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- 109. A sa 19ème session (Genève, février 1958), le Comité a poursuivi l'examen des plaintes présentées, l'une par la Confédération internationale des syndicats libres le 13 août 1956 et relative à des sanctions infligées à des membres et dirigeants syndicaux de l'Union générale des travailleurs espagnols, de la Confédération nationale du travail et de la Solidarité des travailleurs basques, l'autre par l'Union générale des travailleurs espagnols en exil le 25 avril 1957 relative à la grève et à sa qualification de délit en Espagne. Cet examen a été fait à la lumière des observations communiquées par le gouvernement espagnol le 22 février 1958.
110. Dans sa communication en date du 13 août 1956, la Confédération internationale des syndicats libres allègue qu'après que l'Union générale des travailleurs espagnols, la Confédération nationale du travail et la Solidarité des travailleurs basques eurent été déclarées illégales, en 1936, leurs dirigeants ont été condamnés, qui à mort, qui à des peines d'emprisonnement.
110. Dans sa communication en date du 13 août 1956, la Confédération internationale des syndicats libres allègue qu'après que l'Union générale des travailleurs espagnols, la Confédération nationale du travail et la Solidarité des travailleurs basques eurent été déclarées illégales, en 1936, leurs dirigeants ont été condamnés, qui à mort, qui à des peines d'emprisonnement.- 111. Dans sa communication du 25 avril 1957, l'Union générale des travailleurs espagnols en exil alléguait que la grève est en Espagne un délit passible de six à douze ans de prison; seraient responsables de la grève, non seulement les participants, mais toutes les personnes que leurs antécédents caractérisent comme tels. La Confédération internationale des syndicats libres reprend cette allégation dans sa lettre du 13 août 1956.
- 112. Dans sa communication en date du 22 février 1958, le gouvernement indique tout d'abord que le projet de loi sur les conventions collectives, qui avait fait l'objet d'une demande d'informations de la part du Conseil d'administration, a été présenté aux Cortès. Il déclare, d'autre part, qu'« aucun membre ou dirigeant des organisations mentionnées ne se trouve emprisonné ou détenu en ce moment, soit en raison de son appartenance à L'une desdites organisations, ou des fonctions qu'il y occupait, soit en raison de toute autre activité syndicale». Par contre, le gouvernement ne se réfère pas aux allégations selon lesquelles la législation pénale rend passibles de sanctions les participants à une grève.
- 113. Le Comité a constaté au paragraphe 106 de son vingt-huitième rapport, approuvé par le Conseil d'administration lors de sa 138ème session (Genève, février 1958), qu'« il ne ressort pas clairement de la réponse du gouvernement que l'intention de ce dernier ait été d'indiquer qu'aucun membre ou aucun dirigeant des trois organisations en question ne se trouve en prison pour aucun motif ou qu'aucune de ces personnes n'est détenue en raison de son appartenance, de ses fonctions ou de ses activités syndicales (par opposition, par exemple, à la haute trahison ou autres crimes) ».
- 114. En conséquence, et tenant compte de tous ces éléments, le Comité a présenté un rapport intérimaire recommandant au Conseil d'administration, au paragraphe 110 de son vingt-huitième rapport, en ce qui a trait au projet de loi sur les conventions collectives, d'attirer l'attention du gouvernement sur l'importance que le Conseil d'administration attache au principe selon lequel des mesures appropriées aux conditions nationales doivent être prises pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges des procédures de négociation volontaire entre les employeurs ou les organisations d'employeurs d'une part, et les organisations de travailleurs d'autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi, il a également recommandé au Conseil d'administration d'exprimer l'espoir que le projet de loi qui était alors à l'étude tiendrait pleinement compte de ce principe et serait prochainement adopté; quant à l'allégation qui a trait à l'emprisonnement de membres et de dirigeants des anciennes organisations professionnelles espagnoles, le Comité a recommandé au Conseil d'administration de demander au gouvernement de l'informer si, pour une raison quelconque, des membres ou des dirigeants de l'Union générale des travailleurs espagnols, de la Confédération nationale du travail ou de la Solidarité des travailleurs basques se trouvent détenus dans des pénitenciers ou d'autres lieux et, dans l'affirmative, de lui indiquer sous quel chef d'accusation, quelle est la procédure selon laquelle ils ont été jugés, les garanties dont cette procédure est assortie et, dans la mesure du possible, de communiquer le texte des jugements rendus. Enfin, pour l'allégation relative à l'interdiction de la grève, le Comité a recommandé au Conseil d'administration de demander au gouvernement des informations sur le point de savoir si la grève constitue en Espagne un délit pénal entraînant les peines mentionnées au paragraphe 108 du rapport ou d'autres peines.
- 115. Le 17 décembre 1957, l'Union générale des travailleurs espagnols en exil a communiqué certaines informations complémentaires sur les «détenus sociaux », ainsi que des allégations relatives à l'emprisonnement de grévistes et de syndicalistes, tous éléments qui ont été dûment communiqués au gouvernement.
- 116. Depuis la dernière session du Comité, en février 1958, de nouvelles plaintes et des informations complémentaires ont été communiquées par l'Union générale des travailleurs espagnols en exil le 31 mars et le 6 mai 1958, la Confédération internationale des syndicats libres le 25 mars, le 2 mai et le 10 juillet 1958, la Fédération syndicale mondiale le 15 mai et le 7 août 1958, la Fédération internationale des mineurs les 21 août et 23 septembre 1958. Les allégations qu'elles contenaient avaient trait à une violation de la liberté syndicale en Espagne à la suite de l'agitation ouvrière qui s'était produite dans le nord du pays au cours du mois de mars 1958. La plainte de la Fédération internationale des mineurs reprend plus brièvement les allégations déjà formulées plus en détail par les autres organisations plaignantes et n'a donc pas été analysée à fond dans le corps du présent document.
- 117. Toutes ces plaintes ont été communiquées au gouvernement espagnol, qui, d'une part, a communiqué le 30 mai 1958 une réponse au rapport intérimaire sur l'Espagne présenté par le Comité à sa 19ème session et, d'autre part, a répondu par deux lettres du 29 avril et du 17 octobre 1958 aux allégations dont il est question au paragraphe précédent.
- Législation sur les conventions collectives
- 118. Par une communication en date du 30 mai 1958, le gouvernement espagnol a fait parvenir ses observations sur les recommandations contenues au paragraphe 110 du vingt-huitième rapport du Comité (Genève, février 1958). A cette occasion, le Comité avait recommandé au Conseil d'administration:
- a) de noter la déclaration du gouvernement selon laquelle le projet de loi sur les conventions collectives se trouve actuellement à l'examen devant une commission des Cortès, qui seront saisies d'un texte révisé, et:
- i) d'attirer à nouveau l'attention du gouvernement sur l'importance qu'il attache au principe selon lequel des mesures appropriées aux conditions nationales doivent être prises pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire entre les employeurs ou les organisations d'employeurs, d'une part, et les organisations de travailleurs, d'autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi;
- ii) d'exprimer l'espoir que le projet de loi en question tiendra pleinement compte du principe rappelé ci-dessus et sera prochainement adopté;
- iii) de demander au gouvernement de bien vouloir tenir le Conseil d'administration informé de toute évolution dans ce sens.
- Le gouvernement a fait savoir dans sa lettre du 30 mai 1958 que le projet de loi sur les conventions collectives avait été approuvé et la loi promulguée le 24 avril 1958.
