qu’un Pacte national économique et social de croissance qui constituent la valorisation des acquis sociaux et des réformes économiques avec l’engagement des partenaires sociaux. Cet exemple de dialogue et de concertation sociale est partagé, grâce à l’appui du Bureau, avec des pays africains dans le cadre de la coopération Sud-Sud. Souhaitant apporter un éclairage sur les suites données à la proposition d’une mission de contacts directs sur place contenue dans les conclusions de 2017 de la Commission de la Conférence, l’orateur a indiqué que son gouvernement avait donné son accord pour qu’une telle mission soit effectuée en février 2018 et avait accepté sans réserve la composition de cette mission. Le Bureau avait par la suite proposé des termes de références que le gouvernement a acceptés pour l’essentiel, rejetant deux points sur les 12 proposés. Par la suite, le gouvernement avait finalisé le programme des réunions, y compris avec des membres du gouvernement, et s’était préparé à accueillir la mission qui, en fin de compte, n’a pu être effectuée. Suite à cette annulation, le gouvernement a tenu à s’entretenir avec le Bureau et les partenaires pour clarifier sa position. Il a ainsi expliqué ne pouvoir cautionner des personnes concernées par les deux termes de références non acceptées au motif que ces derniers développent leurs activités sans aucune base légale afin de provoquer la déstabilisation sociale du pays. Enfin, le gouvernement continue ses consultations avec le Bureau sur cette question, tel que le démontre l’entretien que la délégation gouvernementale conduite par le ministre du Travail a tenu avec le Bureau peu avant le début des travaux de la Conférence. L’orateur a conclu en réaffirmant le soutien du gouvernement envers les réformes préconisées par le Directeur général du BIT et, en particulier, la promotion du tripartisme, élément fondamental de son fonctionnement. A cet égard, le gouvernement soutient la nécessité de réformer le fonctionnement de la Commission de la Conférence pour une participation tripartite à toutes les étapes du contrôle pour davantage de transparence, d’équité et de fidélité aux principes fondamentaux de l’OIT.
Les membres travailleurs ont souligné que ce cas fait à nouveau l’objet d’un examen pour la simple raison que le gouvernement a refusé de tenir compte des recommandations formulées par la Commission de la Conférence l’année dernière. Ils s’interrogent sur la démarche singulière du gouvernement qui a accusé, dans une communication diffusée dans le cadre de l’Organisation arabe du travail (OAT), le Bureau de partialité et la Commission de la Conférence de pratiquer une politique de deux poids, deux mesures. Une simple lecture des statistiques des cas examinés par la commission ces dernières années suffit pour démontrer que ces accusations sont infondées. Les membres travailleurs ont regretté que le gouvernement n’ait donné aucune suite aux conclusions adoptées l’année dernière par la Commission de la Conférence, en particulier celle relative à l’envoi d’une mission de contacts directs avant la présente session de la Conférence devant faire rapport à la commission d’experts sur les progrès accomplis. Par ailleurs, aucun progrès n’a été réalisé concernant le nouveau Code du travail qui en est au stade de projet depuis 2011 et au sujet duquel le gouvernement n’indique pas les commentaires de la commission d’experts à son égard qui ont été pris en compte. Aucun progrès non plus n’a été accompli pour modifier l’article 6 de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 qui limite le droit de fonder une organisation syndicale aux personnes de nationalité algérienne d’origine ou acquise depuis au moins dix ans. Si le gouvernement a indiqué qu’une disposition en cours de discussion avec les partenaires sociaux abaisserait l’ancienneté requise à cinq ans, cette modification ne serait toujours pas conforme à l’article 2 de la convention no 87 qui prévoit qu’aucune distinction ne peut être faite quant au droit des travailleurs et des employeurs de constituer des organisations de leur choix. A cet égard, la commission d’experts dans son étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales a rappelé que ceci implique que tous ceux qui séjournent sur le territoire d’un Etat, qu’ils aient ou non un permis de résidence, bénéficient des droits syndicaux prévus par la convention, sans aucune distinction fondée sur la nationalité. Enfin le gouvernement n’a pas fait état de progrès dans la modification des dispositions qui ont pour effet de limiter la constitution des fédérations et confédérations. Dans sa déclaration, le gouvernement indique, comme il l’a fait l’année passée, que le délai pour effectuer ces modifications peut paraître long mais, vu l’importance du texte, il conviendrait de rechercher l’adhésion la plus large possible. Si les membres travailleurs accueillent favorablement l’importance que le gouvernement semble attacher à la concertation, ils s’interrogent sur le fait qu’il faille une concertation de plus de douze ans sur des modifications relativement simples à adopter. En outre, dans le contexte actuel où certaines organisations sont exclues des cadres de consultation, les membres travailleurs considèrent que les concertations mentionnées ne sont pas conformes aux normes de l’OIT. S’agissant de la question de l’enregistrement des syndicats, la commission d’experts continue de faire état de sa préoccupation devant des délais particulièrement longs pour l’obtention de l’enregistrement, ou des refus sans justification des autorités d’enregistrer les syndicats autonomes. Il s’agit d’un procédé récurrent de la part des autorités. Ainsi, la CGATA demande depuis 2015 son enregistrement. Suite au dépôt de son dossier, elle a reçu une lettre qui se borne à indiquer que la demande est refusée pour cause de non-conformité avec la règlementation. Aucune suite n’a depuis été donnée à sa demande de justification. Il en résulte qu’à ce jour la CGATA est dans l’impossibilité de savoir en quoi sa demande d’enregistrement serait non conforme à la réglementation. De plus, en raison de cette non-reconnaissance, la CGATA est exclue de la participation aux structures tripartites de consultation, si bien qu’elle n’a pas été consultée sur la réforme du Code du travail en cours. Les membres travailleurs ont rappelé que certaines formalités préalables à l’enregistrement ne sont compatibles avec la convention que dans la mesure où elles ne donnent pas aux autorités un pouvoir discrétionnaire pour refuser la constitution d’une organisation et que ces exigences ne constituent pas un obstacle aboutissant en fait à une interdiction pure et simple.
Les membres travailleurs ont fait état de plusieurs cas d’ingérence des autorités dans le fonctionnement des syndicats: i) s’agissant du cas du SNATEGS, les membres travailleurs observent qu’un communiqué de presse du ministère du Travail du 3 décembre 2017 annonçait la dissolution volontaire du SNATEGS, selon les dispositions de la loi 90-14 de 1990. En vertu de l’article 29 de cette loi, la dissolution volontaire est prononcée par les membres de l’organisation syndicale ou leurs délégués régulièrement désignés conformément aux dispositions statutaires. Or il est à signaler que selon les statuts du SNATEGS, déposés auprès du ministre du Travail, la dissolution de l’organisation syndicale doit être décidée lors d’un congrès national du syndicat SNATEGS. L’assemblée générale du 7 octobre 2017 à laquelle le gouvernement fait référence dans son communiqué de presse, n’avait donc ni la compétence, ni l’autorité pour décider cette dissolution. Il est regrettable que suite à cette décision, les comptes bancaires du syndicat SNATEGS aient été gelés; ii) le 4 février 2018, la police a indiqué au Syndicat algérien des éditeurs de la presse électronique, qui est un syndicat d’employeurs en voie de constitution, que son assemblée générale prévue pour le lendemain était illégale faute d’une demande d’autorisation préalable. Or la loi ne prescrit pas de demander une autorisation préalable pour la constitution d’un syndicat professionnel dans un espace privé un jour de semaine. Il s’agit ici simplement d’une autre atteinte à la liberté syndicale; iii) le 6 mars 2018, hors de tout cadre légal, le gouvernement a demandé, uniquement via le site Internet du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, aux 65 organisations syndicales agréées à démontrer leur représentativité. Le formulaire imposé par le ministère obligeait les organisations syndicales à indiquer, entre autres, la liste nominative de leurs adhérents, leurs postes et leurs numéros d’immatriculation à la sécurité sociale. Au terme du délai de trois semaines imposé, seules 30 organisations ont pu déposer leurs dossiers. Sur ce nombre, selon le gouvernement, seules 17 auraient satisfait aux critères exigés. Les membres travailleurs rappellent à cet égard que la loi contient des dispositions qui permettent de déterminer la représentativité d’une organisation syndicale si bien que cette initiative superflue des autorités s’apparente à une énième atteinte à la liberté syndicale. Insistant une nouvelle fois sur le lien entre l’exercice de la liberté syndicale et le respect des libertés publiques, les membres travailleurs ont rappelé les cas de harcèlement et de persécution à l’encontre des dirigeants syndicaux indépendants affiliés à la CGATA, et en particulier de: i) M. Khaddour Chouicha, membre du bureau exécutif de la CGATA, arrêté par la police à la terrasse d’un café avec des militants des droits de l’homme au motif de rassemblement non autorisé; ii) M. Abedlkader Kouafi, secrétaire général du SNATEGS, et M. Slimane Benzine, président de la Fédération nationale des travailleurs de la sûreté interne, tous deux condamnés à des peines de prison et d’amende pour avoir dénoncé les mauvaises conditions de travail et les pratiques de harcèlement sexuel à l’encontre de travailleuses; iii) M. Raouf Mellal, président du SNATEGS, qui a fait l’objet de plusieurs plaintes en diffamation dans le but de l’intimider; à cet égard, une décision de justice prononcée en novembre 2017 ordonnant sa réintégration dans ses fonctions et en sa qualité de dirigeant syndical est toujours en attente d’exécution; et iv) M. Mekhfi Djeha, licencié en février 2018 après avoir informé sa hiérarchie de son mandat de délégué d’un syndicat indépendant. Les membres travailleurs ont conclu en regrettant profondément le fossé entre la situation du mouvement syndical indépendant en Algérie et les principes de la liberté syndicale de l’OIT.
Les membres employeurs ont rappelé que la Commission de la Conférence avait examiné ce cas en 2014, en 2015 et en 2017. La discussion avait porté sur des questions relatives aux obstacles à la constitution d’organisations de travailleurs, dont l’enregistrement des syndicats en droit et dans la pratique. Le gouvernement avait indiqué que ces problèmes seraient réglés dans le nouveau Code du travail. Les membres employeurs ont rappelé qu’ils avaient pris note, en 2017, d’informations sur le processus de dialogue social dans le pays, de l’engagement du gouvernement à rencontrer les parties pour discuter de ces questions et du fait que le projet de Code du travail, en cours d’élaboration depuis 1990, n’avait pas encore été adopté. En 2017, la Commission de la Conférence avait formulé des recommandations sur l’enregistrement des syndicats, sur les obstacles à la constitution de fédérations et de confédérations de leur choix, par les organisations de travailleurs, ainsi que sur la nécessité de veiller à ce que la liberté syndicale puisse s’exercer dans un climat exempt d’actes d’intimidation et de violence et à ce que le nouveau projet de Code du travail soit conforme à la convention. La Commission de la Conférence avait également instamment prié le gouvernement d’accepter une mission de contacts directs avant la prochaine session de la Conférence. A cet égard, la commission d’experts note que la mission de contacts directs n’a pas été acceptée sans restriction. Tout en remerciant le gouvernement d’avoir accepté 10 des 12 points du mandat de la mission, les membres employeurs se sont dits déçus que la mission n’ait pas été acceptée sur la base de l’ensemble des termes proposés par le Bureau. Si une mission de contacts directs avait obtenu des informations, on aurait peut-être pu éviter une discussion au sein de la Commission de la Conférence. Sans informations émanant d’une mission de contacts directs, la discussion ne peut que s’appuyer sur le rapport de la commission d’experts. Compte tenu des conclusions de la Commission de la Conférence de 2017, les membres employeurs ont salué l’engagement du gouvernement en faveur du dialogue social tripartite et invité le gouvernement à achever la réforme du Code du travail, en consultation avec les partenaires sociaux. Cette réforme doit porter sur les conditions requises pour obtenir une autorisation préalable et sur la reconnaissance du droit de tous les travailleurs de constituer des syndicats. Elle doit garantir que l’enregistrement des syndicats sera mis en conformité avec les dispositions de la convention, en droit et dans la pratique, et que la liberté syndicale s’exercera sans intimidation ni violence à l’encontre des travailleurs, des syndicats ou des employeurs. Les membres employeurs ont dit espérer qu’il sera possible d’aller de l’avant et de réaliser des progrès tangibles en l’espèce, sur la base de recommandations simples et concrètes. Il convient de prier instamment le gouvernement de fournir un rapport complet à la commission d’experts et d’accepter une mission de contacts directs, dans un esprit d’ouverture et de transparence, afin que des informations complètes puissent être recueillies sur les efforts déployés pour appliquer la convention.
La membre travailleuse de l’Algérie a déclaré que la Conférence est une plate-forme mondiale qui permet aux partenaires sociaux de prendre la mesure de l’engagement des Etats Membres à l’égard des instruments qu’ils ont ratifiés, en toute impartialité et objectivité. Cependant, certains cas souffrent précisément d’un manque d’objectivité et d’intégrité. Les syndicats participent à la sensibilisation des travailleurs et améliorent leurs conditions de travail et de vie. Cependant, le mouvement syndical souffre actuellement d’une vision opportuniste du syndicalisme, celui-ci étant désormais plutôt utilisé comme un outil servant des fins qui n’ont rien à voir avec la vie et la souffrance des travailleurs. Cela représente une menace pour les travailleurs et pour la crédibilité de l’OIT et de ses mécanismes. Les mécanismes et méthodes de l’OIT doivent être réformés afin d’en préserver la réputation, la crédibilité et l’efficacité. La campagne menée contre l’Algérie et certains autres pays repose sur des arguments fallacieux. Une législation datant d’un quart de siècle est soudain accusée de violer les obligations. Des manœuvres tentent de démanteler et d’affaiblir le mouvement syndical algérien, et il existe des projets contre les mouvements syndicaux originels en Algérie et ailleurs. Cela a des conséquences préjudiciables sur le principe d’un syndicalisme digne de ce nom ainsi que sur l’action de l’OIT. L’oratrice a instamment prié tous ceux qui respectent l’OIT de plaider pour un réexamen des cas et d’insister sur l’importance des preuves matérielles justifiant ces cas.
Un membre employeur de l’Algérie a exprimé son étonnement quant au grief adressé à l’Algérie de manière récurrente depuis quelques années, considérant le nombre important d’organisations syndicales de travailleurs enregistrées depuis le début des années quatre-vingt-dix et le fait que le pluralisme syndical et le droit de grève soient inscrits dans la loi fondamentale du pays. Il ne se passe pas un mois sans que des mouvements de grève ne soient déclenchés en Algérie, la plupart du temps en violation de la réglementation régissant le droit de grève et paralysant des secteurs vitaux tels que la santé, l’éducation, les transports et autres secteurs économiques. Les pouvoirs publics ont toujours privilégié le recours au dialogue et à la négociation pour résoudre ces conflits et n’ont jamais adopté des mesures répressives à l’encontre des travailleurs et des syndicats ayant déclenché ces grèves. Les sanctions prises à l’encontre des travailleurs ne sont pas liées à leur activité syndicale, mais relèvent plutôt de troubles à l’ordre public et d’entraves à l’activité au sein des lieux de travail, ce que toutes les législations nationales répriment. L’Algérie s’est distinguée en adoptant une politique visant à privilégier le dialogue et la concertation avec les partenaires économiques et sociaux, comme l’attestent les deux pactes économiques et sociaux signés en 2006 et 2014 et le nombre de réunions tripartites et bipartites organisées pour débattre des questions liées au développement économique du pays. En outre, des centaines de conventions et d’accords collectifs ont été signés entre les partenaires sociaux au sein des entreprises. L’orateur a déclaré que l’Algérie aspire à construire un Etat de droit et veille donc à la stricte application de la loi dans tous les domaines, y compris en matière d’exercice du droit syndical et d’organisation de manifestations publiques. Il ne s’agit donc pas d’entraves à la liberté syndicale, mais plutôt du respect des dispositions législatives régissant l’activité syndicale. Ces explications ont été fournies par le gouvernement à maintes reprises, sans qu’elles soient prises en compte par la commission.
Une autre membre employeuse de l’Algérie a souligné l’attachement du gouvernement et des employeurs de son pays au respect des normes internationales du travail et à la promotion du dialogue social qui s’expriment tant dans les institutions tripartites et le pacte économique et social existants en Algérie que dans la coopération de longue date entre l’Algérie et l’OIT. Elle a pris acte du travail de la commission d’experts et exprimé le souhait de son organisation, le Forum des chefs d’entreprise, que se poursuive une collaboration bénéfique pour toutes les parties prenantes, ce qui requiert cependant une exigence d’objectivité et de transparence conformément aux valeurs de l’OIT. Concernant la réforme du Code du travail, il s’agit d’un processus important, complexe et sensible qui doit assurer un équilibre entre les différentes parties qui composent l’entreprise et permettre la construction d’une économie moderne. Tant les employeurs que les travailleurs se doivent d’accompagner les efforts du gouvernement pour mener à bien ce processus de concertation de manière sereine et consolider durablement une croissance économique créatrice de richesse, d’emplois et de paix sociale. En matière de liberté syndicale et de droit de grève, l’oratrice a souligné que la Constitution algérienne garantit toutes les libertés fondamentales, y compris l’exercice de la liberté syndicale et du droit de grève, ces derniers s’exerçant dans le cadre du strict respect de la loi. Le dispositif juridique mis en place en application de la loi fondamentale du pays est en conformité avec l’esprit et la lettre des conventions et instruments internationaux ratifiés par le pays. Dans ce contexte, le pluralisme syndical consacré par la Constitution depuis 1989 a permis à l’Algérie d’enregistrer une intense activité syndicale, aussi bien dans le secteur privé que dans la fonction publique. Il en résulte que, tel qu’indiqué par le gouvernement, le cadre normatif en vigueur ainsi que son application pratique respectent les principes de la convention en matière de liberté syndicale et d’exercice du droit de grève. L’oratrice a finalement signalé qu’il serait opportun de prévoir, en amont de la rédaction finale du rapport de la commission d’experts, des temps d’échanges avec les experts afin d’assurer qu’ils détiennent des informations fiables.
La membre gouvernementale du Mali a noté avec satisfaction les actions entreprises par l’Algérie pour le respect de la convention. Saluant les efforts fournis, notamment en ce qui concerne le renforcement du dialogue social à travers les rencontres tripartites, des espaces de concertation et de négociations, elle a encouragé l’Algérie à continuer dans son travail constant pour le respect de la liberté syndicale.
Un observateur représentant la Confédération syndicale internationale (CSI), s’exprimant au nom de la Confédération générale autonome des travailleurs en Algérie (CGATA), a déploré que le gouvernement fasse l’objet de plaintes récurrentes de la part des organisations syndicales et qu’il refuse de coopérer avec l’OIT. Depuis l’année dernière, quand ce cas a été discuté au sein de cette commission, il n’y a eût aucune amélioration, et d’autres entraves ont été ajoutés au libre exercice du droit syndical. Aucune recommandation de la commission d’experts n’a été retenue concernant les questions suivantes: les syndicalistes licenciés réintégrés ont été rétrogradés; l’enregistrement des organisations syndicales; la révision du projet de Code du travail; l’imposition d’un agenda à la mission de suivi du BIT qui interdisait la rencontre des responsables des organisations syndicales plaignantes. La répression continue dirigée contre les représentants syndicaux, en particulier le président de la CGATA (M. Rachid Malaoui) et le président du SNATEGS (M. Raouf Mellal), le coordonnateur national du Syndicat des enseignants du supérieur (SESS) (M. Kaddour Chouicha) et le responsable de la Fédération des travailleurs de la justice affiliée au Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique (SNAPAP) (M. Mourad Ghedia).
La membre gouvernementale du Liban a relevé que le gouvernement prend des mesures pour s’acquitter de ses obligations internationales et a voulu croire que tout sera fait pour y parvenir. Elle a accueilli avec satisfaction les mesures que l’Algérie a déjà prises, notamment l’adoption du Pacte national économique et social de croissance. Le dialogue social qui est déjà en place doit être encouragé.
Un observateur représentant IndustriALL Global Union a déclaré que le pluralisme syndical dont se revendique le gouvernement algérien n’est qu’un pluralisme de forme et que la preuve de cela se retrouve dans les terribles campagnes de répression à l’encontre du SNATEGS, malgré la ratification par l’Algérie de la plupart des conventions internationales consacrées aux libertés syndicales. A cet égard, 1 114 personnes impliquées ont été traduites devant la justice et 12 délégués syndicaux ont été poursuivis pour des affaires fabriquées et menacés de peines de prison pour avoir exercé leur droit de grève. L’orateur a fait part de sa propre condamnation à dix-huit mois d’emprisonnement ainsi que de plusieurs autres exemples de cas tous arbitraires, dans le cadre desquels un nombre important de dirigeants syndicaux ont été licenciés. Le ministère du Travail a non seulement refusé d’appliquer l’article 56 de la loi no 90-14 sur les modalités d’exercice du droit syndical, selon lequel un délégué syndical doit être réintégré dans son poste de travail en cas de violation de la loi, mais a également dissous le syndicat deux fois: la première par l’entremise de l’adoption d’un décret ministériel en mai 2017 et la deuxième par la tenue d’une réunion dite de «dissolution volontaire». Dans ces deux cas, le ministère du Travail a refusé d’appliquer les lois relatives à la liberté syndicale et a outrepassé la compétence du pouvoir judiciaire, qui seul a le pouvoir de dissoudre les syndicats conformément aux articles 27 et suivants de la loi no 90-14. La liberté syndicale est maintenant une illusion en Algérie, où les syndicats sont muselés et où celui qui tente d’exposer la détérioration des conditions sociales des travailleurs ou la mauvaise gestion des entreprises est condamné à l’emprisonnement pour diffamation. Finalement, l’orateur a exprimé sa préoccupation non seulement face aux peines d’emprisonnement, mais aussi face aux licenciements et à la politique d’agression du gouvernement algérien contre les dirigeants syndicaux et tous ceux qui essaient de s’engager dans une activité syndicale.
Le membre gouvernemental de l’Erythrée a déclaré appuyer sans réserve la position du gouvernement algérien en ce qui concerne l’application de la convention. La commission doit apprécier à leur juste valeur les mesures prises par le gouvernement pour harmoniser sa législation avec les normes internationales du travail applicables grâce à des consultations tripartites, en particulier en ce qui concerne la réforme de la législation du travail en cours. L’orateur estime lui aussi que les méthodes de travail de la Commission de la Conférence doivent être revues, en particulier en ce qui concerne les critères appliqués pour choisir les cas qui doivent figurer dans la liste, afin de garantir la transparence et la participation de tous.
Un observateur représentant l’Internationale des services publics (ISP) a fait part de la situation du Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique (SNAPAP), syndicat affilié. A cet égard, il précise que les autorités ont réussi à mettre sur pied un syndicat clone du SNAPAP dont le dirigeant participe aux travaux de la Conférence internationale du Travail. Cette manœuvre ayant pour objectif de tromper les membres de la Commission de la Conférence. Cependant, au niveau national le SNAPAP original fait l’objet d’ingérence dans ses activités dans la mesure où à chaque fois qu’il tente de constituer une section syndicale dans une administration donnée, les adhérents potentiels font l’objet d’intimidations afin qu’ils adhèrent au syndicat clone par les services de sécurité et l’administration locale. En outre, des pressions sont exercés de toutes parts afin d’empêcher le SNAPAP de pouvoir louer des locaux syndicaux. Enfin, l’orateur a regretté qu’un responsable de l’ISP qui devait effectuer une mission sur place avec le SNAPAP se soit vu refuser un visa d’entrée par les autorités algériennes.
Le membre gouvernemental de la République bolivarienne du Venezuela s’est félicité des informations communiquées par le gouvernement sur le respect de la convention, informations qui soulignent les bonnes pratiques utilisées en matière de dialogue social en vue de promouvoir les relations professionnelles et l’exercice du droit syndical. Le gouvernement s’est dit préoccupé qu’on lui pose de nouveau des questions sur le droit syndical, alors qu’il avait déjà fourni des informations sur des cas précis et sur le projet de Code du travail en 2015 et 2017. Il escomptait que les progrès accomplis seraient évalués. La République bolivarienne du Venezuela encourage le gouvernement à continuer de promouvoir le travail décent et le renforcement des droits des travailleurs dans le cadre de la convention. Les plaintes à l’encontre du gouvernement provenant d’individus ou d’organisations qui n’appartiennent pas au monde du travail sont également sources de préoccupation. Comme le dit le gouvernement, le pays connaît une activité syndicale importante qui a permis la ratification de bon nombre de conventions collectives sur la base d’un dialogue social permanent et efficace, lequel a conduit à la signature d’un pacte économique et social de croissance, ainsi que de divers accords dans le domaine socio économique. Enfin, il convient d’attirer l’attention sur la résurgence d’une politique agressive contre l’Algérie qui vise à restreindre l’évolution sociale du pays et à nier ses valeurs de justice sociale, ce dont la commission devrait rendre compte dans ses conclusions.
La membre travailleuse des Etats-Unis a rappelé que le SNATEGS a été dissout par le ministère du Travail, sans que ce syndicat puisse faire autrement. Suite à des actions pacifiques menées en réaction à cette décision, des dirigeants du SNATEGS ont été arrêtés. Par la suite, le SNATEGS a organisé une manifestation pacifique pour exiger du gouvernement de mettre un terme à la privatisation des entreprises nationales, de respecter la liberté syndicale et de réintégrer les travailleurs et les dirigeants syndicaux de l’entreprise d’énergie nationale licenciés. La police a arrêté un millier de manifestants. La détention de dirigeants syndicaux pour des rassemblements non autorisés présumés ne concerne pas uniquement le SNATEGS. M. Kaddour Chouicha, coordinateur national du SESS, fait face à des accusations similaires et, dans l’université où il travaille, les enseignants se sont vu imposer un lock-out. La détention de dirigeants syndicaux, la dissolution présumée du SNATEGS et le lock-out des membres du SESS sont des actes qui contreviennent à la convention et qui concernent des employeurs publics. La législation sert à priver les travailleurs de leur liberté syndicale, en sanctionnant les dirigeants syndicaux et les syndicalistes et en les empêchant de se rassembler. La réforme de la législation progresse beaucoup trop lentement. Il est très préoccupant qu’une telle situation se produise dans le secteur public, le gouvernement étant responsable de la lenteur de l’éventuelle mise en œuvre des réformes recommandées par la Commission de la Conférence et d’autres mesures à l’examen. L’orateur a recommandé d’adopter les mêmes conclusions que l’année précédente, en mettant l’accent sur la nécessité de procéder aux réformes sans retard excessif.
Le membre employeur du Qatar a rappelé que le cas de l’Algérie est unique. L’Algérie a ratifié plus de 60 conventions de l’OIT et compte plus d’une centaine de syndicats actifs. En tant qu’employeurs, ils ont toujours considéré la stabilité de l’environnement économique comme étant le principal objectif pour permettre le développement économique. Tout problème dans l’environnement économique d’un pays voisin ou d’un pays de la région a des répercussions néfastes sur l’environnement économique du pays en question. L’Algérie ne mérite pas de figurer sur la liste des 24 cas examinés par la Commission de la Conférence. Ce cas doit être clos, et le gouvernement doit être invité à résoudre les problèmes soulevés par sa réglementation et ses cadres juridiques.
La membre gouvernementale de l’Etat plurinational de Bolivie a remercié le gouvernement d’avoir expliqué que la liberté syndicale est pleinement protégée par la législation du pays et indiqué que des travailleurs licenciés avaient été réintégrés, point qui doit être pris en compte dans les conclusions de la Commission de la Conférence. L’Etat plurinational de Bolivie reconnaît les droits syndicaux comme droits fondamentaux.
Le membre travailleur du Brésil a déploré l’augmentation des attaques violentes perpétrées par le gouvernement algérien contre les travailleurs. En particulier, les médecins affiliés au Comité autonome des médecins résidents algériens (CAMRA), en grève depuis plusieurs mois, ont été brutalement réprimés par la police lors de manifestations organisées entre janvier et mai 2018 à Alger et à Oran. En outre, plusieurs médecins ont été arbitrairement détenus et relâchés très tard dans la nuit dans des endroits isolés. Le 4 janvier 2018, après avoir interdit à des centaines de médecins de la CAMRA de protester devant l’hôpital universitaire «Mustafa Pacha» à Alger, la police les a brutalement réprimés, causant de graves blessures. Des arrestations arbitraires des membres de la Coordination des médecins ont également eu lieu. Enfin, le 20 janvier 2018, la police algérienne a brutalement réprimé encore une fois un rassemblement pacifique organisé par le SNATEGS-CGATA et arrêté un grand nombre de manifestants pacifiques, notamment des femmes syndicalistes membres du SNAPAP. Enfin, l’orateur a appelé le gouvernement à garantir la liberté syndicale sur la base du dialogue social tripartite.
Le membre gouvernemental des Etats-Unis a noté que le gouvernement continue de faire état des progrès réalisés dans le cadre du processus entamé en 2011 pour modifier le Code du travail. L’engagement du gouvernement se traduit dans le dialogue qu’il entretient avec la commission d’experts sur le projet de loi ainsi que dans l’action qu’il mène pour mener des consultations avec les acteurs tripartites. L’orateur s’est dit préoccupé par l’annulation de la mission de contacts directs de l’OIT qui avait été demandée par la Commission de la Conférence en 2017 parce que le gouvernement ne garantissait pas la tenue de réunions avec des organisations syndicales indépendantes. Des syndicats non enregistrés continuent de signaler des retards dans les enregistrements et certains cas de refus. Le gouvernement est invité à prendre des mesures pour résoudre ces problèmes. Il devrait accepter une mission tripartite de l’OIT et garantir la tenue de réunions avec toutes les parties prenantes concernées, dont des organisations syndicales indépendantes. Les recommandations formulées par la mission doivent contenir un plan d’action assorti de délais qui prévoit des sanctions applicables à des violations spécifiques des droits des travailleurs. Le gouvernement doit également veiller à ce que les syndicats puissent exercer leurs activités dans un environnement exempt d’actes d’intimidation, établir une procédure d’enregistrement des syndicats transparente et conforme aux normes internationales et faire en sorte que les demandes d’enregistrement des syndicats soient traitées dans les meilleurs délais.
Le membre gouvernemental de la Libye a déclaré que la volonté du gouvernement d’appliquer la convention se reflète dans sa législation nationale qui appuie la liberté syndicale, ainsi que dans l’article 70 de la Constitution de 2016, qui reconnaît le droit de liberté syndicale à tous les citoyens. La réponse détaillée du représentant gouvernemental confirme que le gouvernement prend actuellement toutes les mesures nécessaires et positives pour résoudre les cas individuels qui posent problème et qu’il ne reste que peu de cas individuels concernant les travailleurs, ce qui est au cœur des efforts de rapprochement entre les inspecteurs du travail et les juridictions compétentes. En outre, 88 pour cent des affaires ont été réglées. Le gouvernement a signé le Pacte national économique et social de croissance et plusieurs réunions bilatérales et tripartites entre partenaires sociaux ont suivi. Concernant l’achèvement du processus relatif à la réforme du travail, le gouvernement s’efforce d’élaborer un Code du travail qui vise à renforcer l’application de toutes les lois sociales en vigueur et à répondre aux attentes des acteurs économiques. La Commission de la Conférence doit rendre compte, dans ses conclusions, de toutes les mesures positives prises par le gouvernement pour donner effet à la convention.
