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Convention (n° 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989 - République centrafricaine (Ratification: 2010)

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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2014, Publication : 103ème session CIT (2014)

 2014-Central African Rep-C169-Fr

Un représentant gouvernemental a souhaité rappeler le contexte dans lequel s’inscrivent les commentaires de la commission d’experts sur l’application de la convention no 169. La République centrafricaine est un vaste pays à faible densité de population et aux frontières mal maîtrisées, qui compte plus de 650 000 personnes déplacées par les violences internes. A sa tête, un gouvernement de transition s’efforce de restaurer l’autorité de l’Etat, avec les faibles moyens de maintien de l’ordre à sa disposition, alors que la communauté internationale interdit le réarmement des forces nationales et que l’administration est quasi absente hors de la capitale. Malgré la présence des différentes forces de maintien de la paix, les deux principales milices armées, les Seleka et les Anti-balaka poursuivent leurs violences contre des civils pris pour cible en fonction de leur supposée identité religieuse. La situation en termes de droit humanitaire et de droits de l’homme est aggravée par l’impuissance du système judiciaire qui favorise le sentiment d’impunité. Les peuples autochtones de la République centrafricaine sont victimes à des degrés divers des répercussions du conflit. Les Pygmées ba’aka n’y sont pas directement impliqués. Vivant de manière semi-nomade au cœur de la forêt dense, leur cohabitation difficile avec les populations bantoues est faite d’exploitation, de discriminations et de violences. Les Peulhs Mbororo ont été directement victimes des Seleka qui ont dépouillé certains de leurs troupeaux avant d’imposer un droit de pâturage illégal. Les milices anti-balaka s’attaquent aussi au bétail des Peulhs dans les régions qu’elles contrôlent. Ces persécutions ont entraîné des déplacements massifs des Mbororo, tant à l’intérieur, du nord-ouest vers le sud-est du pays, qu’à l’extérieur, vers le Cameroun, la République démocratique du Congo, le Tchad et le Soudan. Des mesures de relocalisation ont été entreprises avec l’appui de l’Organisation internationale des migrations (OIM) afin de protéger les populations peulhs. Dans les circonstances prévalant depuis mars 2013, il est difficile au gouvernement d’assurer l’application de la convention no 169, alors même que le conflit affecte toute la population et non les seuls peuples autochtones. Le gouvernement compte sur la solidarité active de la communauté internationale pour surmonter la grave crise que traverse le pays. Le BIT pourrait y contribuer par son assistance dans la promotion de la convention no 169.

Les membres employeurs ont félicité le gouvernement d’avoir ratifié la convention no 169 et précisé qu’il s’agissait du premier pays à l’avoir fait sur le continent africain. Le gouvernement doit également être loué pour avoir adressé son premier rapport en juin 2013, particulièrement dans les circonstances dramatiques que connaît le pays. Effectivement, il ressort des informations disponibles que l’Etat est gravement menacé et que son gouvernement est très faible. Dans ces conditions, il est très difficile de parler d’application effective de la convention no 169, en l’absence d’institutions susceptibles de lui donner effet. A cet égard, l’OIT doit œuvrer de concert avec les autres organisations du système des Nations Unies à la reconstruction des institutions du pays avant de pouvoir commencer à exiger l’application effective de cette convention. Par ailleurs, il faut espérer que, dans un avenir proche, une fois surmontée la crise humanitaire et institutionnelle, le gouvernement appliquera cette convention en tant qu’instrument de gouvernance, en particulier pour ce qui est des consultations préalables et en toute connaissance de cause avec les peuples indigènes et tribaux. D’une manière générale, la convention pourrait servir de plate-forme pour la construction du dialogue social et du consensus. Il faut exiger des personnes qui ont quelque responsabilité sur le terrain de faire appliquer l’article 3 de la convention afin de garantir pleinement le respect des droits fondamentaux des peuples indigènes Aka et Mbororo.

Les membres travailleurs ont rappelé que la République centrafricaine avait été le premier pays africain à ratifier la convention no 169 en 2010. Pourtant, l’insécurité, l’effondrement de l’ordre public et les tensions interconfessionnelles concourent à une situation de violations massives du droit humanitaire et des droits de l’homme dont sont notamment victimes les populations Aka et Mbororo. Les milices perpètrent exécutions extrajudiciaires, tortures, sévices sexuels, viols et recrutement forcé d’enfants, tous actes susceptibles d’être qualifiés de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. La plupart de ces violences ciblent des membres de groupes ethniques et religieux. Dans ce contexte, la commission d’experts s’inquiète de l’aggravation des tensions intercommunautaires et des violences visant tout particulièrement les peuples autochtones constitués par les populations Aka et Mbororo. Aux termes de l’article 2 de la convention, il incombe pourtant au gouvernement de protéger les droits de ces peuples et de garantir le respect de leur intégrité. Aucune information ne permet de penser que des mesures ont été prises pour donner effet à l’arrêté ministériel du 1er août 2003 portant interdiction d’exploitation ou exportation des traditions orales des minorités culturelles, en termes de sauvegarde des droits individuels, institutionnels, de propriété, du travail, culturels et environnementaux des populations Aka et Mbororo. Le gouvernement n’a pas non plus indiqué la manière dont sont assurées la participation et la coopération des populations requises par l’article 5 de la convention, ni la manière dont il donne effet à l’article 8 relatif au droit à la conservation des coutumes et institutions. Le gouvernement doit s’engager à protéger la culture des minorités ethniques, à reconnaître les formes traditionnelles de justice des peuples Aka et Mbororo et à renforcer dans le Code pénal la lutte contre les discriminations dont ils sont victimes, ainsi qu’à prendre en compte leurs problèmes linguistiques dans l’accès à la justice et à garantir dans les faits leur droit à la terre.

Le membre travailleur de la Zambie s’est référé à la description par le gouvernement de l’instabilité politique et sociale qui prévaut depuis 2012 en République centrafricaine pour souligner que cette instabilité avait détérioré la situation des droits de l’homme, aggravé la crise humanitaire et multiplié les cas de détresse et de souffrance. Cette terrible situation a eu un impact négatif sur les peuples indigènes qui vivent dans le pays. Le nombre de personnes déplacées est passé de 94 000 en 2012 à 625 000 en 2014. Ceux qui ont fui le pays sont aussi nombreux, ce qui a entraîné des difficultés dans les pays hôtes tels que le Cameroun, le Tchad et la République démocratique du Congo. Certaines informations font état de plus de 3 000 enfants soldats et la plupart des victimes sont des femmes, des enfants et des personnes âgées, tant du côté chrétien que musulman. Les Nations Unies doivent faire usage de leur mandat et des moyens dont elles disposent pour protéger les civils vulnérables; il faut créer immédiatement un environnement permettant l’acheminement de l’aide humanitaire conjointement aux efforts visant à mettre fin au conflit.

La membre travailleuse de la France a souligné que les peuples Aka et Mbororo sont parmi les plus vulnérables du pays et qu’ils ont été victimes de violences et de discriminations bien avant le conflit actuel: expulsion de leurs terres sans indemnisation, confinement dans des emplois mal rémunérés, accès restreint voire inexistant à la santé et à l’éducation du fait de l’éloignement et des coûts. Les pires horreurs ont été perpétrées dans le cadre des guerres civiles, au point que les Nations Unies avertissent de la menace d’un génocide. Les réclamations de terres et les déplacements de population ajoutent aux tensions existantes, notamment à l’encontre des peuples indigènes.

Le membre travailleur du Mali a abordé la question du cadre juridique de la protection des peuples autochtones en République centrafricaine. Les Pygmées Aka et les Peulhs Mbororo ne bénéficient pas de la reconnaissance juridique officielle qui assurerait leur visibilité statistique et favoriserait la coordination des initiatives publiques en leur faveur. Il importe donc de développer un cadre juridique spécifique de protection de leurs droits culturels ainsi que de protection contre les discriminations, y compris celles dont sont victimes les femmes autochtones. Leur accès à la justice devrait aussi être favorisé, en levant notamment les obstacles financiers et linguistiques. Enfin, le Code du travail devrait tenir compte des conditions particulières et souvent abusives qui leur sont faites, en particulier dans les secteurs forestier et touristique.

