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Observation (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

La commission note les observations de la Confédération Générale du Travail (CGT) reçues le 29 août 2023 et des réponses du gouvernement à cet égard. La commission relève que les observations de la CGT contiennent en particulier des allégations: i) de restrictions à l’exercice des droits collectifs, y compris la négociation collective lors de la pandémie de COVID-19; et ii) d’actes de discrimination antisyndicale dans les secteurs public et privé dans un contexte général, selon la CGT, d’atteinte croissante aux droits syndicaux. La commission note également sur ce dernier point les éléments généraux contenus dans l’observation de la Confédération française de l’encadrement-Confédération Générale des Cadres (CFE-CGC) présentée à propos de l’application de la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971, et des réponses correspondantes du gouvernement. La commission prend bonne note des réponses détaillées du gouvernement sur les mesures prises pour faciliter la négociation collective ainsi que les activités de représentation des travailleurs dans le contexte spécifique de la pandémie. La commission note également les éléments du gouvernement concernant les mécanismes de protection contre la discrimination antisyndicale ainsi que les réponses fournies à certaines allégations spécifiques. Au vu des allégations de caractère général des organisations syndicales en matière de discrimination antisyndicale, la commission prie le gouvernement de mener un dialogue avec les partenaires sociaux représentatifs sur l’efficacité des mesures de prévention et de sanction des actes de discrimination antisyndicale. La commission prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard.

Suivi des recommandations d ’ un comité tripartite (réclamation présentée en vertu de l ’ article 24 de la Constitution de l ’ OIT) 

