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  1. 327. La plainte initiale du Congrès des syndicats africains de Rhodésie du Sud (A.T.U.C.S.R.) est contenue dans quatre communications adressées directement au B.I.T le 15 mai, le 21 mai, le 23 mai et le 13 août 1962. Le gouvernement a présenté ses observations sur les trois premières communications par une lettre datée du 7 août 1962.
  2. 328. Ces documents se trouvaient entre les mains du Comité lorsqu'il a examiné le cas à sa session d'octobre 1962, et le Comité a soumis au Conseil d'administration les conclusions figurant aux paragraphes 510 à 550 de son soixante-sixième rapport, qui a été approuvé par le Conseil d'administration le 8 novembre 1962, au cours de sa 153ème session.
  3. 329. Dans ce rapport, le Comité soumettait au Conseil d'administration son rapport définitif quant à certaines allégations relatives aux limitations apportées par la loi de 1959 sur la conciliation dans l'industrie, au droit des syndicats d'élaborer librement leurs statuts et règlements, au refus du droit de s'organiser à certaines catégories de travailleurs, aux restrictions qui seraient apportées aux réunions syndicales, et aux inspecteurs du travail. Il a soumis un rapport provisoire en ce qui concerne les allégations relatives à l'utilisation de la loi sur le maintien de la légalité et de l'ordre public dans le but d'apporter des restrictions à l'activité syndicale et les allégations relatives à la répression de la grève déclenchée le 14 mai 1962, au sujet desquelles il a invité le gouvernement à fournir des informations complémentaires.
  4. 330. Depuis lors, deux nouvelles communications ont été adressées au B.I.T par le Congrès des syndicats africains de Rhodésie du Sud - la première consistant en une copie d'une lettre qu'il a adressée au fonctionnaire de l'enregistrement dans les questions de travail (Industrial Registrar) le 30 septembre 1962, la seconde, en une lettre adressée au B.I.T le 13 février 1963. La Confédération internationale des syndicats libres (C.I.S.L.) a soumis une plainte au B.I.T le 7 décembre 1962.
  5. 331. Par une communication en date du 10 mai 1963, le gouvernement du Royaume-Uni a fourni des informations complémentaires, comme il en avait été prié par le Comité, sur les allégations restant à examiner, mentionnées au paragraphe 329, en même temps que ses observations sur les dernières communications, mentionnées au paragraphe 330; le présent rapport du Comité est limité à ces questions restant à résoudre.
  6. 332. Le Royaume-Uni a ratifié la convention sur le droit d'association (territoires non métropolitains), 1947 (no 84), et s'est engagé, avec l'accord du gouvernement de la Rhodésie du Sud, à en appliquer les dispositions, sans modification, en Rhodésie du Sud. Le gouvernement du Royaume-Uni a également ratifié la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 (no 87), et la convention sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949 (no 98), mais a réservé sa décision quant à l'application de ces conventions en Rhodésie du Sud.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  • Allégations relatives à l'utilisation de la loi sur le maintien de la légalité et de l'ordre public ainsi que de la loi sur les organisations illégales pour restreindre la liberté syndicale
    1. 333 Selon le Congrès des syndicats africains de Rhodésie du Sud, le gouvernement utilise les lois pour supprimer les activités syndicales; en vue d'intimider les travailleurs, on a malmené des secrétaires chargés de travaux d'organisation dans l'exercice de leurs fonctions au sein de leurs organisations; le 7 mai 1962, le secrétaire général du Congrès, M. J. T. Maluleke, a été arrêté alors qu'il haranguait des travailleurs en grève.
    2. 334 Dans sa réponse, datée du 7 août 1962, le gouvernement déclarait que le but de la loi est d'assurer la protection de la collectivité dans son ensemble contre toute action illégale entreprise en vue de troubler l'ordre public et l'exécution de la loi, et que, en tant que partie intégrante de la communauté, les syndicats sont soumis aux restrictions applicables au public en général. A aucun moment, a déclaré le gouvernement, la loi ni aucun autre instrument législatif similaire n'ont été appliqués de manière à restreindre les activités syndicales authentiques ou à intimider les travailleurs.