Le représentant gouvernemental a remercié les différents intervenants pour la bienveillance et la compréhension qu’ils ont témoignées à l’égard de la situation de son pays. Il faut espérer qu’avec l’appui de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) établie par la résolution 2149 (2014) du Conseil de sécurité, les autorités seront en mesure de protéger tous les peuples autochtones du pays et notamment les Aka et Mbororo. L’assistance et les conseils du BIT devraient apporter leur contribution à la recherche d’une solution durable donnant toute leur place aux normes internationales du travail. Pour sa part, le gouvernement est fermement engagé dans cette voie, en coopération avec les organisations patronales et syndicales, ainsi qu’avec les représentants des populations autochtones.

Les membres employeurs ont estimé que l’ampleur de la crise humanitaire était encore impossible à déterminer; par conséquent, la collaboration avec le système des Nations Unies est requise de toute urgence pour évaluer et examiner dès que possible le respect de la convention no 169. Quoi qu’il en soit, l’OIT doit être tenue informée de l’évolution des événements.

Les membres travailleurs ont remercié le représentant gouvernemental pour ses explications et exprimé leur compréhension des difficultés rencontrées par le gouvernement de transition. Malgré ces difficultés, le respect de la convention doit être assuré de toute urgence, afin que les peuples indigènes et tribaux jouissent pleinement des droits de l’homme qui leur sont garantis. Les mécanismes de participation et de consultation des Aka et Mbororo doivent être renforcés conformément à la convention. Le gouvernement devrait fournir des informations sur l’application de l’arrêté ministériel du 1er août 2003, garantir la reconnaissance formelle des formes traditionnelles de justice et faciliter l’accès aux procédures garantissant les droits protégés par la convention. Il devrait présenter un rapport en vue de la prochaine réunion de la commission d’experts, sur les actions déjà entreprises, afin qu’elle puisse assurer un suivi dans son rapport en 2015. Enfin, il convient de donner suite à la demande d’assistance technique formulée par le gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