- 119. D'après les déclarations du gouvernement, la nouvelle loi a les principales caractéristiques indiquées ci-après. Champ d'application: les conventions collectives peuvent s'appliquer à toutes les entreprises de la même branche, à un groupe d'entreprises définies par des caractéristiques spéciales, à une seule entreprise ou à une partie des travailleurs d'une même entreprise. Capacité pour négocier des conventions collectives: les représentants des associations nationales, provinciales ou locales sont habilités à négocier des conventions collectives; lorsqu'une convention ne s'applique qu'à une seule entreprise, les représentants statutaires de l'entreprise, d'une part, et les représentants syndicaux élus par le personnel, d'autre part, sont habilités à négocier. Contenu des conventions collectives: les conventions collectives peuvent contenir des clauses relatives à la fixation des taux de salaire, aux primes de rendement et d'encouragement, aux normes des qualifications professionnelles, aux méthodes de travail, à la réduction de la durée du travail, aux services sociaux des travailleurs et à toutes questions concernant les droits et les prérogatives des travailleurs, l'organisation de la production des entreprises et la collaboration entre travailleurs et employeurs au sein de l'entreprise. Durée des conventions collectives: les conventions collectives sont valables deux ans et renouvelables d'année en année par tacite reconduction, à moins que la convention elle-même n'en stipule autrement. Portée des conventions collectives: elles ne lient que les parties mais peuvent être étendues en tout ou en partie à d'autres entreprises ou à d'autres travailleurs qui n'étaient pas représentés, par accord entre les employeurs et les travailleurs qui désirent que la convention leur soit appliquée. Latitude des syndicats de conclure des conventions collectives: les conventions collectives sont établies sans intervention du ministère du Travail, lequel est responsable de leur enregistrement et de leur publication officielle; toutefois, s'il y a désaccord quant à l'interprétation d'une convention, les parties peuvent demander au ministère de désigner un représentant qui présidera aux discussions et s'efforcera de trouver une solution au différend. Juridiction et inspection relatives aux conventions collectives: en cas de non respect des obligations découlant d'une convention collective, la partie lésée peut se pourvoir devant les tribunaux; le contrôle de l'application des conventions incombe aux services de l'inspection du travail.
- 120. Le Comité a noté avec intérêt les progrès réalisés en Espagne à cet égard grâce à la promulgation d'une loi qui octroie aux travailleurs le droit de négociation collective en vue de fixer leurs conditions d'emploi.
- 121. Le Comité a observé que, conformément à ce qui est dit dans la lettre du gouvernement, «la négociation des conventions aura lieu sans intervention du ministère du Travail ». De même, le gouvernement indique dans son rapport du 27 septembre 1957, présenté conformément aux dispositions de l'article 19 de la Constitution de l'O.I.T, en ce qui concerne la convention no 98, « que l'autorisation préalable administrative pour engager des négociations et conclure des conventions» n'est pas nécessaire.
- 122. Néanmoins, en ce qui concerne l'application même de la convention conclue, c'est-à-dire sa mise en vigueur, le Comité a constaté que les articles 13 et 14 de la loi sont ainsi conçus:
- Article 13. - Lorsque les parties se sont mises d'accord sur la convention collective syndicale (convenio colectivo sindical), le texte de cette dernière sera transmis au délégué syndical provincial ou national (selon la portée de la convention) qui la communiquera sans délai - en y joignant le rapport exigé - au bureau du travail provincial ou au Directeur général du travail selon le cas. Dans un délai maximum de cinq jours ouvrables après la réception de la convention par le service compétent du travail, ce dernier approuvera la convention, déclarera nulle toute partie contenant un vice rédhibitoire, ou la retournera non approuvée en donnant au syndicat les raisons de sa décision. Le renvoi de la convention aura pour effet de replacer celle-ci au stade de la négociation.
- L'une quelconque des parties peut, par l'intermédiaire du syndicat et selon les règles prescrites, en appeler de la décision de renvoyer la convention non approuvée. Si la décision n'est pas signifiée dans les délais mentionnés ci-dessus, la convention sera considérée comme approuvée par les autorités compétentes.
- Article 14. - Si, conformément au dernier paragraphe de l'article 12 de la présente loi, les parties à une convention font savoir que l'une des stipulations qu'elle contient risque d'entraîner une augmentation des prix, le consentement de la Commission du gouvernement pour les affaires économiques (Comisión delegada del Gobierno), qui sera demandé par la Délégation nationale des syndicats, sera nécessaire pour que la procédure relative à cette convention puisse se poursuivre. Si ladite commission ne manifeste pas son désaccord dans un délai de deux mois à partir du moment où elle a été saisie, la procédure décrite à l'article 13 ci-dessus sera reprise. En déposant une convention, l'organisation syndicale joindra au texte de la convention, en sus du ou des rapports des parties mentionnés à l'article 12, un autre rapport du Conseil économique syndical (Consejo Económico Sindical) qui est compétent en ce qui concerne la portée de la convention.
- De plus, la réglementation relative à la loi sur les conventions collectives, approuvée par une ordonnance du 22 juillet 1958, contient les clauses suivantes:
- Article 18. - Compétence de la Commission du gouvernement pour les questions économiques:
- 1) Dans les cas mentionnés aux sous-paragraphes 2 et 4 de l'article précédent (relatif aux conventions impliquant des changements dans la rémunération susceptibles d'affecter les prix), l'approbation définitive de la convention dépend du consentement préalable, explicite ou implicite, de la Commission du gouvernement pour les affaires économiques, consentement qui sera demandé par la Délégation nationale des syndicats par l'intermédiaire de la présidence du gouvernement; à cette demande seront annexés le texte de la convention, les déclarations faites par les parties et l'opinion du Conseil économique syndical compétent pour la région à laquelle la convention est applicable.
- 2) Si, après deux mois à dater du dépôt de la demande auprès de l'autorité compétente, la Commission du gouvernement n'a pas manifesté son désaccord, il convient de considérer que la Commission a implicitement autorisé la convention, qui sera traitée conformément à la procédure établie au paragraphe 3 de l'article précédent.
- 3) Si, dans le délai prescrit, la Commission présente ses objections à la convention, elle en informera la Délégation nationale des syndicats de manière à permettre à cette dernière d'en tenir compte conformément à la réglementation pertinente; cela fait, le dossier sera renvoyé à la Commission pour décision définitive, qui devra être prise dans le délai de deux mois prescrit.
- Article 19. - Résolution du ministère du Travail:
- 1) Le texte de la convention et la documentation y afférente ayant été reçus par les autorités du travail compétentes, ces dernières, dans un délai de quinze jours à partir de l'enregistrement à la délégation provinciale ou à la Direction générale du travail, adopteront, selon le cas, l'une des solutions suivantes.
- 2) Approbation
- ......................................................................................................................................................
- 3) Désapprobation L'approbation sera refusée lorsqu'il existe les raisons de nullité énumérées ci-dessous.
- Article 20. - Causes de nullité des conventions: La délégation provinciale ou le Directeur général du travail, dans la période de quinze jours prescrite à l'article 19, refusera d'approuver une convention et la déclarera nulle pour les raisons suivantes:
- 1) Nullité totale, en raison d'un vice rédhibitoire, s'il apparaît que l'une des parties a recouru à une fraude ou a obtenu le consentement de l'autre partie par coercition.