La membre travailleuse de l’Espagne a indiqué qu’elle s’exprimait au nom de plusieurs organisations syndicales de France, d’Italie et d’Espagne. Selon le rapport que l’Union européenne (UE) a publié le 6 avril 2018 sur l’état des relations entre l’UE et l’Algérie dans le cadre de la nouvelle Politique européenne de voisinage, en matière de liberté syndicale, les syndicats autonomes algériens continuent de rencontrer des difficultés pour s’enregistrer ou se rassembler, malgré la ratification de la convention par l’Algérie. Par ailleurs, la promotion du dialogue social par le bais, en particulier, de l’apparition de syndicats autonomes, conformément aux recommandations de l’OIT, devrait elle aussi être citée parmi les améliorations qui ont été apportées dans le domaine économique et dans celui du marché du travail. A partir de ces principes, il convient de rappeler que peu de progrès ont été enregistrés concernant l’Algérie. Suite aux grèves qu’a récemment organisées le Conseil national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique, le ministère du Travail a lancé une campagne de pression auprès des syndicats qui affaiblit les mécanismes de la représentation syndicale. Le 6 mars 2018, les syndicats ont été priés, conformément à la loi, de fournir d’ici au 30 mars, c’est-à-dire dans un délai de vingt-quatre jours, des données spécifiant leur représentativité, telles que, par exemple, le nombre de leurs adhérents ou le montant de leurs cotisations. Mais d’autres données ont été exigées qui, elles, ne sont pas prescrites par la loi, telles que le nom en entier, le sexe, la date de naissance, l’organisation employeuse, l’adresse du lieu de travail, le poste de travail, la date d’adhésion, le numéro d’affiliation, le montant de la cotisation annuelle pour 2017 et le numéro de sécurité sociale, ce qui, de toute évidence, va à l’encontre de la liberté syndicale dans le pays. Ces obligations ont servi de prétexte pour dresser une liste de syndicats que les autorités citent souvent pour essayer de prouver l’existence du libre exercice syndical en Algérie, précisant que ce sont eux qui ont fourni les données susmentionnées – excluant ainsi ceux qui ne l’ont pas fait – et affirmant de surcroît la représentativité de quelques organisations qui, sans avoir été précédemment présentes sur le terrain, font cause commune avec la campagne de harcèlement à l’encontre du Conseil national autonome précité. C’est pour cette raison, parmi tant d’autres, que l’on peut se poser des questions sur les critères utilisés pour prouver la représentativité syndicale en Algérie. Le gouvernement est encore très loin de respecter les dispositions de la convention, comme cela figure dans les recommandations du rapport de l’UE précité.
La membre gouvernementale du Sénégal a salué les efforts entrepris par l’Algérie pour donner effet à la convention. Tout en réaffirmant son attachement aux idéaux et objectifs universels de l’OIT ainsi que la nécessité pour tout Etat Membre d’assurer le respect des droits et libertés syndicaux de tous les travailleurs, elle a exhorté le gouvernement algérien à poursuivre les progrès réalisés pour améliorer, avec ses partenaires sociaux, la situation de sa législation et de sa pratique nationales en matière de respect et de protection des droits syndicaux des travailleurs. Elle a également invité le gouvernement à renforcer la coopération avec le BIT et, si nécessaire, solliciter son assistance technique en vue de donner plein effet à la convention.
Un observateur, représentant de l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation (UITA), a annoncé que Nassira Ghozlane, la secrétaire générale de la SNAPAP et membre de l’exécutif de l’ISP, a été empêchée par les autorités algériennes de voyager ce matin pour se rendre à Genève et assister à cette réunion. Il a par ailleurs constaté que l’isolement dans lequel se trouvent les syndicats autonomes ne fait qu’augmenter car, en plus de refuser aux membres de la mission de suivi de rencontrer les syndicats autonomes qui se battent pour la liberté syndicale, bien qu’un camarade ait été prévenu d’assister le matin même à la réunion, la CSI et la CSE n’ont pas reçu de visa alors qu’ils devaient aller en Algérie pour débattre avec les responsables de la CGATA du contexte syndical et du prochain congrès de la CSI. Il convient de rappeler, à titre informatif, que M. Mustapha Tlili, responsable au sein de la CSI arabe, a été refoulé le 24 mai 2016, lors de son arrivée à l’aéroport d’Alger. La liberté syndicale exige la liberté d’association à tous les niveaux, y compris à l’international. On assiste à la montée de la criminalisation de toutes activités syndicales par le système judicaire, qui a facilité une cascade de poursuites infondées contre des dirigeants syndicaux; aux jugements arbitraires déjà cités du 27 janvier 2016, du 2 janvier 2017 et du 28 novembre 2017 contre M. Raouf Mellal, président du SNATEGS, impliquant des peines d’emprisonnement allant jusqu’au six mois fermes et des amendes jusqu’à 5 000 euros pour avoir dénoncé la corruption dans le domaine publique et pris la défense de victimes de harcèlement sexuel. En outre, des procédures à l’encontre du secrétaire général du SNATEGS, M. Abdelkader Kouafi, sont en cours. Ces procédures créent une atmosphère de peur qui pèse lourdement sur les travailleuses et travailleurs algériens, sur les droits civiques et sur la liberté syndicale.
Le membre gouvernemental du Qatar est revenu sur les informations détaillées fournies par le gouvernement, en particulier au sujet des procédures législatives entamées pour garantir l’exercice de la liberté syndicale et la constitution d’organisations syndicales, ainsi que des efforts de dialogue social avec les partenaires sociaux. Les conclusions de la Commission de la Conférence doivent faire état des efforts déployés par le gouvernement ainsi que de sa volonté de coopérer avec le BIT à cet égard.
Le membre gouvernemental de la Turquie s’est félicité des informations fournies par le gouvernement sur les progrès réalisés dans l’application de la convention. Le gouvernement s’emploie à résoudre les problèmes concernant les droits au travail, et les chiffres relatifs aux conflits du travail qui ont été réglés indiquent clairement que le gouvernement est résolu à poursuivre ses efforts en vue d’améliorer davantage la situation des travailleurs. L’orateur a également salué l’action que le gouvernement mène pour rédiger un Code du travail et parvenir à un consensus, qui pourra être obtenu grâce au dialogue social. Le gouvernement est invité à continuer de travailler étroitement avec le BIT et à redoubler d’efforts, en particulier pour protéger les droits des syndicats.
La membre travailleuse de la Pologne a souligné que la situation des travailleurs en Algérie ne s’est pas améliorée depuis la discussion de la Commission de la Conférence de l’année précédente. Au contraire, de nouvelles violations graves se sont produites. Il est en outre rappelé que la liberté syndicale doit être garantie sans aucune sorte de discrimination, en particulier sur la base de la profession et de la nationalité, et qu’il ne doit pas y avoir de restrictions à l’enregistrement de syndicats. En Algérie, rien ne garantit une procédure d’enregistrement rapide, et aucune sanction spécifique ne s’applique aux autorités en raison de la lenteur de la procédure d’enregistrement. La réforme du droit du travail est un processus long. C’est pourquoi des recommandations plus fermes doivent être formulées. Une mission de l’OIT doit être envoyée en Algérie. Enfin, le gouvernement est instamment prié de modifier sa législation, de reconnaître immédiatement tous les syndicats légitimes et de réintégrer tous les travailleurs illégalement licenciés pour leurs activités syndicales.
La membre gouvernementale du Zimbabwe a pris note des informations fournies par le gouvernement sur les cas clos et sur ceux encore à l’examen. Elle a dit espérer que les cas devant l’instance interne de règlement des conflits seront prochainement réglés. Elle a pris note de la volonté du gouvernement de continuer à coopérer avec les organes de contrôle de l’OIT en veillant à ce que tous les cas en instance soient traités dans le cadre des voies de recours nationales. Le BIT est instamment prié de continuer à fournir son assistance technique en vue de renforcer les institutions bipartites et tripartites en Algérie, ces structures étant cruciales pour régler les conflits dans le monde du travail.
Le membre gouvernemental de la République islamique d’Iran a salué les mesures adoptées par le gouvernement pour améliorer la situation des syndicats dans le pays. Se référant aux statistiques fournies par le gouvernement sur le règlement des cas individuels, il a noté que 76 des 86 cas ont été réglés ou sont en passe de l’être. Des efforts ont été déployés pour parvenir à un Code du travail consensuel, au moyen d’une consultation avec les partenaires sociaux. Le gouvernement a indiqué qu’il n’avait pas rejeté les recommandations adoptées par la Commission de la Conférence en 2017 au sujet de la mission de contacts directs. La poursuite de négociations peut ouvrir la voie à une solution. Il a invité le Bureau à apporter l’assistance nécessaire pour régler les derniers problèmes.
Le membre travailleur du Maroc s’est dit surpris par la réponse du gouvernement algérien selon laquelle il décrit la CGATA comme étant un «demi syndicat» et a souligné que la CGATA est un membre fondateur de la Confédération syndicale arabe, du Forum social maghrébin et du Forum social mondial, et membre de la Confédération internationale des syndicats. En outre, la Fédération générale des travailleurs marocains entretient une relation de coopération datant de plusieurs années avec la CGATA, qu’elle considère être un syndicat sérieux et responsable. Par conséquent, considérer que ce syndicat n’existe pas et qu’il n’a pas de représentativité syndicale n’est qu’une tentative de favoriser un syndicat par rapport à un autre, alors que la procédure appropriée devrait plutôt être de tisser les liens de coopération et de participation entre les syndicats centraux d’un pays. Ceci est un facteur essentiel à la promotion de la paix sociale, ce à quoi un gouvernement sérieux aspire. L’orateur a terminé en déclarant que toute action préjudiciable au droit à la liberté syndicale constitue une violation explicite de la Constitution de l’OIT et contredit les dispositions de la convention.
Le membre gouvernemental de l’Egypte a déclaré qu’il convient de tenir compte de tous les efforts déployés par le gouvernement dans le cadre du dialogue avec les partenaires sociaux afin d’assurer la mise en œuvre effective de la convention. Cela comprend notamment l’élaboration d’une législation du travail et d’autres lois sociales y afférentes, la garantie du pluralisme syndical, l’aide à la constitution de syndicats à différents niveaux en éliminant les restrictions et obstacles en la matière, et l’assurance des garanties nécessaires à la constitution de syndicats indépendants. Le gouvernement est invité à prendre des mesures complémentaires afin de parvenir à la pleine application de la convention, tant en droit que dans la pratique, et à se prévaloir de l’assistance technique du Bureau à cette fin.
Le membre travailleur du Mali, s’exprimant également au nom des travailleurs de la Guinée ainsi que de ceux du Congo, a indiqué que pour la deuxième année consécutive la commission examine les manquements aux dispositions de la convention par l’Algérie. Au regard des arguments développés par le gouvernement, et tenant compte des efforts fournis pour la clarification des points litigieux, des progrès significatifs ont été observés, notamment en ce qui concerne: la reconnaissance effective du pluralisme qui se traduit par l’enregistrement de plusieurs syndicats couvrant la quasi-totalité des branches d’activités économiques et le secteur de la fonction publique; et l’existence d’un cadre réglementaire favorisant la signature d’accords collectifs conclus au niveau d’entreprises. Outre ces acquis, un Pacte national économique et social de croissance a été signé donnant ainsi plus de force à la promotion du dialogue social et à la reconnaissance des droits de tous les travailleurs. La paix sociale est le socle de tout progrès économique et le fondement du droit dans la mesure où elle permet de respecter le choix de chaque travailleur d’exercer librement ses activités. En l’espèce, l’Algérie est un pays engagé dans un processus de mutation qualitative qui tout au long de sa marche s’enrichit des valeurs de progrès et de démocratie dont l’OIT est une référence. Dans ce contexte, le rôle de l’Organisation est d’encourager activement le renforcement du dialogue social comme vecteur de paix et de cohésion sociale par la reconnaissance des acquis obtenus depuis 2017 en matière de droit syndical. Le BIT doit continuer à appuyer l’Algérie pour parachever les résultats obtenus.
Le membre gouvernemental du Mexique a pris note des mesures adoptées par le gouvernement pour tenir compte des observations de la commission d’experts, notamment des progrès réalisés dans le processus de réforme du Code du travail et la volonté politique de mener à bien un vaste processus de consultations avec les partenaires sociaux, dans le but de produire des normes permettant de renforcer la mise en œuvre des lois et la pratique, ce qui permettra de surmonter les défis que pose le cas à l’examen. Par ailleurs, la commission d’experts a pris note des allégations qui sont portées devant le Comité de la liberté syndicale, soulignant qu’il est important d’éviter tout chevauchement dans l’analyse des questions qui sont soulevées. Pour cette raison, il convient tout particulièrement de ne pas préjuger des questions qui sont toujours pendantes devant ce comité, ce qui permettra d’assurer la cohésion du fonctionnement des mécanismes de contrôle. Le Mexique réitère que le respect des droits fondamentaux au travail est une condition essentielle pour garantir un travail décent et, de ce fait, il est satisfaisant que le gouvernement soit prêt à collaborer avec les mécanismes de contrôle. Il est à espérer que le processus législatif qui en résultera sera fructueux et que la commission d’experts sera tenue informée des progrès réalisés.
Le membre travailleur de Bahreïn a déclaré qu’il ne fait aucun doute que le gouvernement fait manifestement le nécessaire, et avec transparence, pour tenir compte des observations de la commission d’experts, et qu’il a répondu en détail à toutes les questions qui y sont soulevées. Il s’est dit surpris que l’Algérie figure depuis des années sur la liste des cas, en dépit du fait qu’elle a ratifié plus de 60 conventions internationales du travail, ce qui atteste de l’engagement du pays à respecter les normes internationales du travail. Confirmant que le mouvement syndical algérien est un mouvement dynamique et actif, il a reconnu le soutien moral et matériel important qu’il apporte aux syndicats des pays africains et arabes. Toutefois, il a appuyé les déclarations du gouvernement qui demande de pouvoir se charger librement de la réforme du Code du travail, avec la pleine coopération des partenaires sociaux. Le grand nombre d’accords sectoriels confirme le fait que l’Algérie fait appel au dialogue social et à la négociation collective comme moyens privilégiés de réglementer les conditions de travail. Enfin, il a réaffirmé qu’il est important de saluer les efforts de l’Algérie, qui sont un bon exemple de la liberté syndicale et du dialogue social, au lieu de s’obstiner à inscrire le pays sur la liste des cas.
Le membre gouvernemental de la Fédération de Russie a relevé que les informations fournies par le gouvernement confirment que celui-ci tient à respecter la convention. Le gouvernement fait preuve de bonne volonté et est ouvert au dialogue avec les partenaires sociaux sur les points soulevés. Depuis plusieurs années, le gouvernement prend des mesures spécifiques qui montrent son attachement aux principes et droits fondamentaux au travail. La situation doit être analysée de manière approfondie et le dialogue social en cours doit être soutenu. L’orateur a encouragé la coopération du gouvernement avec l’OIT, notamment dans le cadre d’une mission du BIT, et invité le gouvernement à continuer de prendre des mesures à cet égard.
Le membre travailleur du Soudan a déclaré que la convention dispose qu’il convient de tenir compte de la législation nationale dans le cadre des activités syndicales. L’Algérie a ratifié un grand nombre de conventions de l’OIT. Elle joue également un rôle important dans le développement d’un mouvement syndical africain, via l’Organisation de l’unité syndicale africaine (OUSA), et est active au sein du mouvement syndical arabe, via la Confédération internationale des syndicats arabes (CISA). La législation du travail algérienne est conforme aux normes internationales du travail, y compris en ce qui concerne le pluralisme syndical.
Le membre gouvernemental du Ghana a salué les mesures prises par le gouvernement pour réintégrer les travailleurs licenciés. La commission d’experts ne doit pas oublier la distinction qui existe entre les droits fondamentaux et les droits syndicaux, ces derniers comportant également des obligations. L’Algérie sait bien utiliser le dialogue social pour parvenir à un consensus sur d’importantes questions socio-économiques. La réforme du Code du travail nécessite la participation d’acteurs majeurs du pays afin de trouver un consensus autour d’une loi comblant les lacunes existantes et tenant compte des problèmes émergents dans le monde du travail. Le gouvernement est instamment prié de renforcer sa coopération avec les partenaires sociaux et de se prévaloir de l’assistance technique du BIT afin de parvenir à finaliser la réforme du Code du travail, conformément aux normes internationales du travail.
La membre gouvernementale de Cuba a accueilli avec satisfaction les informations communiquées par le gouvernement au sujet de la convention. Elle a relevé que certaines recommandations de la commission d’experts ont déjà été mises en œuvre et voulu croire que l’Algérie continuera de donner suite aux recommandations déjà formulées.
Un observateur, représentant la Fédération syndicale mondiale (FSM), a déclaré que l’Algérie met en pratique le pluralisme syndical puisque 100 syndicats sont enregistrés, dont 65 centrales syndicales. L’Algérie a besoin d’une législation audacieuse et juste qui réglemente les syndicats pluralistes. Certains considèrent que le dialogue tripartite signifie nécessairement que seuls les syndicats les plus représentatifs y sont associés et que les autres organisations en sont exclues, alors que le dialogue tripartite ne devrait pas être limité, mais englober plusieurs organisations de travailleurs et d’employeurs à tous les stades du dialogue. Il est recommandé au gouvernement d’établir un Haut Conseil du dialogue social auquel plusieurs organisations d’employeurs et de travailleurs pourraient participer.
Le membre gouvernemental du Kenya a noté que, depuis le dernier examen du cas par la Commission de la Conférence en 2017, le gouvernement a mis en place une série de mesures pour régler certains problèmes liés à l’application de la convention. Davantage de cas ont été réglés par la conciliation ou le recours aux tribunaux compétents. La plupart de ces cas étaient liés à des fautes professionnelles plutôt qu’à l’exercice des droits syndicaux des travailleurs. La consultation et la négociation ont également permis de signer plusieurs pactes économiques et sociaux et de créer des institutions en vue d’améliorer le dialogue social. Etant donné le temps nécessaire pour modifier la législation et restructurer les institutions, le gouvernement a besoin de davantage de temps et de l’assistance technique du BIT pour être en mesure de mieux respecter la convention.
Le membre gouvernemental du Nigéria a pris note avec satisfaction du rapport du gouvernement sur l’application de la convention et estimé que d’importants progrès ont été accomplis. Il s’est lui aussi déclaré favorable à une révision des méthodes de travail de la commission afin qu’elle mène sa mission dans le respect des principes du tripartisme et qu’elle veille à la totale transparence des cas individuels. De vives préoccupations persistent quant aux plaintes déposées contre le gouvernement par des personnes et des syndicats qui ne seraient pas officiellement reconnus au motif que le gouvernement ferait obstacle à la liberté syndicale. Tenter de forcer un gouvernement à reconnaître implicitement de pseudo-organisations porte atteinte à la souveraineté d’un Etat. Enfin, il convient de saluer l’engagement du gouvernement à appliquer les principes de la convention.
Le membre gouvernemental de la République arabe syrienne a déclaré que les mesures engagées par le gouvernement sont positives et qu’elles doivent être encouragées, les autorités étant déterminées à poursuivre les réformes afin de garantir l’application de la convention. Le temps pris pour finaliser le Code du travail ne doit pas être source de préoccupation puisque ce texte suppose des consultations et un dialogue tripartites. Il est à souhaiter que les mandants parviendront rapidement à un consensus permettant la promulgation de la nouvelle loi.
Le représentant gouvernemental a souligné que l’Algérie est un pays stable, respectueux des droits humains en général et de la liberté syndicale en particulier, comme le démontre la tenue de grèves, y compris dans des secteurs très sensibles comme l’éducation nationale, la santé ou les transports. Concernant l’enregistrement des organisations syndicales, il n’existe pas de conditions préalables mais uniquement l’application des procédures prévues par la législation nationale. Les informations sur la situation des dossiers d’enregistrement ont toujours été fournies au BIT dans les délais. L’orateur a par ailleurs affirmé qu’une personne prétendant représenter les travailleurs n’est actuellement plus fonctionnaire, qu’elle ne représente donc plus qu’elle-même aujourd’hui. Le gouvernement a par ailleurs déjà fourni toutes les preuves sur les activités illicites de cette personne consistant à inciter à la rébellion et à la désobéissance, agissements qui ne peuvent trouver protection dans la convention. Concernant la mission de contacts directs, l’orateur a mentionné que celle-ci n’a été ni annulée ni refusée par l’Algérie. Toutes les informations ont été fournies sur les efforts et préparatifs engagés à cet effet et un processus de concertation se poursuit à cet égard avec le Bureau. A propos des résultats des cas individuels, toutes les informations ont été fournies de manière transparente et les dossiers ont bien avancé. Quant à la réforme du Code du travail, le dialogue et la concertation tripartite sont en cours, y compris vis-à-vis de dispositions du Code commentées par la commission d’experts. Dans l’attente de la finalisation de ce processus, l’Algérie dispose d’une législation du travail conforme aux conventions internationales et ne se trouve donc pas dans une situation de vide juridique. Le représentant gouvernemental a ensuite regretté que de nombreuses accusations aient été portées contre son pays en dépit des informations préalablement fournies par son gouvernement les réfutant. Il a ainsi été indiqué que M. Mellal ne fait plus partie de l’entreprise en question mais qu’il exerce la profession d’avocat au barreau d’Alger. Concernant la procédure judiciaire le concernant, l’entreprise a introduit un pourvoi en cassation et la justice poursuit son travail en toute indépendance. D’autres personnes présentes dans la salle prétendent avoir fait l’objet de peines d’emprisonnement alors qu’elles peuvent se déplacer librement hors du territoire national. Concernant le conflit ayant surgi au sein du SNAPAP, il faut rappeler que la Cour suprême a tranché cette affaire et que le syndicat dispose d’une direction réélue lors de son dernier congrès. Quant au cas de la CGATA, toutes les informations pertinentes ont été fournies au Bureau et il revient maintenant à la commission d’experts de les exploiter. Le pluralisme syndical existe en Algérie comme le démontre le grand nombre d’organisations existantes. Concernant la dissolution du SNATEGS, celle-ci a été prononcée par ses membres fondateurs conformément à la législation, et le ministère s’est limité à prendre acte de cette dissolution volontaire. S’agissant de la représentativité des syndicats, le cadre légal existe depuis la promulgation des lois sociales de 1990. Le canevas élaboré cette année vise uniquement à assurer plus de transparence et de précision dans l’appréciation de la représentativité des syndicats. De fait, 21 organisations syndicales ont respecté les nouvelles démarches sans que cela ne trouble leur fonctionnement. Le représentant gouvernemental a conclu ses propos en rappelant l’attachement de son pays au tripartisme et au dialogue social et en soulignant la pleine disposition de son gouvernement à poursuivre le renforcement de la coopération avec la commission et avec l’OIT en général.
Les membres travailleurs ont souligné que le gouvernement a apporté plusieurs précisions relatives à l’observation de la commission d’experts discutée par cette commission en 2017, sans toutefois fournir des réponses aux remarques formulées par la commission d’experts dans sa dernière observation. Il aurait été souhaitable, tel que l’avait demandé la commission l’an dernier, que ces informations aient été envoyées à la commission d’experts afin qu’elle ait pu en tenir compte dans l’examen de ce cas. Un envoi moins tardif de ces informations aurait également permis d’effectuer les vérifications nécessaires. Les membres travailleurs ont relevé qu’à ce stade: i) la liste des travailleurs réintégrés fournie par le gouvernement inclut des délégués du SNAPAP qui n’ont été réadmis qu’à condition de renoncer à leurs fonctions syndicales; ii) des travailleurs de la poste sont mentionnés sur cette liste alors qu’en fait la poste refuse toujours de les réintégrer; et iii) la plupart des délégués du SNATEGS ne sont pas mentionnés sur cette liste. Il résulte de ce qui précède que le gouvernement ne s’est que partiellement conformé à la recommandation de la commission sur ce point. S’agissant de la procédure d’enregistrement des syndicats, les membres travailleurs ont considéré que les informations fournies par le gouvernement sont préoccupantes. Selon ce dernier, la non-reconnaissance du Syndicat autonome des travailleurs des transports (SAATT) serait en premier lieu due à des imprécisions dans la détermination de la catégorie professionnelle couverte par les statuts de l’organisation, exigence qui s’avère contraire à l’article 3 de la convention qui reconnaît le droit des organisations de travailleurs d’élaborer librement leurs statuts. Quant à la supposée omission des dispositions de l’article 21 de la loi no 90-14, les membres travailleurs ont souligné que cet article contient des exigences constituant une ingérence de la part des autorités publiques contraires à l’article 3, paragraphe 2, de la convention et que le gouvernement ne précise pas en quoi le SAATT ne respecterait pas l’article mentionné. Quant aux supposées réintégrations de travailleurs dans la fonction publique, le gouvernement ne fournit pas d’éléments précis pour appuyer son propos sur ce point. Les membres travailleurs ont ensuite souligné que la convention contient une série de dispositions qui ne sont toujours pas mises en œuvre dans le droit algérien. Concernant l’enregistrement des syndicats, des dispositions claires et transparentes sont nécessaires. Pour éviter que l’enregistrement ne s’apparente à une demande d’autorisation préalable, il serait utile de prévoir une disposition légale qui fixe un bref délai pour obtenir le récépissé d’enregistrement et qui prévoie l’enregistrement automatique du syndicat en cas de défaut de réponse motivée dans ce délai. De manière spécifique, les membres travailleurs ont à cet égard demandé au gouvernement de: i) reconnaître dans les plus brefs délais les syndicats autonomes, y compris la CGATA et de rétablir le récépissé retiré indument au SNATEGS; et ii) modifier la législation afin que soit reconnu à tous les travailleurs, sans distinction de nationalité, le droit de constituer une organisation syndicale. Concernant le Code du travail en préparation, les membres travailleurs: i) ont demandé au gouvernement de s’assurer que le texte est pleinement conforme à la convention et ont regretté que le gouvernement ne se soit pas explicitement engagé dans ce sens; ii) ont relevé que le document déposé ne fait nullement référence aux commentaires de la commission d’experts; et iii) ont demandé au gouvernement de communiquer ce document aux organisations syndicales autonomes, y compris à la CGATA afin qu’elles puissent faire part de leurs observations. Les membres travailleurs ont par ailleurs prié le gouvernement de cesser toutes les actions entravant la liberté syndicale afin que celle-ci puisse s’exercer dans un climat exempt d’intimidation et de violence. Eu égard au fait que le gouvernement n’a réservé aucune suite aux recommandations émises lors de la dernière session de la commission, il lui est demandé d’accepter une mission de haut-niveau afin de prendre connaissance de tous les éléments pertinents, et notamment de rencontrer les syndicats plaignants.
Les membres employeurs ont accueilli avec satisfaction les informations fournies à la Commission de la Conférence, y compris l’engagement du gouvernement de continuer de coopérer avec l’OIT et les partenaires sociaux nationaux. Faisant référence aux conclusions adoptées en 2017 par la Commission de la Conférence, le gouvernement est invité à s’employer à achever la réforme du Code du travail, en consultation avec les partenaires sociaux. A cet égard, il convient de souligner que la convention prescrit de lever tous les obstacles à la constitution d’organisations de travailleurs de leur propre choix, y compris à l’enregistrement de syndicats, et d’insister sur la nécessité d’instaurer un climat exempt d’actes d’intimidation et de violence. Les membres employeurs ont salué l’engagement du gouvernement en faveur du dialogue social tripartite, élément nécessaire à la poursuite des progrès. Dans un esprit de transparence et de clarté, et compte tenu du fait que la commission d’experts a besoin des informations les plus récentes, le gouvernement doit accepter sans restriction une mission de haut niveau afin de manifester sa volonté de parvenir au respect des conventions ratifiées.
Conclusions
La commission a pris note des déclarations orales du gouvernement et de la discussion qui a suivi.
La commission s’est dite préoccupée que persistent les restrictions imposées au droit des travailleurs de s’affilier à des organisations, fédérations et confédérations syndicales de leur choix et d’en constituer. Elle a relevé avec préoccupation que la mise en conformité avec la convention no 87 continuait à progresser lentement, alors qu’elle examine ce cas depuis plus de dix ans et que le gouvernement n’a toujours pas soumis le projet de Code du travail au Parlement pour adoption définitive. Elle regrette profondément que le gouvernement n’ait pas accepté les termes de la mission de contacts directs sans restriction, comme le demandaient ses recommandations de 2017.
Prenant en compte l’exposé du gouvernement et la discussion qui a suivi, la commission a prié instamment le gouvernement:
- de veiller à ce que l’enregistrement des syndicats, en droit et dans la pratique, soit conforme à la convention no 87;
- de traiter les demandes d’enregistrement de syndicats en suspens qui répondent aux conditions énoncées par la loi et de permettre aux syndicats de mener librement leurs activités;
- de veiller à ce que le nouveau projet de Code du travail soit adopté en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives et à ce qu’il soit conforme au texte de la convention no 87;
- de modifier l’article 4 de la loi no 90 14 afin de lever les obstacles que les travailleurs rencontrent pour constituer des organisations, des fédérations et des confédérations de leur choix, quel que soit le secteur auquel ils appartiennent;
- de modifier l’article 6 de la loi no 90 14 afin de reconnaître le droit de tous les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des syndicats;
- de veiller à ce que la liberté syndicale puisse être exercée dans un environnement exempt d’actes d’intimidation et de violence à l’égard de travailleurs, de syndicats, d’employeurs ou d’organisations d’employeurs;
- de fournir davantage d’informations sur la réintégration rapide des agents de l’administration dont le licenciement relevait d’une discrimination antisyndicale;
- de fournir à la mission de haut niveau mentionnée ci-après des informations sur la décision de dissoudre le syndicat SNATEGS.
La commission a invité instamment le gouvernement à accepter sans délai et sans restriction, avant la prochaine session de la commission d’experts, une mission de haut niveau de l’OIT et à indiquer les progrès réalisés à cet égard à la commission d’experts, avant sa prochaine session de novembre 2018.
Le représentant gouvernemental a regretté la décision prise par la commission, malgré la transmission de toutes les informations et tous les documents au Bureau. Il a considéré qu’il y avait au niveau du fonctionnement du mécanisme de la commission des problèmes portant sur l’appréciation de la mise en œuvre de la convention par son pays, ce qui confirmait la nécessité et l’urgence de procéder à une réforme de son fonctionnement, permettant d’établir la liste des cas individuels de manière transparente et de conclure sur ces cas de manière tripartite, de manière à refléter correctement et fidèlement les points de vue exprimés lors des débats et en être l’expression des recommandations consensuelles. Il a rappelé la disponibilité du ministre du Travail pour poursuivre la consultation autour de la mission de contacts directs qui devait se déplacer à Alger, ayant notamment rencontré le Directeur général du BIT et la directrice du Département des normes internationales du travail pour discuter de cette mission. Le représentant gouvernemental a déclaré solennellement que son pays rejetait dans le fond et dans la forme les conclusions de la commission. Il a regretté que la commission, au lieu de tenir compte des avancées et d’apporter un soutien et un accompagnement dans un objectif d’amélioration, se soit contentée des déclarations de deux personnes et de l’exploitation d’articles de presse non documentés et qu’elle ait recommandé l’envoi d’une mission de haut niveau sans prendre en considération dans ses conclusions les démarches, les arguments, les documents et les avancées enregistrées, ainsi que l’existence d’un grand nombre d’organisations syndicales. Il avait souligné à maintes reprises lors des précédentes sessions de la Conférence que de telles dérives portaient atteinte à l’impartialité et à la crédibilité de la commission. Enfin, à l’intention des représentants des syndicats de travailleurs du Maroc et du Brésil, il leur a conseillé de consacrer leur énergie à amener leur pays à ratifier la convention au lieu de critiquer l’Algérie qui avait fait du pluralisme syndical un principe constitutionnel, et a saisi l’occasion pour rappeler au porte-parole des travailleurs les dangers d’un comportement non constructif poussant la commission vers le blocage et l’impasse.
