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Rapport définitif - Rapport No. 19, 1956

Cas no 92 (Pérou) - Date de la plainte: 01-JUIN -53 - Clos

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A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  • Plainte de la Confédération internationale des syndicats libres
    1. 16 Le plaignant allègue que M. Rafael Lovett, secrétaire général de la Fédération des travailleurs du textile du Pérou, et M. Lucio Sandoval auraient été arrêtés par la police de Lima peu après leur retour de Genève, où ils avaient participé à une session de la Commission des industries textiles de l'O.I.T comme membres travailleurs. Ils auraient été accusés par le gouvernement, ainsi que plusieurs autres syndicalistes, d'avoir pris part à un « complot contre le gouvernement ». En fait, l'arrestation aurait été motivée par une grève dans l'industrie textile survenue à Arequipa.
    2. 17 La Fédération des travailleurs du textile, affiliée à la Confédération des travailleurs du Pérou, aurait, dans une déclaration, contesté que la grève ait eu aucun caractère politique et démenti les allégations selon lesquelles la Fédération serait liée à un parti politique ou exercerait des activités politiques.
    3. 18 Le plaignant estime que l'arrestation de délégués des travailleurs à leur retour d'une réunion de l'O.I.T constitue un cas particulièrement grave de violation des droits syndicaux, qui porterait directement atteinte à l'autorité de l'Organisation internationale du Travail. Il demande son intervention en vue d'obtenir la libération des détenus.
  • Plainte de la Fédération des travailleurs du textile du Pérou
    1. 19 Par une communication adressée au B.I.T, MM. Rafael Lovett Tapia et Lucio Sandoval Maurique, en leur qualité, le premier de secrétaire général, le second de secrétaire d'organisation de la Fédération des travailleurs du textile du Pérou, allèguent que le 21 février 1953, le jour même de leur retour de la quatrième session de la Commission des industries textiles de l'O.I.T, ils auraient été arrêtés et incarcérés à la prison centrale de Lima, où ils auraient été détenus jusqu'au 15 avril. A cette date, ils auraient été expulsés du pays et conduits sur le territoire de la République argentine.
    2. 20 Ces mesures seraient abusives et injustes, étant donné que l'affaire n'aurait pas été régulièrement instruite et que les inculpés n'auraient été autorisés ni à prendre connaissance de l'acte d'accusation ni à organiser leur défense.
    3. 21 Les plaignants indiquent qu'en tant que dirigeants syndicalistes, toujours voués à des activités d'ordre strictement syndical, ils avalent réclamé des autorités compétentes la révocation des mesures prises contre eux. Ils insistent auprès du Conseil d'administration pour que celui-ci veuille bien intervenir auprès du gouvernement péruvien pour appuyer leur demande.
  • ANALYSE DES REPONSES
  • Analyse de la première réponse du gouvernement (26 janvier 1954)
    1. 22 Dans une communication en date du 26 janvier 1954, le gouvernement péruvien a répondu que les autorités compétentes, auxquelles les plaintes ont été transmises, l'ont informé, après avoir procédé à une enquête approfondie, que les personnes mentionnées dans les plaintes, dirigeants ouvriers péruviens, exercent des activités communistes au Pérou. Les mesures de police prises contre elles étaient par conséquent nécessaires pour assurer la sécurité du pays. Elles sont conformes à la politique de collaboration dans la lutte contre le communisme dans l'hémisphère occidental.
  • Décisions antérieures du Comité
    1. 23 A sa onzième session (février 1955), comme il l'avait fait lors de sessions antérieures, le Comité a décidé de surseoir à l'examen du cas et a chargé le Directeur général de demander au gouvernement péruvien des informations complémentaires sur les raisons qui ont motivé les mesures prises contre MM. Lovett et Sandoval, ainsi que sur la procédure suivie en ce qui concerne leur déportation.
  • Analyse de la deuxième réponse du gouvernement (15 février 1955)
    1. 24 Dans sa deuxième réponse, le gouvernement déclare que les informations qu'il a déjà fournies auraient dû être jugées suffisamment explicites par le Comité. Il précise à nouveau que les autorités péruviennes possèdent des preuves formelles établissant que MM. Rafael Lovett et Lucio Sandoval se sont livrés à des activités politiques distinctes de leurs activités syndicales et ont commis des actes tendant à troubler l'ordre public et mettant en péril la sécurité extérieure du pays. Le gouvernement indique que la nature des informations qu'il a recueillies et les moyens qui ont permis de les obtenir relèvent du système de protection de la sécurité nationale et ne sauraient par suite être divulgués.
    2. 25 Depuis l'envoi de cette deuxième réponse, le gouvernement péruvien a, par un télégramme en date du 25 septembre 1955, fait savoir au Directeur général qu'il avait décidé d'autoriser M. Lucio Sandoval à réintégrer le pays et qu'il étudiait actuellement le cas de M. Rafael Lovett.
  • Décision antérieure du Comité (treizième session)
    1. 26 A sa treizième session (novembre 1955), le Comité a décidé d'ajourner à sa prochaine session la suite de l'examen du cas en attendant de connaître la décision prise par le gouvernement péruvien à l'égard de M. Rafael Lovett.
  • Analyse de la dernière réponse du gouvernement (16 février 1956)
    1. 27 Par une communication en date du 16 février 1956, le gouvernement du Pérou a fait savoir au Directeur général que M. Rafael Lovett, à son tour, avait été autorisé à réintégrer son pays.