La commission note qu’en mars 2023, le Conseil d’administration a approuvé le rapport du comité tripartite chargé d’examiner une réclamation déposée par la Confédération générale du travail – Force ouvrière (CGT-FO) et la CGT au titre de l’article 24 de la Constitution de l’OIT (GB.347/INS/18/3) concernant l’application par la France des conventions nos 87 et 98 et concernant certains aspects circonscrits des réformes adoptées en 2016 et 2017 en matière de dialogue social et de négociation collective. La commission relève que le Comité tripartite a demandé à la commission d’experts d’effectuer un suivi de ses recommandations, qui concernent particulièrement l’application de l’article 4 de la présente convention. La commission note que le comité a prié le gouvernement de: i) engager le dialogue avec les partenaires sociaux afin d’assurer que la législation concernant l’articulation entre les différents niveaux de négociation soit mise en œuvre d’une manière qui garantisse le principe de la négociation collective libre et volontaire; ii) examiner et évaluer avec les partenaires sociaux concernés l’application des dispositions attribuant à l’employeur la faculté de convoquer une consultation des salariés pour faire approuver un accord d’entreprise qui n’aurait pas été appuyé par les organisations syndicales majoritaires dans l’entreprise et que les syndicats signataires n’auraient pas soumis à un référendum sur le lieu de travail; et iii) informer de la mise en œuvre des réformes et de leurs effets sur la négociation collective dans la pratique. Tout en notant les indications du gouvernement sur les arrêts du Conseil d’État du 7 octobre 2021 examinés plus avant dans le cadre du présent commentaire, la commission prie le gouvernement de: i) fournir des informations sur le dialogue avec les partenaires sociaux requis par le comité tripartite concernant, d’une part, la mise en œuvre de la réforme en matière d’articulation des niveaux de la négociation et, d’autre part, la consultation des salariés à l’initiative de l’employeur aux fins de l’adoption d’un accord d’entreprise;etii) continuer à fournir des informations sur la mise en œuvre et les effets des réformes de 2016 et de 2017 en matière de négociation collective.
Articles 1 et 4 de la convention. Protection contre la discrimination antisyndicale et promotion de la négociation collective des travailleurs de plateformes considérés comme indépendants. La commission rappelle que, ayant pris note des initiatives prises par le gouvernement à cet égard, elle l’avait prié d’informer de l’adoption de tout texte concernant l’exercice des droits reconnus par la convention aux travailleurs de plateformes, quel que soit leur statut contractuel. La commission note que le gouvernement indique que: i) l’ordonnance no 2021-484 du 21 avril 2021 relative aux modalités de représentation des travailleurs indépendants recourant pour leur activité aux plateformes et aux conditions d’exercice de cette représentation, ratifiée par la loi no 2022-139 du 7 février 2022, a organisé la représentation des travailleurs des plateformes sur le principe d’une élection nationale sous l’égide d’un nouvel établissement public, l’Autorité des relations sociales des plateformes d’emploi (ARPE); ii) des dispositions de protection des représentants des travailleurs s’appliquent pendant leur mandat et pour une durée de six mois après la fin de ce mandat: la rupture par la plateforme du contrat commercial conclu avec un représentant des travailleurs pendant cette période de protection est soumise à une autorisation administrative préalable et un représentant qui estime subir une baisse d’activité du fait de la plateforme peut saisir le tribunal judiciaire, la charge de la preuve étant alors déplacée; iii) La première élection des organisations représentant les travailleurs des plateformes a été réalisée en mai 2022; iv) L’ordonnance no 2022-492 du 6 avril 2022 organise pour les secteurs de la conduite de voitures de tourisme avec chauffeur et celui des activités de livraison de marchandises au moyen d’un véhicule à deux ou trois roues le dialogue social et la négociation collective au niveau sectoriel; v) Pour être valide, l’accord collectif de secteur doit être signé par au moins une organisation de plateformes et par des organisations de travailleurs représentant plus de 30 pour cent des suffrages exprimés lors des élections et ne pas avoir rencontré l’opposition d’organisations de travailleurs représentant 50 pour cent des suffrages exprimés; vi) L’accord conclu s’applique aux plateformes adhérentes aux organisations signataires et à leurs travailleurs relevant des secteurs concernés; il s’impose aux contrats commerciaux liant les plateformes et les travailleurs du secteur concerné, sauf s’agissant des stipulations plus favorables dans les contrats commerciaux; et vii) l’ordonnance prévoit l’obligation d’engager une négociation tous les ans au niveau du secteur sur certains thèmes. La commission note avec satisfaction l’adoption des instruments précités reconnaissant et organisant les droits collectifs des travailleurs indépendants de plateformes et, pour deux secteurs spécifiques, établissant un cadre complet facilitant l’exercice du droit de négociation collective des travailleurs indépendants concernés. À cet égard, la commission note avec intérêt la signature en 2023 de plusieurs accords collectifs dans les deux secteurs mentionnés et relatifs, entre autres, à la rémunération des travailleurs indépendants et aux conditions régissant la rupture de leur relation contractuelle avec la plateforme. La commission encourage le gouvernement à poursuivre ses efforts pour que tous les travailleurs de plateformes, quel que soit leur type d’activités et leur statut contractuel, puissent exercer de manière effective les droits reconnus par la convention. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations à cet égard.
Article 4. Négociation collective avec des acteurs non syndicaux au sein de petites entreprises. La commission rappelle que, sur la base d’observations successives de la CGT FO, de la CFE-CGC et de la Confédération française démocratique du travail (CFDT), elle s’est penchée sur les possibilités de conclusion d’accords par le biais d’acteurs non syndicaux ouvertes par l’ordonnance de 2017.
Sur la base des informations fournies par le gouvernement, la commission rappelle qu’elle a constaté l’existence de trois principales modalités de conclusion d’accords collectifs dans les petites entreprises, soumises chacune à des règles et conditions spécifiques: i) la conclusion d’un accord avec un ou plusieurs délégués syndicaux ou un ou plusieurs salariés mandatés par une organisation syndicale (ces derniers pouvant être également des représentants du personnel élus); ii) en l’absence de délégué syndical, la conclusion d’un accord avec un ou plusieurs représentants élus du personnel non mandatés par une organisation syndicale; et iii) l’approbation sous certaines conditions dans les entreprises allant jusqu’à 20 salariés d’une proposition de l’employeur par un vote direct des salariés de l’entreprise à la majorité des deux-tiers. La commission a constaté que la première modalité s’inscrit dans le cadre de l’article 4 de la convention en vertu duquel la négociation collective a lieu entre les employeurs et les organisations d’employeurs d’une part, et les organisations de travailleurs d’autre part. Pour ce qui concerne la deuxième modalité, la commission a rappelé que la négociation directe avec des représentants élus par les travailleurs ne devrait être possible qu’en l’absence d’organisations syndicales au niveau considéré. Pour ce qui concerne la troisième modalité, la commission a considéré que l’adoption par un vote direct des salariés d’une proposition de l’employeur ne présente pas les caractéristiques d’un mécanisme de négociation collective au sens de la convention. Sur la base de ces éléments, la commission a prié le gouvernement de: i) préciser, lorsqu’il existe dans une petite entreprise un salarié mandaté par une organisation syndicale représentative aux fins de la négociation collective, si l’employeur pouvait librement choisir un autre mode de conclusion d’un accord collectif; ii) continuer à fournir des statistiques sur l’utilisation des différentes modalités de conclusion d’accords collectifs dans les petites entreprises; et iii) continuer à fournir des informations sur les mesures de promotion de la négociation collective entre l’employeur et les organisations de travailleurs au sein des petites entreprises.
Concernant le choix par l’employeur des modes de conclusion d’un accord, la commission note que le gouvernement indique que: i) dans les entreprises de moins de 50 salariés et en l’absence de délégué syndical, le code du travail permet à l’employeur d’opter pour une négociation soit avec un salarié mandaté par un syndicat, soit avec un salarié élu, mandaté ou non; et ii) Dans les entreprises employant entre 11 et 20 salariés, en l’absence de membre élu de la délégation du personnel du comité social et économique (CSE), l’employeur peut opter pour une négociation avec un salarié mandaté par un syndicat ou pour la consultation directe des salariés.
La commission note les informations fournies par le gouvernement sur les différents types d’accords conclus en 2021 dans les petites entreprises: i) pour les entreprises de moins de 50 salariés dans leur ensemble, 24,8 pour cent des accords ou avenants hors épargne salariale ont été signés par des délégués syndicaux (19 pour cent en 2020), 14,1 pour cent par des élus et salariés mandatés par des organisations syndicales (17,7 pour cent en 2020); 20,2 pour cent par des élus non mandatés par des organisations syndicales (20,7 pour cent en 2020) et 40,2 pour cent par des votes de salariés à la majorité des deux tiers (41 pour cent en 2020); et ii) 40,2 pour cent des accords hors épargne salariale ont été conclus par des votes des salariés à la majorité des deux tiers dans les entreprises de 11 à 20 salariés (72,9 pour cent en 2020) et 82,6 pour cent dans les entreprises de moins de 11 salariés (89 pour cent en 2020). La commission note que le gouvernement affirme que le développement du recours à des modalités alternatives de signature dans les petites entreprises ne se substitue pas à la négociation avec les représentants d’organisations syndicales puisque la proportion d’accords signés avec des délégués syndicaux a progressé en 2021 et la présence de ceux-ci dans les entreprises de 10 à 49 salariés étant d’ailleurs passée de 3,6 pour cent en 2014 à 4,5 pour cent en 2021.
La commission note que le gouvernement ajoute que: i) le salarié mandaté par un syndicat n’est pas habilité à représenter le syndicat dans l’entreprise de manière permanente mais seulement pour une négociation ponctuelle; ii) seules les organisations syndicales peuvent présenter des candidats au premier tour des élections du CSE et 54 pour cent des salariés élus du personnel dans les entreprises de moins de 50 salariés sont syndiqués; iii) la modalité du mandatement syndical d’un salarié est très rarement utilisée; et iv) la conclusion d’accords par un vote de la majorité des deux tiers du personnel ne consiste pas en une simple approbation de la décision de l’employeur mais donne lieu à un dialogue entre les salariés et ce dernier.
La commission note que le gouvernement rappelle également que: i) pour éviter que toutes les petites entreprises ne soient structurellement exclues des possibilités offertes par l’accord d’entreprise, il a été prévu des modalités de négociation adaptées à leurs spécificités, notamment à celles des entreprises dépourvues de tous acteurs syndicaux (salariés mandatés ou élus du personnel syndiqués ou mandatés), ce qui a conduit à un accroissement significatif des accords conclus dans ce type d’entreprises; et ii) est prévue depuis 2012 l’organisation tous les quatre ans d’une élection visant à mesurer l’audience des organisations syndicales dans les entreprises de moins de onze salariés.
La commission prend bonne note de ces différents éléments. Rappelant que l’article 4 de la convention contient une obligation de promouvoir la négociation avec les organisations de travailleurs, la commission est dans le même temps consciente du contexte spécifique de la négociation collective dans les petites et très petites entreprises du fait, en particulier, de la faible présence syndicale en leur sein. La commission reconnaît à cet égard les efforts du gouvernement pour permettre la conclusion d’accords dans les petites entreprises ainsi que l’existence de mécanismes spécifiques (en particulier le mandatement) pour que ces accords soient conclus avec des acteurs syndicaux. La commission souligne toutefois la nécessité que les travailleurs et leurs organisations puissent mettre en œuvre ce type de mécanismes de manière autonome. Dans ce sens, la faculté attribuée à l’employeur de pouvoir écarter une négociation avec un salarié mandaté par une organisation syndicale représentative au profit d’autres modalités d’accords n’impliquant pas d’acteurs syndicaux, n’apparaît pas conforme à la convention dans la mesure où: i) elle ne promeut pas la négociation collective avec les organisations de travailleurs tel qu’établi par l’article 4 de la convention; et ii) en vertu des principes de non -ingérence et de négociation collective libre et volontaire établis respectivement par les articles 2 et 4 de la convention, il appartient aux travailleurs et non à l’employeur de choisir leurs représentants à la négociation. Sur la base de ce qui précède, la commission prie le gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux représentatifs, les mesures nécessaires pour: i) assurer que les mécanismes de conclusion d’accords collectifs n’impliquant pas la participation des organisations syndicales ne soient possible qu’en l’absence d’acteurs syndicaux aptes à négocier collectivement dans l’entreprise considérée; et ii) assurer qu’en cas de pluralité d’options de représentation des travailleurs à la négociation collective, ce choix n’incombe pas à l’employeur. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toutes mesures prises à cet égard.
Faculté de dérogation par des accords conclus par des acteurs non syndicaux de clauses protectrices contenues dans des accords de niveau supérieur négociés par des organisations syndicales. La commission rappelle qu’elle a constaté qu’à la suite des réformes introduites par l’ordonnance de 2017, les accords d’entreprises non signés par une organisation syndicale, en particulier dans les entreprises de moins de 50 salariés, y compris ceux procédant d’une proposition de l’employeur soumise au vote des salariés, sont en mesure de mettre à l’écart, sur un nombre significatif de thèmes ouverts à la négociation collective, les clauses plus favorables aux salariés établies dans des conventions de branche négociées et signées par des organisations syndicales représentatives. La commission a souligné que cette faculté n’est pas conforme à l’obligation de promotion de la négociation collective consacrée par l’article 4 de la convention et a donc prié le gouvernement, d’une part de fournir des informations sur la mise en œuvre dans la pratique de cette possibilité de dérogation et, d’autre part, de prendre les mesures nécessaires pour réviser la faculté de dérogation des accords de niveau supérieur dont jouissent les accords conclus par des acteurs non syndicaux.
La commission prend note que le gouvernement se réfère aux arrêts du Conseil d’État du 7 octobre 2021 qui établissent que le montant minimal de la rémunération globale fixée par un accord de branche s’impose à l’entreprise, la marge de manœuvre laissée à l’accord d’entreprise portant uniquement sur la façon d’atteindre ce minimum. La commission comprend que cette information a pour but d’indiquer les limites existant aux facultés de dérogation reconnues aux accords d’entreprises par l’ordonnance de 2017.
Tout en rappelant qu’en vertu de ladite ordonnance, à l’exception d’un nombre de thèmes précisément définis par la loi, le contenu des accords d’entreprises prévaut dorénavant sur celui des accords de niveau supérieur (art. L2253-3 du Code du travail), la commission observe que le gouvernement ne fournit pas d’ informations sur le point spécifique soulevé dans ses commentaires précédents, à savoir la faculté reconnue aux accords conclus par des acteurs non syndicaux de déroger aux accords de niveau supérieur signés par les partenaires sociaux. Soulignant de nouveau que cette possibilité n’est pas conforme à l’obligation de promotion de la négociation collective avec les organisations de travailleurs consacrée par l’article 4 de la convention, la commission prie le gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux représentatifs, les mesures nécessaires pourréviser lafaculté reconnue aux accords d’entreprise conclus par des acteurs non syndicaux de déroger aux clauses protectrices des accords de niveau supérieur signés par les partenaires sociaux. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les progrès réalisés à cet égard.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2021, publiée 110ème session CIT (2022)

