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Rapport intérimaire - Rapport No. 68, 1963

Cas no 300 (Afrique du Sud) - Date de la plainte: 12-MAI -62 - Clos

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  1. 153. La plainte du Congrès des syndicats d'Afrique du Sud (S.A.C.T.U) figure dans quatre communications, datées, respectivement, des 12 mai, 21 mai, 9 juin et 17 août 1962, et celle de la Confédération internationale des syndicats libres (C.I.S.L), dans deux communications datées des 11 septembre 1962 et 21 décembre 1962. Le gouvernement a présenté ses observations en la matière par une communication en date du 17 janvier 1963.
  2. 154. La République sud-africaine n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  • Questions préjudicielles relatives à la compétence du Comité
    1. 155 En présentant ses observations, le gouvernement a souligné qu'il le fait sans préjudice de l'opinion qu'il n'a cessé de soutenir, et qu'il réaffirme, selon quoi le Conseil d'administration et le Bureau international du Travail auraient outrepassé leur pouvoir.
    2. 156 Sur ce point, le Comité confirme le point de vue qu'il a exprimé dans des cas précédents, selon lequel il estime qu'étant donné la décision prise en la matière par la Conférence internationale du Travail à sa 33- session en 1950, il ne lui appartient pas de réexaminer la question de la compétence de l'Organisation internationale du Travail pour établir cette procédure.
  • Allégation relative au budget national
    1. 157 Dans sa communication en date du 12 mai 1962, le S.A.C.T.U exposait que le budget pour 1962 a prévu un accroissement des impôts en vue d'assurer « la sécurité contre une attaque venant de l'extérieur aussi bien que contre les désordres intérieurs ». Le plaignant présume que les « désordres intérieurs » désignent des manifestations, grèves, etc., organisées par le peuple sud-africain contre la politique de l'apartheid.
    2. 158 Le gouvernement, dans ses observations, n'a pas commenté cette allégation; il apparaît, cependant, que celle-ci revêt le caractère d'une critique d'ordre général envers la politique raciale du gouvernement sans que cette critique ait de rapport précis, en l'occurrence, avec l'exercice des droits syndicaux.
    3. 159 Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que cette allégation n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
  • Allégations relatives à l'interdiction de grèves
    1. 160 Dans sa communication en date du 12 mai 1962, le S.A.C.T.U fait état des peines, amendes ou emprisonnements institués, au sujet de grèves conduites par des travailleurs africains, par la loi de 1953 sur la main-d'oeuvre indigène (règlement des conflits du travail), et par la loi portant modification de la législation pénale. Malgré ces restrictions, on a relevé quatre cent cinquante-trois grèves des travailleurs africains durant la période 1954-1960, ce qui aurait donné lieu à des poursuites contre environ quarante mille travailleurs africains, dont un grand nombre auraient été condamnés à une amende ou à l'emprisonnement. Le plaignant fait alors mention de différents cas plus récents de grèves qui, selon lui, étaient toutes de caractère économique.
    2. 161 Le plaignant allègue qu'en août 1961, quatre-vingts travailleurs africains aveugles, travaillant à l'Institut pour les aveugles de Constance Caworth (Natal), et gagnant seulement 10 livres par mois (environ le tiers de l'évaluation admise du minimum vital), se mirent en grève afin d'obtenir un salaire plus élevé; que la police fut appelée et tous les travailleurs renvoyés; qu'il leur fut alors enjoint de faire une nouvelle demande afin d'être rengagés, mais que treize d'entre eux ne le furent pas, et qu'il n'y eut pas d'augmentation de salaire.
    3. 162 Il est de même allégué qu'en août 1961, cent trente-six travailleurs de la Lion Match Company (Durban) ont été condamnés, chacun, à une amende de 5 livres ou à dix jours d'emprisonnement, sous l'inculpation d'avoir fait une grève illégale, pour avoir tenu manifestation durant la pause du déjeuner et exhibé des pancartes réclamant la reconnaissance du syndicat et le paiement d'un salaire de 1 livre par jour; la permission de faire appel de ce jugement leur a été refusée.