    3. 335 Le gouvernement a déclaré que M. Maluleke a été arrêté, non parce qu'il haranguait des grévistes, mais parce que, dans sa harangue, il a prononcé des paroles considérées comme subversives ou de nature à troubler la paix. Le gouvernement a ajouté que l'affaire était en instance et que l'intéressé avait été libéré en attendant que son cas soit examiné par la Cour suprême.
    4. 336 A sa session d'octobre 1962, le Comité a observé que les allégations des plaignants concernant l'application de la loi sur le maintien de la légalité et de l'ordre public sont conçues en termes vagues et ont été formellement démenties par le gouvernement, qui a déclaré que la loi n'avait jamais été utilisée pour restreindre les activités syndicales. Il ne restait qu'un fait précis: l'arrestation de M. Maluleke et l'affaire en instance contre lui.
    5. 337 Le Comité a observé que, dans le passé, il a suivi la règle de ne pas procéder à l'examen d'affaires faisant l'objet d'une action judiciaire pendante, pourvu que la procédure suivie fût assortie de garanties convenables d'une procédure judiciaire régulière, lorsque la procédure était de nature à fournir des informations utiles au Comité pour l'appréciation du bien-fondé des allégations. Dans ces conditions, le Comité a demandé au gouvernement de bien vouloir fournir des informations en temps utile sur l'issue des procédures engagées, en y joignant le texte du jugement rendu.
    6. 338 De nouvelles allégations concernant la loi de 1960 sur le maintien de la légalité et de l'ordre public ont été présentées par la C.I.S.L dans sa communication en date du 7 décembre 1962. La C.I.S.L se réfère aux articles 8 à 13 de la loi de 1960 et à l'article 10 de la loi modificatrice de 1962, qui confèrent au ministre, au juge de première instance ou à un fonctionnaire de police le pouvoir d'interdire des cortèges publics, des rassemblements ou des réunions publiques, s'il estime ou a des raisons plausibles de croire qu'une atteinte à la tranquillité publique ou des désordres sont à prévoir, à l'article 29 de la loi modificatrice de 1962, qui autorise le ministre à interdire à une personne le séjour dans une certaine zone ou à lui assigner une résidence, si elle a été condamnée pour délit en relation avec l'ordre public, à l'article 29 de la loi de 1960, qui punit l'incitation à la grève dans un service essentiel, à l'article 15, autorisant la police à pénétrer dans tout local où elle estime, pour des motifs plausibles, qu'une atteinte à la tranquillité publique est à prévoir, aux articles 16, 19 et 39 de la loi de 1960, interdisant les publications contraires à la sécurité publique, le déploiement de drapeaux, pancartes, etc., en un lieu public où ils sont de nature à causer des désordres ou une action de grève, et la publication de déclaration de nature à encourager une personne à commettre un acte pouvant mettre en danger la sécurité publique ou troubler l'ordre public, et à la section 5 de la loi de 1962, prescrivant la tenue de procès-verbaux de réunions publiques.
    7. 339 Le plaignant cite aussi certaines dispositions de la loi de 1959 sur les organisations illégales. L'article 3 confère au gouverneur le pouvoir de déclarer illégale une organisation, lorsqu'il estime que l'activité de cette organisation ou de membres de cette organisation est de nature à nuire à l'ordre public ou trouble la tranquillité. D'autres articles cités concernent les infractions en relation avec une organisation après qu'elle a été déclarée illégale.
    8. 340 Le gouvernement présente des observations sur le cas de M. Maluleke et sur la plainte formulée par la C.I.S.L dans sa communication en date du 10 mai 1963.
