National Legislation on Labour and Social Rights
Global database on occupational safety and health legislation
Employment protection legislation database
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Un représentant gouvernemental a assuré la commission de la pleine et entière coopération de la délégation haïtienne, soulignant son appréciation des travaux des organes de contrôle de l’OIT qui constitue une source d’inspiration et de référence pour les Etats en matière de normes du travail. Le gouvernement a pris note des observations de la commission d’experts sur l’application par Haïti des conventions ratifiées en matière de temps de travail. Se référant au contexte national, l’orateur a rappelé que le pays avait connu dans les dernières années de nombreuses catastrophes naturelles ainsi que des crises politiques qui ont eu un impact sur le fonctionnement régulier des institutions chargées d’élaborer et de mettre en œuvre la politique sociale de l’Etat, et notamment sur le ministère des Affaires sociales et du Travail (MAST). Sur le plan économique, la situation est précaire, avec un taux de chômage officiel de près de 35 pour cent de la population active et une croissance économique en déclin. Le gouvernement au pouvoir depuis mai 2017 a pour objectifs particuliers de créer massivement des emplois pour lutter contre le chômage, relancer l’économie nationale, renforcer le dialogue social, poursuivre les objectifs de développement durable et promouvoir les objectifs de justice sociale tels que prévus par la Constitution de l’OIT. A cet effet, l’accent a été mis sur le secteur de la sous-traitance, un secteur vital pour l’économie nationale. C’est dans cette dynamique de favoriser rapidement la création massive d’emplois qu’en 2017 le Parlement haïtien a adopté la loi portant organisation et réglementation du travail sur la durée de vingt-quatre heures, répartie en trois tranches de huit heures. Par cet instrument, l’Etat haïtien a voulu adapter la situation du travail aux réalités contemporaines. Tout en établissant le principe de 8 heures de travail par jour et 48 heures par semaine, la loi permet qu’en cas de besoin, par accord entre l’employeur et l’employé et en conformité avec les normes nationales et internationales du travail, la tranche normale de 8 heures de travail par jour soit dépassée sans que le total des heures fournies ne dépasse 48 heures par semaine. Le nombre d’heures de travail par jour de 8 heures reste la clé de voûte du régime haïtien en matière de temps de travail. Le régime des trois tranches horaires mises en place dans l’ensemble des secteurs n’a été conçu que dans la finalité de dynamiser l’économie nationale et de renforcer la production grâce à la disponibilité des machines, ce qui pourrait créer un plus grand nombre de postes de travail et d’emplois au bénéfice de la population haïtienne tout entière. La loi prend, en principe, en compte la protection, la santé et la sécurité des travailleurs dans l’esprit des conventions ratifiées par Haïti. En faisant injonction aux employeurs de veiller à la bonne santé et en assurant une récupération adéquate des travailleurs et en exigeant que les entreprises mettent à leur disposition des services sanitaires et de restauration conformes aux normes, le législateur haïtien a mis en place des garde-fous qui sont appelés à être complétés par des mesures règlementaires, en vue de mieux protéger et sécuriser les travailleurs contre toute forme d’exploitation abusive. Ayant pris bonne note des observations de la commission d’experts et des partenaires sociaux, le gouvernement est disposé à poursuivre les discussions dans un cadre tripartite et avec l’assistance du BIT en vue de trouver des formules consensuelles adaptées à la réalité haïtienne en ce qui concerne la durée du temps de travail. S’agissant de l’inspection du travail, le gouvernement reconnaît l’importance d’un corps d’inspecteurs compétent pour assurer le respect effectif des dispositions du Code du travail. A cet effet, des efforts ont été déployés et la coopération avec le BIT a permis de renforcer les capacités du service concerné qui compte actuellement sept inspecteurs stables et environ une quarantaine de personnes ressources qui font office, occasionnellement, d’inspecteurs ou de conciliateurs. Un projet de «centre d’appel» visant à faciliter la réception d’éventuelles plaintes de la part de personnes qui auraient pu être victimes dans leurs milieux de travail a été retardé à cause d’une série d’exigences pratiques liées à la confidentialité et à la fiabilité des services fournis par les opérateurs téléphoniques sur place. Plusieurs programmes coordonnés par le BIT interviennent utilement dans le pays, tels que Better Work ou le Programme des investissements à haute intensité de main-d’œuvre (HIMO). En dépit des efforts déployés par le gouvernement, le pays reste un pays fragile où les projets de coopération doivent être élaborés et exécutés de manière à créer des effets durables sur la population. Ils doivent viser le renforcement du dialogue social, la création rapide d’emplois décents durables susceptibles de générer des revenus au sein des populations les plus déshéritées. Dans cette perspective, le gouvernement plaide pour un renforcement de la coopération avec l’OIT dans des questions aussi fondamentales que la protection sociale, la lutte contre le travail des enfants, la formation professionnelle et d’autres thématiques pertinentes qui font partie du champ d’intervention de l’Organisation. En ce qui concerne le dialogue social, le gouvernement considère qu’il s’agit d’un élément fondamental pour la poursuite des objectifs de paix et de croissance économique. Encourager les partenaires sociaux à résoudre leurs conflits par des mécanismes pacifiques demeure une priorité du gouvernement qui a accueilli avec satisfaction la conclusion d’un accord en mars 2018 entre les six principales organisations de travailleurs du pays et le secteur patronal. Par ailleurs, le gouvernement a pris note du nombre important de rapports sur l’application des conventions et recommandations qui sont dus par Haïti. Des dispositions sont prises au niveau de l’instance concernée en vue de s’acquitter de ces obligations internationales dans le meilleur délai. Une assistance technique du BIT sur cette question spécifique sera sollicitée. Enfin, l’orateur a souligné qu’il n’existe aucune volonté du gouvernement de violer les conventions de l’OIT auxquelles Haïti est partie, notamment les dispositions relatives au temps de travail. Les difficultés qui existent autour de la loi de 2017 seront abordées par le gouvernement à travers des discussions tripartites. L’accord intervenu entre les syndicats et le patronat en mars 2018 constitue une base solide pour lancer de telles initiatives.
