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Rapport définitif - Rapport No. 11, 1954

Cas no 76 (Costa Rica) - Date de la plainte: 01-JUIN -53 - Clos

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A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  • Analyse de la plainte
    1. 104 Le plaignant allègue que le gouvernement aurait réprimé par la violence une grève déclenchée en vue d'obtenir des contrats plus favorables pour les travailleurs des plantations de bananes et qu'il aurait emprisonné MM. Isaias Marchena, Domingo Rojas et Victor Solano, tous trois dirigeants syndicalistes, sous le prétexte qu'ils n'auraient pas respecté la propriété d'autrui. La grève aurait été déclarée illégale et le gouvernement aurait donné l'ordre d'arrêter d'autres dirigeants. Le plaignant demande la cessation des actes de violence et la libération des travailleurs et dirigeants syndicalistes emprisonnés.
  • Analyse de la réponse
    1. 105 Dans sa réponse, le gouvernement rappelle tout d'abord qu'il a pour préoccupation de stimuler le développement d'un syndicalisme sain et à l'abri des influences extérieures, et estime qu'une telle accusation n'aurait jamais été formulée à Costa-Rica même, étant donné que ceux qui y vivent, étrangers comme nationaux, constatent qu'ils y bénéficient d'un climat de totale liberté. Il indique ensuite que la grève déclenchée par un groupe important de travailleurs de la Compagnie bananière de Costa-Rica a été déclaré illégale, non par le gouvernement, mais par les tribunaux compétents, et il souligne à cet égard l'absolue indépendance dont jouit le pouvoir judiciaire vis-à-vis du pouvoir exécutif.
    2. 106 Pour se conformer à la décision rendue par la justice, le gouvernement a envoyé sur les lieux du conflit des éléments de la force publique, dont le rôle est strictement limité à assurer le maintien de l'ordre. Le seul fait regrettable qui se soit produit au cours de la grève résulte d'un incident qui s'est élevé entre un groupe de grévistes et le « Resguardo fiscal de corredores de coto » et qui s'est soldé par un meurtre et diverses blessures. La fixation des responsabilités découlant de cet événement est actuellement en instance de jugement devant les tribunaux.
    3. 107 Il est exact que, sur plainte de la Compagnie bananière, les autorités ont effectivement arrêté les dirigeants mentionnés dans la plainte, en raison des dommages causés par les grévistes qui avaient renversé une locomotive, et les ont mis à la disposition de l'autorité judiciaire compétente. Mais des démarches ont été ensuite effectuées en vue d'obtenir la libération de ces dirigeants - qui sont restés en liberté -, et ils ont collaboré aux pourparlers qui ont précédé la reprise du travail.
    4. 108 Le gouvernement retrace en effet de manière détaillée les efforts qui furent déployés par le Président de la République et le ministre du Travail en vue d'arriver à résoudre le conflit. Le Président obtint d'abord de la Compagnie que, si les travailleurs reprenaient le travail, celle-ci s'engagerait à ne pas considérer comme rompus les contrats de travail des grévistes et que les travailleurs conserveraient leur droit de réintroduire par les voies légales les demandes tendant à la satisfaction de leurs revendications. Ceux-ci se plaignant de la lenteur des procédures normales, le ministre du Travail intervint pour permettre un accord direct entre la Compagnie et les travailleurs en faisant élire par les travailleurs des délégués chargés de discuter avec la direction de l'entreprise. Grâce à ces mesures de conciliation, les travailleurs ont accepté de reprendre le travail sans aucun acte de répression ni de contrainte physique ou morale. Enfin, le Président de la République étudia avec l'entreprise les moyens d'accorder aux travailleurs une augmentation de salaire. Le gouvernement estime que son attitude a été manifestement favorable aux travailleurs, dans toute la mesure estimée raisonnable et juste, et qu'elle ne peut donc donner lieu à aucune plainte.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  • Allégation relative à l'illégalité de la grève
    1. 109 Le plaignant allègue que la grève déclenchée par les travailleurs des plantations de bananes en vue d'obtenir des contrats plus favorables a été déclarée illégale. Bien qu'il ne le dise pas explicitement, il laisse entendre que ce serait le gouvernement qui aurait pris cette mesure. Dans sa réponse, celui-ci souligne que la déclaration d'illégalité de la grève a été faite par les tribunaux du travail - organismes qui participent du pouvoir judiciaire et sont totalement indépendants du pouvoir exécutif - « pour des raisons qui sont exclusivement de leur ressort ».