Article 1 de la convention. Auto-identification. En réponse aux commentaires de la commission sur l’importance numérique des peuples Aka et Mbororo, le gouvernement précise que les populations Aka et Mbororo sont des peuples autochtones et transhumants dont l’importance numérique n’est pas disponible. Les Aka sont localisés dans les préfectures de la Lobaye, la Sanga Mbaéré et la Mambéré Kadei tandis que les Mbororo se trouvent dans les préfectures de la Nana Mambéré, l’Ouham Pendé, la Ouaka, la Basse Kotto et le Haut-Mbomou. Tout en prenant note de ces informations, la commission encourage le gouvernement à faire des efforts pour collecter les données sur l’importance numérique de ces peuples et sur leur situation socio économique dans la mesure où de telles données pourraient permettre au gouvernement de mieux définir et orienter les mesures destinées à protéger leurs droits.
Articles 2 et 33. Action systématique et coordonnée développée avec la participation des peuples intéressés. La commission a demandé précédemment au gouvernement de communiquer des informations sur les mesures adoptées, avec la participation des représentants des peuples Aka et Mbororo, pour développer une action coordonnée et systématique en vue de protéger les droits des peuples concernés. La commission renvoie à cet égard à son observation dans laquelle elle constate que la situation humanitaire et des droits de l’homme demeure préoccupante dans le pays, en raison notamment de la présence de divers groupes armés, et que cette situation a un impact sur les droits des peuples autochtones dont certains ont dû fuir leurs territoires. La commission note que le gouvernement indique dans son rapport que, pendant la période de transition, les Mbororo et Aka ont été identifiés et leurs représentants ont été nommés conseillers nationaux pour discuter, protéger et défendre leurs droits. Le gouvernement indique également qu’en collaboration avec des organisations non gouvernementales, le gouvernement élabore des projets en faveur des communautés autochtones afin qu’elles relèvent elles-mêmes les défis auxquels elles sont confrontées et deviennent acteur de la protection et de la promotion de leur patrimoine culturel ainsi que de la défense de leurs droits. En outre, l’article 147 de la Constitution prévoit que la haute autorité chargée de la bonne gouvernance veille à la protection des minorités et des peuples autochtones.
La commission note que, dans ses observations finales du 4 mai 2018, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies exprime sa préoccupation face à «la marginalisation persistante, la pauvreté et l’extrême vulnérabilité des populations autochtones». Le comité se réfère en particulier aux obstacles à l’obtention de documents d’identité et à l’enregistrement des naissances; aux difficultés d’accès aux services de santé équipés et dotés d’un personnel qualifié, notamment dans la préfecture de la Lobaye; aux obstacles dans l’accès à la terre; au fait que ces populations occupent des emplois précaires et sous-payés, notamment dans l’agriculture, et sont parfois réduites à l’esclavage par d’autres groupes ethniques locaux; et à leur faible représentation et participation aux affaires politiques et publiques.
Tout en notant la complexité de la situation dans le pays et les difficultés auxquelles le gouvernement fait face, la commission réitère l’importance d’adopter une approche et une action coordonnées et systématiques afin de protéger les droits des peuples autochtones consacrés dans la convention. Par conséquent, la commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures adoptées pour élaborer et mettre en œuvre, avec la participation des représentants des peuples Aka et Mbororo, une action coordonnée et systématique qui englobe l’ensemble de leurs droits. Prière d’indiquer les mesures prises pour institutionnaliser de plus en plus la participation des peuples autochtones aux politiques publiques et aux programmes de développement économiques susceptibles de les toucher directement, conformément aux dispositions des articles 2, 7 et 33 de la convention. Enfin, notant que la haute autorité chargée de la bonne gouvernance veille à la protection des peuples autochtones, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les actions qu’elle mène dans ce domaine.
Article 5. Reconnaissance des valeurs des peuples autochtones. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté que la Charte culturelle de la République centrafricaine (loi no 06-002 du 10 mai 2006) vise à protéger les patrimoines culturels nationaux, notamment les itinéraires et les aires culturelles des minorités ethniques, et à promouvoir le dialogue interculturel et la diversité culturelle. La commission a demandé au gouvernement d’indiquer la manière dont la participation et la coopération des peuples autochtones sont assurées dans ce contexte. Le gouvernement indique que les peuples autochtones sont consultés, informés et représentés à tous les niveaux de l’administration et des collectivités locales avant toute prise de décision concernant leurs valeurs et pratiques sociales, culturelles, religieuses et spirituelles. La commission prie le gouvernement de fournir des exemples de mesures qui ont été adoptées pour protéger les valeurs et les pratiques sociales, culturelles, religieuses et spirituelles des peuples autochtones en précisant la manière dont ces derniers ont participé et collaboré à l’adoption de ces mesures.
Articles 6 et 7. Mécanisme approprié de consultation et de participation. S’agissant de l’absence d’un mécanisme systématique de consultation des peuples autochtones en ce qui concerne l’adoption de mesures législatives ou administratives susceptibles de les toucher, la commission note que le gouvernement se réfère une nouvelle fois à la procédure de consultation au sein du Conseil économique et social, prévue à l’article 130 de la Constitution. La commission observe que le Conseil économique et social est consulté sur tout plan ou tout projet de loi de programme d’action à caractère économique, social, culturel et environnemental. Tout en notant que les communautés autochtones Aka et Mbororo sont représentées par une personne au sein du Conseil économique et social, la commission rappelle à cet égard que, aux termes de son article 6, la convention prévoit la nécessité d’établir des consultations spécifiques des peuples autochtones à chaque fois que des mesures législatives et administratives les affectant directement sont envisagées. Elle prévoit en outre la nécessité de mener des consultations dans des situations spécifiques prévues à l’article 15, paragraphe 2, et aux articles 16, 17, 22, 27 et 28. Par conséquent, la commission prie une nouvelle fois le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les peuples autochtones soient consultés et puissent participer de manière appropriée, à travers leurs entités représentatives, à l’élaboration d’un mécanisme de consultation, et ce afin qu’ils puissent exprimer leur avis et influer sur le résultat final du processus.
Article 11. Interdiction de la prestation obligatoire de services personnels. Dans ses précédents commentaires, la commission a demandé au gouvernement d’examiner les cas présumés de servitude dont seraient victimes certains membres des peuples Aka. En l’absence de réponse du gouvernement à cet égard et notant que le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies a exprimé sa préoccupation face au fait que «ces populations […] sont parfois réduites à l’esclavage par d’autres groupes ethniques locaux», la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour identifier et mettre fin à toute pratique aux termes de laquelle des Aka seraient contraints de travailler sans y avoir valablement consenti.
Articles 13 et 14. Terres. Dans ses précédents commentaires, la commission a demandé au gouvernement d’indiquer les mesures prises pour identifier les terres occupées traditionnellement par les peuples autochtones et garantir leurs droits sur ces terres. En réponse, le gouvernement indique que ces mesures sont prévues dans les Codes forestier, minier et de l’environnement. La commission observe que ces textes ne semblent pas contenir de dispositions concernant le droit de propriété sur les terres traditionnellement occupées par les peuples autochtones et que, par ailleurs, le gouvernement a précédemment indiqué qu’il était nécessaire de reconnaître de manière normative l’importance du droit à la terre pour les peuples autochtones. La commission rappelle que la reconnaissance et la protection effective des droits fonciers des peuples indigènes sur les terres qu’ils occupent traditionnellement, conformément à l’article 14 de la convention, sont essentielles à la sauvegarde de l’intégrité de ces populations et, par conséquent, au respect des autres droits prévus par la convention. Par conséquent, la commission prie une nouvelle fois le gouvernement de fournir des informations sur les dispositions de la législation qui reconnaîtraient les droits fonciers coutumiers des peuples autochtones sur les terres qu’ils occupent traditionnellement. Prière également d’indiquer si, et le cas échéant sous quelle forme, est reconnu le droit des groupes nomades d’utiliser les terres non exclusivement occupées par eux. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute revendication foncière émanant des peuples Mbororo et Aka et, le cas échéant, sur la suite qui aura été donnée à ces revendications.
Article 15. Ressources naturelles. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté que, aux termes du Code forestier de 2008 (loi no 08 022 du 17 octobre 2008), toute concession d’une partie du domaine forestier de l’Etat en vue d’une exploitation industrielle est subordonnée à une consultation préalable des populations riveraines, y compris les peuples autochtones. Le Code forestier reconnaît que, en vertu du droit coutumier, les populations autochtones ont un droit d’usage en vue d’exploiter le domaine forestier de l’Etat. Il met en outre en place un système de forêts communautaires, qui potentiellement permet la gestion, la conservation et l’exploitation des ressources forestières par les communautés autochtones à travers l’établissement d’une convention de gestion entre la communauté et l’Etat. En outre, les produits forestiers, y compris les espèces animales, appartiennent entièrement aux populations concernées (art. 133 et suivants).
La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle toutes les exploitations forestières, industrielles ou concessions d’une partie du domaine de l’Etat sont subordonnées à une consultation préalable des populations riveraines ainsi que des populations autochtones. Tel est le cas de l’octroi des permis d’exploitation et d’aménagement (PEA) aux sociétés forestières en vue de l’exploitation industrielle du domaine forestier ou du processus d’identification et d’attribution des forêts communautaires. La commission a également pris connaissance du décret no 15 463 du 3 décembre 2015, qui fixe les modalités d’attribution et de gestion des forêts communautaires en application des dispositions du Code forestier et qui complète le Manuel de procédure d’attribution des forêts communautaires établi en 2011 par le ministère des Eaux, Forêts, Chasse et Pêche.
La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les conventions de gestion qui auraient été signées entre les communautés autochtones et l’Etat pour l’attribution de forêts communautaires, en indiquant le nombre de demandes déposées, le nombre de conventions signées, les communautés et les aires géographiques concernées. La commission souhaiterait également que le gouvernement indique si des communautés autochtones ont été consultées avant l’octroi des PEA aux sociétés forestières. En outre, la commission prie une nouvelle fois le gouvernement d’indiquer comment les droits des peuples Aka et Mbororo sur les autres ressources naturelles sont spécialement sauvegardés et la manière dont ces droits s’exercent.
Articles 21 à 31. Recrutement, conditions d’emploi, formation professionnelle et éducation. Dans ses précédents commentaires, la commission a demandé au gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises, en coopération avec les peuples Aka et Mbororo, pour leur assurer une protection effective en matière de recrutement et de conditions d’emploi, de formation professionnelle et d’accès à l’éducation. La commission note que le gouvernement se réfère aux dispositions de la Constitution qui garantissent ces droits à l’ensemble de la population sans distinction ainsi qu’à certaines dispositions du Code du travail. Le gouvernement indique également que, dans le cadre du Plan national de relèvement et de consolidation de la paix en République centrafricaine, un des trois piliers est consacré au renouvellement du «contrat social entre l’Etat et la population». La priorité absolue est l’accès aux services de base et le plan prévoit que «l’amélioration de l’accès à l’éducation, à la santé, à la nutrition, à l’eau, à l’assainissement et à la protection sociale aura un impact positif sur la stabilité en créant, d’une part, des opportunités pour les jeunes marginalisés et en élevant les niveaux de vie et, d’autre part, en permettant de poser les bases du relèvement économique grâce à une main d’œuvre saine et qualifiée et en mettant en place les éléments d’une protection sociale au niveau national». S’agissant de l’éducation, le gouvernement indique que, compte tenu des circonstances nationales et de la destruction de bâtiments administratifs et des archives, il n’est pas en mesure de fournir des informations sur l’évaluation de la mise en œuvre du Plan national d’action de l’éducation pour tous (PNA EPT) 2004 15 et son impact sur les peuples indigènes.
Reconnaissant l’impact du conflit sur les institutions publiques et notamment sur les établissements de l’éducation et de la santé, la commission espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires, notamment à travers la mise en œuvre du Plan national de relèvement et de consolidation de la paix, pour permettre aux peuples autochtones de bénéficier de la protection prévue par la convention en matière d’éducation, d’accès à l’emploi et de santé. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures spéciales prises en coopération avec les peuples intéressés concernant: i) l’accès à la formation professionnelle et à une protection efficace en matière de recrutement et de conditions d’emploi; ii) l’accès des enfants des peuples Mbororo et Aka à l’éducation, et notamment à des établissements scolaires qui répondent à leurs besoins particuliers; iii) l’accès aux services de santé, qui autant que possible tiennent compte de leurs conditions économiques, géographiques, sociales et culturelles ainsi que de leurs traditions.
Article 32. Contacts et coopération à travers les frontières. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou les accords bilatéraux conclus pour donner effet à cette disposition de la convention. Prière notamment de fournir des informations concernant une coopération avec les pays voisins au sujet des populations autochtones déplacées suite au conflit et à la question de la transhumance.