Les membres employeurs ont d’abord noté qu’il serait utile que la commission d’experts fournisse une indication claire sur les raisons justifiant l’usage de doubles notes de bas de page. Ils considèrent que ce cas, relatif à l’adoption de la loi portant sur l’organisation et la réglementation du travail sur la durée de 24 heures, répartie en trois tranches de huit heures (loi sur le temps de travail), était opportun puisqu’il se tenait deux jours après l’étude d’ensemble de 2018 sur les instruments relatifs au temps de travail. Le temps de travail est une matière sujette à des changements fréquents et nécessite d’être adapté aux nouvelles réalités. Les avancées de la technologie et des communications modifient la conception traditionnelle du temps et de l’espace, et l’organisation du temps du travail revêt une importance fondamentale pour la productivité, la performance, la compétitivité, la durabilité et la capacité des entreprises à créer des emplois. En ce qui concerne les conventions nos 1 et 30 sur la durée du travail, les membres employeurs se sont référés à l’étude d’ensemble de 2005 sur la durée du travail selon laquelle «les conventions nos 1 et 30 ne reflètent pas pleinement la réalité actuelle en la matière. En fait, certains aspects de ces conventions sont clairement dépassés. (…) D’une manière générale, de plus en plus de pays considèrent que les normes prescrites par ces deux instruments sont d’une rigidité excessive. Le système de durée «fixe» du travail, dont ces conventions font la pierre angulaire de la réglementation du temps de travail, n’est pas compatible avec la plus grande flexibilité demandée de nos jours.» Les conventions nos 14 et 106 sur le repos hebdomadaire sont considérées comme à jour par le Conseil d’administration du BIT et sont plus largement ratifiées. C’est particulièrement le cas de la convention no 14, qui est un instrument relativement souple dans la mesure où il permet des exceptions totales ou partielles au repos hebdomadaire normal quasi inconditionnelles, ainsi que des exceptions à l’indemnisation lorsqu’il n’est pas possible d’accorder les jours de repos hebdomadaire. En revanche, la convention no 106 autorise des exceptions au repos hebdomadaire dans des conditions beaucoup plus strictes et ne prévoit pas d’exceptions pour ce qui est de l’octroi d’une indemnisation. Puisque que le décret d’application de la loi sur le temps de travail n’est pas encore publié, les articles du Code du travail concernant le temps de travail continuent de s’appliquer dans le pays. Les membres employeurs encouragent le gouvernement à veiller à ce que la réglementation du temps de travail soit débattue dans le cadre de la réforme globale du Code du travail en vue d’assurer la conformité avec les conventions ratifiées. Ils estiment que, au cas où les réalités nouvelles et émergentes du marché du travail en Haïti exigent une modification de la législation allant dans un sens contraire aux dispositions des conventions en question, le gouvernement doit les dénoncer afin d’éviter le non-respect de ses obligations internationales. Enfin, ils notent avec une grande inquiétude que, pour la cinquième année consécutive, les rapports dus sur toutes les conventions ratifiées n’ont pas été reçus. Ils prient instamment le gouvernement de solliciter l’assistance technique du BIT avant le 1er septembre 2018, en vue de soumettre sans délai les rapports dus à la commission d’experts, y compris sur les conventions nos 1, 14, 30 et 106.
Les membres travailleurs ont rappelé que les questions relatives à la durée du travail sont au cœur de la relation de travail et se retrouvent dans le traité fondateur de l’OIT et la Déclaration de Philadelphie qui affirment que le travail n’est pas une marchandise. Fixer des limites décentes au temps de travail préserve la dignité des travailleurs et leur permet de donner un sens à leur activité professionnelle. La question du temps de travail présente de nombreux enjeux majeurs pour les travailleurs, tels que le pouvoir d’achat, la conciliation entre la vie professionnelle et la vie privée, la sécurité, la santé et le bien-être. Il est fondamental qu’une réglementation claire et stricte du temps de travail soit mise en place et effectivement appliquée pour que le travail décent puisse être garanti. Les partenaires tripartites au sein de l’OIT ont toujours été convaincus de la nécessité de réglementer le temps de travail. C’est pourquoi l’Organisation s’est dotée de nombreux instruments qui fixent certaines limites à la durée du travail. La commission doit veiller à ce que les Etats Membres mettent tout en œuvre en vue de respecter ces normes. Dans le cas examiné, le gouvernement s’est affranchi de certaines limites fixées par les normes internationales du travail relatives au temps de travail. Les différentes mesures prises ont pour effet d’accroître la durée effective du travail et s’éloignent de la recommandation no 116. En Haïti, une grande proportion de la population est demandeuse d’emploi et l’introduction de réformes qui visent à allonger la durée du travail des travailleurs déjà actifs ne favorisera pas une répartition efficace du travail disponible. La récente réforme législative a abrogé les dispositions qui réglementaient les dérogations au principe de la journée de travail de huit heures et les dérogations à la durée normale du travail, et qui affirmaient le principe du repos hebdomadaire de vingt-quatre heures consécutives devant être accordé de préférence le dimanche et en même temps à tout le personnel d’un même établissement. Il résulte de ces différentes abrogations que la législation haïtienne n’est plus en conformité avec les conventions ratifiées. La nouvelle législation prévoit également qu’employeurs et travailleurs peuvent déroger au niveau individuel au principe de la durée du travail journalière de huit heures, sans préciser une durée journalière maximale, et que les travailleurs négocient individuellement leur horaire de travail. La relation de travail étant fondamentalement asymétrique, il est essentiel que les normes relatives au temps de travail soient négociées collectivement et non individuellement. En outre, l’absence d’encadrement de limitation des dérogations possibles à la durée normale du travail laisse penser que les heures supplémentaires peuvent être effectuées sans aucun motif et sans limites, contrairement aux dispositions des conventions nos 1 et 30. Cela pourrait compromettre l’objectif de la recommandation no 116 d’atteindre une norme sociale de 40 heures de travail par semaine. La nouvelle législation a encore pour conséquence que les organisations syndicales ne doivent plus être consultées et que la direction du travail du ministère des Affaires sociales et du Travail ne doit plus donner son autorisation sur un certain nombre de questions ayant trait aux dérogations possibles en matière de durée du travail. Cela contrevient aux dispositions des conventions nos 1 et 30. Se référant au manque de moyens des services d’inspection, l’oratrice a rappelé que les conventions nos 30 et 106 prévoient que les Etats doivent adopter des mesures appropriées pour assurer la bonne application des règles relatives au temps de travail par une inspection adéquate. Haïti a également ratifié la convention (no 81) sur l’inspection du travail, 1947. Le gouvernement doit donc veiller à ce que les inspections aient des effectifs suffisants et à ce que les inspecteurs reçoivent une formation adéquate en matière de temps de travail et bénéficient de moyens financiers et matériels suffisants. Le développement de ressources statistiques est également essentiel en vue de pouvoir cibler les secteurs sensibles aux abus en matière de temps de travail. Notant qu’une grande majorité de l’activité en Haïti relève de l’économie