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Commentaires adoptés par la Commission d'experts : Austria

Adopté par la commission d'experts 2021

C029 - Observation (CEACR) - adoptée 2021, publiée 110ème session CIT (2022)

Articles 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 2 c), de la convention. Travail des détenus pour des entreprises privées. Depuis plusieurs années, la commission examine la situation des détenus obligés de travailler, sans leur consentement formel, dans des ateliers gérés par des entreprises privées au sein des prisons d’État, conformément à l’article 46 (3) de la loi sur l’exécution des peines. La commission a noté l’indication du gouvernement selon laquelle les détenus travaillant dans des ateliers gérés par le secteur privé ne sont supervisés que par du personnel pénitentiaire et sont payés par la prison. La commission a souligné à plusieurs reprises que la pratique suivie en la matière correspond à tous égards à ce que l’article 2, paragraphe 2 c), interdit expressément, à savoir qu’une personne soit «concédée» à une entreprise privée. Elle a noté, en particulier, que le terme «concédé» vise non seulement les situations où les détenus sont «employés» par l’entreprise privée, mais aussi les situations où les détenus sont concédés à des entreprises privées tout en restant sous l’autorité et le contrôle de l’administration pénitentiaire.
La commission a également noté l’indication répétée du gouvernement selon laquelle les détenus travaillant pour des entreprises privées bénéficient de droits et de conditions de travail comparables à ceux garantis dans une relation de travail libre. Bien que le gouvernement ait indiqué qu’il a stipulé que les détenus qui travaillent à des postes de travail gérés par le secteur privé à l’intérieur de la prison doivent également donner leur consentement libre et éclairé, la commission a noté que l’article 46(3) de la loi sur l’exécution des peines n’a pas été modifié à cet effet. En outre, elle a noté que, selon un document intitulé «Services pénitentiaires en Autriche» publié par le ministère de la Justice en août 2016, les condamnés et les détenus soumis à des mesures préventives de placement, qui sont aptes au travail, sont tenus par la loi de travailler. Les détenus qui sont tenus de travailler doivent effectuer le travail qui leur a été confié, à l’exception des travaux qui pourraient mettre leur vie en danger ou les exposer à des risques graves pour leur santé. En outre, 75 pour cent de la rémunération du travail est retenue à titre de contribution aux frais de détention, ce qui signifie qu’en moyenne, les détenus reçoivent 5 euros par jour, après déduction de leur contribution aux frais de la prison et de leur cotisation à l’assurance-chômage. La commission a prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour réviser l’article 46 (3) de la loi sur l’exécution des peines afin de le mettre en conformité avec les prescriptions de la convention et également avec la pratique indiquée par le gouvernement.
La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique qu’il n’y a pas eu de modifications législatives concernant la mise en œuvre de la convention. Pour autant, la rémunération du travail des détenus purgeant des peines d’emprisonnement a été majorée, conformément à l’augmentation de 61,31 pour cent dans l’indice des salaires standard négocié. La commission note également que le gouvernement se réfère à l’article 49 (3) de la loi sur l’exécution des peines qui garantit la protection de la vie, de la santé et de la sécurité des travailleurs ainsi que d’autres prestations de sécurité sociale, droits et conditions d’emploi qui sont applicables aux détenus travaillant pour des entreprises privées. En outre, le gouvernement déclare que, bien que les institutions impliquées dans l’exécution des peines privatives de liberté puissent conclure des accords avec des entreprises commerciales pour l’emploi de prisonniers, ces entreprises n’ont aucun pouvoir disciplinaire sur les prisonniers et ne sont pas autorisées à exercer une quelconque forme de coercition directe ou indirecte ou à donner des ordres aux prisonniers. Le gouvernement fournit également des exemples d’entreprises privées qui offrent une formation professionnelle spéciale et d’excellentes conditions de travail avec l’octroi de paiements supplémentaires, ce qui est très demandé par les détenus.