    9. 341 Le gouvernement déclare que la loi sur le maintien de la légalité et de l'ordre publie et la loi sur les organisations illégales ont pour objet d'assurer l'ordre public et ne sont pas dirigées contre les activités syndicales authentiques, mais les membres des syndicats, comme tous les membres de la collectivité, sont tenus de respecter cette législation de sécurité. De l'avis du gouvernement, la C.I.S.L n'a fourni aucune preuve que ces lois aient été utilisées contre les syndicats, l'interdiction des grèves dans les services publics étant accompagnée de procédures pour le règlement de différends par arbitrage. Le gouvernement rappelle au Comité que la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 (no 87), et la convention sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949 (no 98), ne sont pas applicables à la Rhodésie du Sud. Cette législation, déclare le gouvernement, n'intervient pas dans le fonctionnement des syndicats de la Rhodésie du Sud, où la politique officielle consiste à encourager le développement de syndicats libres sous le régime de la loi sur la conciliation dans l'industrie. Il existe actuellement cinquante-deux syndicats enregistrés et soixante-dix-sept conseils industriels mixtes qui, en trois ans, ont obtenu une augmentation de 50 pour cent du salaire minimum dans la plupart des industries.
    10. 342 Quant au cas de M. Maluleke, le gouvernement rectifie son information antérieure que l'affaire était pendante devant la Cour suprême; en réalité, il s'agissait du tribunal de première instance. Le 8 septembre 1962, M. Maluleke a été reconnu coupable, selon l'article 32 d) en liaison avec l'article 39 (1) a) ii) et v) de la loi sur le maintien de la légalité et de l'ordre public, d'avoir prononcé devant une assemblée une harangue contenant les mots « un temps viendra où vous devrez combattre la police ». Il a été condamné à une amende de 10 livres ou, à défaut de paiement, à un emprisonnement de quatorze jours avec travail disciplinaire, et à un emprisonnement de deux mois avec travail disciplinaire, le sursis étant accordé pour trois ans quant à cette deuxième peine, à condition qu'il ne soit pas condamné pour le même délit durant cette période.
    11. 343 Si un certain nombre des dispositions de la loi sur le maintien de la légalité et de l'ordre public et de la loi sur les organisations illégales, auxquelles les syndicats et leurs membres, comme le déclare le gouvernement, sont soumis aussi bien que les autres membres de la collectivité, peuvent dans certaines circonstances, appliquées aux syndicats et à leurs membres, exiger un examen du point de vue de leur effet sur l'exercice des droits syndicaux, aucun exemple caractéristique de l'application des articles, des textes cités dans les plaintes, à part le cas de M. Maluleke, n'a été apporté par l'un ou l'autre des plaignants.
    12. 344 M. Maluleke a été poursuivi en vertu de la loi sur le maintien de la légalité et de l'ordre public, mais il semble, d'après la réponse du gouvernement, qu'il a été convaincu par un tribunal ordinaire d'avoir prononcé dans une harangue aux grévistes les mots « un temps viendra où vous devrez combattre la police », propos subversifs qui semblent bien aller au-delà de ce qu'un chef syndical, comme toute autre personne, peut prononcer en public sans encourir de sanctions pénales, contre lesquelles aucun privilège ne peut être invoqué en raison du statut syndical de l'intéressé. En conséquence, le Comité ne considère pas que l'application des dispositions de la loi sur le maintien de la légalité et de l'ordre public, dans ce cas particulier, constitue une violation du droit syndical.
    13. 345 Dans ces conditions, le Comité, sous réserve de la possibilité d'avoir à connaître des allégations qui pourraient à l'avenir lui être présentées au sujet de l'application de cette législation de sécurité aux syndicats ou à leurs membres, recommande au Conseil d'administration de décider que ces allégations ne donnent pas lieu à complément d'examen.
  • Allégations relatives aux restrictions qui seraient apportées au droit de réunions syndicales
    1. 346 Aux paragraphes 529 à 537 de son soixante-sixième rapport, le Comité a examiné les allégations selon lesquelles, aux termes de la loi sur le maintien de la légalité et de l'ordre public, une autorisation préalable est nécessaire pour la tenue d'une réunion, et des membres de la police assistent et interviennent à cette réunion et que les autorités locales exigent des dépôts trop élevés comme caution lorsque des réunions sont tenues. Le Comité a recommandé au Conseil d'administration de décider que la partie de ces allégations qui concerne les conditions de location imposées par les autorités locales n'exigeait pas de complément d'information, mais, quant aux autres aspects de ces allégations, d'attirer l'attention du gouvernement sur le fait que la présence de fonctionnaires de la police à des réunions syndicales pouvait être considérée comme une intervention dans le droit des syndicats de tenir librement des réunions, interventions dont les autorités devraient s'abstenir.