    4. 163 Le plaignant expose que les travailleurs employés par la firme Klipfontein Organie Products (Transvaal) sont recrutés par le Département administratif bantou (administration publique), qu'ils vivent dans des camps d'un salaire de misère de 7 livres par mois, plus la nourriture et le logement, leur unique ressource, lorsqu'ils sont victimes d'injustice, étant de déposer plainte auprès du commissaire principal, pour les indigènes bantous, lequel, selon le plaignant, répond à toute démarche tentée auprès de lui en faisant renvoyer les requérants et en leur refusant ensuite les permis qui leur seraient nécessaires pour chercher du travail ailleurs. C'est en désespoir de cause, poursuit le plaignant, que ces travailleurs se sont mis en grève en juillet 1961. Six cents d'entre eux auraient alors été arrêtés, dont deux seulement auraient fait par la suite l'objet d'une inculpation et auraient été condamnés, après trois semaines de détention, à une amende de 20 livres chacun. Le S.A.C.T.U étant intervenu en faveur de ces travailleurs auprès du ministre des Affaires bantoues, celui-ci l'aurait renvoyé au même commissaire principal, dont le comportement était l'objet d'une plainte des travailleurs.
    5. 164 Le S.A.C.T.U allègue que cent quatre-vingt-treize travailleurs africains, appartenant à la Bay Transport Company, Port Elizabeth, ont été condamnés chacun à une amende de 7 livres 10 shillings pour s'être mis en grève.
    6. 165 Le gouvernement n'ayant, dans sa réponse, fait mention d'aucune des allégations précitées, le Comité lui demande de bien vouloir présenter ses observations en la matière.
  • Allégations relatives à une propagande antisyndicale menée par des administrations publiques
    1. 166 Dans sa communication en date du 12 mai 1962, le S.A.C.T.U allègue que l'Administration des chemins de fer et des ports sud-africains, qui est un département du gouvernement, mène une propagande antisyndicale parmi les 99.800 travailleurs africains qu'elle emploie.
    2. 167 Le plaignant cite à l'appui de ses dires un texte qu'il présente comme étant un extrait de la livraison de mars 1962 de Umgondiso, publication officielle de l'Administration, qui est en circulation parmi les travailleurs non blancs des chemins de fer. Dans le texte ainsi présenté, on lit notamment:
  • Les représentants des travailleurs et le comité régional (nommé par l'Administration) composent l'organisme officiel destiné à faire des représentations auprès du Département. Ils sont, en fait, les seuls organes reconnus par le Département... D'autre part, il y a des organisations ou de prétendus syndicats qui cherchent à ce que les employés non européens se joignent à leurs membres. Les frais sont élevés et sont perçus chaque mois en particulier. Ces syndicats paraissent légaux du fait qu'ils délivrent une carte de membre et un reçu... Ces prétendus syndicats ne sont pas reconnus par le Département, et la Direction des chemins de fer et ses fonctionnaires ne traitent sous aucune forme et d'aucune manière, dans aucun domaine, avec ces syndicats. Ils ne peuvent apporter aucun changement à vos conditions de travail; ils ne cherchent qu'à vous soutirer de l'argent. Ils vivent grassement, et cela sur l'argent péniblement gagné que vous leur remettez chaque mois. En réalité, toute activité en rapport quelconque avec ces syndicats, de quelque nature qu'elle soit, n'est pas autorisée sur les lieux de travail des employés des chemins de fer.
  • Après avoir qualifié encore ces organisations de « syndicats prétendus et illicites », le texte cité poursuit en ces termes:
  • En vue de vous protéger contre ces personnes sans scrupules, l'Administration a donné des instructions strictes de manière qu'aucun employé non européen ne puisse venir quêter au profit de sociétés, de maisons de commerce, de syndicats, d'associations ou d'autres organisations en cause, sans la permission écrite du chef du Département. De plus, personne n'est autorisé à pénétrer sur les lieux réservés aux employés des chemins de fer pour leur soutirer de l'argent, que ce soit pendant les heures de travail ou non. Que cela vous serve d'avertissement et ne permettez pas à autrui de vous induire en erreur.
  • De l'avis du plaignant, cet écrit est diffamatoire à l'égard de fonctionnaires du Syndicat des travailleurs des chemins de fer et des ports sud-africains, prétend faussement que le syndicat est illicite et confirme l'opposition implacable du gouvernement à l'organisation syndicale libre.
    1. 168 Le gouvernement n'ayant pas, dans sa réponse, fait mention de ces allégations, le Comité lui demande de bien vouloir présenter ses observations en la matière.