Le gouvernement considère que le travail que les détenus effectuent pour des entreprises privées bénéficie d’un statut juridique assorti de droits et de conditions de travail comparables à ceux du travail en dehors des prisons. Il réaffirme que, dans la pratique, les détenus donnent leur consentement libre et bien éclairé pour travailler dans des ateliers gérés par le secteur privé au sein des prisons. Il considère donc qu’aucune révision de l’article 46 (3) de la loi sur l’exécution des peines n’est nécessaire.
La commission note avec regret que le gouvernement n’envisage pas de prendre des mesures pour légiférer et accorder une reconnaissance juridique à cette question et qu’il n’a pris aucune mesure pour réviser l’article 46 (3) de la loi sur l’exécution des peines selon lequel les détenus sont tenus de travailler dans des ateliers gérés par des entreprises privées, sans aucune référence à leur consentement. La commission rappelle qu’en vertu de l’article 2, paragraphe 2, de la convention, le travail obligatoire des personnes ayant fait l’objet d’une condamnation est exclu du champ d’application de la convention, à la condition qu’il soit «exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques» et que ledit individu ne soit pas «concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées». Ces deux conditions sont d’égale importance et s’appliquent de manière cumulative: le fait que le détenu reste à tout moment sous la surveillance et le contrôle d’une autorité publique ne dispense pas en soi le gouvernement de remplir la deuxième condition, à savoir que la personne n’est pas concédée à des entreprises privées ou mise à leur disposition. Si l’une ou l’autre de ces deux conditions n’est pas respectée, le travail obligatoire exigé des condamnés dans ces conditions est interdit en vertu de l’article 1, paragraphe 1, de la convention. La commission a néanmoins estimé que le travail des détenus pour le compte d’entreprises privées peut être considéré comme compatible avec les exigences de la convention, si ce travail est effectué par les détenus dans le cadre d’une «relation de travail librement acceptée», comme l’a indiqué le gouvernement. Dans ces conditions, les détenus concernés doivent offrir leur travail volontairement, sans être soumis à des pressions ou à la menace d’une quelconque sanction, en donnant leur consentement libre, formel et éclairé au travail pour des entreprises privées, en droit et en pratique. La commission prie par conséquent à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que l’article 46 (3) de la loi sur l’exécution des peines soit révisé, afin de le rendre conforme aux exigences de la convention et à la pratique indiquée. La commission prie également le gouvernement de fournir des informations sur le nombre de détenus travaillant dans des ateliers d’entreprises privées à l’intérieur des locaux de l’établissement pénitentiaire. Notant que les institutions en charge de l’exécution des peines privatives de liberté peuvent conclure des accords avec des entreprises commerciales pour l’emploi de prisonniers et que ces entreprises n’ont pas de pouvoir disciplinaire sur les prisonniers, la commission prie le gouvernement de fournir des information sur la manière dont les autorités pénitentiaires exerce un contrôle, et s’il y lieu, la discipline sur les prisonniers qui réalisent un travail pour le compte des entreprises commerciales. La commission prie également le gouvernement d’indiquer les circonstances qui dans la pratique permettent de caractériser le consentement libre et bien éclairé de ces prisonniers, et de préciser si leur refus de réaliser un tel travail peut faire l’objet de sanctions disciplinaires.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

