National Legislation on Labour and Social Rights
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Employment protection legislation database
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Un représentant gouvernemental a rappelé que son pays figurait pour la convention no 111 au paragraphe 98 du rapport de la commission d'experts parmi les cas de progrès. Aussi, il s'est quelque peu étonné que ce cas fasse l'objet des discussions au sein de la présente commission. S'agissant de la situation des fonctionnaires licenciés ou mutés entre 1980 et 1987, l'adoption par le Conseil d'Etat de la décision du 7 décembre 1989, dont la commission d'experts a pris note avec satisfaction, implique que toute la jurisprudence y relative a été unifiée de manière à dissiper toute confusion. En raison de cette évolution, tous les problèmes relatifs à la réintégration et au retour des fonctionnaires publics qui avaient été soit licenciés, soit mutés pendant l'application de la loi martiale ont été fondamentalement résolus, et il en est de même des questions relatives aux indemnités. La mise en oeuvre de la décision du Conseil d'Etat continue à être appliquée. Il est également pris note de l'avis de l'avocat général du Conseil d'Etat selon lequel l'article 4 de la convention devrait être en tous points respecté.
Aux termes de l'article 48 de la loi no 657 sur la fonction publique, les fonctionnaires publics pour pouvoir être réintégrés ne doivent pas être privés de leurs droits civiques. Cette exigence est liée à l'article 31 du Code pénal selon lequel la privation des droits civiques peut être soit permanente, soit temporaire. La réclusion d'une durée supérieure à cinq ans entraîne la privation permanente des droits civiques. Quant à la réclusion pour une durée de trois à cinq ans, elle entraîne une privation temporaire des droits civiques d'une durée équivalente à celle de la condamnation. Le Code pénal contient également des dispositions permettant de lever ladite privation dans les conditions prescrites. Il en découle que l'expression "ne devant pas être privé des droits civiques" figurant à l'article 48 susmentionné signifie ne pas avoir été condamné en vertu des dispositions pertinentes du Code pénal. Les fonctionnaires, dont les demandes de réintégration ont été refusées, peuvent toujour s'adresser directement aux tribunaux pour demander la levée des restrictions imposées, comformément aux dispositions du Code pénal. La majorité des personnes qui ont été affectées par de telles condamnations se sont vu restaurées dans leurs droits, étant donné que la loi no 3713 qui est entrée en vigueur le 12 mai 1991 a déclaré nuls les délits qui ont donné lieu aux condamnations. Ces personnes peuvent donc être réintégrées. En outre, toute personne qui estime avoir fait l'objet d'un traitement inéquitable peut faire appel à la Commission des droits de l'homme qui a été établie par le Parlement. Nul ne peut désormais prétendre en Turquie être privé de ses droits de recours. Les informations communiquées à la commission d'experts mentionnaient 358 fonctionnaires dont la réintégration avait été refusée. Depuis lors, ce nombre a été réduit à 197 à la suite notamment de l'entrée en vigueur de la nouvelle législation. Il n'a pas été possible pour ces fonctionnaires d'être réintégrés car ils avaient été soit privés de leurs droits civiques conformément au droit pénal, soit condamnés pour des délits infamants tels que corruption, vol, escroquerie et fraude aux termes de la loi no 657.
Sur les soixante-douze membres de l'université qui avaient demandé leur réintégration, 68 ont été réintégrés dans leur poste à la suite des mesures adoptées et en particulier de la création de postes supplémentaires, conformément à la décision du Conseil d'Etat. En ce qui concerne les quatre membres de l'université qui se sont vu refuser leur réintégration, le premier avait perdu ses qualifications en tant que fonctionnaire, le recours du deuxième avait été refusé par les tribunaux, le troisième n'avait pas encore réuni les documents requis et le quatrième était déjà à la retraite. Il n'y a donc aucun membre de l'université qui n'a pu être réintégré en raison de l'absence de création de postes supplémentaires. Le représentant gouvernemental a également rappelé que tous les obstacles empêchant le retour dans leur région des personnes transférées dans d'autres régions pendant l'application de la loi martiale ont été supprimés à la suite de la levée de celle-ci. Certaines d'entre elles ont pu être réintégrées au poste qu'elles occupaient précédemment au moyen de procédures judiciaires normales, d'autres grâce à la décision du conseil d'Etat, et d'autres encore par des demandes adressées directement. Il n'y a donc plus aucune demande ni appel qui soient en suspens. Les personnes réintégrées ont fait l'objet d'une indemnisation complète. S'agissant des amendements devant être apportés à la loi no 1402, tous les efforts sont faits au cours du présent processus législatif pour tenir compte des principes mentionnés, tant dans le rapport de la commission d'experts que dans la décision du Conseil d'Etat. Le ministre du Travail a une nouvelle fois adressé une demande écrite au président et aux membres de la Commission parlementaire de la justice pour qu'ils tiennent compte de ces principes lors de la modification de la loi. L'établissement par la loi no 3686 du 5 décembre 1990 d'une Commission des droits de l'homme au sein du Parlement constitue un autre développement significatif. Cette commission a commencé ses travaux de révision de la loi no 1402. En outre, une sous-commisson de la Commission des droits de l'homme a adressé un avis à la Commission parlementaire de la justice afin que cell-ci prenne en considération les principes internationaux relatifs aux droits de l'homme lors de ses travaux. Le représentant gouvernemental s'est déclaré convaicu qu'à la suite de ces efforts le projet de loi final, qui doit amender la loi no 1402, inclura l'avis exprimé dans la décision du Conseil d'Etat.
S'agissant de la question de savoir si les décisions de la Commission d'évaluation établies par l'article 15 de la réglementation sur les enquêtes de sécurité peuvent être l'objet d'un appel, le représentant gouvernemental a déclaré qu'il n'y avait aucun doute sur le fait que toute mesure administrative peut faire l'objet d'un recours et que toutes les procédures légales sont ouvertes à cette fin. Il s'agit d'une disposition fondamentale qui est prévue par la Constitution. Il n'est donc pas nécessaire d'inclure une disposition supplémentaire dans la réglementation précisant les règles en matière d'appel.
Compte tenu du fait que la liberté d'opinion et le droit de s'organiser n'impliquant pas le recours à la violence sont garantis par la loi no 3713 du 12 mai 1991, les dispositions figurant aux alinéas E, F et J de l'article 3 de la réglementation sur les enquêtes de sécurité de 1990 fixent des critères appropriés qui devraient lier les autorités administratives et judiciaires. Les recherches sur archives et les enquêtes de sécurité ne sont conduites en Turquie qu'à l'égard de certaines personnes qui sont spécifiées dans la réglementation et conformément à des critères objectifs. Le droit de recourir en appel est toujours garanti, et les pratiques concernant ces recherches et enquêtes sont sujettes à révision par les tribunaux. En outre, la loi no 3713 a rendu plus objectives les dispositions de la réglementation et, jusqu'ici, aucun appel n'a été formulé contre ladite réglementation.
Le président de la commission a rappelé que le fait que la commission d'experts ait mentionné un cas parmi les cas de progrès ne saurait empêcher la présente commission de procéder à une discussion sur ledit cas, et cela notamment pour lui permette, le cas échéant, de constater à son tour les progrès accomplis.
Les membres employeurs ont remercié le représentant gouvernemental de ses informations extrêmement détaillées qui font état d'une évolution positive, même si la décision du Conseil d'Etat aurait pu avoir des conséquences plus favorables encore en ce qui concerne les mesures prises pour remédier aux situations découlant de la loi martiale. Des statistiques ont été communiquées sur les personnes réintégrées, celles qui souhaiteraient l'être, et celles qui ne l'ont pas été. A cet égard, il faut se demander quelles sont les raisons qui ont motivé les refus de réintégration ainsi que les voies légales ouvertes aux personnes qui n'ont pas été réintégrées. Selon les informations communiquées par le représentant gouvernemental, une grande partie de personnes concernées ne peuvent être réintégrées, car elles ont été l'objet d'une condamnation pénale. Le fait que dans les universités pratiquement tous les professeurs aient retrouvé leur poste est digne d'intérêt. Des informations portant sur la réparation des préjudices subis par les personnes licenciées ou mutées ont été également communiquées. Il serait souhaitable que l'ensemble de ces renseignements soient communiqués sous forme écrite par le gouvernement afin que la commission d'experts puisse les examiner. S'agissant des amendemnets proposés à la loi no 1402, la commission d'experts a souligné que le projet de loi n'empêcherait pas de prendre les mesures affectant l'emploi contre des personnes considérées comme dangereuses ou indésirables du point de vue de la sécurité de l'Etat. Elle a également demandé que des mesures visant à protéger la sécurité de l'Etat soient suffisamment bien définies et délimitées dans la nouvelle version de la loi. Il faut également prévoir des moyens de recours. Dans ce contexte, il conviendra d'attendre les résultats des mesures prises à la suite de la création de la Commission parlementaire des droits de l'homme qui, selon le représentant gouvernemental, doit jouer un rôle efficace dans la révision de la loi.
En ce qui concerne la réglementation de 1990 sur les enquêtes de sécurité, la commission d'experts a estimé que les catégories de personnes pouvant faire l'objet de telles mesures étaient trop largement définies et que les critères adoptés n'étaient pas suffisamment précis. Le fait que des mesures soient prévues en matière de sécurité est parfaitement normal, pour autant que leur domaine d'application est délimité de manière précise. Les possibilités de recours sont également imortantes. A cet égard, il serait souhaitable que le représentant gouvernemental indique quelles sont les mesures qui sont adoptées pour que les personnes concernées puissent être informées des enquêtes entreprises à leur encontre de manière à leur permettre de faire usage des possibilités de recours. La réglementation étant récente, il s'agira donc de voir comment à l'avenir elle sera appliquée dans la pratique. Les membres employeurs ont estimé que le présent cas montre une fois encore que les conséquences d'un état d'exception sont longues à corriger. On doit toutefois constater que la Turquie a déjà déployé des efforts pour remédier à la situation découlant de l'application de la loi martiale, et l'on peut espérer qu'à l'avenir des informations permettant de constater une amélioration de la situation continueront à être fournies.
Les membres travailleurs ont insisté sur le fait que, malgré les nouveau développements intervenus et certaines modifications législatives, il s'agissait d'un cas particulièrement grave. Il appartient à la présente commission de suivre la situation non seulement en droit, mais également en fait. Ils ont estimé que, bien que le représentant gouvernemental ait fourni de très nombreuses informations et que des progrès puissent être constatés dans certains domaines, il restait encore considérablement à faire. Des informations devaient encore être fournies sur les cas où les fonctionnaires n'ont pas obtenu leur réintégration en précisant les raison spécifiques qui ont motivé la décision de refus. Le cas des personnes qui ont été mutées dans d'autres régions a également été évoqué. La commission d'experts a demandé des informations spécifiques ainsi que des statistiques sur le nombre de celles qui sont retournées dans leur région et ont retrouvé leurs fonctions antérieures ainsi que sur la question de leur indemnisation. Il ne suffit pas d'attirer l'attention des intéressés sur l'existence de procédures d'appel. Il est également nécessaire de communiquer des informations sur la manière dont ces procédures sont mises en oeuvre et en particulier des statistiques. Les membres travailleurs ont exprimé leur déception devant le fait que la loi no 1402 n'a toujours pas été modifiée, bien qu'ils soient conscients qu'un projet de loi soit pendant devant l'Assemblée nationale. Selon le représentant gouvernemental, cette loi, une fois adoptée, devrait être conforme aux principes internationaux relatifs au droits de l'homme. Il semble toutefois que les mesures visant à protéger la sécurité de l'Etat qui figurent dans le projet de loi ne sont pas suffisamment bien définies et délimitées. C'est pourquoi le gouvernement et le Parlement devraient être priés de prendre en considération les commentaires de la commission d'experts sur ce point. Ils ont suggéré que le projet de loi soit communiqué pour examen par la commission d'experts afin qu'elle puisse s'assurer de sa complète conformité avec les principes spécifiques consacrés par la convention.
De même que les membres employeurs, les membres travailleurs se sont déclarés insatisfaits des informations fournies par le représentant gouvernemental en ce qui concerne les enquêtes de sécurité. Aucune information susceptible de répondre aux points soulevés par la commission d'experts ne paraît avoir été fournie. Celle-ci a exprimé sa préoccupation en ce qui concerne la définition extrêmement large donnée aux catégories de personnes pouvant faire l'objet d'enquêtes de sécurité. Elle a demandé qu'une définition plus précise de ces personnes soit donnée en conformité avec la convention. En outre, il est absolument essentiel que ces personnes fassent l'objet d'une information suffisante et qu'elles puissent bénéficier d'un droit de recours. A cet égard, elle a rappelé les paragraphes 135 et 136 de son étude d'ensemble de 1988 qui reflètent également les vues de la présente commission et les principes qui devraient être appliqués dans ce cas. Enfin, les membres travailleurs ont insisté pour que le gouvernement fournisse les informations détaillées demandées par la commission d'experts sur la mesure dans laquelle les rapports sur les enquêtes de sécurité sont établis et utilisés pour ce qui a trait à l'emploi et pour toute autre décision pertinente.
Le membre travailleur de la Norvège, s'exprimant également au nom des membres travailleurs de la Suède et de la Finlande, a rappelé que les mesures prises, en application de la loi martiale, à l'égard des fonctionnaires publics sur la base de l'opinion politique, s'apparente à celles prises par les régimes dictatoriaux qui se fondent sur la puissance du capital ou sur le système d'un parti. Il a également souligné que les clarifications demandées par la commission d'experts en ce qui concerne la réintégration des fonctionnaires publics et notamment l'exigence selon laquelle ils ne doivent pas être privés de leurs droits civiques n'avaient pas été fournies. Il a regretté qu'on puisse faire trop largement usage des enquêtes de sécurité portant sur des fonctionnaires publics dans tous les ministères et institutions publiques turcs. Bien qu'il soit compréhensible que certains fonctionnaires ayant accès à des documents secrets puissent faire l'objet d'enquêtes de sécurité, la possibilité d'étendre une telle pratique à tous les fonctionnaires est manifestement contraire à la convention.
Le membre travailleur de l'Espagne a déclaré que le cas de la Turquie était particulièrement grave. S'il est vrai, comme l'ont indiqué les membres employeurs, qu'il est beaucoup plus facile d'imposer un état de siège que d'en éliminer les conséquences, l'histoire montre que, lorsqu'il y a une volonté politique réelle de supprimer l'état de siège, ses conséquences peuvent être également supprimées très rapidement. L'état de siège vise à restreindre ou éliminer les libertés, aussi il ne sera pas facile de remédier à cette situation si le même régime qui l'a imposé demeure au pouvoir. Or dans le cas de la Turquie, c'est le régime au pouvoir qui a décrété la loi martiale, et c'est ce régime qui est responsable des conséquences prévalant actuellement. De l'avis de l'avocat général du Conseil d'Etat, les personnes concernées par les décisions prises par les commandants de la loi martiale n'ont pas eu le droit de recourir devant les tribunaux administratifs; une telle situation est en contradiction flagrante avec la notion d'état de droit. Il a rappelé également que l'avocat général du Conseil d'Etat a estimé que les compétences des commandants de la loi martiale visant à protéger la sécurité de l'Etat ne sont pas clairement définies dans la loi. Ceci constitue également une situation inacceptable dans un état de droit.
Le représentant gouvernemental a souligné les progrès réalisés et s'est inscrit en faux contre les déclarations selon lesquelles il reste encore considérablement à faire. Même si quelques mesures peuvent encore être prises, les progrès réalisés vont dans la bonne direction. Il importe d'être conscient que la loi martiale n'est plus en vigueur depuis 1987. La présente discussion ne porte donc que sur des conséquences résiduelles de cette loi ainsi que sur les progrès qui ont été réalisés à cet égard. Il convient également de distinguer les mesures prises par le gouvernement et celles qui relèvent du Parlement. Le gouvernement a présenté un projet de loi au Parlement que celui-ci examine actuellement. Des contributions très positives ont déjà été apportées. Pour sa part, le gouvernement s'efforce d'assister le Parlement dans ses travaux de manière que ses délibérations puissent répondre aux préoccupations exprimées. La tâche relève désormais du Parlement. Il a également rappelé les effets de la nouvelle loi no3713, entrée en vigueur le 12 mai 1991, qui a annulé les articles 141, 142 et 163 du Code pénal. Les nouveaux développements qu'il a mentionnés devraient dissiper les craintes exprimées au sein de cette commission dans la mesure où, avec l'adoption de cette nouvelle législation, il ne saurait être question de discrimination fondée sur l'opinion publique. Après avoir rappelé les informations qu'il a fournies précédemment concernant la réintégration dans leur emploi des fonctionnaires publics et des membres des universités, il a estimé qu'il n'y avait pratiquement plus de problèmes dans ce domaine. Il a souligné, une fois encore, que le projet de loi qui doit modifier la loi no1402 inclura l'avis exprimé dans la décision du Conseil d'Etat, lequel est conforme à la convention et aux droits fondamentaux de l'homme, et il s'est référé à nouveau aux travaux de la Commission parlementaire des droits de l'homme, récemment créée au sein du Parlement. L'élaboration de ce processus législatif, dont il conviendra d'attendre l'issue, constitue une évolution positive. Son pays est sur la bonne voie, car des progrès réels ont déjà été accomplis.
Le membre travailleur de l'Allemagne a remercié le représentant gouvernemental pour ses informations détaillées. Il s'est félicité que de nombreuses personnes, parmi celles qui avaient été transférées dans d'autres régions, ont pu retourner dans leur lieu d'origine. Mais la commission se doit d'examiner la question de manière approfondie, tant en ce qui concerne la situation actuelle que future. L'examen de ce cas ne pourra être considéré comme terminé que lorsque toutes les personnes auront retrouvé leur domicile, leurs fonctions ou leur lieu de travail, et que toutes les indemnités nécessaires auront été versées aux victimes des mesures prises sous la loi martiale. Il s'agit certes d'un cas de progrès, mais aucune solution définitive n'a encore été adoptée.
Les membres travailleurs ont déclaré qu'ils ne sauraient partager l'opinion du représentant gouvernemental selon laquelle peu de chose restait encore à faire. Les progrès sont toujours lents et difficiles à réaliser. Certes, la loi martiale n'est plus en vigueur, mais les lois et les procédures qui étaient appliquées à cette époque sont toujours en vigueur et le demeureront jusqu'à l'amendement définitif de la loi no1402. En ce qui concerne la nouvelle législation, celle-ci devrait être communiquée à la commission d'experts pour examen. En outre, ils ont exprimé le ferme espoir que le projet de loi, qui doit modifier la loi no1402, reflétera les préoccupations exprimées par la commission d'experts. Ils ont invité le gouvernement à communiquer rapidement au BIT les projets de loi existants afin que l'on puisse examiner s'ils sont conformes à la convention.
La commission a pris note avec intérêt des informations détaillées fournies par le représentant gouvernemental ainsi que du rapport de la commission d'experts. Elle a noté également avec intérêt que plusieurs mesures législatives et décisions judiciaires ont été prises pour assurer la mise en oeuvre de la convention. La commission a exprimé le ferme espoir que le gouvernement prendra, dans un proche avenir, touters les mesures supplémentaires nécessaires, qu'il poursuivra ses efforts pour mettre la législation et la pratique en pleine conformité avec la convention et qu'il sera en mesure de fournir les informations détaillées demandées par les organes de contrôle de l'OIT sur les progrès réalisés.
Un représentant gouvernemental a rappelé que la question de l'application de la convention en Turquie avait été portée à l'attention de la commission, essentiellement en raison de la loi martiale no 1402 appliquée de 1980 à 1987. Cette loi n'est plus appliquée et le gouvernement est en train de procéder à l'élimination des conséquences résiduelles de son application. La commission d'experts a reçu le rapport du gouvernement qui contient des informations sur les progrès réalisés dans la solution d'un grand nombre des problèmes qui se sont posés, mais elle ne pourra l'examiner en détail que lorsqu'elle disposera de la traduction des documents joints à ce rapport. Compte tenu de l'importance que la présente commission attache à ce cas, l'orateur a tenu à lui fournir les informations nécessaires, notamment en ce qui concerne les points spécifiques soulevés par la commission d'experts.
Le premier point concerne la réintégration des fonctionnaires licenciés et le retour des fonctionnaires mutés pendant la période où la loi martiale était en vigueur. Des progrès significatifs ont été accomplis dans ce domaine en vertu de la décision du Conseil d'Etat du 7 décembre 1989. Cette décision a rendu inopérante la disposition de la loi martiale no 1402 selon laquelle les fonctionnaires licenciés ne pourront jamais exercer un nouvel emploi dans la fonction publique, en limitant son application à la période pendant laquelle la loi martiale était en vigueur. En conséquence, puisque cette loi n'est plus en vigueur, les personnes affectées peuvent maintenant retourner à leur travail sous réserve d'autres obstacles de caractère juridique. En vertu de l'article 40 de la loi no 2575 concernant le Conseil d'Etat, la décision susmentionnée a un caractère contraignant pour l'administration et les tribunaux administratifs. La décision du Conseil d'Etat ne s'applique pas seulement aux membres de l'université mais à tous les fonctionnaires. La commission d'experts semble avoir la fausse impression que les fonctionnaires, autres que les membres de l'université, ne sont pas concernés par la décision du Conseil d'Etat et qu'ils sont donc victimes d'une certaine discrimination. En fait, la décision du Conseil d'Etat s'applique de la même manière à tous les fonctionnaires. S'agissant de la réintégration dans leurs postes d'origine des personnes qui ont été mutées dans d'autres régions en vertu de la loi martiale, l'orateur a déclaré sans équivoque que, du fait de la décision du Conseil d'Etat et de la levée de la loi martiale, plus rien n'empêche ces personnes de retourner dans leur lieu d'origine. De toute manière, aucune disposition de la loi martiale no 1402 ne prévoyait que les personnes mutées ne pouvaient revenir dans leur lieu d'origine après la levée de la loi martiale. En d'autres termes, ces personnes ont été transférées dans d'autres régions uniquement pendant la période d'application de la loi martiale car on estimait alors qu'il était dangereux pour elles de demeurer dans la région soumise à la loi martiale. Les restrictions imposées à ces personnes étaient limitées tant du point de vue de la région que du point de vue de la durée; la levée de la loi martiale a entraîné la suppression desdites restrictions. A ce jour, le gouvernement n'a connaissance d'aucune difficulté qu'aurait éprouvée une personne mutée à revenir dans son lieu d'origine. La commission d'experts a demandé au gouvernement des données statistiques précises sur le nombre de fonctionnaires réintégrés ou autorisés à revenir des régions vers lesquelles ils avaient été mutés ainsi que les informations sur la situation des personnes qui sont encore considérées comme "dangereuses". Les archives officielles font état de 9400 fonctionnaires affectés, 4530 ayant été licenciés et 4870 mutés. Il est presque impossible de donner des chiffres exacts de la situation actuelle, mais d'après les données statistiques au 15 mai 1990, sur les 4530 fonctionnaires licenciés, plus de 4000 ont été réintégrés. Il n'est pas possible de faire un compte exact de la situation des autres personnes licenciées qui sont moins de 300. Certaines n'ont pas demandé leur réintégration, beaucoup ont atteint l'âge de la retraite, certaines sont décédées, d'autres ne sont plus aptes à exercer leur emploi (par exemple pour inaptitude physique ou raison de santé) et certaines demandes de réintégration ont été rejetées car les intéressés ne peuvent plus exercer un emploi dans la fonction publique en raison des poursuites pénales dont ils ont fait l'objet. Cela étant, depuis l'entrée en vigueur de la décision susmentionnée du Conseil d'Etat, il n'a été enregistré aucun cas de refus de réintégration au motif que l'intéressé est considéré comme "dangereux". En outre, la décision permet aux personnes dont la demande de réintégration a été rejetée dans le passé pour un tel motif de saisir à nouveau les tribunaux administratifs afin de recouvrer leurs droits. Plus précisément, il n'est plus possible qu'une personne ne soit pas réintégrée uniquement pour avoir été considérée comme "dangereuse" pendant la période où la loi martiale était en vigueur. La procédure définie par la décision susmentionnée a permis de réintégrer de nombreuses personnes. En fait, 90 pour cent des personnes licenciées pendant la loi martiale l'ont été. La commission d'experts a également demandé des informations sur les mesures qui ont été prises pour reconnaître les droits des intéressés résultant de leur service antérieur et sur toutes mesures leur permettant d'obtenir une indemnité pour perte de gain et d'autres prestations au cours de la période où ils avaient été privés de leur emploi ou mutés. Tous les fonctionnaires qui ont demandé leur réintégration ont le droit de demander la reconnaissance des droits susmentionnés y compris une indemnité pour perte de gain et d'autres prestations, dans le cadre des dispositions générales de la loi en vigueur. Si les tribunaux compétents rendent un jugement en leur faveur, ils peuvent obtenir une indemnité et la reconnaissance de tous les droits et prestations résultant de leur service antérieur, tels qu'ils sont déterminés par les tribunaux. Une telle décision judiciaire est nécessaire à des fins administratives et comptables. S'agissant des informations demandées par la commission d'experts sur les autres obstacles de caractère juridique qui s'opposent à la réintégration et sur le nombre de personnes auxquelles une réintégration a été refusée, l'orateur a signalé que, selon les informations disponibles, moins de 300 personnes étaient concernées. Il s'est référé à ses remarques précédentes sur les cas dans lesquels une réintégration n'était pas possible et il a noté que des dispositions similaires existaient dans la législation d'autres pays.
Le deuxième point soulevé par la commission d'experts porte sur les amendements proposés à la loi no 1402 relative à la loi martiale. Le projet visant à amender la loi no 1402 est encore examiné par la Grande Assemblée nationale turque. Le ministre du Travail a envoyé une lettre au président de la Commission de la justice de la Grande Assemblée nationale rappelant que la Turquie a ratifié la présente convention et qu'en conséquence cette convention faisait partie intégrante de la législation nationale. La commission de la justice doit donc tenir compte des articles pertinents de cette convention lors de la modification de la loi no 1402. Dans cette lettre, le ministre du Travail a souligné en particulier que les dispositions de la loi martiale devaient être fondées sur des critères objectifs, qu'un mécanisme de révision judiciaire approprié devait être prévu et que les mesures visant à sauvegarder la sécurité de l'Etat devaient être suffisamment définies et circonscrites de manière à n'entraîner aucune discrimination. L'initiative du ministère du Travail est une manifestation claire de l'importance qu'il attache aux normes de l'OIT. Le ministère du Travail est déterminé à poursuivre ses efforts pour qu'une législation non controversée soit adoptée en la matière.
Enfin, la commission d'experts soulève une troisième question relative au Règlement sur les enquêtes de sécurité concernant les fonctionnaires occupant des postes clés. Ce règlement a été invalidé, pour vice de forme, à la suite d'une décision récente du Conseil d'Etat. La commission d'experts a exprimé le souhait de recevoir, en plus de cette décision, des informations sur tout nouveau règlement qui pourrait avoir été adopté et sur les mesures prises pour assurer le respect de la convention à cet égard. Un nouveau règlement a été publié le 13 avril 1990. Il convient de souligner, à ce propos, que tout pays se réserve le droit de procéder à une enquête de sécurité avant de recruter des fonctionnaires pour des postes clés. Il n'y a pas exception à cette règle. Chaque pays mène ce type d'enquête de sécurité en fonction de ses besoins et de sa situation. Le nouveau règlement ne contient aucune disposition qui aille au-delà de cet objectif. Etant donné que le règlement vient d'être publié, il n'a pas été possible d'en communiquer une copie à la commission d'experts avant qu'elle se réunisse. Le nouveau règlement sera naturellement inclus dans le prochain rapport du gouvernement à la commission d'experts.