informelle où les travailleurs sont particulièrement exposés aux abus, les membres travailleurs ont souligné qu’il convient de veiller à ce que les services d’inspection aient compétence pour contrôler le respect de la législation sur la durée du travail dans le secteur informel. Bien qu’ils bénéficient généralement de relations de travail plus formelles, les travailleurs des zones franches d’exportation sont également soumis à de nombreux abus. Ces zones représentent un important pourvoyeur d’emplois dans le pays et il convient d’y assurer le respect de la réglementation sur la durée du travail. Il est regrettable que la réforme du temps de travail soit intervenue sans aucune consultation des organisations syndicales représentatives et en dehors du processus de réforme globale du Code du travail en cours avec l’assistance du BIT, que le gouvernement s’était engagé à finaliser pour le 31 juillet 2015 dans le cadre du programme par pays de promotion du travail décent, couvrant la période 2015-2020. La nouvelle législation sur le temps de travail a été votée à la surprise générale lors d’une session parlementaire de nuit. Cette réforme ne tient par ailleurs aucunement compte de l’accord qui avait été obtenu dans le cadre de la réforme globale du Code du travail, entre-temps paralysée. Il est donc nécessaire de rappeler que le dialogue social et la négociation collective ont un rôle fondamental pour aboutir à des règles relatives au temps de travail qui sont portées par les partenaires sociaux et à travers eux une large part de la société. La réforme, passée en force par le gouvernement et approuvée unilatéralement par une frange des organisations d’employeurs, ne bénéficie pas du soutien des travailleurs. Les tentatives de passer sous silence les oppositions mettent en péril l’ordre démocratique haïtien et le gouvernement est invité à prendre l’engagement fort de ratifier la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976. Par ailleurs, les membres travailleurs partagent la profonde préoccupation de la commission d’experts quant à la non-communication des rapports par le gouvernement qui doit veiller à respecter ses obligations constitutionnelles. En outre, il est regrettable que, du fait du retard pris dans la constitution de la délégation haïtienne, le délégué travailleur titulaire n’ait pas pu prendre part à l’examen du cas. Il s’agit d’une négligence de la part du gouvernement vis-à-vis de ses obligations à l’égard de l’OIT et une plainte a été introduite auprès de la Commission de vérification des pouvoirs. Les membres travailleurs condamnent les menaces et pressions que subissent les syndicalistes en Haïti. Le gouvernement doit prendre toutes les mesures afin d’assurer un environnement propice à l’expression libre des opinions syndicales et la sécurité de tous les militants syndicaux pour que ceux-ci puissent exercer leur activité syndicale en toute liberté et sans crainte de représailles et afin que l’ordre démocratique haïtien puisse être sauvegardé. Les membres travailleurs regrettent que les membres employeurs aient encouragé le gouvernement à dénoncer les conventions relatives au temps de travail ratifiées et aient remis en question la pertinence des normes internationales du travail relatives au temps de travail. L’examen d’un cas individuel par la commission ne peut avoir pour objet d’évaluer la pertinence des normes examinées et doit se tenir à évaluer leur correcte application en droit comme en pratique dans le pays concerné. Les membres travailleurs rappellent les conclusions de la Réunion tripartite d’experts de l’OIT sur l’aménagement du temps de travail (octobre 2011) qui indiquent clairement que les normes actuelles de l’OIT relatives au temps de travail sont toujours d’actualité et qu’elles doivent être encouragées dans le but de faciliter le travail décent.
Le membre employeur du Malawi, s’exprimant au nom de la membre employeuse d’Haïti en son absence, a noté que les dispositions de la nouvelle loi sur le temps de travail n’étant pas aussi précises que les dispositions abrogées du Code du travail, les entreprises sont tenues de respecter les dispositions des conventions nos 1, 14, 30 et 106 ratifiées par Haïti car ces dispositions sont juridiquement contraignantes et priment sur les lois nationales en vertu de l’article 276-2 de la Constitution haïtienne. De plus, le décret d’application de la loi sur le temps de travail n’ayant pas encore été publié, les articles du Code du travail sont toujours en vigueur en Haïti. Selon l’orateur, les conventions nos 1 et 30 sur la durée du travail ne reflètent pas pleinement les réalités modernes du temps de travail. Le faible taux de ratification de ces deux conventions est dû au besoin accru de flexibilité dans l’environnement du travail de nos jours. Les pays ont de plus en plus recours à des conventions collectives ou individuelles pour répondre à leurs besoins spécifiques en matière de temps de travail. L’orateur a indiqué que, en attendant la promulgation du nouveau Code du travail, les employeurs d’Haïti sont déterminés à poursuivre le dialogue tripartite en vue d’adopter le cadre opérationnel nécessaire pour assurer la conformité avec les instruments internationaux ratifiés par Haïti. Il a saisi l’occasion pour remercier le BIT de l’assistance technique continue fournie à Haïti et pour son rôle de facilitateur dans le dialogue tripartite mené pour reprendre les travaux sur la réforme du Code du travail.
Le membre travailleur d’Haïti a indiqué que la situation qui prévaut actuellement dans le monde du travail en Haïti est très préoccupante. Se référant spécialement au travail domestique et au secteur informel, l’orateur a dénoncé des conditions de travail injustes tant au regard de la durée du temps de travail qu’en matière de droit au congé ou au préavis en cas de licenciement. S’agissant de la situation des agents de sécurité et des travailleurs des entreprises de sous-traitance dans le secteur textile, il est à déplorer l’absence d’horaires de travail fixes et le refus du paiement des heures supplémentaires par les employeurs, et ce avec la complicité du gouvernement. L’orateur a appelé l’attention de la commission sur la violation flagrante des conventions nos 1, 14, 30 et 106, portant sur le temps de travail, ainsi que de la convention no 81 relative à l’inspection du travail. L’inspection du travail en Haïti manque de moyens et de capacités. Bien que le BIT ait contribué au renforcement des capacités d’un groupe d’inspecteurs, ceux-ci sont souvent empêchés d’agir en toute neutralité et font l’objet de nombreuses pressions. La nouvelle loi, adoptée sous l’impulsion des employeurs, montre le mépris du gouvernement envers ses engagements auprès de l’OIT. Elle permet aux employeurs de forcer les travailleurs et travailleuses à faire des heures supplémentaires, occasionnant des cas d’abus graves, tels que l’exercice de pressions psychologiques et l’émergence du travail forcé. Le gouvernement a décidé d’amender unilatéralement le Code du travail en abrogeant certains articles alors qu’il avait sollicité et obtenu une assistance technique du BIT dans le cadre de la réforme globale de ce code et que la finalisation de cette réforme était une priorité en termes de résultats à atteindre dans le cadre du programme par pays de promotion du travail décent. Les syndicats haïtiens exigent la reprise du processus de réforme du Code du travail qui doit respecter en matière de temps de travail l’esprit et la lettre des conventions nos 1, 14, 30 et 106. L’orateur espère que les engagements pris dans le cadre du récent accord signé sous les auspices du BIT seront respectés, et sollicite de l’OIT un suivi étroit et rigoureux de l’application par Haïti des conventions ratifiées relatives au temps de travail.