Observation (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

Articles 2 et 3 de la convention. Protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones. Dans ses commentaires précédents, la commission a exprimé sa profonde préoccupation face au fait que la sécurité demeurait précaire dans le pays et face aux actes de violence qui ont fait des victimes parmi les communautés autochtones du pays et ont entraîné la fuite d’un grand nombre d’éleveurs, notamment de Mbororo partis s’exiler dans les pays limitrophes. La commission a prié les autorités nationales de transition de déployer davantage d’efforts pour assurer le plein respect des droits de l’homme à l’égard des peuples autochtones, et notamment à l’égard des enfants et des femmes des communautés aka et mbororo.
La commission note que dans son rapport le gouvernement indique que, suite à la crise que traverse le pays depuis 2013, il a relevé et constaté des déplacements massifs des peuples autochtones en général et plus particulièrement des Mbororo, contre leur gré, pour des raisons liées à l’insécurité. Il précise que, pendant la période de transition, les peuples mbororo et aka ont été identifiés et leurs représentants ont été nommés conseillers nationaux pour discuter, protéger et défendre leurs droits. Le gouvernement se réfère également aux garanties consacrées par la nouvelle Constitution de 2016 et notamment à l’article 6 qui prévoit que l’Etat assure la protection renforcée des droits des minorités, des peuples autochtones et des personnes handicapées. Le gouvernement indique que le Plan national de relèvement et de consolidation de la paix en République centrafricaine, adopté en octobre 2016, constitue une réponse urgente et immédiate aux besoins de toutes les couches de la population sans distinction aucune.
La commission prend note de différents documents des organes des Nations Unies qui examinent la situation en République centrafricaine et, notamment, des rapports du Secrétaire général sur la situation en République centrafricaine, de l’experte indépendante sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine et du Groupe d’experts sur la République centrafricaine (documents S/2018/922 du 15 octobre 2018, A/HRC/39/70 du 13 août 2018 et déclaration du 27 septembre 2018, S/2018/729 du 23 juillet 2018). La commission note que l’experte indépendante indique dans sa déclaration de septembre 2018 que «la situation des droits de l’homme s’illustre par une activité constante des groupes armés menant des attaques contre les civils, une autorité étatique encore trop faible, l’impunité dominante, des cas de discrimination fondée sur l’ethnie et la religion, une fragmentation sociale et la marginalisation de certaines populations». De manière générale, la commission observe qu’il ressort des informations contenues dans ces documents que si certains progrès ont pu être constatés, notamment dans le cadre de l’initiative de paix africaine et des accords de paix locaux, la situation sur le plan humanitaire et des droits de l’homme reste préoccupante avec une prolifération des zones d’affrontements, de constants abus et violations des droits de l’homme liés à la persistance des attaques par divers groupes armés, des violences intercommunautaires, et un nombre considérable de personnes déplacées. La commission note par ailleurs que, dans ses observations finales du 4 mai 2018, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies exprime sa préoccupation face à «la marginalisation persistante, la pauvreté et l’extrême vulnérabilité des populations autochtones (Mbororo et Aka) qui continuent de se heurter à d’importants obstacles dans la jouissance des droits énoncés dans le pacte, situation qui s’est détériorée dans le cadre du conflit en République centrafricaine».
La commission note avec une profonde préoccupation l’ensemble de ces informations. Tout en reconnaissant la complexité de la situation dans le pays, la commission prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre fin aux violences et violations des droits de l’homme subies par la population civile et notamment celles dont sont victimes les peuples autochtones qui ont été contraints de quitter leurs territoires. La commission veut croire que la mise en œuvre du Plan national de relèvement et de consolidation de la paix en République centrafricaine permettra de rétablir l’ordre, la sécurité et la stabilité dans le pays de manière à garantir aux peuples mbororo et aka le bénéfice des droits prévus dans la convention, de protéger leur intégrité et de permettre le retour des personnes déplacées au sein de leur communauté. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises à cette fin et de préciser la manière dont les peuples autochtones et leurs représentants ont participé à la définition et à la mise en œuvre des mesures les concernant.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2015, publiée 105ème session CIT (2016)

Le gouvernement se réfère dans son rapport aux dispositions de la loi no 13.001 du 18 juillet 2013 portant Charte constitutionnelle de transition. La commission espère que le prochain rapport fournira des informations complètes sur les points suivants.
Article 1 de la convention. Auto-identification. La commission prie le gouvernement de préciser l’importance numérique des peuples Aka et Mbororo et les régions où ils habitent.
Article 2. Action systématique développée avec la participation des peuples intéressés. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures adoptées, avec la participation des représentants des peuples Aka et Mbororo, pour développer une action coordonnée et systématique en vue de protéger les droits des peuples concernés. Elle prie également le gouvernement d’indiquer comment les peuples autochtones ont été associés à la mise en œuvre de ces mesures.
Article 3. Mise en œuvre des droits de l’homme sans discrimination. La commission prie le gouvernement de décrire toutes les mesures adoptées afin de garantir que les peuples autochtones puissent jouir pleinement des droits de l’homme et des libertés fondamentales sans entrave ni discrimination.
Article 4. Mesures spéciales. La commission avait précédemment noté que l’arrêté ministériel du 1er août 2003 portant interdiction d’exploitation et/ou d’exportation des traditions orales des minorités culturelles de Centrafrique à des fins commerciales a établi le principe de l’illégalité de l’exploitation des traditions orales des minorités culturelles. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les autres mesures spéciales adoptées qui se seraient avérées appropriées en vue de sauvegarder les personnes, les institutions, les biens, le travail, la culture et l’environnement des peuples Aka et Mbororo.
Article 5. Reconnaissance des valeurs des peuples autochtones. La commission avait noté que la loi no 06.002 du 10 mai 2006 portant Charte culturelle de la République centrafricaine avait comme objectif de protéger les patrimoines culturels nationaux, notamment les itinéraires et les aires culturelles des minorités ethniques. La charte met aussi en avant le dialogue interculturel et la promotion de la diversité culturelle de la République centrafricaine. Les traditions orales des Pygmées Aka de Centrafrique ont été proclamées œuvre du patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) en 2003. La commission prie le gouvernement d’indiquer la manière dont la participation et la coopération des peuples autochtones ont été assurées afin de reconnaître et protéger leurs valeurs et pratiques sociales, culturelles, religieuses et spirituelles, et respecter l’intégrité de leurs institutions.
Articles 6 et 7. Mécanisme approprié de consultation et de participation. La commission note qu’il n’existe pas de processus systématique de consultation des peuples autochtones dans les affaires les concernant. Elle note également que le décret no 07.293 du 11 octobre 2007 régissant le Conseil économique et social a établi que les communautés autochtones Aka et Mbororo soient représentées par une personne chacune. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures adoptées afin d’établir, conformément à la convention, un mécanisme approprié de consultation et de participation. Elle demande au gouvernement de garantir que les peuples autochtones soient consultés et puissent participer de manière appropriée, à travers leurs entités représentatives, à l’élaboration dudit mécanisme, et ce de telle manière qu’ils puissent exprimer leur avis et influer sur le résultat final du processus.
Article 8. Droit coutumier. La commission prie le gouvernement de fournir des exemples de l’application de l’article 8 de la convention dans la pratique.
Article 10. Sanctions. La commission prie le gouvernement de fournir des exemples de l’application de l’article 10 de la convention dans la pratique.
Article 11. Interdiction de la prestation obligatoire de services personnels. La commission note que le Code du travail interdit le travail forcé ou obligatoire de façon absolue sous toutes ses formes, notamment en tant que méthode de mobilisation et d’utilisation de la main-d’œuvre à des fins de développement économique ou en tant que mesure de discrimination raciale, sociale, nationale ou religieuse. Se référant à sa demande directe de 2014 concernant l’application de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, la commission prie le gouvernement d’indiquer les méthodes de surveillance employées et les sanctions prescrites assurant l’application des dispositions de cet article de la convention. Elle espère que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires afin d’interdire la prestation obligatoire de services personnels.
Article 12. Procédures légales. La commission avait précédemment noté que le système réglementaire en place ne prévoit pas que les autorités et les tribunaux prennent en considération les difficultés linguistiques que les peuples autochtones peuvent rencontrer. La commission prie le gouvernement de fournir de plus amples informations sur les mesures prises pour assurer que les peuples Aka et Mbororo soient à même de comprendre et de se faire comprendre dans le cadre des procédures légales. Elle prie également le gouvernement d’indiquer comment il est assuré que les organisations représentatives des Aka et Mbororo puissent engager une procédure légale pour assurer les droits prévus par la convention.
Partie II. Terres. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises pour identifier les terres que les peuples intéressés occupent traditionnellement et pour garantir la protection effective des droits des peuples autochtones à ces terres (article 14). Prière également d’indiquer les mesures prises pour donner effet aux articles 17 à 19 de la convention.
Article 15. Ressources naturelles. La commission note que la loi no 08.022 du 17 octobre 2008 portant Code forestier de la République centrafricaine prévoit que la forêt maintient la fertilité des sols, génère de nombreux services environnementaux et contribue à la séquestration du carbone, à la survie et au bien-être des populations, notamment des peuples qui y sont culturellement et intimement associés. Le code prévoit également que toute concession d’une partie du domaine forestier de l’Etat en vue d’une exploitation industrielle est subordonnée à une consultation préalable des populations riveraines, y compris les peuples autochtones. De plus, le Code forestier, qui couvre le domaine forestier national, établit le principe de propriété de l’Etat et de droit d’usage pour les peuples autochtones sur le domaine forestier de l’Etat. Le code met en place un système de forêts communautaires qui potentiellement permet une gestion directe des ressources forestières par les communautés autochtones. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises pour sauvegarder les droits des peuples autochtones en ce qui concerne les forêts. Elle prie le gouvernement d’indiquer les moyens par lesquels les droits des peuples Aka et Mbororo sur les autres ressources naturelles sont spécialement sauvegardés et la manière dont ces droits s’exercent. Elle invite également le gouvernement à indiquer quelles sont les procédures qui existent pour établir la participation des peuples autochtones aux avantages de l’exploitation des ressources dont sont dotées leurs terres.
Article 16. Déplacement. La commission prie le gouvernement de rendre compte des dispositions garantissant que, lorsque le déplacement des peuples autochtones est nécessaire, leur consentement, donné librement et en toute connaissance de cause, est recherché et que, si celui-ci ne peut être obtenu, le déplacement n’a lieu que conformément à des procédures établies par la législation nationale (article 16, paragraphe 2).
Partie III. Recrutement et conditions d’emploi. La commission prie le gouvernement de rendre compte des mesures adoptées en coopération avec les peuples Aka et Mbororo pour assurer, en ce qui les concerne, une protection effective en matière de recrutement et de conditions d’emploi. Prière d’indiquer quelles mesures ont été prises pour assurer des services adéquats d’inspection du travail dans les régions où vivent les peuples autochtones.
Partie IV. Articles 21, 22 et 23. Formation professionnelle, artisanat et industries rurales. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises afin que les peuples autochtones puissent bénéficier de la formation professionnelle en conformité avec les articles 21 à 23 de la convention.
Partie V. Sécurité sociale et santé. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises afin que les régimes de sécurité sociale soient progressivement étendus aux peuples Aka et Mbororo.
Partie VI. Education et moyens de communication. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises pour donner effet aux articles 26 à 31 de la convention.
Partie VII. Article 32. Contacts et coopération à travers les frontières. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises et les traités bilatéraux conclus pour donner effet à cette disposition de la convention.