Un représentant gouvernemental, tout en saluant le travail de la commission d’experts et du Comité de la liberté syndicale, a marqué son étonnement de voir figurer l’Algérie parmi les cas examinés par la Commission de la Conférence et a demandé avec insistance à cette dernière de réexaminer les critères de désignation des pays. La Constitution algérienne garantit toutes les libertés fondamentales, les droits de l’homme et du citoyen, incluant la liberté d’association et de réunion et la liberté de manifestation pacifique, l’exercice du droit syndical et du droit de grève, ces droits s’exerçant dans le cadre du strict respect de la loi. Aussi le dispositif juridique mis en place en application de la loi fondamentale du pays est-il en conformité avec l’esprit et la lettre des conventions et instruments internationaux ratifiés par le pays. Dans ce contexte, le pluralisme syndical consacré par la Constitution depuis 1989 a permis à l’Algérie d’enregistrer une intense activité syndicale, aussi bien dans le secteur économique que dans la fonction publique. A ce jour, 102 organisations syndicales ont été enregistrées dont 66 organisations de travailleurs et 36 organisations d’employeurs. Depuis 2014, il a été procédé à l’enregistrement de 5 organisations syndicales. L’activité syndicale, en Algérie, s’exerce dans le cadre de la loi, sans aucune difficulté ou entrave, y compris concernant le recours à la grève. En 2016, 35 mouvements de grève ont été enregistrés (23 dans la fonction publique et 12 dans le secteur privé) et ont compté la participation de plus de 200 000 travailleurs issus des différents secteurs. S’agissant de l’enregistrement des syndicats, l’orateur a rappelé qu’il revient à l’administration du travail de contrôler en amont la conformité des textes fondateurs de l’organisation syndicale de travailleurs ou d’employeurs aux dispositions de la législation nationale régissant l’exercice du droit syndical, en conformité avec les dispositions de la convention no 87. Les dossiers des trois syndicats cités par la commission d’experts ont été examinés par les services compétents du ministère du Travail; des observations leur ont été notifiées dans les délais fixés par la législation en vigueur et une réponse de leur part est attendue. Pour ce qui est de Confédération générale autonome des travailleurs en Algérie (CGATA), cette organisation a introduit une demande d’enregistrement en juin 2013; une réponse portant observations de l’administration sur ses statuts lui a été notifiée en juillet 2013, à l’adresse figurant dans la demande d’enregistrement, mais le courrier a été retourné pour fausse adresse. Le 2 décembre 2014, l’organisation a saisi l’administration du travail pour s’enquérir des suites réservées à sa demande de constitution. Il y a plus de deux ans qu’un nouveau courrier a été adressé à l’organisation l’invitant à mettre ses textes fondateurs en conformité avec la loi algérienne mais, force est de constater que, à ce jour, aucune réponse n’a été enregistrée au niveau de l’administration du travail. L’organisation n’a donc pas d’existence légale. Sur le dialogue social, l’orateur a indiqué que la pratique du dialogue social au niveau national a permis la signature, entre le gouvernement et les partenaires économiques et sociaux, du pacte national économique et social en 2006, lequel a été reconduit en 2010, ainsi que du pacte national économique et social de croissance, en février 2014. Au niveau des branches et des secteurs d’activité, le dialogue social s’est traduit par la signature de 82 conventions collectives et de 167 accords collectifs de branche. En outre, le ministère de l’Education nationale et huit syndicats sectoriels (sur les 10 que compte le secteur) ont procédé à la signature, en 2015, d’une charte d’éthique comportant des engagements de toutes les parties pour la préservation et la promotion d’un climat social propice à la résolution des problèmes du secteur. Pour sa part, l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) a procédé en 2015, à la signature, avec les organisations patronales, d’un pacte de stabilité et de développement de l’entreprise dans le secteur privé. Enfin, 3 671 conventions collectives et 17 242 accords collectifs d’entreprise ont été conclus. L’orateur a notamment rappelé que l’expérience algérienne en matière de pratique du dialogue social fait actuellement l’objet d’un partage avec les pays africains dans le cadre d’un accord signé avec l’OIT, visant à promouvoir la coopération Sud-Sud à travers la mise en œuvre d’un programme financé par l’Algérie, et qu’un événement parallèle sur l’expérience algérienne en matière de dialogue social et de protection sociale a été organisé lors de la 329e session du Conseil d’administration du BIT. S’agissant de l’observation citée par la commission d’experts relative à l’usage de violence policière à l’encontre de syndicalistes lors de manifestations, l’orateur a indiqué que la manifestation à laquelle il est fait allusion a été organisée en violation des dispositions de la loi 89-28 relative aux réunions et manifestations publiques, qu’elle avait pour objectif la perturbation et l’atteinte à l’ordre public et que, à ce titre, les manifestants se sont exposés aux sanctions prévues par la loi. L’intervention des services de l’ordre s’est faite dans le respect de la loi et en conformité avec les standards internationaux en matière d’exercice de la liberté de manifestation pacifique. Enfin, s’agissant des questions législatives relatives à l’avant-projet de loi portant Code du travail, l’orateur a rappelé que, conformément aux conclusions de la 104e session de la CIT (juin 2015), le gouvernement en a transmis une copie à la commission d’experts en octobre 2015. Cet avant-projet de loi a pris en compte une série d’observations contenues dans le mémorandum de commentaires techniques élaboré par les services du BIT. Pour ce qui est des questions relatives aux articles 3, 4 et 6 de la loi 90-14 du 2 juin 1990, relative aux modalités d’exercice du droit syndical, des précisions ont été intégrées dans l’avant-projet en vue de répondre aux préoccupations soulevées. Le texte se trouve toujours au stade de la concertation avec toutes les organisations syndicales de travailleurs et d’employeurs, et la concertation a été élargie aux départements ministériels et aux autorités départementales. Une réunion a d’ailleurs été organisée en janvier 2017 avec les syndicats sectoriels, et un débat fructueux a été enregistré entre l’administration du travail et ces derniers, en présence du Bureau de l’OIT à Alger. Les délais peuvent certes paraître longs pour certains mais, s’agissant d’un texte de loi d’une extrême importance, il convient de rechercher l’adhésion du plus grand nombre à l’effet de disposer d’un texte cohérent qui prenne en compte les préoccupations du monde du travail dans leur globalité et leur complexité. L’orateur a tenu à rassurer la Commission de la Conférence sur la volonté du gouvernement de faire aboutir le processus de concertation sur cet avant-projet de texte.
Les membres travailleurs ont souligné que, depuis la précédente discussion de ce cas en 2015, la situation en Algérie s’est détériorée. Le Code du travail n’a pas été amendé en dépit des demandes de révision persistantes émanant des organes de contrôle de l’OIT. L’Algérie n’a pas remédié aux problèmes soulevés par l’OIT et n’a pas engagé de consultations, même les plus élémentaires, avec les partenaires sociaux. Le projet de Code du travail de 2015 n’a pas été révisé alors que certaines des dispositions de ce projet enfreignent explicitement la convention comme les articles 510-512, en vertu desquels les syndicats ne pourraient s’affilier à des fédérations ou des confédérations que s’ils appartiennent aux mêmes branches ou secteurs. Par ailleurs, le projet de loi imposait une série de conditions préalables concernant le nombre requis de syndicats de la même profession, du même secteur ou de la même branche pour établir des fédérations et confédérations de leur choix. L’article 514 du projet autorise uniquement les personnes de nationalité algérienne ou celles naturalisées algériennes depuis au moins cinq ans à établir des syndicats ou à y adhérer en contradiction avec la convention qui reconnaît le droit de tous les travailleurs d’établir des organisations de leur choix et de s’y affilier. Là encore, aucune amélioration n’a été apportée. Le gouvernement n’a en outre donné suite à aucune des demandes concernant les articles 517 et 525 du projet qui requièrent qu’une série de procédures publiques soient suivies lors de la création d’un nouveau syndicat ou lorsque des changements interviennent dans les statuts ou les conseils exécutifs de syndicats existants. Les clarifications demandées n’ont jamais été données et le processus de révision avec les partenaires sociaux n’a jamais eu lieu. L’article 534 du projet de Code du travail reste lui aussi inchangé et prévoit que les syndicats nationaux ne peuvent accepter des cadeaux et des legs d’organisations étrangères que suite à une autorisation expresse à cet effet délivrée par les autorités publiques, en contradiction avec la convention. La loi 90-14 du 2 juin 1990 relative aux modalités d’exercice du droit syndical prévoit une condition préalable liée à la nationalité, qui limite la possibilité de créer des syndicats et d’y adhérer. Cette disposition limite le droit des travailleurs étrangers à établir un syndicat sur la base d’une discrimination fondée sur la nationalité alors que, selon la convention, la liberté syndicale doit être garantie sans discrimination d’aucune sorte. L’Etat cherche à décourager et à saper le cœur même du mouvement syndical indépendant en Algérie et dresse des obstacles différents et persistants chaque fois qu’un syndicat introduit une demande de reconnaissance et d’enregistrement. En dépit des dispositions de la loi 90-14, les autorités ont arbitrairement refusé de délivrer les récépissés d’enregistrement aux syndicats. Qui plus est, les syndicats sont fréquemment appelés à modifier leurs statuts ou à fournir des documents complémentaires qui ne sont pas exigés par la loi. La non-délivrance des récépissés d’enregistrement restreint le pouvoir des syndicats de fonctionner normalement. Sans le récépissé, les syndicats ne sont pas autorisés à percevoir de cotisations d’affiliation, qui constituent la source essentielle des revenus d’un syndicat. Ils ne peuvent pas non plus ouvrir un compte bancaire ni engager d’actions en justice. Tel est notamment le cas de la CGATA – qui reste en attente de son enregistrement depuis plus de vingt ans. Un autre syndicat, le Syndicat national autonome des postiers (SNAP), n’a été reconnu qu’au bout de deux ans, au terme d’une procédure de plainte introduite auprès du Comité de la liberté syndicale. La liste de licenciements arbitraires et discriminatoires de syndicalistes en Algérie est sans fin. Comme le cas de M. Mellal Raouf, président du Syndicat national autonome des travailleurs du gaz et de l’électricité (SNATEGS), licencié en mars 2015 en représailles de ses activités syndicales. En décembre 2016, il a été condamné par contumace à six mois de prison et à une amende de 50 000 dinars algériens pour avoir dénoncé la pratique illégale de la compagnie nationale d’électricité et de gaz Sonelgaz consistant à gonfler les factures d’électricité. La sentence pénale a été confirmée par le Tribunal de deuxième Instance en mai 2017. En avril 2013, M. Rachid Malaoui, président du Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique (SNAPAP), a été limogé de son poste à l’université de la formation continue pour «absence non justifiée de son poste» et le paiement de son salaire a été suspendu. Il n’a pu obtenir une copie de sa lettre de licenciement qu’en juin 2013, et sa demande de révocation de son licenciement a été rejetée par le Conseil d’Etat en janvier 2017. En outre, plusieurs cas de détention arbitraire et d’ingérence injustifiée au cours de manifestations pacifiques ont eu lieu en Algérie en 2017, comme l’arrestation dans un hôtel de Tizi Ouzou des dirigeants du SNATEGS, de la Sonelgaz, dont le président, M. Mellal Raouf, le secrétaire général, M. Kouafi Abdelkader, le directeur des communications, Chaouki Fortas, ainsi que deux membres du comité exécutif, Mekki Mohammed et Baali Smail. En mars 2017, la police a réprimé une manifestation pacifique organisée par le même syndicat – 240 travailleurs, dont 30 femmes, ont été arrêtés. Il est impératif que l’Algérie mette en œuvre dans les plus brefs délais les réformes législatives demandées depuis dix ans. Les victimes de cette inaction sont les milliers de travailleurs algériens qui sont sujets aux abus et au déni de leur droit fondamental de s’organiser. Il s’agit d’un cas d’une extrême gravité, que l’OIT devra continuer à suivre. Les membres travailleurs ont exhorté le gouvernement à modifier sa législation, à reconnaître immédiatement tous les syndicats légitimes et à réintégrer tous les travailleurs illégalement licenciés pour leurs activités syndicales.
Les membres employeurs ont estimé qu’il s’agit d’un cas de progrès extrêmement lent plutôt que d’un cas d’infraction délibérée, et rappelé qu’il porte sur les trois questions suivantes. Premièrement, depuis 2011, des actes de violence ont été allégués à de nombreuses occasions. A ce sujet, les dernières allégations portent sur l’arrestation en février 2016 de membres d’un syndicat et sur des actes de violence commis par la police contre des manifestants dans le secteur de l’éducation. Néanmoins, en partie à cause du fait que, dans les diverses interventions au cours des ans ces allégations ont été formulées par des personnes de pays autres que l’Algérie, il n’est pas facile pour la commission d’examiner cette situation. L’absence d’allégations directes de citoyens algériens, combinée avec l’indication du gouvernement selon laquelle aucune plainte n’a été déposée par les autorités compétentes au sujet de ces questions, fait qu’il est difficile de faire plus que prendre acte des allégations. Les membres employeurs supposent que, si les travailleurs algériens avaient porté plainte, ces allégations auraient fait l’objet d’enquêtes. Par conséquent, avant de formuler les conclusions, il est nécessaire d’avoir eu connaissance d’un ensemble équilibré de faits et de disposer d’informations détaillées sur les mesures prises, ou non, par le gouvernement. Deuxièmement, en ce qui concerne la demande précédente de la commission visant à consulter les organisations représentatives d’employeurs et de travailleurs afin de prendre en compte leurs vues pour élaborer le Code du travail, plusieurs consultations ont eu lieu. En 2016, copie du projet de code a été soumis pour commentaires au BIT et, en conséquence, plusieurs suggestions visant à l’améliorer ont été exprimées. Avant et depuis cette date, de nombreuses réunions tripartites et bipartites se sont tenues pour examiner le code et des questions afférentes. En janvier 2017, des copies du projet de code, contenant des amendements suggérés par le BIT, ont été communiquées aux organisations d’employeurs et aux syndicats, pour commentaires et en vue d’autres suggestions de modifications. Un projet final en cours d’élaboration devrait être soumis au Parlement dès qu’il aura été finalisé. L’Algérie ne répugne pas à entamer des discussions avec les partenaires sociaux, et a un passé long et actif d’engagement tripartite sur tout un éventail de questions aux échelles nationale, sectorielle et des entreprises. Entre autres, le Pacte national économique et social de croissance a été conclu, ainsi que plusieurs conventions et accords collectifs. En ce qui concerne le Code du travail, il s’agit d’un cas de progrès, même si les progrès sont lents. Le gouvernement est encouragé à mener ce processus à son terme dès que possible, en prenant en compte la demande directe de 2016 dans laquelle la commission d’experts a identifié plusieurs dispositions restrictives. Troisièmement, à propos des restrictions au droit de constituer des syndicats et au droit des travailleurs de constituer des organisations et de s’affilier à des organisations de leur choix, l’article 6 de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 limite le droit de constituer une organisation syndicale aux nationaux algériens de naissance et aux personnes ayant acquis la nationalité algérienne au moins dix ans auparavant, et les articles 2 et 4 de la loi, lus conjointement, ont pour effet de restreindre la constitution de fédérations et de confédérations dans une profession, une branche ou un secteur d’activité. La commission avait noté précédemment l’indication du gouvernement selon laquelle la loi allait être modifiée afin que le droit de constituer des syndicats soit étendu aux citoyens étrangers et afin d’y inclure une définition des fédérations et confédérations. Etant donné que le gouvernement se dit résolu à apporter ces changements, et en l’absence d’information sur des faits nouveaux à cet égard, les membres employeurs demandent au gouvernement de modifier les articles 4 et 6 dès que possible. De plus, en ce qui concerne les préoccupations exprimées précédemment au sujet des longs délais dans l’enregistrement du Syndicat des enseignants du supérieur (SESS), du Syndicat national autonome des postiers (SNAP) et de la CGATA, les membres employeurs ont noté les indications suivantes du gouvernement: le SNAP a été enregistré, les autorités ont informé le SESS de certaines conditions qu’il doit satisfaire pour que sa demande d’enregistrement soit conforme à la loi, et la CGATA a été informée en 2015 qu’elle ne remplissait pas les conditions requises par la loi pour être constituée en tant que confédération. Sur ce dernier point, il n’apparaît pas clairement quelles exigences ne sont pas satisfaites. Les membres employeurs demandent donc instamment au gouvernement de fournir des informations à ce sujet, de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir l’enregistrement rapide des syndicats qui ont satisfait aux conditions prévues par la loi et, si nécessaire, de demander aux autorités compétentes de faire en sorte que les organisations en question soient dûment informées des autres conditions à remplir.
La membre travailleuse de l’Algérie a estimé que certains utilisent des stratagèmes pour exercer une pression sur les travailleurs à des fins tout autres que celles de la défense légitime des intérêts des travailleurs. L’expérience a montré que le syndicalisme qui reflète la volonté des travailleurs ne doit pas être entravé; le respect des principes fondamentaux au travail dans un contexte objectif loin de toute influence négative constitue une condition essentielle du progrès social. Autrement, le syndicalisme perdra toute crédibilité parmi les travailleurs. Elle a souligné l’importance d’un véritable dialogue social et d’une véritable représentativité établis selon les critères de l’OIT. L’UGTA qu’elle représente bénéficie d’une longue expérience qui a été partagée en de nombreuses occasions avec d’autres organisations syndicales.
Le membre employeur de l’Algérie a souligné que la ratification de la convention et des conventions fondamentales de l’OIT ainsi que la promulgation des lois sociales de 1990 ont permis d’enregistrer plus de 102 organisations syndicales. Depuis 1990, un dialogue social soutenu a permis de concrétiser un pacte économique et social en 2006, reconduit en 2010, ainsi qu’un pacte national économique et social de croissance en 2014. Un accord de développement de l’entreprise signé entre les organisations des employeurs et l’UGTA a été remis au BIT en juillet 2016. L’avant-projet du Code du travail longuement débattu par les employeurs a été transmis à ACT/EMP pour avis et propositions. Les observations des employeurs ont récemment été transmises au gouvernement. Dans le domaine du dialogue social, les initiatives entreprises par les autorités algériennes constituent une grande avancée qui mérite soutien et encouragements.
Le membre gouvernemental de la Mauritanie a relevé que l’Algérie a fait des efforts considérables pour traduire la convention no 87 dans les faits, convaincue que la liberté est un moteur puissant, ce qui n’est pas surprenant dans un pays d’un million de martyrs qui ont payé le plus lourd tribut pour la réalisation de cet objectif. L’Algérie est un pays dans lequel 102 organisations syndicales opèrent librement et promeuvent, aux côtés du gouvernement, le dialogue social à tous les niveaux. Les syndicats peuvent s’enregistrer sans danger et les activités syndicales ne sont soumises à aucune condition si ce n’est celles prévues dans le cadre juridique et réglementaire fondamental. En ce qui concerne le dialogue social, l’orateur a mentionné les activités organisées par l’Algérie au bénéfice de pays africains dans le cadre de l’initiative de coopération Sud-Sud financée par l’Algérie. L’exemple donné par le pays en la matière est hautement apprécié par la Mauritanie. La dynamique du dialogue social aux niveaux national, sectoriel et institutionnel a des résultats positifs.
Un observateur représentant la Confédération syndicale internationale (CSI) a souhaité faire le bilan du suivi donné aux trois recommandations formulées en 2015 par la Commission de la Conférence. En ce qui concerne les demandes d’enregistrement des organisations syndicales, celles-ci sont toujours traitées par les autorités avec un large pouvoir discrétionnaire sans que rien n’ait vraiment changé. Non seulement il n’y a pas eu de réintégration, mais les licenciements n’ont pas cessé, et ce dans tous les secteurs. En ce qui concerne le Syndicat des enseignants du supérieur solidaires (SESS), en dépit du dépôt de deux demandes d’enregistrement en 2012 et même d’une modification du statut du syndicat, aucune réponse du gouvernement n’est intervenue. Le cas de la CGATA, relatif au droit d’organisation, reste sans progrès depuis dix ans en dépit des plaintes adressées au Comité de la liberté syndicale, des différents rapports de suivi ainsi que des rapports de la commission d’experts. Il a fallu que la CGATA dénonce le contenu du nouveau projet de Code du travail pour attirer l’attention du Comité de la liberté syndicale et de la commission d’experts. Enfin, le cas du SNATEGS a pris une dimension particulière car, si le SNATEGS a obtenu son enregistrement après plusieurs années en 2013 suite à une plainte formée devant le Comité de la liberté syndicale, on doit déplorer le licenciement abusif des deux présidents successifs du syndicat par l’employeur qui a toujours refusé par écrit de reconnaitre le SNATEGS, en dépit de son enregistrement officiel et malgré les différents recours. L’orateur a conclu en indiquant que le ministre du Travail venait de décider de retirer l’enregistrement du SNATEGS.
La membre gouvernementale de Cuba a indiqué que la dynamisation des relations professionnelles que réglemente la législation sociale a favorisé la constitution de 102 organisations syndicales de travailleurs et d’employeurs. D’après les informations fournies par le gouvernement, le dialogue social se déroule à trois niveaux, c’est-à-dire au niveau du pays, du secteur d’activité et de l’entreprise, ce qui a permis la participation des partenaires sociaux et la négociation de conventions collectives. Par ailleurs, l’OIT a formulé des observations concernant l’avant-projet du Code du travail, lesquelles sont actuellement examinées par le gouvernement. L’esprit de coopération et la volonté dont fait preuve le gouvernement algérien doivent être dûment pris en considération par la commission.
Le membre gouvernemental de la République bolivarienne du Venezuela a rappelé les informations fournies par le gouvernement algérien concernant la création de 102 organisations syndicales, aussi bien de travailleurs que d’employeurs; la conclusion d’un grand nombre de conventions collectives, au niveau de la branche d’activité et de l’entreprise; et la tenue de 20 réunions tripartites entre le gouvernement, les employeurs et l’UGTA. Entre 2006 et 2015, le dialogue social a permis la signature de divers pactes nationaux dans les domaines économique et social, et dans celui de l’éducation, et a assuré la stabilité et le développement du secteur privé. Par ailleurs, l’avant-projet du Code du travail qui a fait l’objet de discussions, en janvier 2017, avec les organisations syndicales, prend en considération les observations du BIT. Après concertation avec les organisations syndicales, l’avant-projet sera soumis au Parlement en vue de son adoption. L’orateur a invité la Commission de la Conférence à prendre en considération la bonne volonté et les efforts réalisés par le gouvernement, dont font preuve les explications et les arguments présentés, et s’est dit convaincu que les conclusions de cette commission, issues de la discussion, seront objectives et équilibrées, ce qui encouragera le gouvernement à les prendre en considération et à les évaluer dans le cadre de l’application de la convention.
Le membre employeur de la Mauritanie a noté que l’amélioration de l’environnement syndical avec la promulgation en 1990 des lois sociales a conduit au pluralisme syndical qu’attestent aujourd’hui des dizaines d’organisations syndicales de travailleurs et d’employeurs. Il suffit aux organisations syndicales de se conformer aux dispositions législatives pour être enregistrées et entrer immédiatement en activité. Le nombre élevé de conventions collectives et d’accords collectifs enregistrés au plan national souligne le résultat probant du dialogue social. L’avant-projet de loi portant Code du travail, élaboré en concertation avec les partenaires sociaux et le BIT, est en passe d’être soumis au gouvernement et adopté par le Parlement. Au vu des avancées remarquables, la demande faite à l’Algérie de fournir des informations relatives aux manquements dans l’application des dispositions de la convention devrait être reconsidérée.
La membre gouvernementale de la Guinée a relevé la volonté politique du gouvernement de respecter les normes de l’OIT démontrée par la ratification de 60 conventions, dont les huit fondamentales, qui sont prises en compte dans la législation nationale, ainsi que l’adoption d’un dispositif juridique conforme aux instruments internationaux en ce qui concerne la liberté syndicale, le pluralisme syndical et le droit de grève. Il convient donc d’encourager le gouvernement algérien à poursuivre les contacts avec le BIT afin de bénéficier de son assistance technique.
La membre travailleuse de l’Espagne, s’exprimant au nom des syndicats CCOO, UGT, CIG et ELA (Espagne), CGT et CFDT (France), CGIL, CISL et UIL (Italie), LO-N (Norvège), TUC (Grande-Bretagne) et DGB (Allemagne) et l’Union syndicale suisse, a fait référence à différents cas d’enregistrement d’organisations syndicales en Algérie. Par exemple, le Syndicat autonome des avocats en Algérie (SAAVA) a déposé sa demande d’enregistrement le 8 septembre 2015 et n’a toujours reçu aucune réponse du ministère du Travail, de la Protection sociale et de l’Emploi en dépit du courrier de rappel qu’il a envoyé aux autorités le 24 mars 2016. Un autre exemple est celui du Syndicat des enseignants du supérieur solidaires (SESS) qui s’est vu refuser son enregistrement et dont tous les membres fondateurs font l’objet d’une enquête policière. Ils ont été convoqués par téléphone ou par écrit, une procédure illégale dont l’objectif était de faire pression sur les membres fondateurs et d’essayer de trouver des failles que les autorités pourraient avoir mises à profit pour éventuellement cloner cette organisation. Le 367e rapport du Comité de la liberté syndicale de mars 2013 met en exergue le manque de progrès, ainsi que la mauvaise foi et le refus du gouvernement d’appliquer les recommandations. Les mêmes conclusions peuvent être tirées des observations de la commission d’experts de 2015 et de 2016. Quant à la CGATA, ses statuts ont été élaborés par des experts d’ACTRAV et de la CSI afin de respecter à la lettre la loi et les conventions ratifiées par le pays. Malgré cela, le ministère du Travail a refusé l’enregistrement de différentes organisations syndicales, dont le Syndicat national autonome des travailleurs algériens (SNATA) en septembre 2000 ou la Confédération algérienne des syndicats autonomes (CASA) en avril 2001. Il ressort de l’examen de la plainte par le Comité de la liberté syndicale et des rapports intérimaires, ainsi que de l’examen du respect de la convention no 87 par la commission d’experts et la Commission de l’application des normes qu’aucun progrès n’a été accompli. En ce qui concerne le Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique (SNAPAP), les autorités ont décidé de le sanctionner après son refus de se positionner à la suite de l’élection du Président de la République en 1998. La première sanction a été la création d’un autre syndicat SNAPAP dont le dirigeant est un député. Les autorités ont tenté de toutes les façons possibles de le faire passer pour un syndicat légitime en l’enregistrant et en lui octroyant des moyens financiers, et en demandant aux administrations à tous les niveaux de ne travailler avec aucun autre syndicat. La plainte déposée devant le Comité de la liberté syndicale contient les preuves relatives à tous ces points. Enfin, l’oratrice a rappelé qu’en 2016 les autorités algériennes ont refusé l’accès à son territoire d’une délégation de la CSI, sans avoir à ce jour expliqué les motifs de ce refus.
Le membre gouvernemental du Tchad a fait observer que le paysage syndical en Algérie ne peut que faciliter la constitution des organisations syndicales étant donné qu’une seule condition – la conformité aux dispositions législatives régissant l’exercice du droit syndical – est requise pour l’enregistrement d’une organisation syndicale. Le pluralisme syndical progresse grâce à la volonté du gouvernement de donner plus d’espace aux organisations syndicales et d’alléger les conditions de légalité de leurs activités. Les résultats d’un dialogue social qui s’étend à tous les niveaux sont tangibles. Le gouvernement en fait un outil de paix et de stabilité comme l’atteste la conclusion des pactes nécessaires au développement socio-économique du pays. Quant à l’élaboration d’un document appelé à régir les activités et la vie des travailleurs et de leurs familles, l’approche mise en œuvre par le gouvernement s’inscrit dans la dynamique de la recherche du consensus avec ses partenaires sociaux. Le gouvernement fournit suffisamment d’efforts pour se conformer à la convention; il convient donc de l’encourager et de lui donner le temps de faire aboutir les projets et les réformes enclenchés.
Une observatrice représentant IndustriALL Global Union a fait part de sa forte inquiétude face aux graves violations des droits syndicaux dont est victime le SNATEGS. En décembre 2016, son président, M. Raouf Mellal, a été condamné par contumace à six mois de prison, accusé d’avoir obtenu illégalement certains documents. Ceux-ci, disponibles sur Internet, révèlent l’augmentation par la compagnie nationale Sonelgaz, sur une période de dix ans, des factures d’électricité de huit millions de consommateurs. Pourtant, plutôt que d’être loué pour avoir mis au jour un cas de corruption, il a été persécuté. En mai 2017, il a fait appel de sa condamnation sans succès. Depuis le début de 2017, le SNATEGS a organisé une série de grèves dans tout le pays pour exiger des salaires plus élevés, le respect des libertés syndicales et l’amélioration des normes de sécurité à la suite de nombreux décès de travailleurs sur des lignes électriques dans l’entreprise. En représailles de ces grèves bien suivies, 93 dirigeants syndicaux ont été licenciés et 663 autres membres du SNATEGS font l’objet de poursuites judiciaires. Le 16 mai 2017, à peine quelques jours avant une grève planifiée de cinq jours, le ministère du Travail a supprimé l’enregistrement du SNATEGS et a licencié M. Mellal, en violation de la loi nationale, de la convention no 87 et de la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, que l’Algérie a ratifiée en 1962. Les dirigeants et les membres du SNATEGS subissent constamment du harcèlement physique et des persécutions de la part des forces de l’ordre pour l’exercice de leurs activités syndicales légitimes et de leur droit de grève. En mars 2017, plus de 240 dirigeants et membres syndicaux ont été arrêtés, et 30 femmes ont été physiquement agressées à la suite de manifestations pacifiques. La situation est grave. Le gouvernement est prié d’abandonner toutes les charges pesant sur M. Mellal et sur d’autres membres du SNATEGS, de réintégrer les 93 membres syndicaux et d’annuler immédiatement la décision de supprimer l’enregistrement du SNATEGS.
Le membre gouvernemental de Madagascar a déclaré que le respect des normes constitue un élément important et fondateur de l’Organisation. Le fait qu’il y ait 102 organisations syndicales enregistrées en Algérie atteste que les procédures correspondantes existent. Ce nombre significatif est dans un contexte de liberté accordée aux travailleurs. Les textes normatifs existent et ces organisations sont régies par leurs statuts et ont signé plus de 3 000 conventions collectives. Dès lors, il convient de s’interroger sur la manière dont elles ont procédé pour signer ces conventions et quel est le pourcentage d’employés couvert par ces conventions collectives. La signature récente de pactes et chartes en matière de développement économique et social suite à des concertations organisées entre les entités concernées en Algérie témoigne de l’ouverture des autorités au dialogue. Le projet de Code du travail en cours d’élaboration procède d’une démarche participative et bénéficie de l’expertise du BIT; son aboutissement devra permettre une confiance mutuelle entre les parties et améliorer l’environnement socio-économico-politique du travail. L’orateur s’est dit persuadé que, forte de ces instruments nationaux, soutenus par des procédures de contrôle et d’évaluation permanentes, l’Algérie sera en mesure de se conformer à la convention. Il a encouragé le gouvernement à poursuivre ses efforts afin d’appliquer efficacement les instruments nationaux, mettre en place un mécanisme de suivi et d’évaluation avec des indicateurs appropriés, tout en fournissant à la commission d’experts les informations nécessaires.
Le membre travailleur du Soudan a déclaré qu’il y a plus de 100 syndicats en Algérie, que les lois et règlements nationaux permettent aux syndicats de jouer un rôle important et que les relations extérieures très étendues des syndicats algériens leur permettent de diriger le mouvement syndicaliste aux niveaux régional et international. Soulignant que l’Algérie est déterminée à mettre en œuvre les dispositions de la convention, il exprime l’espoir que le gouvernement pourra se prévaloir de l’assistance technique du BIT à cet égard.
Le membre gouvernemental de la Turquie a accueilli avec satisfaction les mesures concrètes et positives prises par le gouvernement, notamment la signature du Pacte économique et social de croissance, de la Charte d’éthique dans le secteur de l’éducation et du Pacte de stabilité. Ces mesures prises pour enrichir le dialogue social, qui ont abouti à la conclusion de plusieurs conventions et accords collectifs, indiquent la volonté et l’engagement du gouvernement en faveur d’une nouvelle amélioration de la situation des droits syndicaux dans le pays. Les efforts déployés pour adopter le Code du travail en tenant compte de l’avis des parties prenantes devraient également être salués. L’orateur a encouragé le gouvernement à redoubler d’efforts pour améliorer la vie professionnelle et la protection des droits syndicaux et à continuer de travailler en étroite collaboration avec le BIT à cet égard.
Le membre travailleur du Mali, secrétaire général de l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM), rappelant que le non-respect des libertés est un frein au développement, a noté que le gouvernement est ouvert à l’expression libre des idées qui concourent à la reconnaissance effective de la liberté syndicale. Le gouvernement est dès lors encouragé à respecter la convention dans sa lettre et à garantir l’exercice du droit syndical pour tous. L’avant-projet de Code du travail est un instrument important de bonne gouvernance, et sa soumission aux partenaires sociaux et au BIT est encourageante pour répondre aux attentes des parties concernées. L’orateur a conclu en indiquant que cette concertation doit se poursuivre et en observant que le gouvernement s’est engagé, à travers le Pacte économique et social national, à promouvoir un cadre institutionnel de renforcement du dialogue et de la concertation dans tous les domaines.