La commission note les observations de la Confédération française démocratique du travail (CFDT) et de la Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC) reçues respectivement les 6 et 8 septembre 2021 qui concernent les thèmes examinés dans le présent commentaire. La commission note également les commentaires du gouvernement à leur égard.
Négociation collective et pandémie de COVID-19. La commission note les informations du gouvernement concernant les mesures prises en 2020 afin de soutenir la poursuite de la négociation collective pendant la crise sanitaire et de permettre aux partenaires sociaux de faire face à l’urgence des situations créées par la pandémie de COVID-19. La commission note à cet égard que: i) un dispositif exceptionnel de raccourcissement de certains délais de conclusion et d’extension des accords collectifs relatifs aux conséquences de la crise sanitaire a été mis en place; et ii) ce dispositif n’était applicable qu’aux accords d’entreprise et de branche dont l’objet exclusif était de faire face aux conséquences sociales, économiques et financières de la pandémie et il a cessé de s’appliquer le 10 octobre 2020.
Article 4. Promotion de la négociation collective dans les petites entreprises. Dans son précédent commentaire, la commission avait pris note des observations de la Confédération générale du travail-Force ouvrière (CGT-FO) et de la CFE-CGC dénonçant le fait que les réformes des mécanismes de négociation collective et du dialogue social adoptées le 22 septembre 2017 avaient étendu de manière significative la possibilité de conclure des accords collectifs sans la participation d’organisations syndicales, en particulier dans les petites entreprises. Sur la base de ces observations et des réponses correspondantes du gouvernement, et après avoir rappelé que la négociation avec des représentants non syndicaux ne devrait être possible qu’en l’absence d’organisations syndicales au niveau considéré, la commission avait prié le gouvernement de: i) préciser les modalités permettant aux travailleurs d’entreprises de moins de onze salariés et d’entreprises occupant entre 11 et 20 salariés dépourvues de représentants du personnel de négocier collectivement, s’ils le souhaitaient, leurs conditions de travail par le biais d’organisations syndicales; et ii) indiquer les actions prises pour promouvoir la négociation collective dans les petites entreprises au sens de la convention.
La commission note à cet égard les indications du gouvernement selon lesquelles: i) dans les entreprises de 11 à 20 salariés, il est toujours possible, en l’absence de représentant élu du personnel, de négocier un accord avec un ou plusieurs salariés expressément mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives (article L. 2232-23-1 du code du travail); ii) même si la désignation d’un délégué syndical (qui, en droit français, a la capacité de négocier et de conclure un accord collectif dès lors que son organisation est suffisamment représentative) n’est expressément envisagée par le Code du travail que pour les entreprises d’au moins 50 salariés, les branches peuvent fixer l’effectif des entreprises à partir duquel les délégués syndicaux peuvent être désignés. Elles peuvent donc prévoir la possibilité de désigner un délégué syndical dans les entreprises de moins de 50 et même de moins de 20 salariés si elles l’estiment approprié au regard du contexte syndical de la branche; et iii) une organisation syndicale peut également négocier, dans toutes les petites entreprises, par le biais du représentant de la section syndicale. Les organisations syndicales peuvent en effet créer des sections syndicales dans les petites entreprises dans les conditions prévues par l’article L. 2142-1 du Code du travail. Or, l’article L. 2143-23 du code du travail autorise le représentant de la section syndicale à négocier, en l’absence de délégué syndical dans l’entreprise ou l’établissement, des accords d’entreprise ou d’établissement dès lors qu’il est mandaté par son organisation syndicale.
La commission note que le gouvernement fournit ensuite des informations sur l’utilisation en 2020 des différentes modalités de conclusion d’accords collectifs dans les petites entreprises (en-dehors de ceux conclus spécifiquement en matière d’épargne salariale). Le gouvernement indique à cet égard que: i) dans les entreprises de moins de 50 salariés en général, 19 pour cent des accords conclus ont été signés par des délégués syndicaux, 17,7 pour cent ont été signés par des représentants élus et salariés mandatés par une organisation syndicale, 20,7 pour cent par des représentants élus non mandatés par une organisation syndicale tandis que 41 pour cent ont fait l’objet d’une approbation directe des salariés à la majorité des deux tiers; ii) si l’ont réduit le champ d’analyse aux entreprises de moins de 21 salariés, 72,9 pour cent des accords conclus l’ont été par le biais d’une approbation des salariés à la majorité des deux tiers; et iii) pour ce qui concerne spécifiquement les entreprises de moins de onze salariés, 89 pour cent des accords conclus l’ont été par le biais d’une approbation des salariés à la majorité des deux tiers.
La commission note également les indications additionnelles fournies par le gouvernement concernant: i) l’organisation tous les quatre ans d’une élection visant à mesurer l’audience des organisations syndicales dans les entreprises de moins de onze salariés, conformément à l’article L. 2122-10-1 du code du travail qui, selon le gouvernement, est de nature à favoriser l’implantation des organisations syndicales au sein de ces entreprises; et ii) l’existence des observatoires départementaux d’analyse et d’appui au dialogue social et à la négociation, dont les organisations syndicales sont parties prenantes et qui ont pour but de favoriser et encourager la négociation collective dans les entreprises de moins de 50 salariés.
La commission prend note dans le même temps des observations de la CFDT et de la CGC-CFE. La commission relève en premier lieu que la CFDT souhaite nuancer l’affirmation du gouvernement sur les possibilités d’implantation syndicale dans les petites entreprises dans la mesure où d’autres dispositions du Code du travail viseraient au contraire à empêcher celle-ci. La commission note que la CFDT affirme à cet égard que: i) depuis 2017, les organisations syndicales ne sont plus automatiquement informées de l’organisation des élections des représentants du personnel dans les entreprises de 11 à 20 salariés, ce qui limite nettement leur possibilité de s’implanter dans l’entreprise; ii) même si le mandatement par une organisation syndicale d’un salarié aux fins de la négociation collective reste possible dans les entreprises de moins de 50 salariés sans délégué syndical, l’employeur a désormais la faculté de choisir d’autres modalités de conclusion d’accords collectifs avec des acteurs non syndicaux (négociation avec des représentants élus lorsqu’ils existent; soumission par l’employeur d’une proposition au vote des salariés en l’absence de représentants élus dans les entreprises allant jusqu’à 20 salariés); et iii) les organisations syndicales ne sont pas informées par l’employeur de son intention de négocier un accord collectif dans l’entreprise, ce qui complique nettement les initiatives tendant au mandatement de salariés aux fins de la négociation collective.
La commission note également la position exprimée par la CGC-CFE qui critique à son tour les accords conclus par approbation directe des salariés d’une proposition faite par l’employeur dans les entreprises allant jusqu’à 20 salariés. L’organisation syndicale affirme que ce mécanisme ne donne pas lieu à une véritable négociation collective et que les conditions d’un débat équilibré entre l’employeur et ses salariés ne sont pas réunies. La commission note à cet égard les commentaires du gouvernement soulignant que: i) le système du mandatement de salariés de petites entreprises par des organisations syndicales aux fins de la négociation collective était très rarement utilisé avant la réforme de 2017, ce qui laissait de très nombreuses petites entreprises sans la possibilité de négocier et conclure des accords collectifs; ii) la négociation collective dans les petites et très petites entreprises présente généralement un caractère informel; iii) une majorité qualifiée des salariés est requise pour l’approbation de l’accord proposé par l’employeur envisagé par les articles L. 2232-21 à L. 2232-23 du Code du travail; et iv) en vertu des mêmes dispositions, les salariés disposent d’un délai de 15 jours pour se prononcer sur la proposition de l’employeur et ont la possibilité de chercher conseil auprès de l’observatoire départemental d’analyse et d’appui au dialogue social et à la négociation.
La commission prend note de ces différents éléments. Elle relève en premier lieu les informations fournies par le gouvernement sur les possibilités de négociation collective par le biais d’organisations syndicales dans les petites entreprises, y compris dans les entreprises de moins de 20 et moins de 11 travailleurs. La commission prend également note des avis divergents du gouvernement et des organisations syndicales sur l’effectivité des mesures de promotion de la négociation collective au sens de la convention dans les petites entreprises ainsi que sur le mécanisme permettant la conclusion d’un accord par le biais de l’approbation par la majorité des deux tiers des travailleurs d’une proposition présentée par l’employeur. La commission note également les allégations des organisations syndicales selon lesquelles, en vertu des articles L. 2232-23 et L. 2232-23-1 du Code du travail, en cas de présence dans l’entreprise d’un salarié mandaté par une organisation syndicale aux fins de la négociation collective, l’employeur disposerait du choix soit de négocier avec ce dernier soit d’avoir recours aux autres modes de conclusions d’accords collectifs prévus par le Code du travail dans les petites entreprises n’impliquant pas d’acteurs syndicaux.