Le membre travailleur de la Turquie a exprimé son insatisfaction face à la situation qui prévaut en Turquie eu égard à l'application de la convention. Tout d'abord, la décision du Conseil d'Etat relative à l'indemnisation des fonctionnaires licenciés n'a pas encore été appliquée faute d'instructions gouvernementales à cet effet. Ensuite, s'il faut se féliciter que les amendements proposés, critiqués par la commission d'experts, aient été retirés, les questions qui se posent sont de savoir si la loi no 1402 demeure en vigueur, quand le nouveau projet de loi tel que modifié sera soumis au parlement et quelle en sera la teneur. Par ailleurs, la circulaire adressée par le Conseil supérieur de l'éducation aux doyens de l'université au sujet de la réintégration des personnes licenciées n'a pas été suivie d'effet faute de postes libres. Les personnes concernées devront attendre que des postes se libèrent. Enfin, le règlement sur les enquêtes de sécurité a bien été invalidé mais il a été remplacé deux mois plus tard par un autre règlement presque identique.
Le membre travailleur du Royaume-Uni a déclaré que la lettre envoyée par le ministre du Travail était une initiative intéressante mais que ce qui importait était le résultat concret à savoir l'abrogation ou la modification des dispositions de la loi no 1402 qui n'étaient pas conformes avec les exigences de la convention. S'agissant des enquêtes de sécurité, en général de telles enquêtes ne sont menées que pour certains emplois spécifiques dit "sensibles"; il ne serait pas conforme à la convention qu'un règlement prévoie ce type d'enquête pour tous les fonctionnaires. Il serait donc utile de recevoir des précisions sur le champ d'application du nouveau règlement sur les enquêtes de sécurité.
Le membre travailleur de la Norvège a estimé que les informations données par le représentant gouvernemental n'étaient pas suffisamment explicites. Etant donné que la décision du Conseil d'Etat en date du 7 décembre 1989 n'a pas été appliquée, il convient de savoir quant le gouvernement donnera les instructions formelles qui assureront la réintégration effective des fonctionnaires licenciés. La même question est posée en ce qui concerne la réintégration, conformément à la circulaire du Conseil supérieur de l'éducation, des membres licenciés de la faculté. Par ailleurs, on aimerait avoir des précisions sur les mesures que le gouvernement compte prendre pour reconnaître les droits des personnes licenciées résultant de leurs services antérieurs et pour les indemniser de la perte de gain et d'autres prestations au cours de la période de leur licenciement. Enfin, la teneur du nouveau règlement sur les enquêtes de sécurité devrait être explicitée et il faudrait savoir si le texte a été communiqué au BIT.
Le membre travailleur des Pays-Bas a déclaré que ce cas avait déjà une longue histoire. Il serait tout à l'honneur du gouvernement de la Turquie de faire preuve de diligence en la matière mais il semblerait qu'il n'ait pas compris toute l'importance que la commission d'experts attache aux questions soulevées. Comme l'ont relevé les orateurs précédents, les informations données par le représentant gouvernemental sont assez confuses tant en ce qui concerne le nouveau projet de loi visant à amender la loi no 1402 qu'en ce qui concerne l'application de la décision du Conseil d'Etat, en date du 7 décembre 1989, et le contenu du nouveau règlement sur les enquêtes de sécurité. Des précisions devraient être apportées sur tous ces points.
Les membres employeurs ont fait remarquer que ce cas portait sur l'élimination des conséquences de la loi martiale et que cette question avait déjà été examinée à plusieurs reprises et mentionnée dans un paragraphe spécial du rapport de la présente commission. La commission d'experts n'ayant pu examiner en détail le rapport du gouvernement, il serait opportun d'attendre ses observations avant de prendre position, mais une première évaluation peut d'ores et déjà être faite à la lumière des informations données par le représentant gouvernemental. S'agissant de la réintégration des personnes licenciées, il est pris acte de la décision du Conseil d'Etat et de la déclaration du représentant gouvernemental selon laquelle cette décision concerne tous les fonctionnaires et s'impose à toute l'administration. Il conviendrait que le gouvernement fournisse les données statistiques précises demandées par la commission d'experts sur le nombre de fonctionnaires réintégrés et sur les indemnisations qui leur ont été versées afin de pouvoir parvenir à une opinion en la matière. En ce qui concerne les amendements proposés à la loi no 1402 et en particulier le problème des mesures en matière d'emploi contre les personnes considérées comme "dangereuses" ou "indésirables du point de vue de la sécurité de l'Etat", tout dépend encore ici de la teneur finale de ces amendements. La commission d'experts attend ce texte et devra l'examiner de très près car il s'agira de tracer une ligne de démarcation raisonnable et admissible entre l'exigence d'un minimum de loyauté de la part des fonctionnaires et la discrimination de nature politique. La même remarque vaut pour le nouveau règlement sur les enquêtes de sécurité et, le cas échéant, la question devra être examinée à nouveau par la présente commission sur la base des textes fournis. En tout état de cause, les victimes de la loi martiale doivent être réintégrées et indemnisées. Le processus de retour à une situation normale est long mais on assiste à une évolution positive et il faut veiller à ce qu'elle se poursuive. Les questions importantes soulevées par le membre travailleur de la Turquie exigent une réponse, mais il importe en premier lieu que la commission d'experts examine en détail le rapport et les textes fournis par le gouvernement afin que la présente commission puisse se prononcer en toute connaissance de cause.
Le représentant gouvernemental, en réponse aux remarques des orateurs précédents a réitéré sa déclaration selon laquelle la lettre du ministère du Travail a été adressée au président de la Commission de la justice de la Grande Assemblée nationale pour attirer son attention sur la convention et sur les observations de la commission d'experts. Par ailleurs, le processus de modification de la loi no 1402 obéit aux règles de la démocratie. Les divergences de vues doivent être prises en considération et aplanies de même qu'il faut tenir compte de la décision du Conseil d'Etat du 7 décembre 1989, afin d'aboutir à un projet de loi acceptable pour tous. Son gouvernement fera tout ce qui est en son pouvoir pour atteindre cet objectif. Par ailleurs, la décision susmentionnée du Conseil d'Etat ne nécessite aucune circulaire pour acquérir force obligatoire. Elle s'impose d'office à l'ensemble de l'administration et des tribunaux administratifs. La circulaire, adressée par le Conseil supérieur de l'éducation aux doyens de l'université au sujet de cette décision, est une mesure administrative interne dont l'objectif est d'expliquer les modalités d'application de la décision du Conseil d'Etat. Le gouvernement n'a connaissance d'aucun cas dans lequel cette décision n'aurait pas été appliquée ou aurait soulevé des difficultés. Quant au nouveau règlement sur les enquêtes de sécurité, le texte en sera envoyé très prochainement à la commission d'experts qui l'examinera. La présente commission pourra alors en discuter à la lumière des observations de la commission d'experts. Enfin, pour ce qui est de l'indemnisation des pertes de gain et d'autres prestations, les victimes doivent saisir la justice et chaque cas est examiné individuellement. Des jugements favorables aux requérants ont été rendus; on a donc la preuve tangible que des progrès concrets ont été réalisés dans ce domaine.
Le membre travailleur des Pays-Bas a déclaré qu'il ressortait du rapport de la commission d'experts et des informations données par le représentant gouvernemental que les progrès étaient seulement en voie de réalisation mais que rien de concret n'était visible.
Le membre travailleur de la Grèce, faisant référence aux conclusions de la présente commission en 1989, s'est demandé pourquoi la restauration des droits des travailleurs prenait tant de temps dans le cadre du rétablissement de la démocratie. Cela fait déjà longtemps que le gouvernement turc, formé à la suite d'élections, promet de se conformer aux dispositions de la présente convention. Par ailleurs, le représentant gouvernemental n'a donné aucune indication au sujet des informations communiquées par la Confédération des syndicats turcs, auxquelles la commission d'experts se réfère dans son rapport, et selon lesquelles 4125 des fonctionnaires qui avaient été licenciés sont encore considérés comme "dangereux". La présente commission devrait exprimer une fois encore ses vives inquiétudes en ce qui concerne l'application de la convention en Turquie.
Le membre travailleur du Royaume-Uni a rappelé que cette commission essayait d'obtenir la mise en conformité de la législation turque avec la convention depuis 1987. Cela doit être apprécié par rapport à la rapidité dont ont fait preuve certains pays d'Europe orientale qui, venant de s'engager dans un processus démocratique, ont été en mesure de faire état, devant la présente commission, de l'abolition de lois répressives, notamment dans le domaine de la législation du travail.
Le représentant gouvernemental a affirmé que les progrès réalisés étaient tout à fait visibles et que le processus de rectification de la situation avait été accéléré. En premier lieu, le Conseil d'Etat a pris une décision qui s'impose à toutes les juridictions inférieures. Cette décision s'est traduite par la réintégration de plus de 4000 personnes, soit 90 pour cent de celles qui avaient été licenciées. S'il ne s'agit pas là d'un progrès visible, de quoi s'agit-il? En deuxième lieu, le ministre du Travail a adressé une lettre à la Commission de la justice de la Grande Assemblée nationale attirant spécifiquement et fermement son attention sur la convention et sur les observations de l'OIT. Cela est également un élément visible. En troisième lieu, si près de 300 personnes n'ont pas été réintégrées, aucune ne l'a été au motif qu'elle était considérée comme "dangereuse". Certaines d'entre elles sont décédées, d'autres sont à la retraite ou ne sont plus en mesure de travailler et d'autres encore ont fait l'objet de poursuites pénales pour d'autres infractions que celles liées à la loi martiale. Aucune personne ne s'est heurtée à des difficultés pour revenir à son lieu d'origine. Ce sont là aussi des éléments visibles.
Les membres travailleurs, compte tenu des conclusions dans le paragraphe spécial du rapport de la présente commission de 1989, ont regretté que le rapport du gouvernement soit arrivé trop tard pour être examiné en détail par la commission d'experts. Les informations fournies par le représentant gouvernemental et les quelques signes de progrès que l'on peut constater sont certes appréciables mais des questions et des doutes subsistent sur les trois points débattus. Premièrement, des données chiffrées concrètes et complètes font toujours défaut en ce qui concerne le nombre des fonctionnaires réintégrés et indemnisés. La signification du membre de phrase "sous réserve d'autres obstacles de caractère juridique" doit encore être précisée. Deuxièmement, en ce qui concerne le projet de loi visant à amender la loi no 1402, on ne sait toujours pas s'il empêchera de prendre des mesures affectant l'emploi contre les personnes considérées comme "dangereuses" ou "indésirables du point de vue de la sécurité de l'Etat", conformément aux observations de la commission d'experts. Troisièmement, les questions relatives au champ d'application du nouveau règlement sur les enquêtes de sécurité demeurent posées. La présente commission doit donc à nouveau exprimer sa préoccupation et insister sur la nécessité de recevoir des rapports complets dans les plus brefs délais afin que la commission d'experts puisse examiner les mesures qui ont été prises et pas uniquement des intentions.
Le représentant gouvernemental a déclaré qu'il était impossible de fournir des données chiffrées absolument précises car certains cas sont encore examinés par les tribunaux. Les dernières statistiques datent du 15 mai 1990. Par ailleurs, la commission devrait faire preuve d'un peu de patience et laisser à la commission d'experts le temps d'examiner le nouveau règlement sur les enquêtes de sécurité qui vient d'être adopté. En conclusion, l'orateur a de nouveau donné l'assurance que la lettre du ministère du Travail adressée au président de la Commission de la justice de la Grande Assemblée nationale contenait les dispositions pertinentes de la convention no 111 et les observations de la commission d'experts.
La commission a pris note des informations détaillées fournies par le gouvernement. Compte tenu de la préoccupation qu'elle a exprimée l'années dernière et qu'elle ressent partiellement cette année, elle a estimé qu'il était nécessaire que le gouvernement envoie des informations complémentaires afin de pouvoir effectuer une évaluation complète des dispositions législatives et de leur application pratique eu égard à leur conformité avec la convention. En conséquence, la commission a exprimé le ferme espoir que le gouvernement serait en mesure de communiquer aux organes de contrôle de l'OIT, aussi rapidement que possible, le texte des nouvelles dispositions adoptées et des jugements qui ont été rendus ainsi que des informations sur les mesures qui sont envisagées.
Un représentant du gouvernement a déclaré, premièrement, que la loi martiale no 1402 n'avait été promulguée que pour certains cas dans des circonstances exceptionnelles; deuxièmement, que cette loi martiale n'était plus en vigueur dans aucune région du pays depuis le 19 juillet 1987 et, troisièmement, que le gouvernement s'était engagé à remédier à certains des inconvénients de cette loi et avait soumis récemment à cet effet un projet de loi au parlement. Ce projet, dont le parlement débat actuellement, a pour but d'apporter certaines améliorations à des dispositions existantes, notamment par la limitation de certains pouvoirs conférés aux commandants de la loi martiale.
Le gouvernement sera heureux de pouvoir soumettre à la commission d'experts la version définitive de ce projet de loi au moment où il lui adressera sa réponse à ses observations en même temps que la copie des jugements prononcés sur la réintégration des travailleurs licenciés en vertu des dispositions de la loi martiale no 1402. Le gouvernement n'est pas en mesure pour l'instant d'entamer une discussion sur un texte en discussion au parlement, mais prend note des observations formulées par la commission d'experts sur la question.
Le membre travailleur de la Norvège a déclaré, au nom des syndicats nationaux de la Finlande, du Danemark, de la Suède et de la Norvège, qu'il s'associait aux propos tenus par le membre travailleur de la Turquie au sujet de la convention no 98.
Dans le cas présent, la promulgation de la loi martiale et de son règlement d'application a eu pour conséquence, depuis le coup d'Etat de septembre 1980, la révocation ou la mutation de quelque 8 500 personnes regroupant des professeurs d'université, des enseignants, des fonctionnaires, des employés du service public et des travailleurs occupés dans des entreprises publiques. Les fonctionnaires et les employés du service public continuent d'être l'objet de discrimination un peu partout dans le pays et les personnes jugées indésirables sont écartées à jamais de l'emploi dans le service public ou les entreprises d'Etat. Ces sanctions n'ont pas été prononcées par le pouvoir judiciaire mais résultent de décisions administratives arbitraires.
Le nouveau projet de loi proposé au parlement devrait limiter les pouvoirs des commandants de l'état d'urgence, mais les critères pouvant justifier la révocation ou la mutation ne sont pas encore clairement définis. La réglementation qui prévoit des enquêtes de la sûreté pour recueillir des renseignements sur les opinions politiques des fonctionnaires et des employés du service public est toujours en vigueur et ne fait l'objet d'aucun contrôle judiciaire. Pareil service de police secrète ne saurait se justifier dans un pays qui s'est engagé à respecter les obligations faites par la Constitution de l'OIT et par la convention no 111.
Les syndicats finlandais, danois, norvégiens et suédois invitent instamment la commission à insister auprès du gouvernement de la Turquie pour qu'il mette un terme à toute discrimination à l'encontre des fonctionnaires et des employés du service public pour des motifs d'opinion politique.
Les membres travailleurs ont déploré que, bien que la loi martiale ait été levée le 19 juillet 1987, la situation soit restée la même en ce qui concerne l'application de la convention no 111. Rappelant que, pendant l'état d'urgence, certaines mesures disciplinaires exceptionnelles ont été prises, ils ont constaté à l'instar de la commission d'experts que celles-ci continuent d'avoir des effets. Ils ont noté qu'un projet de loi est en préparation, qui devrait apporter certaines améliorations même si la Confédération des syndicats de Turquie (TURK-IS) a émis certains doutes quant à son contenu, mais que, pour l'instant, la situation reste inchangée.
Ils ont rappelé qu'ils ont déjà demandé que les personnes révoquées, qui se comptent par milliers et se voient écartées pour toujours de la fonction publique, puissent, après avoir été jugées objectivement, être réintégrées dans leur emploi et bénéficier de réparations. Ils ont également observé que, malgré les demandes répétées de la commission d'experts, le gouvernement n'a toujours pas fourni copie d'un quelconque jugement rendu. Faute d'informations communiquées par le gouvernement, il faut donc se référer aux informations fournies par la Confédération des syndicats de Turquie et constater à regret que le gouvernement turc n'applique pas correctement la convention no 111 qu'il a ratifiée.
Le membre travailleur de la Turquie a déclaré que, comme l'a indiqué la commission d'experts, en vertu de l'article 2 de la loi martiale no 1402, les autorités compétentes sont tenues d'exécuter immédiatement toute demande des commandants de l'état de siège de transférer ou de licencier des employés dont les services seraient considérés comme dangereux pour la sécurité générale, la loi et l'ordre ou la sûreté publique. Il a été demandé maintes fois au gouvernement turc de prendre des mesures pour abroger ou modifier ces dispositions afin que tout transfert ou licenciement ne puisse être effectué que sur la base de critères strictement définis; ce cas a également fait l'objet d'une mission de contacts directs qui n'a donné aucun résultat. Entre septembre 1980 et la date à laquelle a été levée la loi martiale, dans toutes les régions de Turquie, de nombreux fonctionnaires ont été licenciés en application de cette loi. Le caractère dangereux des services de ces personnes a été déterminé en recourant à diverses sources d'informations dénuées de toute fiabilité telles que rapports d'enquêtes sur la sécurité réalisés par les services de renseignements nationaux et la police, informateurs ou dénonciateurs. Ces informations étaient fondées sur des oui-dire et des évaluations de caractère politique. En outre, considérées comme confidentielles, ces informations n'étaient pas communiquées aux personnes concernées qui n'avaient donc aucun moyen de les contester ou d'apporter des éclaircissements. Au nombre des victimes de cette pratique inacceptable, l'on compte 95 assistants d'université, 2 515 instituteurs, 1298 fonctionnaires et 317 ouvriers; 4000 ont été révoqués et 4509 agents de l'administration ont été transférés. Une minorité d'entre eux ont été réintégrés. Le projet déposé au parlement est loin d'être satisfaisant puisqu'il maintient les pouvoirs conférés aux commandants de l'état de siège bien qu'il limite la durée des mesures de licenciement ou de transfert à la période pendant laquelle la loi martiale est en vigueur et qu'il prévoie que les personnes intéressées peuvent demander une nouvelle enquête. Il est regrettable que le projet de loi ne limite pas les mesures visant à assurer la sécurité de l'Etat, par exemple en définissant strictement les critères qui peuvent fonder une décision de licenciement ou de transfert. Ce projet de loi vise en fait à annihiler tous les résultats positifs acquis devant les tribunaux. De plus, les personnes réintégrées ne se voient accorder aucune compensation financière pour les salaires et autres prestations afférents à la période pendant laquelle elles ont été privées d'emploi. Ce projet de loi n'améliorera en aucune façon la situation et il ne résoudra pas les problèmes actuels.
Il convient de relever pour conclure que la Turquie a bien ratifié la Charte sociale européenne mais qu'elle a exprimé des réserves en ce qui concerne la liberté syndicale et le droit de négociation collective.
Le membre travailleur de l'Espagne a déclaré que, compte tenu du fait que le projet de loi portant modification de la loi martiale maintenait les pouvoirs accordés aux commandants de l'état de siège de demander la révocation ou le transfert de fonctionnaires, il était impossible de prendre acte de progrès dans l'application de la convention. En effet, la possibilité de recourir aux tribunaux ou à d'autres autorités compétentes ou, comme le prévoit le projet de loi de demander un réexamen du cas ne constitue pas une véritable garantie puisque les pouvoirs publics continueront probablement à appliquer la législation en vigueur au lieu de donner effet à la convention no 111. En conséquence, il est indispensable de modifier la législation de manière que les autorités militaires ne continuent pas à appliquer les dispositions en question. Il a rappelé la résolution adoptée par la Conférence en 1970 sur les droits syndicaux et leurs liens avec les libertés civiques, parmi lesquels figurent les droits consacrés par la convention no 111. L'orateur a souligné que la seule façon de résoudre le problème des licenciements et des déplacements de fonctionnaires était de proclamer l'amnistie, c'est-à-dire de réintégrer tous les intéressés dans l'emploi qu'ils avaient avant d'être congédiés ou déplacés selon des procédés discriminatoires, de manière qu'ils puissent tous de nouveau jouir de leurs droits.
Les membres employeurs ont souligné que ce cas soulève le problème de la loi martiale qui ne relève pas directement de la compétence de l'OIT. Ils ne peuvent que prendre acte de la situation et des conséquences de l'état d'urgence tout en déplorant qu'un pays se voie contraint de prendre de telles mesures.
Lors de l'application de l'état d'urgence, les commandants de la loi martiale ont le droit de révoquer ou de déplacer des agents de la fonction publique pour autant que la sécurité nationale soit menacée. Le projet de loi actuellement en préparation devrait permettre de réduire la durée d'application des mesures de révocation et devrait représenter une amélioration de la situation puisque, selon la commission d'experts, les motifs de révocation invoqués ne sont pas toujours liés à la sécurité du pays.
Les employeurs se sont associés à la commission d'experts pour demander au gouvernement de fournir des informations supplémentaires sur cette question ainsi que sur toute modification qu'il envisagerait d'apporter à la loi martiale. Ils ont pris acte du souhait exprimé par la commission d'experts que les fonctionnaires révoqués jouissent d'un droit de recours et puissent demander la révision de leur cas. Le représentant gouvernemental a indiqué dans sa déclaration qu'il n'était pas en mesure de fournir les informations demandées sur le projet de loi qui venait d'être soumis au parlement, ce qui leur semble compréhensible. Ils ont observé que, dans ces trois derniers rapports, le Comité de la liberté syndicale a souligné que la Turquie a toujours soumis les informations requises. Ils veulent croire une fois de plus que le gouvernement fera diligence dès que la situation le lui permettra. Ils ont exprimé le voeu que les conclusions de la commission reflètent son espoir de voir disparaître les séquelles de l'état d'urgence et s'instaurer en Turquie une société libérée de toute pression politique.
Le représentant gouvernemental a noté que l'on demandait au gouvernement de fournir des informations, et de prendre des mesures d'ordre législatif. S'agissant de la première demande, le gouvernement fournira des informations aussi rapidement que possible: en ce qui concerne la seconde, le gouvernement ne peut qu'élaborer un projet de loi et le soumettre au parlement, ce qui a été fait en février 1989. Le projet a été examiné par la Commission de la défense nationale; il passera ensuite devant les commissions de la justice de la Constitution puis sera discuté en séance plénière du parlement. Le gouvernement n'est de toute évidence pas en mesure de se prononcer sur ce projet de loi qui n'est pas arrivé au terme du processus législatif.
Enfin, en vertu de l'article 122 de la Constitution turque, toutes les lois du gouvernement peuvent faire l'objet d'un contrôle judiciaire. Par ailleurs, les tribunaux ont prononcé la réintégration de 3406 personnes sur 4891, soit 70 pour cent des personnes dont il a été question ici.
Le représentant gouvernemental a déploré que les conclusions de la commission sur le cas de la Turquie soient totalement disproportionnées par rapport aux conclusions qu'elle a tirées pour d'autres pays. Elles sont non seulement disproportionnées du point de vue de la compatibilité des pratiques nationales avec les normes de l'OIT mais elles ne servent en rien les objectifs généraux de la commission. L'orateur a en outre exprimé son désaccord avec la proposition des membres travailleurs et des membres employeurs de citer le cas de la Turquie dans un paragraphe spécial.
La commission a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental et des différentes opinions et commentaires exprimés lors de la discussion. La commission a noté les conclusions de la commission d'experts selon lesquelles il subsiste tant en droit qu'en pratique de profondes divergences en ce qui concerne la pleine application de la convention. La commission a exprimé le vif espoir que la révision envisagée de certains articles de la loi martiale no 1402 tiendra dûment compte des observations des organes de contrôle de l'OIT et que le gouvernement poursuivra ses efforts pour que des mesures destinées à assurer la sécurité de l'Etat soient définies et délimitées de manière telle qu'elles n'entraîneront plus aucune discrimination fondée sur l'opinion politique. La commission a voulu croire que le gouvernement communiquera dans un proche avenir toutes les informations demandées afin de permettre à la commission de s'assurer de l'application de la convention et de la réalisation de progrès déterminants.
Sur la proposition des membres travailleurs, appuyée par les membres employeurs, la commission a décidé de consigner ce cas dans un paragraphe spécial de son rapport.
Voir sous convention no 98, comme suit:
Le gouvernement a fourni les informations suivantes:
Le gouvernement, conformément aux objectifs mentionnés dans la lettre adressée au Directeur général le 30 avril 1986 par le précédent ministre du Travail et de la Sécurité sociale, a examiné à fond les questions relatives aux relations professionnelles en Turquie.
A cet égard, à la suite des consultations qui ont eu lieu entre le gouvernement et tout d'abord les partenaires sociaux puis, ultérieurement, un représentant du Bureau, au cours d'une récente mission consultative technique et à la lumière des souhaits exprimés tant par les travailleurs et les employeurs que par l'OIT, et en tenant compte à la fois de ces souhaits et d'autres facteurs, le gouvernement a estimé nécessaire de revoir de nouveau d'une manière plus complète la question afin d'amender la loi no 2821 sur les syndicats et la loi no 2822 sur la négociation collective, les grèves et les lock-out, conformément aux changements intervenus dans les conditions nationales. A cet effet, il sera naturellement nécessaire de tenir compte de certaines dispositions de la Constitution.
Le gouvernement est d'avis que toutes les mesures nécessaires doivent être prises pour élaborer une législation du travail qui soit pleinement conforme aux principes et aux normes de l'OIT. A cette fin, le gouvernement va de nouveau engager de véritables consultations tripartites en Turquie. Le gouvernement espère également pouvoir bénéficier des avis techniques que pourra lui fournir le Bureau à cet égard.
Le gouvernement a l'intention de faire débuter immédiatement cet exercice et il espère qu'il sera achevé le plus rapidement possible à la condition que toutes les parties y participent pleinement et de manière constructive et que le processus législatif lui en offre les possibilités appropriées.
Un représentant gouvernemental, se référant aux informations écrites communiquées par le gouvernement, a déclaré que les observations formulées par la commission d'experts en ce qui concerne la convention no 98 avaient fait l'objet d'un examen approfondi sur une base tripartite et qu'un effort réel avait été entrepris avec les organisations d'employeurs et de travailleurs pour mettre la législation en meilleure conformité avec les normes de l'OIT en la matière. La loi no 3299 du 3 juin 1986 contient un certain nombre d'amendements à la loi no 2822 de 1983 sur la négociation collective, les grèves et les lock-out. Des missions consultatives techniques se sont rendues en Turquie sur l'invitation du gouvernement en avril 1986 ainsi qu'en 1987 pour discuter des amendements législatifs en considération. Le gouvernement en a conclu qu'un certain nombre de problèmes législatifs existent encore, qui sont dus au fait que la loi de 1983 avait été adoptée sous l'empire de la loi martiale dans les années quatre-vingt, période justifiant des mesures spéciales. La situation politique et sociale s'étant considérablement améliorée depuis lors tant sur le plan national qu'international, le gouvernement estime que toutes les mesures législatives nécessaires peuvent et doivent être prises pour mettre les dispositions de la législation du travail en conformité avec les principes et les normes de l'OIT et éliminer ainsi tout élément incompatible avec ceux-ci. Le gouvernement a l'intention d'entreprendre immédiatement un réexamen plus complet de la question qu'il espère pouvoir achever le plus rapidement possible à condition que toutes les parties intéressées participent pleinement et de manière constructive à ce processus. Il est également déterminé à maintenir sa coopération très fructueuse avec l'OIT afin de réaliser ces objectifs.