Le membre gouvernemental de la Libye s’est félicité de l’engagement pris par le gouvernement d’appliquer la convention dans la pratique. En réalité, comme l’a indiqué le gouvernement, un dialogue social est présent à tous les niveaux. Le projet de Code du travail a été discuté avec les partenaires économiques, les autorités administratives et les organisations syndicales. Les partenaires sociaux ont été associés au dialogue, ce qui a permis de signer plusieurs accords, comme l’a montré la réunion de janvier 2017 qui s’est tenue entre le ministre du Travail et des organisations syndicales indépendantes. Il est surprenant que l’Algérie ait été inscrite dans la liste des cas examinés par la Commission de la Conférence.
Une observatrice représentant la Confédération syndicale internationale (CSI) s’est référée à l’utilisation de la violence policière en dehors du cadre judiciaire visant à entraver le droit légitime à la liberté d’association des syndicats indépendants et l’interdiction des manifestations pacifiques. En octobre 2015, des policiers ont pénétré dans l’enceinte de l’Université de Tiaret pour arrêter le délégué SNAPAP, M. Ahmed Mansri, qui a été relâché le lendemain. En octobre 2016, un rassemblement au sein de la ville de Bouira a été violemment réprimé, 75 personnes ont été embarquées et retenues pendant toute la matinée dans les commissariats de la ville. En février 2016, le siège du SNAPAP-CGATA a été encerclé; plusieurs syndicalistes ont été retenus pendant plusieurs heures sans aucune décision judiciaire. L’oratrice informe également que la marche des enseignants et enseignantes contractuels, partis de la ville de Bejaia en mars 2016, a été bloquée pendant une quinzaine de jours par un important dispositif policier aux portes d’Alger, avant que ses participants ne soient finalement évacués de nuit par les forces de l’ordre. En mai 2017, le siège du SNAPAP-CGATA d’Oran a été encerclé afin d’empêcher le rassemblement pacifique organisé par la CGATA.
Le membre gouvernemental de l’Egypte a indiqué que le gouvernement démontre les efforts fournis pour assurer le pluralisme syndical et qu’aujourd’hui plus d’une centaine de syndicats sont enregistrés. Il a salué l’approche de dialogue social adoptée par le gouvernement dans le cadre du Pacte national économique et social, adopté par les partenaires sociaux comme base équitable et fructueuse pour les relations professionnelles. Notant la volonté politique du gouvernement de mettre les réglementations nationales en conformité avec la convention, l’orateur l’a encouragé à déployer plus d’efforts dans ce sens, notamment avec l’assistance technique du BIT.
La membre travailleuse des Etats-Unis, s’exprimant au nom de la Fédération américaine du travail et Congrès des organisations professionnelles (AFL-CIO) et du Congrès du travail du Canada (CLC), a souligné que de lourdes restrictions ont été imposées au droit des syndicats à la liberté de réunion dans le pays et que, malgré la levée de l’état d’urgence en 2011, les manifestations publiques restent interdites. Outre cette interdiction, les autorités s’appuient sur un certain nombre de dispositions pénales pour criminaliser les réunions pacifiques: i) l’article 97 du Code pénal interdit les «attroupements non armés qui peuvent troubler la tranquillité publique»; toute atteinte à cette disposition est passible d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à trois ans; ii) l’article 98 prévoit une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à un an pour les personnes qui organisent une manifestation non autorisée ou qui y participent; iii) l’article 100 sanctionne toute «provocation directe à un attroupement non armé»; et iv) la loi no 91-19 exige des Algériens qu’ils notifient aux autorités leur intention d’organiser une réunion publique ou une manifestation qui nécessite, dans la pratique, l’obtention d’une autorisation préalable, d’ailleurs souvent refusée. Les autorités saisissent également les tribunaux pour réduire la dissidence au silence, en particulier en cas de grève. Outre la criminalisation des réunions pacifiques, la section 24 du Code du travail exige des syndicats qu’ils remplissent un certain nombre de critères avant de pouvoir se mettre en grève, et quand bien même ces critères sont remplis, les grévistes sont souvent licenciés et encourent des poursuites pénales. Quoique l’article 49 de la Constitution garantisse le droit à la liberté de réunion, les grèves et les manifestations politiques se heurtent systématiquement à la violence policière et à la répression. C’est ce qui s’est produit lors d’une manifestation pacifique qui a réuni des milliers de membres du syndicat SNATEGS en mars 2017 pour réclamer des salaires décents et le droit à la liberté de réunion. Cette manifestation s’est soldée par l’arrestation de 240 participants et l’agression physique de 30 femmes. L’AFL-CIO et le CLC ont partagé la profonde préoccupation exprimée par le Rapporteur spécial de l’ONU dans un rapport de 2013, ainsi que par Amnesty International et Human Rights Watch, quant aux graves violations de la convention qui continuent d’être commises par le gouvernement.
Le membre gouvernemental du Ghana a noté que le gouvernement de l’Algérie a mis en place des structures et déployé des efforts sous les orientations de la commission d’experts en vue de satisfaire pleinement les exigences de la convention à travers l’interaction de la demande et de l’offre de travail et des relations cordiales entre les travailleurs et les employeurs. Ce parcours ne peut porter ses fruits sans un engagement en termes de délai, de moyens financiers et de capital humain. Le gouvernement de l’Algérie est en train de parvenir à cet exploit au moyen de l’adoption de lois garantissant le pluralisme syndical et la constitution d’organisations de travailleurs. Le dialogue social et la bonne gouvernance sont instaurés à travers des consultations pour l’élaboration du projet de Code du travail, actuellement à l’examen. La plupart des thématiques de ce projet de loi sont le résultat de consultations avec les partenaires économiques, différentes autorités administratives et les syndicats, avec la participation active du BIT. Le gouvernement doit en conséquence être encouragé à renforcer son engagement avec ses partenaires sociaux et le BIT, en vue de parvenir à concrétiser cette aspiration louable.
La membre gouvernementale du Sénégal a salué l’ensemble des réponses données par le gouvernement aux préoccupations formulées par la commission d’experts dans sa dernière observation, ainsi que les mesure prises par celui-ci depuis l’adoption des lois sociales de 1990. Ces dernières ont permis notamment la création de 102 organisations syndicales de travailleurs et d’employeurs, le maintien du dialogue social, comme le démontre les consultations tripartites et bipartites, la négociation de conventions collectives et d’accords de branche et la signature de nombreux pactes. La concertation inclusive, à l’origine de l’élaboration de la nouvelle législation, est preuve de l’engagement du gouvernement à la rendre conforme aux normes de l’OIT. Il convient d’encourager les partenaires sociaux à poursuivre leur travail dans le sens du respect des normes sociales de l’OIT et le gouvernement à continuer ses efforts en vue de mettre en œuvre la convention, tout en gardant à l’esprit que l’atteinte de l’objectif du travail décent passe nécessairement par le dialogue social et le respect de la liberté syndicale.
Un observateur représentant l’Internationale des services publics (ISP) a souligné que le cas est examiné par la commission d’experts presque tous les ans depuis quinze ans, et l’a été par la Commission de la Conférence en 2014 et 2015. A ces occasions, le gouvernement a réaffirmé ce qui suit: la législation et la réglementation du travail se fondent sur les principes des conventions de l’OIT; les partenaires sociaux sont représentés dans tous les secteurs d’activité au niveau régional; et les organisations syndicales sont enregistrées conformément aux dispositions prévues par la loi, dans le cadre d’un processus simple et sans restriction. Néanmoins, l’examen du cas par la Commission de la Conférence démontre le contraire. Les plaintes présentées au Comité de la liberté syndicale ont avéré les licenciements antisyndicaux, les actes de harcèlement de la part des autorités publiques, ainsi que l’arrestation et la détention arbitraire de syndicalistes appartenant à des organisations de travailleurs autonomes qui ne respectent pas le diktat du gouvernement. Le gouvernement s’en prend à certains membres du SNAPAP, qui est affilié à l’ISP, et aux membres de la CGATA et, à ce jour, il ne lui a pas accordé l’enregistrement syndical. M. Rachid Malaoui, président de la CGATA, a été licencié en 2013. Le 16 janvier 2017, l’ambassadeur d’Algérie à Bruxelles a communiqué une lettre à la CSI dans laquelle il indique que M. Malaoui est accusé de chercher à provoquer une insurrection. L’orateur se dit flatté que le gouvernement considère qu’un syndicaliste ait cette capacité de mobilisation, mais ce n’est pas le cas et il ne s’agit que d’une autre excuse pour refuser d’enregistrer la CGATA. D’autres syndicalistes ont été récemment licenciés au motif de leur activité syndicale, comme M. Hasan Fouad, responsable des migrations et des réfugiés de la CGATA, en décembre 2016, et M. Naser Kaca, responsable de la section syndicale de l’enseignement supérieur de la CGATA à Bejaïa, le 26 avril 2017. D’autres affiliés ont été suspendus, rétrogradés, ou leurs salaires ont fait l’objet de retenues. C’est le cas par exemple de MM. Yahia Habib et Arab Haddak, responsables de la section de l’enseignement supérieur du SNAPAP-CGATA à Tiaret et Bejaïa. Par ailleurs, Mme Hassina Bensaïd, de la section syndicale municipale du SNAPAP-CGATA à Bejaïa, a été mutée jusqu’à neuf fois en une seule année. De plus, en raison de la persistance de son activité syndicale, elle a été menacée avec une arme à feu par le président de l’assemblée municipale. Aussi, Mme Nadia Bedri, de la section syndicale du SNAPAP-CGATA à l’Agence nationale des ressources hydrauliques, a été obligée de subir un examen psychiatrique au motif qu’elle avait porté plainte pour harcèlement sexuel. Le gouvernement n’a pas donné suite à toutes les recommandations de la commission d’experts et du Comité de la liberté syndicale, et aux conclusions de la Commission de la Conférence de 2014 et 2015. La commission doit condamner énergiquement ces pratiques et prier instamment le gouvernement de rendre la législation conforme à la convention et d’en respecter les principes.
Le membre gouvernemental de la République islamique d’Iran a fait bon accueil aux mesures adoptées par le gouvernement pour renforcer le pluralisme syndical et, à cet égard, a pris note des données fournies sur la création d’organisations des travailleurs et des employeurs dans le pays. Concernant le dialogue social, 20 réunions tripartites et 14 réunions bipartites ont été organisées au niveau national, ce qui a abouti à un certain nombre d’accords entre le gouvernement et les partenaires sociaux. Le projet de Code du travail est actuellement examiné par les syndicats, les partenaires économiques et les autorités administratives concernées. Ces efforts montrent que le gouvernement a la volonté de progresser sur cette question et qu’il s’y emploie. Tout en soutenant ces mesures, l’orateur a encouragé le gouvernement à poursuivre ses efforts et a demandé au Bureau de lui fournir l’assistance technique nécessaire.
Le membre gouvernemental du Qatar a remercié le gouvernement pour les informations détaillées qu’il a fournies et qui ont révélé les mesures adoptées pour appliquer la convention. Il a félicité le gouvernement des efforts déployés en vue du dialogue social et de la tenue de consultations avec les partenaires sociaux et économiques, qui ont débouché sur la signature de plusieurs accords nationaux et sectoriels.
Le membre gouvernemental du Pakistan a salué les mesures prises par le gouvernement pour appliquer les normes du travail dans le pays, notamment des mesures législatives et politiques, ainsi que son dialogue constructif avec les organes de contrôle du BIT. Il a noté que 102 syndicats sont enregistrés dans le pays, ce qui souligne les possibilités de dialogue social et d’exercice de la liberté syndicale. Le projet de Code du travail est examiné par les partenaires sociaux, et le gouvernement attend de recevoir les vues de tous les syndicats en vue d’enrichir éventuellement le code. Il a exprimé l’espoir que les syndicats s’engagent de manière constructive dans ce processus et que leurs préoccupations véritables seront prises en considération par le gouvernement.
Le membre gouvernemental de l’Angola a noté avec satisfaction que, suite à la promulgation des lois sociales de 1990, l’Algérie a facilité la mise en œuvre du pluralisme syndical. Plusieurs organisations syndicales des travailleurs et employeurs ont ainsi été créées, en conformité avec la législation en vigueur. En outre, le dialogue social en Algérie se déroule dans un parfait respect du tripartisme, permettant notamment la signature du Pacte économique et social de croissance, lequel définit un certain nombre d’objectifs de gestion adéquate des secteurs économiques et sociaux. L’Algérie est encouragée à poursuivre ses efforts dans le renforcement du pluralisme syndical. La Commission de la Conférence ainsi que le Bureau doivent accompagner le gouvernement dans la mise en œuvre des réformes économiques et sociales destinées au développement et à la paix sociale.
La membre gouvernementale du Kenya a noté que la législation en vigueur en Algérie permet l’enregistrement d’organisations d’employeurs ainsi que de travailleurs, dont le nombre est passé en conséquence à plus de 102 syndicats. Ceci démontre que les exigences légales pour l’enregistrement des syndicats sont conformes aux dispositions de la convention. L’oratrice a également pris note du Pacte national économique et social signé par le gouvernement et les partenaires économiques et sociaux en vue de renforcer le dialogue et d’améliorer les consultations, ainsi que de son renouvellement périodique. Enfin, elle a noté l’augmentation du nombre d’accords de négociations collectives ces dernières années. Elle a conclu en soulignant qu’un processus de modification de la législation et de restructuration institutionnelle exige du temps et qu’il faut donc en accorder davantage au gouvernement, en même temps qu’une assistance technique de la part du BIT, pour réaliser la mise en conformité avec la convention.
Le membre gouvernemental du Bangladesh s’est félicité des progrès accomplis par le gouvernement algérien pour faire appliquer la législation du travail et promouvoir le dialogue social à tous les niveaux. De même, il salue la collaboration continue entre le gouvernement, les partenaires sociaux et le BIT en vue de la rédaction du Code du travail. Il encourage le BIT à continuer à fournir une assistance technique à l’Algérie afin de mener à bien les réformes en cours et d’améliorer les capacités institutionnelles des mécanismes réglementaires.
Le membre gouvernemental du Soudan a remercié le gouvernement pour les efforts importants qu’il a accomplis en matière de dialogue social et dans l’élaboration de la réglementation nationale du travail. Le dialogue social donne de la légitimité à toutes les mesures prises par le gouvernement, qui offrent aux partenaires sociaux le droit à la liberté syndicale sans conditions, sinon celles qui sont spécifiées par la loi. Le gouvernement est encouragé à poursuivre ses efforts en matière de dialogue social et à solliciter pour ce faire l’assistance technique du BIT en vue de l’élaboration du Code du travail.
La membre gouvernementale du Liban a accueilli favorablement les informations fournies par le gouvernement sur l’application de la convention, suite aux commentaires de la commission d’experts, et sur le projet de Code du travail dont les dispositions sont en conformité avec les normes internationales du travail et tout particulièrement la convention no 87. Elle a encouragé les partenaires sociaux à poursuivre le dialogue social existant, le cas échéant, en sollicitant l’assistance technique du BIT.
La membre gouvernementale du Zimbabwe a pris bonne note de la législation complète de l’Algérie, ainsi que de l’engagement au dialogue pris par le gouvernement, dont le membre employeur s’est fait l’écho. Elle partage les préoccupations exprimées par le représentant gouvernemental sur les critères à appliquer pour dresser la liste des cas dont la commission devra discuter. Le représentant gouvernemental tout comme le membre employeur de l’Algérie ont confirmé l’existence d’un mécanisme de dialogue social, comme le témoignent les nombreuses réunions qui se sont tenues aussi bien à l’échelle tripartite que bipartite. Celles-ci ont donné lieu à des pactes sociaux et économiques qui ont été bénéfiques pour le marché du travail algérien, ce qui est digne d’éloges. Pour qu’il puisse atteindre les objectifs souhaités, le dialogue social ne doit être ni précipité ni accéléré. La commission doit dûment tenir compte de la volonté du gouvernement algérien d’engager le dialogue avec ses partenaires sociaux, et il convient d’encourager les partenaires tripartites à continuer à collaborer afin d’obtenir des solutions conçues par le pays lui-même pour faire face aux défis auxquels il est confronté. Ce cas est un cas de progrès, et le Bureau devrait continuer à offrir une assistance technique afin de renforcer les initiatives destinées à promouvoir la justice sociale sur le marché du travail algérien.
Le représentant gouvernemental a souligné que, malgré le soutien de la majorité des intervenants des trois secteurs, quatre ou cinq ont porté des accusations envers son gouvernement auxquelles une réponse doit être donnée. Le dialogue et le respect doivent être réciproques et il doit être évité de s’éloigner des grands principes prônés par l’OIT en la matière. L’Algérie a reconquis et préservé sa stabilité au prix d’énormes sacrifices, stabilité bénéfique dont l’impact se mesure dans toute la région africaine et pourtour méditerranéen. La 2e session du Comité technique spécialisé sur le développement social, le travail et l’emploi de l’Union africaine, qui a été réalisée à Alger il y a environ deux mois, a permis aux délégations africaines tripartites présentes dans cette commission de constater la réalité du dialogue social en Algérie, où il n’y a ni restriction ni menace, ni entrave. L’orateur a mentionné deux exemples. S’agissant du SNAPAP, les communications transmises au BIT en 2014 et 2015 ont été claires et précises. A l’époque, il y avait un problème concernant la situation de cette organisation syndicale, mais la justice a décidé qu’il existe un seul SNAPAP et non pas deux. Le SNAPAP est dirigé par M. Felfour, et les personnes qui ont été mentionnées dans les interventions ne sont pas concernées par cette question. Le SNAPAP a travaillé avec l’administration, obtenu des documents officiels et tenu des assemblées générales réglementaires. Concernant le SNATEGS, suite à la demande de l’ISP, une rencontre entre le secrétaire adjoint de l’ISP et le gouvernement a eu lieu il y a quarante-huit heures dans les locaux du BIT. La discussion a été franche et amicale, mais il semble toujours y avoir des questions concernant une prétendue dissolution. Le SNATEGS est une organisation syndicale enregistrée et active; elle est dirigée par M. Boukhaly. Il a été indiqué au secrétaire adjoint de l’ISP que la personne mentionnée dans les précédentes interventions n’en est pas le président. Elle travaille comme avocat depuis 2016 et, par conséquent, ne peut pas défendre les intérêts de travailleurs là où il ne travaille pas. L’intéressé est respecté comme citoyen algérien, mais il n’est pas secrétaire général du SNATEGS. Le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale connaît les procédures concernant l’enregistrement ou la dissolution. Si une question de dissolution se présente, elle suivra les procédures officielles et, si des informations contraires circulent, les personnes seront induites en erreur. En ce qui concerne le Code du travail, de la lenteur peut être perçue, mais il est important d’élaborer un texte qui résiste au temps et soit près de la réalité. Le gouvernement est actuellement engagé dans une concertation avec tous les partenaires sociaux. L’Algérie dispose d’un arsenal juridique et adapte et améliore le Code du travail et sa législation nationale pour la mettre en conformité avec une certaine évolution du secteur économique et de l’entreprise. En conclusion, il a mentionné qu’il faut éviter les faux débats et accusations gratuites qui peuvent porter préjudice à cette commission. L’Algérie travaille de manière transparente avec toutes les institutions car le dialogue et la concertation entre les parties sont la base de la législation nationale.
Les membres employeurs ont remercié le gouvernement et les membres de la commission pour leurs interventions, celles-ci ayant contribué à clarifier certains points et à mieux comprendre la situation dans le pays. Le gouvernement a fourni beaucoup d’informations sur le droit et la pratique en Algérie, notamment les processus de dialogue social à différents niveaux, et s’est dit prêt à rencontrer les parties concernées, dans la perspective des mesures à prendre pour répondre aux questions soulevées lors de cette discussion. Bien que le gouvernement semble s’attaquer à ces questions dans la pratique, le moyen de renforcer le dialogue social passe essentiellement par le Code du travail, un instrument législatif qui est en cours d’élaboration depuis plusieurs années et qui n’a pas encore été adopté. Même si l’on peut comprendre que ce processus demande du temps, il conviendrait de le mener à bien dans des délais raisonnables. Par conséquent, les membres employeurs ont encouragé le gouvernement à achever les travaux qu’il a entrepris dans le cadre du Code du travail. De même, rappelant que, d’une manière générale, les membres employeurs ne tolèrent pas le recours à la violence et qu’ils auraient souhaité avoir des informations plus détaillées sur les raisons ayant motivé les actions du gouvernement, ils ont encouragé celui-ci à fournir ces informations à la commission d’experts, en vue de permettre un examen approprié du cas.
Les membres travailleurs se sont déclarés préoccupés par les violations systématiques de la liberté syndicale en Algérie et ont espéré sincèrement que la sélection de ce cas apportera des changements concrets dans la vie des syndicalistes confrontés aux licenciements illégaux, aux détentions arbitraires et aux ingérences policières violentes lors de manifestations pacifiques. Le gouvernement doit restaurer la justice pour les femmes et les hommes qui luttent sans relâche, souvent au risque de leur vie et de leur liberté, pour établir un mouvement syndical indépendant. La question qu’il convient de se poser est de savoir comment il serait possible de jeter les bases d’un Etat démocratique si un droit aussi fondamental que le droit de s’associer et d’adhérer librement à des associations pour représenter les intérêts des travailleurs n’est pas reconnu. La réponse est on ne peut plus simple: cela n’est pas possible. Le droit de libre association constitue le fondement même de toute société démocratique. En refusant d’enregistrer et de reconnaître les syndicats indépendants, le gouvernement algérien affiche clairement une préférence pour des procédés autoritaires. Le Comité de la liberté syndicale, la commission d’experts et la Commission de l’application des normes ont, à maintes reprises, appelé le gouvernement à prendre toutes les dispositions nécessaires pour garantir, le plus rapidement possible, l’enregistrement des syndicats qui réunissent les conditions prévues par la loi. Ces appels ont malheureusement été ignorés et cela fait plus de dix années que le gouvernement ne réagit pas aux recommandations réitérées d’apporter des modifications fondamentales à la loi no 90-14. L’Algérie persiste à bafouer des droits garantis aux travailleurs en vertu de la convention, et ce au mépris des obligations internationales auxquelles elle a souscrit. Les membres de la commission ont la responsabilité de veiller au plein respect des droits garantis au titre de la convention et d’adopter une position ferme, même à l’égard de gouvernements qui semblent n’y accorder que peu d’importance. Le gouvernement doit prendre – sans plus tarder – des dispositions en vue de la mise en œuvre des recommandations émanant des mécanismes de contrôle de l’OIT concernant la liberté syndicale. Des réformes doivent être engagées en concertation avec les partenaires sociaux. En particulier, le président de la CGATA, M. Rachid Malaoui, et le président du SNATEGS, M. Raouf Mellal, qui, entre autres, a été condamné à six mois d’emprisonnement en raison de sa militance syndicale, doivent être réintégrés dans leur poste. En outre, le gouvernement doit immédiatement procéder à l’enregistrement des syndicats indépendants, en particulier de la CGATA et SAAVA, et annuler la décision ministérielle du 16 mai 2017 portant le retrait du récépissé d’enregistrement du SNATEGS. Ces mesures urgentes constituent un premier pas indispensable pour ramener l’Algérie sur la bonne voie. Les membres travailleurs ont terminé en exhortant le gouvernement à accepter une mission de haut niveau avant la prochaine session de la Conférence internationale du Travail.
La commission a pris note des déclarations orales du représentant du gouvernement et de la discussion qui a suivi.
La commission a exprimé sa profonde préoccupation face aux restrictions persistantes du droit des travailleurs de constituer des syndicats, des fédérations et des confédérations de leur choix et d’y adhérer. La commission a noté avec préoccupation que les progrès accomplis dans la mise en application de la convention no 87 demeurent inacceptablement lents, étant donné que cela fait plus de dix ans que ce cas est discuté et que le gouvernement doit encore soumettre le projet de code du travail au Parlement en vue de son adoption définitive. La commission a déploré que le gouvernement n’ait pas encore répondu de manière satisfaisante à ses conclusions de 2015.
Prenant en compte la discussion qui a eu lieu sur ce cas, la commission a prié le gouvernement de l’Algérie de prendre, sans délai, les mesures suivantes:
- assurer que l’enregistrement des syndicats, en droit et dans la pratique, est conforme à la convention no 87;
- traiter les demandes d’enregistrement de syndicats en suspens qui répondent aux conditions fixées par la loi et informer la commission d’experts des résultats à cet égard;
- assurer que le nouveau projet de code du travail est conforme à la convention no 87;
- modifier l’article 4 de la loi no 90-14 afin de lever tout obstacle à la constitution de fédérations et de confédérations de leur choix par les organisations de travailleurs, quel que soit le secteur auquel elles appartiennent;
- assurer que la liberté syndicale peut être exercée dans un climat exempt d’intimidation et sans violence contre les travailleurs, les syndicats ou les employeurs;
- réintégrer les agents de la fonction publique licenciés pour des motifs de discrimination antisyndicale.
Le gouvernement devrait accepter une mission de contacts directs avant la prochaine Conférence internationale du Travail et faire rapport à la commission sur les progrès accomplis avant sa session de novembre 2017.
Le représentant gouvernemental a souligné que le contenu des conclusions doit être fidèle aux discussions qui se sont déroulées au sein de la commission. Sur les 32 interventions faites par un membre travailleur, employeur ou gouvernemental, 26 ont soutenu les actions engagées par l’Algérie. Sur cette base, la question de l’envoi d’une mission de contacts directs ne devrait pas se poser. Soulignant que ces conclusions ne reflètent pas les réactions des membres de la commission ni les réalités de l’exercice du droit syndical dans le pays, l’orateur a demandé à ce qu’elles soient révisées. Il a également affirmé que certaines des allégations rappelées par les membres travailleurs sont fausses et dénuées de tout fondement. Le Syndicat national autonome des travailleurs du gaz et de l’électricité (SNATEGS) est enregistré et poursuit ses activités normalement, alors qu’il a été prétendu qu’il avait été dissous. S’agissant du projet de code du travail, contrairement à ce qui a été dit, le processus législatif suit son cours et le processus de consultations avec les partenaires sociaux a été engagé. Un nouveau projet de texte a été communiqué au BIT. Le gouvernement a donné des informations suffisantes sur le paysage syndical algérien. Enfin, s’agissant du cas personnel de M. Mellal, le représentant gouvernemental a indiqué qu’il était avocat et non travailleur de la Sonelgaz. Tout en rappelant que l’Algérie est un pays démocratique, le représentant gouvernemental a réitéré sa demande de révision des conclusions qui ont été adoptées.
Un représentant gouvernemental a rappelé que l’Algérie, en ratifiant 59 conventions de l’OIT, avait affiché de manière claire sa volonté d’utiliser les normes internationales du travail pour son développement économique et social. La législation et la réglementation du travail algériennes se fondent sur les principes énoncés par ces conventions et par la Constitution algérienne. Le droit syndical est un acquis, et les partenaires sociaux sont représentés dans tous les secteurs d’activités au niveau national. L’enregistrement des organisations syndicales obéit aux dispositions de la loi, à travers des formalités simples et sans contraintes. Il en résulte que 95 organisations syndicales de travailleurs et d’employeurs, aussi bien dans le secteur public que privé, sont enregistrées, dont neuf au cours des deux dernières années. La législation nationale a également instauré un environnement propice à la négociation collective qui permet aux partenaires économiques et sociaux de normaliser les relations socioprofessionnelles. L’expérience algérienne en matière de dialogue social, telle que présentée au Conseil d’administration du BIT, a suscité des échos favorables et des encouragements. Un projet de Code du travail a été transmis aux partenaires sociaux pour avis ainsi qu’au BIT. La politique menée est donc claire, et toutes les démarches sont engagées dans un cadre de transparence totale. L’élaboration d’un Code du travail, ou son amendement, est un processus qui peut paraître long, mais qui doit respecter des phases et des étapes de concertation et d’échanges pour aboutir à un consensus entre les parties. Le BIT a connaissance des étapes engagées pour la réforme du Code du travail, qui a fait l’objet d’une réunion tripartite dès juillet 2014, et il a récemment émis des recommandations sur le projet de texte. Un programme de travail a été élaboré avec l’ensemble des parties, et il est suivi de manière méthodique et sans pression. Le rapport de la commission d’expert contient des informations erronées. Le gouvernement algérien n’a aucun problème avec le Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique (SNAPAP) ni avec le Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (SNAPEST) dont la direction a été confirmée par décisions de justice qui doivent être respectées par tous. L’Algérie est un Etat de droit, ouvert au dialogue social. Un pacte économique et social, signé en 2006 entre le gouvernement et les partenaires économiques et sociaux, a été reconduit en 2010. Un autre pacte économique et social de croissance a été signé en février 2014. Les allégations ne peuvent donc être acceptées car elles ne sont qu’une répétition d’une partie de ce qui avait été avancé en juin 2014, alors que des explications avaient été fournies démontrant le respect de la convention no 87. La commission devrait s’assurer du bien-fondé des allégations présentées, alors que l’Algérie donne l’exemple en matière de concertation et de négociation, comme cela a été reconnu par différents services du BIT après des visites sur site en Algérie. Tous les efforts seront faits avec pour objectif le développement du dialogue entre les partenaires, dans le respect des décisions prises par les juridictions compétentes et en conformité avec la réglementation et la législation, afin de préserver les droits des parties sans aucune ingérence.
Les membres travailleurs ont rappelé que la Commission de l’application des normes avait discuté ce cas en 2014, notamment sur les points concernant les articles 2 et 5 de la convention no 87, relatifs au droit de constituer des organisations syndicales et au droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix, et de s’y affilier. Les mêmes reproches se répétant depuis plus de dix ans, il était espéré que le gouvernement modifie sa législation et sa pratique nationales et fasse rapport sur les mesures prises en matière de liberté syndicale. Le rapport de la commission d’experts de cette année prouve que le gouvernement n’a pas donné suite aux remarques constructives entendues au sein de la Commission de l’application des normes en 2014. Alors que le gouvernement s’était déclaré prêt à améliorer son droit du travail, force est de constater que cela n’a pas changé. La commission d’experts demande de nouveau que la modification de l’article 6 de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 intervienne sans délai afin que soit reconnu à tous les travailleurs, sans distinction de nationalité, le droit de constituer une organisation syndicale. Elle demande également, dans le cadre de la réforme législative en cours, que le gouvernement procède sans délai supplémentaire à la révision de l’article 4 de la loi no 90-14 afin de lever tout obstacle à la constitution, par les organisations de travailleurs et quel que soit le secteur auquel elles appartiennent, de fédérations et de confédérations de leur choix. Dans son 374e rapport (mars 2015), le Comité de la liberté syndicale se penche une nouvelle fois sur la question de l’enregistrement de certains syndicats du secteur public et note sa préoccupation en ce qui concerne des délais trop longs d’enregistrement alors que les organisations demanderesses ont satisfait aux obligations administratives. Il rappelle également qu’une absence d’enregistrement paralyse l’action des syndicats et qu’une procédure d’enregistrement trop longue constitue un obstacle sérieux à la création d’organisations, ce qui équivaut à la négation du droit de créer des organisations sans autorisation préalable.
La liberté syndicale est un droit de l’homme. C’est dans ce cadre que le Parlement européen a voté le 30 avril 2015 une résolution appelant les autorités algériennes à «assurer la sûreté et la sécurité des militants de la société civile et des défenseurs des droits de l’homme ainsi que leur liberté à poursuivre leurs activités pacifiques légitimes». Les députés européens demandent ainsi aux autorités algériennes d’assurer et de garantir le droit à la liberté d’expression et d’association. Cette résolution du Parlement européen, la première sur l’Algérie depuis plus d’une décennie, témoigne de l’importance que l’Union européenne attache à la démocratie et aux droits syndicaux des travailleurs et des employeurs en Algérie. Depuis la dernière session de la Commission de l’application des normes, le gouvernement avait promis d’étudier le dossier d’enregistrement de la Confédération générale autonome des travailleurs en Algérie (CGATA). Or en mars 2015, le ministère du Travail a refusé sans explication aucune son enregistrement ainsi que celui d’autres syndicats de diverses branches. La seule initiative des pouvoirs publics a été de continuer des actes de harcèlement envers les travailleurs. Aujourd’hui encore, le gouvernement algérien persiste à ne pas répondre aux accusations d’actes d’intimidation et de menaces, y compris des menaces de mort, formulées par la Confédération syndicale internationale (CSI) et par plusieurs syndicats algériens, représentatifs surtout du personnel de la fonction publique et de l’enseignement. Il ne répond pas davantage aux questions posées par la commission elle-même, qui concernent la conformité de la législation algérienne avec les normes de l’OIT. Les membres travailleurs ont conclu que le gouvernement algérien témoignait d’une inertie inacceptable. La liberté syndicale permet que les travailleurs et les employeurs puissent se regrouper pour négocier de façon efficace leurs conditions de travail. Les normes contenues dans la convention no 87 s’appliquent à tous les travailleurs «sans distinction d’aucune sorte» et couvrent donc le personnel de l’Etat, ce qui est un principe essentiel.