- 2) Nullité partielle, en raison d'un vice auquel il peut être porté remède, s'il existe l'une des conditions suivantes:
- a) si les normes réglementaires n'ont pas été observées lors des négociations, lors de la convocation des parties ou dans les clauses de la convention;
- b) si la convention contient des dispositions ou des clauses qui affectent les droits des travailleurs tels qu'ils sont établis par les lois, décrets, ordonnances, règlements du travail ou toute autre prescription légale;
- c) si la convention s'applique à des entreprises qui ne sont pas couvertes par la réglementation du travail fondamentale;
- d) si la convention contient des normes ou des clauses impliquant une violation des dispositions législatives relatives aux droits reconnus des entreprises en ce qui concerne l'organisation du travail ou qui sont contraires aux exigences du progrès économique ou de la productivité;
- e) si la convention contient des clauses qui portent atteinte au principe de la coopération entre les éléments personnels de la communauté de travail qui constituent l'entreprise ou s'opposent aux exigences de la discipline et de la paix sociale;
- f) si la convention contient des clauses ou des dispositions qui ne reconnaissent pas, restreignent ou enfreignent les pouvoirs que le système juridique attribue aux autorités ou aux fonctionnaires de l'Etat.
- 123. L'article 4 de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, prévoit que «des mesures appropriées aux conditions nationales doivent, si nécessaire, être prises pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les organisations d'employeurs d'une part, et les organisations de travailleurs d'autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi».
- Le Comité avait déjà observé dans un cas antérieur que la nécessité d'une approbation préalable de la part du gouvernement pour la mise en vigueur d'une convention collective pourrait constituer, dans certaines circonstances, une mesure contraire au développement et à la promotion des procédures de négociation collective entre employeurs et travailleurs pour le règlement des conditions d'emploi. Dans ces conditions, le Comité déclarait: « Bien que le refus de l'approbation administrative puisse faire l'objet d'un recours en justice, le système même d'une approbation administrative préalable est contraire à tout le régime de négociations volontaires... Le Comité, dans le cas no 102 (Union sud-africaine), a souligné l'importance qu'il y a à reconnaître que les syndicats devraient avoir le droit, par voie de négociations collectives... de chercher à améliorer les conditions de vie et de travail de ceux qu'ils représentent et que les autorités publiques devraient s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit. »
- 124. Dans le cas présent, le Comité recommande au Conseil d'administration de noter que, à la suite de la promulgation de la loi sur les conventions collectives, l'autorisation administrative préalable pour entreprendre des négociations collectives et conclure des conventions collectives n'est pas nécessaire; de noter qu'il est nécessaire de soumettre les conventions, une fois conclues, à l'approbation des autorités compétentes et que les conventions n'entrent pas en vigueur si elles ne sont pas approuvées; d'attirer l'attention sur l'incompatibilité d'une telle disposition avec le développement et l'utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs ou les organisations d'employeurs d'une part et les organisations de travailleurs d'autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi; de demander au gouvernement espagnol de bien vouloir informer le Conseil d'administration de la proportion des cas où les conventions collectives n'ont pas été approuvées dans la forme où elles avaient été présentées, des circonstances dans lesquelles lesdites conventions n'ont pas été approuvées et, d'une manière générale, des mesures prises dans ce domaine.
- Allégations relatives à l'interdiction, par la loi, de la grève
- 125. Dans sa communication en date du 25 avril 1957, l'Union générale des travailleurs espagnols en exil allègue qu'en Espagne, la grève constitue un délit punissable de six à douze ans de prison. La loi ne permet pas seulement d'inculper ceux qui prennent effectivement part à une -rêve, mais ceux dont les autorités ont des raisons de penser qu'ils auraient pu y prendre part. Cette allégation est confirmée par la Confédération internationale des syndicats libres dans son mémoire du 13 août 1956, où il est dit que le gouvernement ne reconnaît pas le droit de grève et emploie la force pour briser tout mouvement visant à améliorer les conditions de travail et de vie des ouvriers.
- 126. Dans sa communication en date du 30 mai 1958, le gouvernement déclare qu'en vertu du système législatif espagnol, les droits légitimes des travailleurs sont sauvegardés par l'intermédiaire des syndicats. Les fonctionnaires syndicaux aux échelons local, provincial et national sont élus librement par les travailleurs eux-mêmes conformément à la procédure établie par la réglementation du 22 mai 1947; de plus, l'Inspection du travail veille à ce que les employeurs respectent leurs obligations sociales; il existe, enfin, des tribunaux du travail auxquels les travailleurs peuvent gratuitement faire appel. L'article 218 du Code pénal punit les actes de sédition, lesquels sont définis comme des actes publics et violents visant à faire triompher, par des moyens illicites et par la force, des buts (qui sont énumérés) incompatibles avec le maintien de l'ordre public et de l'autorité de l'Etat. Le gouvernement ajoute que « c'est seulement lorsque les travailleurs se livrent à des actes séditieux et non pas en raison d'une cessation du travail que les travailleurs peuvent être punis en application de l'article 222 du Code pénal ». Des revendications ont été faites par des voies illégales; toutefois, les conflits qu'elles ont entraînés et les arrêts du travail dont ils ont été parfois accompagnés n'ont pas été considérés par les autorités comme constituant des actes de sédition. Cela ne signifie pas qu'en cas d'actes de coercition, d'occupation de fabriques, etc., à l'occasion d'un différend, ces actes resteraient impunis, tant il est vrai qu'il ne s'agirait plus là de faits de grève au sens propre du terme. Le gouvernement s'est borné à prendre les mesures nécessaires au maintien de la paix et de l'ordre publics et, ce, dans le respect absolu de la légalité.
- 127. Le Comité a noté que l'article XI (2) de la Charte du travail déclare: «Toute action collective ou individuelle qui nuit au rythme normal de la production ou qui risque de lui nuire sera considérée comme un crime contre l'Etat ». De son côté, la loi du 29 mars 1941 sur la sécurité de l'Etat stipule:
- Article 44. - Les lock-outs et les grèves seront punissables d'une peine d'emprisonnement de trois à cinq ans. Leurs promoteurs, organisateurs et meneurs seront passibles d'une peine de cinq à huit ans d'emprisonnement. Le tribunal, tenant compte des circonstances du délit et de la position du délinquant, en particulier de sa situation financière, peut infliger, en plus des peines mentionnées ci-dessus, une amende allant de 5.000 à 50.000 pesetas.
- Article 45. - Les personnes qui font usage de la violence ou d'intimidation en se rendant coupables des délits précisés aux articles 43 et 44 seront passibles d'une peine d'emprisonnement allant de six ans et un jour à huit ans.
- Article 46. -Toute personne qui cause, de quelque manière que ce soit, la suspension totale ou partielle du fonctionnement des services publics définis à l'article 43, ou la grève ou le lock-out mentionnés à l'article 44 sera passible d'une peine d'un à trois ans de prison.
- Si les délits mentionnés à l'article précédent sont commis à la suite de cette provocation, une peine de trois à six ans de prison sera infligée.
- De plus, l'article 222 du Code pénal (mentionné par le gouvernement dans sa réponse) déclare:
- Article 222. - Seront coupables de sédition:
- 1) les fonctionnaires et employés de n'importe quel type de service public et les personnes qui, par la nature de leur emploi, effectuent un travail reconnu comme étant d'importance vitale, et qui menacent la sécurité de l'Etat, gênent son fonctionnement normal ou menacent son autorité ou son prestige en arrêtant le travail ou en réduisant la régularité du fonctionnement de ses services;
- 2) les coalitions d'employeurs visant à paralyser le travail;
- 3) les grèves de travailleurs.