En ce qui concerne la convention no 111, le représentant gouvernemental a indiqué que l'état de siège en vigueur en vertu de la loi no 1402 sera levé à partir du 19 juillet 1987 dans les cinq provinces dans lesquelles il demeure encore appliqué. Indépendamment de l'existence de la loi martiale, un certain nombre de garanties existent dans la législation nationale contre le risque de discrimination fondée sur l'opinion politique. L'article 10 de la constitution prévoit que toute personne est égale devant la loi quelle que soit, notamment, son opinion politique et que les organes de l'Etat et les autorités administratives doivent agir en conformité avec ce principe d'égalité. En outre, en vertu de l'article 125 de la Constitution, tous actes de l'administration sont susceptibles de recours. En application de ces dispositions, sur un total de 4 530 fonctionnaires ayant fait l'objet d'un licenciement, 3 999 cas ont été ainsi réexaminés à ce jour. Dans les cinq provinces dans lesquelles la loi martiale demeurait en application, seuls cinq fonctionnaires ont été licenciés au cours des trois dernières années, le dernier licenciement datant de février 1986. L'application de la loi martiale no 1402 est donc assortie des procédures juridiques nécessaires empêchant que son application ne puisse conduire à des discriminations d'ordre politique ou autre. En outre, cette loi n'a pas été appliquée depuis février 1986 et cessera d'être en vigueur dès la levée totale de l'état de siège du 19 juillet 1987.
Le membre travailleur de la Suède a rappelé que le cas de la Turquie faisait l'objet d'une discussion de la commission depuis plusieurs années. A chaque fois le gouvernement s'engageait à prendre des mesures pour améliorer la situation mais, dans la réalité, très peu a été fait. L'exercice du droit de négociation collective est rendu pratiquement impossible en raison d'exigences exagérées de la législation quant à la représentabilité des syndicats et le droit de grève est limité par une procédure qui permet de l'ajourner pendant une durée de 60 jours, de sorte que son exercice en est rendu extrêmement difficile. Le droit de négociation collective n'est qu'une extension du droit syndical le plus fondamental: la liberté syndicale. Le droit de négociation collective ne peut être pleinement utilisé que si les organisations de travailleurs et d'employeurs jouissent du droit suprême d'organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d'action sans ingérence des autorités publiques. Or, dans ce domaine, beaucoup reste également à faire. Les syndicats suédois sont profondément préoccupés par la situation syndicale en Turquie et ils expriment l'espoir que les modifications législatives nécessaires seront adoptées le plus rapidement possible, de manière à assurer la pleine application des conventions des normes de l'OIT concernant la liberté syndicale, la négociation collective ainsi que l'exercice du droit de grève et de lock-out.
Le membre travailleur de la Grèce a déclaré s'associer à la déclaration du membre travailleur de la Suède. Il a rappelé qu'une des organisations syndicales turques avait été interdite. Dans ces conditions, on ne saurait considérer que le droit de négociation collective existe librement en Turquie. Le représentant gouvernemental devrait être prié de fournir des informations sur les procès faits aux syndicalistes turcs ainsi que sur l'état de la liberté syndicale dans le pays.
Le membre travailleur de la Turquie a insisté sur le fait que le gouvernement n'avait pas tenu sa promesse faite en 1986. Il est regrettable qu'aucun progrès n'ait été réalisé cette année. La mission d'évaluation technique du BIT d'avril 1987 décrit la situation syndicale générale de manière parfaitement claire. Les lois nos 2821 et 2822 sur les syndicats, la négociation collective et les grèves violent les droits fondamentaux reconnus dans la convention no 98 et ne sont pas en conformité avec le principe selon lequel les organisations ont le droit d'organiser leur administration et leurs activités et de formuler leurs programmes d'action en toute liberté. Ainsi, il est interdit aux fonctionnaires, aux enseignants des écoles privées, aux travailleurs des institutions religieuses et aux étudiants qui travaillent d'établir des syndicats et de s'y affilier. Les candidats aux postes de dirigeants syndicaux ne doivent pas avoir été condamnés pour violation des dispositions concernant la négociation collective et les grèves, et il faut avoir travaillé au moins 10 ans avant d'être éligible aux fonctions de dirigeant syndical. Toute activité politique est interdite aux syndicats. Il est mis fin automatiquement aux fonctions des dirigeants syndicaux et des confédérations lorsqu'ils acceptent une fonction dans un organe gouvernemental ou un parti politique. Les autorités disposent du pouvoir discrétionnaire de faire des enquêtes périodiques sur les affaires internes des syndicats et des confédérations. Les syndicats doivent regrouper 10 pour cent des travailleurs occupés dans une branche d'activité déterminée ainsi que plus de 50 pour cent des travailleurs employés dans l'établissement ou l'entreprise pour avoir le droit de négocier collectivement. Des restrictions sévères sont apportées au droit de grève dans plusieurs secteurs qui ne peuvent pas être considérés comme des services essentiels. Le gouvernement est en droit de différer l'application d'une décision de grève et de soumettre le conflit à l'arbitrage obligatoire d'un organe contrôlé par lui. Le gouvernement n'a non seulement pris aucune mesure pour donner suite aux assurances qu'il avait données en 1986, mais il a encore aggravé la situation en étendant l'application du décret no 2333 concernant les contrats privés d'emploi aux entreprises publiques. Les travailleurs soumis à ce décret ne peuvent pas s'affilier à un syndicat ni bénéficier des conventions collectives. En outre, il a été créé en 1986 trois soi-disant organisations d'employeurs publics qui représentent les entreprises d'Etat et les institutions publiques dans les négociations. Par l'intermédiaire de ces organisations qui sont dirigées par des fonctionnaires, le gouvernement réglemente tout ce qui ferait normalement l'objet de la négociation collective.
Le membre travailleur de la France s'est référé à certains faits montrant dans la pratique des restrictions très importantes à la liberté syndicale, à la liberté d'expression et au droit de négociation collective. Ainsi le siège de l'organisation syndicale TURK-IS a été encerclé par la police alors que 700 militants syndicaux y étaient rassemblés dans le but d'aller remettre une pétition au parlement sur des problèmes politiques et sociaux. D'autre part, le président de la DISK, organisation syndicale déclarée illégale, a reçu son visa avec retard pour se rendre à la Conférence internationale du Travail. Il s'agit d'atteintes au pluralisme et à la liberté syndicale qui sont inacceptables. Le gouvernement a demandé son adhésion à la Communauté économique européenne. Celle-ci n'est pas simplement une structure économique, c'est aussi une entité de caractère politique qui exige que les éléments de démocratie traditionnels soient appliqués dans ses Etats membres. C'est pourquoi, si le gouvernement veut avoir le soutien du mouvement syndical européen dans sa demande d'adhésion à la CEE, il est nécessaire qu'il applique correctement les engagements internationaux qu'il a pris, et notamment qu'il respecte les conventions fondamentales de l'OIT.
Le membre travailleur des Etats-Unis a déclaré que les informations fournies par le membre travailleur de la Turquie illustraient la gravité des agissements du gouvernement. L'article 37 de la loi no 2821 interdit toute activité politique des syndicats et de leurs confédérations, ce qui est en contradiction directe avec l'article 1 de la convention no 111.
Le membre travailleur de la Norvège a rappelé que la Fédération des syndicats norvégiens avait présenté en 1982 une réclamation contre la Turquie concernant la violation des conventions nos 111 et 98 par ce pays. Cinq ans plus tard, la législation turque contrevient toujours et de manière grave à ces deux conventions fondamentales. Malgré ses promesses, le gouvernement turc n'a toujours pas pris de mesures pour modifier l'article 12 de la loi no 2822 qui subordonne le droit de la négociation collective des syndicats à des conditions de représentativité exagérées. En ce qui concerne la convention no 111, il convient de rappeler que, selon les normes internationales concernant les droits de l'homme, l'établissement ou le maintien de la loi martiale ne se justifient que dans des situations d'urgence exceptionnelles affectant la vie de la nation. Dans ces conditions, le maintien de la loi martiale en Turquie constitue une sérieuse violation des droits fondamentaux de l'homme tels qu'ils sont reconnus dans l'article 15 de la convention européenne des droits de l'homme ainsi que par la Constitution et les conventions de l'OIT, et notamment la convention no 111. Le maintien de la loi martiale ne saurait être une justification pour le gouvernement de ne pas s'acquitter de ses obligations découlant de la ratification de la convention no 111. Depuis plusieurs années, cette législation a conduit à de sérieuses et nombreuses discriminations de fonctionnaires ou de candidats à la fonction publique. Les employés concernés ont été licenciés, transférés ou envoyés dans d'autres régions sur la base de critères ne donnant aucune garantie certaine contre les discriminations fondées exclusivement sur des motifs politiques. En conséquence, la commission devrait exprimer sa profonde préoccupation devant le maintien dans cinq provinces de la loi martiale dont les dispositions impliquent de sérieuses violations de ladite convention à l'égard des fonctionnaires. La commission devrait également constater avec regret la lenteur avec laquelle des efforts ont été entrepris pour assurer la mise en oeuvre de la convention no 98 sur le plan législatif.
Les membres travailleurs ont rappelé que le droit de négociation collective est intimement lié à la liberté syndicale qui est un principe fondamental de la Constitution de l'OIT. Les interventions précédentes ont montré que dans ce domaine des violations flagrantes étaient constatées. Une organisation a été dissoute, des dirigeants syndicaux ont été condamnés de sorte que tant le droit de négociation que la liberté d'association sont bafoués. Les conditions exigées des syndicats pour qu'ils puissent bénéficier du droit de négociation collective montrent que l'on veut arriver à une sorte d'unicité syndicale. Or, il n'appartient pas au gouvernement d'imposer de telles mesures, mais la décision doit en être laissée aux responsables syndicaux. En 1986, la commission, par manque de temps, avait renoncé à discuter du cas de la Turquie compte tenu des informations écrites fournies par le gouvernement et des assurances données par celui-ci. Elle avait toutefois insisté sur le fait qu'elle s'attendait à ce que les promesses formulées par le gouvernement soient réalisées dans les meilleurs délais de manière à pouvoir constater des progrès lors de sa prochaine session. Or, force est de constater que ces promesses n'ont pas été tenues. Fait plus grave encore, le gouvernement, immédiatement après la discussion de 1986, a tenu une conférence de presse pour faire valoir que la situation syndicale en Turquie ne faisait pas l'objet de critiques au niveau international et que les problèmes en suspens seraient réglés sans intervention extérieure. De tels procédés ne favorisent pas le dialogue et ne permettent pas de réaliser des progrès. Aujourd'hui, le représentant gouvernemental indique que la loi martiale sera levée prochainement dans un certain nombre de provinces. En fait, le gouvernement paraît toujours vouloir se réserver la possibilité d'intervenir arbitrairement en se prévalant de soi-disant dangers pour la sécurité de l'Etat. Par ailleurs, dans les informations écrites communiquées à propos de la convention no 98, le gouvernement indique avoir l'intention de revoir la question de la manière la plus appropriée mais qu'il sera naturellement nécessaire de tenir compte de certaines dispositions de la Constitution. L'ambiguïtè de cette déclaration est embarrassante. Cela signifie-t-il que la Constitution turque contient des dispositions contraires à la convention ou que la convention ne peut pas être appliquée intégralement? Les informations fournies dans le cadre de la convention no 111 manquent également de clarté, aucune réponse valable n'ayant été fournie aux observations de la commission d'experts. Il n'a été fait état d'aucun progrès concret; seules des promesses et des déclarations ont été faites. Dans ces conditions, il importe que le gouvernement prenne au sérieux la préoccupation manifestée par les membres travailleurs.
Les membres employeurs ont rappelé, en ce qui concerne la convention no 98, que des rapports détaillés avaient été communiqués par le gouvernement. Si la commission d'experts a pu noter avec intérêt l'évolution qui a lieu en Turquie, des restrictions considérables limitent toujours le droit de négociation collective. Avec l'assistance du BIT, ces problèmes ont pu être discutés avec le gouvernement. Celui-ci indique maintenant que de nouvelles propositions sont en voie d'élaboration pour modifier la législation. A cet effet, le gouvernement espère pouvoir en discuter les détails avec une nouvelle mission du BIT. Il semble que le gouvernement s'engage sur la bonne voie mais il serait souhaitable que le représentant gouvernemental précise si c'est bien l'intention de son gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour mettre tous les points soulevés par la commission d'experts en conformité avec la convention. Il convient également de souligner que, comme l'ont relevé les membres travailleurs dans leurs nombreuses interventions, la situation n'est pour l'instant toujours pas conforme à la convention no 98. En ce qui concerne la convention no 111, il serait souhaitable que le représentant gouvernemental indique si la décision de lever la loi martiale a été prise officiellement et si elle sera publiée dans le Journal officiel. Peu d'informations ont été fournies sur les mesures prises, notamment en ce qui concerne les licenciements et les condamnations à des peines de prison. Des informations complémentaires sont nécessaires car pour l'instant la situation n'est pas en conformité avec la convention.
Le représentant gouvernemental a rappelé qu'en 1986 un certain nombre d'amendements à la loi no 2822 de 1983 avaient été adoptés en vue d'assurer une meilleure application de la convention no 98. Etant donné que certains points demeurent en suspens, le gouvernement a décidé de réexaminer la question d'une manière approfondie mais cela prendra un certain temps car, dans un système parlementaire, la modification de la législation ne dépend pas seulement du gouvernement. Il est nécessaire d'obtenir l'accord des partenaires sociaux et de susciter une certaine prise de conscience du parlement et de l'opinion publique. En outre, il est nécessaire de développer un dialogue constructif avec l'OIT. La vie politique, économique et sociale a évolué de manière positive ces dernières années, ce qui ne manquera pas d'avoir un effet favorable sur les relations professionnelles. Le gouvernement est prêt à s'acquitter de ses obligations internationales et à prendre les mesures nécessaires pour modifier la législation sociale de manière à supprimer tout élément incompatible avec les normes internationales du travail. Cela sera accompli dans un délai compatible avec l'évolution politique, économique et sociale. C'est le parlement qui a pris la décision de lever la loi martiale dans les provinces où elle est encore en application avec effet au 19 juillet 1987. Il n'y aura donc plus aucune question en suspens en ce qui concerne la convention no 111. Quant à la manifestation organisée par la Confédération des syndicats turcs, celle-ci aurait dû en demander l'autorisation préalable, ce qu'elle n'a jamais fait. Il était donc normal que des complications s'ensuivent. Son gouvernement est conscient du fait que pour pouvoir adhérer à la CEE, il devra se conformer aux normes prévalant dans cette organisation. Enfin, la loi d'amnistie générale a été soumise au parlement. Celui-ci a adopté une loi qui prévoit une certaine réduction des peines de prison.
La commission a noté les informations communiquées par le gouvernement et son représentant. Elle a exprimé sa préoccupation au sujet des sérieuses divergences qui existent toujours entre la législation et la pratique nationales et les conventions nos 98 et 111, et cela malgré les promesses faites à plusieurs reprises par le gouvernement. Elle a exprimé l'espoir que ces promesses seront pleinement réalisées dans un avenir très proche et qu'elle pourra enregistrer des progrès lors de sa prochaine session. Si tel ne devait pas être le cas, la commission se verra obligée de recourir à d'autres moyens en vue d'assurer la conformité avec les conventions.
La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle espère qu’un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu’il contiendra des informations complètes sur les points soulevés dans sa précédente demande directe, qui était conçue dans les termes suivants:
Articles 1 et 2 de la convention. Harcèlement sexuel. La commission note que, selon le rapport du gouvernement, 1 071 condamnations ont été prononcées en 2007 sur la base de l’article 105 du Code pénal qui érige le harcèlement sexuel en infraction pénale et que des procédures ont été entamées suite à des plaintes des victimes. Rappelant ses commentaires précédents sur le fait que les dispositions concernant le harcèlement sexuel sont contenues dans les articles 24 et 25 de la loi sur le travail ainsi que dans l’article 105 du Code pénal, la commission demande à nouveau au gouvernement de préciser quel genre de comportement est considéré comme constituant un «harcèlement sexuel» au sens du Code du travail et du Code pénal, sachant qu’aucun de ces instruments ne le définit. Considérant le nombre important de condamnations prononcées sur la base de l’article 105 du Code pénal, la commission prie le gouvernement d’indiquer le nombre de cas concernant le harcèlement sexuel sur le lieu de travail et de fournir des informations sur toute autre mesure prise tendant à la prévention du harcèlement sexuel, notamment sur les initiatives de sensibilisation de l’opinion.
Egalité de chances et de traitement en matière d’emploi et de profession sans distinction de la race, de la couleur et de l’ascendance nationale. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur la situation en matière d’emploi et de profession des minorités non musulmanes, ainsi que sur celle des citoyens turcs d’origine kurde ou rom. Prière d’indiquer les mesures prises pour promouvoir et assurer l’égalité de chances de ces personnes en matière d’emploi et de profession.
Article 5. Mesures spéciales de protection. La commission note qu’en vertu de l’article 79 du Code du travail un salarié se voit interdit de travailler lorsque son âge, son sexe ou sa santé est incompatible avec l’emploi dans un établissement. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les cas dans lesquels l’âge, le sexe ou la santé du salarié est considéré comme incompatible avec l’emploi dans un établissement donné.
La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente, qui était conçue dans les termes suivants:
La commission prend note du rapport du gouvernement, ainsi que des commentaires formulés par la Confédération turque des associations d’employeurs (TİSK) et la Confédération des syndicats turcs (TÜRK-İŞ), qui étaient joints au rapport.
Articles 1 et 2 de la convention. Discrimination fondée sur l’opinion politique. La commission rappelle ses précédents commentaires concernant l’application de la loi antiterrorisme ou du Code pénal dans des affaires impliquant des journalistes, des écrivains et des éditeurs ayant exprimé leurs opinions politiques. Notant que le gouvernement n’a pas communiqué d’information sur ce sujet, la commission le prie une fois encore de communiquer des informations sur le nombre et l’issue des affaires dans lesquelles des journalistes, des écrivains et des éditeurs sont poursuivis, en précisant brièvement les faits qui leur sont reprochés et les charges retenues contre eux. La commission demande également au gouvernement de fournir des informations sur toute mesure prise, y compris sur le plan législatif, pour garantir que des restrictions ne puissent être imposées à des journalistes, des écrivains ou des éditeurs dans leur emploi ou dans l’exercice de leur profession, en raison des opinions politiques qu’ils expriment.
Article 2. Egalité de chances et de traitement entre hommes et femmes. La commission note, d’après les données statistiques du BIT, que le taux d’activité des femmes (de plus de 15 ans) est tombé à 24,5 pour cent en 2008 (il était de 24,8 pour cent en 2005). En comparaison, le taux d’activité des hommes était de 70,1 pour cent en 2008 (72,2 pour cent en 2005). La commission note que, entre 2001 et 2008, l’activité économique des femmes de moins de 20 ans et des femmes de plus de 45 ans a baissé. La baisse de l’activité économique des jeunes femmes, qui coïncide avec l’augmentation de leur participation à l’éducation, s’est traduite par une hausse de l’activité économique des femmes de 20 à 45 ans. La commission note, selon les informations du gouvernement dans son rapport, que le taux de scolarisation des filles dans le secondaire était de 55,8 pour cent en 2007-08, alors qu’il était de 61,1 pour cent pour les garçons au cours de la même période.
La commission se félicite des progrès réalisés dans le domaine de l’égalité de chances entre hommes et femmes dans l’éducation, mais note avec préoccupation le faible niveau de participation active des femmes sur le marché du travail, et notamment la baisse du taux d’activité des femmes de plus de 45 ans. Dans son observation précédente, la commission avait demandé au gouvernement de communiquer des informations détaillées sur les mesures prises pour promouvoir l’égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession. La commission note, d’après le rapport du gouvernement, que des dispositions relatives à l’égalité de traitement existent dans la Constitution, le Code du travail et le règlement des programmes pour l’emploi; que 13 123 femmes et 30 418 hommes sans emploi ont participé à des programmes de formation et d’intégration organisés par l’Agence nationale pour l’emploi turque; que des amendements législatifs concernant le congé de paternité ont été élaborés, comme la commission l’avait déjà noté en 2007; et que des efforts pour analyser la situation des femmes sur le marché du travail ont été déployés dans le contexte de la stratégie européenne pour l’emploi. La commission note que le gouvernement a communiqué très peu d’informations sur les mesures visant à promouvoir l’égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes dans la pratique et aucune information sur le suivi du Sommet pour l’emploi des femmes tenu à Istanbul en 2006 ni sur la collaboration avec les organisations de travailleurs et d’employeurs sur la question. La TISK indique que 24 projets pour aider les femmes et les jeunes sans emploi à acquérir des compétences et de l’expérience professionnelles ont été présentés en avril 2008, dans le cadre d’un programme financé par l’Union européenne. La TİSK indique que, en tant que corollaire à la stratégie nationale pour l’emploi, la politique nationale pour l’emploi des femmes doit être mise en œuvre. Selon la TÜRK-İŞ, les institutions de formation professionnelle à l’échelon provincial n’ont pas fonctionné de manière satisfaisante. Notant que des politiques et des mesures volontaires sont nécessaires pour surmonter les inégalités persistantes entre hommes et femmes sur le marché du travail, la commission demande au gouvernement de communiquer des informations plus détaillées sur les mesures pratiques et les projets mis en œuvre pour promouvoir l’égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession, y compris les mesures spécifiquement prises pour les femmes dans les zones rurales et les femmes de plus de 45 ans. La commission demande au gouvernement de communiquer des informations sur toute mesure prise pour donner suite au Sommet pour l’emploi des femmes de 2006, notamment les mesures visant à collaborer avec les partenaires sociaux. En outre, la commission demande une fois encore au gouvernement de communiquer des données statistiques sur la situation des hommes et des femmes sur le marché du travail, notamment sur leur participation à différents secteurs et professions.
Dans ses précédents commentaires, la commission avait demandé au gouvernement de donner son avis sur les conséquences de l’interdiction faite aujourd’hui aux étudiants et étudiantes des établissements supérieurs de se couvrir la tête, et sur la fréquentation de ces établissements par des femmes qui veulent porter un foulard sur la tête par obligation ou conviction religieuses. A cet égard, la commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur le nombre d’étudiantes qui auraient été expulsées de ces établissements pour avoir porté un foulard sur la tête. En réponse à ces commentaires, le gouvernement indique qu’il n’est pas en mesure de communiquer ces informations. La commission rappelle ses précédents commentaires dans lesquels elle indiquait que, bien que l’interdiction de se couvrir la tête concerne toutes les formes de couvre-chefs et s’applique aux hommes comme aux femmes, l’effet de cette mesure est potentiellement discriminatoire à l’égard des femmes en ce qui concerne leur accès à l’enseignement supérieur. La commission demande une fois encore au gouvernement d’obtenir et de communiquer des informations sur le nombre d’étudiantes expulsées des universités pour avoir porté un foulard, et d’indiquer les mesures prises pour évaluer la situation et examiner la question.
Articles 1, 2 et 3. Protection légale contre la discrimination concernant le recrutement et la sélection. La commission rappelle que l’article 5(1) du Code du travail interdit toute discrimination dans la relation de travail fondée sur la langue, la race, le sexe, l’opinion politique, les convictions philosophiques, la religion, et sur d’autres motifs analogues. Dans ses précédents commentaires, la commission avait conclu que cette disposition n’interdit pas la discrimination au stade du recrutement. Néanmoins, elle avait noté que l’article 122 du nouveau Code pénal turc, entré en vigueur en 2005, prévoit que toute personne qui commet une discrimination fondée sur la langue, la race, la couleur, le sexe, le handicap, l’opinion politique, les convictions philosophiques, la religion, la croyance ou quelque autre critère, qui subordonne l’emploi d’une personne à l’un de ces critères ou qui empêche une personne d’exercer une activité économique ordinaire, sur la base de l’un de ces critères, encourt une peine d’emprisonnement de six mois à un an ou une amende pénale. La commission note, comme indiqué par le gouvernement, qu’il y a eu un cas fondé sur l’article 122 du Code pénal. Rappelant que la convention impose de prendre des mesures contre la discrimination en matière d’accès à l’emploi, notamment concernant le recrutement et la sélection, la commission demande au gouvernement de continuer à communiquer des informations sur le nombre, la nature et l’issue des procédures pénales, en vertu de l’article 122 du Code pénal, afin qu’elle puisse vérifier s’il existe une protection effective contre la discrimination au stade du recrutement dans le cadre de la législation existante. La commission demande également au gouvernement d’indiquer si les personnes se considérant elles-mêmes victimes de discrimination dans l’emploi peuvent présenter une plainte en vertu de l’article 122 du Code pénal, et si elles peuvent obtenir réparation ou d’autres compensations.
Contrôle de l’application de l’article 5 du Code du travail. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que, selon les commentaires communiqués par les syndicats, la discrimination fondée sur le sexe est courante, en dépit des dispositions légales concernant l’égalité de traitement prévues par l’article 5 du Code du travail. Répondant à la demande d’informations de la commission sur les mesures prises par l’inspection du travail pour veiller au respect des dispositions de la législation du travail, le gouvernement indique de manière générale que le respect de l’article 5 est pris en considération dans le contexte des inspections et qu’une demande individuelle peut déclencher une inspection. Néanmoins, les informations communiquées n’indiquent pas si les inspections conduites ni si les amendes infligées concernent des questions relevant de l’article 5 du Code du travail. La commission demande au gouvernement de communiquer des informations indiquant si l’inspection du travail a traité des cas en vertu de l’article 5 du Code du travail et demande une fois encore au gouvernement d’indiquer si des décisions judiciaires ont été rendues dans ces affaires. Prière d’indiquer le nombre, la nature et l’issue de ces cas.
Articles 1, 2 et 3 d). Application de la convention dans le service public. La commission rappelle les préoccupations exprimées par la Confédération de syndicats de fonctionnaires (KESK) selon lesquelles la législation couvrant les salariés du secteur public ne comporte pas de dispositions contre la discrimination et indiquant que la protection de caractère général offerte par l’article 10 de la Constitution est insuffisante. La KESK citait des exemples d’annonces d’emploi discriminatoires et d’inégalités de traitement des femmes dans l’accès à des postes de responsabilité de la fonction publique. En réponse aux précédents commentaires de la commission, le gouvernement indique que les fonctionnaires sont nommés en fonction des résultats d’un examen centralisé ayant lieu dans tout le pays. Les entretiens ne concernent qu’un nombre limité de postes, et le gouvernement est d’avis que cela réduit la possibilité de discrimination. En outre, le gouvernement affirme qu’il n’y a pas de discrimination fondée sur le sexe concernant le recrutement à des postes de niveau supérieur. Tout en notant cette information, la commission veut croire que le gouvernement prendra rapidement des mesures pour répondre à toute allégation de discrimination dans la fonction publique. Elle demande aussi au gouvernement de communiquer des informations détaillées sur la participation des hommes et des femmes aux examens pour les différents secteurs d’activité et emplois dans la fonction publique, sur le nombre de nominations suite à des entretiens et sur les mesures prises pour promouvoir l’égalité de chances entre hommes et femmes, notamment les mesures visant à permettre aux hommes et aux femmes de concilier responsabilités professionnelles et familiales.
La commission rappelle en outre ses précédents commentaires dans lesquels elle craignait que les enquêtes de sûreté entraînent un rejet des candidatures qui serait fondé sur des considérations contraires à la convention, par exemple sur le fait d’avoir exprimé pacifiquement certaines opinions politiques. Notant que le gouvernement n’a pas communiqué les informations demandées par la commission à cet égard, la commission demande une fois encore au gouvernement d’évaluer la mesure dans laquelle les enquêtes de sûreté ont pu entraîner un rejet ou une exclusion d’un emploi public, et de communiquer les résultats de cette évaluation. Dans ce contexte, la commission demande au gouvernement d’indiquer le nombre de recours administratifs exercés par des personnes dont la candidature à un emploi public a été rejetée suite à une enquête de sûreté, et les résultats de ces recours.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
La commission espère que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un proche avenir.