  • Allégations relatives à des mesures d'intimidation à l'encontre de travailleurs africains
    1. 169 Il est, en outre, allégué que l'Administration des chemins de fer et la Police de sécurité cherchent à intimider les travailleurs africains qui adhèrent au Syndicat des travailleurs des chemins de fer et des ports sud-africains, et qu'en décembre 1961, le bureau de ce syndicat, à Johannesburg, fut envahi par la police, qui confisqua les cartes nominatives de membres affiliés à l'organisation. Par la suite, selon le plaignant, les travailleurs dont les cartes avaient été confisquées ont été interrogés par la police des chemins de fer et menacés de renvoi s'ils ne démissionnaient pas du Syndicat; nombre de ceux qui ont refusé de quitter le Syndicat ont été licenciés ou transférés dans les régions agricoles à salaire inférieur.
    2. 170 Le Comité a déjà été saisi de ces allégations en rapport avec un autre cas dans lequel, après avoir noté que le gouvernement, dans sa réponse, n'avait pas fait mention de cette affaire, il avait recommandé au Conseil d'administration de demander au gouvernement de bien vouloir fournir ses observations sur les allégations en question. Dans ces conditions, le Comité a différé l'examen de cet aspect du cas, en attendant de recevoir lesdites observations.
  • Allégations relatives à la ségrégation raciale à l'intérieur des syndicats
    1. 171 Ces allégations ont trait aux dispositions de la loi de 1956 sur la conciliation dans l'industrie, y compris les amendements qui y ont été ultérieurement apportés, dispositions qui interdisent de procéder à l'avenir à l'enregistrement de syndicats admettant conjointement l'adhésion de personnes de couleur et de Blancs, enjoignent aux syndicats existants d'organiser des sections distinctes, d'une part pour les Blancs, d'autre part, pour les personnes de couleur, de réunir des assemblées distinctes pour les différentes races et d'instituer un comité exécutif composé exclusivement de Blancs, des sanctions étant prévues pour le cas où les statuts d'un syndicat ne seraient pas adaptés aux exigences de la loi.
    2. 172 Le gouvernement s'est abstenu de faire mention de ces questions dans ses observations, mais le Comité a déjà été appelé à examiner des allégations similaires dans des cas antérieurs, concernant la République (anciennement Union) sud-africaine.
    3. 173 Le Conseil d'administration, lors de sa 133ème session (novembre 1956), en adoptant les conclusions contenues au paragraphe 209 (4) et (5) du vingt-quatrième rapport du Comité, a noté que les dispositions figurant dans l'article 8 de la loi de 1956, au sujet de l'organisation, dans les syndicats mixtes enregistrés, de sections distinctes pour les Blancs et pour les personnes de couleur, et de la réunion d'assemblées distinctes, sont incompatibles avec le principe généralement admis que les organisations de travailleurs doivent avoir le droit d'établir leurs statuts et règlements et d'organiser leur administration et leurs activités, et que les dispositions réservant aux Européens le droit de faire partie des comités exécutifs de ces syndicats sont incompatibles avec le principe énoncé ci-dessus ou avec le principe selon lequel les organisations de travailleurs doivent avoir le droit d'élire leurs représentants en pleine liberté. Le Conseil d'administration a, en outre, noté que les dispositions de la loi de 1956, qui interdisent de procéder à l'avenir à l'enregistrement de syndicats mixtes, sont incompatibles avec le principe généralement admis que les travailleurs, sans aucune distinction, devraient avoir le droit d'établir des organisations de leur choix et, sous réserve seulement du règlement de l'organisation intéressée, d'en faire partie, sans autorisation préalable, ou avec le principe que toutes les organisations de travailleurs doivent bénéficier du droit de négociation collective. Ces conclusions formulées par le Comité dans le cas no 145, relatif à l'ex-Union sud-africaine, ont été réaffirmées dans le cas no 200, relatif au même pays, et elles ont été adoptées par le Conseil d'administration à sa 144ème session (mars 1960). Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de confirmer lesdites conclusions dans le présent cas.
  • Allégations relatives à des réservations d'emploi
    1. 174 Le S.A.C.T.U allègue également, dans sa communication en date du 12 mai 1962, qu'en application de l'article 77 de la loi de 1956 sur la conciliation dans l'industrie, plusieurs investigations ont été menées sur la base desquelles le tribunal compétent a pris plusieurs décisions ayant force de loi, aux fins de réserver aux Blancs certaines catégories d'emplois. Le plaignant a fait état de onze décisions de cet ordre, en précisant quelles sont les professions visées (industrie de la confection, conduite de véhicules à moteur, industrie mécanique, etc.).
    2. 175 Le gouvernement s'est abstenu de fournir des observations sur ces allégations, mais la question de l'application de ces dispositions légales a, elle aussi, été examinée par le Comité dans des cas antérieurs relatifs à l'ex-Union sud-africaine.