La commission constate qu’il résulte de ce qui précède que, en vertu de la législation en vigueur depuis 2017, il existe trois principales modalités de conclusion d’accords collectifs dans les petites entreprises, soumises chacune à des règles et conditions spécifiques: i) la conclusion d’un accord avec un ou plusieurs délégués syndicaux ou un ou plusieurs salariés mandatés par une organisation syndicale; ii) la conclusion d’un accord avec un ou plusieurs représentants élus du personnel non mandatés par une organisation syndicale; et iii) l’approbation d’une proposition de l’employeur par un vote direct des salariés de l’entreprise à la majorité des deux-tiers. La commission constate que la première modalité s’inscrit dans le cadre de l’article 4 de la convention en vertu duquel la négociation collective a lieu entre les employeurs et les organisations d’employeurs d’une part, et les organisations de travailleurs d’autre part. Pour ce qui concerne la deuxième modalité, la commission rappelle, tel qu’indiqué dans son précédent commentaire, que la négociation directe avec des représentants élus par les travailleurs ne devrait être possible qu’en l’absence d’organisations syndicales au niveau considéré. Pour ce qui concerne la troisième modalité, la commission considère que l’adoption par un vote direct des salariés d’une proposition de l’employeur ne présente pas les caractéristiques d’un mécanisme de négociation collective au sens de la convention. Sur la base des éléments qui précèdent, la commission prie le gouvernement de: i) préciser, lorsqu’il existe dans une petite entreprise un salarié mandaté par une organisation syndicale représentative aux fins de la négociation collective, si l’employeur peut librement choisir un autre mode de conclusion d’un accord collectif (négociation avec des représentants élus non mandatés lorsqu’ils existent; soumission par l’employeur d’une proposition au vote des salariés en l’absence de représentants élus dans les entreprises allant jusqu’à 20 salariés); ii) continuer à fournir des statistiques sur l’utilisation des différentes modalités de conclusion d’accords collectifs dans les petites entreprises; et iii) continuer à fournir des informations sur les mesures de promotion de la négociation collective entre l’employeur et les organisations de travailleurs au sein des petites entreprises.
Dans le contexte du point précédent, la commission avait également constaté dans son dernier commentaire que, à la suite des réformes introduites par les ordonnances du 22 septembre 2017, les accords d’entreprises non signés par une organisation syndicale, en particulier dans les entreprises de moins de cinquante salariés y compris ceux procédant d’une proposition de l’employeur soumise au vote des salariés, étaient en mesure de mettre à l’écart, sur un nombre significatif de thèmes ouverts à la négociation collective, les clauses plus favorables aux salariés établies dans des conventions de branche négociées et signées par des organisations syndicales représentatives. Soulignant que cette faculté n’était pas conforme à l’obligation de promotion de la négociation collective consacrée par l’article 4 de la convention, la commission avait prié le gouvernement de: i) fournir des informations sur la fréquence et l’ampleur dans la pratique des dérogations à des conventions collectives de niveau supérieur effectuées par des accords d’entreprises signés par des représentants du personnel élus ou adoptés suite à un vote direct du personnel; et ii) prendre, en consultation avec les partenaires sociaux représentatifs, les mesures nécessaires pour réviser la faculté de dérogation des accords de niveau supérieur dont jouissent les accords conclus par des acteurs non syndicaux.
La commission note que le gouvernement indique que le ministère du travail ne dispose pas d’information sur le nombre d’accords d’entreprise signés par des représentants du personnel élus ou adoptés suite à un vote direct du personnel qui dérogeraient aux accords de branche. Le gouvernement se réfère toutefois à une étude publiée en 2021 par l’Institut de recherches économiques et sociales (IRES) sur les pratiques de négociation collective et l’articulation des accords de branche et d’entreprise après les ordonnances du 22 septembre 2017 dans quatre branches différentes et a conclu que: i) les possibilités de dérogation offertes par les ordonnances paraissent encore peu utilisées par les entreprises dans l’ensemble des branches étudiées, à l’exception de la branche Bâtiments Travaux Publics; et ii) sauf situation de contraintes économiques ou sur l’emploi fortes, cette possibilité de mobilisation de pratiques dérogatoires suppose aussi un élément clé: l’existence d’une dynamique de négociation au sein des entreprises et la possibilité de construire des accords donnant/donnant.
Le gouvernement ajoute que pendant la crise sanitaire due à la pandémie de COVID-19, les procédures alternatives de conclusion d’accords ont permis à des petites entreprises de faire face aux conséquences de cette crise en bénéficiant du dispositif d’activité partielle de longue durée, accessible seulement par le biais d’un accord collectif. Dans les entreprises de moins de 20 salariés, la très grande majorité de ces accords ont été conclus par une consultation directe des salariés.
La commission relève que, pour sa part, la CFE-CGC exprime son inquiétude par rapport au fait que des accords sans négociation préalable permettent une modification substantielle et potentiellement à la baisse des conditions de travail des salariés des petites entreprises. La centrale ajoute que le rapport intermédiaire d’évaluation des ordonnances de 2017 publié par France Stratégie en 2020 n’est à cet égard pas rassurant. La CFE-CGC affirme que, selon ce rapport, un tiers de 233 accords relatifs aux heures supplémentaire examinés visait à réduire la majoration salariale en matière d’heures supplémentaires. La commission note la réponse du gouvernement à cet égard, indiquant que font défaut les éléments de contexte nécessaires pour apprécier l’importance des droits aménagés et des contreparties accordées par lesdits accords.
La commission prend note des lectures divergentes des organisations syndicales et du gouvernement et la difficulté de disposer, à ce stade, de statistiques spécifiques sur l’ampleur et la fréquence de l’utilisation des facultés de dérogation reconnues dans les accords collectifs conclus par des acteurs non syndicaux. La commission note en revanche que le gouvernement ne fournit pas d’informations sur la prise en compte de sa demande de réviser ladite faculté de dérogation. Le gouvernement indique que les possibilités de dérogation reconnues aux procédures alternatives de conclusion d’accords collectifs est nécessaire pour permettre aux petites entreprises, où l’implantation syndicale est très faible, de bénéficier des mêmes capacités d’adaptation du droit que les grandes entreprises.
Tout en relevant que la négociation collective constitue effectivement un outil fondamental d’adaptation aux conditions spécifiques des entreprises et secteurs couvertes par celle-ci, la commission souligne de nouveau qu’en vertu de l’article 4 de la convention, les gouvernements sont tenus de promouvoir la négociation entre un employeur, des employeurs ou leurs organisations d’une part et les organisations de travailleurs d’autre part. Dans ces conditions, la commission rappelle de nouveau qu’elle considère que la mise à l’écart des clauses protectrices de conventions collectives négociées par des organisations syndicales représentatives par le biais d’accords conclus par des acteurs non syndicaux n’est pas conforme à l’obligation de promotion de la négociation collective consacrée par l’article 4 de la convention. La commission prie donc à nouveau le gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux représentatifs, les mesures nécessaires pour réviser la faculté de dérogation de clauses protectrices contenues dans des accords de niveau supérieur négociés par des organisations syndicales dont jouissent les accords conclus par des acteurs non syndicaux. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute avancée à cet égard.
Promotion de la négociation collective. Travailleurs de plateformes. La commission note l’examen par le Parlement du Projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2021484 du 21 avril 2021 relative aux modalités de représentation des travailleurs indépendants recourant pour leur activité aux plateformes et aux conditions d’exercice de cette représentation et portant habilitation du gouvernement à compléter par ordonnance les règles organisant le dialogue social avec les plateformes. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les résultats de cet examen ainsi que sur l’adoption de tout texte concernant l’exercice des droits reconnus par la convention aux travailleurs de plateformes, quel que soit leur statut contractuel.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