La commission prend note du rapport du gouvernement, ainsi que des commentaires formulés par la Confédération turque des associations d’employeurs (TISK) et la Confédération des syndicats turcs (TÜRK-IŞ), qui étaient joints au rapport.
La commission se félicite des progrès réalisés dans le domaine de l’égalité de chances entre hommes et femmes dans l’éducation, mais note avec préoccupation le faible niveau de participation active des femmes sur le marché du travail, et notamment la baisse du taux d’activité des femmes de plus de 45 ans. Dans son observation précédente, la commission avait demandé au gouvernement de communiquer des informations détaillées sur les mesures prises pour promouvoir l’égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession. La commission note, d’après le rapport du gouvernement, que des dispositions relatives à l’égalité de traitement existent dans la Constitution, le Code du travail et le règlement des programmes pour l’emploi; que 13 123 femmes et 30 418 hommes sans emploi ont participé à des programmes de formation et d’intégration organisés par l’Agence nationale pour l’emploi turque; que des amendements législatifs concernant le congé de paternité ont été élaborés, comme la commission l’avait déjà noté en 2007; et que des efforts pour analyser la situation des femmes sur le marché du travail ont été déployés dans le contexte de la stratégie européenne pour l’emploi. La commission note que le gouvernement a communiqué très peu d’informations sur les mesures visant à promouvoir l’égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes dans la pratique et aucune information sur le suivi du Sommet pour l’emploi des femmes tenu à Istanbul en 2006 ni sur la collaboration avec les organisations de travailleurs et d’employeurs sur la question. La TISK indique que 24 projets pour aider les femmes et les jeunes sans emploi à acquérir des compétences et de l’expérience professionnelles ont été présentés en avril 2008, dans le cadre d’un programme financé par l’Union européenne. La TISK indique que, en tant que corollaire à la stratégie nationale pour l’emploi, la politique nationale pour l’emploi des femmes doit être mise en œuvre. Selon la TÜRK-IŞ, les institutions de formation professionnelle à l’échelon provincial n’ont pas fonctionné de manière satisfaisante. Notant que des politiques et des mesures volontaires sont nécessaires pour surmonter les inégalités persistantes entre hommes et femmes sur le marché du travail, la commission demande au gouvernement de communiquer des informations plus détaillées sur les mesures pratiques et les projets mis en œuvre pour promouvoir l’égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession, y compris les mesures spécifiquement prises pour les femmes dans les zones rurales et les femmes de plus de 45 ans. La commission demande au gouvernement de communiquer des informations sur toute mesure prise pour donner suite au Sommet pour l’emploi des femmes de 2006, notamment les mesures visant à collaborer avec les partenaires sociaux. En outre, la commission demande une fois encore au gouvernement de communiquer des données statistiques sur la situation des hommes et des femmes sur le marché du travail, notamment sur leur participation à différents secteurs et professions.
Application de l’article 5 du Code du travail. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que, selon les commentaires communiqués par les syndicats, la discrimination fondée sur le sexe est courante, en dépit des dispositions légales concernant l’égalité de traitement prévues par l’article 5 du Code du travail. Répondant à la demande d’informations de la commission sur les mesures prises par l’inspection du travail pour veiller au respect des dispositions de la législation du travail, le gouvernement indique de manière générale que le respect de l’article 5 est pris en considération dans le contexte des inspections et qu’une demande individuelle peut déclencher une inspection. Néanmoins, les informations communiquées n’indiquent pas si les inspections conduites ni si les amendes infligées concernent des questions relevant de l’article 5 du Code du travail. La commission demande au gouvernement de communiquer des informations indiquant si l’inspection du travail a traité des cas en vertu de l’article 5 du Code du travail et demande une fois encore au gouvernement d’indiquer si des décisions judiciaires ont été rendues dans ces affaires. Prière d’indiquer le nombre, la nature et l’issue de ces cas.
La commission soulève d’autres points dans une demande adressée directement au gouvernement.
1. Protection contre la discrimination dans l’accès à l’emploi et à certaines professions ainsi qu’à la formation professionnelle. Prenant note des explications communiquées par le gouvernement en réponse au premier point de sa précédente demande directe, la commission note que l’article 5 du Code du travail n’exprime pas l’interdiction de la discrimination au stade du recrutement. Elle note cependant que l’article 122 du nouveau Code pénal turc (loi no 5237) entré en vigueur en 2005 énonce que toute personne qui pratique une discrimination fondée sur la langue, la race, la couleur, le sexe, le handicap, l’opinion politique, les convictions philosophiques, la religion, la croyance ou quelque autre critère, qui subordonne l’emploi d’une personne à l’un de ces critères ou qui empêche sur le motif de l’un de ces critères l’exercice d’une activité économique ordinaire par une personne encourt une peine d’emprisonnement de six mois à un an ou une amende pénale. La commission prie le gouvernement d’indiquer si les tribunaux ont eu à connaître d’affaires faisant intervenir l’article 122 du Code pénal, de manière à évaluer dans quelle mesure cette disposition se révèle être une protection efficace contre la discrimination dans l’accès à l’emploi ou à certaines professions, au sens de la convention. Elle demande à nouveau que le gouvernement indique par quels moyens l’égalité de chances et de traitement en matière de formation professionnelle est assurée.
2. Catégories de travailleurs exclues du champ d’application de la loi sur le travail. La commission note que le gouvernement indique que la législation applicable à l’emploi des travailleurs exclus du champ d’application de la loi sur le travail (art. 4) ne contient aucune disposition discriminatoire, et qu’une protection de caractère général par rapport à l’inégalité de traitement est offerte par la loi des obligations. Le gouvernement souligne également que l’article 122 du Code pénal (voir ci-dessus) est applicable à toutes les catégories de travailleurs exclues du champ d’application de la loi sur le travail. La commission prend note par ailleurs des préoccupations exprimées par la Confédération de syndicats de fonctionnaires (KESK), qui estime que la législation applicable aux salariés du public ne comporte pas de dispositions antidiscriminatoires et que la protection de caractère général offerte par l’article 10 de la Constitution par rapport à la discrimination fondée sur le sexe est insuffisante. La KESK cite des exemples d’annonces d’emploi discriminatoires et d’inégalités de traitement des femmes dans l’accès à des postes de responsabilités de la fonction publique. La commission souligne que la convention s’applique à toutes les catégories de travailleurs et que la politique nationale visant à promouvoir l’égalité de chances et de traitement en matière d’emploi et de profession que tout Membre doit formuler et appliquer en vertu de l’article 2 de cet instrument doit prévoir des mesures protégeant, en droit et dans la pratique, tous les travailleurs contre la discrimination. Tout en prenant note des diverses mesures de caractère administratif visant à promouvoir la non-discrimination dans la fonction publique, la commission rappelle les obligations échéant à la Turquie en vertu de l’article 3 d) de la convention et prie le gouvernement d’étudier, en concertation avec les partenaires sociaux, l’introduction de dispositions antidiscriminatoires dans les lois et règlements régissant le secteur public, et de bien vouloir faire état dans son prochain rapport des mesures ainsi prises ou envisagées.
3. Harcèlement sexuel. La commission note que le rapport du gouvernement se réfère aux articles 24 et 25 de la loi sur le travail, sur lesquels elle a déjà fait ses commentaires, mais aussi à l’article 105 du Code pénal, qui énonce que, sur plainte de la victime, l’auteur avéré d’un «abus sexuel» encourt une peine d’emprisonnement de trois mois à deux ans ou une amende pénale. La commission prie le gouvernement de préciser quel genre de comportement est considéré comme constituant un «abus sexuel» au sens de l’article 105 du Code pénal et d’expliquer la différence, s’il en est, entre l’«abus sexuel» et le harcèlement sexuel au sens des articles 24 et 25 de la loi sur le travail. Exprimant une fois de plus ses préoccupations devant le fait que la loi sur le travail ne vise que le harcèlement sexuel dans le contexte de la rupture de la relation d’emploi, la commission incite le gouvernement à revoir sa législation de manière à ce que celle-ci définisse explicitement le harcèlement sexuel au travail et en exprime l’interdiction. Elle le prie également de donner des informations sur toute évolution sur ce plan ainsi que sur toute autre mesure tendant à la prévention du harcèlement sexuel, notamment sur les initiatives de sensibilisation de l’opinion.
4. Mesures de promotion de l’égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession. Parallèlement à son observation (points 1 à 4), la commission prie le gouvernement de fournir les informations suivantes:
a) les progrès enregistrés en termes de resserrement de l’écart entre hommes et femmes en matière d’éducation, en s’appuyant sur des statistiques de la fréquentation des établissements d’enseignement et de formation professionnelle à tous les niveaux (y compris le supérieur), ventilées par sexe et par niveau académique;
b) les mesures prises par l’Agence nationale pour l’emploi en vue de promouvoir l’accès des femmes à la formation professionnelle et à l’emploi, avec des précisions sur la mesure dans laquelle les femmes bénéficient de mesures volontaristes d’insertion dans le marché du travail;
c) des statistiques illustrant la position respective des hommes et des femmes dans l’emploi public et l’emploi privé, par niveau de formation, statut d’emploi et catégorie professionnelle; et
d) les mesures prises par la direction générale par rapport à la situation des femmes, aux questions d’égalité entre hommes et femmes au travail et aux problèmes rencontrés par les femmes.
La commission prend note du rapport du gouvernement ainsi que des observations de la Confédération turque des associations d’employeurs (TISK), la Confédération des syndicats turcs (TÜRK-IŞ) et la Confédération des syndicats de fonctionnaires (KESK), jointes à ce rapport.
1. Egalité de chances et de traitement entre hommes et femmes. La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement, ainsi que des informations communiquées par la TISK relatives aux divers programmes, initiatives et campagnes de promotion d’un plus large accès des femmes et des jeunes filles à l’éducation et à la formation professionnelle. D’après les statistiques communiquées, 46,8 pour cent des élèves du secondaire sont des filles. Les pouvoirs publics s’efforcent d’améliorer les moyens de transport et de logement en faveur des jeunes, garçons et filles, dans le but d’élargir l’accès à l’éducation. L’Agence nationale pour l’emploi continue de faire bénéficier les femmes de certaines mesures volontaristes d’intégration du marché du travail. En outre, la question de l’égalité entre hommes et femmes et de la promotion de l’emploi des femmes a été au cœur de plusieurs projets menés en coopération avec l’Union européenne. Une initiative tendant à instaurer un congé parental non rémunéré est en cours au niveau législatif.
2. Tout en saluant ces efforts, la commission note avec une profonde préoccupation que le taux d’activité chez les femmes a continué de baisser. D’après les chiffres du gouvernement, ce taux est passé de 25,4 pour cent en 2004 à 24,8 pour cent en 2005. Le taux d’activité des femmes qui ont un diplôme universitaire a considérablement baissé de 2004 à 2005, passant de 17 à 14,2 pour cent. La commission note que la gravité de la situation des femmes sur le marché du travail et la persistance de la concentration de celles-ci dans l’agriculture et dans l’économie informelle ont été reconnues par le Sommet sur l’emploi des femmes, qui s’est tenu à Istanbul en février 2006. La commission note que la déclaration finale adoptée à l’issue du sommet énonce d’importantes propositions tendant à faire évoluer la situation, notamment par l’élaboration d’une politique nationale de l’emploi de longue durée chez les femmes, qui serait mise en œuvre au moyen de plans d’action annuels, par le renforcement du dialogue social et par l’encouragement des pratiques axées sur l’égalité de chances. La déclaration appelle aussi à des mesures de lutte contre l’analphabétisme chez les femmes et à des mesures d’amélioration de l’accès des femmes à la formation professionnelle et à l’enseignement supérieur. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises pour promouvoir l’égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession, notamment sur toutes mesures prises en concertation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs pour faire suite aux propositions formulées par le Sommet sur l’emploi des femmes de 2006.
3. La commission prend note de la communication de la KESK datée du 31 mai 2006, reçue avec le rapport du gouvernement, dans laquelle cette centrale déclare que la discrimination fondée sur le sexe est courante, en dépit des dispositions légales en vigueur. Rappelant ses précédents commentaires concernant l’application dans la pratique des dispositions de la législation du travail relatives à l’égalité de traitement, la commission demande à nouveau que le gouvernement communique dans son rapport des informations détaillées sur les mesures prises par l’inspection du travail pour veiller au respect des dispositions de la législation du travail relative à l’égalité de traitement, ainsi que des informations sur toute décision des instances administratives ou judiciaires en la matière, en précisant aussi si des sanctions ont été imposées, dans les conditions prévues à l’article 5 de la loi sur le travail.
4. Faisant suite à ses précédents commentaires concernant les restrictions en vigueur au port d’une coiffure sur la tête chez les étudiants et étudiantes des établissements de l’enseignement supérieur, la commission note que le gouvernement ne fournit aucune information en réponse à ces demandes spécifiques. La commission réitère ses précédents commentaires à ce sujet et demande à nouveau que le gouvernement donne son avis sur les conséquences de l’interdiction faite aujourd’hui aux étudiants et étudiantes des établissements supérieurs de se couvrir la tête, et sur la fréquentation de ces établissements par des femmes qui veulent porter un foulard sur la tête par obligation ou par conviction religieuse. Elle prie également le gouvernement de fournir des informations sur le nombre d’étudiantes qui auraient été expulsées de ces établissements pour avoir porté un foulard sur la tête. La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que ces informations soient communiquées dans son prochain rapport.
5. Discrimination fondée sur l’opinion politique. Dans ses précédentes observations, la commission exprimait l’espoir que le gouvernement garantirait qu’il ne soit pas imposé de restrictions à des journalistes, des écrivains ou des éditeurs dans l’exercice de leur emploi ou de leur profession à raison des opinions politiques qu’ils expriment ou manifestent, et elle avait demandé que le gouvernement fournisse des informations sur des affaires ayant donné lieu à des condamnations de personnes exerçant ces professions sur la base de la loi antiterrorisme ou du Code pénal. La commission note que le rapport du gouvernement indique que, au 20 juin 2006, 1 068 affaires dans lesquelles des journalistes, des écrivains et des éditeurs étaient poursuivis sur le fondement de la loi antiterrorisme ou du Code pénal étaient en cours. Entre le 1er janvier et le 20 juin 2006, 74 de ces affaires ont été jugées, deux s’étant conclues par des condamnations à des peines d’emprisonnement (dont une avec sursis), et 37 par des condamnations à des amendes. La commission prie le gouvernement de continuer de la tenir informée de manière détaillée du nombre et de l’issue des affaires dans lesquelles des journalistes, des écrivains et des éditeurs sont poursuivis, en précisant brièvement les faits qui leur sont reprochés et leurs qualifications. La commission prie également le gouvernement d’indiquer si des mesures ont été prises ou envisagées, y compris sur le plan législatif, pour garantir que des restrictions ne puissent être imposées à des journalistes, des écrivains ou des éditeurs dans l’exercice de leur emploi ou de leur profession, à raison des opinions politiques qu’ils expriment ou manifestent.
6. La commission note en outre que, selon la KESK, l’administration persiste à ne pas réintégrer les salariés du public contre qui des poursuites engagées sur le fondement des articles 301 et 216 du Code pénal ont été abandonnées ni ceux qui ont fait l’objet de sanctions disciplinaires pour avoir exprimé des opinions de gauche, et ce, malgré des décisions des tribunaux ordonnant cette réintégration. La KESK mentionne en particulier deux affaires dans lesquelles le ministère de l’Education nationale a refusé de réintégrer ses agents alors même que les décisions des tribunaux par lesquels ils avaient été condamnés avaient été ensuite infirmées. La KESK déclare aussi que les agents du secteur public, qui ont sur le plan religieux des convictions conformes à ce que le gouvernement souhaite, sont promus aux dépens des autres. La commission prie le gouvernement de communiquer sa réponse aux questions soulevées par la KESK.
7. Article 3 d) de la convention. Enquêtes de sûreté. La commission avait noté précédemment que des enquêtes de sûreté sont exigées pour les personnes candidates à un emploi dans un large éventail d’institutions publiques dont les activités n’ont aucun rapport avec la sécurité de l’Etat, et que ces enquêtes de sûreté ne se limitent pas apparemment à vérifier si l’intéressé a des antécédents judiciaires mais s’étend aussi à la vérification des contacts qu’il aurait pu avoir avec la police ou des unités de renseignement. Dans ce contexte, la commission exprimait ses craintes que les enquêtes de sûreté en question entraînent un rejet de la candidature qui serait fondé sur des considérations contraires à la convention, par exemple sur le fait d’avoir exprimé pacifiquement certaines opinions politiques. Elle demandait au gouvernement d’indiquer dans quelle mesure les enquêtes de sûreté entraînent le rejet de la candidature ou l’exclusion d’un emploi dans le secteur public, et de préciser les motifs invoqués dans ces circonstances. Dans son rapport, le gouvernement déclare que les enquêtes de sûreté dans les établissements publics ne concernent que les fonctionnaires travaillant dans des services qui manipulent des informations classifiées, et que les évaluations menées sur la base des enquêtes de sûreté peuvent être contestées devant les tribunaux administratifs. Tout en prenant note de ces informations, la commission réitère sa demande tendant à ce que le gouvernement évalue la mesure dans laquelle les enquêtes de sûreté ont pu entraîner un rejet ou une exclusion d’un emploi public et communique les résultats de cette évaluation. Dans ce contexte, la commission demande que le gouvernement fasse aussi état des recours administratifs exercés par des personnes dont la candidature à un emploi public a été rejetée suite à une enquête de sûreté, et du résultat de ces recours.
La commission soulève par ailleurs d’autres points dans une demande adressée directement au gouvernement.
1. Article 1 de la convention. Interdiction de la discrimination. Faisant suite à son observation, la commission demande au gouvernement de l’informer sur les points suivants qui ont trait à la loi no 4857 sur le travail:
a) Notant que l’article 2 de la loi définit la «relation de travail» comme étant la relation qui est établie entre le travailleur et l’employeur, la commission demande au gouvernement de préciser si l’article 5 de la loi sur le travail interdit la discrimination, en ce qui concerne le recrutement ainsi que les conditions et la cessation de l’emploi, fondée sur l’ensemble des motifs couverts par l’article 5(1) de la loi.
b) Prière d’indiquer comment est garantie l’égalité de chances et de traitement dans l’accès à la formation professionnelle, à certaines professions, à l’emploi indépendant, et à certaines catégories d’emplois qui sont exclues du champ d’application de la loi sur le travail.
2. Discrimination fondée sur le sexe. Harcèlement sexuel. La commission note qu’en vertu de l’article 24 de la loi susmentionnée le travailleur a le droit de mettre fin au contrat de travail, avant l’expiration du contrat ou avant la fin de la période de préavis, en cas de harcèlement sexuel de l’employeur à son égard, ou dans le cas où les mesures nécessaires ne seraient pas prises lorsque, au travail, d’autres travailleurs ou une tierce personne soumettent à un harcèlement sexuel le travailleur et que celui-ci en a averti l’employeur. La commission attire l’attention du gouvernement sur le fait que, conformément à la convention, le harcèlement sexuel est une forme interdite de discrimination fondée sur le sexe. La commission espère que l’article 5 de la loi en question, qui interdit d’une manière générale la discrimination fondée sur le sexe, couvre aussi le harcèlement sexuel. Par ailleurs, la commission est préoccupée par le fait que le harcèlement sexuel n’est expressément pris en considération qu’en cas de cessation de la relation de travail. La commission encourage le gouvernement à réexaminer la législation afin de définir et d’interdire expressément le harcèlement sexuel, et de prévoir une protection juridique appropriée pour les victimes de ces pratiques. Le gouvernement est aussi invité à fournir des informations en réponse à l’observation générale de 2002 de la commission sur cette question.
3. Discrimination fondée sur l’opinion politique. La commission rappelle ses commentaires précédents qui portaient sur la nécessité d’abroger ou de modifier l’article 3(d) de la loi martiale no 1402. La commission rappelle que cette disposition investit les chefs militaires qui appliquent la loi martiale d’amples pouvoirs discrétionnaires qui leur permettent de muter des travailleurs ou des fonctionnaires dans d’autres régions. De l’avis de la commission, ces pouvoirs peuvent aboutir à une discrimination dans l’emploi fondée sur l’opinion politique, ce qui est contraire à la convention. La commission note que le gouvernement a transmis le texte de plusieurs décisions qui ont été prises à propos d’un recours en appel qui a été intenté au sujet de l’application de l’article 3(d) de la loi en question. La commission espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour envisager, dans le cadre des réformes en cours et en consultation avec les partenaires sociaux, d’éventuelles modifications de l’article 3(d) de la loi martiale afin que les mesures prises pour garantir la sécurité de l’Etat soient suffisamment définies et délimitées, et ne se traduisent pas par des discriminations. La commission demande au gouvernement de la tenir informée à cet égard.
4. Article 2. Mesures pour promouvoir l’égalité de chances et de traitement dans l’emploi et la profession entre hommes et femmes. Faisant suite à son observation (point 6), la commission demande au gouvernement de l’informer sur les points suivants:
a) les progrès accomplis pour combler l’écart entre hommes et femmes en matière d’éducation, y compris des informations statistiques sur la participation, à tous les niveaux, à l’éducation et à la formation, ventilées par sexe, et sur le taux d’alphabétisation;
b) les mesures prises par l’Agence nationale turque de l’emploi pour promouvoir l’accès des femmes à la formation professionnelle et à l’emploi, y compris des informations sur la mesure dans laquelle les femmes ont bénéficié des politiques et mesures relatives au marché du travail;
c) des statistiques à propos de la situation des femmes et des hommes sur le marché du travail en fonction du niveau d’instruction, du statut, de l’emploi, du secteur et de la catégorie économique ou professionnelle; et
d) la mise en œuvre de la circulaire émise en janvier 2004 par le Cabinet du Premier ministre sur le recrutement pour le service civil en tenant compte de l’égalité entre les sexes, et les mesures qu’a prises la direction générale chargée de la situation et des problèmes des femmes pour promouvoir l’égalité entre femmes et hommes au travail.
5. Article 5. Licenciement après un congé de maternité. La commission note qu’en vertu de l’article 25(1) de la loi sur le travail l’employeur peut licencier une femme sans préavis dans le cas où la période de rétablissement après la grossesse et l’accouchement dépasserait de plus de six semaines la fin du congé de maternité. Prenant note de l’indication du gouvernement selon laquelle cette disposition est en cours de modification, la commission lui demande de la tenir informée de tout fait nouveau à cet égard.
1. La commission prend note du rapport du gouvernement et des commentaires formulés par la Confédération des syndicats progressistes de Turquie (DISK), la Confédération des syndicats d’ouvriers de Turquie (TÜRK-IS), la Confédération des syndicats des fonctionnaires de Turquie (Türkiye KAMU-SEN), et la Confédération des associations d’employeurs de Turquie (TISK). La commission rappelle aussi la communication de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), en date du 15 décembre 2003, qui porte sur l’égalité entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession.
2. Article 1 de la convention. Interdiction de la discrimination. La commission note que l’article 5(1) de la loi du 22 mai 2003 (no 4857) sur le travail interdit la discrimination dans la relation de travail fondée sur la langue, la race, le sexe, l’opinion politique, les convictions philosophiques, la religion, et sur d’autres motifs analogues. Cela étant, il n’est pas fait référence dans cette disposition à l’origine sociale, la couleur et l’ascendance nationale, motifs qui sont énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention. L’article 5(3) de la loi en question interdit à l’employeur de prendre, au motif du sexe ou de la grossesse, des mesures discriminatoires à l’encontre d’un travailleur, directement ou indirectement, en ce qui concerne la conclusion, les conditions, l’exécution et la cessation du contrat de travail. La commission note aussi que la violation de l’article 5 constitue une infraction administrative et que les victimes de discrimination peuvent demander une indemnisation au titre de l’article 5(6) de la loi. La commission fait bon accueil à ces dispositions et demande au gouvernement des informations sur l’application dans la pratique des dispositions en matière d’égalité de traitement de la loi sur le travail, y compris sur les mesures prises par l’inspection du travail, sur les décisions judiciaires et administratives et sur toutes sanctions prises pour inobservation de la loi. Afin qu’elle puisse évaluer pleinement les dispositions en matière d’égalité de traitement de la loi sur le travail au regard des exigences de la convention, la commission demande un complément d’information sur un certain nombre de points qui figurent dans une demande directe adressée au gouvernement.
3. Discrimination fondée sur l’opinion politique. La commission rappelle ses observations précédentes qui portaient sur la nécessité d’empêcher que des journalistes, des écrivains ou des éditeurs soient privés de leur emploi ou de leur profession pour avoir exprimé pacifiquement leur opinion politique. A cet égard, elle prend note du rapport du gouvernement et des informations fournies par le gouvernement au Comité des ministres du Conseil de l’Europe (annexe II de la Résolution intérimaire ResDH(2004)38, que le Comité des ministres a adoptée le 2 juin 2004), à savoir que plusieurs modifications avaient été apportées à la législation pour rendre la législation turque conforme aux exigences de l’article 10 (liberté d’expression) de la Convention européenne des droits de l’homme, en particulier l’abrogation de l’article 8 de la loi antiterrorisme et les modifications de l’article 7 de la même loi, ainsi que des articles 159 et 312 du Code pénal. La commission compte sur le gouvernement pour qu’il continue de prendre des mesures afin que les journalistes, écrivains et éditeurs ne soient pas restreints dans l’exercice de leur emploi ou de leur profession en raison des opinions politiques qu’ils expriment. Elle lui demande de l’informer de toute mesure législative ou autre prise à cette fin. Le gouvernement est aussi prié de l’informer sur le nombre, la nature et le résultat des cas de condamnation de journalistes, d’écrivains et d’éditeurs, dans le cadre de la loi antiterrorisme ou du Code pénal, et d’indiquer si des peines d’emprisonnement ont été prononcées dans ces cas.
4. Discrimination fondée sur la religion ou le sexe. Rappelant ses commentaires précédents sur les restrictions dont font l’objet les étudiants universitaires qui portent le foulard islamique, la commission prend note des indications du gouvernement, de la DISK, de la TÜRK-IS et de la DISK selon lesquelles ces restrictions sont conformes à la Constitution nationale et à la Convention européenne des droits de l’homme. Ces restrictions étaient nécessaires, la question du foulard islamique étant utilisée par certains partis politiques pour promouvoir des modifications à la Constitution qui, en fin de compte, auraient pour effet d’abolir les garanties établies qui protègent les droits de l’homme. La commission prend note du jugement, du 29 juin 2004, de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Leyla Şahin/Turquie, jugement dont le gouvernement communique copie dans son rapport. Dans cette affaire, la cour a estimé que les réglementations qui prévoient des restrictions au port du foulard islamique à l’université constituaient une ingérence dans l’exercice par l’intéressée du droit de manifester sa religion. Toutefois, la convention européenne n’a pas été enfreinte étant donné que, dans le contexte turc actuel, des restrictions étaient nécessaires dans une société démocratique pour protéger les droits et libertés d’autrui. La commission note que la Grande chambre de la Cour européenne des droits de l’homme a rendu un jugement, le 10 novembre 2005, qui confirmait la décision du 29 juin 2004.