- Article 223. - Les personnes s'étant rendues coupables des délits précisés à l'article précédent seront punies:
- 1) d'une peine d'emprisonnement s'il s'agit des promoteurs, des organisateurs ou des meneurs ou si elles font usage de la violence ou de l'intimidation en commettant les délits mentionnés plus haut;
- 2) d'une peine de prison plus légère dans les autres cas. Le tribunal, tenant compte des circonstances du délit et de la situation du délinquant, en particulier de sa situation financière, pourra, en plus des peines mentionnées plus haut, infliger une amende de 5.000 à 50.000 pesetas.
- Il convient de noter que les juristes espagnols contemporains se réfèrent également à ces textes et en déduisent qu'en Espagne la grève constitue un crime.
- 128. Le Comité recommande au Conseil d'administration de prendre note de la déclaration du gouvernement espagnol selon laquelle «c'est seulement lorsque les travailleurs se livrent à des actes séditieux et non pas en raison d'une cessation du travail que les travailleurs peuvent être punis en application de l'article 222 du Code pénal » et que« les arrêts du travail ont été réglementés sans être considérés par les autorités comme constituant des actes séditieux comportant des conséquences pénales ».
- 129. Néanmoins, le Comité a considéré que les dispositions législatives reproduites au paragraphe 127 ci-dessus sont si larges que, même si elles ne sont pas appliquées en pratique, elles sont susceptibles d'être appliquées d'une façon incompatible avec la liberté syndicale. Il convient de signaler que le Comité a estimé en des occasions antérieures que les allégations relatives à l'interdiction du droit de grève n'échappent pas à sa compétence dans la mesure où cette interdiction touche à l'exercice des droits syndicaux.
- 130. Dans un nombre assez considérable de cas, le Comité a ainsi été appelé à donner son avis sur divers aspects du droit de grève. Il a déclaré notamment que, « dans la plupart des pays, le droit de grève est communément considéré comme un des droits généraux reconnus aux travailleurs pour la défense de leurs intérêts professionnels, dans la mesure où il s'exerce pacifiquement et sous réserve des restrictions temporaires qui pourraient lui être apportées ». De même, le Comité a déclaré à de nombreuses reprises que l'on reconnaît généralement aux travailleurs et à leurs organisations le droit de grève comme un moyen légitime de défense de leurs intérêts professionnels. Dans les cas spéciaux (services publics et services essentiels) où le droit de grève est soumis à des restrictions statutaires, le Comité a attaché de l'importance à l'existence d'une procédure garantissant une solution pacifique de tout conflit et accordant des garanties appropriées aux travailleurs qui ne peuvent recourir à la grèves. Dans ces mêmes cas, le Comité a établi que, « si la loi peut restreindre provisoirement les grèves... jusqu'à ce que tous les moyens de négociation, de conciliation et d'arbitrage aient été épuisés, un tel système devrait s'accompagner des procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et expéditives, aux diverses étapes desquelles les intéressés devraient pouvoir participer».
- 131. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:
- a) de prendre note de la déclaration du gouvernement selon laquelle les travailleurs ne sauraient être punis en vertu de l'article 222 du Code pénal pour le simple fait d'avoir abandonné leur travail;
- b) de demander au gouvernement espagnol, étant donné que la relation entre les « arrêts de travail » et la «grève » ne paraît pas parfaitement claire et que les dispositions pénales relatives aux grèves paraissent être rédigées en des termes si larges qu'elles sont susceptibles d'une application incompatible avec la liberté syndicale, de lui indiquer si les mesures nécessaires ont été prises pour que toutes les autorités chargées d'engager les procédures légales apprécient pleinement la portée de la loi;
- c) de demander au gouvernement s'il étudie la possibilité d'amender les dispositions de la Charte du travail, de la loi sur la sécurité de l'Etat et du Code pénal relatives à l'interdiction de la grève, mentionnées au paragraphe 127 ci-dessus, à la lumière de la politique énoncée par lui.
- Allégations relatives aux grèves de mars 1958
- 132. L'Union générale des travailleurs espagnols en exil a déposé, le 31 mars 1958, une plainte relative aux grèves qui se sont déroulées dans les Asturies en mars 1958. Cette communication cite une ordonnance, émanant du Conseil des ministres et datée du 14 mars 1958, qui suspend l'application des articles 14, 15 et 18 de la Charte du peuple espagnol pendant une période de quatre mois dans les provinces minières, et, ce, en vertu des pouvoirs conférés par l'article 35 de la Charte. Parallèlement, plusieurs articles de la loi du 26 juillet 1945 sur l'ordre public ont été mis en vigueur.
- 133. Dans la plainte, est reproduite également une description des divers événements qui ont marqué la grève, description provenant d'organisations syndicales clandestines. D'après cette description, la grève a pour origine le fait qu'après les grèves de 1956, le gouvernement a rajusté les salaires au détriment des mineurs. Une des conséquences immédiates de cette circonstance fut la demande de salaires plus élevés formulée par les mineurs du puits Mana Luisa au printemps de 1957. Le rapport explique que les mineurs ont un salaire de base, auquel s'ajoute une prime au rendement qui ne peut dépasser 100 pour cent du salaire de base. Depuis les événements de 1957, les entreprises ont dépassé ce maximum légal. La production du charbon s'est élevée de 11 pour cent, ce sur quoi le ministre a décrété que la production avait atteint un niveau satisfaisant, privant ainsi les entreprises de toute raison de maintenir le volume de la production. En conséquence, les employeurs réduisirent les prunes au rendement, et, lorsque les mineurs du puits Maria Luisa protestèrent au début de mars 1958, ils furent congédiés. Un mouvement de solidarité s'est alors dessiné: les mineurs freinèrent la production jusqu'à ce qu'elle atteigne un niveau juste au-dessus du minimum officiel, à la suite de quoi ils furent licenciés; étant donné l'ampleur du mouvement, plusieurs mines fermèrent. Lorsque le nombre des travailleurs impliqués atteignit 15.000, le gouvernement décida d'envoyer sur place des détachements de la garde civile. Les représailles exercées auraient frappé même des travailleurs n'ayant pas pris part à la grève; le nombre des mineurs congédiés se monterait à quarante. Selon les informations à la disposition des plaignants, certains mineurs qui faisaient leur service militaire dans les mines furent rappelés dans les rangs. Les mineurs s'adressèrent à leurs représentants syndicaux, mais il leur fut répondu qu'il était impossible d'intervenir dans le conflit puisqu'il s'agissait d'une question d'ordre public. Les plaignants soutiennent qu'il ne s'agissait pas d'une grève politique, mais d'un lock-out soutenu par les autorités. Le compte rendu des événements s'achève sur une citation d'une déclaration du gouverneur des Asturies avertissant les mineurs que le gouvernement entendait appliquer la loi dans toute sa rigueur et annonçant que des instructions avaient été données aux employeurs de rouvrir leurs entreprises le 17 mars.
- 134. Le 6 mai 1958, l'Union générale des travailleurs espagnols en exil a fourni des informations complémentaires au sujet de la grève en donnant des chiffres, ainsi que le nom de travailleurs congédiés en Catalogne, dans les Asturies, à Levante et à Bilbao. Ces informations reproduisent également le texte de deux déclarations faites par le délégué du ministère du Travail, Laudelino León, le 2 avril 1958, et qui traitent des licenciements effectués dans l'entreprise métallurgique Aranzabal, S.A., à la suite d'abandons de poste. Le délégué du gouvernement donnait un avertissement aux travailleurs selon lequel toute récidive entraînerait le renvoi immédiat; de leur côté, les employeurs étaient informés d'avoir à n'apporter aucun changement aux conditions de travail existantes à la suite de l'action coercitive des travailleurs.