Les membres employeurs se sont félicités du caractère constructif de la déclaration du gouvernement, de l’attention qu’il a portée à l’observation de la commission d’experts et des informations communiquées en retour au sujet des améliorations dans la mise en œuvre de la convention no 87 en droit comme en pratique, et de ses commentaires concernant le rôle du dialogue avec les partenaires sociaux s’agissant de l’amélioration de la législation du travail. Ils ont rappelé qu’il s’agit d’un suivi du cas soumis à la Commission de l’application des normes lors de la 103e session de la Conférence, en 2014, et croient comprendre que, depuis lors, le gouvernement s’est efforcé d’achever un projet de Code du travail. Les membres employeurs ont invité le gouvernement à persévérer dans l’élaboration du nouveau Code du travail tout en consultant les partenaires sociaux. Malheureusement, cette commission n’a pas reçu copie du projet de Code du travail et ne peut donc émettre qu’un avis limité. Néanmoins, ils invitent le gouvernement à fournir à la commission d’experts des informations détaillées sur ce nouveau code afin de lui permettre de l’analyser à la lumière de l’observation des experts. Les membres employeurs se sont déclarés raisonnablement optimistes quant à la manière dont les choses ont évolué et y voient un progrès. Il convient d’espérer que le nouveau Code du travail traitera les questions relatives aux organisations syndicales et à leur création faisant l’objet des articles 2, 4 et 6 de la loi no 90-14. Le gouvernement avait indiqué l’an dernier que le nouveau Code du travail définirait les critères relatifs aux droits des syndicats de constituer ou de s’affilier à des fédérations de leur choix quel que soit le secteur, et que la question de la nationalité des personnes demandant à constituer des fédérations serait examinée. A la lumière des commentaires formulés par le gouvernement pendant cette session et celle de l’an dernier, les membres employeurs ont formulé l’espoir que ces assurances s’avéreront fondées lorsqu’ils procéderont à l’examen du projet de Code du travail.
Une membre travailleuse de l’Algérie a rappelé que la promulgation du nouveau Code du travail en Algérie a été l’un des points de revendication de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) depuis 1995. Le gouvernement a remis à l’UGTA en 2014 une copie du projet de code pour avis et consultation. Afin de l’améliorer et de le rendre conforme aux normes de l’OIT, l’UGTA a sollicité une assistance technique du BIT qui a donné lieu à un document de 30 pages, remis en avril 2015, dans lequel le BIT a exprimé son appréciation et constaté qu’il s’agissait d’une grande avancée en matière de relations de travail. Il convient de noter que l’UGTA a introduit dans ses statuts une disposition donnant droit aux travailleurs étrangers d’adhérer et de se présenter aux élections. De plus, convaincue de l’importance du respect des conventions fondamentales, l’UGTA a toujours agi par la voie du dialogue social au profit des droits des travailleurs.
Un autre membre travailleur de l’Algérie a indiqué que les expériences liées à la liberté syndicale en Algérie différaient de celles d’autres pays. La Constitution de 1999 a consacré le principe du système multipartite. Le pays compte ainsi 60 partis et 95 syndicats. Des demandes ont été formulées afin d’améliorer le Code du travail. Un projet de code a donc été soumis au BIT. Le syndicat travaille en toute liberté et de manière pleinement démocratique, sans pression aucune, depuis 1999.
Le membre gouvernemental de l’Egypte a salué les efforts accomplis par le gouvernement algérien pour respecter la liberté syndicale. Les déclarations du gouvernement montrent qu’il respecte les règles du dialogue social et qu’il a donné aux partenaires sociaux la possibilité d’exprimer leurs opinions. En outre, le BIT a jugé positifs les amendements apportés au Code du travail. Ces mesures doivent être reconnues.
Le membre gouvernemental de la Lybie a rappelé que l’Algérie a ratifié 59 conventions et a présenté 28 rapports, ce qui démontre que le pays respecte ses obligations et les normes internationales du travail. La commission a examiné le cas de l’Algérie au cours de la précédente session et a recommandé que le gouvernement modifie l’article 6 de la loi no 90-14 afin de permettre aux travailleurs de jouir du droit de constituer des syndicats sans discrimination fondée sur la nationalité. Elle a également demandé au gouvernement de fournir toute information relative à de nouvelles évolutions à cet égard, ce que le gouvernement a fait. Le gouvernement ne s’est pas contenté d’amender l’article en cause: il a adopté une nouvelle loi avec la participation des partenaires sociaux, et la leur a présentée pour obtenir leur avis. Cet élément devrait être pris en compte, et le gouvernement devrait être encouragé à promulguer dans les meilleurs délais le projet de Code du travail, qui devrait tenir compte des droits de l’homme et des normes internationales du travail.
Une autre membre travailleuse de l’Algérie, s’exprimant au nom de la CSI et de la Confédération générale autonome des travailleurs en Algérie (CGATA), a présenté la situation des syndicats en Algérie au cours des vingt dernières années. Le gouvernement a mis en place des lois liberticides destinées à verrouiller la liberté d’expression et à réprimer les mouvements syndicaux et sociaux. La lettre adressée par la CGATA au gouvernement algérien, avant la tenue de la 104e session de la Conférence internationale du Travail, afin de résoudre les conflits, est restée sans réponse. Le gouvernement nie les faits documentés et affirme que les lacunes de la loi algérienne seront corrigées par le nouveau Code du travail. Or non seulement ce nouveau code ne corrige pas les problèmes liés à l’enregistrement des organisations syndicales, mais il y ajoute des conditions. L’oratrice a signalé des exemples d’entraves au libre exercice du droit syndical, la majorité des syndicalistes étant fichés au niveau du contrôle des frontières, sur instructions de la direction de la sureté nationale émises en dehors de tout contrôle judiciaire. Par ailleurs, nombre de rapports établis par des organisations non gouvernementales internationales mettent en évidence les atteintes au droit syndical et aux droits fondamentaux en Algérie.
Le membre gouvernemental du Niger a indiqué que sa délégation a suivi avec intérêt, et apprécié, les efforts du gouvernement algérien pour donner effet aux dispositions de la convention no 87. L’Algérie est engagée dans un processus de révision de sa législation du travail, notamment en ce qui concerne les dispositions relatives aux modalités de formation des syndicats, fédérations et confédérations syndicales, et au droit des travailleurs étrangers de former des syndicats. Le gouvernement s’est également engagé à prendre en considération les remarques et commentaires du BIT pour se conformer aux conventions pertinentes. Tous ces éléments, qui démontrent la bonne foi et la volonté politique du gouvernement algérien, méritent d’être encouragés.
Le membre travailleur du Gabon a indiqué que, depuis sa création en 2006, la Fédération nationale de l’éducation, affiliée au SNAPAP, lutte pour la titularisation de tous les enseignants contractuels, en s’assurant du respect de l’application des lois et des conventions protégeant les travailleurs et garantissant le droit syndical. Elle lutte également pour la rénovation du système éducatif aussi bien sur le plan humain qu’en ce qui concerne les programmes et les conditions matérielles. L’orateur a évoqué des cas d’arrestation, de harcèlement et de résiliation de contrats d’enseignants précaires, sur instruction présidentielle, au moment de l’avènement du Printemps arabe en 2011 et a donné un exemple du harcèlement continu dont sont victimes, encore aujourd’hui, des déléguées syndicales. D’autres catégories socioprofessionnelles, telles que les travailleurs des corps communs recrutés comme gardiens, les veilleurs de nuit ou les femmes de ménage, sont également laissées pour compte. Enfin, le Syndicat des enseignants du supérieur solidaires (SESS) se voit refuser son enregistrement.
Le membre gouvernemental du Ghana a souligné que la liberté syndicale était un droit de l’homme fondamental et une préoccupation essentielle pour l’OIT, étant donné qu’il était le pilier des bonnes pratiques en matière de relations professionnelles, quel que soit le pays. Il convient de rappeler que les questions concernant l’Algérie ont été soulevées par la commission d’experts au sujet de l’article 6 de la loi no 90-14. Le projet de Code du travail a été élaboré en tenant compte des contributions des partenaires sociaux, et il a salué l’initiative du gouvernement algérien destinée à solliciter l’assistance du BIT. Il faut féliciter le gouvernement pour l’élaboration du nouveau Code du travail qui vise notamment à combler les lacunes de la loi précédente.
La membre travailleuse des Etats-Unis, s’exprimant également au nom des membres travailleurs du Canada et du Brésil, a rappelé que les syndicalistes algériens ont subi diverses formes d’intimidation et que de nombreux incidents, déjà signalés au sein de la commission, n’ont toujours pas fait l’objet de sanctions. Elle a cité les exemples suivants de syndicalistes ayant subi dans le pays divers problèmes, tels que: des arrestations au cours d’une protestation pacifique alors qu’ils exerçaient le droit à la liberté syndicale et leur condamnation injuste à un an de prison, dont six mois avec sursis; plusieurs cas de licenciement sans motif; refus du droit d’adhérer au Syndicat national autonome des postiers (SNAP) sous prétexte que le ministère algérien du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale s’y est opposé; tentatives d’assassinat; suspension arbitraire des fonctions de ces syndicalistes qui subissent depuis des actes de harcèlement graves; ou interdiction de passer la frontière algérienne. Le gouvernement est souvent intervenu dans des réunions et des manifestations, ou les a tout simplement interdites. L’oratrice a également cité d’autres exemples de syndicalistes à qui l’on a interdit de recevoir des invités à leurs réunions, ceux-ci étant retenus aux frontières par la police. Depuis des années, la Maison des syndicats, siège du SNAPAP, subit des attaques et des harcèlements répétés. De plus, le gouvernement et les employeurs découragent les travailleurs d’adhérer à des syndicats indépendants, dont la CGATA, le SNAPAP et le SNAP, et des cotisations aux syndicats soutenus par le gouvernement sont déduites de leurs fiches de salaire sans qu’ils n’en soient informés. Les travailleurs subissent une pression pour qu’ils soutiennent ces syndicats, et leur capacité de se syndiquer dans certains secteurs ou d’élire leurs représentants à l’échelle nationale est restreinte. L’oratrice a demandé instamment au gouvernement algérien d’effectuer de profondes réformes pour remplir son obligation de garantir la liberté syndicale, comme l’exige la convention.
Le membre gouvernemental de la République bolivarienne du Venezuela a rappelé que, selon le rapport de la commission d’experts, celle-ci avait demandé au gouvernement de modifier la loi no 90-14 afin d’en adapter certains aspects à la convention. Le gouvernement de l’Algérie a souligné que cette loi est en cours de révision, dans le cadre du projet de Code du travail que les partenaires sociaux ont soumis au BIT, lequel l’a examinée et a formulé des commentaires. Prenant en compte les bonnes dispositions et les efforts du gouvernement de l’Algérie, la commission ne devrait pas ignorer les aspects positifs qui ressortent des explications et arguments du gouvernement de l’Algérie. L’orateur a déclaré vouloir croire que les conclusions de la commission seront objectives et équilibrées, ce qui amènera sans aucun doute le gouvernement de l’Algérie à les considérer et à les apprécier.
Le membre gouvernemental du Mali a félicité le gouvernement algérien pour les informations fournies et les efforts déployés afin d’assurer une meilleure application de la convention. Il se félicite également de la réforme législative en cours, notamment la révision de la loi no 90-14 relative aux modalités d’exercice du droit syndical, et le dialogue social qui accompagne ce processus. La commission doit tenir compte de la bonne foi du gouvernement algérien dans l’application de la convention, l’encourager dans cette voie et lui accorder l’assistance technique nécessaire.
Un observateur représentant la Confédération syndicale internationale (CSI) a déclaré que le gouvernement algérien choisit le représentant syndical qui soutient les autorités. Compte tenu du climat politique conflictuel, le gouvernement a établi un syndicat qui n’est pas légitime, confisque des biens syndicaux, et licencie des dirigeants syndicaux. Par solidarité avec le SNAP, et au nom de la Confédération internationale des syndicats arabes et de l’Union démocratique d’Egypte, il a exhorté le gouvernement algérien à mettre un terme au harcèlement à l’encontre des syndicalistes.
Le membre gouvernemental du Mozambique a félicité le gouvernement de l’Algérie pour sa réponse exhaustive et noté que les autorités algériennes se sont engagées à garantir que la législation soit conforme aux conventions de l’OIT. L’Algérie est l’un des cinq pays africains à avoir ratifié le plus grand nombre de conventions de l’OIT et, étant Membre de longue date de l’OIT, on ne peut douter de sa volonté politique et de ses efforts, avec la participation des partenaires sociaux, pour rendre sa législation conforme à la convention. La commission devrait laisser à l’Algérie assez de temps pour réviser la législation afin que le résultat final soit consensuel et contribue à la croissance économique du pays.
La membre gouvernementale de Cuba a souligné l’indication du gouvernement algérien selon laquelle les observations figurant dans le rapport de la commission d’experts sont actuellement examinées dans le contexte de la finalisation du projet de Code du travail. A ce titre, il faut prendre en compte les informations que le gouvernement a communiquées. Dans le cadre de la consultation tenue avec les partenaires sociaux relativement au projet susmentionné, les points soulevés par la commission d’experts seront certainement abordés. La présente commission doit accueillir favorablement la volonté politique exprimée par le gouvernement algérien de respecter les principes sur lesquels se fondent la liberté syndicale.
Le membre gouvernemental du Zimbabwe s’est félicité des mesures adoptées par le gouvernement algérien pour la pleine application de la convention, en particulier l’actuel processus de réforme du droit du travail mené de façon tripartite. Ces efforts ont atteint leur apogée avec le projet de Code du travail. L’orateur a souligné le rôle du BIT dans la rédaction de ce code, et s’est dit confiant dans l’issue positive de la réforme. Il s’est félicité de la déclaration du gouvernement algérien, qui démontre le respect de ce dernier pour les normes de l’OIT, y compris les principes contenus dans la convention no 87 et a loué les progrès accomplis depuis l’examen du cas l’année passée. Le Bureau doit continuer à soutenir ces réformes prometteuses.
Le membre travailleur de l’Argentine, s’exprimant au nom de la Confédération syndicale des travailleurs et travailleuses des universités des Amériques (CONTUA), de l’Internationale des services publics (ISP) et de l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA), a fait état de refus persistants du gouvernement algérien d’engager un dialogue avec les représentants légitimes des travailleurs, ainsi que de la persécution des syndicalistes et de menaces à leur encontre. Il a donné des exemples de syndicalistes ayant dû quitter le pays, qui ont été incarcérés et vivent en exil en raison de leurs activités syndicales. Il a rappelé que l’Algérie, pays riche en ressources naturelles, réprime l’activité du Syndicat national autonome des travailleurs de l’électricité et du gaz (SNATEG) au sein de la Société nationale de l’électricité et du gaz (SONELGAZ), seul fournisseur de gaz et d’électricité sur tout le territoire. Le gouvernement a créé de faux syndicats, comme le clone SNAPAP, pour embrouiller les travailleurs, en tirant parti des instances juridiques pour rendre leur création officielle. Par conséquent, le gouvernement algérien viole la convention no 87, comme l’a reconnu récemment le Parlement européen qui a voté une résolution d’urgence, dénonçant les violations graves des libertés et des droits fondamentaux, des droits au travail et des droits humains. Il faut espérer que des mesures seront adoptées pour inverser cette situation.
Le membre gouvernemental de l’Angola a rappelé que c’était la deuxième fois que le gouvernement devait s’expliquer sur l’application de la convention. On lui demande de modifier certaines dispositions de la loi no 90-14, du 2 juin 1990, relatives aux modalités de création de syndicats, de fédérations et de confédérations syndicales, ainsi qu’à l’exercice du droit de former un syndicat par les travailleurs étrangers. Comme on le sait, la loi précitée est en cours de révision dans le cadre du projet de Code du travail déjà soumis aux partenaires sociaux pour examen. L’UGTA a transmis le texte du projet au Bureau, qui l’a examiné et commenté, commentaires qui ont été communiqués aux partenaires sociaux. L’orateur a estimé que le gouvernement s’efforcera d’en tenir compte, dans le respect de l’esprit et de la lettre de la convention. Compte tenu de ce qui précède, il a considéré que la Commission de l’application des normes devrait tenir compte des efforts engagés par le gouvernement pour améliorer la législation du travail.
Le membre gouvernemental de la Mauritanie a indiqué que le gouvernement de l’Algérie avait fait énormément d’efforts pour mener à bien les réformes entreprises et les mesures prises pour contribuer de manière efficace à améliorer la liberté syndicale et sa protection. Il note avec satisfaction la révision du cadre juridique qui a été menée à bien et qui tend à moderniser le système juridique pour intégrer les travailleurs faisant partie des fédérations et des confédérations syndicales ainsi que les droits des travailleurs étrangers qui pourront dorénavant créer leur propres syndicats pour mieux défendre et promouvoir leurs droits de manière efficace. Ces importantes innovations ont été portées à la connaissance du BIT qui les a examinées et a émis des commentaires. Dans sa conclusion, l’orateur a exprimé sa confiance que le gouvernement algérien pourra traduire, dans les faits, les engagements pris. Il a espéré que les travaux de réforme produiront leurs fruits.
Le membre gouvernemental du Qatar s’exprimant également au nom du membre gouvernemental de Bahreïn a déclaré être satisfait des travaux de réforme menés par le gouvernement de l’Algérie pour répondre aux demandes de la commission, plus particulièrement la réforme du Code du travail qui est en discussion entre le gouvernement et les partenaires sociaux. L’orateur a exprimé l’espoir que la commission prendra en compte les efforts déployés par le gouvernement.
La membre travailleuse de l’Italie a fait part de son inquiétude quant à l’enregistrement de certains syndicats. S’agissant du SESS, qui a déposé sa demande d’enregistrement en 2013, il s’avère que plusieurs membres fondateurs ont été soumis à une enquête des services de police (renseignements généraux), notamment le coordonnateur national. Il en est de même pour le membre fondateur et membre du bureau national, M. Tajeddine Abdellatif qui a également été convoqué. Elle mentionne également que des travailleurs ont subi des répressions policières lors de manifestations le 22 février 2014; cinq cas d’agression physique contre les membres du Comité national pour la défense des droits des travailleurs du pré-emploi (M. Ziani Mohammed, M. Latreche Walid, M. Ben Ammar Tayeb, M. Habib Ahmed, M. Guerras Abdelghani et Mme Driouche Zoulikha). Pour conclure, l’oratrice a déploré que le gouvernement s’appuie trop souvent sur l’article 87bis du Code pénal pour limiter les manifestations syndicales pacifiques, alors que cet article concerne le terrorisme.
Le membre gouvernemental de la Chine, en rappelant que le cas de l’Algérie a été discuté l’an dernier, a noté que le gouvernement et les partenaires sociaux ont répondu positivement à l’appel de la commission et ont travaillé ensemble pour modifier le Code du travail, avec l’assistance technique du BIT. Il espère que la commission saura reconnaître l’engagement pris et appréciera les efforts déployés par le gouvernement de l’Algérie et de ses partenaires sociaux pour faire progresser le processus de réforme législative. Il demande au BIT de continuer à fournir une assistance aux partenaires sociaux en Algérie. L’orateur est convaincu que le processus de réforme sera bientôt finalisé et saura donc placer l’Algérie dans une position favorable pour se conformer pleinement à la convention.
Le membre gouvernemental du Kenya a relevé que l’Algérie a accompli d’immenses progrès sur ce cas depuis l’examen de la commission l’année dernière. Une révision du Code du travail est en cours, menée avec les partenaires sociaux et l’assistance technique du BIT, et l’Algérie est résolument engagée sur la voie du respect et de l’application de la convention. Outre le projet de Code du travail, le représentant gouvernemental de l’Algérie a fourni d’autres informations sur les mesures adoptées. Au regard des réformes législatives et de la gouvernance en cours, l’Algérie doit être accompagnée pour garantir la pleine application de la convention. Le BIT est invité à renforcer son assistance technique en Algérie; il s’agit d’une plate-forme durable pour une révision efficace.
Le membre gouvernemental du Koweït s’est félicité des informations fournies par le représentant du gouvernement, en particulier concernant le nouveau projet de Code du travail, et l’engagement du gouvernement pour renforcer le dialogue avec les partenaires sociaux, qui participent à l’élaboration du Code. Il souligne que le futur Code du travail étant au stade de projet, il y est de ce fait facile d’introduire les modifications nécessaires. Il a également apprécié les efforts menés par le gouvernement pour coopérer avec le BIT et a espéré que la commission prendra en compte positivement ces efforts.
Le représentant gouvernemental a souligné que le processus de réforme est un chantier en cours d’évolution qui a été entamé en juin 2014. Cette réforme s’inscrit dans un cadre tripartite avec la contribution du BIT. Il précise que l’on ne peut pas affirmer que l’Algérie ne respecte pas la liberté syndicale. Il existe en effet dans le secteur de l’éducation nationale 8 à 10 organisations syndicales autonomes, ainsi que dans le secteur de la santé. Par ailleurs, des rencontres ont été organisées avec le concours du BIT et le Bureau régional de l’OIT pour Afrique, ainsi que l’Organisation de l’unité africaine. Il rappelle que le Code du travail est conforme aux normes internationales du travail et a besoin d’une mise à jour qui est menée conjointement avec les partenaires sociaux. S’agissant de la procédure d’enregistrement des règles sont prévues à cet effet, et la législation en vigueur doit être appliquée. Le gouvernement a demandé l’assistance technique du BIT et a souhaité continuer le processus de réforme législative jusqu’à son aboutissement.
Les membres employeurs ont remercié le représentant gouvernemental pour les informations fournies et ont apprécié le ton constructif du gouvernement. Ils considèrent le projet de Code du travail comme étant un développement positif, d’autant plus qu’il a été préparé en consultation avec les partenaires sociaux. Ils attendent avec impatience de recevoir de plus amples informations sur l’aboutissement du projet de Code. Les conclusions des travaux de la commission doivent prendre cette évolution en considération. Ils invitent le gouvernement à fournir des informations détaillées, y compris une copie papier du projet de Code du travail à la commission d’experts afin d’examiner sa conformité avec les dispositions de la convention. Ils ont également encouragé le gouvernement à veiller à ce qu’il n’y ait pas d’obstacles à l’égard de l’enregistrement des syndicats en droit et dans la pratique, conformément à la convention.
Les membres travailleurs ont souligné que, depuis de très nombreuses années, les procédures et pratiques en matière d’enregistrement des nouveaux syndicats en Algérie empêchent la reconnaissance de nouvelles organisations. Dans ses commentaires, la commission d’experts souligne depuis plusieurs années que la loi algérienne ne respecte pas les dispositions de la convention no 87, notamment dans ses articles 2 et 5. Ils font remarquer que la communauté internationale est inquiète face à cette situation, et le gouvernement devrait à cet effet prendre conscience que cela pourrait avoir un impact sur certains partenariats commerciaux. Ils se réfèrent à cet égard à la résolution du Parlement européen. Ils soulignent que les informations communiquées par le gouvernement concernent certes l’évolution de certains aspects de sa législation, mais que toutefois aucun élément concret n’a été fourni quant aux nombres de syndicats enregistrés. Les membres travailleurs expriment le souhait que le gouvernement procède à l’enregistrement d’un certain nombre de syndicats, notamment le Syndicat des enseignants du supérieur solidaires (SESS), le Syndicat national autonome des postiers (SNAP), le Syndicat autonome du transport, ainsi que le Syndicat national autonome de la banque de l’agriculture et du développement rural (SNABADR). Ils indiquent que la session de la commission d’experts, qui aura lieu en novembre 2015, sera une occasion à saisir pour que le gouvernement envoie les informations nécessaires relatives à l’enregistrement des syndicats susmentionnés. Pour conclure, les membres travailleurs ont estimé qu’il est nécessaire que le gouvernement accepte l’assistance technique du BIT afin de vérifier, en concertation avec les parties concernées, la conformité de la législation et de la pratique nationale avec les normes internationales.
La commission a pris note des informations fournies par le gouvernement et de la discussion qui a suivi à propos des questions soumises à la commission d’experts, notamment sur les entraves au droit de constituer des organisations, fédérations et confédérations syndicales et les allégations persistantes de retards et d’obstacles mis à l’enregistrement des syndicats. La commission a observé en outre que subsistent des allégations de violence et d’intimidation à l’encontre de militants syndicaux et elle a pris note des déclarations du gouvernement à ce propos.
La commission a pris note de la déclaration du gouvernement suivant laquelle, s’inspirant des recommandations et normes internationales du travail, les questions législatives en suspens dans le cas présent sont abordées dans le cadre de l’actuelle révision du Code du travail à l’occasion de laquelle une consultation approfondie avec les partenaires sociaux est à la recherche d’un consensus. Le gouvernement a signalé qu’un projet de nouveau Code du travail a été préparé en consultation avec les partenaires sociaux.
S’agissant de l’enregistrement des syndicats, le gouvernement indique que les formalités légales en la matière sont simples et n’imposent pas de contraintes. Quatre-vingt-quinze organisations syndicales et organisations d’employeurs sont enregistrées dans le pays; neuf l’ont été au cours des deux dernières années. S’agissant des allégations spécifiques se rapportant au SNAPAP et au SNAPEST, le gouvernement indique que ces deux organisations sont enregistrées et poursuivent librement leurs activités. Le conflit qui touche l’organe exécutif du SNAPAP a été réglé par les autorités judiciaires, une décision dans laquelle il ne peut s’ingérer.
Prenant en compte la discussion qui a eu lieu, la commission a demandé instamment au gouvernement:
- de fournir des informations détaillées à propos du projet de nouveau Code du travail, notamment en lui en communiquant une copie à des fins d’analyse et d’examen en rapport avec l’application de la convention no 87;
- de s’assurer qu’aucun obstacle n’existe, en droit ou dans la pratique, à l’enregistrement des syndicats conformément à la convention no 87;
- d’agir avec célérité afin de traiter les demandes d’enregistrement de syndicats en suspens et d’en aviser l’OIT;
- de réintégrer les agents de la fonction publique licenciés pour des motifs de discrimination antisyndicale; et
- de rendre compte de manière détaillée à la commission d’experts à sa prochaine session.
Un représentant gouvernemental a fait part de son appréciation des efforts de la commission d’experts et du Comité de la liberté syndicale pour évaluer le respect des conventions et recommandations de l’OIT permettant ainsi aux législations nationales du travail de se perfectionner. Le gouvernement prend bonne note des observations formulées par la commission d’experts concernant l’application de la convention no 87. Cependant, il tient à souligner avoir fourni toutes les observations demandées dans les délais requis. Il faut rappeler qu’aujourd’hui 94 organisations syndicales sont actives en Algérie, dans tous les secteurs d’activités, tant dans la fonction publique que dans le secteur privé. La législation algérienne en matière de relations de travail consacre le dialogue social et la négociation collective comme fondements essentiels sur lesquels reposent les rapports entre les partenaires sur les lieux de travail. Ce principe a permis la signature de plus de 3 000 conventions collectives d’entreprises, 80 conventions collectives de branche, plus de 16 000 accords collectifs d’entreprises et 156 accords collectifs de branche. Au niveau national, un pacte national économique et social a été signé en 2006 et reconduit en février 2014, lors de la 16e réunion tripartite, sous la forme d’un pacte économique et social de croissance. L’expérience algérienne en matière de dialogue social a fait l’objet d’une présentation détaillée devant la 309e session du Conseil d’administration du BIT en novembre 2010, expérience qui a d’ailleurs été unanimement saluée. Concernant les observations formulées par la commission d’experts relatives à l’enregistrement des syndicats, le gouvernement indique que, après la mise en conformité de ses statuts avec la législation nationale, le Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (SNAPEST) a été enregistré et qu’il exerce ses activités dans le cadre réglementaire sans aucune difficulté. S’agissant du Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique (SNAPAP), ce dernier exerce ses activités conformément à la législation et la réglementation en vigueur. Le conflit interne au sein du syndicat est dépassé dans la mesure où il a fait l’objet d’une décision de la Cour suprême. Dans cette affaire, le gouvernement a adopté une position neutre, conformément aux recommandations du Comité de la liberté syndicale. Par ailleurs, le Directeur général du BIT a eu l’occasion de s’entretenir, à Alger, avec la direction du SNAPAP ainsi qu’avec la partie contestataire, lors d’une visite officielle en avril 2013. Ce cas étant résolu depuis la décision de la plus haute instance judiciaire du pays, le gouvernement demande la clôture du cas devant le Comité de la liberté syndicale. Par ailleurs, la commission d’experts a noté avec satisfaction l’enregistrement du Syndicat national des travailleurs de la formation professionnelle (SNTFP). Il en est ainsi lorsque les demandes d’enregistrement sont conformes aux prescriptions de la loi. Les retards constatés dans l’enregistrement de certains syndicats ne sauraient être interprétés comme une entrave à l’exercice du droit syndical mais découlent de la nécessité de mise en conformité des statuts des organisations concernées avec les exigences de la loi. A cet égard, une dizaine de syndicats ont été enregistrés depuis 2012.
Concernant les allégations relatives aux actes d’intimidation ou de menaces de mort qui auraient été proférées à l’encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, délit puni par le Code pénal en Algérie, le gouvernement observe qu’aucune plainte pour menace de mort n’a été déposée auprès des juridictions compétentes. Par ailleurs, les allégations ne sont étayées d’aucune preuve concrète. En ce qui concerne la mise en œuvre de l’article 6 de la loi no 90-14 relative aux modalités d’exercice du droit syndical, le gouvernement a déjà indiqué que les travailleurs étrangers peuvent adhérer librement à une organisation syndicale, et la nationalité ne constitue donc pas un obstacle à la syndicalisation des travailleurs étrangers qui bénéficient des mêmes droits et de la même protection que les travailleurs nationaux. Toutefois, en ce qui concerne le critère de la nationalité pour constituer une organisation syndicale, la question est en cours d’examen dans le cadre de la finalisation du projet de Code du travail. En ce qui concerne l’application de l’article 4 de la loi no 90-14, qui porte sur les modalités de constitution, par les organisations de travailleurs, quel que soit le secteur auquel elles appartiennent, de fédérations et de confédérations de leurs choix, les critères entourant la création de fédérations et de confédérations syndicales seront également précisés dans le cadre de la finalisation du Code du travail en question. Enfin, pour ce qui est de la mise en œuvre de l’article 43 de la loi no 90-02, relative à la prévention et au règlement des conflits collectifs de travail et à l’exercice du droit de grève, le gouvernement observe que la convention no 87 ne traite en aucune manière du droit de grève. Néanmoins, le droit de grève est un droit constitutionnel transcrit dans la loi et qui obéit à des procédures légales en matière de prévention, de conciliation, de médiation et d’arbitrage. Le nombre de grèves enregistrées annuellement montre la réalité du libre exercice du droit de grève par les organisations syndicales. La dernière en date étant la grève déclenchée par les syndicats du secteur de l’éducation nationale et qui a connu un dénouement suite aux négociations avec les pouvoirs publics, négociations qui se sont soldées par la satisfaction des revendications des travailleurs. L’Algérie a ratifié 59 conventions de l’OIT, dont les huit conventions fondamentales ainsi que trois conventions de gouvernance. Elle figure parmi les pays ayant ratifié le plus grand nombre de conventions internationales du travail. Le monde du travail évolue sans cesse pour s’adapter aux nouveaux contextes économiques et sociaux. Dans ce contexte, le gouvernement est sensible à toute recommandation ou observation pouvant contribuer à l’amélioration de la législation du travail et à l’instauration d’un climat social apaisé.