    3. 176 Le Conseil d'administration, à sa 133ème session (novembre 1956), en adoptant e paragraphe 209 (3) du vingt-quatrième rapport du Comité, a repris en substance les conclusions contenues dans le paragraphe 185 (6) du quinzième rapport du Comité, adopté par lui lors de sa 128ème session (mars 1955), et noté que l'article 77 de la loi de 1956 sur la conciliation dans l'industrie tendrait - en ce qui concerne les travailleurs qui, en vertu d'autres articles de la loi, ne peuvent devenir membres ou peuvent cesser d'être autorisés à être membres des syndicats enregistrés ou enregistrables, en application de la loi - à empêcher la négociation, par voie de négociation collective, de meilleures conditions d'emploi, notamment de conditions concernant l'accès à des emplois déterminés et, de ce fait, à porter atteinte aux droits des travailleurs intéressés de négocier collectivement et d'améliorer leurs conditions de vie et de travail, qui sont généralement considérées comme des éléments essentiels de la liberté syndicale. Ces conclusions formulées par le Comité dans le cas no 145, relatif à l'ex-Union sud-africaine, ont été réaffirmées dans le cas no 200, relatif au même pays, et adoptées par le Conseil d'administration à sa 144ème session (mars 1960). Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de confirmer lesdites conclusions dans le présent cas.
  • Allégations relatives aux mesures prises à l'encontre de dirigeants et de militants syndicaux
    1. 177 Dans sa communication en date du 12 mai 1962, le S.A.C.T.U fait état du grand nombre de proscriptions prononcées contre des dirigeants et des membres de syndicats, depuis 1961, en vertu de la loi portant interdiction du communisme et de la loi sur les attroupements séditieux. Le plaignant cite les noms de dix-neuf personnes qui auraient fait l'objet de telles mesures.
    2. 178 Il est notamment allégué que M. Leon Levy (président national du Congrès des syndicats sud-africains), M. Melville Fletcher (secrétaire de section, Syndicat professionnel des travailleurs des textiles, Durban), et M. B. Nair (secrétaire du Comité du syndicat local du Congrès des syndicats sud-africains, Durban, et secrétaire du Syndicat des travailleurs des métaux, Durban) ont été assignés à résidence dans une zone délimitée et qu'interdiction leur a été faite, durant cinq années, de participer à aucune réunion, cette dernière restriction s'appliquant également à M. Mark Williams-Shope (secrétaire général du Congrès des syndicats sud-africains). Il a été allégué que M. Harry Gwala (secrétaire du comité du syndicat local du Congrès des syndicats sud-africains, Petermaritzburg) s'est vu notifier l'interdiction de participer aux affaires du S.A.C.T.U.
    3. 179 Les autres cas allégués sont un peu différents. Il est allégué que M. U. Maleka (secrétaire du Syndicat des travailleurs du meuble et de la literie) et M. R. Takalo (secrétaire du Syndicat des travailleurs des métaux, Transvaal) ont été arrêtés alors qu'ils assistaient à une distribution d'imprimés à des mineurs africains et inculpés d'infraction à la loi de 1959 sur les troubles possessoires (Trespass Act) ; M. Brown Ndavemavota (organisateur de la Commission administrative nationale des mineurs), également arrêté alors qu'il distribuait des imprimés, aurait, quant à lui, été condamné à trois mois de prison en vertu de la loi sur les zones urbaines. Il est de même allégué que M. R. Bapela (membre du Syndicat sud-africain des travailleurs de la confection) a été arrêté alors qu'il distribuait des imprimés. Il est également allégué que MM. M. Lekhoto (organisateur du Syndicat général des travailleurs, Transvaal), Johannes Mebena (membre du Syndicat des employés de magasin et de bureau) et Lawrence Ndzanga (secrétaire du Syndicat des chemins de fer et des ports sud-africains) ont été arrêtés lors d'une manifestation de porteurs de pancartes et que M. Colombus Nixishe (organisateur du Syndicat des travailleurs des chemins de fer et des ports sud-africains, Transvaal) a été inculpé, en vertu de la loi de 1959 sur les troubles possessoires. Il est dit, enfin, que M. D. Sebolai et M. J. Mampie (respectivement président adjoint et secrétaire administratif du Syndicat général des travailleurs africains de Kimberley) et que quatre membres de ce syndicat, MM. A. Motaung, A. Mogoje, T. Sohleze et M. Sebolai, attendent d'être jugés sous l'inculpation d'être entrés sans permission dans une réserve.
