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Rapport définitif - Rapport No. 14, 1954

Cas no 88 (France) - Date de la plainte: 01-NOV. -53 - Clos

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A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 18. Le plaignant allègue que l'Administration des postes du Soudan français aurait ordonné le déplacement en Guinée française de M. Abdoulaye Diallo, employé des postes et vice-président de la Fédération syndicale mondiale, afin de l'empêcher d'exercer sa fonction syndicale. Comme il avait refusé de se conformer à cette ordonnance antisyndicale, il aurait été révoqué.
  2. 19. En novembre 1953, cette plainte a été soumise pour avis au Comité ; celui-ci a recommandé au Conseil d'administration qu'elle soit communiquée pour observations au gouvernement français.
    • Le Conseil d'administration a approuvé cette recommandation à sa 123ème session (novembre 1953) et la plainte a été, en conséquence, communiquée au gouvernement français par une lettre du Directeur général en date du 4 décembre 1953.
    • ANALYSE DES REPONSES
  3. 20. Dans sa réponse en date du 1er mars 1954, le gouvernement indique que M. Abdoulaye Diallo a été révoqué le 3 mars 1950, conformément aux lois et décrets relatifs au statut de la fonction publique, à la suite de son refus de rejoindre sa nouvelle affectation. L'intéressé s'est pourvu contre cette décision devant le Conseil d'Etat, tribunal administratif compétent devant lequel un fonctionnaire peut déférer les décisions administratives dont il aurait fait l'objet.
  4. 21. La mesure concernant M. Abdoulaye Diallo ayant fait l'objet d'un recours devant une juridiction nationale, le Comité a estimé, à sa 8ème session (mars 1954), qu'il ne lui était pas possible de formuler une recommandation à ce stade et a chargé le Directeur général de demander au gouvernement français de vouloir bien l'informer en temps utile de la décision prise par le Conseil d'Etat. Le Directeur général a fait part de cette demande au gouvernement par une lettre en date du 20 mars 1954.
  5. 22. Dans sa réponse en date du 16 octobre 1954, le gouvernement indique que M. Abdoulaye Diallo a été mis sur sa demande en congé hors cadre, puis qu'il a été réintégré et mis à la disposition du gouverneur du Dahomey à compter du 1er juillet 1949. Le gouvernement précise que cette affectation n'était motivée que par les seules nécessités du service et n'impliquait en rien une intention de la part de l'Administration de mettre obstacle aux fonctions syndicales exercées par M. Abdoulaye Diallo. Ce dernier demanda ensuite qu'avant de reprendre son poste au Dahomey, une permission de trois mois lui soit accordée. Cette permission lui a été accordée. M. Abdoulaye Diallo partit alors pour la métropole, sans y avoir été administrativement autorisé, d'où il présenta une demande de mise en disponibilité le 10 septembre 1949. Cette demande ne put être satisfaite en raison des besoins en personnel spécialisé du service des postes et télécommunications. M. Abdoulaye Diallo fut avisé de cette décision par une correspondance qui lui précisait également que, eu égard aux fonctions syndicales qui l'avaient amené à se rendre à Paris, sa situation administrative entre la date d'expiration de son congé et une reprise de service qui lui était demandée le plus tôt possible serait examinée avec le maximum de bienveillance.
  6. 23. Dans sa réponse, le gouvernement indique en outre que, malgré cette correspondance, M. Abdoulaye Diallo n'a pas rejoint son poste et n'est rentré en A.O.F qu'au mois de janvier 1950. Même alors, cependant, l'Administration locale, ne tenant pas compte de ce long délai, s'est déclarée disposée à reprendre l'intéressé à son service. Elle lui a communiqué en outre, le 24 janvier 1950, notification officielle des deux décisions administratives relatives, d'une part, au rejet de sa demande de mise en disponibilité, d'autre part à son affectation au Dahomey. Par une lettre du 25 janvier 1950, M. Abdoulaye Diallo a fait connaître à l'Administration qu'il maintenait sa demande et, sans attendre de réponse, a quitté Bamako le 31 janvier pour se rendre aux Etats-Unis.