Observation (CEACR) - adoptée 2015, publiée 105ème session CIT (2016)

Article 3 de la convention. Droits de l’homme et libertés fondamentales des peuples autochtones. Le gouvernement se réfère dans son rapport aux dispositions de la loi no 13.001 du 18 juillet 2013 portant Charte constitutionnelle de transition. Dans ses commentaires précédents, la commission avait mis l’accent sur les violences ciblant des membres des peuples Aka et Mbororo, protégés par la convention, ainsi que sur l’aggravation de l’insécurité et des tensions intercommunautaires dans le pays. La commission note que, en date du 28 avril 2015, le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté la résolution 2217 (2015) où il constate avec préoccupation que la sécurité en République centrafricaine demeure précaire et condamne les violations généralisées des droits de l’homme et les exactions à l’égard des minorités. La commission exprime à nouveau sa profonde préoccupation devant les actes de violence qui ont fait des victimes parmi les communautés autochtones du pays et qui ont entraîné la fuite d’un grand nombre d’éleveurs et notamment de Mbororo partis s’exiler dans les pays limitrophes. La commission prie instamment toutes les parties de ne pas recourir à la violence et de rétablir le dialogue entre les différentes communautés. A l’instar du Conseil de sécurité des Nations Unies, la commission rappelle qu’il incombe aux autorités de la République centrafricaine de protéger toutes les populations du pays, et elle prie à nouveau les autorités nationales de transition de déployer davantage d’efforts pour assurer le plein respect des droits de l’homme à l’égard des peuples autochtones, et notamment à l’égard des enfants et des femmes des communautés Aka et Mbororo. La commission exprime également son souhait de voir le BIT apporter une contribution à la recherche d’une solution durable donnant toute leur place aux normes internationales du travail.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2014, publiée 104ème session CIT (2015)