    2. 110 D'après le Code du travail de Costa-Rica, il appartient en effet aux tribunaux du travail de se prononcer sur la légalité ou l'illégalité d'une grève. Selon l'article 366 de ce code, pour déclarer une grève, les travailleurs doivent:
      • a) se conformer strictement aux dispositions de l'article 364 [selon lequel la grève légale est l'abandon temporaire du travail dans une entreprise, un établissement ou un magasin, convenu et exécuté pacifiquement par un groupe de trois travailleurs au moins, avec l'intention exclusive de promouvoir ou de défendre leurs intérêts économiques et sociaux communs] ;
      • b) épuiser les procédures de conciliation prévues au chapitre III du titre VII du Code du travail;
      • c) constituer au minimum 60 pour cent des personnes qui travaillent dans l'entreprise, le lieu de travail ou le magasin.
    3. 111 Bien que le gouvernement n'indique pas le détail des raisons sur lesquelles s'est appuyé le tribunal du travail pour déclarer la grève illégale, il ne fait pas de doute que celui-ci a été appelé à prendre sa décision dans le cadre de la réglementation prévue par le Code du Travail.
    4. 112 Dans ces conditions, le Comité estime qu'en ce qui concerne cette première allégation, le plaignant n'a pas fait la preuve que le gouvernement aurait porté atteinte à l'exercice des droits syndicaux.
  • Allégation relative à la répression de la grève par la violence
    1. 113 A l'appui de son allégation relative à la répression de la grève par la violence, le plaignant invoque l'arrestation de trois dirigeants syndicalistes. Il indique lui-même qu'ils auraient, été arrêtés sous le chef d'accusation de ne pas avoir respecté la propriété d'autrui. Le gouvernement précise dans sa réponse que leur arrestation fut décidée à la suite d'une plainte de la Compagnie, motivée par le fait que des grévistes avaient renversé une locomotive. Il est à noter, à cet égard, que si la Constitution de Costa-Rica de 1949 reconnaît le droit de grève dans son article 61, elle précise que celui-ci sera exercé conformément aux règlements qui seront édictés en vertu de la loi et devra interdire tout acte de contrainte et de violence. Le Code du travail, à son article 367, précise également que « la grève doit se limiter au simple fait de la suspension et de l'abandon du travail » et que «les actes de coercition et de violence contre les personnes ou les biens seront punis, par les autorités répressives ordinaires, des peines prévues ». Les dirigeants syndicalistes arrêtés avaient bien été, selon les dires du gouvernement, mis à la disposition de la justice. Ils furent du reste libérés par la suite et prirent personnellement part aux pourparlers qui ont conduit à la reprise du travail.
    2. 114 Les démarches effectuées en vue d'obtenir la libération de ces dirigeants et les précisions que donne le gouvernement sur les négociations qu'il a entreprises en accord avec ceux-ci, tant auprès de la Compagnie qu'auprès des travailleurs, pour aboutir à une solution pacifique du conflit contredisent les allégations du plaignant, selon lequel la grève aurait été réprimée par la violence.
    3. 115 Il est vrai que le gouvernement indique également qu'un incident s'est produit, qui s'est soldé par un meurtre et diverses blessures. Mais il affirme qu'il s'agit d'un incident isolé, survenu au début du conflit et dont la justice a été régulièrement saisie. Il souligne à cet égard que les éléments de la force publique convoqués sur les lieux du conflit, une fois l'illégalité de la grève proclamée par les tribunaux de travail, ont limité leur action à assurer le maintien de l'ordre sans exercer de pression et sans se livrer à des mesures incorrectes.
    4. 116 Le plaignant n'a pas fait mention de ce meurtre dans le texte de sa plainte et n'a cité aucun autre fait à l'appui de son allégation relative à la répression de la grève par la violence.
    5. 117 Le Comité estime donc qu'en ce qui concerne cette deuxième allégation, le plaignant n'a pas apporté de preuves suffisantes permettant de conclure que le gouvernement aurait porté atteinte à l'exercice des droits syndicaux.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 118. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que le cas dans son ensemble n'appelle pas un examen plus approfondi.
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