    2. 347 Depuis lors, le Congrès des syndicats africains de Rhodésie du Sud a fourni de nouvelles informations sur ces points; le Comité a donc à considérer s'il y a été apporté de nouveaux éléments de nature à décider le Comité à rouvrir un aspect du cas, qui autrement aurait été considéré comme clos, et à continuer l'examen.
    3. 348 D'abord, le Congrès des syndicats africains de Rhodésie du Sud a fait parvenir copie d'une lettre qu'il a adressée le 30 novembre 1962 au fonctionnaire de l'enregistrement dans les questions de travail de la Rhodésie du Sud. Dans cette lettre, l'organisation se plaint que trois essais de son conseil régional de Gwelo de louer une salle pour une réunion syndicale ont échoué parce que la police a refusé l'autorisation de tenir la réunion, et un quatrième essai, parce que l'autorité locale a demandé 15 livres pour l'assurance et 2 livres pour la location du local. Le Congrès déclare que, si toutes les autorités appliquaient ces règles, cela représenterait un paiement accablant de 13.050 livres pour que les vingt-neuf syndicats affiliés puissent tenir chacun trente réunions dans les trente régions.
    4. 349 En second lieu, de nouvelles allégations sont présentées dans la communication de cette organisation en date du 13 février 1963. Il est allégué que, lorsque l'organisation a tenu sa conférence les 20 et 21 octobre 1962 et que le conseil général s'est réuni les 19 et 20 janvier 1963, la police a exigé la clôture des réunions avant que toutes les affaires aient été réglées, menaçant de la dissoudre par la force. Ces conférences et réunions du conseil général - déclarent les plaignants - sont des réunions de membres strictement privées, et il n'existe pas de loi autorisant la police à exiger une demande d'autorisation pour tenir ces réunions et la communication des noms des orateurs et de l'ordre du jour, ou les autorisant à placer des magnétophones.
    5. 350 Le gouvernement a envoyé copie de la réponse du Secrétaire du travail à la lettre mentionnée au paragraphe 348. Il est indiqué qu'un dépôt de 15 livres est exigé d'une organisation, plus 2 livres de location, lorsque l'organisation désire faire usage de la grande salle municipale de Gwelo pour une réunion publique se prolongeant après trois heures de l'après-midi, ce dépôt étant restitué si aucun dégât n'a été causé. Si la salle de jeu, qui peut contenir cent cinquante personnes, est utilisée, aucun dépôt n'est exigé. Aucune autre autorité locale n'exige un dépôt en sus du prix de location. Les seules réunions pour lesquelles le Congrès ait demandé une autorisation dans les régions de Gwelo depuis mai 1962 - déclare le gouvernement - ont eu lieu dans la salle de jeu, le 15 septembre 1962, pour laquelle l'autorisation a été accordée, et la réunion mentionnée au paragraphe 348, le 17 septembre, dans la grande salle, réunion que le secrétaire local de l'organisation plaignante a annulée parce qu'il ne pouvait fournir le dépôt. Le gouvernement mentionne cependant, sans la réfuter, une déclaration du comité organisateur du Syndicat à Gwelo, selon laquelle, lorsqu'il a cherché à louer la grande salle pour une réunion le 1er décembre 1962, « l'autorité a refusé l'autorisation parce que l'ordre du jour et les orateurs désignés étaient susceptibles d'être changés ».