    4. 180 Le gouvernement s'est abstenu de fournir des observations sur ces allégations, mais il a précédemment exposé, au sujet des cas de M. Williams-Shope et de M. Levy, que les mesures incriminées avaient été prises à leur encontre en vertu de la loi de 1950 portant interdiction du communisme et que, dans les circonstances données, il ne pouvait fournir aucune autre information à ce sujet.
    5. 181 Dans ces conditions, le Comité demande au gouvernement de bien vouloir fournir ses observations sur ces allégations.
  • Allégations relatives à la délégation sud-africaine à la 46ème session de la Conférence internationale du Travail
    1. 182 Dans sa communication en date du 12 mai 1962, le S.A.C.T.U expose que la délégation des travailleurs à la 46ème session de la Conférence internationale du Travail avait été choisie après consultation de la Confédération du travail (qui groupe vingt-huit syndicats, comptant 150.158 Blancs et 175 personnes de couleur) et du Conseil des syndicats de l'Afrique du Sud (qui groupe quarante-neuf syndicats totalisant 110.427 Blancs, 44.726 personnes de couleur et 11.850 Indiens). Jusqu'à mars 1962, les Africains n'étaient pas autorisés à adhérer au Conseil des syndicats; depuis lors, ils peuvent y être admis, mais aucun de leurs syndicats ne s'est affilié. Le S.A.C.T.U déclare grouper cinquante-cinq syndicats, totalisant 54.000 membres, dont 41.000 Africains; par conséquent, il prétend être le seul organe vraiment représentatif des travailleurs en Afrique du Sud au sens de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail. De l'avis du plaignant, la délégation ne représentait donc pas la grande masse des travailleurs, qui sont les travailleurs africains. Le S.A.C.T.U ajoute que le gouvernement continue à refuser de le consulter lors de la désignation du délégué des travailleurs, bien que la Commission de vérification des pouvoirs de la Conférence internationale du Travail ait souligné maintes fois la nécessité de cette consultation.
    2. 183 Comme il l'a indiqué dans un cas antérieur, le Comité n'est pas compétent pour examiner les questions relatives aux pouvoirs des délégués et des conseillers techniques à la Conférence internationale du Travail. De même, il n'est pas compétent pour examiner les allégations selon lesquelles un gouvernement n'aurait pas traité une organisation syndicale conformément à la Constitution de l'Organisation internationale du Travail lors de la désignation des délégués à la Conférence. Ce sont là des questions qui relèvent uniquement de la compétence de la Commission de vérification des pouvoirs de la Conférence.
    3. 184 Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que, pour les motifs exposés au paragraphe 183 ci-dessus, il n'y a pas lieu pour lui de soumettre ces allégations à un plus ample examen.
  • Allégations relatives à la loi de 1962 portant amendement de la législation générale
    1. 185 Différentes dispositions de la loi de 1962 portant amendement de la législation générale font l'objet de critiques formulées par le S.A.C.T.U dans ses communications en date des 21 mai, 9 juin et 17 août 1962 et par la C.I.S.L dans ses communications en date des 11 septembre et 21 décembre 1962. Les différentes questions soulevées sont examinées séparément.
      • a) Allégations relatives aux dispositions concernant le sabotage
    2. 186 Dans sa communication en date du 21 mai 1962, le S.A.C.T.U déclare que l'article 21 de la loi crée le nouveau délit de « sabotage »; aux termes de cet article, est-il allégué, toute critique à l'adresse du gouvernement peut être taxée de « sabotage » et son auteur est passible de mort par pendaison ou d'un emprisonnement de cinq ans au moins. De l'avis du plaignant, il résulte de ces dispositions que tout travailleur, qu'il s'agisse d'un Blanc, d'un Indien ou d'une personne de couleur, qui se met en grève contrairement aux dispositions de la loi de 1956 sur la conciliation dans l'industrie, et tout ouvrier africain qui se met en grève, dans quelque circonstance que ce soit, pour obtenir un salaire plus élevé ou de meilleures conditions de vie, peut être accusé de sabotage. Cela tient, poursuit le plaignant, à ce que l'acte de grève peut être interprété comme « portant atteinte » à l'observation de la loi et au maintien de l'ordre ou la « menaçant », ou de nature à « porter atteinte » à la propriété des possesseurs de capitaux. Selon le plaignant, la situation serait particulièrement grave en ce qui concerne les travailleurs des industries du transport, de l'alimentation et des conserves, ainsi que les travailleurs des mines, des industries productrices de lumière et d'énergie, ainsi que ceux qui sont affectés aux services sanitaires, au service de prévention des incendies, aux services hospitaliers et médicaux, ainsi qu'aux services de la poste, des télégraphes et de la radiodiffusion. Il est allégué que si un travailleur peint sur un mur un slogan réclamant un « salaire plus élevé », il est considéré comme « détériorant » ou « endommageant » la propriété d'autrui et encourt, de ce fait, la peine de mort; et que, de même, si un militant syndical pénètre à l'intérieur d'une usine pour recruter de nouveaux membres ou s'adresser aux travailleurs sans l'autorisation du propriétaire, il peut également être accusé de sabotage.