Article 1 de la convention. Auto-identification. Le gouvernement indique dans son rapport que les populations Aka et Mbororo constituent les peuples autochtones de la République centrafricaine. La commission prie le gouvernement de préciser l’importance numérique des populations Aka et Mbororo et les régions où elles habitent.
Article 2. Action systématique développée avec la participation des peuples intéressés. Le gouvernement indique que, de manière institutionnelle, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme et à la bonne gouvernance est particulièrement actif en ce qui concerne les droits des peuples autochtones. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures adoptées, avec la participation des représentants des populations Aka et Mbororo, pour développer une action coordonnée et systématique en vue de protéger les droits des peuples concernés. Elle invite également le gouvernement à indiquer comment les peuples autochtones ont été associés à la mise en œuvre de ces mesures.
Article 3. Mise en œuvre des droits de l’homme sans discrimination. Le gouvernement indique que le Code pénal centrafricain renforce la protection contre la discrimination. La commission prie le gouvernement de décrire toutes les mesures adoptées afin de garantir que les peuples autochtones puissent jouir pleinement des droits de l’homme et des libertés fondamentales sans entrave ni discrimination.
Article 4. Mesures spéciales. Le gouvernement indique que l’arrêté ministériel du 1er août 2003 portant interdiction d’exploitation et/ou d’exportation des traditions orales des minorités culturelles de Centrafrique à des fins commerciales a établi le principe de l’illégalité de l’exploitation des traditions orales des minorités culturelles. Le gouvernement indique que cet arrêté peut être perçu comme une mesure spéciale de protection dans le sens où il s’agit d’un processus temporaire de protection et qu’il protège spécifiquement des populations ayant souffert dans le passé. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les autres mesures spéciales adoptées qui se seraient avérées appropriées en vue de sauvegarder les personnes, les institutions, les biens, le travail, la culture et l’environnement des populations Aka et Mbororo.
Article 5. Reconnaissance des valeurs des peuples autochtones. Le gouvernement indique que la loi no 06.002 du 10 mai 2006 portant charte culturelle de la République centrafricaine a été promulguée avec l’objectif de protéger les patrimoines culturels nationaux, notamment les itinéraires et les aires culturelles des minorités ethniques. La charte met aussi en avant le dialogue interculturel et la promotion de la diversité culturelle de la République centrafricaine. Le gouvernement indique également dans son rapport que d’autres mesures pratiques ont déjà été prises, notamment la proclamation des traditions orales des Pygmées Aka de Centrafrique comme œuvre du patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) en 2003 et la construction d’un centre culturel à Mbaïki, dans la Lobaye, avec l’aide de l’ONG Caritas. Le gouvernement ajoute toutefois que le manque de référence directe aux droits culturels des peuples autochtones demeure une lacune importante. La commission prie le gouvernement d’indiquer la manière dont la participation et la coopération des peuples autochtones ont été assurées afin de reconnaître et protéger leurs valeurs et pratiques sociales, culturelles, religieuses et spirituelles, et respecter l’intégrité de leurs institutions.
Articles 6 et 7. Mécanisme approprié de consultation et de participation. Le gouvernement indique dans son rapport que, d’une manière générale, il n’existe pas de processus systématique de consultation des peuples autochtones dans les affaires les concernant. Il indique que son défi est l’instauration des mécanismes institutionnels visant à garantir la consultation et la participation des peuples autochtones. Le gouvernement précise dans son rapport que le décret no 07.293 du 11 octobre 2007 régissant le Conseil économique et social établit que les communautés autochtones Mbororo et Aka y sont représentées par une personne chacune. La commission prie le gouvernement d’inclure dans son prochain rapport des informations sur les mesures adoptées afin d’établir, conformément à la convention, un mécanisme approprié de consultation et de participation. Elle demande au gouvernement de garantir que les peuples autochtones sont consultés et peuvent participer de manière appropriée, à travers leurs entités représentatives, à l’élaboration dudit mécanisme, et ce de telle manière qu’ils puissent exprimer leur avis et influer sur le résultat final du processus.
Article 8. Droit coutumier. Le gouvernement indique dans son rapport que, bien qu’il n’existe pas de reconnaissance formelle et législative des formes traditionnelles de gestion de la justice au sein des peuples autochtones, il existe une reconnaissance informelle (et pratique) du droit coutumier au sein des communautés autochtones Aka. La commission prie le gouvernement de fournir des exemples de l’application de l’article 8 de la convention dans la pratique.
Article 10. Sanctions. La commission prie le gouvernement de fournir des exemples de l’application de l’article 10 de la convention dans la pratique.
Article 11. Interdiction de la prestation obligatoire de services personnels. Le gouvernement indique dans son rapport que le Code du travail prévoit que le travail forcé ou obligatoire est interdit de façon absolue sous toutes ses formes, notamment en tant que méthode de mobilisation et d’utilisation de la main d’œuvre à des fins de développement économique ou en tant que mesure de discrimination raciale, sociale, nationale ou religieuse. La commission se réfère à sa demande directe de 2011 concernant l’application de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, où elle avait pris note des informations sur l’exploitation des travailleurs autochtones Aka et avait demandé au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires afin que soit mise en place une structure nationale qui examine la situation des populations Aka et, en particulier, les cas présumés de servitude dont elles seraient victimes, et que des sanctions soient imposées contre les coupables. La commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les méthodes de surveillance employées et les sanctions prescrites assurant l’application des dispositions de cet article de la convention. Elle espère que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires afin d’interdire la prestation obligatoire de services personnels.
Article 12. Procédures légales. Le gouvernement indique dans son rapport que le système réglementaire en place ne prévoit pas que les autorités et les tribunaux prennent en considération les difficultés linguistiques que les peuples autochtones peuvent rencontrer. Le gouvernement indique également dans son rapport que la question de l’accès à la justice reste un défi important car les peuples autochtones sont souvent victimes d’exploitation, de violation de leurs droits fondamentaux au travail et de violences, et la perspective d’accéder à la justice reste marginale. Les défis sont aussi de nature financière car l’accès à la justice est souvent rendu impossible par le manque de moyens financiers. La commission prie le gouvernement de fournir de plus amples informations sur les mesures prises pour assurer que les populations Aka et Mbororo soient à même de comprendre et de se faire comprendre dans le cadre des procédures légales. Elle prie également le gouvernement d’indiquer comment il est assuré que les organisations représentatives des populations Aka et Mbororo peuvent engager une procédure légale pour assurer les droits prévus par la convention.
Partie II. Terres. Le gouvernement indique dans son rapport qu’il serait nécessaire de reconnaître de manière normative l’importance du droit à la terre pour les peuples autochtones, notamment l’aspect culturel de cet attachement. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises pour identifier les terres concernées et pour garantir la protection effective des droits des peuples autochtones à ces terres (article 14). Prière également d’indiquer les mesures prises pour donner effet aux articles 17 à 19 de la convention.
Article 15. Ressources naturelles. Le gouvernement indique que la loi no 08.022 du 17 octobre 2008 portant Code forestier de la République centrafricaine prend en considération l’approche spécifique des peuples autochtones avec les forêts. Le Code forestier prévoit que la forêt maintient la fertilité des sols, génère de nombreux services environnementaux et contribue à la séquestration du carbone, à la survie et au bien-être des populations, notamment des peuples qui y sont culturellement et intimement associés. Le code prévoit également que toute concession d’une partie du domaine forestier de l’Etat en vue d’une exploitation industrielle est subordonnée à une consultation préalable des populations riveraines, y compris les peuples autochtones. De plus, le Code forestier, qui couvre le domaine forestier national, établit le principe de propriété de l’Etat et de droit d’usage pour les peuples autochtones sur le domaine forestier de l’Etat. Le code met en place un système de forêts communautaires qui potentiellement permet une gestion directe des ressources forestières par les communautés autochtones. La commission note également les informations concernant le Code de l’environnement et le Code minier. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises pour sauvegarder les droits des peuples autochtones en ce qui concerne les forêts. Elle prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les moyens par lesquels les droits des populations Aka et Mbororo sur les autres ressources naturelles sont spécialement sauvegardés et la manière dont ces droits s’exercent. Elle invite également le gouvernement à indiquer quelles sont les procédures qui existent pour établir la participation des peuples autochtones aux avantages de l’exploitation des ressources dont sont dotées leurs terres.
Article 16. Déplacement. Le gouvernement indique dans son rapport qu’aucun cas de déplacement de groupes appartenant aux peuples autochtones de leurs territoires habituels n’a été signalé. La commission prie le gouvernement de rendre compte des dispositions garantissant que, lorsque le déplacement des peuples autochtones est nécessaire, leur consentement, donné librement et en toute connaissance de cause, est recherché et que, si celui-ci ne peut être obtenu, le déplacement n’a lieu que conformément à des procédures établies par la législation nationale (article 16, paragraphe 2).
Partie III. Recrutement et conditions d’emploi. Le gouvernement précise dans son rapport que, de manière générale, la loi ne prévoit pas de protection particulière pour les peuples autochtones. L’un des défis concernant les conditions de travail des peuples autochtones réside dans le fait que, dans la plupart des cas, leur travail a lieu en dehors de tout cadre formel d’un contrat de travail. La grande majorité des autochtones travaillent en dehors du secteur formel, n’ayant ainsi pas accès à la protection offerte par la législation du travail qui concerne principalement le secteur formel de l’économie. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures envisagées en application de l’article 20 de la convention. Elle prie le gouvernement de rendre compte des mesures adoptées en coopération avec les populations Aka et Mbororo pour assurer, en ce qui les concerne, une protection effective en matière de recrutement et de conditions d’emploi des travailleurs. Prière d’indiquer quelles mesures ont été prises pour assurer des services adéquats d’inspection du travail dans les régions où habitent les peuples autochtones.
Partie IV. Formation professionnelle, artisanat et industries rurales. Le gouvernement indique qu’il n’existe pas de politique nationale mise en place pour rendre compatibles le contenu, la méthode d’enseignement, ainsi que les calendriers du système éducatif national avec le mode de vie des peuples autochtones qui sont en majorité semi-nomades. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises afin que les peuples autochtones puissent bénéficier de la formation professionnelle, et ainsi assurer la mise en œuvre des articles 21, 22 et 23 de la convention.
Partie V. Sécurité sociale et santé. Le gouvernement indique dans son rapport qu’il a adopté un Plan national de développement de la santé (PNDS) 2006-2015 qui a notamment comme objectif de prêter une attention particulière aux populations les plus défavorisées. Toutefois, le cadre législatif et opérationnel régissant la sécurité sociale ne fournit pas de garantie sur la couverture des questions de santé des peuples autochtones. La commission note que les communautés autochtones ont très peu accès aux centres de soins, soit par le fait de leur isolement géographique, soit pour des raisons financières. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises afin que les régimes de sécurité sociale soient progressivement étendus aux populations Aka et Mbororo. Elle invite également le gouvernement à fournir une évaluation du PNDS et son impact sur les peuples autochtones.
Partie VI. Education et moyens de communication. Le gouvernement indique que le Plan national d’action de l’éducation pour tous (PNA-EPT) 2004 2015 se fixe comme objectif de relever le niveau d’accès des groupes minoritaires. Le plan appelle aussi à la mise en place d’un cadre juridique en faveur des personnes handicapées et des minorités. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises pour donner effet aux articles 26 à 31 de la convention. Elle invite également le gouvernement à fournir une évaluation du PNA-EPT et son impact sur les peuples autochtones.
Partie VII. Contacts et coopération à travers les frontières. Le gouvernement indique dans son rapport que, au niveau régional la Communauté économique et monétaire en Afrique centrale (CEMAC) a établi un comité sous régional qui se réunit chaque année pour gérer de manière concertée la transhumance effectuée par les peuples autochtones Mbororo. La commission prie le gouvernement de fournir de plus amples informations sur les activités du comité sous-régional de la CEMAC et sur le fonctionnement des traités bilatéraux dans les domaines couverts par la convention (article 32).