La commission prend note des observations de la Confédération générale du travail-Force ouvrière (CGT-FO) et de la Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC) reçues respectivement le 9 octobre 2019 et le 30 octobre 2020 ainsi que des commentaires correspondants du gouvernement. La commission observe qu’une partie des thèmes soulevés par les observations de CGT-FO et de la CFE-CGC, (en particulier ceux relatifs au niveau de la négociation collective, à la consultation des salariés en cas d’opposition des syndicats majoritaires à la signature d’une convention d’entreprise ainsi qu’aux conséquences de la fusion des institutions représentatives du personnel), sont en cours d’examen par un comité tripartite dans le cadre d’une réclamation présentée par la Confédération Générale du Travail et CGT-FO en vertu de l’article 24 de la Constitution de l’OIT.
Article 1 de la Convention. Protection adéquate contre la discrimination antisyndicale. La commission note que la CGT-FO affirme que, dans un contexte de durcissement du climat social, se produirait une aggravation des actes de discrimination antisyndicale tels que le fichage des salariés syndiqués ou les licenciements pour motifs antisyndicaux. La CGT-FO manifeste à cet égard que, selon une enquête de 2019 du Défenseur des droits, institution de caractère public: i) près d’une personne active sur trois (29 pour cent ) et une personne syndiquée sur deux (52 pour cent) considèrent que les discriminations antisyndicales se produisent souvent ou très souvent; et ii) un tiers de la population active estime que la peur des représailles de la part de la direction est le facteur qui dissuade le plus les salariés de s’engager dans une activité syndicale.
La commission note que la CGT-FO réclame que, au-delà de la publication de statistiques et d’enquêtes publiques, le gouvernement s’engage dans une véritable politique volontariste de lutte contre les actes antisyndicaux qui devrait en particulier inclure: i) un allongement de la durée de la protection renforcée contre le licenciement postérieure à l’expiration des mandats syndicaux ou de représentation du personnel en général, aspect particulièrement important dans le contexte de la fusion des institutions représentatives du personnel consécutive aux réformes de 2017; et ii) la mise en place d’une réelle valorisation des parcours syndicaux.
La commission note que le gouvernement manifeste en premier lieu que la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi a mis en place des mesures supplémentaires pour protéger les travailleurs syndiqués, et notamment les élus, contre toute discrimination ou toutes représailles en raison de leur activité syndicale. Le gouvernement signale en particulier que: i) l’article 4 de la loi instaure un dispositif d’entretiens professionnels en début et fin de mandat pour les représentants du personnel élus ou désignés; ii) cet entretien s’ajoute à l’entretien ayant lieu tous les 2 ans et qui, depuis la loi de 2015, peut également permettre de procéder au recensement des compétences acquises en cours de mandat en vue de leur valorisation; iii) l’article 5 de la loi du 17 août 2015 prévoit un dispositif national de certification des compétences correspondant à l’exercice d’un mandat de représentant élu ou désigné et complété par deux arrêtés de la ministre du travail du 18 juin 2018 portant création de la certification relative aux compétences acquises dans l’exercice d’un mandat de représentant du personnel ou d’un mandat syndical; iv) dans le cadre de la mise en œuvre des ordonnances adoptées en 2017, un guide d’accompagnement des salariés dont le mandat a pris fin a été publié en août 2018; v) l’article 6 de la loi du 17 août 2015 a mis en place une garantie d’évolution salariale pour les représentants du personnel dont les heures de délégation sont au moins égales à 30 pour cent de leur durée du travail afin d’éviter toute rupture d’égalité vis-à-vis des autres salariés de l’entreprise relevant de la même catégorie professionnelle et dont l’ancienneté est comparable; et vi) en application des ordonnances adoptées en 2017, les branches et les entreprises peuvent négocier des accords sur la valorisation des parcours syndicaux, plusieurs grandes entreprises s’étant déjà saisies de cette opportunité. La commission note que le gouvernement se réfère en second lieu aux rôles respectifs de l’inspection du travail et des tribunaux dans la lutte contre les discriminations antisyndicales. La commission note que le gouvernement se réfère en particulier: i) aux enquêtes régulières de l’inspection du travail afin de détecter d’éventuels liens entre l’activité syndicale des salariés et d’éventuels actes de gestion pris à leur détriment; ii) l’aménagement de la charge de la preuve par les tribunaux afin de faciliter l’identification d’actes et pratiques de discrimination antisyndicale; et iii) les décisions de réintégration prononcées par les tribunaux en cas de licenciement discriminatoire. La commission note enfin l’indication du gouvernement relative à l’ouverture aux organisations syndicales par la loi du 18 novembre 2016 de la possibilité de mener des actions de groupe pour faire cesser des discriminations affectant plusieurs salariés.
La commission prend particulièrement note des résultats de l’enquête menée par le Défenseur des droits sur les discriminations syndicales portés à son attention par la CGT-FO. Accueillant favorablement la réalisation de telles études et encourageant à leur poursuite, la commission observe que les résultats de l’enquête démontrent l’importance de l’adoption de mesures spécifiques pour renforcer la prévention et la sanction des actes de discrimination antisyndicale ainsi qu’un suivi régulier de leur mise en œuvre.
À cet égard, la commission prend bonne note des dispositifs législatif et jurisprudentiel en place pour assurer une réponse effective aux actes de discrimination antisyndicale. La commission note également avec intérêt l’établissement d’une garantie d’évolution salariale pour les représentants du personnel-y compris les représentants syndicaux- ainsi que les mesures prises tendant à valoriser les compétences acquises en cours de mandat de représentation du personnel en général et de mandat syndical en particulier, mesures mentionnées dans l’observation de la CFE-CGC comme allant dans le sens souhaité par ladite organisation syndicale. La commission souligne la pertinence de telles mesures pour contribuer à prévenir la discrimination antisyndicale. Au vu des éléments qui précèdent, la commission invite le gouvernement à continuer de s’assurer de manière régulière, y compris par le biais du dialogue social, de l’effectivité et de l’efficacité des mesures de prévention et de sanction des actes de discrimination antisyndicale. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations à cet égard.
Article 4. Promotion de la négociation collective. La commission note que la CGT FO et la CFE-CGC dénoncent le fait que l’ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 2017 (ci-après l’ordonnance de 2017) aurait pour effet d’affaiblir le rôle des organisations syndicales dans les procédures de négociation collective, en rendant possible dans plusieurs situations la conclusion d’accords par le biais d’acteurs non syndicaux.
La commission note que les organisations syndicales se réfèrent en particulier: i) à la possibilité pour l’employeur, en l’absence de délégué syndical dans les entreprises comptant entre 11 et 49 salariés, de choisir de négocier soit avec un représentant du personnel élu soit avec un salarié mandaté par une organisation syndicale; ii) à l’instauration dans les entreprises de moins de 20 salariés ne disposant ni d’un délégué syndical ni de représentation du personnel élue de la possibilité pour l’employeur d’établir seul et unilatéralement un projet d’accord qu’il fait ensuite approuver par voie de référendum par ses salariés -; et iii) aux prérogatives de négociation collective reconnues au conseil d’entreprise, instance devant pour l’instant être mise en place avec l’accord des organisations syndicales majoritaires mais dont l’instauration, selon la CGT-FO, pourrait, au gré d’une future réforme, être généralisée à l’avenir.
La commission note que la CFE-CGC allègue que les réformes précitées, en permettant la conclusion d’accords non signés par des organisations syndicales, font fi du principe selon lequel seule la représentation des travailleurs par des organisations syndicales garantit le respect de l’objectif fondamental de rééquilibrage du rapport de forces dans les relations sociales, inhérent au mécanisme de négociation collective et exprimé dans la référence de l’article 4 de la convention aux seules organisations de travailleurs.
La commission note également que la CGT-FO dénonce particulièrement le fait que les nouveaux mécanismes précités permettraient de déroger sans participation syndicale au contenu des accords de branche conclus par les organisations syndicales au niveau supérieur, portant de cette manière atteinte à la liberté syndicale et au droit de négociation collective.
La commission note que, de son côté, le gouvernement, après avoir souligné que la grande majorité des entreprises de moins de cinquante salariés ne disposent pas de délégué syndical, manifeste que de nouvelles possibilités de négociation leur sont maintenant ouvertes afin de leur permettre de participer elles aussi à la définition des meilleurs équilibres. La commission note que le gouvernement indique à cet égard que, en vertu de l’ordonnance de 2017:
  • – dans les entreprises de moins de 11 salariés dépourvues de délégué syndical, et dans celles dont l’effectif est compris entre 11 et 20 salariés et qui ne disposent pas de membre de la délégation du comité social et économique, l’employeur peut proposer un projet d’accord aux salariés qui, pour être valide, doit avoir été approuvé à la majorité des deux tiers par les salariés, sur le modèle de l’approbation des accords d’intéressement (art. L2232-21 à L2232-23 du code du travail).
  • – dans les entreprises dont l’effectif habituel est compris entre 11 et 50 salariés et dépourvues de délégué syndical, l’employeur pourra négocier soit avec un salarié (membre du comité social et économique ou non) mandaté par une organisation syndicale, soit avec un membre de la délégation du personnel au comité social et économique. Un accord signé par un salarié mandaté non-membre de la délégation du personnel du comité social et économique devra être approuvé par la majorité des salariés lors d’une consultation (art. L2332-23-1).
  • – enfin, dans les entreprises de plus de 50 salariés, les règles antérieures à l’ordonnance précitée sont maintenues, avec, en l’absence de délégué syndical, l’obligation de négocier avec un membre de la délégation du personnel du comité social et économique mandaté puis, si aucun de ces membres n’a souhaité se faire mandater, par un membre non mandaté, et si aucun membre de la délégation du personnel n’a souhaité négocier, avec un salarié mandaté (art. L 2232-24 à L 2232-26).
La commission note également les informations de contexte fournies par le gouvernement concernant l’implantation syndicale, la négociation collective et le dialogue social dans les très petites et petites entreprises, justifiant selon ce dernier l’adoption des mesures précitées. Le gouvernement indique en particulier que: i) les organisations syndicales ont, de fait, une présence très faible au sein des petites entreprises puisque seules 4 pour cent des entreprises de 11 à 50 salariés ont un délégué syndical pour négocier un accord; et ii) le dispositif du mandatement par une organisation syndicale représentative dans la branche n’a pas fait ses preuves; ainsi, en 2017, sur plus de 30 000 accords d’entreprise conclus, seuls 197 l’ont été avec un salarié mandaté. En particulier, dans les entreprises de moins de 11 salariés, seuls 31 accords ont été conclus par un salarié mandaté et le recours au mandatement concerne moins de 1 pour cent des entreprises qui engagent des négociations.
La commission note que le gouvernement manifeste à cet égard que: i) c’est pour tenir compte de la réalité de ces petites entreprises et afin qu’elles ne se voient pas exclues des possibilités offertes par les accords d’entreprise, que des modalités de négociation adaptées ont été prévues; ii) ces modalités ne contournent cependant pas les organisations syndicales, puisque l’article L2232-21 du Code du travail prévoit explicitement leur application en l’absence de délégué syndical ou de membre élu de la délégation du personnel du comité social et économique; iii) l’absence de négociation préalable avec les organisations syndicales ne saurait ainsi constituer un contournement volontaire de celles-ci, dans la mesure où le dispositif en litige est conçu précisément dans une hypothèse où la négociation avec les organisations syndicales est impossible, dès lors que les personnes habilitées à négocier sont absentes; et iv) ces dispositions ont donc pour objet d’apporter des solutions pragmatiques pour permettre la conclusion d’accords même dans les très petites entreprises où le dialogue entre l’employeur et les travailleurs présente généralement un caractère informel.