- 135. La Confédération internationale des syndicats libres a également déposé une plainte le 25 mars 1958 à la suite des mesures prises par le gouvernement au moment de la grève du bassin minier d'Oviedo. Les plaignants affirment que le gouvernement a suspendu l'application d'un certain nombre de garanties contenues dans la Charte du peuple espagnol et qu'il a incorporé dans l'armée les grévistes et leurs meneurs. Selon les plaignants, la grève avait son origine dans le refus de donner suite à une revendication portant sur une augmentation de salaire et une journée de six heures pour le travail dans le fond.
- 136. La Confédération internationale des syndicats libres a présenté des informations complémentaires le 2 mai 1958, d'où il ressort que la police aurait perquisitionné dans un certain nombre de foyers, détenu et maltraité de nombreux ouvriers et contraint certains autres à quitter le district. Des mouvements de grève analogues, appuyant des revendications économiques, ont également eu lieu dans les provinces de Guipúzcoa et de Catalogne. Le gouverneur civil de Barcelone aurait ordonné aux ouvriers d'une usine de reprendre le travail; cette mesure étant restée sans effet, il aurait ordonné la fermeture de toutes les usines affectées par la grève et interdit tout changement dans les contrats de travail sans sa permission. La grève trouverait son origine dans le rejet par les employeurs des revendications pour des salaires plus élevés. A la suite de la grève, des mesures de représailles auraient été prises, telles que licenciement, détention et déportation de grévistes.
- 137. D'autres informations complémentaires ont été reçues de la Confédération internationale des syndicats libres le 10 juillet 1958. Elles traitent essentiellement de la brutalité dont la police aurait fait preuve vis-à-vis des grévistes. Deux travailleurs de la mine de charbon du Nalon, arrêtés au début de la grève, seraient maintenant internés à « La Cadellada », hôpital psychiatrique des environs d'Oviedo, capitale des Asturies. Deux travailleurs auraient tenté de se suicider au quartier général de la police de cette même ville. Les plaignants disent avoir eu l'occasion de s'entretenir avec certains des anciens détenus, qui déclarèrent avoir été torturés au cours de leur interrogatoire par le détachement spécial de police envoyé de Madrid dans le but de les forcer à avouer qu'ils appartenaient à des cellules communistes. A la date de l'expédition de la communication du plaignant, trente-quatre travailleurs se seraient encore trouvés en prison et attendraient de passer en jugement; les ouvriers libérés auraient reçu l'ordre d'aller vivre dans une autre province. La même mesure aurait été imposée à des travailleurs qui n'avaient pas été arrêtés. Les plaignants citent le cas d'un dirigeant syndical condamné à être déporté pour s'être plaint auprès de son employeur au sujet de diverses questions de travail; les plaignants ajoutent que le cas se présenterait assez souvent. Les demandes faites par les travailleurs à leurs syndicats n'aboutissent jamais à rien puisque les syndicats avouent être impuissants dans toutes les matières qui relèvent du gouvernement.
- 138. La Fédération syndicale mondiale a également fourni des informations au sujet des grèves mentionnées plus haut. Dans une lettre en date du 15 mai 1958, elle déclare qu'un mouvement de grève a éclaté dans le bassin minier d'Oviedo au cours du mois de mars, mouvement qui a été suivi ailleurs par des grèves de solidarité. Le gouvernement - déclare le plaignant - a suspendu certaines des garanties de la Charte du peuple espagnol et adopté des mesures de répression contre les mineurs. A Barcelone, un mouvement similaire s'est déclenché, affectant quelque 50.000 travailleurs, et le gouvernement aurait pris des mesures analogues; de même, dans les provinces basques, toute augmentation de salaire a été interdite sous peine de sanctions. A la suite de la grève, plusieurs dirigeants syndicaux, dont le plaignant donne les noms, auraient été arrêtés.
- 139. De plus, le 7 août 1958, la Fédération syndicale mondiale a communiqué le texte d'un message qu'elle dit provenir de travailleurs détenus à Barcelone. Ce message affirme que les buts des grèves étaient purement économiques et décrit les conditions de travail qui prévalent dans l'industrie, où dix et même seize heures de travail par jour constitueraient un régime « normal ». Après l'échec des tentatives faites auprès des syndicats, qui refusèrent de les soutenir, les travailleurs n'eurent d'autre recours que de protester. Bien que l'arrêt du travail ait été pacifique, il a amené la fermeture des usines par le gouverneur civil, le général Felipe Acedo Colunga, et la détention de nombreux travailleurs, y compris plusieurs représentants syndicaux, dont certains passeraient prochainement devant un tribunal militaire. Le message termine en mentionnant le cas de soixante-quatre travailleurs et syndicalistes qui auraient été jugés après avoir subi de mauvais traitements au quartier général de la police, à Barcelone, dans le but de leur faire avouer qu'ils appartenaient à un mouvement d'inspiration communiste.
- 140. En réponse aux diverses plaintes relatives aux grèves de mars 1958, le gouvernement déclare, dans ses lettres en date des 29 avril et 17 octobre 1958, que les travailleurs de certaines des mines de charbon des Asturies ont réduit graduellement leur rendement. Cette situation a pour ainsi dire paralysé entièrement certains puits en dépit du fait que les travailleurs se sont normalement rendus à leur travail. Les employeurs, confrontés avec une chute du rendement, ont pris certaines mesures disciplinaires, telles que la suspension des travailleurs intéressés, en même temps qu'ils engageaient les procédures prévues par la loi. Le mouvement s'étendit, par solidarité semble-t-il, sur quoi les employeurs suspendirent les travaux et en informèrent les autorités. Le gouvernement déclare qu'il n'y a pas eu lock-out puisque la fermeture des entreprises a été effectuée avec l'approbation des autorités et ne fut que la conséquence de la position illégale adoptée par les travailleurs; les mouvements qui ont eu lieu à Barcelone, Guipúzcoa et Alava se sont déroulés de la même manière. Le gouvernement soutient qu'il n'y a donc pas eu de grève à proprement parler, mais une diminution délibérée du rendement qui s'est transformée en une occupation illicite des entreprises. Le gouvernement déclare qu'il ne s'agissait pas d'un différend du travail dans le sens de la loi et qu'aucune demande en vue d'une modification des conditions de travail n'a été adressé aux services du travail. Les revendications auraient dû être présentées par l'intermédiaire des comités syndicaux, dont les membres, déclare le gouvernement, sont librement élus conformément à la réglementation du 22 mars 1947. Une enquête ultérieure a révélé que le mouvement n'était autre qu'un complot subversif destiné à perturber une des branches essentielles de l'économie nationale. Le gouvernement ajoute que les grévistes appartenaient à l'une des catégories de la population les mieux payées et jouissant des plus importants privilèges sociaux. Etant donné l'ampleur du mouvement, le gouvernement a décidé de suspendre, durant quatre mois, les articles 14, 15 et 18 de la Charte du peuple espagnol (conformément à l'article 35 de la Charte), mettant ainsi en application les articles 40 à 47 de la loi du 28 juillet 1933 sur l'ordre public, qui traitent de l'état d'urgence. Le gouvernement conclut que toutes les mesures qu'il a prises l'ont été en stricte application de la loi et n'ont entraîné aucune restriction des droits syndicaux, qui restent garantis en vertu de la loi du 6 décembre 1940. Des procédures judiciaires sont actuellement en cours devant les tribunaux compétents, mais seulement dans les cas les plus sérieux et en ce qui concerne les principaux accusés. Enfin, soutient le gouvernement, il n'y a rien de surprenant à ce que ceux qui se sont trouvés impliqués dans les activités illégales décrites plus haut aient perdu leurs droits en tant que travailleurs à la suite de la rupture unilatérale de leur contrat de travail.