    6. 351 Dans sa communication datée du 10 mai 1963, le gouvernement commente la communication du Congrès en date du 13 février 1963. Le gouvernement déclare que la police était présente à la réunion tenue les 20 et 21 octobre 1962 parce qu'il y avait des raisons de croire que des troubles se produiraient; pour cette raison, la législation de sécurité a été invoquée et l'autorisation donnée pour tenir la réunion; l'heure de clôture indiquée dans l'autorisation était l'heure indiquée par le Congrès comme étant celle à laquelle la réunion prendrait fin et correspondait à la durée pour laquelle l'organisation avait loué le local. A la même heure, la réunion a pris fin sans incident, déclare le gouvernement, et l'allégation que la police a mis fin à la réunion et a proféré des menaces n'est pas fondée. Le gouvernement nie que la police ait été présente aux réunions tenues les 19 et 20 janvier 1963.
    7. 352 En conclusion, le gouvernement déclare: « La surveillance limitée qui a été exercée pour une période relativement courte a été supprimée, et la loi modificatrice de 1963 sur le maintien de la légalité et de l'ordre public, qui prévoit la surveillance des réunions devant se tenir un dimanche ou un jour de fête, exclut maintenant expressément les réunions privées ou publiques tenues par des syndicats enregistrés à des fins syndicales authentiques. La surveillance ne s'exerce pas non plus sur les réunions privées d'organisations syndicales non enregistrées, à la condition que le nombre des participants ne dépasse pas deux cents. »
    8. 353 Les faits complémentaires mentionnés en ce qui concerne les conditions régissant la location de locaux pour des réunions syndicales n'ajoutent aucun élément nouveau à ceux qui sont mentionnés au paragraphe 532 du soixante-sixième rapport du Comité, sur lesquels le Comité s'est fondé pour conclure que cet aspect de l'affaire n'exigeait pas de complément d'information. En conséquence, le Comité juge superflu de rouvrir la question.
    9. 354 La situation quant à l'étendue des restrictions auxquelles peuvent être sujettes les réunions syndicales privées n'est pas claire. Le Congrès maintient que, pendant cette dernière année, ses conférences et même les réunions de son conseil général, qu'il présente comme des réunions de membres privées, ont été soumises à l'obligation d'obtenir l'autorisation par les autorités, de communiquer les noms des orateurs et l'ordre du jour et de tolérer l'installation de magnétophones lorsqu'une réunion est tenue. Le gouvernement lui-même, dans sa dernière communication, se réfère sans autre commentaire à une allégation du secrétaire organisateur de réunions selon laquelle l'autorisation de tenir une réunion a été refusée parce que l'ordre du jour et les orateurs annoncés étaient susceptibles d'être changés. Ces restrictions, si réellement elles sont appliquées aux réunions syndicales privées, sembleraient incompatibles avec le droit généralement reconnu des syndicats de tenir librement des réunions. Le fait que la présence de fonctionnaires de la police aux réunions syndicales peut aussi constituer une atteinte à ce droit a été porté, par le Conseil d'administration, à l'attention du gouvernement, lorsque le soixante-sixième rapport du Comité a été adopté. Cependant, le gouvernement se réfère maintenant à une nouvelle loi - la loi modificatrice de 1963 sur le maintien de la légalité et de l'ordre public - et déclare que la surveillance limitée qui a été exercée pendant une période relativement courte a maintenant été supprimée, mais il ne précise pas la nature de la surveillance mentionnée.
    10. 355 Dans ces conditions, prenant en considération la nouvelle législation mentionnée par le gouvernement, le Comité invite le gouvernement à lui faire savoir si les réunions, conférences, réunions de conseil ou de comité d'un syndicat, de caractère privé, sont soumises à l'autorisation de la police ou d'une autre autorité, et si la police peut y assister, si leurs ordres du jour et les noms des orateurs doivent être annoncés d'avance, de sorte qu'aucun autre point d'intérêt syndical ne puisse être ajouté à l'ordre du jour et qu'aucune autre personne ne puisse être autorisée à parler, conformément aux règlements du syndicat, et si les débats doivent être enregistrés par magnétophone. En raison aussi de l'allusion du gouvernement au fait que la surveillance ne s'applique pas aux réunions de syndicats non enregistrés lorsque le nombre des assistants n'excède pas deux cents, le Comité, considérant que le fait que l'enregistrement, bien que présentant des avantages, n'est pas obligatoire, de sorte que des organisations authentiques peuvent préférer ne pas se faire enregistrer, demande d'expliquer pourquoi une distinction est apparemment faite en ce qui concerne la liberté des réunions de ces organisations.