Les membres travailleurs ont observé que les questions soulevées dans le présent cas concernent pour l’essentiel le secteur public, à savoir des travailleurs dont l’employeur est l’Etat. Cela n’exclut pas le secteur privé qui rencontre les mêmes problèmes. Dans sa réponse, le gouvernement n’a pas répondu aux accusations d’actes d’intimidation et de menaces, y compris des menaces de mort, formulées par la Confédération syndicale internationale et par plusieurs syndicats algériens dans la fonction publique. Des intervenants prendront la parole pour témoigner de la réalité des problèmes allégués. Le gouvernement n’a pas non plus répondu aux observations de la commission d’experts concernant la mise en conformité de la loi avec les normes de l’OIT. A cet égard, il est rappelé que la loi algérienne réserve le droit de créer des organisations syndicales aux personnes qui possèdent la nationalité algérienne de naissance ou depuis dix ans au moins; que les organisations syndicales sont limitées dans leur possibilité de constituer des fédérations ou des confédérations de leur choix. A cet égard, s’il est admis qu’une législation nationale peut obliger les fondateurs d’une organisation syndicale à respecter certaines prescriptions de publicité et autres dispositions analogues, ces prescriptions ne devraient pas s’apparenter à une autorisation préalable ou être telles qu’elles reviennent à interdire en fait la création d’une organisation. Dans un cas examiné par le Comité de la liberté syndicale en mars 2013 (cas no 2944), ce dernier a demandé au gouvernement d’indiquer si, en définitive, les deux organisations syndicales plaignantes, nommément le Syndicat des enseignants du supérieur (SESS) et le Syndicat national autonome des postiers (SNAP), ont obtenu leur enregistrement. Les membres travailleurs croient pouvoir dire que ces organisations ne sont toujours pas enregistrées aujourd’hui.
Les organisations syndicales subissent diverses limitations dans leur droit d’exercer librement leurs activités et de formuler leurs programmes d’action. Il ne s’agit pas ici d’un simple problème relatif au contenu du droit de grève. Selon la loi algérienne, la grève est interdite lorsqu’elle est susceptible de provoquer une «crise économique grave». Le gouvernement affirme que cette notion est substantiellement identique à l’expression «crise nationale aiguë», habituellement utilisée par la commission d’experts et le Comité de la liberté syndicale. Néanmoins, ces derniers demandent au gouvernement de préciser le contenu de cette notion en l’étayant par des exemples. En réalité, tous les préavis de grève déposés au cours des dernières années dans le secteur public ont fait l’objet par les autorités d’une procédure en référé devant le tribunal administratif et, dans tous les cas, la grève a été déclarée illégale. Cette procédure est unilatérale car les organisations syndicales concernées n’y sont pas invitées pour faire valoir leur point de vue. L’ordonnance rendue n’est pas motivée et n’est susceptible de recours que devant le Conseil d’Etat qui rend ses décisions dans un délai moyen de deux ans. Les membres travailleurs rappellent que, selon la jurisprudence constante du Comité de la liberté syndicale, la décision de déclarer la grève illégale ne devrait pas appartenir au gouvernement mais à un organe indépendant des parties et jouissant de leur confiance. Or, à partir du moment où une proportion aussi démesurée de grèves sont déclarées illégales, à la seule requête des pouvoirs publics parties au conflit, sans aucune motivation, sans que les parties intéressées aient l’occasion de développer leur point de vue, on peut s’interroger sur l’indépendance de la justice en Algérie et se demander si elle peut prétendre à la confiance des parties. Par ailleurs, la commission d’experts fait aussi allusion à l’existence d’une commission nationale d’arbitrage, qui peut être saisie par le gouvernement en vue d’intervenir dans les conflits collectifs. Les membres travailleurs s’interrogent sur la composition d’un tel organe en l’absence d’élections syndicales ou d’un comptage indépendant des affiliations en Algérie. Cela revient donc à s’interroger sur l’indépendance de cette commission d’arbitrage et la confiance qu’elle peut susciter chez les parties. En réalité, les activités syndicales, comme la tenue de congrès ou de réunions de formation, sont soumises à une autorisation du ministère de l’Intérieur, et la procédure donne presque systématiquement lieu à des intimidations, des retards et des tracasseries diverses.
Les membres employeurs ont remercié le gouvernement pour ses réponses très constructives et son attitude positive face aux commentaires de la commission d’experts sur la façon d’améliorer ses relations de travail et la législation. Les membres employeurs ont apprécié que le gouvernement reconnaisse que le dialogue social et la négociation collective sont des piliers essentiels, ainsi que les informations fournies concernant la négociation et la consultation avec les partenaires sociaux. Deux grands thèmes semblent avoir été retenus par la commission d’experts au titre de l’application de la convention. La première question, soulevée dans les commentaires précédents de la commission d’experts, concerne l’article 6 de la loi no 90-14 de 1990 qui limite le droit de constituer une organisation syndicale aux personnes de nationalité algérienne d’origine ou acquise depuis au moins dix ans. La commission d’experts avait rappelé que le droit syndical doit être garanti aux travailleurs et aux employeurs sans distinction de nationalité. Egalement dans ses commentaires précédents, la commission d’experts avait demandé à plusieurs reprises au gouvernement de modifier en conséquence les dispositions législatives pour remédier à ce problème et d’informer sur les mesures prises à cet effet. En outre, dans ses commentaires précédents, la commission d’experts avait demandé à plusieurs reprises au gouvernement de modifier sa législation pour supprimer tous les obstacles qui empêchent les travailleurs de constituer des fédérations de leur choix. La commission avait noté les explications du gouvernement selon lesquelles la nationalité n’était pas un obstacle à l’enregistrement. Pour autant, cela pèse sur leur capacité à constituer des syndicats. Croyant comprendre que les commentaires de la commission d’experts seront pris en compte dans le cadre de la révision en cours du Code du travail, les membres employeurs encouragent le gouvernement à fournir davantage d’informations à ce sujet. La deuxième question constitue un motif de préoccupation pour les membres employeurs. La commission d’experts, dans ses commentaires des dernières années, s’est référée à l’article 43 de la loi no 90-02, en vertu duquel le recours à la grève est interdit dans les services essentiels lorsque cette grève «est susceptible d’entraîner par ses effets une crise économique grave». La commission d’experts avait non seulement demandé au gouvernement de modifier le libellé de la loi, mais avait aussi proposé un projet de texte à cet effet. En outre, la commission d’experts avait demandé des exemples de cas concrets dans lesquels, en raison de ce libellé, le recours à la grève a été interdit sur le fondement de ses effets potentiels. Selon les membres employeurs, cela pose problème car la commission d’experts a outrepassé son mandat à cet égard. Il est important que le droit de grève ne soit pas traité dans les conclusions de la Commission de la Conférence car il n’y a pas de consensus tripartite sur le fait qu’il soit traité dans la convention. Dans ses réponses, le gouvernement était aussi d’avis que la convention ne traite pas du droit de grève. Les membres employeurs concluent en déclarant que le gouvernement a fait preuve d’un esprit très constructif et l’ont encouragé à fournir les informations demandées par la commission d’experts. Il faut saluer la réceptivité du gouvernement qui a bien accueilli les commentaires de la commission d’experts pour améliorer les relations de travail au sein du pays, ainsi que les efforts qu’il a déjà accomplis et qu’il doit poursuivre.
Le membre travailleur de l’Algérie a observé que, malgré la situation particulière que vit l’Algérie depuis quelques années, cela n’a pas empêché le développement d’un pluralisme syndical, du moins dans certains secteurs. Les grandes centrales syndicales ont dû faire face ces dernières années à de nouveaux choix politiques guidés par la situation économique et sociale. Il s’est déclaré solidaire des difficultés rencontrées par les syndicalistes dans son pays. Les difficultés sont indéniables mais elles peuvent être réglées dans le cadre d’un dialogue social national. Faisant état de la situation des travailleurs et du syndicalisme dans la région, il souligne que l’évolution de la situation nécessite de l’écoute, de la conciliation et de franchir certaines étapes.
Une observatrice représentant la Confédération syndicale internationale (CSI) a rappelé qu’à la suite des événements d’octobre 1989 le pouvoir, sous la contrainte de la révolte populaire, a cédé de petites réformes sur le pluralisme syndical, cependant limitées aux syndicats sectoriels. C’est ainsi que le SNAPAP a été enregistré en 1990. Cependant, 90 pour cent des syndicats sectoriels enregistrés pendant cette période de révolte ont été dissous suite à l’arrêt du processus électoral en 1992. Les syndicats épargnés demeurent la cible constante d’un pouvoir qui cherche à les contrôler ou à les neutraliser. L’Algérie a ratifié la convention no 87 en 1962 mais le pluralisme syndical n’a été inscrit dans la Constitution nationale qu’en 1989. Même si l’article 132 de cette Constitution dispose que les conventions ratifiées sont supérieures aux lois nationales, le contenu de la convention ne peut être revendiqué devant les tribunaux en matière de libre exercice du droit syndical. En ce qui concerne les suspensions et licenciements de syndicalistes, en septembre 2013, neuf membres du bureau fédéral du secteur des travaux publics ont été suspendus pendant un mois suite à une grève. Aujourd’hui, 137 syndicalistes, en majorité des femmes, sont toujours suspendus, suite à une grève générale déclenchée en avril 2012. En ce qui concerne l’interdiction de manifestation et la répression physique et judiciaire, des centaines de manifestants et de grévistes ont fait l’objet de violence physique et ont été arrêtés en 2012, notamment MM. Abdel Khader Kherba et Tahar Bel Abes, du comité des chômeurs du SNAPAP, et M. Yacine Zaïd, représentant de l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA). En février 2013, les forces de l’ordre ont encerclé la maison des syndicats pour empêcher la tenue du Forum maghrébin des diplômés chômeurs, puis ont arrêté et expulsé les délégations du Maroc, de la Mauritanie et de la Tunisie qui devaient y participer. En mars 2013, la police des frontières a empêché une délégation de 100 personnes du SNAPAP de se rendre en Tunisie pour le Forum social mondial. Concernant l’ingérence dans les affaires internes des syndicats et leur «clonage», qui constituent des pratiques courantes de la part des autorités, ces derniers ont décidé de créer un syndicat «clone» du SNAPAP en 2001, dirigé par un député à la retraite. Ce clonage avait pour objectif de discréditer le SNAPAP auprès de l’OIT. Les congrès syndicaux régionaux ou nationaux se font sous ordonnance du tribunal, or on peut s’étonner que le ministère du Travail refuse de considérer les dossiers résultant de ces congrès concernant le SNAPAP. Par ailleurs, les services des renseignements généraux ont convoqué les fondateurs du Syndicat des enseignants du supérieur solidaires dans le but de faire pression sur les travailleurs et en même temps de chercher à identifier les personnes susceptibles d’aider l’administration à créer une organisation «clone». En ce qui concerne le refus d’enregistrement de syndicats autonomes ou d’une organisation faîtière, le refus d’enregistrer des syndicats ou des confédérations est une décision discrétionnaire fondée sur aucun texte réglementaire. Les demandes d’enregistrement de nouveau syndicat demeurent sans suite durant des années dans le but de dissuader toute nouvelle constitution de syndicat. Les demandes d’autorisation du ministère de l’Intérieur pour l’organisation de réunions, de rencontres, de séminaires de formation ou de congrès syndicaux sont systématiquement refusées. En réalité, il y a une absence totale de dialogue social. Lorsqu’un syndicat est enfin enregistré, l’employeur peut refuser de le reconnaître ou encore harceler son dirigeant, comme c’est le cas du Syndicat des travailleurs de SONELGAZ (secteur de l’électricité et du gaz). En conclusion, le SNAPAP a déjà déposé plusieurs plaintes auprès du Comité de la liberté syndicale. Ces dernières ont donné lieu à des recommandations qui sont ignorées par le gouvernement. La répression à l’encontre des membres du SNAPAP s’est même accrue. L’assistance technique du BIT n’a pas donné de résultat. La gravité de la situation mériterait que l’on considère les autres options envisageables dans le cadre de la Constitution de l’OIT.
Le membre gouvernemental de l’Egypte a salué les efforts déployés par le gouvernement dans l’élaboration d’un projet de Code du travail qui prend en compte les observations de la commission d’experts, en particulier pour ce qui concerne la possibilité de créer librement des organisations syndicales, des fédérations et confédérations dans tous les secteurs d’activités et vis-à-vis des droits syndicaux reconnus aux travailleurs étrangers. De même, des mesures ont été prises pour renforcer le dialogue avec les partenaires sociaux et des consultations sont menées sur tous les aspects de l’activité syndicale. Par ailleurs, le droit de grève est reconnu par la Constitution nationale, la grève n’étant donc pas interdite mais simplement réglementée. Quant au système judiciaire, il prend en compte les conventions de l’OIT et son fonctionnement mérite d’être respecté. Les réformes profondes qu’a entreprises l’Algérie se poursuivent et elles ne sont pas exemptes de difficultés et de défis. Le peuple y est pleinement partie prenante et, en ce sens, l’Algérie constitue un gardien des droits humains fondamentaux, de la bonne gouvernance et du pluralisme syndical.
Une observatrice représentant l’Internationale de l’éducation (IE) a dénoncé la précarisation des contrats de travail dans l’éducation, laquelle ne permet pas de créer le climat social favorable à la syndicalisation qui est préconisé par la convention. Depuis 2006, la Fédération algérienne de l’éducation du SNAPAP revendique des contrats de travail permanents pour des dizaines de milliers d’enseignants et enseignantes précaires. Leur mouvement est réprimé. Plus de 7 000 enseignants précaires protestataires ont été arrêtés et 5 000 ont été verbalisés comme des criminels puis licenciés parfois après plus de dix ans de carrière. Ces travailleurs, principalement des femmes, sont maintenant sans ressources, et plusieurs déclarent avoir été passées à tabac par les forces de l’ordre. Cependant, l’avènement du Printemps arabe et la crainte que les protestations ne prennent de l’ampleur ont ouvert un espace et 35 000 enseignants ont été titularisés par instruction présidentielle. Cette régularisation n’ayant pas été négociée avec les syndicats, 30 000 autres enseignants sont restés dans une situation précaire. Depuis 2011, ces enseignants continuent de revendiquer un contrat de travail permanent avec l’appui du SNAPAP. Le bras de fer continue, de même que les harcèlements, les arrestations et les ruptures de contrat. A la rentrée 2013, plus de mille contrats temporaires d’enseignants n’ont pas été renouvelés. Il se trouve que toutes ces personnes étaient syndiquées.
La membre gouvernementale de la République bolivarienne du Venezuela a souligné que la commission d’experts a pris note avec satisfaction des progrès réalisés dans le pays en matière de liberté syndicale, en particulier concernant l’enregistrement de syndicats. Les progrès accomplis par le gouvernement grâce à un large dialogue social doivent être soulignés. En témoignent la signature d’un grand nombre de conventions collectives et la reconduction en février 2014 du Pacte national économique et social. La bonne volonté du gouvernement est illustrée par sa prise en compte, dans le projet de Code du travail, des recommandations de la commission d’experts. De plus, il convient de souligner que le gouvernement nie catégoriquement les prétendus actes d’intimidation et les menaces à l’encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, qu’aucune plainte n’a été déposée devant les organes compétents à ce sujet et qu’aucune preuve n’existe à ce sujet. Il ne fait aucun doute que le gouvernement poursuivra ses efforts et ses progrès dans ce domaine, en garantissant pleinement la liberté syndicale. Par conséquent, les conclusions de la commission doivent reconnaître et souligner les progrès accomplis par le gouvernement, ainsi que ses engagements et sa bonne volonté à l’égard de l’application de la convention.
La membre travailleuse des Etats-Unis, s’exprimant également au nom des membres travailleurs du Canada, de l’Espagne et de la Suisse, a signalé diverses formes d’intimidation auxquelles sont soumis les syndicalistes algériens depuis de nombreuses années – entre autres, le «clonage» de syndicats de la part du gouvernement, licenciements, violences et menaces physiques, emprisonnement pour des motifs infondés et restrictions à la liberté de mouvement. Les tentatives d’intimidation de dirigeants syndicaux et de syndicalistes sont flagrantes et incessantes. L’oratrice s’est référée en particulier aux menaces de mort qui ont visé le président du SNAPAP en 2011 – après avoir rencontré le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le logement convenable –, à son licenciement pour «absence illégale de son poste» en 2013 et à la décision arbitraire d’annuler le congé syndical qui lui était accordé depuis dix ans. Le plus alarmant reste toutefois l’assassinat en avril 2011 du professeur Ahmed Kerroumi, militant de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (organisation constituée avec l’appui du SNAPAP), après la rencontre de ce dernier avec le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression. Le gouvernement n’a pas diligenté d’enquête officielle sur ce meurtre. L’oratrice a également donné des exemples d’accusations et de condamnations sans fondement à des peines d’emprisonnement à l’encontre de syndicalistes pour divers motifs: organisation d’une grève à laquelle ont participé des greffiers et des fonctionnaires du pouvoir judiciaire, participation à des réunions ou à des grèves de la faim ou, récemment, en avril 2014, distribution de prospectus susceptibles de nuire à l’intérêt national. En ce qui concerne les restrictions à la liberté des syndicalistes de se déplacer, en 2009, le président du SNAPAP a été arbitrairement privé de son passeport alors qu’il s’apprêtait à se rendre en France et il lui a été interdit de se déplacer pendant un mois. Un autre syndicaliste avait été arrêté en 2012 puis incarcéré alors qu’il allait se déplacer pour organiser des travailleurs. Récemment, il a été arrêté lorsqu’il était sur le point de prendre un vol pour assister à la plate-forme de Dublin pour les défenseurs des droits humains. En juillet 2013, les autorités n’ont pas autorisé la délégation du SNAPAP à se rendre au Forum social mondial de Tunis. En outre, des travailleurs ont subi les lourdes conséquences de leur participation à des grèves ou des manifestations pacifiques, y compris en février 2014 – arrestations, agressions physiques, non-paiement de salaires et suppression de prestations de santé et de sécurité sociale. Le droit des syndicats d’exercer librement leurs activités a été également restreint, comme il ressort des nombreux actes de harcèlement et agressions commis contre la Maison des syndicats du SNAPAP ces cinq dernières années. Ce ne sont là que quelques-uns des nombreux exemples qui montrent que les actes de répression dont sont victimes les syndicalistes en Algérie sont graves et fréquents. Le gouvernement doit donc effectuer de profondes réformes pour remplir son obligation de garantir la liberté syndicale, comme l’exige la convention.
Le membre gouvernemental de l’Angola a indiqué soutenir l’intervention du gouvernement qui a fait des progrès significatifs dans la mise en œuvre des conventions ratifiées. La liberté syndicale dans le pays est respectée puisque des organisations syndicales sont créées et des conventions collectives sont signées, en particulier le Pacte national économique et social. Le droit de grève est également respecté et il apparaît que le gouvernement a répondu aux questions posées quant à l’application de la convention dans le pays.
Une observatrice représentant l’Internationale des services publics (ISP) a indiqué que, bien que l’Algérie ait ratifié 53 conventions de l’OIT, dont la convention no 87, la liberté syndicale est constamment entravée par des pratiques abusives de l’administration. Les délégués syndicaux dans de nombreux secteurs d’activité ont subi des violations de leurs droits, notamment des interdictions de se livrer à des activités syndicales, le refus de permettre aux affiliés de tenir des assemblées générales, le «clonage» de syndicats, la suspension et radiation de membres et dirigeants syndicaux, l’interdiction de détachement des syndicalistes même avec un mandat national. Selon la loi, pour être considéré comme représentatif, un syndicat doit regrouper au moins 20 pour cent de l’effectif total de l’entreprise. Cependant, dans les faits, c’est l’employeur qui apprécie la représentativité des syndicats, empêchant leur reconnaissance et l’exercice de leur droit à la négociation collective. Par ailleurs, les syndicalistes sont victimes de menaces, de suspensions, de licenciements arbitraires, de harcèlement judiciaire, de violence policière, d’entrave à la liberté de circulation, et les procédures devant les tribunaux pour dénoncer ces faits restent sans effet. La situation sociale des femmes syndicalistes se dégrade également puisque celles qui ont participé à la grève d’avril 2012 ont fait l’objet de mesures conservatoires depuis lors. Enfin, en mai 2013, un syndicaliste de l’Université de formation continue a été licencié à cause de son activité syndicale et de son engagement pour la défense des droits humains. La convention doit être pleinement appliquée et l’assistance technique fournie doit être étendue avec la participation du SNAPAP et de la Confédération générale autonome des travailleurs en Algérie (CGATA).
La membre gouvernementale du Cameroun a indiqué que les informations fournies attestent que l’Algérie prend véritablement au sérieux les observations formulées par la commission d’experts. Il convient de préciser que la révision des lois sociales en Afrique suit un processus complexe puisque les réformes doivent passer par différentes commissions consultatives avant d’être transmises au Parlement. Il faut donc laisser du temps au gouvernement pour mettre en œuvre la réforme demandée. Cependant, le gouvernement affirme sa réelle volonté de répondre aux préoccupations exprimées par la commission d’experts dans le cadre de la révision du Code du travail qui est en cours de finalisation. Il existe dans le pays une multitude de syndicats au point qu’il serait possible de reprocher au gouvernement de favoriser l’émiettement syndical mais en aucune façon d’entraver la liberté syndicale quand l’exercice de celle-ci s’avère si évident. Il convient d’encourager le gouvernement à accélérer le processus de révision du Code du travail en tenant compte des observations de la commission d’experts.
La membre travailleuse de la Libye, s’exprimant également au nom des membres travailleurs de Bahreïn, de l’Egypte, de la Mauritanie, du Maroc, de la Tunisie et du Yémen, a déclaré que le système judiciaire algérien n’est pas indépendant. Lorsque des membres du SNAPAP et du SNAPEST ont saisi le Conseil supérieur de la magistrature et le Conseil d’Etat, leurs cas sont restés en suspens pendant des années sans aucun résultat. Des syndicats ont engagé des poursuites contre le ministre du Travail en 2005 au sujet d’un appui financier public qui avait abouti à la création d’un syndicat parallèle par le gouvernement, qui s’était vu attribuer le même numéro d’enregistrement que le syndicat original. En outre, le gouvernement a transféré les cotisations syndicales des travailleurs du syndicat original vers le syndicat parallèle. De nombreuses conventions internationales du travail ratifiées par l’Algérie n’ont pas été publiées au Journal officiel, ce qui prive les travailleurs de la possibilité d’utiliser ces conventions dans les procédures judiciaires. Les membres des syndicats d’enseignants sont confrontés à des situations de harcèlement, d’intimidation, de non-paiement des salaires et à des arrestations arbitraires. Dans ce contexte, les membres des syndicats d’enseignants n’ont pas eu d’autre choix que de recourir à une grève en 2012, qui a été suivie par 95 pour cent des travailleurs du secteur. Certains membres ayant participé à la grève continuent de subir le même genre de représailles pendant que le gouvernement ne mène aucune enquête appropriée. En outre, l’oratrice accuse le gouvernement d’avoir tenté d’assassiner le président d’une organisation syndicale, et l’auteur présumé de cet acte criminel n’a nullement été poursuivi par le système judiciaire. Le silence de l’appareil judiciaire dans ces affaires suffit à lui seul à comprendre qu’il est dépourvu de tout pouvoir en Algérie. Le gouvernement a réprimé les syndicalistes et éliminé les syndicats indépendants. L’oratrice a indiqué que, dans ces conditions, il n’y a pas d’autre choix que de se tourner vers cette honorable commission pour demander justice.
Le membre travailleur de Bahreïn a pris note des observations formulées par l’observateur représentant la CSI, qui attestent que l’Algérie connaît des difficultés économiques et que des solutions internes doivent être recherchées en collaboration avec tous les partenaires sociaux. Dans le contexte actuel, la situation des organisations syndicales en Algérie ne requiert pas d’intervention de la part de la commission, et la CSI a adopté une position plutôt radicale concernant ce cas. Certaines parties semblent exploiter l’OIT pour affaiblir le rôle de syndicats arabes. La situation en Algérie devrait être examinée de façon équitable à la vue des faits objectifs.
Le représentant gouvernemental a indiqué qu’il entendait répondre avec sérénité et confiance aux accusations portées à l’encontre de son pays. L’Algérie a reconquis et préservé sa stabilité au prix d’énormes sacrifices. Il s’agit aujourd’hui d’une terre d’accueil où il n’y a ni restriction ni menaces de mort, ni entrave à l’organisation d’événements à caractère national ou international dès lors que la législation et les procédures sont respectées, tel que l’a démontré la récente organisation à Alger de la Conférence des ministres des affaires étrangères des pays non alignés. Il est nécessaire de relever que les personnes se prétendant menacées sont présentes dans la salle. Si ces menaces étaient réelles, il conviendrait de s’interroger alors sur comment ces personnes ont pu sortir du territoire pour participer à une conférence internationale. La discussion de ce cas contient donc de faux débats basés sur des accusations infondées qui risquent de porter préjudice à l’OIT et de déboucher sur des dérives aux conséquences imprévisibles. L’Algérie est un pays respectueux des droits humains et des normes internationales de l’OIT, comme l’atteste le nombre de conventions ratifiées. Quant aux droits syndicaux, tel qu’exposé de manière détaillée lors de l’intervention d’ouverture de ce cas, leur respect est pleinement assuré. Il n’est pas concevable d’accuser l’Algérie d’entraves à l’exercice du droit syndical quand on connaît le nombre d’organisations syndicales actives sur le terrain, tout comme il n’est pas concevable de l’accuser d’entrave à l’exercice du droit de grève quand on connaît le nombre de grèves qui y sont déclenchées chaque année. Tout pays a besoin de lois devant être respectées par tous afin d’éviter l’anarchie. Dans ce sens, il ne peut pas être reproché aux employeurs de recourir à la justice lorsque des grèves sont déclenchées en totale violation des procédures légales en vigueur. Il ne saurait être toléré de diktat ni des employeurs ni des travailleurs et, à ce titre, toute la législation sociale du pays est bâtie sur le dialogue et la concertation entre les parties dans la prise en charge de leurs différends. Concernant un forum maghrébin dont l’organisation aurait été empêchée, il convient de rappeler qu’aucun pays au monde ne saurait tolérer l’organisation d’une rencontre internationale sur son territoire national en violation de sa législation. La CSI en a été informée par le biais du BIT à travers un rapport datant du 8 mai 2013. Quant au cas de la CGATA qui aurait subi des entraves à sa constitution, elle n’a, depuis plus d’un an, toujours pas apporté de réponses aux observations formulées par le gouvernement sur la base de la législation en vigueur sur ses statuts et son dossier administratif. Concernant les allégations de clonage syndical formulées par la CSI, il convient de relever que les syndicalistes algériens ignorent tout de cette supposée pratique. Quant à l’absence de participation de certains syndicats à des rencontres tripartites, elle résulte uniquement de la reconnaissance de certaines prérogatives aux syndicats les plus représentatifs conformément aux normes internationales pertinentes. Les syndicats à caractère sectoriel participent pleinement aux discussions relatives à leur champ d’activité et sont consultés pour toutes questions touchant aux intérêts matériels et moraux des travailleurs concernés. Concernant les syndicalistes qui auraient été licenciés abusivement, la législation nationale leur assure une totale protection et leur donne la possibilité de se pourvoir en justice pour faire valoir leurs droits. Il est du devoir de tous de préserver la crédibilité de la commission en veillant à ce que les griefs examinés soient effectivement fondés. L’Algérie réaffirme sa totale disponibilité à collaborer avec la commission afin d’améliorer sa législation, ce qui constitue un processus de longue haleine.
Les membres travailleurs ont relevé que les organisations au sujet desquelles le Comité de la liberté syndicale s’était déjà prononcé en 2013 n’ont toujours pas été enregistrées plus d’un an après. Les organisations syndicales subissent diverses restrictions dans leurs activités qui vont au-delà des limites à l’exercice du droit de grève pour des motifs qui ne semblent pas juridiquement plausibles et qui ne sont pas conformes aux normes de l’OIT. Les instances appelées à se prononcer sur la légalité des actions syndicales ne correspondent pas non plus aux exigences découlant de ces normes. Leur indépendance est fortement sujette à caution, elles ne recueillent pas la confiance des parties intéressées et les procédures qu’elles appliquent ne respectent pas les critères d’un procès équitable. Pour toutes ces raisons, il est nécessaire de demander au gouvernement d’accueillir une mission de contacts directs afin de vérifier, en concertation avec les parties concernées, la conformité de la législation et des pratiques administratives aux normes internationales.
Les membres employeurs ont remercié le gouvernement pour ses propositions et l’ont félicité pour sa volonté de coopérer avec la commission et avec le BIT en vue d’améliorer la législation et la pratique nationale en matière de liberté syndicale. Il semble exister un consensus pour encourager le gouvernement à faire rapport sur les mesures prises en matière de liberté syndicale, en incluant notamment les informations sur la réforme du Code du travail, ainsi que les mesures relatives à la formation des syndicats, leur enregistrement et le dialogue social en général. Cette information doit être reproduite dans les conclusions de la présente discussion. A la lumière des discussions et des propositions des membres travailleurs et des membres employeurs ainsi que de celle du gouvernement concernant le champ d’application de la convention, les conclusions devraient également faire état du fait que la commission n’a pas abordé le droit de grève dans ce cas, les employeurs n’étant pas d’accord avec le fait que la convention no 87 reconnaisse le droit de grève. Elles devraient également indiquer qu’il n’existe pas de consensus entre les groupes sur l’inclusion du droit de grève dans la convention no 87. En outre, il convient d’éviter toute proposition de conclusions demandant au gouvernement d’assurer la conformité de leurs lois et pratiques nationales avec les principes fixés par la commission d’experts en matière de droit de grève.
Commentaire précédent
La commission note les observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) en date du 26 août 2009 qui concernent des questions déjà examinées par la commission et font notamment état d’obstructions à la syndicalisation dans le secteur public et de répression violente par les forces de l’ordre de manifestations syndicales. La commission prie le gouvernement de fournir ses observations en réponse à la communication de 2009 de la CSI ainsi que d’indiquer toute décision de justice rendue dans des affaires concernant des syndicalistes enseignants nommément désignés par la CSI dans ses observations de 2007, notamment du Conseil national des enseignants du supérieur (CNES) et de la Coordination de l’intersyndicale de l’éducation (CISE), qui seraient poursuivis en justice pour fait de grève.
Article 2 de la convention. Droit de constituer des organisations syndicales. La commission avait précédemment relevé que l’article 6 de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 limite le droit de fonder une organisation syndicale aux personnes de nationalité algérienne d’origine ou acquise depuis au moins dix ans. La commission avait rappelé que le droit syndical doit être garanti aux travailleurs et aux employeurs sans distinction ou discrimination d’aucune nature, à l’exception de celles prévues à l’article 9 de la convention, et que les étrangers devraient aussi disposer du droit de constituer un syndicat. Dans son rapport, le gouvernement confirme qu’aux termes de la loi no 90-14 seuls les travailleurs de nationalité algérienne depuis au moins dix ans ont le droit d’être membres fondateurs d’une organisation syndicale et que, dès lors que celle-ci est constituée, tout travailleur sans distinction de nationalité a le droit d’y adhérer librement. La commission note avec regret qu’aucune mesure n’a ainsi été prise, comme demandé précédemment, pour rendre la loi no 90-14 conforme aux prescriptions de la convention. La commission prie instamment une nouvelle fois le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires pour modifier l’article 6 de la loi no 90-14 afin de reconnaître à tous les travailleurs, sans distinction de nationalité, le droit de constituer une organisation syndicale.
Articles 2 et 5. Droit des travailleurs, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier, et de constituer des fédérations et des confédérations. Dans ses commentaires précédents, la commission avait demandé au gouvernement de prendre des mesures concrètes pour modifier les dispositions législatives qui empêchent les organisations syndicales, quel que soit le secteur auquel elles appartiennent, de constituer des fédérations et confédérations de leur choix (art. 2 et 4 de la loi no 90-14). La commission avait précédemment relevé l’indication du gouvernement selon laquelle il était conscient de la nécessité de préciser davantage la formulation de cette disposition par l’introduction d’une définition des notions de fédération (ou union) et confédération. La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement indique que l’article 4 de la loi no 90-14 fera l’objet d’une meilleure clarification à la faveur de la réflexion engagée autour du projet de Code du travail. La commission prie instamment le gouvernement de faire état de tout fait nouveau dans la modification de l’article 4 de la loi no 90-14 afin de lever tout obstacle à la constitution par les organisations de travailleurs, quel que soit le secteur auquel elles appartiennent, de fédérations et de confédérations de leur choix.