- 141. Le gouvernement déclare dans sa communication du 29 avril qu'« aucune demande n'a été présentée en ce qui concerne les conditions de travail » et que le mouvement «n'avait pas son origine dans un différend du travail au sens de la loi puisque aucune demande ou aucune plainte relative aux conditions dé travail n'a été déposée auprès des services officiels du travail».
- 142. Aux termes du décret du 17 juillet 1948, les syndicats sont représentés par des délégués syndicaux (enlaces sindicales), sauf dans les entreprises où il existe des comités d'entreprise. Les délégués représentent les ouvriers et les techniciens dans leurs relations avec les employeurs et avec les organisations syndicales supérieures; ils sont élus par les membres qu'ils représentent. Le décret du 11 septembre 1953 traite des comités d'entreprise, qui sont des organismes mixtes constituant les unités de base de l'organisation syndicale; leur rôle est de « s'occuper de toutes les réclamations présentées par les travailleurs, les membres du comité eux-mêmes ou l'employeur au sujet de la non-application de la législation du travail ou du non-respect des obligations sociales du capital et du travail» (article 46). Le comité est «l'organe compétent pour transmettre les voeux et demandes que les employés pourraient souhaiter porter à la connaissance de la direction de l'entreprise, ainsi que pour les plaintes que cette dernière pourrait avoir à formuler au sujet de la façon dont les travailleurs s'acquittent de leurs obligations » (article 57).
- 143. Les articles de la Charte du peuple espagnol dont l'application a été suspendue sont les suivants:
- Article 14. - Les Espagnols ont le droit de fixer librement leur résidence à l'intérieur du territoire national.
- Article 15. - Personne ne pourra pénétrer dans la maison d'un Espagnol et la fouiller sans le consentement de celui-ci, si ce n'est avec un mandat de l'autorité compétente, dans les cas et de la façon prévus par les lois.
- Article 18. - Aucun Espagnol ne pourra être détenu si ce n'est dans les cas et de la manière prévus par les lois. Dans un délai de soixante-douze heures, toute personne détenue devra être relâchée ou déférée à l'autorité judiciaire.
- 144. Il ressort de ce qui précède que, selon les trois organisations plaignantes, les grèves ont leur origine dans le refus des employeurs de faire suite aux revendications de salaire des travailleurs et dans le mouvement de solidarité des travailleurs en face de l'attitude patronale. Les allégations formulées font également allusion à la situation économique précaire des travailleurs du secteur impliqué dans la grève. De son côté, le gouvernement nie l'existence de revendications et affirme que les travailleurs ayant participé à la grève bénéficiaient de salaires importants et d'avantages sociaux substantiels; le gouvernement soutient que le mouvement constitue une manoeuvre subversive caractérisée, qui s'est manifestée par un ralentissement délibéré de la production et s'est transformé en une occupation illicite des entreprises. Il convient de signaler ici que le message des détenus de Barcelone qui accompagnait la lettre de la Fédération syndicale mondiale du 7 août 1958 se réfère à une réclamation antérieure des travailleurs formulée par les voies syndicales, mais qui n'aboutit à rien. Les autres communications font apparaître que les travailleurs se sont adressés au syndicat après l'ouverture du conflit, mais qu'il n'en ont reçu aucun appui, les dirigeants syndicaux ayant refusé d'intervenir. Le gouvernement s'abstient de présenter des observations au sujet de cette dernière allégation.
- 145. Il ressort également de ce qui précède que le gouvernement, en face de ces événements, a suspendu certaines garanties de la Charte du peuple espagnol et a arrêté, mobilisé ou déporté un certain nombre de travailleurs. Il semble également que le gouvernement ait pris plusieurs mesures de caractère disciplinaire, non seulement à l'encontre de travailleurs ayant participé à la grève, mais également à l'encontre de travailleurs n'y ayant pas participé. Enfin, les plaignants font allusion de façon répétée aux mauvais traitements et à la torture auxquels auraient été soumis les détenus.
- 146. Si, dans certains cas, le Comité avait conclu que des allégations relatives à des mesures prises à l'encontre de militants syndicalistes ne méritaient pas un examen plus approfondi, c'est après avoir pris connaissance des observations du gouvernement établissant de manière suffisamment précise et circonstanciée que ces mesures n'étaient nullement motivées par des activités d'ordre syndical, mais seulement par des actes dépassant le cadre syndical et qui étaient, soit préjudiciables à l'ordre public, soit de nature politique.
- 147. Etant donné les divergences qui existent entre les informations très complètes fournies par les plaignants, tendant à prouver que la grève avait son origine dans des revendications d'ordre économique, et la déclaration du gouvernement selon laquelle la grève aurait constitué un complot subversif, le Comité recommande au Conseil d'administration de demander au gouvernement de lui fournir des informations plus détaillées sur cet aspect du cas.
- 148. En ce qui concerne les allégations relatives aux mauvais traitements et autres mesures punitives qui auraient été infligés aux travailleurs ayant participé aux grèves, et en ce qui concerne également les procédures légales auxquelles se réfère le gouvernement, le Comité recommande au Conseil d'administration: d'attirer de nouveau l'attention sur l'importance qu'il a toujours attachée à ce que les syndicalistes comme toutes les autres personnes bénéficient des garanties d'une procédure judiciaire régulière conformément au principe contenu dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, et de demander au gouvernement de bien vouloir lui fournir des informations plus détaillées sur ces aspects du cas.
- Allégations relatives à la détention de dirigeants et de membres de certaines organisations syndicales dissoutes
- 149. Dans sa communication en date du 13 août 1956, la Confédération internationale des syndicats libres allègue que les organisations politiques et sociales qui faisaient partie du Front populaire ont été dissoutes le 13 septembre 1936. Une loi a été promulguée le 9 février 1939 dissolvant l'Union générale des travailleurs espagnols, la Confédération nationale du travail et la Solidarité des travailleurs basques; les dirigeants de ces organisations passèrent en jugement, l'un d'entre eux fut condamné à mort, les autres à des peines de prison allant de vingt à trente ans.
- 150. Dans sa communication en date du 30 mai 1958, le gouvernement répète les déclarations qu'il avait faites en réponse à la demande d'informations complémentaires formulée par le Conseil d'administration à sa 130ème session; d'après ces déclarations, aucun dirigeant ni aucun membre des organisations en question ne se trouve en prison en raison de son appartenance auxdites organisations ou en raison de toute autre forme d'activité syndicale.
- 151. Lors de son examen de cet aspect du cas (vingt-huitième rapport du Comité), le Comité avait estimé que la réponse du gouvernement manquait de clarté, les personnes en question pouvant fort bien avoir été emprisonnées pour trahison ou quelque délit analogue. En conséquence, tout en reconnaissant que des accusations devant des tribunaux nationaux invoquant la haute trahison ou des crimes de même nature sortent de la compétence de l'O.I.T, le Comité a estimé que le point de savoir si une telle accusation formulée sur la base de faits et d'allégations mettant en cause l'exercice des droits syndicaux doit être considérée comme une question de haute trahison ou un crime analogue ou comme une question relative à l'exercice des droits syndicaux, ne saurait être tranché unilatéralement par le gouvernement intéressé, de telle façon que le Conseil d'administration soit mis dans l'impossibilité de l'examiner plus avant.
