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Rapport définitif - Rapport No. 17, 1956

Cas no 16 (France) - Date de la plainte: 30-JUIL.-51 - Clos

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A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 22. A sa 124ème session (Genève, mars 1954), le Conseil d'administration, en adoptant le douzième rapport du Comité de la liberté syndicale, a approuvé les recommandations que lui avait soumises le Comité au sujet de plusieurs plaintes présentées par diverses organisations syndicales contre le gouvernement de la France en ce qui concerne la situation syndicale au Maroc.
  2. 23. Conformément à ces recommandations, le Conseil d'administration a décidé que certaines allégations formulées dans ces plaintes n'appelaient pas, sous réserve des observations contenues notamment dans les paragraphes 397, 398 et 406 de ce rapport, un examen plus approfondi. En ce qui concerné d'autres allégations relatives à la non-reconnaissance de certains droits syndicaux aux travailleurs marocains, il a pris note du rapport intérimaire du Comité, étant entendu que celui-ci lui soumettrait un nouveau rapport sur la question lorsqu'il serait en possession des informations attendues du gouvernement français au sujet de l'introduction d'un nouveau régime syndical au Maroc.
  3. 24. Par une lettre en date du 16 février 1955, le gouvernement français a indiqué que l'étude de la réforme de la législation syndicale chérifienne avait été activement poursuivie, que l'octroi du droit syndical aux Marocains était l'un des éléments du programme de réformes que le gouvernement français souhaitait particulièrement voir mis en oeuvre et qu'il prévoyait que le droit syndical serait dans un proche avenir juridiquement reconnu aux Marocains.
  4. 25. Se fondant sur ces informations, le Comité, dans son quinzième rapport, avait recommandé au Conseil d'administration:
    • a) d'attirer l'attention du gouvernement français sur la nécessité de promulguer au Maroc une législation assurant aux travailleurs marocains l'exercice du droit syndical intégral en s'inspirant des principes formulés à cet égard par la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, notamment le droit de constituer des syndicats, fédérations et centrales de leur choix et d'élire librement leurs représentants dans les organes directeurs de ceux-ci ;
    • b) de prendre note des informations données par le gouvernement quant à la faculté de fait reconnue aux travailleurs marocains de faire partie des syndicats actuellement constitués au Maroc et relevant de centrales métropolitaines ;
    • c) de recommander au gouvernement, en attendant la promulgation de dispositions législatives sur la question, d'autoriser en fait les travailleurs marocains à constituer des organisations syndicales de leur choix ;
    • d) d'exprimer le désir d'être tenu informé du résultat des efforts que poursuit le gouvernement en vue de faire bénéficier aussitôt que possible les travailleurs marocains du plein exercice du droit syndical ;
    • e) de reprendre à nouveau l'examen de la question lorsque le Comité aura reçu de nouvelles informations du gouvernement français à cet égard.
      • A sa 128ème session (Genève, février 1955), le Conseil d'administration a approuvé ces recommandations du Comité.
    • 26. Par une communication en date du 24 octobre 1955, le gouvernement français a fait savoir au Directeur général qu'un dahir du 12 septembre 1955 octroyait le droit syndical aux Marocains. Il joignait également à sa lettre le texte d'un dahir du 16 septembre 1955 portant sur le statut des délégués du personnel dans les établissements industriels, commerciaux et agricoles. Le texte du dahir du 12 septembre 1955 sur les syndicats professionnels est reproduit ci-dessous:
      • Vu le dahir du 24 décembre 1936 (9 Chaoual 1355), sur les syndicats professionnels, tel qu'il a été modifié et complété:
      • Article premier. - Le bénéfice du droit syndical, tel qu'il est défini et réglementé par le dahir du 24 décembre 1936 (9 Chaoual 1355), est étendu aux sujets marocains.
      • Article 2. - Les articles 3 et 13 du dahir du 24 décembre 1936 (9 Chaoual 1355) sont modifiés ainsi qu'il suit:
      • Article 3. - Toutes personnes voulant créer un syndicat professionnel doivent déposer dans les bureaux de l'autorité locale compétente:
    • 1) les statuts du syndicat projeté ;
  5. 2) la liste complète des personnes chargées, à un titre quelconque, de son administration ou de sa direction. Cette liste indique les nom, prénoms, filiation, date et lieu de naissance, nationalité, profession et domicile des intéressés. Ceux-ci, qui sont obligatoirement choisis parmi les membres du syndicat intéressé, doivent être de nationalité française ou marocaine et jouir de tous leurs droits civils.