5. La commission rappelle que, en principe, lorsque des restrictions ou des exclusions fondées sur une pratique religieuse sont décidées et qu’elles ont pour effet d’empêcher ou de compromettre l’égalité de chances et de traitement dans l’emploi et la profession, il se peut qu’elles entraînent des discriminations telles que définies dans la convention. La commission indique à nouveau que les restrictions au port d’un foulard peuvent avoir pour effet d’empêcher ou de compromettre l’accès à l’université des femmes qui se sentent obligées ou qui manifestent le souhait de porter un foulard en raison de leurs obligations ou de leur conviction religieuse. La commission compte sur le gouvernement pour qu’il continue de suivre l’évolution de la situation afin de déterminer si cette restriction d’ordre général reste nécessaire, et de veiller à ce que le droit d’égalité d’accès à l’éducation et à la formation, à l’université, en faveur des femmes qui se sentent obligées de porter un foulard en raison de leur conviction religieuse, ou qui le souhaitent, n’est pas restreint dans des conditions contraires à la convention. La commission reste préoccupée par les restrictions actuelles qui, dans la pratique, peuvent empêcher des femmes de fréquenter l’université et la formation. Afin qu’elle puisse mieux comprendre la situation, la commission demande au gouvernement d’évaluer dans son prochain rapport l’impact qu’a l’interdiction actuelle, pour les étudiants universitaires, de porter des vêtements qui mettent en évidence leur religion, sur la participation des femmes à l’enseignement supérieur, et d’indiquer le nombre d’étudiantes qui ont été exclues d’universités au motif qu’elles portaient un foulard dans les locaux de l’université.
6. Article 2. Egalité de chances et de traitement entre hommes et femmes. La commission note avec intérêt que l’article 10 de la Constitution a été modifié et prévoit maintenant que l’Etat doit garantir l’égalité effective des hommes et des femmes. La commission note également que, à la suite de l’adoption du nouveau Code civil qui est entré en vigueur le 1er janvier 2002, d’importants progrès ont été accomplis dans l’égalité des droits des hommes et des femmes. La commission estime que le nouveau Code civil pourra contribuer à faire avancer l’égalité entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession. Dans le même temps, la commission prend note avec préoccupation des informations statistiques qui indiquent que la participation des femmes au marché du travail reste très faible. Selon des statistiques que le BIT a réunies sur la population active, le taux d’activité des femmes est passé de 26,9 pour cent en 2002 à 25,4 pour cent en 2004. Le taux d’activité des hommes s’est accru pour passer de 70,5 pour cent à 73,3 pour cent pendant la même période. La commission note aussi, à la lecture des données fournies par le gouvernement, que les femmes ayant étudié à l’université sont sous-représentées aux postes exécutifs et de direction par rapport aux hommes qui ont le même bagage; 58 pour cent des femmes économiquement actives étaient employées dans le secteur agricole en 2003, et 80 pour cent d’entre elles travaillaient pour leur famille sans être rémunérées. La commission note aussi que, s’il est vrai que des progrès ont été accomplis dans le sens d’un taux de participation égal des garçons et des filles à l’éducation, les filles continuent d’être particulièrement touchées par l’analphabétisme, et qu’elles sont moins nombreuses que les garçons à presque tous les niveaux d’enseignement, en particulier l’enseignement supérieur. La commission encourage le gouvernement à continuer de prendre des mesures pour promouvoir l’égalité de chances et de traitement entre les hommes et les femmes dans l’éducation et l’emploi, et à continuer de fournir des informations sur les progrès réalisés. Le gouvernement est également prié de fournir des informations sur les mesures concrètes qui ont été prises pour garantir l’égalité effective entre les hommes et les femmes dans l’emploi, conformément à l’article 10 de la Constitution.
7. Egalité de chances et de traitement, quelles que soient la race, la couleur, l’ascendance nationale et l’origine sociale. Dans son observation précédente, la commission avait demandé au gouvernement des informations sur les mesures prises ou envisagées pour promouvoir l’égalité de chances et de traitement dans l’emploi et la profession, de tous les groupes de la population, quelles que soient la race, la couleur, l’ascendance nationale ou l’origine sociale. La commission note que l’article 5 de la nouvelle loi sur le travail interdit la discrimination fondée sur la langue et la race. La commission recommande au gouvernement d’inclure, dans l’article 5 de la loi sur le travail, les motifs interdits de discrimination qui suivent: la couleur, l’ascendance nationale et l’origine sociale. De plus, elle demande au gouvernement d’indiquer les mesures prises ou envisagées pour garantir et promouvoir l’égalité d’accès à l’emploi et à la profession dans la pratique, qu’elle soit d’origine ethnique ou sociale.
8. Article 3 d). Enquêtes de sécurité. La commission rappelle que, en vertu de la réglementation du 14 février 2004 sur les enquêtes de sécurité et la consultation des archives, le personnel que l’on envisage d’employer dans des entités et des institutions publiques qui détiennent des informations ou des documents classés secrets fait l’objet d’enquêtes de sécurité. La commission note, à la lecture du rapport du gouvernement, que des enquêtes de sécurité doivent être réalisées sur les personnes susceptibles d’être occupées dans tout un ensemble d’institutions publiques chargées de questions qui n’ont pas trait à la sécurité de l’Etat - entre autres, recherche, éducation, questions sociales et du travail, médias, culture, histoire, météorologie, statistiques et commerce. La commission rappelle aussi que les enquêtes de sécurité comportent non seulement la vérification des éventuelles condamnations pénales des candidats mais aussi la demande de renseignements aux services de police et de renseignement. La commission reste préoccupée par le fait que ce type d’enquête sur la sécurité peut conduire à des exclusions de l’emploi, qui vont à l’encontre des exigences de la convention, par exemple au motif d’avoir exprimé pacifiquement des opinions politiques. La commission insiste de nouveau sur la nécessité de veiller à ce que les mesures prises par les autorités qui sont autorisées à demander et à réaliser des enquêtes de sécurité soient, dans la pratique, conformes aux exigences de la convention. Elle demande au gouvernement d’évaluer la mesure dans laquelle des enquêtes de sécurité se sont traduites par des exclusions de l’emploi public, et d’indiquer les motifs de ces exclusions. Enfin, la commission encourage le gouvernement à examiner la possibilité, dans le cadre des réformes en cours en Turquie, de restreindre davantage la portée des enquêtes de sécurité. Elle invite le gouvernement à indiquer les mesures prises à cet égard.
La commission soulève d’autres points ainsi que des points apparentés dans une demande adressée directement au gouvernement.
1. Discrimination fondée sur le sexe. La commission note que le rapport du gouvernement fait état d’efforts soutenus tendant à une amélioration des chances des femmes en matière d’emploi à travers un certain nombre de cours de formation professionnelle mis en place par l’Agence nationale pour l’emploi, y compris dans des professions qui sont traditionnellement à dominante masculine, comme celles de programmeur en informatique, comptable, technicien en informatique ou agent de vente. Elle note qu’au cours de l’année 2000 le pourcentage de femmes ayant pris part à des cours de formation débouchant sur un emploi a légèrement diminué, reculant à 68 pour cent, contre 73,7 pour cent en 1999, et que le pourcentage de femmes participant à des cours sur la création d’une entreprise a augmenté de 86,7 à 89 pour cent. Le gouvernement est invitéà continuer de fournir des informations sur la formation professionnelle offerte par l’Agence nationale pour l’emploi, y compris sur le nombre de femmes participant aux différents cours proposés, notamment dans les branches traditionnellement à dominante masculine.
2. La commission note que, selon la Confédération turque des associations d’employeurs (TISK), les fonctions de l’Institut du travail turc (IŞKUR) ont étéélargies pour mettre en œuvre des politiques actives et passives du marché du travail et que, après restructuration, l’IŞKUR sera à même de prendre des initiatives tendant à ce que les femmes soient plus présentes sur le marché du travail. Le gouvernement est prié de fournir des informations sur l’action déployée par l’IŞKUR pour promouvoir l’égalité entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession.
3. La commission croit comprendre que la Grande Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements à la Constitution et au Code civil, amendements qui concernent l’égalité entre les sexes. Le gouvernement est prié de fournir plus de précisions sur ces amendements législatifs, et sur leur application dans la pratique, sur le plan de l’emploi. Considérant que le gouvernement déclare ne ménager aucun effort afin que la révision du Code du travail dans le cadre de consultations tripartites se poursuive, la commission le prie de fournir des informations sur la révision éventuelle de l’article 17(1)(a), qui permet à l’employeur de mettre fin sans préavis au contrat de travail d’une travailleuse au terme du congé de maternité de celle-ci, et de lui communiquer copie de tout amendement adopté.
4. Faisant suite à ses précédents commentaires concernant la nomination de femmes aux postes les plus élevés de l’administration et à sa demande de statistiques sur la répartition des hommes et des femmes aux différents postes et niveaux de l’administration, la commission constate que le gouvernement n’est pas en mesure de fournir de telles données. Elle fait observer que les statistiques ventilées par sexe et par niveau d’emploi sont un instrument important pour apprécier les situations de ségrégation professionnelle verticale, concevoir et mettre en œuvre des mesures appropriées de promotion de l’accès des femmes à des postes élevés et évaluer l’impact de ces mesures. Par conséquent, elle prie le gouvernement d’indiquer s’il est disposéà l’avenir à recueillir de telles statistiques et à fournir toute autre information sur les mesures prises ou envisagées pour améliorer l’accès des femmes aux postes les plus élevés de l’administration publique, y compris par des mesures positives.
5. Règlement disciplinaire de 1979 concernant les forces de police. La commission note que, selon le rapport du gouvernement, l’article supplémentaire no 11 de la loi no 3201 de 1937 sur l’organisation de la sécurité, qui constitue la base de l’alinéa 33 de l’article 8 du règlement disciplinaire de 1979, a été modifié le 21 avril 2001. Une fois que ces modifications auront été reflétées dans l’alinéa 33, les membres des forces de police seront autorisés àêtre membres fondateurs de fondations telles que prévues par le Code civil et à siéger dans les instances administratives de celles-ci. Le gouvernement est prié de communiquer le texte de tout instrument modificateur du règlement disciplinaire dès qu’il aura été adopté. Notant que le gouvernement a communiqué copie de décisions de tribunaux administratifs et du Conseil d’Etat interprétant les alinéas 31 à 33 de l’article 8 du règlement disciplinaire, la commission se réserve de revenir sur cette question lorsqu’elle disposera des traductions.
La commission prend note de la communication de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) en date du 15 décembre 2003, qui se rapporte à des questions qu’elle avait soulevées précédemment à propos de cette convention. La commission poursuivra l’examen de cette communication avec le prochain rapport du gouvernement et tout commentaire que celui-ci voudra bien faire tenir en réponse.
De plus, la commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle est donc conduite à répéter sa précédente observation, qui avait la teneur suivante:
La commission prend note du rapport du gouvernement ainsi que des commentaires de la Confédération turque des associations d’employeurs (TISK) et de la Confédération des syndicats progressistes de Turquie (DISK).
1. La TISK fait état d’une progression marquée, ces dernières années, de l’emploi des femmes dans le secteur privé, tandis que la DISK argue que les problèmes liés à la discrimination à l’égard des femmes, que la commission avait évoqués antérieurement, persistent. La commission prend note des statistiques pour l’année 2000 communiquées par le gouvernement, statistiques faisant apparaître que le taux d’alphabétisation des femmes et la part représentée par celles-ci dans la population active restent très bas. Ainsi, le nombre de femmes analphabètes reste pratiquement quatre fois supérieur à celui des hommes analphabètes, et ce phénomène ne sévit pas seulement en milieu rural, puisque l’on compte 2,4 millions d’analphabètes sur 6 millions de personnes vivant en milieu urbain. La part représentée par les hommes dans la population active globale est de 73,1 pour cent, celle représentée par les femmes étant de 25,5 pour cent. En 2000, le chômage des femmes en zone urbaine était de 13,1 pour cent, contre 7,9 pour cent pour les hommes. La commission prie le gouvernement de continuer de fournir des statistiques sur la situation des femmes au regard de l’enseignement et de l’emploi, et des informations sur les mesures prises pour assurer l’égalité de chances et de traitement des femmes dans l’emploi et la profession.
2. Discrimination fondée sur le sexe et sur la religion. La commission rappelle la teneur d’une communication de la Maison des travailleurs de la République islamique d’Iran en date du 9 mai 1999, dans laquelle cette organisation signalait qu’une députée portant le voile à la manière islamique a été traitée de manière discriminatoire puisqu’elle a été contrainte de quitter la salle de la Grande Assemblée nationale sans avoir pu être assermentée. Dans cette communication, ce même organisme dénonçait également comme une discrimination l’interdiction de porter le voile à l’université, dans les établissements académiques, de même que pour les fonctionnaires. La commission avait fait observer que la règle prescrivant aux fonctionnaires et aux étudiants d’avoir la tête nue risque en fait d’avoir des conséquences disproportionnées pour les femmes portant le voile, et même d’altérer ou d’annihiler purement et simplement, pour des questions de pratiques religieuses, le droit d’accès à l’enseignement et à l’emploi sur un pied d’égalité. De plus, elle avait appelé l’attention sur les conséquences que l’interdiction du port du foulard peut avoir si on la replace dans le contexte d’un faible niveau d’instruction chez les femmes et d’un faible taux de participation de celles-ci à la vie active.
3. Dans ce même contexte, la commission prend note de l’article 56 du règlement de la Grande Assemblée nationale, aux termes duquel «dans la salle, les membres du Parlement, les membres du Sénat turc, les ministres, les fonctionnaires de la Grande Assemblée nationale et les autres fonctionnaires publics sont tenus de porter veste et cravate. Quant aux femmes, elles doivent porter un tailleur». Constatant que ce code vestimentaire n’empêche pas les femmes députées de porter le voile, la commission exprime l’espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour assurer l’égalité d’accès des femmes à la Grande Assemblée nationale, sans considération de leur sexe ni de pratiques religieuses totalement étrangères aux qualifications exigées pour la fonction considérée.
4. Pour ce qui est de l’interdiction faite aux fonctionnaires de porter le voile dans les bâtiments publics, la commission note que l’article 5(a) du règlement portant code vestimentaire du personnel des institutions et établissements publics du 16 juillet 1982 prévoit que les femmes doivent avoir la tête découverte en toutes circonstances. Cette règle s’applique d’une manière générale à tous les fonctionnaires, à tout employé sous contrat ou engagé temporairement et aux ouvriers des établissements et institutions couverts par le budget général et les budgets supplémentaires, les administrations locales, les institutions à capital variable et les entreprises publiques, de même que les corps et établissements qui leur sont attachés (art. 2). S’agissant de l’interdiction de porter le voile à l’université, la commission prend note de l’arrêt du 7 mars 1989 rendu par la Cour constitutionnelle à propos de la loi no 3511 du 10 décembre 1988 modifiant la loi sur les universités. Dans cet arrêt, la Cour déclare inconstitutionnelles certaines dispositions de la loi no 3511 qui, par dérogation à l’interdiction générale du port du voile dans les locaux de l’université, autorisent le port du voile pour des raisons religieuses. Le raisonnement de la Cour se fonde essentiellement sur la primauté du principe de sécularisme posé par l’ordre constitutionnel de la Turquie, tandis que les dispositions incriminées ont été jugées contraires au principe d’égalité et de droit à la liberté de conscience et de croyance. Pour la Cour, les lois de l’Etat séculier doivent être exemptes de tout contenu religieux pour protéger la démocratie et les droits fondamentaux. Le port du voile à l’université constituerait une pression à l’égard des femmes ne se couvrant pas la tête et favoriserait indûment un groupe particulier. Pour la Cour constitutionnelle, pour assurer l’égalité et la liberté de conscience et de pensée de tous, il n’est pas possible à notre époque d’autoriser le port du voile islamique.
5. Sur les considérations qui précèdent, la commission, concevant la complexité de la situation, réitère ses craintes de voir que l’interdiction généralisée du port du voile pour les étudiantes et les fonctionnaires risque de mener à des situations incompatibles avec le principe d’égalité tel qu’envisagé par la convention. Comme déjà dit, une telle obligation risque en fait d’affecter de manière disproportionnée les femmes musulmanes et, peut-être, d’altérer ou de nier purement et simplement leur droit d’accès sur un pied d’égalitéà l’éducation et à l’emploi au motif de leurs pratiques religieuses. La commission juge nécessaire de rappeler au gouvernement qu’à travers la présente convention il s’est engagéà formuler et à appliquer une politique nationale visant à promouvoir, par des méthodes adaptées aux circonstances et aux usages nationaux, l’égalité de chances et de traitement en matière d’emploi et de profession, afin d’éliminer toute discrimination, notamment sur la base du sexe et de la religion, en cette matière. Elle rappelle également que, pour être admissible au regard de la présente convention, toute distinction, exclusion ou préférence ayant pour effet de détruire ou d’altérer l’égalité de chances ou de traitement en matière d’emploi ou de profession doit être fondée sur les qualifications exigées pour l’emploi considéré. Il est donc demandé au gouvernement d’étudier les modalités propres à favoriser et garantir l’égalité d’accès des femmes musulmanes à l’emploi dans la fonction publique sans préjudice de leurs pratiques religieuses, et de tenir la commission informée de tout nouveau développement à cet égard. Rappelant que l’accès des femmes à l’éducation est l’un des facteurs déterminants de leur participation à la vie active et que le niveau général d’instruction des femmes et leur taux de participation à la vie active en Turquie restent bas, la commission prie également le gouvernement de donner des informations sur les mesures prises ou envisagées pour assurer que toutes les femmes, y compris les femmes et les jeunes filles musulmanes, jouissent de droits égaux en matière d’éducation, y compris au niveau universitaire. La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des statistiques sur le nombre de femmes n’ayant pu accéder à l’université ou obtenir un emploi dans la fonction publique ou conserver un tel emploi en raison de l’interdiction du port du voile.
6. Situation des fonctionnaires révoqués ou mutés sous la loi martiale. La commission se réfère à ses précédents commentaires concernant la réintégration des personnes victimes d’une discrimination fondée sur leurs convictions politiques en conséquence de la loi martiale no 1402. Elle avait demandé des précisions sur les raisons pour lesquelles 753 des fonctionnaires mutés et 202 des employés publics mutés qui avaient demandé leur réintégration ne l’avaient pas obtenue. Le gouvernement avait répondu que les intéressés n’ont pas été réintégrés soit parce qu’ils ne l’ont pas demandé soit parce qu’ils ne satisfaisaient plus aux exigences de l’emploi considéré du fait des peines d’emprisonnement qui leur avaient été infligées en application du Code pénal. Rappelant qu’elle avait demandé au gouvernement de fournir des informations détaillées sur le pourcentage de quelque 955 agents publics mutés qui n’ont pas été réintégrés à cause des peines d’emprisonnement infligées, en précisant pour chacun d’eux le chef d’inculpation et la peine infligée, la commission note que le gouvernement déclare que les informations demandées ne sont pas disponibles dans les archives des ministères et institutions compétentes. La commission réitère sa demande et exprime l’espoir que le gouvernement fera tout ce qui est en son pouvoir pour se procurer les informations nécessaires et les lui communiquer avec son prochain rapport.
7. Amendements à la loi martiale no 1402. La commission constate que le rapport du gouvernement ne contient pas d’informations nouvelles concernant la nécessité d’abroger ou de modifier l’article 3(d) de la loi martiale no 1402. Elle rappelle que cet article 3(d) investit les chefs militaires appliquant la loi martiale de vastes pouvoirs discrétionnaires leur permettant de licencier des travailleurs et des fonctionnaires ou bien de les muter dans d’autres régions. De l’avis de la commission, un tel pouvoir discrétionnaire peut aboutir à une discrimination dans l’emploi sur la base de l’opinion politique, ce qui est contraire à la convention. La commission avait exprimé l’espoir que des modifications appropriées seraient prises pour assurer que les mesures destinées à préserver la sécurité de l’Etat soient définies et délimitées avec assez de précision pour ne pas risquer de conduire à une telle discrimination. Rappelant que le gouvernement avait assuré qu’en vertu de l’article 125 de la Constitution et de la loi no 2577 concernant les procédures administratives il est possible de faire appel d’une décision fondée sur l’article 3(d) de la loi no 1402, la commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des statistiques sur le nombre des appels interjetés contre une décision rendue en application de l’article 3(d) de la loi no 1402, en indiquant l’issue de ces appels.
8. Enquêtes de sécurité. La commission rappelle ses précédents commentaires concernant la résolution du Conseil des ministres no 90/245 du 8 mars 1990 et l’article 1 de la loi no 4045 du 26 octobre 1990 concernant les enquêtes de sécurité. La commission avait déclaré craindre que la formulation particulièrement large de ces dispositions ne conduise à une discrimination dans l’emploi et la profession sur la base, notamment, de l’opinion politique. Dans ce contexte, elle prend note de l’adoption du règlement du 14 février 2000 relatif aux enquêtes de sécurité et à la consultation des archives, qui remplace le règlement du même objet tel que contenu dans la résolution no 90/245 du 8 mars 1990. La commission note que les enquêtes de sécurité et la consultation des archives ne visent que le personnel devant être employé dans des unités et départements de ministères et institutions publiques ou autres organes détenteurs d’informations ou de documents classés, de même que le personnel devant être employé dans les forces armées turques, les organes de sécurité et de contre-espionnage, et les prisons et centres de détention. Le gouvernement est prié de préciser quels sont, conformément à l’article 6 du règlement, les unités, départements et postes des ministères et autres institutions publiques considérées comme unités et départements détenteurs d’informations encore tenues secrètes. Elle prie également le gouvernement d’expliquer le sens et la teneur de la clause traitant de «toute connexion avec les forces de police et organes de contre-espionnage» que l’on retrouve dans les rubriques «enquêtes de sécurité» et «consultation d’archives» dont il est question à l’article 4(f) et (g). La commission note qu’une «enquête de sécurité» tend notamment àétablir si l’intéressé s’est livréà des «activités destructives ou séparatistes» ou a agi en contravention de la loi no 5816 relative aux délits contre Atatürk ou les principes et réformes d’Atatürk (art. 4(g) et 11(c)). Elle note avec intérêt que le sens des «activités destructives et séparatistes» a été limité aux «activités tendant à violer l’intégrité indivisible de l’Etat, de son territoire et de la nation et à mettre en danger l’existence de l’Etat et de la république ou anéantir les droits et libertés fondamentaux» (art. 4 (k)). Elle prie le gouvernement de donner des informations sur l’application de cette disposition dans la pratique, notamment en précisant le nombre et la nature des cas d’exclusion ou de transfert ayant résulté de l’application de l’article 11(c), en conjonction avec l’article 4(g) et (k). Elle le prie également de communiquer copie des instructions de service prévues à l’article 12(e) du règlement des autorités habilitées à enquêter. La commission prend acte, d’une manière générale, des progrès concernant l’amélioration de la précision de certains termes contenus dans la législation antérieure et quant à la limitation du champ des enquêtes de sécurité. Cependant, elle est conduite à souligner qu’il reste nécessaire d’assurer que les mesures prises par les autorités habilitées à ordonner et conduire des enquêtes de sécurité soient, dans la pratique, conformes aux règles posées par la convention.
9. Loi antiterrorisme de 1991. La commission rappelle avoir souligné dans ses précédents commentaires que cette loi définit de manière très large le terrorisme (art. 1) et les délits de propagande (art. 8). Elle avait déclaré craindre que ces définitions ne posent pas de critères suffisants pour assurer une protection contre un emprisonnement qui reposerait sur l’opinion politique ou certains autres critères visés par la convention. La commission avait pris note de la modification de l’article 8 introduisant dans cet article l’élément d’intention et restreignant de ce fait les interprétations trop larges et le risque de discrimination. Elle avait également pris note de la déclaration du gouvernement selon laquelle l’article 1 limite la définition du terrorisme aux actes de violence. Cependant, elle avait noté que des journalistes avaient été condamnés sur le fondement de la loi antiterrorisme pour avoir exprimé leur opinion. Croyant comprendre que les amendements évoqués de la législation sont intervenus, la commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur tout changement concernant la loi antiterrorisme ou une autre législation qui aurait pour effet de restreindre la possibilité des journalistes, écrivains et éditeurs privés de leur emploi ou de l’exercice de leurs métiers d’exprimer leur opinion politique. La commission prie à nouveau le gouvernement d’envisager la révision, pour parer à toute ambiguïté, de l’article 1 de la loi, de manière à garantir qu’aucune disposition de cet instrument ne donne lieu à une condamnation pour l’expression d’opinions politiques par des moyens non violents. Elle demande également de continuer de fournir des informations sur le nombre, la nature et le résultat des affaires portant sur des condamnations de journalistes, écrivains et éditeurs auxquelles cette loi donnerait lieu.
10. Discrimination sur d’autres critères. Le gouvernement réitère que l’égalité de tous les citoyens turcs devant la loi est garantie par la législation turque et que ceux-ci ne se heurtent à aucune discrimination quelle qu’elle soit quant aux droits que la loi leur reconnaît. Le gouvernement déclare également que la Turquie d’aujourd’hui englobe une multitude de composantes ethniques, religieuses et culturelles et que des identités ethniques diverses, kurde comprise, sont reconnues et acceptées. La commission rappelle que, si les dispositions législatives concernant l’égalité et la non-discrimination sont un élément important d’une politique nationale sur l’égalité telle qu’elle est conçue à l’article 2 de la convention, ces dispositions ne constituent pas en elles-mêmes une politique. La convention prévoit l’élimination de la discrimination en droit et dans la pratique et prescrit à cette fin de prendre des mesures décisives pour l’égalité de chances et de traitement de tous les travailleurs. A cet égard, la commission prend note des informations du gouvernement relatives aux projets de promotion de l’accès à l’éducation et à l’emploi menés par la direction régionale des projets pour l’Anatolie du sud-est, qui intéressent notamment des communautés nomades et semi-nomades. Notant que de récentes réformes introduisent la possibilité, pour les écoles privées, d’enseigner dans une langue autre que le turc, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur cette réforme et sur toutes autres mesures prises ou envisagées pour promouvoir l’égalité dans l’emploi et la profession, sans distinction de la race, la couleur, l’ascendance nationale ou l’origine sociale.
La commission adresse par ailleurs au gouvernement une demande directe sur certains autres points.
La commission exprime l’espoir que le gouvernement s’efforcera de prendre les mesures nécessaires dans un proche avenir.
2. Discrimination fondée sur le sexe et sur la religion. La commission rappelle la teneur d’une communication de la Maison des Travailleurs de la République islamique d’Iran en date du 9 mai 1999, dans laquelle cette organisation signalait qu’une députée portant le voile à la manière islamique a été traitée de manière discriminatoire puisqu’elle a été contrainte de quitter la salle de la Grande Assemblée nationale sans avoir pu être assermentée. Dans cette communication, ce même organisme dénonçait également comme une discrimination l’interdiction de porter le voile à l’université, dans les établissements académiques, de même que pour les fonctionnaires. La commission avait fait observer que la règle prescrivant aux fonctionnaires et aux étudiants d’avoir la tête nue risque en fait d’avoir des conséquences disproportionnées pour les femmes portant le voile, et même d’altérer ou d’annihiler purement et simplement, pour des questions de pratiques religieuses, le droit d’accès à l’enseignement et à l’emploi sur un pied d’égalité. De plus, elle avait appelé l’attention sur les conséquences que l’interdiction du port du foulard peut avoir si on la replace dans le contexte d’un faible niveau d’instruction chez les femmes et d’un faible taux de participation de celles-ci à la vie active.