- 152. Le Comité recommande au Conseil d'administration de constater qu'à deux reprises, il avait décidé de solliciter du gouvernement espagnol des informations sur la détention d'anciens membres et dirigeants des organisations syndicales mentionnées dans la plainte. En effet, le Conseil d'administration a approuvé le vingt-septième rapport du Comité, dont le paragraphe 187 i) recommandait:
- de décider qu'il devrait être demandé au gouvernement espagnol d'indiquer si les membres ou les dirigeants de l'Union générale des travailleurs, de la Confédération nationale du travail ou de la Solidarité des travailleurs basques sont toujours détenus et, en attendant de recevoir cette information, de prendre note du présent rapport provisoire.
- De même, le Conseil d'administration a approuvé le vingt-huitième rapport du Comité, dont le paragraphe 110 b) recommandait:
- de demander au gouvernement de l'informer si, pour une raison quelconque, des membres ou des dirigeants de l'Union générale des travailleurs, de la Confédération nationale du travail ou de la Solidarité des travailleurs basques se trouvent détenus dans des pénitenciers ou d'autres lieux et, dans l'affirmative, de lui indiquer sous quel chef d'accusation, quelle est la procédure selon laquelle ils ont été jugés, quelles sont les garanties dont cette procédure est assortie et, dans la mesure du possible, de fournir le texte des jugements rendus.
- La seule réponse que le Conseil d'administration ait reçue du gouvernement espagnol est que:
- aucun dirigeant ni aucun membre des organisations en question ne se trouve en prison en raison de son appartenance auxdites organisations ou en raison de toute autre forme d'activité syndicale.
- 153. Dans ces conditions, le Comité recommande également au Conseil d'administration d'attirer l'attention du gouvernement espagnol sur l'importance qu'il attache à ce que dans tous les cas, y compris lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques ou criminels que le gouvernement considère comme étant étrangers à leurs activités syndicales, les personnes en question soient jugées promptement par une autorité judiciaire impartiale et indépendante.
- Allégations relatives aux « détenus sociaux »
- 154. L'Union générale des travailleurs espagnols en exil a fourni, le 17 décembre 1957, des informations complémentaires à l'appui des allégations qu'elle avait formulées le 22 août 1956, relatives à l'emprisonnement de diverses personnes comme « détenus sociaux ». Dans cette communication, les plaignants citent mot pour mot le verdict passé le 10 décembre 1948 par une cour martiale ordinaire après un procès sommaire et concernant Emilio Salgado Moreira, convaincu de rébellion militaire. Le jugement déclarait que M. Moreira avait constitué en 1945, avec Eduardo Villegas, Vicente Orche et Leopoldo Mejorada, le Comité exécutif national du Parti socialiste des travailleurs espagnols. L'accusé assumait le rôle de secrétaire à la presse et à la propagande; il avait fait l'acquisition d'une presse à imprimer dont il se servait pour imprimer la revue clandestine Socialista, les publications de l'Union générale des travailleurs et du mouvement « Renovación »; il a enfin reproduit des extraits d'un discours prononcé à Mexico par Prieto et imprimé des sauf-conduits. En 1946, Salgado a représenté le parti socialiste espagnol à un congrès tenu à Paris. Il a ensuite travaillé à la section des archives de l'Union générale des travailleurs en France et a reçu de l'argent pour le compte de l'organisation connue sous le nom d'« Aide au parti socialiste espagnol en exil ». Il est ensuite retourné en Espagne et a été arrêté en août 1947. Après être passé en jugement pour violation de l'article 288 du Code de justice militaire et de l'article 1 de la loi du 2 mars 1923, M. Salgado a été condamné à vingt-cinq ans de prison pour le crime de rébellion militaire. Cette condamnation a été confirmée par un décret passé par les autorités judiciaires.
- 155. Dans cette même communication de l'Union générale des travailleurs espagnols en exil, il est brièvement fait allusion à Eduardo Villegas; il y est dit que le gouvernement espagnol n'a fourni aucun élément de preuve pour étayer les accusations portées contre l'intéressé. Il est nié que Villegas ait persécuté des employés de la Banque hypothécaire, comme l'allègue le gouvernement; il est dit, enfin, que l'intéressé a été arrêté dans des conditions contraires au droit international puisqu'il se trouvait à bord d'une automobile de l'ambassade des Etats-Unis et quittait Madrid en compagnie d'un fonctionnaire de cette ambassade.
- 156. Le 6 mai 1958, l'Union générale des travailleurs espagnols en exil a déclaré que Félix Carrasquer, dirigeant syndical, avait été arrêté en 1946 sous prétexte qu'il était secrétaire régional pour la Catalogne de la Confédération nationale du travail; il a été libéré sur parole en 1947. Au cours de la même année, il aurait été arrêté de nouveau, accusé cette fois d'être membre du Comité de la Confédération nationale du travail à Madrid. Il aurait été condamné à trente ans de prison, peine qui aurait été ultérieurement ramenée à vingt ans.
- 157. Dans une lettre en date du 15 octobre 1957 répondant aux allégations formulées par l'Union générale des travailleurs espagnols en exil dans sa communication du 22 août 1956, le gouvernement déclare que M. Eduardo Villegas avait été condamné en 1934 pour activités révolutionnaires et qu'entre 1936 et 1939, il a sauvagement persécuté certains employés de la Banque hypothécaire, activité qui lui valut une seconde peine qui s'est achevée en 1944. En 1946, il a été condamné pour incitation à la violence et à la révolte ainsi que pour avoir dirigé une imprimerie clandestine qui publiait des tracts subversifs n'ayant rien à voir avec des questions syndicales. En ce qui concerne Emilio Salgado Moreira, le gouvernement déclare que la personne détenue avait fait des perquisitions et avait « réquisitionné » des bijoux durant la période 1936-1939.
- 158. Dans son vingt-septième rapport (paragraphe 153), le Comité avait noté que le gouvernement avait donné une réponse complète d'où il paraissait ressortir que les personnes intéressées avaient été condamnées par les tribunaux compétents conformément à la procédure judiciaire. En conséquence, il avait estimé que les plaignants n'avaient pas apporté de preuves suffisantes pour montrer que les personnes intéressées n'avaient pas bénéficié des garanties d'une procédure judiciaire régulière ou qu'elles avaient été condamnées en raison de leurs activités syndicales.
- 159. Les informations complémentaires fournies le 17 décembre 1957 par les plaignants au sujet de M. Salgado Moreira, bien qu'étant beaucoup plus détaillées que celles fournies par le gouvernement, ne sont pas suffisantes pour infirmer les conclusions auxquelles le Comité avait abouti dans son vingt-septième rapport. En fait, le texte du jugement établit que tant Salgado que Villegas ont été condamnés au premier chef pour des activités politiques.
- 160. Dans ces conditions, le Comité a estimé qu'en l'occurrence, les plaignants n'ont pas apporté de preuves suffisantes pour montrer que les personnes intéressées ont été condamnées en raison de leurs fonctions ou de leurs activités syndicales et qu'en conséquence, il n'y a pas lieu d'examiner plus avant cet aspect du cas.
- 161. En ce qui concerne le cas de Félix Carrasquer, le gouvernement n'a pas encore présenté d'observations; en conséquence, le Comité a chargé le Directeur général d'obtenir du gouvernement des informations sur cet aspect du cas avant de formuler à son sujet ses recommandations au Conseil d'administration.
- Allégations relatives aux mesures prises à l'encontre de grévistes, et à l'arrestation de syndicalistes
- 162. Dans sa communication en date du 12 décembre 1957, l'Union générale des travailleurs espagnols en exil se réfère aux mesures qui auraient été prises à l'encontre de travailleurs des chantiers de construction navale de Sestao et des mineurs du puits Maria Luisa à la suite de grèves.