Article 3. Droit des organisations d’exercer librement leurs activités et de formuler leur programme d’action. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que l’article 87 bis du Code pénal qualifie de subversif tout acte visant la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet: i) de faire obstacle au fonctionnement des établissement concourant au service public; ou ii) d’entraver la circulation ou la liberté de mouvement sur les voies et places publiques, ces infractions pouvant aller jusqu’à la peine de mort, lorsque la peine prévue par la loi est la réclusion à perpétuité (art. 87 bis 1). La commission avait rappelé que la formulation très générale de certaines dispositions comporte un risque d’atteinte au droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme d’action pour la défense des intérêts de leurs membres, notamment par le recours à la grève. La commission avait demandé au gouvernement de prendre des mesures concrètes pour garantir que cette disposition du Code pénal s’appliquera en aucun cas à l’encontre de travailleurs qui auront exercé pacifiquement leur droit de grève. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle le recours à la grève, outre qu’il est garanti par la Constitution nationale, s’effectue dans le cadre unique de la loi no 90-02 du 6 février 1990 relative à la prévention et au règlement des conflits collectifs de travail, et l’article 87 bis du Code pénal n’a ainsi pas de lien avec l’exercice des droits syndicaux. Le gouvernement ajoute que le pays continue de connaître des mouvements de grève sans que les travailleurs aient été inquiétés sur la base des dispositions de l’article 87 bis du Code pénal. Prenant note de ces éclaircissements de la part du gouvernement, la commission veut croire que le gouvernement continuera de garantir que les dispositions de l’article 87 bis du Code pénal ne soient pas invoquées à l’encontre de travailleurs qui auront exercé pacifiquement leur droit de grève.
La commission avait formulé des commentaires au sujet de l’article 43 de la loi no 90-02, en vertu duquel le recours à la grève est interdit non seulement dans les services essentiels dont l’interruption peut mettre en danger la vie, la sécurité ou la santé du citoyen, mais aussi lorsque cette grève «est susceptible d’entraîner par ses effets une crise économique grave». Ayant noté la réponse du gouvernement selon laquelle cette dernière expression de l’article 43 devait être assimilée à l’expression utilisée par la commission «grève dont l’étendue et la durée risquent de provoquer une crise nationale aiguë», la commission avait demandé que le gouvernement prenne des mesures pour modifier le texte de la loi ou pour adopter un texte réglementaire qui éclaircisse ce point dans le sens indiqué par le gouvernement. La commission note que le dernier rapport du gouvernement ne contient aucune information sur les mesures prises à cet égard. En conséquence, la commission demande une nouvelle fois au gouvernement d’adopter un texte amendant l’article 43 de la loi no 90-02 ou un texte réglementaire précisant expressément que le recours à la grève est interdit dans les services essentiels dont l’interruption peut mettre en danger la vie, la sécurité ou la santé du citoyen, ou lorsque l’étendue et la durée de la grève risquent de provoquer une crise nationale aiguë.
Enfin, la commission avait demandé au gouvernement de modifier l’article 48 de la loi no 90-02 qui confère au ministre ou à l’autorité compétente, en cas de poursuite de la grève et après échec de la médiation, de déférer, après consultation de l’employeur et des représentants des travailleurs, le conflit de travail devant la Commission nationale d’arbitrage. La commission rappelle une nouvelle fois que le recours à l’arbitrage pour faire cesser un conflit collectif ne devrait pouvoir intervenir qu’à la demande des deux parties et/ou en cas de grève dans les services essentiels au sens strict du terme, en cas de grève dont l’étendue et la durée risquent de provoquer une crise nationale aiguë, ou dans le cas de conflit dans la fonction publique concernant des fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat. La commission note que le dernier rapport du gouvernement ne contient aucune information sur les mesures prises, comme demandé précédemment, pour modifier l’article 48 de la loi no 90-02. La commission prie instamment le gouvernement de prendre sans délai des mesures pour ne prévoir le recours à la Commission nationale d’arbitrage que dans les cas qu’elle rappelle ci-dessus, cela afin de garantir pleinement le droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme sans ingérence des pouvoirs publics, conformément à l’article 3 de la convention.
La commission prend note du rapport du gouvernement. Elle note également les commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI) datés du 28 août 2007 concernant des questions qui font déjà l’objet d’un examen par la commission. En outre, la CSI dénonce des obstructions à l’enregistrement des syndicats, des arrestations de syndicalistes ainsi que des représailles contre des grévistes […] (procédures judiciaires en cours). A cet égard, la commission note que le gouvernement indique, entre autres points, qu’aucun syndicaliste ne fait l’objet d’inquiétude pour ses activités syndicales. La commission prie le gouvernement de fournir des informations concrètes concernant les allégations d’arrestations et de représailles de syndicalistes enseignants pour faits de grève, et de fournir copie des décisions de justice rendues à cet égard.
Article 2 de la convention. Droit de constituer une organisation syndicale. La commission observe que l’article 6 de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 modifiée limite le droit de fonder une organisation syndicale aux personnes de nationalité algérienne d’origine ou acquise depuis au moins dix ans. La commission rappelle que le droit syndical doit être garanti aux travailleurs et aux employeurs sans distinction ou discrimination d’aucune nature à l’exception de celles prévues à l’article 9 de la convention et que les étrangers devraient aussi pouvoir fonder un syndicat. La commission prie le gouvernement de rendre l’article 6 de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 conforme aux principes garantis par la convention.
Articles 2 et 5. Droit des travailleurs, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier et de constituer des fédérations et des confédérations. Dans ses commentaires précédents, la commission avait demandé au gouvernement de la tenir informée des mesures prises en vue: 1) d’amender les dispositions législatives empêchant les organisations de travailleurs, quel que soit le secteur auquel elles appartiennent, de constituer des fédérations et confédérations de leur choix (voir art. 2 et 4 de la loi no 90-14); et 2) d’entamer une concertation avec les partenaires sociaux afin de lever toutes les difficultés pouvant surgir, en pratique, de l’interprétation de certaines dispositions législatives sur la constitution des fédérations et confédérations et pouvant notamment, en l’espèce, entraver la reconnaissance de la Confédération algérienne des syndicats autonomes (CASA). Dans sa réponse, le gouvernement affirme que la loi no 90-14 du 2 juin 1990 s’inspire de la convention no 87, et que la législation du travail ne restreint en aucune manière ni la liberté de se constituer en organisation syndicale ni les activités syndicales. Concernant les aspects relatifs à la constitution de fédérations et de confédérations aux termes de l’article 4 de la loi no 90-14 du 2 juin 1990, le gouvernement affirme être conscient de la nécessité de préciser davantage la formulation de cette disposition par l’introduction d’une définition des notions de fédération (ou union) et confédération, et précise que ledit article fait l’objet d’un examen pour prendre en charge cette préoccupation. Pour le cas particulier de la CASA, le gouvernement affirme qu’elle a été invitée à rendre ses statuts conformes aux dispositions de la loi en vigueur. L’autorité compétente est à ce jour dans l’attente d’une réponse de la CASA. En outre, la commission observe que dans le cas no 2153 examiné par le Comité de la liberté syndicale (336e rapport), le gouvernement a indiqué que l’application conjointe des articles 2 et 4 de la loi no 90-14 fait en sorte que le cumul de deux secteurs différents, comme c’est le cas pour l’adhésion du Syndicat national de la navigation aérienne à cette confédération englobant le secteur de l’administration publique, n’est pas conforme à l’article 2 de ladite loi. La commission demande au gouvernement de prendre des mesures concrètes pour amender les dispositions législatives qui empêchent les organisations de travailleurs, quel que soit le secteur auquel elles appartiennent, de constituer des fédérations et confédérations de leur choix. La commission prie le gouvernement de la tenir informée de toutes mesures prises à cet égard.
Article 3. Exercice du droit de grève. Dans ses précédents commentaires, la commission avait aussi prié le gouvernement de limiter le champ d’application du décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992 (dont l’article 1, lu conjointement avec les articles 3, 4 et 5, qualifie d’actes subversifs les infractions visant la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet: i) de faire obstacle au fonctionnement des établissements concourant au service public; ou ii) d’entraver la circulation ou la liberté de mouvement sur les voies et places publiques, ces infractions étant passibles de peines pouvant aller jusqu’à vingt ans de réclusion), en prenant des mesures d’ordre législatif ou réglementaire pour garantir que ce texte ne puisse aucunement être appliqué contre des travailleurs ayant usé pacifiquement de leur droit de faire la grève. Tout en prenant note des commentaires du gouvernement sur les motifs d’adoption de ce décret, la commission constate que l’ordonnance no 95-11 du 25 Ramadhan 1415 correspondant au 25 février 1995, modifiant et complétant l’ordonnance no 66-156 du 8 juin 1966 portant Code pénal, abroge, en son article 2, ledit décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992 relatif à la lutte contre la subversion et le terrorisme. La commission relève que l’article 87 bis du Code pénal modifié par ladite ordonnance continue de qualifier de subversif tout acte visant la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet: i) de faire obstacle au fonctionnement des établissement concourant au service public; ou ii) d’entraver la circulation ou la liberté de mouvement sur les voies et places publiques, ces infractions pouvant aller jusqu’à la peine de mort, lorsque la peine prévue par la loi est la réclusion à perpétuité. La commission rappelle que la formulation très générale de certaines dispositions comporte un risque d’atteinte au droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme d’action pour la défense des intérêts de leurs membres, notamment par le recours à la grève. La commission prie le gouvernement de prendre des mesures pour modifier le Code pénal (art. 87 bis) afin de garantir que ce texte ne s’appliquera en aucun cas à l’encontre des travailleurs qui auront exercé pacifiquement leur droit de grève. La commission demande au gouvernement de la tenir informée de toute évolution à cet égard.
La commission avait également demandé au gouvernement de modifier l’article 43 de la loi no 90-02 du 6 février 1990, en vertu duquel le recours à la grève est interdit non seulement dans les services essentiels dont l’interruption peut mettre en danger la vie, la sécurité ou la santé du citoyen, mais aussi lorsque cette grève est susceptible d’entraîner par ses effets une crise économique grave, les conflits collectifs du travail devant alors être soumis à des procédures de conciliation et d’arbitrage prévues par la loi. De plus, la commission avait demandé au gouvernement de modifier l’article 48 de cette même loi qui confère au ministre ou à l’autorité compétente, en cas de poursuite de la grève ou après échec de la médiation, de déférer, après consultation de l’employeur et des représentants des travailleurs, le conflit de travail devant la Commission nationale d’arbitrage. La commission prend note de la réponse du gouvernement selon laquelle l’expression «entraîner par ses effets une crise économique grave» prévue par l’article 43 de la loi est assimilée à l’expression utilisée par la commission et qui fait état de «grève dont l’étendue et la durée risquent de provoquer une crise nationale aiguë». La commission demande au gouvernement de prendre des mesures pour modifier la législation ou pour adopter un texte règlementaire qui éclaircisse ce point dans le sens indiqué par le gouvernement. De plus, en ce qui concerne l’article 48 de la loi, le gouvernement affirme que l’intervention ne se fait pas dans un esprit d’ingérence à l’exercice légal du droit de grève, mais plutôt dans un esprit de conciliation des deux parties, et que cette intervention n’a lieu que lorsque «d’impérieuses nécessités économiques et sociales l’exigent» et «après consultation de l’employeur et des représentants des travailleurs». La commission rappelle que le recours à l’arbitrage pour faire cesser un conflit collectif ne devrait pouvoir intervenir qu’à la demande des deux parties et/ou en cas de grève dans les services essentiels au sens strict du terme, ou en cas de grève dont l’étendue et la durée risquent de provoquer une crise nationale aiguë, ou dans le cas de conflit dans la fonction publique concernant des fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat. En conséquence, la commission prie instamment le gouvernement de modifier sa législation dans le sens indiqué ci-dessus pour garantir pleinement le droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme sans ingérence des pouvoirs publics, en conformité avec l’article 3. Elle prie le gouvernement de la tenir informée de toute évolution à cet égard.
La commission prend note du rapport du gouvernement ainsi que de sa réponse aux commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) datés du 31 août 2005. Elle note également les commentaires de la CISL datés du 10 août 2006 qui se réfèrent à des questions déjà soulevées par la commission.
Articles 2 et 5 de la convention. Droit des travailleurs, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier et de constituer des fédérations et des confédérations. Dans ses précédents commentaires, la commission avait prié le gouvernement de donner des éclaircissements sur l’application dans la pratique de l’article 8 de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 relative aux modalités d’exercice du droit syndical, et notamment sur les motifs possibles de refus de l’enregistrement d’organisations syndicales et les voies de recours disponibles.
Dans sa réponse, le gouvernement indique que la loi no 90-14 n’a fixé aucune condition à remplir pour constituer des organisations syndicales, hormis celle d’être travailleur ou employeur. Le gouvernement précise que sur la forme, la déclaration de constitution de l’organisation syndicale se fait sur simple demande, à laquelle sont joints les statuts élaborés par les membres fondateurs, accompagnés du procès-verbal de l’assemblée générale constitutive de celle-ci. S’agissant en particulier des dispositions de l’article 8 de la loi no 90-14 précitée, le gouvernement indique que la demande de constitution est déposée: 1) auprès du ministère du Travail et de la Sécurité sociale lorsqu’il s’agit d’une organisation syndicale de travailleurs ou d’employeurs à vocation nationale; 2) au siège de la wilaya lorsque l’organisation est à vocation régionale ou wilayale; et 3) auprès de la commune lorsqu’elle est à vocation communale ou intercommunale. Le choix de l’étendue territoriale de l’organisation syndicale est du ressort des membres fondateurs, dont l’administration compétente ne prend connaissance qu’une fois que la demande a été déposée. Le gouvernement signale que le délai de réponse à la demande de constitution est de trente jours. Il peut être demandé aux organisations concernées de porter des corrections aux statuts de leur acte constitutif. Une fois les correctifs apportés, le récépissé d’enregistrement leur est délivré.
Par ailleurs, dans son observation antérieure, la commission avait demandé au gouvernement de la tenir informée de l’issue finale de la question de l’enregistrement de la Confédération algérienne des syndicats autonomes (CASA). A cet égard, le gouvernement renvoie à ses communications adressées au Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2153, tout en indiquant que la correspondance en question soumise à l’examen du comité ne saurait être considérée comme un refus d’enregistrement de la CASA, mais plutôt comme une invitation de mise en conformité des statuts à la législation du travail. Il souligne en outre que, si les parties concernées avaient vu dans les observations de l’administration un quelconque refus d’autorisation de la constitution de la CASA, elles auraient porté le litige devant la justice, ce qui n’a pas été le cas. La commission note à cet égard que le Comité de la liberté syndicale avait prié le gouvernement: 1) d’amender rapidement les dispositions législatives empêchant les organisations de travailleurs, quel que soit le secteur auquel elles appartiennent, de constituer des fédérations et confédérations de leur choix [cf. art. 2 et 4 de la loi no 90-14]; et 2) d’entamer rapidement une concertation avec les partenaires sociaux afin de lever toutes les difficultés pouvant surgir en pratique de l’interprétation de certaines dispositions législatives sur la constitution des fédérations et confédérations et pouvant notamment, en l’espèce, entraver la reconnaissance de la CASA (voir rapports nos 336 et 340 du Comité de la liberté syndicale). Rappelant que l’acquisition de la personnalité juridique par les fédérations et confédérations ne peut être soumise à des conditions de nature à limiter le droit de constituer ces organisations, la commission prie instamment le gouvernement de la tenir informée des mesures prises en ce sens et du résultat des discussions engagées.
Article 3. Exercice du droit de grève. Dans ses précédents commentaires la commission avait aussi prié le gouvernement de délimiter le champ d’application du décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992 (dont l’article 1, lu conjointement avec les articles 3, 4 et 5, qualifie d’actes subversifs les infractions visant la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet: i) de faire obstacle au fonctionnement des établissements concourant au service public; ou ii) d’entraver la circulation ou la liberté de mouvement sur les voies et places publiques, ces infractions étant passibles de peines pouvant aller jusqu’à vingt ans de réclusion), en prenant des mesures d’ordre législatif ou réglementaire ayant pour effet de garantir que ce texte ne puisse aucunement être appliqué contre des travailleurs ayant usé pacifiquement de leur droit de faire grève. La commission note que, d’après le gouvernement, le décret précité ne constitue aucunement un obstacle à l’exercice du droit de grève des travailleurs, et que plusieurs grèves ont eu lieu, sans aucune incidence par rapport à ce texte. La commission réitère néanmoins que la formulation très générale de certaines dispositions comporte un risque d’atteinte au droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme d’action pour la défense des intérêts de leurs membres, notamment par le recours à la grève. La commission prie donc instamment au gouvernement de circonscrire le champ d’application du décret législatif, en prenant des mesures par voie législative ou réglementaire qui auront pour effet de garantir que ce texte ne s’appliquera en aucun cas à l’encontre des travailleurs qui auront exercé pacifiquement leur droit de grève.
La commission avait également demandé au gouvernement de modifier l’article 43 de la loi no 90-02 du 6 février 1990, en vertu duquel le recours à la grève est interdit non seulement dans les services essentiels dont l’interruption peut mettre en danger la vie, la sécurité ou la santé du citoyen, mais encore lorsque cette grève est susceptible d’entraîner, par ses effets, une crise économique grave, les conflits collectifs du travail devant alors être soumis à des procédures de conciliation et d’arbitrage prévues par la loi. La commission avait également prié le gouvernement de modifier l’article 48 de cette même loi, qui confère au ministre ou à l’autorité compétente, en cas de poursuite de la grève ou après échec de la médiation, de déférer, après consultation de l’employeur et des représentants des travailleurs, le conflit collectif de travail devant la Commission nationale d’arbitrage. Notant que le rapport du gouvernement ne contient pas d’informations à ce sujet, la commission souhaite à nouveau souligner que le recours à l’arbitrage pour faire cesser un conflit collectif ne devrait pouvoir intervenir qu’à la demande des deux parties et/ou en cas de grève dans les services essentiels au sens strict du terme, ou en cas de grève dont l’étendue et la durée risquent de provoquer une crise nationale aiguë. La commission prie instamment le gouvernement d’indiquer les mesures prises ou envisagées pour modifier sa législation dans le sens indiqué ci-dessus pour garantir pleinement le droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme sans ingérence des pouvoirs publics, en conformité avec l’article 3.
La commission veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour que les modifications susmentionnées soient apportées à la législation afin de rendre celle-ci conforme à la convention. Elle prie le gouvernement de fournir le texte de la législation adoptée ou envisagée à cet égard.
La commission prend note du rapport du gouvernement. Elle prend également note des commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), en date du 31 août 2005, qui se réfèrent à diverses questions déjà soulevées par la commission ainsi qu’à des faits de harcèlement et d’arrestations de syndicalistes du secteur public (administration publique centrale, pompiers, hôpital universitaire). La commission prie le gouvernement de communiquer ses observations à cet égard.
La commission a le regret de constater que le gouvernement n’aborde pas dans son rapport les questions soulevées dans sa précédente observation. Dans ces conditions, la commission reprend ses précédents commentaires et prie le gouvernement:
– de donner des éclaircissements sur l’application dans la pratique de l’article 8 de la loi no 90-14 et, plus précisément, sur les aspects suivants: les motifs possibles de refus de l’enregistrement d’organisations syndicales, les dispositions correspondantes, les conséquences pratiques d’un tel refus sur l’existence et le fonctionnement d’une organisation syndicale et les voies de recours ouvertes à une organisation syndicale en cas de refus de son enregistrement ou d’absence d’accusé de réception de sa demande d’enregistrement dans les délais impartis;
– de communiquer des informations précises sur l’issue finale de la question de l’enregistrement de la Confédération algérienne des syndicats autonomes (CASA);
– de délimiter le champ d’application du décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992 (dont l’article 1, lu conjointement avec les articles 3, 4 et 5, qualifie d’actes subversifs les infractions visant la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet: i) de faire obstacle au fonctionnement des établissements concourant au service public; ou ii) d’entraver la circulation ou la liberté de mouvement sur les voies et places publiques, ces infractions étant passibles de peines pouvant aller jusqu’à vingt ans de réclusion), en prenant des mesures d’ordre législatif ou réglementaire ayant pour effet de garantir que ce texte ne puisse aucunement être appliqué contre des travailleurs ayant usé pacifiquement de leur droit de faire grève;
– de modifier l’article 43 de la loi no 90-02 du 6 février 1990, en vertu duquel le recours à la grève est interdit non seulement dans les services essentiels dont l’interruption peut mettre en danger la vie, la sécurité ou la santé du citoyen mais encore lorsque cette grève est susceptible d’entraîner, par ses effets, une crise économique grave, les conflits collectifs du travail devant alors être soumis à des procédures de conciliation et d’arbitrage prévues par la loi. La commission prie également le gouvernement de modifier l’article 48 de cette même loi, qui confère au ministre ou à l’autorité compétente, en cas de poursuite de la grève ou après échec de la médiation, de déférer, après consultation de l’employeur et des représentants des travailleurs, le conflit collectif de travail devant la Commission nationale d’arbitrage;
– de faire connaître l’état d’avancement des travaux de la Commission nationale de réforme des structures de l’Etat et de communiquer tout document pertinent, notamment tout projet de loi relatif aux statuts de la fonction publique.
La commission exprime l’espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour que les modifications susmentionnées soient apportées à la législation afin de rendre celle-ci conforme à la convention. Elle prie le gouvernement de fournir le texte de la législation adoptée ou envisagée à cet égard.
La commission prend note du rapport du gouvernement.
La commission rappelle, en premier lieu, que son dernier commentaire portait sur les quatre questions suivantes:
n l’article 8 de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 concernant l’enregistrement des organisations syndicales et plus précisément son application pratique en général et son application dans le cas particulier de la Confédération algérienne des syndicats autonomes (CASA);
n l’article 1, lu conjointement avec les articles 3, 4 et 5, du décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992, qualifiant d’actes subversifs un certain nombre d’activités, et ses répercussions possibles sur l’exercice du droit de grève;
n les articles 43 et 48 de la loi no 90-02 du 6 février 1990 prévoyant, d’une part, l’interdiction de la grève au motif d’une crise économique grave et, d’autre part, l’arbitrage obligatoire pour mettre fin à un conflit collectif;
n la réforme du statut de la fonction publique.
Articles 2 et 5 de la convention. Droit des travailleurs, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier et de constituer des fédérations et des confédérations. La commission note que le gouvernement limite ses commentaires à la teneur de la loi no 90-14 en indiquant qu’elle donne plein effet à la convention et que les lois régissant la liberté syndicale ne contiennent aucune disposition tendant à limiter, par quelque moyen que ce soit, l’exercice du droit syndical. Le gouvernement indique entre autres qu’aucune autorisation préalable n’est exigée en vertu de la loi no 90-14 pour la constitution d’une organisation syndicale et que cette loi s’applique d’une manière identique à tous les travailleurs salariés quel que soit le secteur où ils exercent. Le gouvernement rappelle aussi que la loi prévoit des sanctions relevant du droit pénal contre toute entrave au libre exercice du droit syndical. La commission rappelle néanmoins que, dans ses commentaires antérieurs, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) avait soutenu que, en pratique, les autorités empêchaient l’enregistrement de certains syndicats en refusant la délivrance d’un récépissé d’enregistrement; la CISL avait citéà cet égard le cas de la CASA. A l’époque, le gouvernement avait déjà fait valoir que la loi no 90-14 n’exigeait aucune autorisation pour la constitution d’une organisation syndicale et qu’en ce qui concernait le cas de la CASA les syndicats pouvaient exercer leurs activités dans le cadre de la confédération projetée sans attendre l’avis juridique du ministère du Travail et de la Sécurité sociale. La commission avait noté cependant que la réponse du gouvernement dans le cas no 2153 examiné par le Comité de la liberté syndicale faisait référence à des réponses négatives qu’il avait données concernant la constitution de deux confédérations, y compris la CASA (voir 327e rapport, paragr. 140 à 161).
La commission rappelle donc que ce ne sont pas les dispositions de la loi no 90-14 qui, en elles-mêmes, soulèvent des questions mais l’application pratique qui en est faite. A cet égard, elle attire à nouveau l’attention du gouvernement sur le fait que les réglementations nationales concernant la constitution des organisations syndicales ne sont pas en elles-mêmes incompatibles avec les dispositions de la convention, à condition qu’elles ne mettent pas en cause les garanties prévues par celle-ci, et notamment qu’elles n’équivalent pas en pratique à un régime d’autorisation préalable pour la constitution des organisations syndicales et qui est interdit par l’article 2 (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 68 et 69). La commission note du reste que le gouvernement avait reconnu dans ce cas devant le Comité de la liberté syndicale que des difficultés d’interprétation des dispositions relatives au droit des partenaires sociaux de constituer des fédérations et confédérations pouvaient surgir. Dans ces conditions, la commission demande à nouveau au gouvernement de lui fournir des clarifications sur l’application en pratique de l’article 8 de la loi no 90-14 et tout particulièrement sur les aspects suivants: les motifs possibles d’un refus d’enregistrement, les dispositions y afférentes, ses conséquences pratiques sur l’existence et le fonctionnement d’une organisation syndicale et le droit de recours des organisations contre un refus d’enregistrement ou l’absence de récépissé d’enregistrement dans le délai imparti. Enfin, la commission prie le gouvernement de lui fournir des informations précises sur la manière dont la question de l’enregistrement de la CASA aura été finalement résolue.
Article 3. Droit pour les organisations d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes sans ingérence des autorités publiques. Notant avec regret que le gouvernement n’a fourni aucune information en ce qui concerne le décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992, la commission rappelle que l’article 1er, lu conjointement avec les articles 3, 4 et 5 de ce décret, qualifie d’actes subversifs les infractions visant notamment la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet: 1) de faire obstacle au fonctionnement des établissements concourant au service public; ou 2) d’entraver la circulation ou la liberté sur les voies ou les places publiques, de tels actes étant passibles de lourdes sanctions pouvant aller jusqu’à vingt ans de prison. Par le passé, le gouvernement avait fait valoir que, ayant étéédicté dans des conditions particulières, ce décret ne visait pas le droit de grève ou la liberté syndicale et qu’il n’avait jamais été appliquéà des travailleurs ayant exercé pacifiquement leur droit de grève. La commission a reconnu à cet égard que la très grande majorité des dispositions du décret n’entrent pas dans le champ de protection prévue par la convention. Toutefois, la formulation très générale de certaines dispositions, et en particulier celle des dispositions susvisées, comporte un risque d’atteinte au droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme d’action pour la défense des intérêts de leurs membres, notamment par le recours à la grève. La commission demande donc au gouvernement de circonscrire le champ d’application du décret législatif, en prenant des mesures par voie législative ou réglementaire qui auront pour effet de garantir que ce texte ne s’appliquera en aucun cas à l’encontre de travailleurs qui auront exercé pacifiquement leur droit de grève. La commission demande également au gouvernement de continuer à la tenir informée sur toute application éventuelle de ce décret dans le cadre d’une grève.
Notant également avec regret que le gouvernement n’a fourni aucune information sur le décret législatif no 90-02 du 6 février 1990, la commission rappelle que l’article 43 de ce décret prévoit que la grève est interdite, non seulement dans les services essentiels dont l’interruption peut mettre en danger la vie, la santé ou la sécurité de la population, ce que la commission a toujours considéré comme admissible, mais aussi lorsque la grève est susceptible d’entraîner par ses effets une crise économique grave, les différends collectifs étant dans de tels cas soumis aux procédures de conciliation et d’arbitrage prévues par la loi. De plus, l’article 48 confère au ministre ou à l’autorité compétente, en cas de persistance de la grève et après échec de la médiation, le pouvoir de déférer, après consultation de l’employeur et des représentants des travailleurs, un conflit à la commission d’arbitrage. Dans de précédents rapports, le gouvernement avait fait valoir que la saisine de la commission d’arbitrage ne s’effectue que lorsque d’impérieuses nécessités économiques et sociales l’exigent. La commission souhaite à nouveau souligner que le recours à l’arbitrage pour faire cesser un conflit collectif ne devrait pouvoir intervenir qu’à la demande des deux parties et/ou en cas de grève dans les services essentiels au sens strict du terme, ou en cas de grève dont l’étendue et la durée risquent de provoquer une crise nationale aiguë. Elle demande donc au gouvernement d’indiquer les mesures prises ou envisagées pour modifier sa législation dans le sens indiqué ci-dessus pour garantir pleinement le droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme sans ingérence des pouvoirs publics, en conformité avec l’article 3. La commission demande également au gouvernement de lui donner des précisions sur l’application qui aurait été faite en pratique des articles 43 et 48.
Enfin, la commission réitère sa demande au gouvernement relative à l’état d’avancement des travaux de la Commission nationale de réforme des structures de l’Etat et le prie de lui faire parvenir tout document à ce sujet, y compris tout projet de loi concernant le statut de la fonction publique.
La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement. Elle regrette que, à nouveau cette année, le rapport du gouvernement ne contienne aucune nouvelle information relative à ses précédents commentaires et se limite à réitérer ses réponses antérieures. Elle note par ailleurs les commentaires formulés par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) sur l’application de la convention en Algérie et la réponse du gouvernement à cet égard.
Articles 2 et 5 de la convention. Droit des travailleurs, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier et de constituer des fédérations et confédérations. La commission note les commentaires de la CISL aux termes desquels, en pratique, les autorités ont empêché l’enregistrement de certains syndicats en refusant la délivrance d’un récépissé d’enregistrement; la CISL se réfère à cet égard au cas de la Confédération algérienne des syndicats autonomes (CASA). La commission note la réponse du gouvernement selon laquelle: 1) en vertu de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 relative aux modalités d’exercice du droit syndical aucune autorisation préalable n’est exigée pour la constitution d’une organisation syndicale; une simple déclaration de constitution, dont l’autorité compétente accuse dûment réception, est requise; et 2) en ce qui concerne le cas particulier auquel se réfère la CISL, les syndicats peuvent exercer leurs activités dans le cadre de la confédération projetée sans attendre l’avis juridique du ministère du Travail et de la Sécurité sociale; le gouvernement n’est jamais intervenu dans les activités de cette confédération. La commission note également la réponse du gouvernement dans le cas no 2153 examiné par le Comité de la liberté syndicale aux termes de laquelle le gouvernement a donné des réponses négatives concernant la constitution de deux confédérations, y compris la CASA, en vertu des articles 2 et 4 de la loi no 90-14 (voir paragr. 170-174 du 329e rapport du Comité de la liberté syndicale).
La commission note que, en vertu de l’article 8 de la loi no 90-14, les organisations syndicales doivent s’enregistrer auprès de l’autorité administrative compétente afin d’être déclarées comme étant constituées et que l’autorité administrative compétente doit délivrer un récépissé d’enregistrement dans les trente jours suivant le dépôt de la demande d’enregistrement. La commission note par ailleurs que, s’agissant du cas particulier mentionné par la CISL, le gouvernement se réfère à l’avis juridique du ministère du Travail et de la Sécurité sociale - et non au simple accusé de réception prévu par la loi. La commission comprend du rapport du gouvernement que, apparemment, cet avis juridique n’a toujours pas été rendu. De surcroît, la commission note, à la lumière de la réponse du gouvernement dans le cas no 2153, que le gouvernement a refusé la demande d’enregistrement de deux confédérations en vertu des articles 2 et 4 de la loi no 90-14. La commission rappelle que les réglementations nationales concernant la constitution des organisations syndicales ne sont pas en elles-mêmes incompatibles avec les dispositions de la convention, à condition qu’elles ne mettent pas en cause les garanties prévues par celle-ci, et notamment qu’elles n’équivalent pas en pratique à un régime d’autorisation préalable pour la constitution des organisations syndicales et qui est interdit par l’article 2 (voir paragr. 68 et 69 de l’étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994).
Dans ces conditions, la commission prie le gouvernement dans son prochain rapport de lui fournir des clarifications sur l’application en pratique de l’article 8 de la loi no 90-14 notamment, à la lumière de ses indications selon lesquelles la demande d’enregistrement peut faire l’objet d’un refus en vertu des articles 2 et 4 de la loi. La commission prie en outre le gouvernement de lui soumettre les informations suivantes: a) les motifs d’un refus d’enregistrement; b) les dispositions, s’il en existe, précisant les motifs d’un refus; c) les conséquences pratiques d’un refus sur l’existence et le fonctionnement d’une organisation syndicale; d) le droit de recours des organisations contre le refus ou l’absence de tout accusé de réception dans le délai imparti. Enfin, la commission prie le gouvernement d’apporter des clarifications, à la lumière de l’article 8 de la loi no 90-14, sur l’avis juridique dans le cas de la CASA mentionné dans son rapport et sur les implications pratiques, présentes et à venir, d’un tel avis sur l’existence et le fonctionnement de la confédération.