1. Discrimination sur la base du sexe. La commission prend note des statistiques pour l’année 1998 communiquées par le gouvernement à propos de la situation des femmes sur les plans de l’éducation et de l’emploi, ainsi que des informations concernant le projet de promotion de l’emploi des femmes (joint au rapport du gouvernement), à propos de la situation des femmes sur le marché du travail en 1996. La commission note à cet égard le niveau particulièrement bas d’instruction chez les femmes. Des chiffres font ressortir que, en octobre 1998, presque quatre fois plus de femmes que d’hommes (22,4 pour cent contre 5,9 pour cent) étaient illettrées. Le pourcentage de femmes ayant achevé leur scolarité primaire, avec 48 pour cent en 1996 puis 51,1 pour cent en 1998, semble avoir progressé. Quant au pourcentage de femmes appartenant à la population active, il reste faible, avec 27,9 pour cent.
2. La commission note, d’après le rapport sur le projet, que 58 pour cent des femmes turques n’ont pas suivi de formation professionnelle en dehors du système d’enseignement officiel. Dans le cadre de cette formation, la plupart se sont orientées vers la couture, la broderie et la fabrication des tapis, activités considérées comme traditionnellement féminines. La commission tient à faire valoir à cet égard que l’orientation et la formation professionnelles ont pour vocation de contribuer à une ouverture sur un vaste éventail de professions, loin de toutes considérations fondées sur des stéréotypes selon lesquels certaines professions seraient réservées à un sexe plutôt qu’à l’autre, cette ouverture devant elle-même favoriser une politique authentique d’égalité de chances et de traitement. Dans sa précédente demande directe, la commission avait pris note des informations communiquées par le gouvernement dans ses deuxième et troisième rapports présentés au Comité des Nations Unies sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), faisant ressortir les efforts déployés par les pouvoirs publics face aux handicaps des femmes sur le marché du travail turc, notamment à travers la révision de la législation, l’amélioration de la formation professionnelle et le projet de l’Agence nationale pour l’emploi relatif à l’emploi et à l’éducation. Sur ce plan, la commission note avec intérêt que, sur 3 379 stages avec garantie d’emploi organisés par l’Agence nationale pour l’emploi depuis 1993, près de 60 pour cent des participants étaient des femmes et que le taux de participation des femmes dans le cadre des quelque 787 programmes de lancement d’entreprises s’élevait à 84 pour cent à la même époque. La commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations sur les progrès réalisés à cet égard et de communiquer copie de ce projet pour l’emploi et l’éducation, ainsi que des statistiques sur la participation des femmes dans la vie active et dans les établissements d’enseignement. La commission prie en outre le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations, y compris des statistiques complètes et à jour, sur les pourcentages de femmes dans l’emploi, ventilées également de manière à distinguer la population urbaine et la population rurale, et les pourcentages de femmes par secteur et branche, dans le public comme dans le privé.
3. Faisant suite à ses précédents commentaires concernant le cadre juridique régissant la situation des femmes au travail et dans la vie familiale, la commission rappelle que le gouvernement indiquait dans son rapport à la CEDAW qu’il existait un projet de loi visant certaines dispositions discriminatoires du Code civil turc et que toutes les clauses discriminatoires de la législation nationale étaient à l’examen, y compris l’article 17/1)a) du Code du travail, lequel permet à l’employeur de mettre fin sans préavis au contrat de travail d’une travailleuse à la fin de son congé rémunéré de maternité. La commission prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur les progrès réalisés sur ce plan et de communiquer copie de tout texte modificateur du Code civil et du Code du travail dès son adoption.
4. Faisant suite à ses précédents commentaires concernant la nomination de femmes aux postes les plus élevés de l’administration, la commission note que le gouvernement déclare que l’instauration d’un système de quota est à l’étude, ce système étant axé sur un accroissement du nombre des femmes élues dans les assemblées locales (provinciales et municipales). Pour ce qui est de l’accès des femmes aux postes les plus élevés de l’administration publique, notamment aux postes de décision, la commission fait observer que le droit, pour tout individu, de ne pas faire l’objet d’une discrimination porte également sur l’avancement dans la carrière et que, pour qu’un système soit exempt de toute discrimination sur ce plan, il doit tout d’abord supprimer toute ségrégation professionnelle verticale, phénomène qui lèse souvent les femmes. La commission rappelle au gouvernement que des mesures volontaristes peuvent inclure, outre des quotas, une orientation et une formation professionnelles conçues de manière à permettre aux femmes de concourir plus efficacement pour les postes les plus élevés. Elle prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises pour améliorer l’accès des femmes aux postes les plus élevés de l’administration publique, notamment des statistiques sur la répartition des hommes et des femmes aux différents postes et niveaux de l’administration.
5. Règlement disciplinaire de 1979 concernant les forces de police. Le gouvernement indique que les articles 31 à 33 du règlement disciplinaire de 1979 ont pour but d’assurer l’objectivité et l’impartialité de la police dans le cadre de missions telles que la sécurité des réunions et manifestations ou la dispersion de réunions et manifestations illégales. Le gouvernement indique en outre que cette impartialité est considérée comme une règle inhérente à l’emploi. La commission rappelle que, dans la fonction publique, surtout pour les postes à haute responsabilité ou confidentialité, un certain devoir de neutralité et de fidélité pourrait être exigé, sans toutefois rendre sans objet la protection accordée par la convention (voir étude d’ensemble de 1996, paragr. 46). Se référant à ses précédents commentaires, la commission fait valoir que les cas dans lesquels l’opinion politique est prise en considération comme condition nécessaire pour un emploi donné doivent pouvoir faire l’objet, sous le contrôle d’une juridiction, d’un examen objectif au terme duquel il sera établi que la condition en question est ou non réellement justifiée par les exigences inhérentes audit emploi. La commission prie donc le gouvernement d’indiquer si des tribunaux judiciaires ou administratifs ont eu l’occasion d’appliquer et d’interpréter les articles 31 à 33 dudit règlement, et de bien vouloir communiquer ces décisions.
1. La commission prend note du rapport du gouvernement ainsi que des commentaires annexés de la Confédération turque des associations d’employeurs (TISK) et de la Confédération des syndicats turcs (TURK-IŞ).
2. La TISK fait état d’une progression marquée de l’emploi des femmes dans le secteur privé, invoquant à cet égard les statistiques du monde du travail publiées par le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, dont le BIT n’a malheureusement pas reçu copie. La commission constate cependant que les statistiques communiquées par le gouvernement dans son rapport dénotent un recul de l’emploi global des femmes (de 34 pour cent en 1990 à 27,9 pour cent en 1998), avec un taux d’emploi encore plus faible pour les citadines (10 pour cent). La commission note que, d’après des données contenues dans le rapport relatif à la situation des femmes sur les plans de l’instruction et de l’emploi, le niveau d’instruction chez les femmes est extrêmement bas. Les données communiquées font ressortir qu’en octobre 1998 les femmes illettrées étaient pratiquement quatre fois plus nombreuses que les hommes. La commission tient à souligner que, si une composante de la population n’a pas les mêmes chances d’atteindre le même niveau d’instruction que les autres, des disparités correspondantes continueront de se répercuter au niveau de l’emploi.
3. Discrimination fondée sur le sexe, la religion et l’opinion politique. Dans une communication en date du 9 mai 1999, la Maison des Travailleurs de la République islamique d’Iran, organisation de travailleurs, allègue, en se référant à la discrimination sur la base du sexe, de la religion et de l’opinion politique, que le gouvernement turc n’a pas respecté la convention. L’organisme en question déclare qu’une députée appartenant au parti pro-islamique de la Vertu a été traitée de manière discriminatoire en raison même de cette appartenance lorsqu’elle s’est présentée à la cérémonie d’investiture à la Grande Assemblée nationale le chef couvert d’un voile à la manière islamique et qu’à la suite des protestations des autres députés elle a été contrainte de quitter la salle sans avoir pu être assermentée. Ce même organisme dénonce également comme une discrimination dans l’emploi, en violation de la convention, l’interdiction de porter le voile à l’université, dans les établissements académiques, de même que pour les fonctionnaires.
4. En réponse à la demande d’éclaircissements de la part du gouvernement à propos de l’applicabilité de la convention aux membres du Parlement ou députés, la commission invite le gouvernement à se reporter au paragraphe 79 de son étude spéciale de 1996 sur l’égalité dans l’emploi et la profession, où sont discutés le sens des termes «profession», «personnes employées pour le compte d’une autre» et «travail». C’est ainsi qu’il apparaît que le champ d’application de la convention est très large puisqu’il s’étend à tous les secteurs d’activité et couvre aussi bien les emplois publics que les emplois privés (voir également étude d’ensemble de 1988 sur l’égalité dans l’emploi et la profession, paragr. 86, dans lequel on cite le rapport IV (1) (de la 42esession de la Conférence internationale du Travail, 1958, annexe) intitulé«Discrimination dans le domaine de l’emploi et de la profession»). La commission fait également observer qu’aux termes de l’article 3 d) de la convention, les Etats qui ratifient cet instrument s’engagent, par des méthodes adaptées aux circonstances et aux usages nationaux, à formuler et à appliquer, sous le contrôle direct d’une autorité nationale, une politique nationale visant à promouvoir l’égalité de chances et de traitement en matière d’emploi et de profession.
5. Dans son rapport, le gouvernement convient que l’apparition, dans la salle de la Grande Assemblée, de cette députée revêtue du foulard a soulevé des protestations de la part de certains membres du Parlement. Le gouvernement se réfère à un code vestimentaire s’appliquant aux parlementaires hommes et femmes, qui prescrit à ces dernières de porter dans la salle une veste et une jupe. Le gouvernement dit néanmoins que la pratique du port du foulard n’empêche pas les femmes d’être élues à une charge parlementaire. Il mentionne d’ailleurs à cet égard une autre femme députée qui a été investie le même jour sans incident mais qui apparemment ne portait pas le foulard ce jour-là même si elle avait notoirement coutume de le faire dans la vie courante. Notant que le code vestimentaire ne semble pas exclure expressément le port du foulard par les députées, la commission prie le gouvernement de communiquer copie de l’article 56 du règlement intérieur de la Grande Assemblée nationale turque.
6. La commission note que la Constitution turque stipule que la Turquie est un Etat démocratique, séculier et social et proclame le principe de la laïcité dans les affaires et la politique de l’Etat, mais aussi la liberté religieuse. Dans le contexte de la communication de la Maison des Travailleurs de la République islamique d’Iran, la commission rappelle que les considérations de religion, comme source de distinction dans la vie sociale et, plus spécialement, dans la vie professionnelle, peuvent présenter des caractères divers (voir son étude spéciale de 1996 précitée, paragr. 41). Les risques de discrimination sont aussi souvent la conséquence de l’absence de confession religieuse ou de la croyance en des principes éthiques différents, de l’absence de liberté religieuse ou de l’intolérance: notamment si une religion déterminée est définie comme la religion de l’Etat, ou si l’Etat est officiellement antireligieux, ou encore si la doctrine politique dominante est hostile à toute religion (ibid.). Le but de la convention est d’assurer une protection contre la discrimination fondée sur la religion et affectant l’emploi et la profession, discrimination qui résulte souvent de l’absence de liberté religieuse ou de l’intolérance et qui peut donner lieu à un certain nombre de situations. Dans certains cas, la discrimination peut résulter d’une attitude d’intolérance à l’égard des personnes qui professent une religion donnée ou des convictions religieuses spécifiques. La libre pratique d’une religion peut, dans certains cas, se heurter aux contraintes d’un emploi ou d’une profession, notamment lorsque cette pratique prescrit le port d’une certaine tenue vestimentaire (voir étude d’ensemble de 1988 susmentionnée, paragr. 47). A cet égard, la commission fait valoir que la protection prévue par la convention contre la discrimination sur le plan de l’égalité de chances et de traitement au motif de la religion serait privée de sa substance si elle n’incluait pas les aspects les plus importants de la pratique religieuse (voir étude d’ensemble de 1988 susmentionnée, paragr. 51).
7. Dans son rapport, le gouvernement confirme que, comme le font ressortir les commentaires de la Maison des Travailleurs, les fonctionnaires et les étudiants ont l’obligation d’avoir la tête nue lorsqu’ils sont, pour les premiers, en service et, pour les seconds, dans un établissement d’enseignement. Cette règle peut avoir une incidence pour les personnes qui - essentiellement des femmes - se couvrent le chef pour l’exercice de leur pratique religieuse. La commission fait valoir que des situations, des règlements ou des pratiques présentant l’apparence de la neutralité peuvent en fait se traduire par un traitement inégal des personnes répondant à certaines caractéristiques et résulter de ce fait en une discrimination indirecte sur la base de certains des critères visés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention. On peut considérer qu’il y a discrimination indirecte lorsqu’une même condition, un même traitement ou un même critère s’applique à toutes les personnes mais que son application a des conséquences d’une rigueur disproportionnée pour certaines d’entre elles en raison de facteurs tels que le sexe ou la religion, sans avoir de rapport étroit avec les exigences inhérentes à l’emploi considéré (voir étude spéciale de 1996 sur l’égalité dans l’emploi et la profession, paragr. 25 et 26). La règle prescrivant aux fonctionnaires et aux étudiants d’avoir la tête nue risque en fait d’avoir des conséquences disproportionnées pour les femmes musulmanes, et même d’altérer ou annihiler purement et simplement le droit proclamé par la convention d’accès à l’enseignement et à l’emploi sur un pied d’égalité pour des raisons de pratiques religieuses.
8. L’effet potentiellement discriminatoire de l’interdiction du port du foulard revêt une importance particulière à la lumière des informations communiquées par le gouvernement concernant le faible niveau d’instruction des femmes en Turquie (une femme sur deux à la recherche d’un emploi n’a qu’une instruction primaire), ce que reflète leur situation sur le marché du travail. La commission, qui s’est déclarée en d’autres occasions préoccupée par les conséquences de règles vestimentaires imposant le port du foulard ou d’autres éléments vestimentaires à l’égard des femmes fonctionnaires, se déclare non moins préoccupée par des règles interdisant à quiconque de se conformer, dans sa tenue vestimentaire, à certaines prescriptions religieuses, notamment au port du foulard, surtout lorsque ce particularisme n’a pas d’incidence sur l’accomplissement des tâches prévues par l’emploi ou la profession considérés. A cet égard, la commission prie le gouvernement de communiquer copie du règlement évoqué dans le rapport et d’indiquer les mesures prises ou envisagées pour assurer que ce règlement n’altère pas le droit des femmes musulmanes d’exercer un emploi dans le secteur public ou d’accéder aux moyens de l’enseignement. Elle le prie également de communiquer copie des jugements rendus par la Cour suprême d’appel et par le Conseil d’Etat (cour administrative suprême) dont il est fait mention dans le rapport. Elle rappelle également l’importance qui s’attache au respect des individus, à la tolérance, à la compréhension et à l’acceptation mutuelle des diverses religions et des divers groupes ethniques dans le cadre d’une politique d’égalité de chances et de traitement dans l’emploi. Elle prie le gouvernement de faire connaître toute mesure prise pour sensibiliser le public à cet égard.
9. Situation des fonctionnaires qui ont été licenciés ou mutés sous la loi martiale pendant la période 1980-87. La commission se réfère à ses précédents commentaires concernant la réintégration des victimes d’une discrimination fondée sur des motifs politiques, en application de la loi martiale no 1402. Faisant suite à sa précédente observation, dans laquelle elle demandait des précisions sur les raisons pour lesquelles 753 des fonctionnaires mutés et 202 des employés publics mutés qui avaient demandé leur réintégration ne l’avaient pas obtenue, la commission note que, selon les déclarations du gouvernement, les intéressés n’ont pas été réintégrés soit parce qu’ils ne l’ont pas demandé soit parce qu’ils ne satisfaisaient plus aux exigences de l’emploi considéré du fait des peines d’emprisonnement qui leur avaient été infligées en application du Code pénal. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur le pourcentage de quelque 955 agents mutés qui n’ont pas été réintégrés à cause des peines d’emprisonnement subies, en précisant pour chacun d’entre eux le chef d’inculpation et la peine infligée. S’agissant de la réintégration, en vertu de la loi no4045, des membres militaires et civils des forces armées et des membres civils des forces de sécurité, la commission note que, selon la déclaration du gouvernement, 148 membres de ces personnels ont été réintégrés à des postes équivalents dans d’autres institutions publiques.
10. Amendements à la loi martiale no1402. Le rapport du gouvernement ne contient pas de réponse aux commentaires antérieurs de la commission concernant la nécessité d’abroger ou de modifier l’article 3 d) de la loi martiale no 1402, lequel investit les commandants de la loi martiale de vastes pouvoirs leur permettant de licencier des travailleurs et des fonctionnaires ou bien de les muter dans d’autres régions, pouvoir discrétionnaire qui, aux yeux de la commission, peut aboutir à une discrimination dans l’emploi sur la base de l’opinion politique en contravention avec la convention. La TURK- IŞ déclare que les commandants de la loi martiale restent toujours investis, en vertu de l’article 3 d) de la loi no1402, du pouvoir discrétionnaire de licencier des travailleurs et des fonctionnaires et de les envoyer dans une autre région sans aucune décision judiciaire et sans, non plus, que ne soient ménagées les voies de recours prévues à l’article 4 de la convention. La commission demande à nouveau au gouvernement de fournir des statistiques sur le nombre de recours formés contre l’application de cet article 3 d) de la loi no1402 et sur leur issue.
11. Mesures en vertu de la réglementation de 1990 sur les enquêtes de sûreté. La commission rappelle ses précédents commentaires sur la manière dont le gouvernement s’assure que les règlements de 1990, dont les définitions et le champ d’application sont très larges, ne sont pas appliqués de manière à interdire l’emploi en violation de la convention. Elle note que, selon le rapport, les dispositions de cette réglementation de 1990 qui n’entrent pas en conflit avec celles de la loi no 4045 restent applicables et que la Direction générale de la sûreté continue de mener des investigations en application à la fois de la loi no 4045 et de celles des dispositions de la réglementation de 1990 qui sont conformes à ce premier instrument. Rappelant que, selon l’article 7 provisoire de la loi no 4045, des dispositions réglementaires d’application devaient être adoptées dans les six mois suivant l’entrée en vigueur de la loi, le 2 novembre 1994, la commission prie le gouvernement de la tenir informée des progrès de la procédure d’adoption des règles d’application en question. Elle souhaiterait également que le gouvernement précise quelles sont les dispositions de la réglementation de 1990 qui sont appliquées par la Direction générale de la sûreté dans le cadre de ses investigations, et d’exposer de manière détaillée les modalités selon lesquelles ces dispositions sont appliquées dans la pratique.
12. Loi de 1991 sur la lutte contre le terrorisme. Se référant à ses précédents commentaires concernant l’article 1 de la loi sur la lutte contre le terrorisme, qui définit les actes de terrorisme et prévoit une peine d’emprisonnement pour de tels actes, la commission note que, selon la déclaration du gouvernement, cet article 1 limite la définition du terrorisme aux actes de violence. La commission note que cet article définit le terrorisme comme incluant tous les actes fomentés par une ou plusieurs personnes appartenant à une organisation qui entend changer les fondements de l’ordre politique, légal, social, séculaire ou économique du pays. A cet égard, la Commission des droits de l’homme des Nations Unies a constaté que plusieurs journalistes ont été condamnés sur le fondement de cette loi pour avoir exprimé leurs opinions ou fait un reportage sur des questions délicates telles que la question kurde (E/CN.4/1999/62/Add.2, 28 décembre 1998, paragr. 8). La commission attire à nouveau l’attention du gouvernement sur le paragraphe 45 de son étude spéciale de 1996 sur l’égalité dans l’emploi et la profession, dans lequel elle explique que la protection assurée par la convention contre la discrimination dans l’emploi et la profession s’étend à l’expression ou à la manifestation d’une opposition à des principes politiques établis ou, simplement, l’expression d’une divergence. La protection à l’égard d’opinions politiques ne s’applique certes pas lorsqu’il est fait recours à des méthodes violentes pour les exprimer ou les manifester. En conséquence, la commission invite à nouveau le gouvernement à envisager de restreindre le champ d’application de l’article 1 de la loi de manière à garantir que nul ne puisse être privé de son emploi ou de sa profession - par effet de cette loi -au motif de l’expression d’une opinion politique.
13. S’agissant de l’article 8 de la loi sur la lutte contre le terrorisme qui contient une définition très large de la propagande, assortie d’une peine de prison, la commission note qu’un nouveau projet d’amendement de cette disposition a été soumis à la Grande Assemblée nationale turque mais n’a pas encore été adopté. Elle saurait gré au gouvernement de la tenir informée du devenir de ce projet et d’en communiquer copie lorsqu’il aura été adopté. Elle apprécierait également qu’il lui soit communiqué copie de toute décision judiciaire ou administrative interprétant et appliquant les articles 1 et 8 de la loi susmentionnée.
14. Non-discrimination sur la base des autres critères. La commission prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle tous les citoyens turcs sont égaux devant la loi, sans considération de langue, race, couleur, sexe, opinion politique, convictions philosophiques et religieuses, appartenance ethnique ou autres caractéristiques. La commission rappelle sa précédente demande directe, où elle demandait des informations à propos de divers critères de discrimination visés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention - la race, l’ascendance nationale et la couleur. La commission constate que le rapport du gouvernement ne contient pas de réponse quant aux mesures prises pour promouvoir l’égalité de chances et de traitement en ce qui concerne les groupes minoritaires tels que les Kurdes. En conséquence, elle réitère sa demande à cet égard.
15. La commission adresse par ailleurs une demande directe au gouvernement sur certains autres points.
1. La commission note avec intérêt l'évolution du septième plan quinquennal de développement pour la période 1996-2000, dont l'un des objectifs est d'assurer la participation des femmes dans tous les domaines de la vie sociale en tant qu'individus, dont l'égalité de statut est un principe fondamental, et indiquant que des mesures seront prises pour améliorer le statut de la femme dans les domaines de l'éducation, de la santé, la vie professionnelle, la sécurité sociale et l'emploi, et pour éliminer les inégalités existantes. Au regard des arrangements prévus des cadres légal et institutionnel, la commission note, d'après les second et troisième rapports périodiques de la Turquie au Comité des Nations Unies sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (CEDAW) combinés qu'une Commission académique a été formée pour l'achèvement du projet de loi civile concernant l'égalité de traitement des femmes. Elle note également la déclaration de la délégation turque au CEDAW que toutes les clauses discriminatoires sont en cours de révision, y compris l'article 17/1a du Code du travail, qui prévoit que l'employeur a le droit de mettre fin au contrat d'une travailleuse sans préavis à la fin du congé de maternité payé. La commission prie le gouvernement de l'informer sur la situation de cette révision.
2. La commission note la déclaration du gouvernement dans son rapport CEDAW que l'égalité entre les sexes dans l'éducation a un impact direct sur les chances et les structures de l'emploi des femmes. Elle note que, d'après le rapport, les problèmes persistants de l'emploi des femmes peuvent être résumés comme suit: 1) le taux de participation des femmes dans la main-d'oeuvre est bas et en diminution de 34 pour cent en 1990 à 30 pour cent en 1995; 2) une large majorité de la main-d'oeuvre féminine est concentrée dans le secteur agricole et travaille comme main-d'oeuvre familiale non rémunérée; 3) l'emploi des femmes dans les secteurs non agricole et non rural est très marginal non seulement quantitativement, mais aussi par leur concentration dans des domaines de travail pouvant être considérés comme tâches appropriées aux femmes, comme le textile, l'industrie alimentaire, etc.; 4) le taux de chômage urbain pour les femmes est de plus du double de celui des hommes; 5) le secteur informel urbain fournit les plus importantes opportunités d'emploi pour les femmes des ménages à faibles revenus, ce qui signifie que les femmes sont généralement exclues de la protection légale et sociale et des bénéfices octroyés dans le secteur formel.
3. La commission note d'après le rapport CEDAW les efforts entrepris par le gouvernement pour aborder certains des problèmes énumérés, notamment par l'allocation de crédits, la révision de la législation, l'amélioration de la formation professionnelle, ainsi que les activités menées dans le cadre du projet d'emploi et d'éducation mis en oeuvre par l'agence turque de l'emploi. Elle prie le gouvernement de la tenir informée des progrès réalisés à cet égard, et de lui fournir copie de la brochure sur le projet de l'emploi et de l'éducation qui, bien que mentionné, n'était pas annexé au rapport. En relation avec cela, la commission note, d'après le rapport CEDAW, la création en 1993 du Département des statistiques sur la structure sociale et les femmes, et prie le gouvernement de lui fournir des données statistiques sur la participation des femmes dans la main-d'oeuvre et dans l'éducation pour permettre une meilleure analyse des progrès effectués.
4. La commission note que le rapport du gouvernement est muet sur la question de l'affectation de femmes à des postes administratifs élevés et doit donc prier une nouvelle fois le gouvernement de continuer à l'informer sur les mesures prises pour améliorer l'égalité d'accès des femmes à des positions à responsabilité dans l'administration.
5. La commission note les déclarations du gouvernement selon lesquelles, conformément à sa législation nationale et les accords internationaux auxquels la Turquie est partie, il n'y a pas de "minorité ethnique", la définition de "minorité" se réfère uniquement aux Juifs, aux Arméniens et aux Grecs orthodoxes, comme reconnu par le Traité de Lausanne de 1923, et qu'un citoyen turc, qu'il appartienne à une minorité religieuse ou non, jouit des mêmes droits et libertés dans l'emploi, la profession et de l'égalité devant la loi. Se référant plus spécifiquement aux critères de discrimination que sont la race, l'ascendance nationale ou la couleur, énumérés à l'article 1 a) de la convention, la commission prie le gouvernement de lui fournir des informations sur les mesures prises pour promouvoir l'égalité de chances et de traitement pour les groupes comme les Kurdes.
6. La commission note que les articles (31), (32) et (33) des Règles disciplinaires concernant les forces de police de 1979 interdisent aux officiers de police, sous peine de renvoi des forces, de participer à toute réunion extérieure ou à toute manifestation organisée dans des buts politiques, toute réunion extérieure ou intérieure ou manifestations dont la nature n'est ni scientifique ni culturelle, ni technique et qui sont organisées par les syndicats ou par des associations dont ils ne sont pas membres, ou de fonder une association ou de se joindre à des associations autres que la Fondation pour le renforcement des forces de police turques ou de prendre poste dans les organes d'autres fondations. A cet égard, la commission rappelle son étude spéciale de 1996 sur l'égalité dans l'emploi et la profession dans laquelle elle déclarait que, dans les cas où le critère de l'opinion politique est pris en compte comme condition préalable pour un poste donné, celui-ci doit être examiné objectivement, sous contrôle juridique, pour déterminer si cette condition est réellement justifiée par les exigences inhérentes au poste. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l'application desdits paragraphes, y compris comment le concept d'exigences inhérentes au poste est sauvegardé lors de l'application de ces paragraphes.
1. La commission note le rapport du gouvernement et les commentaires de la Confédération turque des associations d'employeurs (TISK). Elle note également le rapport précédent du gouvernement et les commentaires précédents de la Confédération des syndicats turcs (TURK-IS) et de la TISK qu'elle n'avait pas pu examiner à sa dernière session. La commission note que, d'après la TISK, l'application pratique de la convention ne pose aucun problème pour le secteur privé. Les commentaires de la TURK-IS font l'objet du point 3 ci-dessous.