La membre gouvernementale de la Bulgarie, s’exprimant au nom de l’Union européenne (UE) et de ses Etats membres, ainsi que de l’Albanie, de la Bosnie-Herzégovine, du Monténégro, de la Serbie, de l’ex-République yougoslave de Macédoine et de la Norvège, a fait remarquer l’actualité de la discussion sur ce cas dans la foulée du débat sur l’étude d’ensemble concernant les instruments relatifs au temps de travail. Les heures de travail et les périodes de repos sont des éléments essentiels de la relation d’emploi et ont des conséquences pour les travailleurs comme pour les employeurs. Haïti est le bénéficiaire principal de l’aide au développement bilatérale de l’UE en Amérique latine et aux Caraïbes. L’oratrice a rappelé l’engagement pris par Haïti dans l’Accord de Cotonou – le cadre de coopération avec l’UE – de respecter la démocratie, l’état de droit et les principes des droits de l’homme. Il est très préoccupant que la nouvelle loi abroge la plupart des dispositions du Code du travail qui donnaient effet aux conventions ratifiées en matière de temps de travail et qu’elle ne donne pas effet aux importants thèmes couverts par ces conventions, y compris des points essentiels, comme le nombre maximum d’heures de travail par jour et le principe du repos hebdomadaire. En outre, les observations de la Confédération des travailleurs et travailleuses des secteurs public et privé (CTSP) à propos du non-respect dans la pratique des dispositions du Code du travail relatives à la durée du travail et au repos hebdomadaire et du manque de moyens des services de l’inspection du travail pour combattre effectivement les violations, suscitent également des inquiétudes. Le gouvernement est prié d’achever sa réforme du Code du travail en consultation avec les partenaires sociaux et de veiller à ce qu’il soit pleinement conforme aux conventions de l’OIT. De plus, il est aussi invité à s’assurer que, dans la pratique, les travailleurs bénéficient de la protection prévue par les conventions relatives au temps de travail et à prendre les mesures nécessaires pour que des inspections du travail soient menées afin de garantir une telle protection. Le gouvernement est fortement encouragé à continuer de se prévaloir de l’assistance technique du BIT et à respecter ses obligations de faire rapport. L’UE et ses Etats membres continueront de soutenir Haïti dans ses efforts pour respecter les conventions de l’OIT.
Un observateur représentant la Confédération syndicale internationale (CSI) s’est référé au programme par pays de promotion du travail décent, signé par le gouvernement haïtien, les employeurs, les travailleurs et le BIT en 2015, et dont le premier résultat visait la reprise du processus de révision du Code du travail qui devait être finalisé le 31 juillet 2015. Au lieu de cela, la loi portant organisation et réglementation du travail sur la durée de vingt-quatre heures, répartie en trois tranches de huit heures a été adoptée en août 2017, loi qui viole les principes fondamentaux en matière de travail et met en péril la conformité de la législation nationale avec les normes internationales en la matière. Une réglementation stricte du temps de travail permet de garantir une vie décente, un équilibre dans la répartition du temps entre les espaces professionnels et privés, la préservation de la santé, l’absence de travail forcé et une rémunération en accord avec les efforts consentis. L’adoption de la nouvelle loi sur le temps de travail représente donc un recul considérable et un mépris du travail accompli dans le cadre de l’OIT et des engagements pris en termes de dialogue social et du tripartisme. Cette loi a des impacts considérables, notamment pour les travailleurs les plus vulnérables. La négociation du temps de travail sur une base individuelle et non collective ouvre les portes, dans la pratique, au renforcement du pouvoir illimité des employeurs, à l’augmentation de la pression patronale en matière d’accroissement du temps de travail et à des sanctions vis-à-vis des travailleurs qui n’acceptent pas de se soumettre aux besoins des entreprises. La situation est d’autant plus préoccupante que l’inspection du travail ne fonctionne pas, n’a pas de capacités ou de moyens et est parfois corrompue. En outre, la loi supprime la condition selon laquelle les organisations syndicales représentatives doivent être consultées sur les questions relatives aux dérogations possibles en matière de durée du travail. La loi viole aussi le principe du repos hebdomadaire et diminue dramatiquement le niveau des salaires. L’orateur a regretté l’attitude complaisante du gouvernement qui a décidé de faire corps avec les employeurs pour violer les conventions internationales et a exigé que l’Etat haïtien respecte les droits fondamentaux des travailleurs et travailleuses, notamment en reprenant le processus de réforme du Code de travail et en respectant les accords déjà pris à ce sujet.
Le membre travailleur de la République dominicaine a déclaré que la gestion des relations du travail en Haïti se fait aux dépens du respect d’importantes conventions de l’OIT. Lorsque le chômage et la pauvreté règnent dans un pays, la création d’emplois passe en général avant le travail décent, alors que le travail décent contribue à lutter contre la pauvreté. Lorsque les travailleurs du secteur des maquilas ou des zones franches d’exportation demandent une véritable réforme de la législation du travail comme celle qui est actuellement en suspens en Haïti, on estime que cela nuit aux possibilités d’investissements étrangers dans le pays. Des investissements qui se fondent sur la pauvreté des travailleurs sont absurdes et doivent être rejetés. Il a demandé au gouvernement de respecter les conventions et de poursuivre les réformes de la législation du travail engagées faisant fi des règles en matière de conditions de travail imposées par les entreprises, contraires aux conventions de l’OIT.