    3. 187 Il est allégué que toute personne accusée de sabotage est tenue de fournir la preuve que l'acte incriminé n'a pas « objectivement » été conçu ou commis dans l'intention de produire aucun des effets définis dans l'article 21 (2) de la loi. C'est ainsi qu'une personne qui s'est mise en grève pour obtenir un meilleur salaire devrait prouver que cette grève n'avait pas apparence de devoir « causer un dommage substantiel » à l'employeur, et il est allégué que, s'agissant d'un travailleur employé dans les services ou les industries des carburants, de l'eau, de la lumière ou de l'énergie, ou dans les services médicaux et les services de pompiers, celui-ci sera dans l'incapacité d'apporter la preuve en question, car, si la grève a revêtu une certaine importance, elle aura nécessairement pour effet d'« interrompre sérieusement la fourniture ou la distribution » des services considérés. Il est dit encore que si un militant syndical, dans un effort pour organiser les travailleurs en vue de la présentation de revendications à leurs employeurs, parle de ceux-ci en des termes hostiles, il lui sera impossible de prouver qu'« objectivement » ces actes n'étaient pas de nature à « engendrer... des sentiments d'hostilité entre les différents groupes de la population » (c'est-à-dire les travailleurs et les employeurs); par conséquent, soutient le plaignant, « il pourrait être reconnu coupable de sabotage et encourir la peine de mort ».
    4. 188 L'une des critiques adressées par le plaignant à cette partie de la loi est que la procédure criminelle normale prévoyant un interrogatoire préalable est abolie dans le cas d'une inculpation de sabotage alors que, dans d'autres cas, cet interrogatoire préalable permet à l'accusé de connaître les chefs d'accusation qui pèsent sur lui et de préparer sa défense. De plus, il est allégué qu'une personne disculpée d'une accusation de sabotage peut être inculpée à nouveau, du même chef, pour les mêmes faits et que même des adolescents de moins de dix-huit ans peuvent être condamnés à mort pour sabotage.
    5. 189 Enfin, il est allégué que, dans tous les cas, c'est au procureur général qu'il appartient de décider si une personne peut ou non être accusée de sabotage.
    6. 190 Dans sa communication en date du 9 juin 1962, le S.A.C.T.U critique le Conseil des syndicats de la République d'Afrique du Sud de s'être satisfait de l'assurance donnée par le ministre de la Justice que la loi n'affecterait pas les syndicats qui sont reconnus aux termes de la loi de 1956 sur la conciliation dans l'industrie, ce qui revient à laisser à la merci de la loi sur le sabotage les autres travailleurs et syndicats, notamment tous les travailleurs et syndicats africains.
    7. 191 C'est essentiellement pour les mêmes raisons que la C.I.S.L, dans sa communication en date du 11 septembre 1962, attaque les dispositions de la nouvelle loi mentionnée dans les paragraphes 186-189 ci-dessus.
    8. 192 La C.I.S.L déclare que le fait que les dirigeants syndicaux accusés de sabotage en raison de leur activité syndicale peuvent être condamnés aux mêmes sanctions que pour trahison est contraire à tous les principes de l'Organisation internationale du Travail. A ce propos, le plaignant expose que, lorsque le Conseil d'administration a procédé à l'examen du cas no 200, relatif à l'ex-Union sud-africaine, il a confirmé, au paragraphe 162 du quarante-quatrième rapport du Comité, son rejet antérieur de l'argumentation du gouvernement selon laquelle la question du procès de certaines personnes accusées de haute trahison n'était pas de la compétence de l'O.I.T, en indiquant que:
  • Si, en tant que telle, une accusation de haute trahison était nettement hors de la compétence de l'O.I.T, le point de savoir si une telle accusation, formulée sur la base de faits et d'allégations mettant en cause l'exercice des droits syndicaux, doit être considérée comme une question de haute trahison ou comme une question relative à l'exercice des droits syndicaux, ne saurait être tranché unilatéralement par le gouvernement intéressé, de telle façon que le Conseil d'administration soit mis dans l'impossibilité de l'examiner plus avant.