Observation (CEACR) - adoptée 2014, publiée 104ème session CIT (2015)

Suivi de la discussion de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 103e session, mai-juin 2014).

Article 3 de la convention. Droits de l’homme et libertés fondamentales des peuples autochtones. La commission a pris note des questions abordées pendant la discussion tripartite portant sur la situation très préoccupante dans laquelle se trouvait le pays, caractérisée notamment par des violences ciblant des membres des peuples Aka et Mbororo, protégés par la convention, ainsi que par une aggravation de l’insécurité et des tensions intercommunautaires. La commission note que le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté à l’unanimité, le 10 avril 2014, la résolution no 2149 (2014) créant la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA). La commission exprime à nouveau sa profonde préoccupation devant les actes de violence qui ont fait des victimes parmi les communautés autochtones du pays et qui ont entraîné la fuite d’un grand nombre d’éleveurs et notamment de Mbororo partis s’exiler dans les pays limitrophes. Elle prie instamment toutes les parties de ne pas recourir à la violence et de rétablir le dialogue entre les différentes communautés. La commission invite les autorités nationales de transition à déployer davantage d’efforts pour assurer le plein respect des droits de l’homme à l’égard des peuples autochtones, et notamment des enfants et des femmes des ethnies Aka et Mbororo. La commission espère que l’ordre institutionnel et public sera rétabli dans le pays et elle invite les autorités gouvernementales à appliquer pleinement la convention. Elle exprime également son souhait de voir le BIT apporter une contribution à la recherche d’une solution durable donnant toute leur place aux normes internationales du travail.
La commission a pris note de la communication datée du 1er septembre 2014 par laquelle l’Organisation internationale des employeurs (OIE) mentionne la République centrafricaine dans ses observations concernant l’application de la convention. La commission invite le gouvernement à présenter les commentaires qu’il jugera opportuns concernant les observations de l’OIE.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