La commission note également que le gouvernement ajoute que l’ordonnance de 2017 entoure les nouveaux mécanismes de négociation collective dans les très petites et petites entreprises d’un certain nombre de garanties afin d’assurer l’équilibre de la négociation ainsi que la protection du rôle des organisations syndicales en la matière. La commission note que le gouvernement indique à cet égard que: i) concernant les projets d’accords soumis directement aux salariés par l’employeur, le Code du travail établit un délai minimal de quinze jours entre le moment où l’employeur propose le projet et le moment où la consultation du personnel peut être organisée; ce délai de quinze jours a vocation à permettre aux salariés de prendre l’attache des organisations syndicales départementales et/ou de l’observatoire d’analyse et d’appui au dialogue social et à la négociation de leur département afin qu’ils leur fournissent une information sur le déroulement et le contenu des accords qui leur sont proposés; ii) la forte majorité des deux tiers, à laquelle est soumise l’approbation du projet d’accord impose à l’employeur de dialoguer avec les salariés, ces derniers constituant bien une partie prenante de l’accord; et iii) concernant la négociation avec des représentants du personnel élus en l’absence de délégué syndical, le champ de cette négociation est plus restreint que celui ouvert à la négociation avec les organisations syndicales puisque ces accords ne peuvent que porter sur des dispositions de mise en œuvre de la loi ou lorsque la loi impose un accord.
La commission note enfin les éléments fournis par le gouvernement à propos de l’impact allégué de l’établissement des conseils d’entreprise sur le rôle des organisations syndicales en matière de négociation collective. La commission note que le gouvernement manifeste à cet égard que la considération selon laquelle les organisations syndicales seraient évincées de la négociation collective par les compétences reconnues en la matière au conseil d’entreprise est erronée dans la mesure où: i) la mise en place d’un conseil d’entreprise est subordonnée par le Code du travail à la conclusion d’un accord d’entreprise ou de branche, par définition conclu par les organisations syndicales représentatives; et ii) les organisations syndicales représentatives au sein d’une entreprise sont représentées au sein du conseil d’entreprise de la même manière qu’elles le sont au sein du comité social et économique et prennent donc pleinement part aux négociations menées au sein de celui-ci.
La commission prend bonne note des éléments fournis par les centrales syndicales et le gouvernement concernant le contenu de l’ordonnance de 2017 en matière de négociation collective et sur les effets de cette réforme sur le rôle dévolu aux organisations syndicales. La commission prend particulièrement note des changements introduits aux modes de conclusion des accords d’entreprises dans les petites et très petites entreprises dépourvues de délégué syndical. La commission note à égard qu’en vertu de la législation française, la participation des organisations syndicales à la négociation et à la conclusion d’accords d’entreprise s’effectue soit par le biais du délégué syndical (travailleur désigné, selon les dispositions expresses du Code du travail, par une organisation syndicale représentative pour la représenter dans les entreprises d’au moins 50 salariés; un délégué syndical pouvant également être désigné par les syndicats parmi la représentation élue du personnel dans les entreprises comptant entre 11 et 50 salariés) soit par le biais d’un salarié mandaté (salarié de l’entreprise recevant, en l’absence de délégué syndical, le mandat d’une organisation syndicale représentative de mener en son nom la négociation d’un accord d’entreprise).
La commission note qu’avant la réforme de 2017, dans un contexte de faible implantation syndicale au sein des petites entreprises et de coexistence articulée dans l’ordonnancement juridique français d’une représentation élue du personnel et d’une représentation syndicale, la législation prévoyait déjà des possibilités de conclusion d’accords collectifs d’entreprise par des acteurs non syndicaux dans le cas de l’absence combinée de délégué syndical et de salarié mandaté. Il était alors possible aux représentants élus du personnel de conclure des accords collectifs dont le champ matériel était toutefois limité aux mesures dont la mise en œuvre était subordonnée par la loi à un accord collectif et dont le contenu, jusqu’à la loi du 8 août 2016, devait être soumis à l’approbation d’une commission paritaire de branche.
La commission relève que, tel qu’indiqué par le gouvernement et les centrales syndicales, l’ordonnance de 2017 a pour effet d’étendre les situations où un accord d’entreprise peut être conclu sans la signature d’une organisation syndicale dans la mesure où: i) le mandatement d’un salarié par une organisation syndicale n’est plus envisagé pour les entreprises de moins de onze salariés ; ii) dans les entreprises de moins de 11 salariés dépourvues de délégué syndical, et dans celles dont l’effectif est compris entre 11 et 20 salariés et ne disposant pas de représentation élue du personnel,, un nouveau mode de conclusion d’accord direct entre l’employeur et ses salariés est établi; et iii) dans les entreprises occupant entre 11 et 49 salariés n’ayant pas de délégué syndical mais disposant à la fois de représentants élus du personnel et d’un salarié mandaté par une organisation syndicale, l’employeur peut dorénavant choisir son interlocuteur à la négociation (sachant que si la négociation se déroule avec un salarié mandaté par un syndicat mais non élu du personnel, l’accord devra être soumis à la consultation des salariés).
Concernant la détermination des acteurs de la négociation collective, la commission rappelle que l’article 4 de la convention se réfère, d’une part, aux employeurs et à leurs organisations et, d’autre part, aux organisations de travailleurs. Sur cette base, la commission considère que la négociation collective avec des représentants de travailleurs non syndiqués ne devrait être possible que s’il n’existe pas d’organisations syndicales au niveau concerné. La commission estime en effet à cet égard que la négociation directe entre l’entreprise et ses salariés visant à contourner les organisations suffisamment représentatives, lorsqu’elles existent, peut porter atteinte au principe de la promotion de la négociation collective inscrit dans la convention. (Voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragraphe 239.)
La commission prend à cet égard bonne note des indications du gouvernement, étayées par des statistiques, concernant la très faible présence syndicale dans les petites et très petites entreprises et de sa volonté de favoriser de manière pragmatique un véritable dialogue social au sein de celles-ci. La commission relève également les chiffres fournis par le gouvernement concernant la mise en œuvre dans la pratique des nouvelles modalités d’accords collectifs dans les petites et très petites entreprises et selon lesquels en 2018, sans compter les instruments relatifs à l’épargne salariale: i) 1 443 accords ont été déposés par des entreprises de moins de 11 salariés dont 75 pour cent ont fait l’objet d’une ratification aux deux tiers; et ii) 850 accords ont été déposés par des entreprises de 11 à 20 salariés, dont 34 pour cent ont fait l’objet d’une ratification aux deux tiers.
Dans le même temps, la commission relève de nouveau qu’en vertu de la législation en vigueur consécutive aux réformes de 2017: i) la désignation d’un délégué syndical par une organisation représentative est expressément prévue, d’une part, dans les entreprises d’au moins 50 salariés (art. L2143-3 du Code du travail) et, d’autre part, dans les entreprises de 11 à 49 salariés dans lesquelles un représentant élu du personnel peut également être nommé délégué syndical (art. L 2143-6); et ii) le mandatement d’un salarié par une organisation syndicale représentative est prévu pour les entreprises de plus de onze salariés sans délégué syndical (arts. L2232-23-1 et L2232-24 et ss. du Code du travail), tout en relevant de nouveau que dans les entreprises comptant entre onze et 20 salariés et ne disposant ni de délégué syndical ni de représentant élu, l’employeur peut directement soumettre un texte au vote des salariés pour approbation (article L2232-23 du Code du travail.)
Rappelant qu’il résulte des termes de la convention que la négociation collective ne devrait avoir lieu avec des représentants non syndicaux qu’en l’absence d’organisation syndicale au niveau considéré, la commission prie le gouvernement de: i) préciser les modalités existantes permettant à des travailleurs d’entreprises de moins de onze salariés d’une part et de onze à 20 salariés dépourvues de représentants élus du personnel d’autre part, de procéder, s’ils le souhaitent, à la négociation et conclusion d’accords régulant leurs conditions de travail et d’emploi par le biais d’une organisation syndicale les représentant (dans le cas où ces modalités seraient envisagées par des conventions collectives de branche, il est prié d’indiquer les conventions prévoyant de telles possibilités); et ii) préciser les mesures prises pour promouvoir la négociation collective au sens de la convention dans les petites entreprises.
La commission relève également, tel que souligné par la CGT-FO et la CFE-CGC, que l’ordonnance de 2017 étend le champ des sujets pouvant donner lieu à un accord non signé par une organisation syndicale dans la mesure où, dans les entreprises de moins de 50 salariés, de tels accords peuvent dorénavant porter sur tous les sujets ouverts à la négociation collective. La commission constate à cet égard que, en vertu de l’ordonnance de 2017, à l’exception d’un nombre de thèmes précisément définis par la loi, le contenu des accords d’entreprises prévaut dorénavant sur celui des accords de niveau supérieur (art. L2253-3 du Code du travail). La commission observe que, dans ces conditions, les accords d’entreprises non signés par une organisation syndicale, en particulier dans les entreprises de moins de cinquante salariés et y compris ceux procédant d’une proposition de l’employeur soumise au vote des salariés, sont en mesure de mettre à l’écart, sur un nombre significatif de thèmes ouverts à la négociation collective, les clauses plus favorables aux salariés établies dans des conventions de branche négociées et signées par des organisations syndicales représentatives. Concernant la mise en œuvre dans la pratique de ces possibilités de dérogation, la commission note: i) d’une part, les préoccupations exprimées par la CFE-CGC sur l’absence de garanties suffisantes pour assurer l’équilibre du contenu des accords conclus dans les entreprises de moins de 20 salariés sur la base d’un vote des salariés; et ii) d’autre part, la réponse correspondante du gouvernement portant en particulier sur les accords de performance collective-APC- (types d’accords collectifs établis par l’ordonnance de 2017 qui permettent d’aménager la durée de travail, la rémunération ou la mobilité des salariés dans le but de préserver ou développer l’emploi ou de répondre aux nécessités de fonctionnement de l’entreprise) et soulignant que sur les 297 APC établis jusqu’à fin décembre 2019, seulement 21 avaient été conclus par une consultation des salariés. La commission relève également dans le même temps que, dans son rapport intermédiaire de juillet 2020, le Comité d’évaluation de la mise en œuvre des ordonnances relatives au dialogue social et aux relations de travail établi par le Ministère du Travail s’interroge sur la capacité des APC d’aboutir à des compromis équilibrés ainsi que sur l’utilisation des modalités de négociation au niveau de l’entreprise dans le contexte de la crise économique générée par la pandémie de COVID 19.
Soulignant que la mise à l’écart des clauses protectrices de conventions collectives négociées par des organisations syndicales représentatives par le biais d’accords conclus par des acteurs non syndicaux n’est pas conforme à l’obligation de promotion de la négociation collective consacrée par l’article 4 de la convention, la commission prie le gouvernement de: i) fournir des informations sur la fréquence et l’ampleur dans la pratique des dérogations à des conventions collectives de niveau supérieur effectuées par des accords d’entreprises signés par des représentants du personnel élus ou adoptés suite à un vote direct du personnel; et ii) prendre, en consultation avec les partenaires sociaux représentatifs, les mesures nécessaires pour réviser la faculté de dérogation des accords de niveau supérieur dont jouissent les accords conclus par des acteurs non syndicaux. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute avancée à cet égard.
La commission note finalement les indications supplémentaires du gouvernement concernant l’adoption de lois récentes et indiquant que: i) la loi travail du 8 août 2016 favorise la culture du dialogue et de la négociation en encourageant la négociation d’accords de méthode qui précisent les étapes de la négociation à venir, les informations à partager et peut prévoir des moyens supplémentaires spécifiques; ii) une marge accrue est reconnue aux partenaires sociaux concernant la fixation de la durée des conventions collectives; et iii) la loi n° 2019-485 du 22 mai 2019 et la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 ont établis de nouveaux thèmes de négociation obligatoire en matière conciliation entre vie professionnelle et personnelle des salariés proches aidants et de mobilité entre le lieu de résidence et le lieu de travail. La commission salue ces innovations qui ont pour effet de renforcer les mécanismes de négociation collective et d’étendre leur champ d’application matériel.
[Le gouvernement est prié de répondre de manière complète au présent commentaire en 2021.]