    1. 193 Le plaignant déclare aussi que la procédure judiciaire applicable aux termes de la loi de 1962 est contraire aux articles 10 et 11 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, qui dit que « toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial » et que « toute personne accusée d'un acte délictueux est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d'un procès public où toutes les garanties nécessaires à sa défense lui auront été assurées ».
    2. 194 Enfin, le plaignant considère que cet aspect du cas devrait être qualifié d'urgent au sens du paragraphe 13 du vingt-neuvième rapport du Comité adopté par le Conseil d'administration à sa 140ème session (novembre 1958).
    3. 195 Dans sa communication en date du 17 janvier 1963, le gouvernement déclare que la loi de 1962 portant modification de la législation générale a pour objet de corriger certaines insuffisances de la loi de 1950 portant interdiction du communisme et de définir le crime de sabotage, et que le fait que le législateur a entendu veiller à « ne pas porter atteinte aux activités des syndicats authentiques » ressort à l'évidence des dispositions des articles 1 (2), 2 (3), 5 (3) et 5 ter (1) de la loi de 1950 sur la suppression du communisme, telle qu'elle a été modifiée, et de la déclaration faite par le ministre de la Justice à l'Assemblée nationale, le 21 mai 1962, lorsqu'il a présenté le projet de loi portant modification de la législation générale. Le ministre s'est alors exprimé comme suit:
  • Je tiens à répéter que le présent projet de loi... vise purement et simplement à mettre hors d'état de nuire les éléments subversifs et les communistes... et, deuxièmement, à les priver des possibilités et des moyens dont ils disposent pour faire de la propagande; troisièmement, à punir le sabotage, et à le punir efficacement.
    1. 196 Le gouvernement déclare que des actes licites aux termes de la loi de 1956 sur la conciliation dans l'industrie ou de la loi de 1960 sur les chemins de fer et le service des ports ne sont pas rendus illicites par les dispositions de la loi de 1962 portant modification de la législation générale.
    2. 197 L'article 21 (3) dispose que le délit de sabotage ne peut être poursuivi qu'avec l'autorisation écrite du procureur général ou du substitut du procureur général ayant compétence dans la circonscription considérée, et que le cas doit être jugé par un juge de la Cour suprême, sans l'assistance d'un jury (art. 21 (4) a)). Les procureurs généraux sont des fonctionnaires supérieurs de l'Etat ayant de nombreuses années d'expérience dans l'administration de la justice. Ils doivent être « impartiaux et au-dessus de tout reproche dans l'accomplissement de leur devoir ». Selon le gouvernement, cette procédure garantit aux inculpés un traitement juste et équitable.
    3. 198 Le gouvernement conteste que la charge de la preuve propre à le disculper de l'inculpation de sabotage incombe à l'accusé lui-même, en arguant que l'article 21 (1) de la loi dispose que c'est à l'Etat qu'il appartient de prouver que l'acte a été commis, et qu'il l'a été dans l'intention de nuire et de propos délibéré, et que l'article 21 (2) « énumère simplement les moyens de défense » qui peuvent être utilisés après que le ministère public a présenté les éléments sur lesquels se fonde l'accusation.
    4. 199 En conclusion, le gouvernement estime que les faits exposés dans sa réponse montrent que les dispositions de la loi de 1962 portant modification de la législation générale ne visent pas à entraver, de quelque façon que ce soit, l'exercice des droits syndicaux authentiques.
    5. 200 Les présentes allégations se rapportent au délit de sabotage, qui, aux termes de la loi de 1962, est passible, au même titre que la trahison, de la peine de mort. Dans un cas antérieur relatif à l'ex-Union sud-africaine, le Comité, tout en reconnaissant pleinement qu'une accusation de haute trahison est, en tant que telle, nettement hors de la compétence de l'Organisation internationale du Travail, a estimé que le point de savoir si une telle accusation, formulée sur la base de faits et d'allégations mettant en cause l'exercice des droits syndicaux, doit être considérée comme une question de haute trahison ou comme une question relative à l'exercice des droits syndicaux, ne saurait être tranché unilatéralement par le gouvernement intéressé, de telle façon que le Conseil d'administration soit mis dans l'impossibilité de l'examiner plus avant. Dans le présent cas, où il est allégué avec précision que diverses activités des syndicats et de leurs membres peuvent donner lieu à des poursuites en tant qu'elles constitueraient des actes de sabotage, passibles de la peine de mort, le Comité considère qu'il a compétence pour examiner la situation sur le fond, en vue de décider si l'exercice des droits syndicaux est ou n'est pas compromis.