  • Allégations relatives à la répression de la grève du 14 mai 1962
    1. 356 Les plaignants allèguent qu'à la suite d'une grève déclenchée le 14 mai 1962 pour protester contre l'intervention de la police dans les activités syndicales et, d'une manière générale, contre l'attitude antisyndicale du gouvernement, l'armée et la police ont malmené les grévistes, qu'il y aurait eu une fusillade qui aurait fait quatre morts et de nombreux blessés, enfin, que plus de trois mille grévistes auraient été congédiés de leur emploi.
    2. 357 Dans sa réponse, datée du 7 août 1962, le gouvernement donnait de ces incidents la version suivante: le 13 mai 1962, a été proclamé un arrêt général du travail de vingt-quatre heures pour le jour suivant comme « coup de semonce au gouvernement... pour des salaires meilleurs aux travailleurs africains ». Le lundi 14 mai, déclarait le gouvernement, il a paru évident, dès les premières heures de la matinée, qu'un plan concerté d'intimidation et d'attaque avait été élaboré pour empêcher les travailleurs de se rendre à leur travail. La police reçut l'ordre d'assurer la protection des travailleurs qui se rendaient à leur travail et cet ordre fut exécuté. En dépit des mesures d'intimidation et des menaces de violences contre leur famille, environ 80 pour cent des travailleurs se rendirent à leur travail. Aucun travailleur ne fut contraint d'évacuer sa maison ou d'aller travailler.
    3. 358 L'échec de cette grève - poursuit le gouvernement - incita les agitateurs à intensifier leur campagne d'agitation et, dans l'après-midi, il fut nécessaire de recourir à la force contre ceux qui molestaient les travailleurs revenant de leur travail et menaçaient leur vie et leurs biens. « La police dut faire usage à six reprises d'armes à feu, provoquant la mort de deux personnes et en blessant dix autres, membres de bandes qui menaçaient les travailleurs respectueux de la loi, revenant de leur travail.» Un nombre limité de militaires fut également mis sur pied vers la fin de l'après-midi du 14 mai pour protéger les travailleurs retournant à leur foyer.
    4. 359 En ce qui concerne les licenciements mentionnés par les plaignants, le gouvernement déclare que de nombreux employeurs, « exaspérés par les agissements » des grévistes, congédièrent immédiatement tous les travailleurs qui n'avaient pas été à leur poste le lundi 14 mai 1962. Le gouvernement indiquait que, tout en appuyant cette mesure des employeurs, les organisations d'employeurs conseillèrent l'examen de chaque cas individuel et la réintégration des intéressés si l'employeur était convaincu qu'un travailleur donné avait fait l'objet de mesures d'intimidation ou de menaces de représailles au cas où il se rendrait à son travail. Le gouvernement ne disposait pas de chiffres exacts, mais des employeurs estimaient que le nombre des grévistes ayant perdu leur emploi ne dépassait pas cent cinquante. Plusieurs travailleurs avaient déjà été réintégrés.
    5. 360 Le Comité a souligné, à sa session d'octobre 1962, qu'il avait toujours appliqué le principe selon lequel les allégations concernant le droit de grève n'échappaient pas à sa compétence dans la mesure, mais seulement dans la mesure, où elles mettent en cause l'exercice des droits syndicaux et a recommandé au Conseil d'administration, en de nombreuses occasions, d'affirmer que le droit de grève des travailleurs et des organisations de travailleurs constitue un moyen essentiel de défendre et de promouvoir leurs intérêts professionnels. Le Comité a toutefois rejeté les allégations relatives à des grèves dépourvues de caractère professionnel ou qui avaient pour but d'exercer une pression sur le gouvernement en matière politique ou qui étaient dirigées contre la politique du gouvernement sans avoir « pour objet un conflit du travail ».