- 163. Dans une lettre en date du 15 mai 1958, la Fédération syndicale mondiale allègue que quarante-quatre citoyens espagnols auraient été arrêtés le 28 janvier de cette année sous prétexte qu'ils auraient assisté au Festival mondial de la jeunesse. Parmi les personnes arrêtées, se trouveraient plusieurs dirigeants syndicaux n'ayant en rien pris part audit festival.
- 164. Ces allégations ont été dûment transmises au gouvernement; celui-ci n'a toutefois pas encore fait parvenir ses observations à leur sujet. Dans ces conditions, le Comité a chargé le Directeur général de demander au gouvernement de bien vouloir présenter sur elles ses observations avant de formuler à leur sujet ses recommandations au Conseil d'administration.
- Allégations relatives à l'imposition de sanctions pénales pour tentative d'organisation de syndicats
- 165. Dans sa communication en date du 6 mai 1958, l'Union générale des travailleurs espagnols en exil a fourni des informations complémentaires d'où il ressort qu'en 1945, dix-huit travailleurs ont été arrêtés à Bilbao pour tentative d'association illicite. Selon les déclarations du ministère public, les accusés auraient reçu des fonds du Mexique et leurs activités auraient visé à la reconstitution de l'Union générale des travailleurs, ce qui constituerait le délit d'association illicite puni en vertu de l'article 174 (1) du Code pénal. L'organisation plaignante ne donne pas les noms des personnes poursuivies. Le gouvernement, dans sa lettre datée du 17 octobre 1958, bien que ne se référant pas expressément à ces allégations, déclare n'avoir jamais contesté que le Code pénal espagnol définit et punit en tant que délit les tentatives de reconstitution de ligues dissoutes. Par suite, conclut le gouvernement, ceux qui prennent part à des activités de cette nature se rendent passibles des peines prévues par le Code.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- 166. Lors de son examen du cas à sa 18ème session (Genève, 1957), le Comité avait examiné en détail la plainte principale, à laquelle se rapportent les informations complémentaires aujourd'hui soumises par le plaignant. Il avait à cette occasion abouti à certaines conclusions qui figurent aux paragraphes 144 et 187 (2) de son vingt-septième rapport (Genève, novembre 1957) et selon lesquelles «cette situation n'est pas compatible avec le principe généralement reconnu d'après lequel les travailleurs et les employeurs doivent avoir le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix ». Les informations complémentaires soumises aujourd'hui au Comité ne se rapportant qu'à un nouvel exemple d'application de la législation pénale, laquelle a été déjà examinée quant au fond, le Comité recommande au Conseil d'administration de réaffirmer les conclusions auxquelles il avait abouti antérieurement à cet égard.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 167. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:
- a) de décider, en ce qui concerne la législation relative aux conventions collectives:
- i) de noter qu'à la suite de la promulgation de la loi sur les conventions collectives, l'autorisation administrative préalable pour entreprendre des négociations et pour conclure des conventions collectives n'est pas nécessaire;
- ii) de noter qu'il est nécessaire, une fois conclues, de soumettre les conventions aux autorités compétentes pour approbation, et que les conventions qui ne sont pas approuvées n'entrent pas en vigueur;
- iii) d'attirer l'attention sur l'incompatibilité d'une telle disposition avec le développement et l'utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs ou les organisations d'employeurs, d'une part, et les organisations de travailleurs, d'autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi;
- iv) de demander au gouvernement espagnol de bien vouloir informer le Conseil d'administration de la proportion des cas où les conventions collectives ne sont pas approuvées dans la forme où elles avaient été présentées, des circonstances dans lesquelles lesdites conventions n'ont pas été approuvées et, d'une manière générale, des mesures prises dans ce domaine;
- b) de décider, en ce qui concerne les allégations relatives aux conséquences pour la liberté syndicale de l'interdiction du droit de grève:
- i) de prendre note de la déclaration du gouvernement selon laquelle les travailleurs ne sauraient être punis en vertu de l'article 222 du Code pénal pour le simple fait d'avoir abandonné leur travail;
- ii) de demander au gouvernement espagnol, étant donné que la relation entre les «arrêts du travail » et la « grève » ne paraît pas parfaitement claire et que les dispositions pénales relatives aux grèves paraissent être rédigées en des termes si larges qu'elles sont susceptibles d'une application incompatible avec la liberté syndicale, d'indiquer au Conseil d'administration si les mesures nécessaires ont été prises pour que les autorités chargées d'engager des procédures légales apprécient pleinement la portée de la loi;
- iii) de demander au gouvernement s'il étudie la possibilité d'amender les dispositions du Code pénal, de la Charte du travail et de la loi sur la sécurité de l'Etat relatives à l'interdiction de la grève, mentionnées au paragraphe 127 ci-dessus, à la lumière de la politique énoncée par lui;
- c) de décider, en ce qui concerne les allégations relatives à la détention de membres et de dirigeants de certaines organisations syndicales dissoutes:
- i) de constater qu'à deux reprises, il avait décidé de demander à cet égard des informations au gouvernement espagnol et que celui-ci s'est borné à répondre qu'«aucun dirigeant ni aucun membre des organisations en question ne se trouve en prison en raison de son appartenance auxdites organisations ou en raison de toute autre forme d'activité syndicale »;
- ii) d'attirer, dans ces conditions, l'attention du gouvernement sur l'importance qu'il a toujours attachée à ce que, dans tous les cas, y compris lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques ou criminels que le gouvernement considère comme étrangers à leurs activités syndicales, les personnes en question soient jugées promptement par une autorité judiciaire impartiale et indépendante;
- d) de décider, en ce qui concerne les allégations relatives aux sanctions pénales infligées pour tentative d'organisation de syndicats, de réaffirmer la conclusion contenue aux paragraphes 144 et 187 (b) du vingt-septième rapport du Comité selon laquelle la situation n'est pas compatible avec le principe généralement reconnu d'après lequel les travailleurs et les employeurs doivent avoir le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix et de s'y affilier;
- e) de décider, en ce qui concerne les allégations relatives à certains « détenus sociaux», que les plaignants n'ont pas apporté de preuves suffisantes pour montrer que les personnes intéressées ont été condamnées en raison de leurs fonctions ou de leurs activités syndicales et qu'en conséquence, il n'y a pas lieu d'examiner plus avant ces allégations;
- f) de décider, en ce qui concerne les allégations relatives aux grèves de mars 1958:
- i) de demander au gouvernement, pour les raisons indiquées au paragraphe 146 ci-dessus et étant donné les divergences qui existent entre les informations détaillées fournies par les plaignants tendant à prouver que la grève avait une origine économique et l'affirmation du gouvernement selon laquelle la grève aurait constitué un complot subversif, de lui fournir des informations plus détaillées sur cet aspect du cas;
- ii) de décider, en ce qui concerne les allégations relatives aux mauvais traitements et autres mesures punitives qui auraient été infligés aux travailleurs ayant participé aux grèves mentionnées ci-dessus, et tenant compte des procédures légales que le gouvernement dit être en cours, de souligner de nouveau l'importance qu'il a toujours attachée à ce que les syndicalistes, comme toutes les autres personnes, bénéficient des garanties d'une procédure judiciaire régulière conformément aux principes contenus dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, et de demander au gouvernement de fournir des informations plus détaillées sur cet aspect du cas;
- g) de prendre note du présent rapport intérimaire en ce qui concerne les aspects du cas restés en suspens, étant entendu que le Comité fera de nouveau rapport lorsqu'il sera en possession des observations sollicitées du gouvernement.