Demande directe (CEACR) - adoptée 2019, publiée 109ème session CIT (2021)

La commission note, d’une part, le rapport du gouvernement et, d’autre part, les observations de la Confédération générale du travail - Force ouvrière (CGT FO) reçues le 9 octobre 2019. La commission constate que les observations de la CGT FO concernent, d’une part, des aspects soulevés dans une réclamation en cours d’examen présentée en vertu de l’article 24 de la Constitution de l’OIT et, d’autre part, des questions additionnelles d’ordre législatif et pratique, relatives, entre autres, à la protection contre la discrimination antisyndicale et à la possibilité de conclure des accords collectifs avec des acteurs non syndicaux. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires aux questions additionnelles contenues dans les observations de la CGT FO.
[Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2020.]

Demande directe (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

La commission a pris note du rapport du gouvernement. Elle prend aussi note des commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI) relatifs à l’impact négatif de la loi du 20 août 2008 (portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail) sur la négociation collective. La commission prie le gouvernement de fournir ses observations à cet égard et l’invite à soumettre cette question au dialogue tripartite, notamment au sein du Haut Conseil du dialogue social (créé aux termes de la loi de 2008) ou de tout autre organe tripartite.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2009, publiée 99ème session CIT (2010)

Dans ses précédents commentaires, la commission avait relevé que l’article 10 de la loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs du 21 août 2007 (loi no 2007-1224) établit que «la rémunération d’un salarié participant à une grève, incluant le salaire et ses compléments directs et indirects à l’exclusion des suppléments pour charges de famille, est réduite en fonction de la durée non travaillée en raison de la participation à cette grève». A cet égard, elle avait prié le gouvernement d’indiquer si cette disposition empêche les parties de conclure des accords ponctuels en la matière. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle cette disposition ne modifie pas les pratiques existantes faisant de la rémunération de tout ou partie des jours de grève un sujet de négociation de fin de conflit et qu’elle ne limite donc pas le champ de la négociation.