    6. 361 Dans le présent cas, tandis que les grévistes donnaient pour motifs de la grève l'intervention de la police dans l'activité syndicale, les bas salaires et les mauvaises conditions d'emploi, le gouvernement lui-même déclarait que la raison avouée de la grève était de lui donner un avertissement afin d'obtenir de meilleurs salaires pour les travailleurs africains. La grève semblait avoir été une grève générale organisée par l'Organisation centrale des travailleurs africains et, de ce fait, le gouvernement pouvait avoir été partiellement visé, en sa qualité d'employeur, dans les réclamations concernant l'obtention de meilleurs salaires. Ce fait, semblait-il au Comité, étant donné l'opinion exprimée par lui dans le cas no 221, concernant Aden, dans des circonstances ayant certains points d'analogie avec le présent cas, pouvait rendre douteux que les allégations puissent être rejetées dès le début pour le motif que la grève n'avait pas pour objet un conflit du travail.
    7. 362 Avant de poursuivre l'examen de cet aspect de la question ou de l'affirmation du gouvernement selon laquelle les incidents violents qui se sont produits ont été causés par le fait que la police a été obligée de protéger les non-grévistes contre des intimidations illégales, le Comité remarquait que certaines personnes - quatre selon les plaignants, deux selon le gouvernement - ont été tuées lorsque la police a tiré sur les grévistes, et rappelait au paragraphe 544 de son soixante-sixième rapport que, dans les cas où la dispersion d'assemblées publiques, etc., par la police pour des raisons d'ordre public ou des raisons similaires a entraîné la perte de vies humaines, il a attaché une importance particulière à ce qu'on procédât immédiatement à une enquête spéciale impartiale et approfondie sur les circonstances et à ce qu'une procédure légale régulière fût suivie pour déterminer le bien-fondé de l'action prise par la police et les responsabilités.
    8. 363 Dans ces conditions, le Comité priait le gouvernement d'indiquer si une enquête spéciale impartiale avait été ouverte pour rechercher les circonstances dans lesquelles certaines personnes ayant pris part à la grève de mai 1962 ont perdu la vie à la suite des mesures prises par la police et, dans l'affirmative, de lui donner connaissance des résultats de cette enquête.
    9. 364 Dans sa communication du 10 mai 1963, le gouvernement déclare que les deux personnes en question ont perdu la vie le 14 mai 1962 lorsque la police s'efforçait de réprimer les violences durant la grève à Salisbury. Les 6 et 27 août 1962, les juges de première instance de Salisbury procédèrent à des enquêtes et rendirent des verdicts de décès dus à des armes à feu. La loi de 1951 sur les enquêtes, modifiée, astreint les juges de première instance à transmettre à l'Attorney-General tout dossier d'enquête, et il en a été fait ainsi. L'Attorney-General a décidé qu'il n'y avait pas lieu à enquête pénale.
    10. 365 Le Comité observe que la seule information nouvelle qui lui ait été fournie, en réponse à sa demande, est le fait que les enquêtes ont confirmé que les deux personnes en question ont été tuées par des armes à feu. Il semble qu'aucune enquête spéciale du caractère indiqué au paragraphe 544 de son soixante-sixième rapport n'ait eu lieu. Cependant, comme les procès-verbaux des enquêtes mentionnées par le gouvernement peuvent être utiles au Comité non seulement pour juger lui-même des circonstances dans lesquelles les deux personnes en question ont perdu la vie, mais aussi pour formuler ses conclusions relatives à la grève elle-même, le Comité prie le gouvernement de bien vouloir lui en envoyer copie.
  • Allégations relatives à des détentions préventives
    1. 366 Dans sa communication en date du 7 décembre 1962, la C.I.S.L allègue que, en vertu de la législation de sécurité, les huit agents du Congrès des syndicats africains de la Rhodésie du Sud dont les noms suivent ont été arrêtés, détenus, ou se sont vu assigner un domicile forcé: MM. T. E. Mswaka, président, S. Muteyauna, trésorier, J. T. Maluleke, secrétaire général, M. M. C. Nziramasanga, secrétaire de la caisse, S. D. Makufa, ancien trésorier, F. N. Msemburi, ancien vice-président, E. Bvunzawabaya et L. Nkala.