La membre travailleuse de l’Italie a rappelé que, après avoir obtenu l’assistance technique du BIT en vue de la réforme du Code du travail, Haïti a signé le programme par pays de promotion du travail décent 2015-2020, dans le cadre de négociations tripartites sous les auspices du BIT. Bien que ce programme ait prévu que la révision du Code du travail devait être finalisée en juillet 2015, le gouvernement a préféré adopter la loi portant organisation et réglementation du travail sur la durée de vingt-quatre heures, répartie en trois tranches de huit heures, qui abroge un nombre d’articles du Code du travail, renforce le pouvoir des employeurs et ne réglemente pas les heures supplémentaires. Cette loi qui contrevient à toutes les conventions de l’OIT sur le temps de travail élimine la nécessité de consultations des organisations syndicales représentatives pour les décisions relatives au temps de travail et sacrifie le principe du repos hebdomadaire. En outre, la perte de 50 pour cent de la majoration pour le travail de nuit et, de manière plus générale, l’augmentation de la durée du temps de travail ont un impact dramatique sur la diminution considérable des salaires, plongeant les travailleurs et leurs familles dans une plus grande misère. Bien que dans le cadre de l’assistance technique du BIT l’inspection du travail ait bénéficié d’une formation technique et d’un renforcement de ses capacités, les dysfonctionnements du ministère des Affaires sociales et du Travail et le manque de moyens la mettent dans une situation d’impuissance face aux employeurs. L’oratrice a dénoncé les dérives du gouvernement en matière de respect des droits fondamentaux du travail et le mépris dont il fait preuve pour ses engagements concernant les conventions de l’OIT. Elle a appelé à la reprise du processus de réforme du Code du travail dans le respect total du tripartisme.
Une observatrice, représentant IndustriALL Global Union, a déclaré que les normes de l’OIT relatives au temps de travail et à la semaine de travail de quarante-huit heures sont malheureusement des concepts vides de sens pour les travailleurs haïtiens de l’industrie du vêtement qui travaillent de longues heures pour survivre avec des salaires de misère. De plus, lorsque les heures supplémentaires sont rémunérées, elles le sont toujours en-dessous du taux légal. Le gouvernement ne parvenant pas à faire respecter les normes internationales et la législation nationale, les usines et leur clientèle de sociétés multinationales s’octroient le droit de voler les salaires et les vies de travailleurs parmi les plus pauvres au monde. L’adoption de la nouvelle loi sur le temps de travail, qui a abrogé les normes existantes sur les heures supplémentaires, le repos hebdomadaire, la rémunération du travail le dimanche et les tarifs de nuit, n’a fait qu’empirer la situation. En mai 2017, les personnels de 22 usines de confection ont fait grève pour exiger des salaires plus élevés. Des dizaines de dirigeants et de membres syndicaux attendent toujours d’être réintégrés et figurent même sur une liste noire, en dépit de recommandations très claires formulées à la suite d’une enquête menée par le Programme Better Work de l’OIT. Enfin, l’oratrice a conclu que, sans de meilleurs salaires et un plus grand respect de la main-d’œuvre et des droits syndicaux, les conventions de l’OIT sur le temps de travail resteront des vœux pieux et il ne pourra y avoir de paix sociale durable dans l’industrie du vêtement en Haïti.
Le membre travailleur de l’Uruguay a estimé que traiter le cas du respect de la part d’Haïti des conventions portant sur le temps de travail d’un point de vue technique et demander aux travailleurs haïtiens qu’ils s’adaptent aux nouvelles dispositions en la matière revient à nier qu’il s’agit d’une tragédie humanitaire. La solution aux problèmes réside dans le dialogue social. Il est nécessaire d’aider Haïti à reprendre le chemin du dialogue social afin de garantir un travail décent. Il a demandé que le cas d’Haïti soit traité dans cette optique.
Le représentant gouvernemental a pris note des remarques et des recommandations faites dans un esprit constructif lors de la discussion. Il a réitéré la volonté du gouvernement de respecter ses engagements internationaux et de poursuivre le dialogue dans un cadre tripartite. L’arrêté d’application de la nouvelle loi n’ayant pas été publié, une solution consensuelle est encore possible. L’accord signé entre les partenaires sociaux en mars 2018 est un cadre idéal pour poursuivre les discussions. Il a demandé l’assistance technique du BIT pour accompagner ce processus.
Les membres travailleurs ont salué la volonté du gouvernement de travailler à la mise en conformité de sa législation relative au temps de travail avec les conventions internationales et ont exprimé l’espoir que cette volonté se traduira par des actions concrètes sur le terrain. Les questions relatives au temps de travail sont essentielles. Les actions suivantes pourraient utilement être prises par le gouvernement pour rendre sa législation et sa pratique conformes aux conventions internationales relatives au temps de travail. Tout d’abord, garantir la consultation de l’ensemble des partenaires sociaux représentatifs afin de réviser la réglementation relative au temps de travail en vue de la mettre en conformité avec les conventions nos 1, 14, 30 et 106. Suite à l’accord intervenu en mars 2018 avec les partenaires sociaux en vue de relancer le dialogue social, la consultation de l’ensemble des partenaires sociaux pourra utilement se faire dans le cadre de la réforme globale du Code du travail qui a été interrompue. Ceci permettra au gouvernement haïtien de remplir l’engagement pris, dans le cadre du programme par pays de promotion du travail décent 2015-2020, de finaliser cette réforme globale. Les membres travailleurs invitent le gouvernement haïtien à relancer ce processus en étroite collaboration avec le BIT. Il conviendra que le gouvernement travaille, avec le concours de l’ensemble des partenaires sociaux, sur un certain nombre de points. Ainsi, à défaut de dérogations inscrites dans la législation, il conviendra d’appliquer et de faire respecter le principe de la journée de 8 heures et de déclarer illégales les dérogations appliquées en pratique. De plus, il conviendra de réintroduire une liste limitative des cas dans lesquels la prestation d’heures supplémentaires est justifiée, ainsi que des limites à la prestation d’heures supplémentaires. La disparition du Code du travail d’une mention explicite au principe du repos hebdomadaire minimum de 24 heures consécutives qui coïncideront de préférence avec le dimanche et qui devront être accordées en même temps à tout le personnel d’un même établissement est un manquement aux obligations prévues par les conventions. Il conviendra donc de réintroduire ce principe dans le Code du travail. Le gouvernement doit veiller à prévoir, dans sa législation et en pratique, une consultation des partenaires sociaux au sujet de tout projet de réforme portant sur ces éléments. Il conviendrait de supprimer la possibilité prévue dans la législation de négocier individuellement entre le travailleur et l’employeur les dérogations à la durée journalière maximale de travail. La négociation individuelle sur des questions aussi importantes que le temps de travail est extrêmement délicate au vu du caractère fondamentalement asymétrique du contrat de travail, l’employeur ayant un pouvoir d’autorité sur le travailleur. Des services d’inspection efficaces sont une condition sine qua non d’une législation du temps de travail respectée dans la pratique. Il conviendra dès lors de doter les services d’inspection d’effectifs et de moyens matériels et financiers suffisants. Une formation adéquate des inspecteurs en matière de temps de travail et des normes internationales est également essentielle. Le gouvernement devra respecter et faire respecter l’indépendance des services d’inspection. Il conviendra également d’accorder une attention particulière au respect de la réglementation du temps de travail dans le secteur informel et dans les zones franches d’exportation qui occupent une grande majorité des travailleurs haïtiens, en s’assurant notamment que les services d’inspection soient compétents pour y contrôler l’application de la législation. Ce cas montre que l’absence de rapport de la part d’un gouvernement ne lui permet pas d’échapper aux organes de contrôle de l’OIT. Les membres travailleurs prient le gouvernement de faire parvenir ses rapports conformément à ses obligations constitutionnelles. Les violences et intimidations envers les militants syndicaux rapportées sont inacceptables. Les membres travailleurs insistent auprès du gouvernement afin qu’il fasse cesser toute manœuvre d’intimidation à l’égard des représentants syndicaux en Haïti, qu’il diligente des enquêtes et condamne les auteurs à des sanctions effectives et dissuasives. Il est important que les militants syndicaux puissent exercer leurs activités librement et sans craintes de représailles. En vue de réaliser toutes ces recommandations, le gouvernement est exhorté à avoir recours à l’assistance technique du BIT. En réponse à la remarque concernant le faible nombre de ratifications des conventions à l’examen, qui serait dû au manque de flexibilité de ces conventions, les membres travailleurs ont indiqué que celui-ci est le signe qu’une large campagne de ratification de ces instruments adoptés de façon tripartite est nécessaire afin que les Etats Membres soient sensibilisés aux principes contenus dans ces normes mais également à la flexibilité que ces instruments permettent.