Article 1 de la convention. Auto-identification. Le gouvernement indique dans son rapport que les populations Aka et Mbororo constituent les peuples autochtones de la République centrafricaine. La commission invite le gouvernement à préciser dans son prochain rapport l’importance numérique des populations Aka et Mbororo et les régions où elles habitent.
Article 2. Action systématique développée avec la participation des peuples intéressés. Le gouvernement indique que, de manière institutionnelle, le Haut Commissariat aux droits de l’homme et à la bonne gouvernance est particulièrement actif en ce qui concerne les droits des peuples autochtones. La commission invite le gouvernement à communiquer des informations sur les mesures adoptées, avec la participation des représentants des populations Aka et Mbororo, pour développer une action coordonnée et systématique en vue de protéger les droits des peuples concernés. Elle invite également le gouvernement à indiquer comment les peuples autochtones ont été associés à la mise en œuvre de ces mesures.
Article 3. Mise en œuvre des droits de l’homme sans discrimination. Le gouvernement indique que le Code pénal centrafricain renforce la protection contre la discrimination. La commission invite le gouvernement à décrire toutes les mesures adoptées afin de garantir que les peuples autochtones puissent jouir pleinement des droits de l’homme et des libertés fondamentales, sans entrave ni discrimination.
Article 4. Mesures spéciales. Le gouvernement indique que l’arrêté ministériel du 1er août 2003 portant interdiction d’exploitation et/ou d’exportation des traditions orales des minorités culturelles de Centrafrique à des fins commerciales a établi le principe de l’illégalité de l’exploitation des traditions orales des minorités culturelles. Le gouvernement indique que cet arrêté peut être perçu comme une mesure spéciale de protection dans le sens où il s’agit d’un processus temporaire de protection et qu’il protège spécifiquement des populations ayant souffert dans le passé. La commission invite le gouvernement à communiquer des informations sur les autres mesures spéciales adoptées qui se seraient avérées appropriées en vue de sauvegarder les personnes, les institutions, les biens, le travail, la culture et l’environnement des populations Aka et Mbororo.
Article 5. Reconnaissance des valeurs des peuples autochtones. Le gouvernement indique que la loi no 06.002 du 10 mai 2006 portant charte culturelle de la République centrafricaine a été promulguée avec l’objectif de protéger les patrimoines culturels nationaux, notamment les itinéraires et les aires culturelles des minorités ethniques. La charte met aussi en avant le dialogue interculturel et la promotion de la diversité culturelle de la République centrafricaine. Le gouvernement indique également dans son rapport que d’autres mesures pratiques ont déjà été prises, notamment la proclamation des traditions orales des Pygmées Aka de Centrafrique comme œuvre du patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO en 2003 et la construction d’un centre culturel à Mbaïki, dans la Lobaye, avec l’aide de l’ONG Caritas. Le gouvernement ajoute toutefois que le manque de référence directe aux droits culturels des peuples autochtones demeure une lacune importante. La commission invite le gouvernement à indiquer la manière dont la participation et la coopération des peuples autochtones ont été assurées afin de reconnaître et protéger leurs valeurs et pratiques sociales, culturelles, religieuses et spirituelles, et respecter l’intégrité de leurs institutions.
Articles 6 et 7. Mécanisme approprié de consultation et de participation. Le gouvernement indique dans son rapport que, d’une manière générale, il n’existe pas de processus systématique de consultation des peuples autochtones dans les affaires les concernant. Il indique que son défi est l’instauration des mécanismes institutionnels visant à garantir la consultation et la participation des peuples autochtones. De manière générale, le droit des peuples autochtones de décider de leurs propres priorités quant au processus du développement est très peu développé dans la législation. En ce qui concerne la participation aux décisions les affectant, la Constitution de 2004 établissait le Conseil économique et social et stipulait qu’il est obligatoirement consulté sur tout plan ou tout projet de loi de programme d’action à caractère social ou culturel. Le gouvernement précise dans son rapport que le décret no 07.293 du 11 octobre 2007 régissant le Conseil économique et social établit que les communautés autochtones Mbororo et Aka y sont représentées par une personne chacune. La commission invite le gouvernement à inclure dans son prochain rapport des informations sur les mesures adoptées afin d’établir, conformément à la convention, un mécanisme approprié de consultation et de participation. Elle demande au gouvernement de garantir que les peuples autochtones sont consultés et peuvent participer de manière appropriée, à travers leurs entités représentatives, à l’élaboration dudit mécanisme, et ce de telle manière qu’ils puissent exprimer leur avis et influer sur le résultat final du processus.
Article 8. Droit coutumier. Le gouvernement indique dans son rapport que, bien qu’il n’existe pas de reconnaissance formelle et législative des formes traditionnelles de gestion de la justice au sein des peuples autochtones, il existe une reconnaissance informelle (et pratique) du droit coutumier au sein des communautés autochtones Aka. La commission invite le gouvernement à fournir des exemples de l’application de l’article 8 de la convention dans la pratique.
Article 10. Sanctions. La commission invite le gouvernement à fournir des exemples de l’application de l’article 10 de la convention dans la pratique.
Article 11. Interdiction de la prestation obligatoire de services personnels. Le gouvernement indique dans son rapport que le Code du travail prévoit que le travail forcé ou obligatoire est interdit de façon absolue sous toutes ses formes, notamment en tant que méthode de mobilisation et d’utilisation de la main d’œuvre à des fins de développement économique ou en tant que mesure de discrimination raciale, sociale, nationale ou religieuse. La commission se réfère à sa demande directe de 2011 concernant l’application de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, où elle avait pris note des informations sur l’exploitation des travailleurs autochtones Aka et avait demandé au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires afin que soit mise en place une structure nationale qui examine la situation des populations Aka et, en particulier, les cas présumés de servitude dont elles seraient victimes, et que des sanctions soient imposées contre les coupables. La commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les méthodes de surveillance employées et les sanctions prescrites assurant l’application des dispositions de cet article de la convention. Elle espère que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires afin d’interdire la prestation obligatoire de services personnels.
Article 12. Procédures légales. Le gouvernement indique dans son rapport que le système réglementaire en place ne prévoit pas que les autorités et les tribunaux chargés de ces affaires prennent en considération les difficultés linguistiques que les peuples autochtones peuvent rencontrer. Le gouvernement indique également dans son rapport que la question de l’accès à la justice reste un défi important car les peuples autochtones sont souvent victimes d’exploitation, de violations de leurs droits fondamentaux au travail et de violences, et la perspective d’accéder à la justice reste marginale. Les défis sont aussi de nature financière car l’accès à la justice est souvent rendu impossible par le manque de moyens financiers. La commission invite le gouvernement à fournir de plus amples informations sur les mesures prises pour assurer que les populations Aka et Mbororo soient à même de comprendre et de se faire comprendre dans le cadre des procédures légales. Elle prie également le gouvernement d’indiquer comment il est assuré que les organisations représentatives des Aka et Mbororo peuvent engager une procédure légale pour assurer les droits prévus par la convention.
Partie II. Terres. Le gouvernement indique dans son rapport qu’il serait nécessaire de reconnaître de manière normative l’importance du droit à la terre pour les peuples autochtones, notamment l’aspect culturel de cet attachement. La commission invite le gouvernement à indiquer les mesures prises pour identifier les terres concernées et pour garantir la protection effective des droits des peuples autochtones à ces terres (article 14). Prière d’indiquer les mesures prises pour donner effet aux articles 17 à 19 de la convention.
Article 15. Ressources naturelles. Le gouvernement indique que la loi no 08.022 du 17 octobre 2008 portant Code forestier de la République centrafricaine prend en considération l’approche spécifique des peuples autochtones avec les forêts. Le Code forestier prévoit que la forêt maintient la fertilité des sols, génère de nombreux services environnementaux et contribue à la séquestration du carbone, à la survie et au bien-être des populations, notamment des peuples qui y sont culturellement et intimement associés. Le code prévoit également que toute concession d’une partie du domaine forestier de l’Etat en vue d’une exploitation industrielle est subordonnée à une consultation préalable des populations riveraines, y compris les peuples autochtones. De plus, le Code forestier, qui couvre le domaine forestier national, établit le principe de propriété de l’Etat et de droit d’usage pour les peuples autochtones sur le domaine forestier de l’Etat. Le code met en place un système de forêts communautaires qui potentiellement permet une gestion directe des ressources forestières par les communautés autochtones. La commission note également les informations concernant le Code de l’environnement et le Code minier. La commission invite le gouvernement à fournir des exemples de mesures prises pour sauvegarder les droits des peuples autochtones en ce qui concerne les forêts. Elle prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les moyens par lesquels les droits des populations Aka et Mbororo sur les autres ressources naturelles sont spécialement sauvegardés et la manière dont ces droits s’exercent. Elle invite également le gouvernement à indiquer quelles sont les procédures qui existent pour établir la participation des peuples autochtones aux avantages de l’exploitation des ressources dont sont dotées leurs terres.
Article 16. Déplacement. Le gouvernement indique dans son rapport qu’aucun cas de déplacement de groupes appartenant aux peuples autochtones de leurs territoires habituels n’a été signalé. La commission prie le gouvernement de rendre compte des dispositions garantissant que, lorsque le déplacement des peuples autochtones est nécessaire, leur consentement, donné librement et en toute connaissance de cause, est recherché et que, si celui-ci ne peut être obtenu, le déplacement n’a lieu que conformément à des procédures établies par la législation nationale (article 16, paragraphe 2).
Partie III. Recrutement et conditions d’emploi. Le gouvernement précise dans son rapport que, de manière générale, la loi ne prévoit pas de protection particulière pour les peuples autochtones. L’un des défis concernant les conditions de travail des peuples autochtones réside dans le fait que, dans la plupart des cas, leur travail a lieu en dehors de tout cadre formel d’un contrat de travail. La grande majorité des autochtones travaillent en dehors du secteur formel, n’ayant ainsi pas accès à la protection offerte par la législation du travail qui concerne principalement le secteur formel de l’économie. La commission invite le gouvernement à fournir des informations sur les mesures envisagées en application de l’article 20 de la convention. Elle prie le gouvernement de rendre compte des mesures adoptées en coopération avec les populations Aka et Mbororo pour assurer, en ce qui les concerne, une protection effective en matière de recrutement et de conditions d’emploi des travailleurs appartenant aux peuples autochtones. Prière d’indiquer quelles mesures ont été prises pour assurer des services adéquats d’inspection du travail dans les régions où habitent les peuples autochtones.
Partie IV. Formation professionnelle, artisanat et industries rurales. Le gouvernement indique qu’il n’existe pas de politique nationale mise en place pour rendre compatibles le contenu, la méthode d’enseignement, ainsi que les calendriers du système éducatif national avec le mode de vie des peuples autochtones qui sont en majorité semi-nomades. La commission invite le gouvernement à indiquer les mesures prises afin que les peuples autochtones puissent bénéficier de la formation professionnelle, et ainsi assurer la mise en œuvre des articles 21, 22 et 23 de la convention.
Partie V. Sécurité sociale et santé. Le gouvernement indique dans son rapport qu’il a adopté un Plan national de développement de la santé (PNDS) 2006-2015 qui a notamment comme objectif de prêter une attention particulière aux populations les plus défavorisées. Toutefois, le cadre législatif et opérationnel régissant la sécurité sociale ne fournit pas de garantie sur la couverture des questions de santé des peuples autochtones. La commission note que les communautés autochtones ont très peu accès aux centres de soins, soit par le fait de leur isolement géographique, soit pour des raisons financières. La commission invite le gouvernement à indiquer les mesures prises afin que les régimes de sécurité sociale soient progressivement étendus aux populations Aka et Mbororo. Elle invite également le gouvernement à fournir une évaluation du PNDS et son impact sur les peuples autochtones.
Partie VI. Education et moyens de communication. Le gouvernement indique que le Plan national d’action de l’éducation pour tous (PNA-EPT) 2004 2015 se fixe comme objectif de relever le niveau d’accès des groupes minoritaires. Le plan appelle aussi à la mise en place d’un cadre juridique en faveur des personnes handicapées et des minorités. La commission invite le gouvernement à indiquer les mesures prises pour donner effet aux articles 26 à 31 de la convention. Elle invite également le gouvernement à fournir une évaluation du PNA-EPT et son impact sur les peuples autochtones.
Partie VII. Contacts et coopération à travers les frontières. Le gouvernement indique dans son rapport qu’au niveau régional la Communauté économique et monétaire en Afrique centrale (CEMAC) a établi un comité sous régional qui se réunit chaque année pour gérer de manière concertée la transhumance des peuples autochtones Mbororo. La commission invite le gouvernement à fournir de plus amples informations sur les activités du comité sous-régional de la CEMAC et sur le fonctionnement des traités bilatéraux dans les domaines couverts par la convention (article 32).
[Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2015.]

Observation (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

La commission prend note du premier rapport du gouvernement sur l’application de la convention, reçu en juin 2013. Elle rappelle que la République centrafricaine a été le premier pays d’Afrique à ratifier la convention, en 2010, et elle note la situation très préoccupante dans laquelle se trouve le pays depuis mars 2013 (résolutions 2121 (2013) et 2127 (2013) du Conseil de sécurité des Nations Unies adoptées le 10 octobre 2013 et le 5 décembre 2013, respectivement). A l’instar du Conseil de sécurité, la commission se déclare particulièrement préoccupée par les informations faisant état de violences ciblant des membres des groupes ethniques protégés par la convention no 169, ainsi que d’une aggravation des tensions intercommunautaires. La commission prie instamment toutes les parties prenantes, et notamment les autorités gouvernementales, d’assurer le plein respect des droits de l’homme à l’égard des peuples autochtones, et notamment les enfants et des femmes des ethnies Aka et Mbororo (article 3 de la convention). La commission espère que l’ordre institutionnel et public sera rétabli dans le pays et elle invite les autorités gouvernementales à appliquer pleinement la convention.
[Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2015.]
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