Par ailleurs, la commission prend note des observations reçues de la Centrale des travailleurs unis (CTU) et de la Confédération syndicale internationale (CSI) dans des communications en date respectivement du 22 avril et du 26 août 2009, ainsi que des réponses du gouvernement sur les questions soulevées.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu.

Dans sa précédente demande directe, la commission avait prié le gouvernement de lui communiquer toute décision rendue concernant l’ordonnance no 2005-892 du 2 août 2005 qui faisait l’objet de contestation devant le Conseil d’Etat de la part, entre autres, de la Confédération générale du travail-Force ouvrière (CGT-FO) (cette ordonnance aurait dispensé de créer des structures de représentation pour certains travailleurs dans certaines entreprises). La commission a pris connaissance du fait que le Conseil d’Etat a, dans un premier temps, suspendu l’application de cette ordonnance et l’a annulée par décision du 6 juillet 2007.

La commission note que l’article 10 de la loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs du 21 août 2007 (loi no 2007-1224) établit que «la rémunération d’un salarié participant à une grève, incluant le salaire et ses compléments directs et indirects à l’exclusion des suppléments pour charges de famille, est réduite en fonction de la durée non travaillée en raison de la participation à cette grève». La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur l’application de cette disposition dans la pratique et d’indiquer si cette disposition empêche les parties de conclure des accords ponctuels en la matière.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2006, publiée 96ème session CIT (2007)

La commission prend note de la réponse du gouvernement aux observations datées du 25 septembre 2005 de la Confédération générale du travail – Force ouvrière (FO) critiquant les aspects soulevés dans le rapport du gouvernement soumis en 2005. FO critique certains textes législatifs qui, à son avis, enfreignent la convention. Ses observations concernent principalement la loi no 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social qui modifie certaines dispositions du Code du travail en ce qui a trait à la négociation d’accords d’entreprise en l’absence de délégué syndical, et à l’articulation entre les accords interprofessionnels, de branches professionnelles, et les accords d’entreprise ou d’établissement, qui contreviendraient à l’article 4 de la convention. La commission prend note que, dans sa réponse aux commentaires de FO, le gouvernement indique que par la loi du 4 mai 2004 il a souhaité développer la capacité des partenaires sociaux à négocier et à favoriser la démocratie sociale par l’approfondissement du dialogue entre les partenaires à tous les niveaux: interprofessionnels, professionnel et entreprise et que cette loi entend renforcer la légitimité des partenaires sociaux dans le processus d’élaboration du droit des relations du travail. Le gouvernement indique par ailleurs que cette loi est largement inspirée de la position commune des partenaires sociaux en fixant d’abord les règles du jeu en matière de négociation collective et en organisant la conclusion et la dénonciation de ces accords par le respect de la démocratie majoritaire.

La commission note que, la période examinée par le rapport du gouvernement se terminant le 1er juillet 2005, il n’aborde pas la question des conséquences de textes adoptés postérieurement à cette période. La commission prend note que, dans sa réponse aux commentaires de FO, le gouvernement indique qu’il présentera l’ordonnance no 2005-892 et un bilan de ses effets dans son prochain rapport.

Par ailleurs, la commission note que l’ordonnance no 2005-892 du 2 août 2005 fait l’objet de contestation devant le Conseil d’Etat de la part, entre autres, de FO. Dans sa décision du 19 octobre 2005, le Conseil d’Etat a sursis à statuer et a saisi pour avis la Cour de justice des communautés européennes sur certains aspects de la compatibilité de l’ordonnance no 2005-892 avec deux directives européennes (Directive 2002/14/CE du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l’information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne, et Directive 98/59/CE du Conseil du 20 juillet 1998 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux licenciements collectifs). Le Conseil d’Etat, par sa décision rendue en référé le 23 novembre 2005, a suspendu l’application de l’ordonnance no 2005-892. La commission prie le gouvernement de lui communiquer dès que disponible toute décision qui sera rendue concernant cette affaire.

La commission note qu’un nouveau type de contrat, le «contrat nouvelle embauche», a été créé par l’ordonnance no 2005-892 du 2 août 2005 et qu’il fait l’objet de recours juridictionnel. La commission prie le gouvernement de lui communiquer toute information sur les appels en instance.

Enfin, la commission note avec intérêt que le Conseil d’Etat considère que l’application du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, dont le sixième alinéa implique le droit pour tout syndicat régulièrement constitué de participer à des négociations collectives (sous réserve de sa représentativité), a implicitement mais nécessairement eu pour effet d’abroger les dispositions de l’article 10 de l’ordonnance du 2 novembre 1945, en tant qu’elles incluaient dans le monopole conféré à la Chambre nationale des huissiers de justice les questions qui relèvent des droits reconnus aux syndicats professionnels, tant d’employeurs que de salariés. La commission note que l’abrogation de l’article 10 de l’ordonnance du 2 novembre 1945, telle que constatée par une décision juridictionnelle non susceptible de recours, a pour effet de garantir le droit syndical des huissiers de justice en tant qu’employeurs et le droit de négociation collective à leurs organisations professionnelles.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2005, publiée 95ème session CIT (2006)

La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement.

En ce qui concerne la possibilité des organisations syndicales d’huissiers de justice et autres officiels ministériels (notaires, commissaires-priseurs judiciaires, avoués) de choisir librement les organisations qui représentent leurs intérêts dans le processus de la négociation collective, la commission renvoie à ses commentaires dans le cadre de l’application de la convention no 87.

Observation (CEACR) - adoptée 2005, publiée 95ème session CIT (2006)

La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement et des commentaires présentés par la Confédération générale du travail-Force ouvrière. La commission note que la réponse du gouvernement a été reçue récemment et se propose de l’examiner à sa prochaine session.

Une demande relative à d’autres points est adressée directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2003, publiée 92ème session CIT (2004)

La commission note les informations figurant au rapport du gouvernement, y  compris les commentaires présentés par la Confédération française démocratique du travail (CFDT). La commission a également pris connaissance des conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2233 (voir 332e rapport, paragr. 614 à 646, approuvé par le Conseil d’administration à sa 288e session) relatives au droit de négociation collective des huissiers de justice, en tant qu’employeurs, au regard de l’ordonnance no 45-2592 régissant leur statut.

Article 4 de la convention. La commission note que, en vertu de l’ordonnance no 45-2592, les huissiers de justice ont l’obligation de s’affilier à la Chambre nationale des huissiers de justice. En outre, tant le tribunal administratif que la Cour administrative d’appel ont récemment consacré la compétence exclusive de la chambre dans les domaines de la négociation collective, en se fondant sur l’article 8 de l’ordonnance no 45-2592. Cette interprétation a pour effet d’exclure le Syndicat national des huissiers de justice du processus de négociation collective, en dépit de sa représentativité au sein de la profession. La commission note par ailleurs que la Chambre nationale des huissiers de justice a un statut particulier qui se caractérise, entre autres, par un contrôle de l’autorité administrative ou juridictionnelle, par l’attribution de fonctions de caractère public et par sa participation à l’exercice de la puissance publique. En conséquence, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’ordonnance no 45-2592 de telle sorte que les huissiers de justice puissent librement choisir des organisations, aux fins de la représentation de leurs intérêts dans le processus de négociation collective, qui soient des organisations d’employeurs pouvant être considérées comme indépendantes des autorités publiques, afin de pleinement garantir le caractère volontaire de la négociation collective conformément à l’article 4.

En outre, la commission note que les ordonnances régissant les statuts des autres officiers ministériels contiennent des dispositions similaires à celles de l’ordonnance no 45-2592 soulevant des questions de compatibilité avec la convention. La commission se réfère à cet égard aux ordonnances suivantes du 2 novembre 1945: no 45-2590 relative au statut des notaires, no 45-2591 relative au statut des avoués et no 45-2593 relative au statut des commissaires-priseurs judiciaires. La commission prie le gouvernement d’examiner également les dispositions de ces ordonnances à la lumière des commentaires présentés ci-dessus et de la tenir informée sur l’ensemble de ces questions dans son prochain rapport.

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