Les membres employeurs ont déclaré qu’il est clair qu’Haïti n’échappe pas aux réalités d’un monde du travail en pleine mutation, ce qui suppose des réglementations plus modernes, flexibles et adaptées à la situation. Loin d’encourager le gouvernement à ne pas respecter les conventions ratifiées, ils ont précisé qu’Haïti doit se conformer à toutes les obligations internationales qu’il a assumées volontairement. La seule façon pour un gouvernement de se soustraire à l’application d’une convention ratifiée est de dénoncer la convention lorsque l’occasion se présente. Ils ont prié instamment le gouvernement de poursuivre le processus de réforme, en collaboration avec les partenaires sociaux et avec les conseils du BIT, en vue de s’acquitter de ses obligations au titre des conventions ratifiées. Enfin, ils ont prié instamment le gouvernement de demander l’assistance technique du BIT pour remédier à la situation de manquement grave à ses obligations d’envoyer des rapports.
Conclusions
La commission a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi. La commission s’est dite préoccupée par plusieurs dispositions législatives figurant dans la loi de 2017 sur le temps de travail qui ne sont pas conformes aux conventions ratifiées sur le temps de travail. La commission a noté que le décret d’application de la nouvelle loi n’a pas été promulgué et que le Code du travail reste d’application. La commission a noté avec regret que la réforme globale du Code du travail n’a pas été finalisée.
Prenant en compte les déclarations du gouvernement et la discussion du cas qui a suivi, la commission a prié instamment le gouvernement:
La commission demande au gouvernement de se prévaloir d’une assistance technique pour traiter ces problèmes. Elle demande au gouvernement de soumettre sans délai tous les rapports dus à la commission d’experts, et d’inclure un rapport détaillé sur les mesures prises pour mettre en œuvre ces conclusions en vue de son examen à la prochaine session de la commission d’experts en novembre 2018.
La représentante gouvernementale a déclaré que la délégation haïtienne avait pris bonne note des discussions et des conclusions adoptées par la Commission de la Conférence et partageait l’avis de la commission d’experts dans son étude d’ensemble selon lequel «le nombre d’heures de travail et les modalités de l’organisation du travail peuvent avoir une profonde influence non seulement sur la qualité du travail, mais aussi sur la vie privée des travailleurs, leur santé physique et mentale, leur bien-être, leur sécurité, au travail mais aussi au cours du trajet entre travail et domicile, et sur leurs revenus». Les conventions ratifiées par Haïti faisaient partie du corpus juridique interne conformément à l’article 276-2 de la Constitution haïtienne, étant au-dessus des textes nationaux dans la hiérarchie des normes et pouvant être invoquées sans réserve devant les tribunaux. Prenant note des observations de la commission d’experts concernant l’application de la loi du 7 août 2017 sur la répartition du temps de travail, l’Etat haïtien envisageait la réalisation de consultations tripartites en vue d’identifier et d’adresser les principales difficultés rencontrées dans l’application de la loi, ainsi que l’adoption d’arrêtés ou de mesures réglementaires qui pourraient préciser le champ d’application respectif. Par ailleurs, le gouvernement était conscient du retard enregistré dans la finalisation du processus de réforme du Code du travail; les discussions avaient été entamées au niveau de la primature et se poursuivraient dans un cadre tripartite, dans l’esprit de l’Accord de San José du 21 mars 2018 et en tenant compte des recommandations du Bureau.