C029 - Demande directe (CEACR) - adoptée 2021, publiée 110ème session CIT (2022)

La commission note que le premier rapport du gouvernement sur l’application du Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930, n’a pas été reçu. La commission prie le gouvernement de fournir le premier rapport sur le Protocole de 2014, en même temps que son prochain rapport sur la convention dû pour 2024.
La commission prend note des observations formulées par la Chambre fédérale du travail (BAK) communiquées avec le rapport du gouvernement.
Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. Traite des personnes. 1. Programme d’action. Suite à ses précédents commentaires, la commission prend note du rapport de mise en œuvre du Plan d’action national pour la lutte contre la traite des personnes, 2018-2020, joint au rapport du gouvernement. Selon ce rapport, plusieurs projets, initiatives et mesures ont été menés pour renforcer la coopération nationale et internationale dans la lutte contre la traite des personnes, pour mobiliser et sensibiliser les différents groupes professionnels ainsi que pour améliorer la protection et le soutien des victimes. Le gouvernement fait également référence à l’adoption d’un nouveau Plan d’action national pour 2021-2023 qui regroupe en tout 109 mesures sous différents thèmes: i) la coordination et la collaboration nationale et internationale, ii) la prévention, iii) la protection des victimes, iv) l’application de la loi et v) le suivi et la recherche. Le plan d’action détermine également qui est responsable de sa mise en œuvre, le calendrier de celle-ci, ainsi que les indicateurs permettant de savoir si les mesures ont été prises et de quelle manière. La commission encourage le gouvernement à continuer de prendre des mesures efficaces pour lutter contre la traite des personnes, dans le cadre du plan d’action national pour 2021-23. Elle prie le gouvernement de transmettre des informations donnant un aperçu des mesures prises dans ce contexte ainsi que sur l’évaluation de la mise en œuvre du plan d’action national, en indiquant les résultats obtenus, les défis rencontrés et les mesures envisagées pour les surmonter.
2. Poursuites et sanctions. La commission prend note de l’information du gouvernement selon laquelle des cours de formation et autres programmes de sensibilisation permettant d’identifier les victimes de la traite des personnes sont régulièrement proposés aux autorités de contrôle telles que la police et les inspecteurs du travail, les officiers de justice ou les autorités de protection de la jeunesse. En ce qui concerne l’application de l’article 104(a) du Code pénal, qui criminalise la traite des personnes et prévoit des peines d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à cinq ans, la commission note que, selon le rapport du Groupe de travail contre la traite des êtres humains à des fins d’exploitation au travail 2018-2020, en 2019, la police a mené au total 42 enquêtes préliminaires concernant 62 suspects de traite des personnes. Un total de 66 victimes (dont 14 victimes mineures) ont été identifiées. La plupart des cas concernaient l’infraction de traite à des fins d’exploitation sexuelle. En outre, selon le rapport du Bureau fédéral de la police criminelle intitulé Rapport de situation, trafic et traite des personnes 2019, 17 victimes ont été identifiées dans le cadre de huit enquêtes sur des cas présumés de traite des personnes à des fins d’exploitation au travail en 2019. Selon l’évaluation des procédures judiciaires du bureau du procureur, de 2017 à 2020, il y a eu 318 cas au titre de l’article 104(a) et 218 cas au titre de l’article 217 du Code pénal concernant la traite transfrontalière à des fins de prostitution, avec 1002 victimes enregistrées. Parmi ces affaires, 61 ont été traitées sur la base de l’article 104(a) et 41 sur la base de l’article 217, en 2020. Au total, 25 condamnations ont été prononcées entre 2017 et 2020. La commission observe que le nombre de condamnations est faible par rapport au nombre de cas enregistrés.
La commission prend note des observations formulées par la BAK selon lesquelles l’application stricte de sanctions efficaces, des contrôles plus fréquents et une coopération accrue entre, d’une part, les inspecteurs du travail et les inspecteurs de l’agriculture et de la sylviculture et, d’autre part, la police financière et la caisse d’assurance maladie autrichienne, sont nécessaires pour lutter contre la traite des personnes. La commission note en outre que le Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes , dans ses observations finales de 2019, tout en se félicitant de l’augmentation du nombre d’enquêtes et de poursuites à l’encontre des trafiquants, s’est déclaré préoccupé par la clémence des peines infligées aux trafiquants (CEDAW/C/AUT/CO/9, paragraphe 24). La commission prie le gouvernement de continuer à prendre des mesures pour s’assurer que des enquêtes sont menées et des poursuites engagées dans les affaires de traite de personnes et que des peines suffisamment efficaces et dissuasives sont imposées. Elle prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur l’application dans la pratique des articles 104(a) et 217 du Code pénal qui criminalisent la traite des personnes et la traite transfrontalière à des fins de prostitution, y compris le nombre de condamnations prononcées et de peines appliquées.
3. Identification et protection des victimes. La commission a précédemment noté les informations du gouvernement sur les institutions de protection des victimes qui assurent des consultations psychosociales, un hébergement, des soins médicaux et une assistance juridique aux victimes de la traite. Elle note également que les victimes étrangères de la traite disposent d’un délai de 30 jours pour récupérer et réfléchir avant de prendre toute décision concernant leur séjour, après quoi elles peuvent bénéficier d’un permis de séjour «spécial de protection», si une procédure pénale a été engagée ou si d’autres revendications ont été présentées.
La commission note, d’après le rapport d’exécution du plan d’action national, qu’un nouveau centre d’accueil pour les hommes victimes de traite a été ouvert en 2018 et qu’il est pleinement opérationnel tout au long de l’année, dont la capacité d’accueil de plus de 60 personnes sera encore étendue en 2020. Ce centre offre un hébergement sûr, un soutien médical, juridique et psychosocial, une intervention en cas de crise ainsi qu’un soutien en cas de litige. Par ailleurs, les cartes rouge-blanc-rouge (permis d’établissement délivré en vertu de l’article 41a de la loi sur l’établissement et la résidence, qui accorde un accès illimité au marché du travail) ont été accordées à 28 victimes de la traite en 2018, à 45 victimes en 2019 et 33 victimes en 2020. La commission note que, dans ses observations, la BAK évoque la nécessité de faciliter l’acquisition et la prolongation du droit de résidence des victimes et d’améliorer leur accès à l’emploi. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises pour améliorer l’identification des victimes de traite et sur les services fournis aux victimes à travers les différentes institutions qui les assistent dans leur réadaptation et réinsertion sociale.
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