2. Situation des fonctionnaires publics licenciés ou mutés durant la période d'application de la loi martiale de 1980-1987. Au regard de l'action prise pour donner effet à la décision du Conseil d'Etat de 1989 concernant la réintégration des victimes d'une discrimination basée sur des motifs politiques sous la loi martiale no 1402, la commission rappelle qu'elle a suivi le processus de réintégration de milliers de fonctionnaires depuis un certain nombre d'années. Dans sa précédente observation, la commission avait demandé des informations sur les raisons pour lesquelles 753 des fonctionnaires publics mutés et 202 des employés publics mutés qui avaient demandé la réintégration n'avaient pas été réintégrés à leur poste. Le gouvernement a répondu que ceux-ci soit n'avaient pas fait la demande, soit ne remplissaient plus les exigences de l'emploi en question. A cet égard, la commission prie le gouvernement d'indiquer si tous les fonctionnaires mutés avaient été informés de leur droit à la réintégration et de continuer à fournir des informations détaillées sur le nombre de demandes traitées et leur aboutissement concernant la réintégration et la compensation. Se référant à sa précédente observation concernant la réintégration de membres militaires et civils des forces armées et les membres des forces de sécurité sous la loi no 4045, la commission prie à nouveau le gouvernement d'indiquer si de telles demandes du personnel susmentionné pour des postes ou emplois dans des institutions publiques autres que celles auxquelles ils appartenaient ont été examinées par le Département du personnel de l'Etat comme requis dans ces cas par l'article 5 provisoire, et les résultats de cet examen.
3. Les amendements à la loi martiale no 1402. La commission rappelle que, dans des observations antérieures, elle avait noté que la loi no 4045 n'amende pas l'article 3 d) de la loi martiale no 1402, laissant intacts les larges pouvoirs se trouvant dans les mains des commandants de la loi martiale lorsque celle-ci est applicable, et avait exprimé l'espoir que les changements appropriés soient apportés pour assurer que les mesures destinées à sauvegarder la sécurité de l'Etat soient suffisamment définies et délimitées pour ne pas mener à une discrimination sur la base, notamment, de l'opinion politique. La TURK-IS indique dans ses commentaires que la loi martiale no 1402 autorise toujours les commandants de la loi martiale à licencier les travailleurs et les fonctionnaires publics ou à les muter dans d'autres régions sans décision judiciaire et sans respecter le droit d'appel prévu à l'article 4 de la convention. Notant la déclaration du gouvernement que la loi martiale, comme il est défini à l'article 122 de la Constitution turque, est une mesure exceptionnelle et temporaire, que l'exercice de la loi martiale a été levé à dater du 19 juillet 1987 et que certaines limitations avaient été placées sur les commandants de la loi martiale, la commission est toutefois d'avis que les commandants continuent à être investis de larges pouvoirs qui pourraient potentiellement mener à une discrimination dans l'emploi des fonctionnaires publics sur la base de l'opinion politique et en contradiction avec la convention. Elle prie donc une fois de plus le gouvernement d'engager une action immédiate pour abroger ou amender suffisamment ladite loi en fonction. Notant les assurances données par le gouvernement dans sa réponse que le droit d'appel pour l'application de l'article 3 d) de la loi no 1402 existe suivant l'article 125 de la Constitution et est ensuite assuré par la loi no 2577 sur la procédure des procès administratifs, la commission prie une nouvelle fois le gouvernement de fournir des informations statistiques sur le nombre d'appels interjetés sous cet article et leurs aboutissements.
4. Les mesures prises sous la réglementation de 1990 sur les enquêtes de sécurité. La commission note que les articles "provisoires" de la loi no 4045 étaient seulement applicables pour une période de six mois suivant son entrée en vigueur le 2 novembre 1994, mais que, d'après le gouvernement, les règlements d'application qui, selon l'article 7 provisoire de la loi, devaient être adoptés dans les six mois suivant l'entrée en vigueur de la loi n'ont pas encore été adoptés et que les dispositions de la réglementation de 1990 qui ne contredisent pas les dispositions de la loi no 4045 sont toujours d'application. La commission aimerait recevoir des informations sur la situation des règlements d'application et sur l'abrogation subséquente de la réglementation de 1990 sur les enquêtes de sécurité, ainsi que les détails sur l'utilisation dudit règlement jusqu'à abrogation.
5. La loi de 1991 sur la lutte contre le terrorisme. La commission note avec intérêt l'amendement du 27 octobre 1995 de l'article 8 de cette loi (qui contient une définition très large de la propagande pouvant être punie d'une peine d'emprisonnement), introduisant l'élément intentionnel ou de motivation, restreignant ainsi les interprétations extensives et la possibilité de discrimination. Elle note également toutefois que l'article 1 de la loi (qui a introduit une définition très large du terrorisme pouvant être puni d'une peine d'emprisonnement) n'a pas été amendé. En rapport à cela et se référant à sa précédente observation, la commission rappelle que la Sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités (Nations Unies) a fermement condamné (E/CN.4/Sub-2/1995/L.10/Add.7 d'août 1995), en Turquie, l'emprisonnement d'intellectuels, d'érudits, d'écrivains, de journalistes et de parlementaires en raison de leurs opinions. Considérant que l'article 1 de la loi contre le terrorisme avait été cité par la commission dans ses observations antérieures comme étant trop vaste dans sa portée et rendant possible une discrimination sur des motifs proscrits par la convention, la commission attire l'attention du gouvernement sur son étude spéciale de 1996 sur l'égalité dans l'emploi et la profession dans laquelle elle déclarait que la protection des individus contre la discrimination dans l'emploi et la profession sur base de l'opinion politique que prévoit la convention implique que cette protection soit accordée pour les activités d'expression ou de démonstration d'opposition aux principes politiques établis, ou simplement d'une opinion différente. Elle a également déclaré que la protection de l'opinion politique s'applique seulement aux opinions qui sont soit exprimées, soit extériorisées, et ne s'applique pas lorsque des méthodes violentes sont utilisées pour cette expression. La commission prie le gouvernement de continuer à envisager des amendements à la loi pour assurer que les personnes ne sont pas privées d'emploi par l'emprisonnement sous cette loi, comme conséquence à une discrimination sur l'un des critères définis à l'article 1, paragraphe 1 a), de la convention.
6. La commission note avec intérêt que la Cour constitutionnelle a abrogé l'article 159 du Code civil, qui exigeait l'autorisation du mari pour qu'une femme puisse accepter un emploi, pour inconstitutionnalité.
La commission soulève d'autres points dans une demande directement adressée au gouvernement.
La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement. Elle note en particulier avec intérêt que l'Agence nationale pour l'emploi ne demande plus, désormais, aux employeurs de préciser le sexe souhaité dans leurs offres d'emploi.
1. La commission note avec intérêt les informations fournies par le gouvernement quant aux différents programmes d'amélioration de l'égalité entre hommes et femmes sur le lieu de travail, notamment d'amélioration des bases de données concernant les femmes, la discrimination sexuelle et l'éducation. Puisque, désormais, la Direction générale de la condition et des problèmes des femmes relève du nouveau ministère d'Etat pour les femmes, la famille et les services sociaux, la commission prie le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur les activités de cette direction dans le cadre du plan quinquennal engagé en 1990.
2. La commission remercie le gouvernement d'avoir fourni copie de la législation de 1930, telle que modifiée, en application de laquelle les décisions concernant la nomination de femmes à des postes administratifs élevés ont été prises. La commission constate toutefois, à la lecture du rapport du gouvernement, qu'une seule femme gouverneur est actuellement en fonction et que sept femmes gouverneurs de district suivent actuellement une formation. Elle prie le gouvernement de continuer à faire connaître les mesures prises pour améliorer l'égalité d'accès des femmes à des postes de responsabilité dans l'administration.
3. Prenant note des chiffres fournis par le gouvernement pour 1993, illustrant l'importance des effectifs issus de catégories défavorisées qui bénéficient d'une formation professionnelle, notamment d'une formation débouchant sur un emploi assuré, la commission constate néanmoins que le rapport ne contient aucune autre précision sur les activités tendant à promouvoir l'égalité de chances et de traitement en faveur de catégories telles que les minorités ethniques. Elle prie donc le gouvernement de fournir de telles informations dans son prochain rapport.
La commission prend note du rapport du gouvernement et des commentaires de la Confédération turque des associations d'employeurs (TISK) (sur l'application de la convention dans le secteur privé) et de la Confédération des syndicats turcs (TURK-IS) (déplorant le maintien en vigueur de la loi martiale no 1402, en contradiction avec la convention).
Elle note également que, au cours de la session de la commission, un court rapport supplémentaire a été reçu comportant en annexe des commentaires nouveaux en langue turque de TURK-IS et de TISK. La commission se trouve dans l'obligation de différer l'examen de ces informations jusqu'à sa prochaine session.
1. Situation des fonctionnaires licenciés ou mutés entre 1980 et 1987, pendant la période d'application de la loi martiale. En ce qui concerne les mesures prises pour donner effet au jugement rendu en 1989 par le Conseil d'Etat au sujet de la réintégration des victimes d'une discrimination fondée sur des motifs politiques, sous la loi martiale no 1402, la commission note la déclaration du gouvernement selon laquelle aucun chiffre définitif ne peut être avancé quant au nombre de personnes licenciées ou mutées en raison de l'action exercée par les tribunaux administratifs. Le gouvernement est toutefois en mesure d'indiquer que, sur les 4 614 fonctionnaires révoqués sous la loi martiale, 3 541 ont demandé leur réintégration, 3 515 ont effectivement été réintégrés et 3 399 ont reçu une compensation; que sur les 7 023 fonctionnaires mutés, 6 270 ont retrouvé leur poste antérieur; et que sur les 267 agents des services publics mutés, 65 seulement ont retrouvé leur poste antérieur. La commission prie le gouvernement d'indiquer si d'autres cas restent pendants. Elle le prie également d'indiquer pourquoi 26 des fonctionnaires révoqués ayant fait leur demande de réintégration n'ont pas été réintégrés et pourquoi 753 fonctionnaires et 202 agents des services publics mutés ayant fait leur demande de réintégration n'ont pas retrouvé leur poste antérieur.
2. Modifications proposées à la loi no 1402 relative à la loi martiale. La commission note avec intérêt l'adoption, le 26 octobre 1994, de la loi no 4045 qui modifie la loi no 1402 par le fait qu'elle limite les recherches dans les archives et autres enquêtes de sécurité au seul personnel des institutions et organes publics traitant d'informations à diffusion restreinte, au sens strict du terme, et au personnel des forces armées, du contre-espionnage, de la police et des prisons; et par le fait qu'elle ordonne la suppression, dans les dossiers personnels des personnes visées par cette loi, de tous les antécédents ayant trait à de telles investigations autres que les décisions de justice. Cette modification permet également aux personnes qui ne pouvaient pas se présenter à des examens d'accès à la fonction publique ou pour des emplois dans cette fonction depuis 1980 pour des motifs de sécurité de passer ces examens ou d'obtenir ces emplois sans préjudice de leur âge dans la mesure où elles justifient encore des qualifications requises alors et où elles ne sont sous le coup d'aucun jugement définitif. Cet instrument modificateur permet officiellement la réintégration, dans les soixante jours, de tout employé des services publics révoqué en vertu de l'article 2 de l'instrument principal, sous réserve de certaines formalités (analogues à celles prévues par le jugement susmentionné rendu par le Conseil d'Etat en 1989).
3. La commission note toutefois que l'article 2 de l'instrument principal (qui habilite les commandants de la loi martiale à demander la révocation ou le transfert de fonctionnaires dans d'autres régions) n'a pas été abrogé comme elle le demandait dans ses précédentes observations, même si cet article a été modifié de manière à limiter le pouvoir de ces commandants de la loi martiale à la seule faculté de demander "une affectation ou une suspension de fonctions en vue d'une affectation". Bien que deux nouveaux alinéas permettent aux salariés des services publics ainsi suspendus de prendre un emploi dans n'importe quelle administration locale qui les accepte hors de la juridiction du commandant de la loi martiale demandant leur suspension, avec levée immédiate de cette suspension et protection du salaire, il n'en reste pas moins que les commandants de la loi martiale restent investis de vastes pouvoirs qui peuvent conduire à une discrimination sur la base de l'opinion politique quant aux conditions d'emploi des salariés des services publics. En outre, l'article "provisoire" 5 de l'instrument modificateur exclut de la portée de cet instrument les membres militaires et civils des forces armées et les membres des forces de sécurité. La commission prie le gouvernement de préciser le moment où les articles "provisoires" de la loi no 4045 cesseront d'être en vigueur.
4. Notant qu'un règlement d'application de l'instrument modificateur doit être promulgué, la commission prie le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur l'incidence de ces dispositions dans la pratique et, en particulier, sur la façon dont les catégories de personnel exclues des effets de l'instrument modificateur sont protégées contre toute discrimination dans l'accès à la formation et à l'emploi et dans les conditions d'emploi sur la base de leur opinion politique. A cet égard, la commission prie le gouvernement de communiquer copie du Règlement disciplinaire sur l'organisation de sécurité, qu'elle sollicite dans ses demandes directes depuis 1991.
5. La commission constate également que la loi no 4045 ne modifie pas l'article 3(d) de l'instrument principal, lequel permet aux commandants de la loi martiale d'expulser du ressort géographique de leur compétence pendant cinq ans les personnes considérées comme constituant une menace pour la sécurité nationale ou l'ordre public. La commission avait exprimé l'espoir que des modifications appropriées seraient effectuées afin que les mesures tendant à garantir la sécurité de l'Etat soient définies de manière suffisamment précise pour ne pas donner lieu à une discrimination sur la base, notamment, de l'opinion politique. Rappelant que ses préoccupations ont trouvé leur expression dans le jugement susmentionné que le Conseil d'Etat a rendu en 1989, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur la situation quant à cet article 3(d) et toute utilisation qui en aurait été faite, notamment tout recours en justice à ce sujet (par exemple à travers la Commission nationale des droits de l'homme). La commission rappelle à cet égard son avis, selon lequel le droit de recours prévu par l'article 125 de la Constitution ne suffit pas, à lui-même, dans ces circonstances, à assurer l'application de l'article 4 de la convention.
6. Mesures prises en application de la réglementation de 1990 sur les enquêtes de sécurité. La commission note avec intérêt qu'aux termes de l'article "provisoire" 7 de la loi no 4045 les dispositions de ce règlement qui ne sont pas en contradiction avec la loi restent en vigueur, jusqu'à ce que le règlement d'application de la loi no 4045 soit adopté, ce qui devrait être fait dans un délai de six mois à compter de l'entrée en vigueur de la loi. Etant donné que, comme elle l'a souligné dans sa précédente observation, le règlement de 1990 a une portée et un champ d'application trop vastes et produit ses effets dans un cadre trop vaste lui aussi, lorsqu'on le lit conjointement avec la loi de 1991 contre le terrorisme, la commission prie le gouvernement de l'informer, dans son prochain rapport, de l'adoption du règlement d'application et de l'abrogation consécutive du règlement sur les enquêtes de sécurité. La commission souhaiterait également obtenir des précisions sur toute application de ce règlement de 1990 tant qu'il n'aura pas été abrogé.
7. Loi de 1991 sur la lutte contre le terrorisme. La commission note à la lecture du rapport du gouvernement que les travaux du Parlement tendant à modifier cette loi (laquelle comportait une définition très large du terrorisme et de la propagande, l'un et l'autre actes étant punissables d'emprisonnement) sont toujours en cours. La commission note que, par décision datée du 31 mars 1992, la Cour constitutionnelle a abrogé, avec effet à compter du 27 janvier 1993, certaines dispositions de cet instrument mais a déclaré conformes à la Constitution ses articles 1 et 8. Dans sa précédente observation, la commission avait critiqué ces articles comme étant trop vastes dans leur portée et rendant possible une discrimination sur des motifs proscrits par la convention. La commission prie le gouvernement de l'informer de l'état d'avancement des travaux du Parlement quant à la modification de cette loi, afin de garantir que nul ne puisse perdre son emploi par le fait d'une peine d'emprisonnement prononcée en application de cet instrument en conséquence d'une discrimination sur l'un des motifs visés à l'article 1, paragraphe 1 a), de la convention.
8. A cet égard, la commission note que la Sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités (Nations Unies) condamne fermement, dans sa décision E/CN.4/Sub.2/1995/L.10/add.7, d'août 1995, l'emprisonnement d'intellectuels, d'érudits, d'écrivains, de journalistes et de parlementaires en raison de leurs opinions. La commission prie le gouvernement de la tenir informée des implications, sur le plan de la politique nationale de non-discrimination en matière d'emploi et de profession, de tels cas d'emprisonnement.
La commission note les informations fournies par le gouvernement dans son rapport et les documents qui y étaient joints.
1. La commission note avec intérêt la création le 25 octobre 1990 de la Direction générale du statut et des problèmes des femmes, avec l'énoncé des responsabilités de cette institution, et saurait gré au gouvernement de continuer à fournir des informations détaillées sur les activités déployées en l'espèce pour promouvoir l'égalité de chances et de traitement dans l'emploi et la profession pour les femmes.
2. La commission note avec intérêt l'augmentation de l'accès des femmes à des postes tels que le gouvernement de province ou de district, prévue par décision gouvernementale datée de juillet 1991, de même que l'augmentation du recrutement des femmes dans les forces armées turques. Elle saurait gré au gouvernement de fournir copie de cette décision.
3. La commission se félicite des statistiques détaillées sur la main-d'oeuvre, ventilées par sexe, niveau d'éducation et profession, que le gouvernement a communiquées et espère qu'il continuera à fournir des données de cette nature. Pour ce qui concerne les statistiques sur les services de placement, la commission saurait gré au gouvernement de préciser si les placements sont désignés comme intéressant soit les hommes, soit les femmes.
4. La commission prend note de l'augmentation des cours de formation professionnelle en faveur des personnes pouvant être considérées comme désavantagées sur le marché du travail, telles que les Turcs de Bulgarie et les handicapés, et prie le gouvernement d'indiquer les résultats acquis en termes d'emploi des intéressés. Elle prie aussi le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises conformément à l'article 3 de la convention pour promouvoir l'égalité de chances et de traitement en vue d'éliminer la discrimination à l'encontre d'autres catégories désavantagées, telles que les minorités ethniques.
5. Action disciplinaire. La commission juge utile de demander encore une fois au gouvernement de fournir avec son prochain rapport un exemplaire des règles et règlements de discipline pour l'organisation de la sécurité.
1. La commission prend note des discussions qui ont eu lieu à la Commission de la Conférence en 1991, du rapport du gouvernement et de la documentation qui y était jointe, notamment des commentaires de la Confédération turque des associations d'employeurs et de la Confédération des syndicats turcs (TURK-IS). Dans ces commentaires, la Confédération turque des associations d'employeurs exprime son accord avec les informations et explications données à la Commission de la Conférence en 1991 par le représentant gouvernemental turc. La TURK-IS s'interroge sur les mesures qui ont été prises pour remplacer et modifier la loi no 1402 relative à la loi martiale et a espéré que la commission continuerait à suivre l'application du règlement de 1990 sur les enquêtes de sécurité.
Situation des fonctionnaires licenciés ou mutés entre 1980 et 1987 pendant la période d'application de la loi martiale
2. Dans son observation de 1991, la commission avait noté le jugement du Conseil d'Etat, en date du 7 décembre 1989, qui concluait que les fonctionnaires, employés publics et travailleurs des services publics dont l'emploi avait pris fin à la demande des commandants de la loi martiale, en application de l'article 2 de la loi no 1402 devront être réintégrés à leur poste par les institutions concernées dans la région où il a été mis fin à leur emploi, pour autant qu'ils n'aient pas perdu les qualifications requises au moment de leur première nomination. La commission avait noté également, au vu de l'opinion de l'avocat général du Conseil d'Etat, que les décisions prises par les commandants de la loi martiale au sujet des licenciements et mutations dans l'emploi, en vertu de la loi no 1402, avaient été jugées non conformes à l'article 4 de cette convention. La commission avait espéré que le jugement du Conseil d'Etat serait pleinement appliqué au profit de toutes les personnes dont l'emploi avait été affecté et que sa teneur serait prise en considération dans les amendements à la loi relative à la loi martiale.
3. La commission note, selon les informations fournies à la Commission de la Conférence en 1991 et d'après le rapport du gouvernement, que le jugement du Conseil d'Etat continue à être mis à exécution et que les demandes de réintégration continuent à être traitées en conséquence.
4. La commission note avec satisfaction, d'après la déclaration du gouvernement, que sur les 72 membres de l'université qui avaient demandé leur réintégration, 68 sont revenus à leur poste à la suite des mesures adoptées, moyennant en particulier la création de postes supplémentaires, conformément au jugement du Conseil d'Etat. Le gouvernement ajoute que, en ce qui concerne les quatre membres de l'université qui s'étaient vu refuser leur réintégration, le premier avait perdu sa qualification en tant que fonctionnaire, le recours du deuxième avait été refusé par le tribunal, le troisième n'avait pas encore remis les documents requis et le quatrième était déjà à la retraite.
5. La commission avait prié le gouvernement de fournir des informations précises pour ce qui est des 358 fonctionnaires qui avaient été licenciés sous le régime de la loi martiale et dont la réintégration avait été refusée. Elle avait également demandé des précisions sur le sens des articles 48 et 98 de la loi no 657 sur la fonction publique, qui avaient été mentionnées comme constituant des obstacles légaux à la réintégration des intéressés. La commission prend note des éclaircissements fournis par le gouvernement à cet égard. Elle note avec intérêt qu'à la suite de l'adoption de la loi no 3713 du 12 avril 1991 sur la lutte contre le terrorisme 161 fonctionnaires ont été réintégrés dans leurs droits et que d'autres demandes de réintégration étaient en cours d'examen. Selon le gouvernement, les 197 fonctionnaires qui n'ont pas encore été réintégrés sont toujours sous le coup de la sentence qui les avait frappés ou ont été reconnus coupables, aux termes de la loi no 657, d'une infraction dégradante telle que corruption, vol, détournement de fonds ou fraude. La commission espère que les demandes continueront à être examinées dans l'esprit du jugement du Conseil d'Etat et que, dans son prochain rapport, le gouvernement continuera à la tenir informée du statut des fonctionnaires dont les demandes de réintégration avaient été suivies d'effet.
6. La commission a noté que le jugement du Conseil d'Etat avait écarté les obstacles empêchant les personnes qui avaient été transférées dans d'autres régions au cours du régime de la loi martiale de revenir à leurs lieux d'origine. La commission avait prié le gouvernement de fournir, au sujet des 4.870 personnes mutées, des informations et des statistiques précises concernant leur retour chez eux. La commission note que, d'après les indications du gouvernement, certaines de ces personnes étaient revenues à leur poste par la voie des procédures légales normales et que d'autres avaient bénéficié du jugement du Conseil d'Etat ou d'une suite favorable donnée à une demande directement présentée. Le gouvernement indique qu'aucun recours ni aucune demande ne sont laissés sans réponse. La commission doit réitérer de nouveau sa demande d'informations et de statistiques plus précises sur le nombre de personnes qui ont retrouvé leur région et leurs fonctions antérieures.
7. La commission avait demandé des informations sur l'indemnisation des personnes dont l'emploi avait été affecté par les décisions prises en application de la loi no 1402, qui avaient demandé réparation et pour lesquels les tribunaux s'étaient prononcés favorablement. La commission note la déclaration générale du gouvernement selon laquelle toutes les personnes réintégrées ont été indemnisées. Elle doit néanmoins demander des informations plus précises sur le nombre de personnes qui ont demandé réparation, notamment sur celles qui n'avaient pas cherché à être réintégrées ou qui n'avaient pas bénéficié d'une réintégration, ainsi que sur les jugements rendus en l'espèce et la mise à exécution de ces derniers.
Amendements proposés à la loi no 1402 relative à la Loi martiale
8. La commission note, d'après le rapport du gouvernement, que le projet de modification de la loi no 1402, qui avait fait l'objet de ses commentaires précédents, était devenu caduc du fait qu'il n'avait pas été adopté avant l'expiration du mandat du Parlement (avant les élections générales d'octobre 1991). La commission note encore qu'un nouveau projet, préparé par le ministère de la Justice, a été soumis au Conseil des ministres en octobre 1992 et devait être présenté au Parlement au début de 1993. Le gouvernement déclare que ce projet abroge l'article 2 de la loi no 1402, qui donnait pouvoir aux commandants de la loi martiale de demander le licenciement ou la mutation dans une autre région de fonctionnaires et prévoit la réintégration, le retour au lieu d'origine et des réparations à l'égard des personnes mutées ou licenciées. La commission veut croire que le gouvernement sera en mesure d'indiquer que cet article aura été abrogé comme elle le demande depuis de nombreuses années.
9. La commission veut croire également qu'un amendement approprié modifiera l'article 3 d) de la loi no 1402, qui autorise le bannissement pour cinq ans de personnes considérées comme constituant une menace pour la sécurité nationale ou l'ordre public, afin de garantir que les mesures tendant à sauvegarder la sécurité de l'Etat soient suffisamment définies et délimitées pour éviter toute discrimination fondée, entre autres, sur l'opinion politique. A cet égard, la commission précise de nouveau que le droit de recours visé à l'article 125 de la Constitution ne suffit pas à assurer la protection nécessaire. La commission espère que ces considérations, dont elle a trouvé l'écho dans l'avis exprimé par l'avocat général du Conseil d'Etat, seront prises entièrement en compte au cours de la rédaction du texte final de la loi projetée. Elle espère que le gouvernement sera en mesure dans son prochain rapport d'indiquer les progrès accomplis dans le sens de l'adoption des amendements voulus à la loi relative à la loi martiale.
10. La commission note avec intérêt qu'une Commission des droits de l'homme a été créée en application de la loi no 3586 du 5 décembre 1990 et que cette commission avait commencé à réexaminer la loi no 1402. La commission prie le gouvernement d'indiquer si cette commission poursuit ses travaux et, dans l'affirmative, de préciser ses fonctions et pouvoirs, notamment en ce qui concerne la révision de la loi no 1402 ou de tout autre texte législatif, et mentionner les décisions qu'elle aurait éventuellement rendues.
11. Le gouvernement indique aussi que le nouveau projet tendant à modifier la loi no 1402 limitera les enquêtes de sécurité entreprises dans l'administration publique aux membres du personnel qui ont en mains des documents secrets et ont accès aux services de haute sécurité, et interdira les enquêtes pour le reste du personnel en fonction ou en cours de recrutement. Ce projet devra comporter une claire définition de la nature des documents et informations réputés mettre en péril la sécurité de l'Etat, de sorte que les personnes qui se seraient vu refuser un emploi ou qui auraient été licenciées à la suite d'enquêtes de cette nature après le 12 septembre 1980 seraient recrutées ou réintégrées, selon le cas, pour autant qu'elles n'auraient pas cessé d'être qualifiées à cet effet. Le gouvernement déclare en outre que la désignation des autorités chargées d'entreprendre ce genre d'enquêtes devrait être établie sous forme d'un règlement séparé.
12. La commission prend acte de l'information susvisée et de la relation qu'elle semble avoir avec la teneur du règlement du 8 mars 1990 sur les enquêtes de sécurité. A cet égard, la commission se réfère à son commentaire formulé ci-après et prie le gouvernement d'indiquer si le nouveau projet modifiera le règlement précité, tout comme la loi no 1402, et, si ce n'est pas le cas, de signaler quelles sont les mesures envisagées pour assurer que les dispositions spécifiques mentionnées ci-dessus ne seront pas rendues inopérantes en vertu de l'application du règlement sur les enquêtes de sécurité d'effet plus général.