Commentaire précédent
Répétition Afin de fournir une vue d’ensemble des questions relatives à l’application des conventions ratifiées en matière de temps de travail, la commission estime qu’il convient d’examiner les conventions nos 1, 14, 30 et 106 dans un même commentaire. La commission prend note des observations de la Confédération des travailleurs et travailleuses des secteurs public et privé (CTSP) reçues le 29 août 2018, de l’Association des industries d’Haïti (ADIH) reçues le 31 août 2018, et de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues le 1er septembre 2018. Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 107e session, mai-juin 2018) La commission prend note de la discussion qui a eu lieu à la Commission de l’application des normes de la Conférence (Commission de la Conférence), et qui a notamment porté sur l’impact de la loi portant organisation et réglementation du travail sur la durée de vingt quatre heures répartie en trois tranches de huit heures (ci après la loi sur le temps de travail) de 2017 sur l’application des conventions ratifiées en matière de temps de travail. Dans ses conclusions, la Commission de la Conférence a demandé au gouvernement: i) d’examiner, en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives, la conformité du Code du travail et de la loi sur le temps de travail avec les conventions ratifiées de l’OIT sur le temps de travail; ii) de renforcer l’inspection du travail et les autres mécanismes de contrôle pertinents pour garantir que les travailleurs bénéficient de la protection prévue dans les conventions; iii) de faire rapport à la commission sur ces mesures; et iv) de se prévaloir d’une assistance technique pour traiter ces problèmes. La commission note qu’au terme de la discussion de la Commission de la Conférence le gouvernement a rappelé que les conventions ratifiées par Haïti faisaient partie du corpus juridique interne conformément à l’article 276-2 de la Constitution haïtienne, étant au-dessus des textes nationaux dans la hiérarchie des normes et pouvant être invoquées sans réserve devant les tribunaux. Prenant note des observations de la commission d’experts concernant l’application de la loi sur le temps de travail, le gouvernement a indiqué qu’il envisageait la réalisation de consultations tripartites en vue d’identifier et d’adresser les principales difficultés rencontrées dans l’application de la loi, ainsi que l’adoption d’arrêtés ou de mesures réglementaires. Par ailleurs, le gouvernement a affirmé être conscient du retard enregistré dans la finalisation du processus de réforme du Code du travail; les discussions avaient été entamées au niveau de la primature et se poursuivraient dans un cadre tripartite, dans l’esprit de l’Accord de San José signé entre les partenaires sociaux le 21 mars 2018 et en tenant compte des recommandations du Bureau. Par ailleurs, la commission note que, dans ses observations, la CTSP regrette l’absence de progrès sur les questions de temps de travail depuis la discussion à la Commission de la Conférence. Cependant, la CTSP indique que les discussions sur la réforme du Code du travail ont repris. En outre, la commission note que l’ADIH confirme la reprise, en août 2018, des discussions tripartites sur la réforme du Code du travail. Selon l’ADIH, la loi sur le temps de travail doit être abrogée, et les organisations d’employeurs et de travailleurs doivent être consultées sur la mise en œuvre des conventions ratifiées en la matière. La commission note également que la CSI se réfère à la discussion du cas lors de la Commission de la Conférence et signale notamment que: i) la loi sur le temps de travail qui libéralise la réglementation sur ce sujet entraîne de graves abus; ii) cette loi a été adoptée sans consultations et en dehors du processus de négociation d’un nouveau Code du travail; et iii) la situation est aggravée par le manque de moyens de l’inspection du travail. La CSI se réfère plus particulièrement: i) aux travailleurs dans les secteurs informel et domestique qui subissent des conditions de travail indignes tant au regard de la durée du temps de travail qu’en matière de droit au congé; ii) aux agents de sécurité et aux travailleurs des entreprises de sous-traitance dans le secteur du textile, où sont à déplorer l’absence d’horaires de travail fixes et le refus du paiement des heures supplémentaires par les employeurs; et iii) aux travailleurs des zones franches d’exportations qui sont particulièrement exposés à des abus. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires sur l’ensemble de ces observations. Enfin, la commission prend note de la communication du gouvernement, reçue le 30 octobre 2018, dans laquelle il informe la commission que, suite aux conclusions de la Commission de la Conférence, il a sollicité l’assistance technique du Bureau, afin notamment de l’aider à présenter les rapports dus, à renforcer les services d’inspection, à consolider le dialogue social pour la poursuite des réformes sociales, ainsi qu’à traiter les autres points soulevés par la Commission de la Conférence. Le gouvernement indique également qu’il espère pouvoir recevoir cette assistance avant la prochaine Conférence internationale du Travail. La commission espère que cette assistance technique pourra être fournie sans délai. Elle prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les résultats de l’assistance technique envisagée, ainsi que sur les mesures adoptées pour garantir la mise en œuvre effective dans la législation et dans la pratique des conventions ratifiées en matière de temps de travail.
Répétition La commission note que le gouvernement a entamé en 2007 un processus de refonte du Code du travail en concertation avec la Commission tripartite de consultation et d’arbitrage, et qu’il attend les propositions des organisations d’employeurs et de travailleurs à ce sujet. Elle prie le gouvernement de tenir le Bureau informé de tout développement à cet égard.Article 1 de la convention. Champ d’application – Mines et carrières. La commission note que les articles 293 à 296 et l’article 300 du Code du travail fixent des règles particulières concernant la durée du travail dans les mines et carrières. Elle note en particulier que la durée hebdomadaire du travail de ces salariés est réduite à quarante heures. La commission prie le gouvernement d’indiquer si, hormis les dispositions relatives à la durée hebdomadaire du travail, les articles 95 à 106 du Code du travail, qui fixent les règles générales en matière de durée du travail, sont également applicables aux travailleurs des mines et carrières.Transports routiers. La commission note que, en application de l’article 285, deuxième alinéa, du Code du travail, les travailleurs occupés à la conduite de véhicules qui prêtent leurs services entre deux ou plusieurs communes et, en général, tous ceux qui servent à bord desdits véhicules, ne sont pas assujettis à la journée normale de travail. Elle attire l’attention du gouvernement sur le fait que le transport de personnes ou de marchandises par route, sans distinction d’aucune sorte, fait partie des activités industrielles auxquelles la convention est applicable. La commission espère que le gouvernement adoptera prochainement des mesures visant à amender le Code du travail de manière à étendre la portée des dispositions du Code relatives à la durée du travail aux travailleurs visés à l’article 285, deuxième alinéa, de celui-ci.Article 2. Durée journalière du travail – Conducteurs de véhicules privés et travailleurs des chemins de fer. La commission note que, en vertu des articles 285, troisième alinéa, et 287 du Code du travail, la durée du travail des travailleurs occupés à la conduite de véhicules privés, au service d’une personne ou des membres de sa famille, peut dépasser huit heures par jour, sans dépasser quarante-huit heures par semaine. Elle note que cette règle s’applique également aux personnes prêtant leurs services à des compagnies de chemin de fer. La commission rappelle cependant que l’article 2 de la convention fixe une double limite, à la fois journalière et hebdomadaire, à la durée du travail des salariés relevant de son champ d’application, y compris les conducteurs de véhicules privés et les personnes employées par des compagnies de chemin de fer. Elle espère que le gouvernement limitera dans un proche avenir à huit heures la durée journalière normale du travail des travailleurs visés à l’article 285, troisième alinéa, et à l’article 287 du Code du travail, et définira d’une manière conforme aux articles 2, 3, 5 et 6 de la convention les conditions dans lesquelles des dérogations à cette règle seraient autorisées.Article 6, paragraphe 1 a). Dérogations permanentes – Travail intermittent. La commission note que, aux termes de l’article 285 du Code du travail, les travailleurs occupés à la conduite de véhicules qui prêtent des services intermittents et, en général, tous ceux qui servent à bord desdits véhicules, ne sont pas assujettis à la journée normale de travail. Elle note que l’article 286 de ce code qualifie d’intermittent le travail des personnes occupées à la conduite de véhicules et prêtant leurs services à des entreprises de transports urbains. La commission attire l’attention du gouvernement sur le caractère limité des dérogations permanentes aux limites normales à la durée du travail autorisées par la convention pour les salariés qui effectuent un travail intermittent. Comme elle l’a souligné dans son étude d’ensemble de 2005 sur la durée du travail (paragr. 126), l’expression «travail intermittent» au sens de la convention «désigne le travail qui est sans rapport avec la production proprement dite et qui, par essence, est interrompu par de longues périodes d’inaction au cours desquelles les travailleurs concernés ne doivent pas exercer une activité physique ni fournir une attention soutenue, et restent à leur poste uniquement pour répondre à des appels éventuels». Tel n’est manifestement pas le cas des personnes occupées à la conduite de véhicules, dont l’activité nécessite une attention soutenue et permanente. La commission prie donc le gouvernement d’amender sa législation afin de restreindre aux salariés qui effectuent réellement un travail intermittent au sens de la convention les dérogations permanentes aux règles normales en matière de durée du travail.