    2. 367 Dans sa communication du 10 mai 1962, le gouvernement donne sur ces cas les informations suivantes.
    3. 368 M. Mswaka et M. Makufa n'étaient pas arrêtés, détenus ni assignés à un domicile forcé en décembre 1962 ni ne l'ont été depuis. Ils sont en liberté sous caution jusqu'au jugement sur leurs appels de la sentence du 19 septembre 1962 les condamnant pour incitation des travailleurs à poursuivre une grève illégale.
    4. 369 M. Muteyauna n'a été arrêté que le 31 décembre 1962, accusé d'appartenir à l'Union populaire africaine Zimbabwe (Z.A.P.U.), qui est une organisation politique et non un syndicat. Il a été convaincu de ce délit le 31 janvier 1963 et condamné à neuf mois d'emprisonnement avec travail disciplinaire. Il est actuellement en liberté sous caution jusqu'au jugement sur son appel.
    5. 370 MM. Maluleke, Nziramasanga et Nkala se sont vu assigner une résidence forcée dans leur village à partir du 20 septembre 1962 pour une durée de trois mois en raison de leur affiliation à la Z.A.P.U.
    6. 371 M. Msemburi ou Nusemburi a été convaincu le 8 août 1962 d'avoir, en prenant la parole dans une réunion, accusé la police d'intimidation et de brutalité, et condamné à douze mois d'emprisonnement avec travail disciplinaire, avec un sursis de trois ans pour huit mois de cette peine. Il a été libéré le 23 janvier 1963.
    7. 372 Le gouvernement juge probable que E. Bvunzawabaya mentionné est M. P. B. Bvunzawabaya, qui a été assigné à résidence forcée dans son village à partir du 22 septembre 1962 pour trois mois, en raison de son affiliation à la Z.A.P.U. Il n'a jamais été connu comme syndicaliste.
    8. 373 Il semblerait donc que, des huit personnes mentionnées dans la plainte, quatre, MM. Maluleke, Nziramasanga, Nkala et Bvunzawabaya, ont été l'objet de restriction de leur liberté de mouvement pour une durée de trois mois en raison de leur adhésion à un mouvement politique illégal, mais ont cessé de l'être. Il semblerait aussi que M. Muteyauna ait été convaincu d'affiliation à une organisation politique illégale et que cette condamnation n'était pas due à son activité syndicale. Le cas de M. Msemburi est semblable à celui de M. Maluleke, examiné au paragraphe 344, en tant qu'il a été convaincu d'avoir exprimé au sujet de la police des appréciations d'une nature contraire à la loi pénale. Les deux cas restants sont examinés ci-après.
    9. 374 Comme, semble-t-il, aucun des intéressés n'est actuellement soumis à détention préventive ou à restriction de sa liberté de mouvement, le Comité considère que cet aspect de la question devrait être regardé comme déjà couvert par la recommandation qu'il a soumise sur ce point au Conseil d'administration dans le cas no 251, relatif à la Rhodésie du Sud, figurant au paragraphe 446 a) de son soixante-sixième rapport, cité au paragraphe 44 du présent rapport.
    10. 375 Il reste les cas de MM. Mswaka et Makufa, qui sont actuellement en liberté sous caution jusqu'au jugement sur l'appel de la condamnation prononcée contre eux pour avoir incité les travailleurs à poursuivre une grève illégale. Comme il y a deux cas où une question relative au droit syndical pourrait être en jeu, le Comité prie le gouvernement de l'informer en temps utile de l'issue des appels interjetés.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 376. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de décider que, sous la réserve exprimée au paragraphe 345, les allégations relatives à l'utilisation de la loi sur le maintien de la légalité et de l'ordre public, et de la loi sur les organisations illégales à des fins antisyndicales n'appellent pas un examen plus approfondi;
    • b) de prendre note du rapport intérimaire du Comité concernant les allégations restantes, étant entendu que le Comité présentera ultérieurement au Conseil d'administration un rapport à ce sujet, lorsqu'il aura reçu les informations complémentaires qu'il a demandé au gouvernement de bien vouloir fournir.
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