  • INFORMATIONS RECUES DE LA CONFEDERATION DU TRAVAIL DU PEROU
    1. 28 Par un télégramme en date du 26 mai 1956, la Confédération du travail du Pérou a informé le Directeur général que cette organisation s'était reconstituée, que son deuxième Congrès national avait désigné des délégués pour assister à la 39ème session de la Conférence internationale du Travail et que MM. Lovett et Sandoval étaient revenus dans leur pays et avaient repris leurs activités syndicales.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 29. A l'appui de ses allégations selon lesquelles l'arrestation de MM. Rafael Lovett et Lucio Sandoval constituerait une violation des droits syndicaux, le premier plaignant a indiqué, d'une part, qu'il s'agirait en l'espèce de l'arrestation de deux dirigeants syndicalistes péruviens, membres travailleurs à une session d'une commission d'industrie de l'O.I.T, d'autre part, que leur arrestation, survenue à leur retour de Genève, aurait eu comme motif réel une grève dans l'industrie textile déclenchée à Arequipa et dont le prétendu caractère politique aurait été démenti par la Confédération des travailleurs du Pérou.
  2. 30. Le second plaignant ajoute que l'arrestation et l'expulsion de MM. Lovett et Sandoval ont été effectuées sans que l'affaire ait été régulièrement instruite et sans que les inculpés aient pu se défendre.
  3. 31. Dans sa première réponse, le gouvernement s'était borné à affirmer que les mesures prises par lui contre ces personnes, dont il ne contestait pas la qualité de syndicalistes, étaient dues à leurs activités communistes constatées par une enquête approfondie. Au dire du gouvernement, les mesures incriminées ont eu pour objet de sauvegarder la sécurité du pays et rentrent dans le cadre de la collaboration dans la lutte contre le communisme dans l'hémisphère occidental.
  4. 32. A sa huitième session, le Comité a noté que le gouvernement, tout en signalant qu'une enquête approfondie a été entreprise, ne précise pas les faits sur lesquels il s'est fondé pour prendre contre certains dirigeants syndicaux les mesures relevées dans les plaintes, ni les modalités de la procédure qu'Il a observée en application de ces mesures. Etant donné qu'il s'agissait de plaintes suffisamment précises et que le gouvernement ne contestait ni le fait, des mesures adoptées, ni la qualité de syndicalistes des personnes intéressées, le Comité a estimé qu'avant de se prononcer sur le cas, il lui serait utile d'obtenir des informations plus détaillées sur les circonstances dans lesquelles ces mesures ont été prises, ainsi que sur les modalités de leur mise en oeuvre.
  5. 33. Dans sa deuxième réponse, le gouvernement a affirmé posséder des preuves établissant de manière irréfutable que les dirigeants syndicaux en question se sont livrés à des activités politiques totalement distinctes de leurs activités syndicales, activités qui risquaient de mettre en danger la sécurité extérieure du pays. Le gouvernement a précisé que c'est cette circonstance même qui lui fait un devoir de ne pas révéler les informations qui lui ont permis d'établir la culpabilité des personnes intéressées ; il a indiqué à cet égard dans sa réponse que «la nature de ces informations et les moyens qui ont permis de les obtenir relèvent du système de protection de la sécurité nationale, lequel ne peut être révélé à aucun gouvernement, étant donné que cela mettrait en danger la sécurité du pays que ce système a précisément pour but de sauvegarder et que l'on devrait dévoiler les méthodes utilisées pour maintenir l'ordre intérieur, qui, dans de nombreux cas, se trouve lié à la paix internationale ».
  6. 34. Depuis l'envoi de cette deuxième réponse, le gouvernement péruvien, par un télégramme en date du 25 septembre 1955, a fait savoir au Directeur général qu'il avait été décidé d'autoriser M. Lucio Sandoval à réintégrer son pays et que le gouvernement procédait à l'étude du cas de M. Rafael Lovett.
  7. 35. A sa treizième session (novembre 1955), le Comité a décidé d'ajourner à sa présente session la suite de l'examen du cas en attendant de connaître la décision prise par le gouvernement péruvien à l'égard de M. Rafael Lovett.
  8. 36. Par une communication en date du 16 janvier 1956, le gouvernement a fait savoir au Directeur général que M. Rafael Lovett, à son tour, avait été autorisé à rentrer dans son pays. Par un télégramme en date du 26 mai 1956, la Confédération du travail du Pérou a informé le Directeur général que MM. Lovett et Sandoval avaient pu retourner au Pérou et reprendre leurs activités syndicales.
  9. 37. Dans ces conditions, tout en regrettant les mesures prises par le gouvernement péruvien, le délai qui s'est écoulé avant que celui-ci autorise le retour au Pérou de MM. Sandoval et Lovett, et en exprimant également son regret que le gouvernement n'ait pas cru opportun de lui fournir les éléments d'information qu'il avait sollicités, le Comité prend acte du fait que la mesure d'interdiction qui frappait MM. Sandoval et Lovett a été rapportée, que les intéressés ont pu retourner au Pérou et reprendre leurs activités syndicales.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 38. Dans ces conditions, le Comité considère que la plainte est devenue sans objet et recommande au Conseil d'administration de décider qu'elle n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
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