La commission rappelle que ses commentaires antérieurs portent depuis plusieurs années sur les points suivants.
Article 3. Droit pour les organisations d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes sans ingérence des autorités publiques. S’agissant du décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992, la commission avait noté que l’article 1er, lu conjointement avec les articles 3, 4 et 5 du décret no 92-03, qualifie d’actes subversifs les infractions visant notamment la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet: 1) de faire obstacle au fonctionnement des établissements concourant au service public; ou 2) d’entraver la circulation ou la liberté sur les voies ou les places publiques sous peine de lourdes sanctions pouvant aller jusqu’à vingt ans de prison. En conséquence, la commission prie à nouveau le gouvernement de prendre des mesures par voie législative ou réglementaire pour assurer qu’en aucun cas ces dispositions ne puissent être appliquées à l’encontre de travailleurs qui auront exercé pacifiquement leur droit de grève, et demande au gouvernement de la tenir informée de toute application de ces dispositions dans le cadre de l’exercice du droit de grève.
S’agissant de l’article 43 du décret législatif no 90-02 du 6 février 1990, la commission avait relevé que cette disposition prévoit que la grève est interdite, non seulement dans les services essentiels dont l’interruption peut mettre en danger la vie, la santé ou la sécurité des citoyens, ce que la commission a toujours considéré comme admissible, mais aussi lorsque la grève est susceptible d’entraîner par ses effets une crise économique grave. De plus, l’article 48 confère au ministre ou à l’autorité compétente, en cas de persistance de la grève et après échec de la médiation, le pouvoir de déférer, après consultation de l’employeur et des représentants des travailleurs, un conflit à la commission d’arbitrage. La commission souhaite à nouveau rappeler que le recours à l’arbitrage pour faire cesser un conflit collectif ne devrait pouvoir intervenir qu’à la demande des deux parties et/ou en cas de grève dans les services essentiels au sens strict du terme. Elle prie en conséquence à nouveau instamment le gouvernement de modifier sa législation dans le sens indiqué ci-dessus pour garantir pleinement le droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme sans ingérence des pouvoirs publics, en conformité avec l’article 3 de la convention.
Par ailleurs, la commission avait noté dans un précédent rapport du gouvernement que, suite à l’absence de cadre juridique adéquat régissant les travailleurs de la fonction publique depuis l’abrogation de la loi no 78-12 portant Statut général du travailleur, le gouvernement avait déclaré que la refonte du Statut général de la fonction publique était à l’ordre du jour et que les conclusions de la Commission nationale de réforme des structures de l’Etat devraient constituer des éléments importants dans l’élaboration du futur Statut de la fonction publique. A cet égard, la commission prie à nouveau le gouvernement de la tenir informée dans son prochain rapport des conclusions de la Commission nationale de réforme des structures de l’Etat et de lui faire parvenir tout projet de loi concernant le Statut de la fonction publique.
La commission exprime le ferme espoir que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires dans un proche avenir pour mettre sa législation en pleine conformité avec les dispositions de la convention. Elle rappelle à cet égard au gouvernement qu’il peut faire appel à l’assistance technique du Bureau s’il le souhaite.
La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement. Elle note en particulier que, suite à l’absence de cadre juridique adéquat régissant les travailleurs de la fonction publique depuis l’abrogation de la loi no 78-12 portant statut général du travailleur, le gouvernement déclare que la refonte du statut général de la fonction publique est à l’ordre du jour et que les conclusions de la Commission nationale de réforme des structures de l’Etat devraient constituer des éléments importants dans l’élaboration du futur statut de la fonction publique. A cet égard, la commission prie le gouvernement de la tenir informée dans son prochain rapport des conclusions de la Commission nationale de réforme des structures de l’Etat et de lui faire parvenir tout projet de loi concernant le statut de la fonction publique.
La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement ainsi que du procès-verbal de la réunion tenue entre le ministère du Travail et de la Sécurité sociale et le Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique (SNAPAP) communiqué par le gouvernement. La commission observe toutefois que cette année, à nouveau, le rapport du gouvernement ne contient pas de réponses à ces précédents commentaires.
Elle rappelle que ses commentaires antérieurs portaient sur les points suivants.
Article 3 de la convention. Droit pour les organisations d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes sans ingérence des autorités publiques. S’agissant du décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992, la commission avait noté que l’article 1er, lu conjointement avec les articles 3, 4 et 5 du décret no 92-03, qualifie d’actes subversifs les infractions visant notamment la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet: 1) de faire obstacle au fonctionnement des établissements concourant au service public; ou 2) d’entraver la circulation ou la liberté sur les voies ou les places publiques sous peine de lourdes sanctions pouvant aller jusqu’à vingt ans de prison. En conséquence, la commission prie à nouveau le gouvernement de prendre des mesures par voie législative ou réglementaire pour assurer qu’en aucun cas ces dispositions ne puissent être appliquées à l’encontre de travailleurs qui auront exercé pacifiquement leur droit de grève et demande au gouvernement de la tenir informée de toute application de ces dispositions dans le cadre de l’exercice du droit de grève.
S’agissant de l’article 43 du décret législatif no 90-02 du 6 février 1990, la commission avait relevé que cette disposition prévoit que la grève est interdite, non seulement dans les services essentiels dont l’interruption peut mettre en danger la vie, la santé ou la sécurité des citoyens, ce que la commission a toujours considéré comme admissible, mais aussi lorsque la grève est susceptible d’entraîner par ses effets une crise économique grave. De plus, l’article 48 confère au ministre ou à l’autorité compétente, en cas de persistance de la grève et après échec de la médiation, le pouvoir de déférer, après consultation de l’employeur et des représentants des travailleurs, un conflit à la commission d’arbitrage. La commission souhaite toutefois rappeler que le recours à l’arbitrage pour faire cesser un conflit collectif ne devrait pouvoir intervenir qu’à la demande des deux parties et/ou en cas de grève dans les services essentiels au sens strict du terme. Elle prie en conséquence à nouveau instamment le gouvernement de modifier sa législation dans le sens indiqué ci-dessus pour garantir pleinement le droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme sans ingérence des pouvoirs publics en conformité avec l’article 3 de la convention.
La commission note que le rapport du gouvernement ne contient pas de réponse à ses précédents commentaires.
Article 3 de la convention. Droit pour les organisations d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes sans ingérence des autorités publiques. La commission avait noté que les articles 1, 3, 4 et 5 du décret législatif no 90-02 du 6 février 1990 portant sur l’arbitrage obligatoire contiennent des dispositions qui risquent de porter atteinte au droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme d’action pour la défense des intérêts économiques, sociaux et professionnels de leurs membres, notamment par le recours à la grève, sans ingérence des pouvoirs publics.
S’agissant du décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992, la commission note que le gouvernement réitère la réponse fournie dans le cadre de ses précédents rapports, à savoir que ledit décret ne vise ni le droit de grève ni le droit syndical et que ces dispositions n’ont jamais été appliquées aux travailleurs ayant exercé pacifiquement leur droit de grève. La commission rappelle toutefois que l’article 1er, lu conjointement avec les articles 3, 4 et 5 du décret no 92-03, qualifie d’actes subversifs ou terroristes les infractions visant notamment la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet: 1) de faire obstacle au fonctionnement des établissements concourant au service public; ou 2) d’entraver la circulation ou la liberté sur les voies ou les places publiques sous peine de lourdes sanctions pouvant aller jusqu’à vingt ans de prison. En conséquence, la commission prie à nouveau le gouvernement de prendre des mesures par voie législative ou réglementaire pour assurer qu’en aucun cas ces dispositions ne puissent être appliquées à l’encontre de travailleurs qui auront exercé pacifiquement leur droit de grève.
S’agissant de l’article 43 du décret législatif no 90-02 du 6 février 1990, la commission avait relevé que cette disposition prévoit que la grève est interdite, non seulement dans les services essentiels dont l’interruption peut mettre en danger la vie, la santé ou la sécurité des citoyens, ce que la commission a toujours considéré comme admissible, mais aussi lorsque la grève est susceptible d’entraîner par ses effets une crise économique grave. De plus, l’article 48 confère au ministre ou à l’autorité compétente, en cas de persistance de la grève et après échec de la médiation, le pouvoir de déférer, après consultation de l’employeur et des représentants des travailleurs, un conflit collectif à la commission d’arbitrage. La commission souhaite toutefois rappeler que le recours à l’arbitrage pour faire cesser un conflit collectif ne devrait pouvoir intervenir qu’à la demande des deux parties et/ou que l’imposition de l’arbitrage pour mettre fin à une grève ne devrait intervenir qu’en cas de grève dans les secteurs essentiels au sens strict du terme, ou en cas de grève dont l’étendue et la durée risquent de provoquer une crise nationale aiguë. Elle prie en conséquence à nouveau instamment le gouvernement de modifier sa législation dans le sens indiqué ci-dessus pour la rendre pleinement conforme aux principes de la liberté syndicale.
La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement.
La commission rappelle que ses commentaires antérieurs portaient sur les articles 1, 3, 4 et 5 du décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992 relatif à la lutte contre la subversion ainsi que sur les articles 43 et 48 de la loi no 90-02 du 6 février 1990 portant sur l'arbitrage obligatoire dans la mesure où ils contiennent des dispositions qui risquent de porter atteinte au droit des organisations de travailleurs d'organiser leurs activités et de formuler leur programme d'action pour la défense des intérêts économiques, sociaux et professionnels de leurs membres, sans ingérence des pouvoirs publics.
La commission note en premier lieu que le gouvernement réitère la réponse fournie dans le cadre de son précédent rapport, à savoir que le décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992 ne vise ni le droit de grève ni le droit syndical. La commission rappelle toutefois que l'article 1er, lu conjointement avec les articles 3, 4 et 5 du décret no 92-03, qualifie d'actes subversifs les infractions visant notamment la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet: 1) de faire obstacle au fonctionnement des établissements concourant au service public; ou 2) d'entraver la circulation ou la liberté sur les voies et les places publiques sous peine de lourdes sanctions pouvant aller jusqu'à vingt ans de prison.
La commission prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre des mesures par voie législative ou réglementaire pour assurer qu'en aucun cas ces dispositions ne puissent être appliquées à l'encontre de travailleurs qui auront exercé pacifiquement leur droit de grève qui est un corollaire indissociable du droit d'association syndical protégé par la convention.
La commission note en second lieu avec intérêt que le gouvernement dans son rapport indique que les activités de contrôle, de conseil et d'assistance développées par les services d'inspection du travail dans le monde du travail ainsi que celles relatives au traitement de différends collectifs du travail ne révèlent pas d'entrave majeure à l'exercice du droit syndical ainsi qu'à celui du droit de grève.
La commission rappelle toutefois que le pouvoir conféré au ministre, ou à l'autorité compétente, par les articles 43 et 48 de la loi no 90-02 du 6 février 1990, de déférer un conflit collectif à la commission d'arbitrage peut être déclenché en cas de persistance de la grève et après échec de la médiation prévue à l'article 46. Le ministre, le Wali ou le président de l'Assemblée communale populaire concernés peuvent "lorsque d'impérieuses nécessités économiques et sociales l'exigent" déférer après consultation de l'employeur et des représentants des travailleurs le conflit collectif du travail devant la commission nationale d'arbitrage.
La commission souhaite à nouveau rappeler que l'arbitrage obligatoire ne devrait pouvoir intervenir qu'à la demande des deux parties et/ou que l'imposition de l'arbitrage pour mettre fin à une grève ne devrait intervenir qu'en cas de grève dans les secteurs essentiels au sens strict du terme, à savoir ceux dont l'interruption risque de mettre en danger la vie, la santé ou la sécurité de la personne, dans tout ou partie de la population, ou en cas de grève dont l'étendue et la durée risquent de provoquer une crise nationale aiguë. Elle prie en conséquence le gouvernement de modifier sa législation dans le sens indiqué ci-dessus pour la rendre plus conforme aux principes de la liberté syndicale.
La commission prie le gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport les mesures prises ou envisagées pour mettre sa législation en conformité avec les exigences de la convention.
La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement. La commission rappelle que ses commentaires antérieurs portaient sur les articles 1, 3, 4 et 5 du décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992 relatif à la lutte contre la subversion ainsi que sur les articles 43 et 48 de la loi no 90-02-90 portant sur l'arbitrage obligatoire.
La commission note en premier lieu que le gouvernement réitère la réponse fournie dans le cadre de son précédent rapport, à savoir que le décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992 n'a aucune relation avec le monde professionnel et ne comporte aucun risque d'atteinte des organisations syndicales qui se conforment aux textes législatifs et réglementaires régissant le droit syndical d'organiser leurs activités et de réaliser leurs programmes d'action. La commission note également que 410 grèves touchant plus de 130 000 travailleurs ont été enregistrées durant l'année 1995. Néanmoins, la commission prie à nouveau le gouvernement de bien vouloir fournir, dans son prochain rapport, des informations sur l'application dans la pratique de l'article premier, lu conjointement avec les articles 3, 4 et 5 du décret législatif no 92-03, puisque cette disposition permet d'infliger une peine de réclusion à perpétuité pour toute action ayant pour objet "de faire obstacle au fonctionnement des établissements concourant au service public" ou "d'entraver la circulation ou la liberté sur les voies et places publiques". La commission prie le gouvernement de lui communiquer le texte de toute décision de justice rendue à cet égard. Elle lui demande en outre de garantir et de prendre des mesures pour que ces dispositions ne puissent s'appliquer aux activités légitimes des organisations syndicales.
Tout en notant avec intérêt que, selon le gouvernement, il n'a jamais été fait usage de recours à la Commission d'arbitrage pour faire cesser un conflit, la commission rappelle toutefois que le pouvoir conféré au ministre ou à l'autorité compétente par l'article 48 de la loi de déférer un conflit collectif à la Commission d'arbitrage ne devrait pouvoir intervenir qu'à la demande des deux parties et/ou que l'imposition de l'arbitrage pour mettre fin à une grève ne devrait intervenir qu'en cas de grève dans les secteurs essentiels au sens strict du terme ou de grève dont l'étendue et la durée risquent de provoquer une crise nationale aiguë. Elle prie en conséquence le gouvernement de modifier sa législation pour la rendre conforme aux principes de la liberté syndicale.
La commission note que le rapport n'a pas été reçu. Elle espère qu'un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu'il contiendra des informations complètes sur les points soulevés dans sa précédente demande directe:
La commission note que, selon le gouvernement, le décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992 relatif à la lutte contre la subversion n'a aucune relation avec le monde professionnel, les organisations syndicales légalement constituées exerçant leurs activités sans aucune restriction de quelque nature que ce soit à l'exception de celles prévues dans les textes régissant les droits syndicaux et qu'au cours de l'année 1994 un grand nombre de grèves ont été enregistrées, y compris dans le secteur économique public. Tout en prenant note de ces informations, la commission relève néanmoins que certaines des dispositions du décret législatif no 92-03 comportent un risque d'atteinte aux droits des organisations des travailleurs d'organiser leurs activités et de formuler leur programme d'action pour la défense des intérêts économiques, sociaux et professionnels de leurs membres. La commission prie le gouvernement de bien vouloir fournir, dans son prochain rapport, des informations sur l'application dans la pratique de l'article premier du décret législatif no 92-03 qui qualifie d'actes subversifs ou terroristes les infractions visant notamment la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet: 1) de faire obstacle au fonctionnement des établissements concourant au service public; ou 2) d'entraver la circulation ou la liberté de mouvement sur les voies et places publiques, ces infractions étant passibles de très lourdes sanctions pouvant aller jusqu'à l'emprisonnement à perpétuité. Elle prie le gouvernement de communiquer des copies de toutes décisions judiciaires rendues à cet égard.
Par ailleurs, la commission avait relevé que l'article 43 de la loi no 90-02-90 dispose que la grève est interdite, non seulement dans les services essentiels dont l'interruption peut mettre en danger la vie, la santé ou la sécurité des citoyens, ce que la commission a toujours considéré comme admissible, mais aussi lorsque la grève est susceptible d'entraîner par ses effets une crise économique grave. De plus, l'article 48 de la loi confère au ministre, ou à l'autorité compétente, en cas de persistance de la grève et après échec de la médiation, le pouvoir de déférer, après consultation de l'employeur et des représentants des travailleurs, un conflit collectif à la commission d'arbitrage.
La commission rappelle que le recours à l'arbitrage pour faire cesser un conflit collectif ne devrait pouvoir intervenir qu'à la demande des deux parties, et non seulement après consultation des parties, et que l'imposition de l'arbitrage pour mettre fin à une grève ne devrait intervenir qu'en cas de grève dans les services essentiels au sens strict du terme ou de grève dont l'étendue et la durée risquent de provoquer une crise nationale aiguë. Notant que le gouvernement fournit dans son rapport des informations sur le nombre très élevé de grèves qui ont eu lieu, elle prie le gouvernement de continuer à lui fournir des informations sur l'application dans la pratique de ces dispositions.
La commission note que le rapport du gouvernement n'a pas été reçu. Elle espère qu'un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu'il contiendra des informations complètes sur les points soulevés dans sa précédente demande directe, qui était conçue dans les termes suivants:
La commission a pris connaissance du décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992 relatif à la lutte contre la subversion. Tout en notant que la très grande majorité des dispositions contenues dans ce décret n'entrent pas dans le champ de la protection prévue par la convention, la commission relève que certaines de ces dispositions comportent un risque d'atteinte aux droits des organisations de travailleurs d'organiser leurs activités et de formuler leur programme d'action pour la défense des intérêts économiques, sociaux et professionnels de leurs membres, notamment par le recours à la grève. Il en est en particulier ainsi des dispositions de l'article premier qui qualifient d'actes subversifs ou terroristes les infractions visant notamment la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet: 1) de faire obstacle au fonctionnement des établissements concourant au service public; ou 2) d'entraver la circulation ou la liberté de mouvement sur les voies et places publiques, passibles de très lourdes sanctions pouvant aller jusqu'à la réclusion à perpétuité (art. 3, 4 et 5).
La commission attire l'attention du gouvernement sur l'importance qu'elle attache à la teneur du paragraphe 2 de l'article 8 de la convention selon laquelle la législation nationale ne devra porter atteinte ni être appliquée de manière à porter atteinte aux garanties prévues par la convention.
Elle estime en outre que, si des peines d'emprisonnement sont imposées, elles devraient être justifiées par la gravité des infractions commises; en tout état de cause, un droit d'appel devrait exister à cet égard (voir Etude d'ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 177).
La commission prie le gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport les mesures prises ou envisagées pour assurer que les dispositions susmentionnées ne soient pas appliquées d'une manière qui porterait atteinte aux garanties prévues par la convention.
La commission rappelle, en outre, l'importance qu'elle attache au principe selon lequel les travailleurs et leurs organisations doivent pouvoir recourir à la grève pour la défense de leurs intérêts économiques, sociaux et professionnels. Elle souligne qu'en cas de limitation, voire d'interdiction, du droit de recourir à la grève lorsque celle-ci est "susceptible d'entraîner, par ses effets, une crise économique grave" (art. 43 de la loi no 90-02 du 6 février 1990) ou "lorsque d'impérieuses nécessités économiques et sociales l'exigent" (art. 48) les travailleurs ainsi dépourvus d'un moyen essentiel de faire valoir leurs revendications collectives devraient bénéficier de garanties compensatoires de règlement des différends collectifs aux différentes étapes desquelles les travailleurs, ainsi que les employeurs, devraient pouvoir participer. Par ailleurs, les travailleurs ne devraient pas subir de peines d'emprisonnement dès lors que la grève conserve son caractère pacifique. La commission prie le gouvernement de communiquer dans son prochain rapport des informations sur l'application dans la pratique de ces dispositions pendant la période couverte par le rapport.
En réponse à sa demande directe précédente, la commission note que le gouvernement indique dans son rapport que le décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992 relatif à la lutte contre la subversion n'a aucune relation avec le monde professionnel, les organisations syndicales légalement constituées exerçant leurs activités sans aucune restriction de quelque nature que ce soit à l'exception de celles prévues dans les textes régissant les droits syndicaux et qu'au cours de l'année 1994 un grand nombre de grèves ont été enregistrées, y compris dans le secteur économique public. Tout en prenant note de ces informations, la commission relève néanmoins que certaines des dispositions du décret législatif no 92-03 comportent un risque d'atteinte aux droits des organisations des travailleurs d'organiser leurs activités et de formuler leur programme d'action pour la défense des intérêts économiques, sociaux et professionnels de leurs membres. La commission prie le gouvernement de bien vouloir fournir, dans son prochain rapport, des informations sur l'application dans la pratique de l'article premier du décret législatif no 92-03 qui qualifie d'actes subversifs ou terroristes les infractions visant notamment la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet: 1) de faire obstacle au fonctionnement des établissements concourant au service public; ou 2) d'entraver la circulation ou la liberté de mouvement sur les voies et places publiques, ces infractions étant passibles de très lourdes sanctions pouvant aller jusqu'à l'emprisonnement à perpétuité. Elle prie le gouvernement de communiquer des copies de toutes décisions judiciaires rendues à cet égard.
La commission prend bonne note du rapport du gouvernement qui contient des réponses aux points qu'elle avait soulevés dans sa demande directe antérieure.
Toutefois, la commission a pris connaissance du décret législatif no 92-03 du 30 septembre 1992 relatif à la lutte contre la subversion. Tout en notant que la très grande majorité des dispositions contenues dans ce décret n'entrent pas dans le champ de la protection prévue par la convention, la commission relève que certaines de ces dispositions comportent un risque d'atteinte aux droits des organisations de travailleurs d'organiser leurs activités et de formuler leur programme d'action pour la défense des intérêts économiques, sociaux et professionnels de leurs membres, notamment par le recours à la grève. Il en est en particulier ainsi des dispositions de l'article premier qui qualifient d'actes subversifs ou terroristes les infractions visant notamment la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet: 1) de faire obstacle au fonctionnement des établissements concourant au service public ou 2) d'entraver la circulation ou la liberté de mouvement sur les voies et places publiques, passibles de très lourdes sanctions pouvant aller jusqu'à la réclusion à perpétuité (art. 3, 4 et 5).
La commission rappelle en outre l'importance qu'elle attache au principe selon lequel les travailleurs et leurs organisations doivent pouvoir recourir à la grève pour la défense de leurs intérêts économiques, sociaux et professionnels. Elle souligne qu'en cas de limitation, voire d'interdiction, du droit de recourir à la grève lorsque celle-ci est "susceptible d'entraîner, par ses effets, une crise économique grave" (art. 43 de la loi no 90-02 du 6 février 1990) ou "lorsque d'impérieuses nécessités économiques et sociales l'exigent" (art. 48), les travailleurs ainsi dépourvus d'un moyen essentiel de faire valoir leurs revendications collectives devraient bénéficier de garanties compensatoires de règlement des différends collectifs aux différentes étapes desquelles les travailleurs, ainsi que les employeurs, devraient pouvoir participer. Par ailleurs, les travailleurs ne devraient pas subir de peines d'emprisonnement dès lors que la grève conserve son caractère pacifique. La commission prie le gouvernement de communiquer dans son prochain rapport des informations sur l'application dans la pratique de ces dispositions pendant la période couverte par le rapport.
La commission note que le rapport n'a pas été reçu. Elle espère qu'un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu'il contiendra des informations complètes sur les points soulevés dans sa précédente demande directe, qui était conçue dans les termes suivants:
Faisant suite à l'adoption de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 relative aux modalités d'exercice du droit syndical et de la loi no 90-02 du 6 février 1990 relative à la prévention et au règlement des conflits collectifs de travail et à l'exercice du droit de grève, la commission désire attirer l'attention du gouvernement sur les points suivants:
Article 2 de la convention. Se référant à la loi no 90-14 du 2 juin 1990, la commission prie le gouvernement d'indiquer si les travailleurs étrangers jouissent du droit de se syndiquer.
Article 3. La commission saurait gré au gouvernement de fournir des informations sur les circonstances dans lesquelles il aurait été fait usage, pour la période couverte par son prochain rapport, des dispositions suivantes de la loi no 90-02 du 6 février 1990: l'article 41 relatif à la réquisition; l'article 48 concernant le recours à l'arbitrage obligatoire dans certaines conditions et l'article 55 relatif aux sanctions pénales.
Article 4. Se référant à l'article 27 de la loi no 90-14 du 2 juin 1990, la commission prie le gouvernement d'indiquer si la suspension des organisations syndicales peut être prononcée avant que la juridiction compétente n'ait statué sur le fond de la requête déposée par les autorités publiques et, dans l'affirmative, quelle est l'autorité compétente pour prononcer cette suspension?
Articles 5 et 6. Se référant à l'article 26 2) de la loi no 90-14 du 2 juin 1990, la commission note que les fonds en provenance de l'étranger ne sont recevables qu'après autorisation des autorités. La commission attire l'attention du gouvernement sur le fait que l'affiliation internationale implique pour les organisations syndicales nationales le droit de bénéficier des services et des avantages provenant de leur adhésion. La commission saurait gré au gouvernement de fournir des informations sur tous les cas pour lesquels les autorités n'auraient pas donné leur accord en application de cette disposition de la loi et s'il est possible de saisir les tribunaux en appel d'une telle décision.
Se référant à ses commentaires précédents, la commission note avec satisfaction l'adoption de la loi no 90-14 du 2 juin 1990 relative aux modalités d'exercice du droit syndical et de la loi no 90-11 du 21 avril 1990 relative aux relations de travail, lois qui mettent fin au système d'unicité syndicale et introduisent la possibilité du pluralisme syndical. Depuis l'adoption de ces textes, le gouvernement indique, dans son rapport, que de nombreuses organisations syndicales autonomes de travailleurs et d'employeurs ont été créées.
La commission note également l'adoption de la loi no 90-02 du 6 février 1990 relative à la prévention et au règlement des conflits collectifs de travail et à l'exercice du droit de grève qui autorise le recours à la grève tant dans le secteur privé que public.
La commission adresse directement au gouvernement une demande d'information concernant d'autres points.
La commission a pris connaissance de la nouvelle Constitution algérienne, et note que l'article 54, comme l'ancien article 61, consacre le droit de grève dans le cadre de la loi, mais qu'il dispose en outre que la législation peut en interdire ou en limiter l'exercice dans les domaines de la défense nationale et de la sécurité ou pour tous services ou activités publics d'intérêt vital pour la communauté.
La question de l'exercice du droit de grève fait l'objet de commentaires depuis plusieurs années portant sur:
- la procédure de règlement des conflits établie par la loi no 82-05 du 13 février 1982 qui conduit à l'arbitrage obligatoire, ce qui a pour effet de restreindre, sinon d'interdire, le droit des travailleurs de recourir à la grève comme moyen de défense de leurs intérêts; et
- l'article 209 de la loi no 78-12 qui constitue une menace à l'exercice de ce droit dans la mesure où il prévoit que seront punies toutes formes d'entraves à la liberté du travail, à la production ainsi que l'occupation des locaux de travail et l'immobilisation des moyens de production, même si le gouvernement a signalé à plusieurs reprises qu'en pratique il n'était pas utilisé.
La commission note que de profondes réformes sont en cours. Elle veut croire que les mesures qui seront prises en application des nouvelles dispositions constitutionnelles tiendront compte de ses commentaires selon lesquels le droit de recours à la grève ne devrait pas être limité, voire interdit, par l'application de dispositions indirectes, tels le recours à l'arbitrage obligatoire ou la menace de sanctions lors de son exercice légal, comme c'est le cas actuellement. De l'avis de la commission, le droit de grève ne peut être limité, voire interdit, qu'à l'égard des fonctionnaires agissant en tant qu'organe de la puissance publique, ou dans les services essentiels au sens strict du terme, à savoir ceux dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne, ou en cas de crise nationale aiguë, pour une période limitée.
La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées afin d'assurer l'application de la convention sur ce point.
La commission saurait gré par ailleurs au gouvernement de bien vouloir transmettre avec son prochain rapport la copie des statuts de l'UGTA.
La commission a pris connaissance du décret présidentiel no 89-18 du 28 février 1989 relatif à la publication au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire de la révision constitutionnelle adoptée par référendum du 23 février 1989.
La commission note avec intérêt les changements constitutionnels qui, comme le souligne le gouvernement dans son dernier rapport, consacrent la séparation du Parti et de l'Etat, ouvrent la voie au pluralisme politique en permettant la création d'associations à caractère politique, affranchissent les organisations sociales et professionnelles de toute tutelle organique imposée sur leur action et sur les modes de désignation de leurs dirigeants en écartant toute référence au Parti et à la Charte nationale.
La commission note cependant que, si la nouvelle Constitution introduit de profondes réformes sur le plan politique, la situation au regard du droit syndical n'est toujours pas conforme aux exigences de la convention.
Depuis de nombreuses années, les commentaires de la commission portent sur le système d'unicité syndicale institué par la législation au profit de l'Union générale des travailleurs algériens (UGTA), centrale unique nommément désignée, à qui revient le droit exclusif de mettre en place la structure syndicale à l'échelon national (ordonnance no 71-75 du 16 novembre 1971, ordonnance no 75-31 du 29 avril 1975 et loi no 78-12 du 5 août 1978). La nouvelle loi no 88-28 du 19 juillet 1988 relative aux modalités d'exercice du droit syndical reprend sans les abroger les anciennes dispositions mentionnées par la commission et ne modifie pas la situation à cet égard. Si le droit syndical est inscrit dans la nouvelle Constitution au chapitre des droits et libertés des citoyens, ce droit ne peut s'exercer qu'au profit de l'UGTA (art. 9 et 10 de la loi no 88-28). Par ailleurs, la création et l'organisation, la suspension et la dissolution de structures syndicales relèvent exclusivement de l'UGTA (art. 7 et 8 de la loi no 88-28). De plus, l'article 6 de la loi no 87-15 du 21 juillet 1987 relative aux associations permet à l'autorité administrative de dissoudre une association contrairement aux articles 2 et 4 de la convention. Enfin, dans le secteur privé, la négociation collective est de la compétence des syndicats mis en place par l'UGTA (art. 29 et 31 de la loi no 88-28), et le droit de recourir à la grève ne peut être exercé, sous peine de sanctions, sans l'autorisation des instances syndicales (art. 30 de la loi no 88-28; art. 15 et 21 de l'ordonnance no 71-75 du 16 novembre 1975).
L'UGTA conserve également son rôle d'encadrement des travailleurs sur les plans culturel, social et politique (art. 4 de la loi no 88-28).
En conséquence, la commission rappelle à nouveau au gouvernement qu'un système de monopole syndical lorsqu'il est institué par la législation va à l'encontre de l'article 2 de la convention dont l'objectif est de permettre aux travailleurs de constituer des organisations de leur choix et de l'article 8 selon lequel la législation nationale ne doit pas porter atteinte ni être appliquée de manière à porter atteinte aux garanties prévues par la convention. Le principe de l'article 2 n'est pas destiné à prendre position en faveur soit de la thèse de l'unité, soit de celle du pluralisme syndical. Cependant, la convention implique au moins que le pluralisme soit possible dans tous les cas. Par ailleurs, aux termes de l'article 4 de la convention, les organisations de travailleurs et d'employeurs ne doivent pas être sujettes à dissolution ou à suspension par voie administrative.
Notant la déclaration du gouvernement dans son dernier rapport selon laquelle les remarques très pertinentes soulevées par la commission d'experts sur les dispositions législatives et réglementaires donnant effet à la convention se trouvent actuellement au centre des débats instaurés au cours des réformes constitutionnelles et politiques en cours, la commission veut croire que les réformes entreprises se poursuivront afin que soient abrogées les restrictions imposées par la législation au droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix prévu à l'article 2 de la convention et les dispositions législatives contraires à l'article 4. La commission demande au gouvernement de garantir à tous les travailleurs, s'ils le souhaitent, le droit de créer les syndicats de leur choix, en dehors de la structure syndicale établie, sans risquer d'être dissous par l'UGTA ou par une décision administrative, et de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour mettre sa législation en conformité avec cette convention ratifiée depuis de très nombreuses années.