Mesures prises sur la base des enquêtes de sécurité
13. La commission se réfère à ses commentaires précédents concernant les dispositions du règlement du 8 mars 1990 sur les enquêtes de sécurité, où elle a relevé leur portée étendue (le règlement touche toutes les personnes appelées à être employées dans des ministères et d'autres institutions et organisations publiques), leur vaste application (il comprend les activités idéologiques et subversives et les relations avec les étrangers) et les définitions très larges qu'elle contient (telles que celles qui concernent les "recherches sur archives", les "enquêtes de sécurité" et les "activités subversives"). La commission prie le gouvernement d'indiquer les mesures prises pour assurer que le refus d'employer ou la mutation à la suite de l'application de ce règlement ne se fondent pas sur l'opinion politique ni sur tout autre critère constituant une discrimination, aux termes de cette convention.
14. La commission note, d'après la déclaration du gouvernement, que les dispositions de la loi du 12 avril 1991 sur la lutte contre le terrorisme donnent une plus grande objectivité au règlement précité, et que toutes les actions entreprises en vertu dudit règlement peuvent être révisées judiciairement en conformité avec l'article 125 de la Constitution et avec la loi no 2577 concernant la procédure des actions administratives. La commission observe que les dispositions de la loi sur la lutte contre le terrorisme, en particulier sa définition du terrorisme (art. 1) et de la propagande (art. 8), sont trop étendues pour donner une spécificité ou une objectivité suffisantes à l'application du règlement sur les enquêtes de sécurité (voir ci-après davantage de détails sur la loi sur la lutte contre le terrorisme). Elle doit préciser en outre que le droit de recours ne suffit pas pour satisfaire aux prescriptions de l'article 4 de la convention en vertu duquel les mesures tendant à sauvegarder la sécurité de l'Etat doivent être suffisamment définies et délimitées pour ne pas entraîner de mesures discriminatoires fondées sur l'opinion politique ou sur tout autre critère interdit. La commission doit, par conséquent, prier une fois encore le gouvernement d'indiquer les mesures prises ou envisagées pour assurer que l'application du règlement en cause n'entraîne pas de discrimination au sens de la convention. La commission prie également le gouvernement de préciser le nombre de personnes qui se sont vu refuser ou ont perdu un emploi à la suite de l'application de ce règlement.
Loi du 12 avril 1991 sur la lutte contre le terrorisme
15. La commission note avec intérêt la loi sur la lutte contre le terrorisme, qui a abrogé les dispositions relatives à la peine capitale, réduit ou commué d'autres peines, décriminalisé l'usage de la langue kurde et abrogé certaines dispositions du Code pénal.
16. La commission note néanmoins, avec préoccupation, que la loi susvisée comporte une définition très étendue du "terrorisme" et de la "propagande", qui donnent tous deux lieu à des peines de prison. L'article 1er définit le terrorisme comme étant une activité dirigée par une ou plusieurs personnes appartenant à une "organisation" (ce dernier terme étant défini comme un groupe de deux personnes ou davantage ayant un objectif commun) et ayant pour but de changer les caractéristiques de la République, telles qu'elles figurent dans la Constitution, et son système politique, légal, social, laïc et économique, de porter atteinte à l'unité indivisible de l'Etat conçu comme territoire et comme nation, de mettre en danger l'existence de l'Etat et de la République turcs, d'affaiblir ou de détruire l'autorité de l'Etat, ou de s'en emparer, d'éliminer les droits et libertés fondamentaux ou de nuire à la sécurité interne et externe de l'Etat, de l'ordre public ou de la santé de la population par tout moyen de pression, de force et violence, de terreur, d'intimidation, de pression ou de menace. Aux termes de l'article 8, la propagande écrite ou orale et les assemblées, réunions et manifestations tendant à porter atteinte à l'unité indivisible de l'Etat turc, conçu comme territoire et comme nation, sont interdites quelles que soient les méthodes utilisées ou l'intention et les idées qui les inspirent.
17. Bien que toute sanction en vertu de cette loi puisse faire l'objet d'un recours, la commission fait observer que les définitions très larges qui y sont contenues ne paraissent pas établir de critères suffisamment précis sur la base desquels une protection contre l'emprisonnement pour, entre autres, l'expression d'une opinion politique soit assurée aux termes de la convention. La commission prie le gouvernement d'indiquer les mesures prises pour assurer que les personnes ne soient pas privées d'emploi du fait qu'elles sont emprisonnées en application de ladite loi en raison d'une discrimination fondée sur l'un des critères établis par la convention et de dire si les dispositions précitées ont été examinées par la Cour constitutionnelle.
La commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans son précédent rapport et des documents figurant en annexe qui ont maintenant été traduits.
1. Mesures disciplinaires. En vertu de l'article 3 c) de la convention, la commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur les mesures disciplinaires ou décisions donnant effet à l'article 129, paragraphe 3, de la Constitution. La commission prend note avec intérêt de l'ordonnance concernant les conseils disciplinaires et les contrôleurs de discipline, des règlements qui l'accompagnent et du texte des décisions judiciaires concernant l'application d'un certain nombre de règles et réglementations disciplinaires. La commission serait reconnaissante au gouvernement de fournir avec son prochain rapport un exemplaire des règles et règlements de discipline pour l'organisation de la sécurité.
2. Promotion de l'égalité de chances et de traitement. La commission prend note avec intérêt des informations fournies par le gouvernement dans son précédent rapport, selon lesquelles des mesures ont été prises pour prévenir la discrimination en matière d'emploi et de profession fondée sur le sexe. A cet égard, elle note la création de bureaux de placement pour les femmes, le lancement d'un programme d'action visant à modifier les préjugés dans le public et la prise de mesures visant à accroître la participation des femmes à la formation et à l'orientation professionnelles, à la prise des décisions et à la création de leurs propres affaires.
La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises pour promouvoir l'égalité de chances et de traitement pour les femmes en matière d'emploi. En particulier, la commission serait reconnaissante au gouvernement de donner des précisions sur le fonctionnement des bureaux de placement, sur l'exécution du programme d'action et sur l'application des autres mesures mentionnées ci-dessus, y compris les résultats obtenus dans l'accroissement de la participation des femmes à l'emploi et à la profession.
3. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises en application de l'article 3 de la convention pour promouvoir la politique d'égalité de chances et de traitement en matière d'emploi et de profession en vue d'éliminer toute discrimination.
La commission prend note des discussions qui ont eu lieu à la Commission de la Conférence en 1990, du rapport du gouvernement pour la période se terminant le 30 juin 1990, qui a été reçu le 7 février 1991, de la documentation jointe (y compris le règlement sur les enquêtes de sécurité du 8 mars 1990) et des observations annexées en date du 20 août 1990 qui ont été reçues de la Confédération turque des associations d'employeurs, observations qui indiquent que l'application de la convention n'a posé aucun problème dans le secteur privé et que l'application de la loi no 1402 relative à la loi martiale ne cause plus de difficultés pour ce qui est des pratiques utilisées en matière d'emploi dans la fonction publique. La commission a aussi examiné les traductions de la documentation annexée au précédent rapport du gouvernement reçu en février 1990 (y compris la décision du Conseil d'Etat en date du 7 décembre 1989 ainsi que la législation et les arrêts des tribunaux concernant les mesures disciplinaires prises contre les fonctionnaires).
1. Situation des fonctionnaires licenciés ou mutés entre 1980 et 1987 pendant la période de la loi martiale
i) A la suite de son examen de la décision du Conseil d'Etat en date du 7 décembre 1989, la commission note avec satisfaction la conclusion de la décision en vertu de laquelle:
- les fonctionnaires et autres agents et travailleurs des services publics dont l'emploi a pris fin à la demande des commandants de la loi martiale, en application de l'article 2 de la loi no 1402, devront être réintégrés dans leurs services par les institutions intéressées lorsque la loi martiale aura été levée dans la région où il a été mis fin à leur emploi, pour autant qu'ils n'aient pas perdu les qualifications requises au moment de leur première nomination;
- on envisage d'unifier la jurisprudence dans le même sens.
La commission note également avec intérêt, au vu de l'opinion de l'avocat général du Conseil d'Etat, que les décisions prises par les commandants de la loi martiale au sujet des licenciements et mutations en matière d'emploi, en vertu de la loi no 1402, ont été jugées non conformes aux dispositions de l'article 4 de la convention parce que les personnes en cause n'ont pas eu le droit de recourir devant les tribunaux administratifs; que l'autorité conférée aux commandants de la loi martiale par la loi no 1402 pouvait donner lieu à des pratiques fondées sur des évaluations subjectives, arbitraires et contraires à l'intérêt public, du fait que les raisons d'exercer un tel pouvoir n'avaient pas été clairement définies par la loi et qu'aucune disposition n'avait été prise pour protéger les agents des services publics; et, au surplus, que la raison selon laquelle "leur service est inutile" n'avait rien à voir avec les raisons constitutionnelles nécessitant la proclamation de la loi martiale.
La commission note la convergence de ces vues avec celles qui ont été exprimées dans ses observations antérieures. Elle espère fermement que la décision sera pleinement appliquée au profit de toutes les personnes dont l'emploi a été affecté par les décisions prises en application de la loi no 1402, et aussi que la teneur de la décision sera prise en considération dans les amendements à la loi relative à la loi martiale dont il est question au point 2 ci-après.
ii) Dans sa précédente observation, la commission invitait le gouvernement à fournir des statistiques sur la réintégration ou le retour des fonctionnaires licenciés ou mutés, ainsi que des informations sur les mesures prises en vue d'une indemnité pour perte de gains et d'autres prestations au cours de la période où ils avaient été privés de leur emploi ou mutés.
La commission relève avec intérêt d'après le rapport du gouvernement que, sur 9.400 fonctionnaires qui ont vu leur emploi affecté du fait de l'application de la loi martiale, 4.530 ont été licenciés et que, parmi eux, 4.097 ont été réintégrés dans la fonction publique, tandis que 75 autres n'ont pas sollicité leur réintégration. Le gouvernement indique aussi que la réintégration a été refusée à 358 fonctionnaires. La commission note d'après le rapport du gouvernement que les obstacles légaux s'opposant à la réintégration sont ceux indiqués aux articles 48 et 98 de la loi no 657 sur la fonction publique qui ont trait aux conditions de nomination dans la fonction publique et aux motifs de licenciement. La commission prie le gouvernement de préciser le sens de l'expression "ne devant pas être privés de droits civiques" qui figure à l'article 48 et aussi, pour ce qui est des 358 fonctionnaires dont la réintégration a été refusée, de fournir des informations sur leurs fonctions antérieures, sur les motifs précis pour lesquels leur réintégration a été refusée et sur la possibilité qu'ils ont ou non de faire appel de ces décisions.
iii) La commission a pris note précédemment de la circulaire adressée le 11 décembre 1989, par le Conseil supérieur de l'éducation aux doyens des universités, les informant qu'en vertu de la décision du Conseil d'Etat les membres licenciés des facultés avaient droit à une réintégration et les priant de donner la priorité à ces personnes dans le pourvoi des postes vacants et de demander au conseil de créer des postes supplémentaires s'il n'y avait pas de postes disponibles.
La commission prend note de la déclaration faite par le membre travailleur de la Turquie devant la commission à la Conférence en 1990, indiquant que la circulaire n'avait eu aucun effet parce qu'il n'y avait aucun poste vacant et que les personnes intéressées devraient attendre jusqu'à ce qu'il y en ait de nouveau. Elle note aussi que les cas particuliers de jugements incompatibles réexaminés dans le cadre de la décision du Conseil d'Etat sont en grande partie fondés sur des demandes de réintégration présentées par le personnel des universités.
La commission prie le gouvernement d'indiquer les mesures adoptées pour donner suite dans les universités à la décision prise par le Conseil d'Etat, au travers de la circulaire, en vue de réintégrer les personnes licenciées en application de la loi no 1402 pendant la période de la loi martiale, et de préciser en particulier si des demandes de création de postes supplémentaires ont été soumises ou approuvées par le conseil dans les cas où il n'existait aucun poste disponible pour donner suite aux demandes de réintégration. La commission prie également le gouvernement de fournir des informations complémentaires sur le nombre de membres des facultés des universités qui ont été réintégrés et sur le nombre de ceux dont les demandes de réintégration ont été refusées, en précisant les motifs de ce refus.
iv) En ce qui concerne les personnes mutées dans d'autres régions pendant l'application de la loi martiale, la commission relève dans le rapport du gouvernement que la décision du Conseil d'Etat a éliminé les obstacles qui empêchaient ces personnes de retrouver leur lieu d'origine. La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir, au sujet des 4.870 personnes qui ont été mutées, des informations et des statistiques précises sur le nombre de personnes qui ont retrouvé leur région et leurs fonctions antérieures.
v) En ce qui concerne l'indemnité aux personnes dont l'emploi a été affecté par les décisions prises en application de la loi no 1402 pendant la période de la loi martiale, le gouvernement indique dans son rapport que tous les fonctionnaires qui ont sollicité leur réintégration ont le droit de demander, par l'entremise des tribunaux compétents, une indemnité pour les pertes de gains et d'autres prestations.
La commission prend note de cette information. Elle prie le gouvernement de donner des précisions sur le nombre de personnes - non seulement celles qui ont sollicité leur réintégration, mais toutes celles qui ont été affectées par les décisions prises en vertu de la loi no 1402 - qui ont demandé une indemnité pour les pertes subies lorsqu'elles étaient privées d'emploi ou mutées, et sur le nombre de personnes qui ont bénéficié de jugements pris en leur faveur, ainsi que des informations sur l'application de tels jugements.
2. Amendements proposés à la loi no 1402 relative à la loi martiale
La commission note que le projet de loi visant à amender la loi no 1402 est encore à l'étude à la Grande assemblée nationale turque. D'après le rapport du gouvernement, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale a, pour la deuxième fois, en janvier 1991, adressé une communication écrite au président de la Commission de la justice de la Grande assemblée nationale pour appeler l'attention sur les vues de la commission d'experts concernant le projet de loi et qu'il a aussi sollicité la coopération des membres de la commission pour faire valoir les vues de la commission d'experts lors de l'amendement de la loi. Le gouvernement a indiqué précédemment que le projet de loi permettrait de procéder à des réexamens périodiques de la situation des personnes affectées par les mesures prises au cours de la période où la loi martiale était en vigueur et que, conformément à l'article 125 de la Constitution, il serait possible de faire appel devant les tribunaux des décisions prises par les institutions pertinentes.
La commission rappelle cependant que le projet de loi n'empêcherait pas de prendre des mesures affectant l'emploi contre les personnes considérées comme "dangereuses ou indésirables du point de vue de la sécurité de l'Etat" et que la possibilité de faire appel devant les tribunaux en vertu de l'article 125 de la Constitution se bornerait à déterminer la conformité avec la loi des actes et décisions de l'administration. La commission rappelle que le fait de prévoir un droit de recours ne suffirait pas à répondre aux exigences de l'article 4 de la convention, à moins que les mesures visant à protéger la sécurité de l'Etat soient suffisamment bien définies et délimitées afin de ne pas conduire à une discrimination fondée, entre autres, sur l'opinion politique.
La commission réitère fermement l'espoir que le texte définitif du projet de nouvelles dispositions législatives concernant la loi martiale tiendra pleinement compte des considérations mentionnées ci-dessus, qui se trouvent d'ailleurs reflétées dans l'opinion de l'avocat général du Conseil d'Etat. Elle prie le gouvernement d'indiquer les progrès accomplis en vue d'une modification appropriée de la loi relative à la loi martiale.
3. Mesures prises sur la base des enquêtes de sécurité
La commission a pris note de la réglementation sur les enquêtes de sécurité qui a été adoptée par la résolution no 90/245 du Conseil des ministres du 8 mars 1990 remplaçant l'ancienne réglementation sur les enquêtes de sécurité invalidée récemment par décision du Conseil d'Etat.
La commission prend note de la large portée de la réglementation sur les enquêtes de sécurité de 1990. En vertu des articles 1 et 2, il faut procéder à de telles enquêtes non seulement pour les personnes qui doivent être recrutées ou mutées à des postes donnant accès à des documents confidentiels et à des domaines hautement protégés, mais aussi pour les personnes devant être employés dans les ministères et autres institutions et organisations publiques. Selon les fonctions, institutions et catégories de personnes intéressées, les enquêtes peuvent consister en "recherches sur archives" à partir des dossiers existants, qui sont exécutées par l'Organisation nationale du renseignement, par la Direction générale de la sécurité ou par les autorités civiles locales, ou bien elle peuvent consister en "enquêtes de sécurité" à partir des dossiers existants et d'observations sur place effectuées par la Direction générale de la sécurité (art. 3E et F). Le personnel devant faire l'objet d'une recherche sur archives, en vertu de l'article 5 de la réglementation, comprend la plupart des personnes travaillant dans l'administration et dans les institutions et associations publiques; les magistrats et procureurs de l'Etat; les recteurs et doyens d'université et les membres des facultés; ainsi que les employeurs d'entreprises et de banques d'Etat et aussi les étudiants qui souhaitent aller étudier à l'étranger. Les enquêtes de sécurité, aux termes des articles 7, 8 et 9, sont requises notamment pour les magistrats et procureurs de l'Etat et les inspecteurs lors de leur nomination initiale, de leur promotion ou de leur changement d'institution, et elles doivent être renouvelées périodiquement ou chaque fois que nécessaire. En vertu des définitions données à l'article 3E et F du règlement, les "recherches sur archives" et les "enquêtes de sécurité" consistent à déterminer (et à apprécier) si les forces de sécurité recherchent ou non une personne ou s'il existe une restriction quelconque ou un rapport émanant des forces de sécurité ou des services de renseignement contre cette personne.
La commission note que les questions relevant de l'enquête de sécurité comprennent les activités idéologiques et subversives et les relations avec des étrangers (art. 3F, J, et 10C et E de la réglementation); que les activités subversives comprennent notamment la participation à des activités où le fait d'avoir été membre ou d'avoir entretenu des rapports étroits avec un membre d'une association ou d'un organe local ou étranger se livrant à des activités visant, entre autres, à porter atteinte à l'intégrité nationale de l'Etat ou aux droits et libertés fondamentaux; à établir le pouvoir d'une personne ou d'un parti sur l'Etat ou à amener la domination d'une classe sociale; ainsi que tout comportement contraire aux principes et révolutions instaurés par Ataturk.
La commission note également qu'en vertu de l'article 15 de la réglementation, une commission d'évaluation sera constituée pour juger, sur la base des conclusions de l'enquête de sécurité et de la recherche sur archives, si la personne doit être engagée comme fonctionnaire ou mutée de manière à l'éloigner des secteurs sensibles. Elle note également qu'aucun droit d'appel de la décision de la Commission d'évaluation ne figure dans la réglementation.
La commission relève que les termes généraux des définitions données dans la réglementation pour la "recherche sur archives" et l'"enquête de sécurité", ainsi que pour les activités subversives, ne semblent pas énoncer de critères suffisamment précis sur la base desquels doit être prise la décision d'engager ou non ou de muter une personne afin d'assurer qu'il ne s'exerce aucune discrimination fondée sur l'opinion politique.
La commission tient à appeler l'attention du gouvernement sur les indications données aux paragraphes 135 et 136 de son Etude d'ensemble de 1988 sur l'égalité en matière d'emploi et de profession, à savoir: i) que la protection conférée par la convention n'est pas limitée aux divergences d'opinion dans le cadre des principes ou institutions reconnus, pour autant qu'on ne fasse pas appel à des méthodes violentes; et ii) que l'application des mesures visant à protéger la sécurité de l'Etat doit être examinée à la lumière des répercussions que les activités prises en considération peuvent avoir sur l'accomplissement de l'emploi, de la tâche ou de la profession des personnes concernées.
La commission rappelle que, conformément à l'information communiquée en 1989 par la Confédération des syndicats turcs (TURK-IS), des mesures affectant l'emploi dans la fonction publique ont aussi été prises et, même après abrogation de la loi martiale, continuent d'être prises en application de la réglementation sur les enquêtes de sécurité afin de recueillir des informations politiques et autres données subjectives dont il est tenu compte dans les décisions prises en matière d'emploi, y compris les nouvelles nominations, les mutations et les promotions.
La commission prie le gouvernement d'indiquer dans quelle mesure les rapports sur les enquêtes de sécurité sont établis et utilisés pour ce qui a trait à l'emploi et pour toute autre décision pertinente et d'indiquer les mesures prises pour assurer que le rejet ou la mutation résultant de l'application de la réglementation n'est pas fondé sur l'opinion politique ou sur tout autre motif qui constituerait une discrimination aux termes de la convention.
La commission prie le gouvernement d'indiquer si les personnes affectées par les décisions prises sur la base d'enquêtes de sécurité bénéficient du droit de recours, conformément aux dispositions de l'article 4 de la convention.
La commission a pris note des discussions qui ont eu lieu à la Commission de la Conférence en 1989 ainsi que du rapport du gouvernement pour la période se terminant le 30 juin 1989. Elle a aussi examiné de nouveau les observations reçues en mars 1989 de la Confédération des syndicats turcs (TURK-IS) au sujet des mesures prises en application de la loi no 1402 relative à la loi martiale, ainsi que les amendements proposés à cette loi (copie de ces observations a été adressée au gouvernement pour lui permettre de faire des commentaires).
Le rapport du gouvernement a été reçu le 15 février 1990. La commission ne pourra l'examiner en détail que lorsqu'elle disposera de la traduction des documents qui y étaient joints (notamment une décision du Conseil d'Etat en date de décembre 1989 ainsi que la législation et des décisions judiciaires concernant les mesures disciplinaires prises contre des fonctionnaires). Toutefois, eu égard à l'importance que la Commission de la Conférence a attachée à l'adoption de mesures visant à éliminer les divergences précédemment relevées entre la législation et la pratique, d'une part, et les exigences de la convention no 111, d'autre part, la commission croit devoir attirer l'attention, dès la présente session, sur les points suivants:
1. Position des fonctionnaires licenciés ou mutés pendant la période de la loi martiale. Dans ses précédents commentaires, la commission avait sollicité des informations sur la réintégration dans leur emploi de fonctionnaires qui avaient été licenciés ou mutés dans d'autres régions à la suite de décisions prises par les commandants de la loi martiale en vertu de la loi no 1402, au cours de la période comprise entre 1980 et 1987, lorsque la loi martiale était en vigueur dans l'ensemble du pays ou dans plusieurs provinces. Selon les informations données par le gouvernement dans son rapport:
- le 7 décembre 1989, le Conseil d'Etat a décrété que la disposition figurant dans l'article 2 de la loi no 1402, aux termes de laquelle "les fonctionnaires licenciés ne devront jamais exercer à un nouvel emploi dans la fonction publique", ne s'appliquait que pendant la période où la loi martiale était en vigueur et que, celle-ci ayant pris fin, les personnes affectées pourraient retourner à leur travail, sous réserve d'autres obstacles de caractère juridique;
- en vertu de l'article 40 de la loi no 2575 concernant le Conseil d'Etat, la décision mentionnée ci-dessus a un caractère contraignant pour l'administration et les tribunaux administratifs;
- le 11 décembre 1989, le Conseil supérieur de l'éducation a adressé une circulaire aux doyens de l'université les informant qu'en vertu de la décision du Conseil d'Etat les membres licenciés de la faculté pouvaient prétendre à une réintégration et les priant de donner la priorité à ces personnes dans le pourvoi des postes vacants ainsi que de demander au Conseil de créer des postes supplémentaires s'il n'y avait pas de postes disponibles.
La commission a noté ces informations avec intérêt. Elle prie le gouvernement de fournir des précisions sur les mesures qui ont été prises pour réintégrer les fonctionnaires qui avaient été licenciés, non seulement dans les universités, mais également dans d'autres secteurs de la fonction publique, ainsi que pour permettre aux personnes qui avaient été mutées dans d'autres régions en vertu de la loi martiale de retrouver leur poste d'origine.
La commission rappelle qu'en vertu d'un document de février 1989, qui a été communiqué par la Confédération des syndicats turcs (TURK-IS) et qui affirme avoir été établi à partir des chiffres officiels, sur un total de 9.400 fonctionnaires qui avaient été licenciés ou mutés dans d'autres régions, 4.125 sont encore considérés comme "dangereux". En conséquence, la commission espère que le gouvernement fournira des données statistiques précises sur le nombre de fonctionnaires qui ont été réintégrés ou autorisés à revenir des régions vers lesquelles ils avaient été mutés.
La commission souhaiterait également recevoir des informations sur les mesures qui ont été prises pour reconnaître les droits des intéressés résultant de leur service antérieur et sur toutes mesures leur permettant d'obtenir une indemnité pour perte de gains et d'autres prestations au cours de la période où ils avaient été privés de leur emploi ou mutés.
La commission prie aussi le gouvernement de bien vouloir indiquer quels sont les autres obstacles de caractère juridique qui s'opposent à la réintégration et quel est le nombre de personnes auxquelles une réintégration a été refusée pour divers motifs.
2. Amendements proposés à la loi no 1402 relative à la loi martiale. La commission note qu'un projet de loi visant à amender la loi no 1402 est actuellement soumis à la Grande Assemblée nationale turque. D'après les indications fournies par le gouvernement, le projet de loi devrait permettre d'examiner périodiquement la situation des personnes affectées par les mesures prises à l'époque où la loi martiale était en vigueur et, conformément à l'article 125 de la Constitution, il serait possible de faire appel devant les tribunaux des décisions qui ont été prises par les agences pertinentes.
La commission note cependant que le projet de loi n'empêchera pas de prendre des mesures affectant l'emploi contre les personnes considérées comme "dangereuses ou indésirables du point de vue de la sécurité de l'Etat" et que la possibilité de faire appel devant les tribunaux en vertu de l'article 125 de la Constitution se bornera à déterminer la conformité avec la loi des actes et décisions de l'administration. La commission rappelle les commentaires concernant la portée de l'article 4 de la convention no 111 qui figurent aux paragraphes 136 et 137 de son Etude d'ensemble de 1988 sur l'égalité en matière d'emploi et de profession, dans lesquels elle soulignait que les mesures visant à préserver la sécurité de l'Etat devaient être suffisamment bien définies et délimitées afin de ne pas conduire à une discrimination fondée (entre autres) sur l'opinion politique; que l'application de mesures visant à protéger la sécurité de l'Etat devait être examinée à la lumière des répercussions que les activités prises en considération peuvent avoir sur l'accomplissement de l'emploi, de la tâche ou de la profession des personnes concernées; et que la disposition prévoyant un droit de recours ne permettrait pas de répondre aux exigences de l'article 4 de la convention si les conditions de fond précitées n'étaient pas remplies.
La commission veut croire qu'il sera pleinement tenu compte des considérations mentionnées ci-dessus dans le texte définitif des nouvelles dispositions législatives que l'on envisage d'adopter concernant la loi martiale. Elle prie le gouvernement d'indiquer les progrès accomplis en vue de l'adoption de ces dispositions.
3. Mesures prises sur la base des enquêtes de sécurité. D'après les informations communiquées en 1989 par la Confédération des syndicats turcs (TURK-IS), des mesures affectant l'emploi dans la fonction publique ont aussi été prises et, même après l'abrogation de la loi martiale, continuent d'être prises en application du Règlement sur les enquêtes de sécurité, afin de recueillir des informations politiques et autres données subjectives, dont il est tenu compte dans les décisions relatives aux nouvelles nominations, aux mutations, aux promotions, etc. La commission relève, dans le rapport du gouvernement, que le Règlement sur les enquêtes de sécurité concernant les fonctionnaires occupant des postes clés que l'on se propose de recruter, muter ou affecter est considéré comme ayant été invalidé, pour vice de forme, à la suite d'une décision récente du Conseil d'Etat, dont le texte sera adressé au BIT lorsqu'il aura été publié. La commission espère que le gouvernement fournira, en plus de cette décision, des informations sur tout nouveau règlement qui pourrait avoir été adopté ou envisagé en vue de procéder à de telles enquêtes de sécurité, et sur les mesures prises pour assurer le respect de la convention à cet égard.