  7. 24. Dans ces conditions, M. Abdoulaye Diallo a été révoqué de son emploi le 3 mars 1950 par application de l'article 20 de l'arrêté du 6 décembre 1944 fixant le statut général du cadre commun secondaire de l'A.O.F. Ce texte précise que « Les fonctionnaires qui ont abandonné un service sans titre régulier de permission ou de congé, ceux qui, sans motif de santé légitime, n'ont pas, au terme d'une période de congé ou de disponibilité, repris leurs fonctions ou rejoint une affectation régulièrement donnée, peuvent être, après mise en demeure régulière, révoqués de leur emploi sans aucune des formalités prévues pour les sanctions disciplinaires. »
  8. 25. Le gouvernement indique enfin que l'intéressé a vu ses requêtes contentieuses rejetées par une décision du Conseil du contentieux administratif de l'A.O.F, qu'il a laissé périmer l'instance devant le Conseil d'Etat et que, par suite, la décision du Contentieux administratif de l'A.O.F est définitive.
  9. 26. En conclusion, le gouvernement oppose à nouveau un démenti catégorique aux allégations formulées par le plaignant selon lesquelles l'affectation de M. Abdoulaye Diallo au Dahomey aurait eu pour objet d'empêcher l'intéressé d'exercer ses activités syndicales et affirme que cette décision n'a été motivée que par les seuls intérêts du service.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 27. Le Comité avait décidé auparavant de surseoir à l'examen du cas, se conformant en cela à la pratique qu'il a établie selon laquelle, lorsqu'un cas fait l'objet d'une instance devant une juridiction nationale indépendante dont la procédure offre les garanties appropriées et qu'il considère que la décision à intervenir est susceptible de lui apporter des éléments supplémentaires d'information, le Comité surseoit à l'examen du cas pendant une durée raisonnable en attendant d'être en possession de cette décision sous réserve que le délai ainsi entraîné ne risque pas de porter préjudice à la partie dont il est allégué que les droits ont été violés. Or il apparaît que M. Abdoulaye Diallo, ayant laissé périmer l'instance devant le Conseil d'Etat, la décision du Contentieux administratif de l'A.O.F est maintenant définitive. Dans ces conditions, le Comité a estimé que le cas est maintenant en état d'être examiné.
  2. 28. Il ressort de la réponse du gouvernement que l'Administration paraît avoir accédé aux demandes de l'intéressé chaque fois que les besoins du service lui en laissaient la possibilité. Il semble donc qu'elle lui ait plutôt facilité l'exercice de ses activités syndicales. Elle a même paru considérer ses activités comme constituant une circonstance atténuante à l'absence injustifiée de son fonctionnaire, puisqu'elle a précisé, dans les communications qu'elle lui a adressées, que, « eu égard aux fonctions syndicales qui l'avaient amené à se rendre à Paris, sa situation administrative entre le 6 octobre 1949, date d'expiration de son congé, et la date de sa reprise de service, qui lui était demandée le plus tôt possible, serait examinée avec le maximum de bienveillance ».
  3. 29. L'Administration ayant fait preuve, à plusieurs reprises, de mansuétude à l'égard de l'intéressé, la mesure dont celui-ci a finalement été l'objet et qui a été prise en application de l'article 20 d'un arrêté du 6 décembre 1944 fixant le statut général du cadre commun secondaire de l'A.O.F paraît justifiée.
  4. 30. Enfin, il convient de retenir le fait que le Conseil du contentieux administratif de l'A.O.F a rejeté les requêtes contentieuses présentées par l'intéressé et que ce dernier a laissé périmer l'instance devant le Conseil d'Etat, organe suprême de recours en matière administrative. Etant donné la nature même de ses responsabilités, le Comité ne saurait se considérer comme lié par les règles qui s'appliquent par exemple aux tribunaux internationaux d'arbitrage et selon lesquelles les procédures nationales de recours doivent être épuisées. Toutefois, lorsqu'il examine selon ses mérites un cas comme celui-ci, le Comité doit tenir compte du fait que les possibilités offertes par la procédure nationale de recours devant un tribunal indépendant présentant toutes les garanties nécessaires n'ont pas été pleinement utilisées.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 31. Pour toutes ces raisons, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que le cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
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