    • Article 13. - Les syndicats professionnels peuvent, en se conformant aux dispositions des lois en vigueur, constituer entre leurs membres des caisses spéciales de secours mutuels et de retraite. Les fonds de ces caisses spéciales sont insaisissables jusqu'à concurrence de 10.000 francs par an pour les rentes et de 100.000 francs pour les capitaux assurés.
    • Article 3. - La date d'entrée en vigueur et les modalités d'application du présent dahir seront, en ce qui concerne les salariés agricoles, fixées par arrêté viziriel.
    • Fait à Rabat, le 24 Moharrem 1373 (12 septembre 1955).
    • Vu pour promulgation et mise à exécution Rabat, le 16 septembre 1955.
    • Le Commissaire résident général, BOYER DE LATOUR.
  6. 27. Par ailleurs, deux plaintes ont été adressées au Directeur général respectivement les 10 et 29 juin 1955 par la Fédération marocaine des syndicats de fonctionnaires et l'Union marocaine des syndicats de cheminots. Par une communication en date du 30 septembre 1955, cette dernière organisation a fait parvenir au Bureau certaines informations complémentaires à l'appui de ses allégations. Ces plaintes protestent contre de nouvelles arrestations de syndicalistes à Safi, arrestations qui auraient entraîné une grève de protestation, laquelle grève aurait entraîné, à son tour, de nouvelles arrestations et un mouvement général de répression. Les plaintes protestent en outre contre l'obligation où auraient été mis certains dirigeants syndicalistes de se démettre de leurs fonctions syndicales.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  • Allégations relatives à la non-reconnaissance des droits syndicaux aux Marocains
    1. 28 Les plaignants alléguaient qu'en vertu de la législation alors en vigueur, les travailleurs marocains, à la différence des travailleurs européens résidant au Maroc, n'avaient pas le droit de s'affilier à des syndicats de leur choix et de constituer une centrale syndicale nationale.
    2. 29 Le dahir du 12 septembre 1955, amendant le dahir du 24 décembre 1936 sur les syndicats professionnels, qui n'accordait qu'aux seuls Européens le droit d'association, modifie ce dernier instrument pour en permettre l'extension aux travailleurs marocains, abolissant ainsi la discrimination qui existait précédemment en matière syndicale.
    3. 30 Aux termes de la nouvelle législation, les Marocains ont maintenant le droit de constituer des syndicats et de s'y affilier librement. Pour que ces syndicats acquièrent la personnalité morale, il suffit à leurs créateurs de se conformer aux formalités suivantes, qui sont les mêmes que celles qui sont exigées des Européens, à savoir: dépôt des statuts du syndicat projeté et dépôt de la liste des personnes chargées de son administration ou de sa direction. Les biens des syndicats sont insaisissables. Enfin, la législation applicable jusqu'ici aux Européens leur étant étendue, les syndicats créés par des Marocains ou auxquels des Marocains sont affiliés ont le droit de se grouper en fédérations et en confédérations.
    4. 31 Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de prendre acte avec satisfaction des mesures adoptées en vue de faire pleinement bénéficier les travailleurs marocains des droits syndicaux, mesures qui tiennent compte des recommandations formulées par le Conseil, et de décider, la plainte étant devenue sans objet, qu'elle n'appelle plus aucune action de sa part.
  • Allégations relatives à de nouvelles mesures d'interdiction et d'arrestation frappant des syndicalistes
    1. 32 Les plaignants allèguent, d'une part, que de nouvelles arrestations de syndicalistes auraient été opérées à Safi, d'autre part, que plusieurs dirigeants syndicaux auraient été placés dans l'obligation de se démettre de leurs fonctions syndicales. Ces mesures - indiquent les plaignants - auraient été prises en application (application d'ailleurs contestable à leurs yeux) de la législation syndicale alors en vigueur au Maroc. Or, comme on vient de le constater avec satisfaction, cette législation a été depuis amendée dans le sens même des recommandations antérieurement formulées par le Conseil d'administration.
    2. 33 En conséquence, le Comité, constatant que les plaintes de la Fédération marocaine des syndicats de fonctionnaires et de l'Union marocaine des syndicats de cheminots se rapportent à des mesures qui semblent avoir été prises en application d'une législation que le dahir du 12 septembre 1955 est venu remplacer, modifiant ainsi profondément, sur le plan juridique comme dans les faits, la situation syndicale au Maroc, recommande au Conseil d'administration de décider que les plaintes en question n'appellent aucune action de sa part.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 34. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que, pour les raisons indiquées aux paragraphes 28 à 33 ci-dessus, le cas dans son ensemble n'appelle plus aucune action de sa part.
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