La commission note que le gouvernement a entamé en 2007 un processus de refonte du Code du travail en concertation avec la Commission tripartite de consultation et d’arbitrage, et qu’il attend les propositions des organisations d’employeurs et de travailleurs à ce sujet. Elle prie le gouvernement de tenir le Bureau informé de tout développement à cet égard.
Article 1 de la convention. Champ d’application – Mines et carrières. La commission note que les articles 293 à 296 et l’article 300 du Code du travail fixent des règles particulières concernant la durée du travail dans les mines et carrières. Elle note en particulier que la durée hebdomadaire du travail de ces salariés est réduite à quarante heures. La commission prie le gouvernement d’indiquer si, hormis les dispositions relatives à la durée hebdomadaire du travail, les articles 95 à 106 du Code du travail, qui fixent les règles générales en matière de durée du travail, sont également applicables aux travailleurs des mines et carrières.
Transports routiers. La commission note que, en application de l’article 285, deuxième alinéa, du Code du travail, les travailleurs occupés à la conduite de véhicules qui prêtent leurs services entre deux ou plusieurs communes et, en général, tous ceux qui servent à bord desdits véhicules, ne sont pas assujettis à la journée normale de travail. Elle attire l’attention du gouvernement sur le fait que le transport de personnes ou de marchandises par route, sans distinction d’aucune sorte, fait partie des activités industrielles auxquelles la convention est applicable. La commission espère que le gouvernement adoptera prochainement des mesures visant à amender le Code du travail de manière à étendre la portée des dispositions du Code relatives à la durée du travail aux travailleurs visés à l’article 285, deuxième alinéa, de celui-ci.
Article 2. Durée journalière du travail – Conducteurs de véhicules privés et travailleurs des chemins de fer. La commission note que, en vertu des articles 285, troisième alinéa, et 287 du Code du travail, la durée du travail des travailleurs occupés à la conduite de véhicules privés, au service d’une personne ou des membres de sa famille, peut dépasser huit heures par jour, sans dépasser quarante-huit heures par semaine. Elle note que cette règle s’applique également aux personnes prêtant leurs services à des compagnies de chemin de fer. La commission rappelle cependant que l’article 2 de la convention fixe une double limite, à la fois journalière et hebdomadaire, à la durée du travail des salariés relevant de son champ d’application, y compris les conducteurs de véhicules privés et les personnes employées par des compagnies de chemin de fer. Elle espère que le gouvernement limitera dans un proche avenir à huit heures la durée journalière normale du travail des travailleurs visés à l’article 285, troisième alinéa, et à l’article 287 du Code du travail, et définira d’une manière conforme aux articles 2, 3, 5 et 6 de la convention les conditions dans lesquelles des dérogations à cette règle seraient autorisées.
Article 6, paragraphe 1 a). Dérogations permanentes – Travail intermittent. La commission note que, aux termes de l’article 285 du Code du travail, les travailleurs occupés à la conduite de véhicules qui prêtent des services intermittents et, en général, tous ceux qui servent à bord desdits véhicules, ne sont pas assujettis à la journée normale de travail. Elle note que l’article 286 de ce code qualifie d’intermittent le travail des personnes occupées à la conduite de véhicules et prêtant leurs services à des entreprises de transports urbains. La commission attire l’attention du gouvernement sur le caractère limité des dérogations permanentes aux limites normales à la durée du travail autorisées par la convention pour les salariés qui effectuent un travail intermittent. Comme elle l’a souligné dans son étude d’ensemble de 2005 sur la durée du travail (paragr. 126), l’expression «travail intermittent» au sens de la convention «désigne le travail qui est sans rapport avec la production proprement dite et qui, par essence, est interrompu par de longues périodes d’inaction au cours desquelles les travailleurs concernés ne doivent pas exercer une activité physique ni fournir une attention soutenue, et restent à leur poste uniquement pour répondre à des appels éventuels». Tel n’est manifestement pas le cas des personnes occupées à la conduite de véhicules, dont l’activité nécessite une attention soutenue et permanente. La commission prie donc le gouvernement d’amender sa législation afin de restreindre aux salariés qui effectuent réellement un travail intermittent au sens de la convention les dérogations permanentes aux règles normales en matière de durée du travail.
Point VI du formulaire de rapport. La commission note les indications du gouvernement selon lesquelles le pays rencontre des difficultés en ce qui concerne le contrôle des conditions de travail dans les entreprises privées, du fait que le Service d’inspection du travail ne dispose pas de la logistique nécessaire. Elle note également que la Direction du travail est obligée d’intervenir en aval, lorsque les conflits éclatent. Elle note enfin que le gouvernement sollicite l’assistance technique du BIT en vue de la création d’une base de données contenant les statistiques du travail. La commission prie le gouvernement de se référer aux commentaires qu’elle formule au titre de la convention (no 81) sur l’inspection du travail, 1947, en ce qui concerne les mesures à prendre pour rendre les services d’inspection pleinement opérationnels. Elle espère également qu’avec l’assistance du Bureau le gouvernement sera prochainement en mesure d’établir des statistiques du travail comprenant notamment des données sur le nombre de travailleurs couverts par la législation donnant effet à la convention.