    6. 201 Les dispositions de la loi en question qui, selon ces allégations, violeraient la liberté syndicale sont celles qui traitent du sabotage et qui figurent à l'article 21 de la loi de 1962 portant modification de la législation générale.
    7. 202 Les paragraphes (1), (2) et (3) de l'article 21 de cette loi ont la teneur suivante:
    8. (1) Sous réserve des dispositions du paragraphe (2), quiconque commet tout acte répréhensible et délibéré, par lequel il lèse, détériore, détruit, rend inutilisable ou hors d'état de fonctionner, met hors de service, entrave, altère, pollue, contamine ou met en danger:
      • a) la santé ou la sécurité publique;
      • b) l'observation de la loi et le maintien de l'ordre;
      • c) l'approvisionnement en eau;
      • d) la fourniture ou la distribution, en quelque lieu que ce soit, de lumière, d'énergie, de combustible, de denrées alimentaires ou d'eau, ou l'activité des services sanitaires médicaux ou d'extinction des incendies;
      • e) toutes installations ou services postaux, téléphoniques ou télégraphiques, ou tous services ou installations de diffusion, de transmission ou de réception radiophoniques;
      • f) le libre mouvement de tout trafic terrestre, maritime ou aérien;
      • g) toute propriété mobilière ou immobilière appartenant à des particuliers ou à l'Etat,
    9. ou qui essaie de commettre un tel acte, ou conspire avec une tierce personne pour aider à commettre cet acte, le faire commettre ou le commettre, ou incite, pousse une tierce personne à commettre cet acte, ou lui ordonne, l'aide, lui conseille, l'encourage ou l'amène à le commettre, ou qui, en violation de la loi, est en possession d'explosifs, d'armes à feu ou d'autres armes, ou qui s'introduit ou se trouve sur un terrain, dans un bâtiment ou dans un local quelconque, se rend coupable du délit de sabotage et est passible des sanctions prévues par la loi pour frapper les actes de trahison sous réserve que, sauf en cas de condamnation à la peine capitale, l'imposition d'une peine d'emprisonnement de cinq ans au minimum sera obligatoire, indépendamment de toute autre condamnation.
    10. (2) Nul ne sera accusé des délits visés au paragraphe (1) s'il apporte la preuve que, considéré en toute objectivité, l'acte commis n'était pas calculé et que, par conséquent, un tel délit n'a pas été perpétré dans l'intention d'entraîner l'un des effets ci-après, à savoir:
      • a) causer ou provoquer une désorganisation générale, des troubles ou des désordres;
      • b) paralyser ou causer un dommage sérieux à une industrie ou une entreprise particulière, ou à des entreprises en général, ou mettre obstacle à la production ou à la distribution, en quelque lieu que ce soit, de denrées alimentaires;
      • c) mettre dans l'impossibilité ou détourner quiconque de prêter son concours pour assurer le respect de la loi et le maintien de l'ordre;
      • d) provoquer, encourager ou favoriser une insurrection ou s'opposer par la force au gouvernement;
      • e) poursuivre ou encourager la réalisation d'un but politique visant, entre autres, à un changement social ou économique dans la République;
      • f) causer une lésion corporelle grave à une personne ou mettre sérieusement en danger la sécurité de quiconque;
      • g) causer une perte financière substantielle à quiconque ou à l'Etat;
      • h) provoquer, encourager ou entretenir des sentiments d'hostilité entre les différents groupes de la population de la République;
      • i) interrompre, de façon à causer un préjudice grave, la fourniture ou la distribution, en quelque lieu que ce soit, de lumière, d'énergie, de combustible ou d'eau; interrompre le fonctionnement des services sanitaires, médicaux ou d'extinction des incendies;
      • j) gêner l'administration des affaires de l'Etat.
    11. (3) Le délit de sabotage ne pourra donner lieu à aucune procédure sans autorisation écrite délivrée personnellement par le procureur général ou le procureur général suppléant dont la région en cause est justiciable.
  • En outre, l'article 21 (4) g) dispose que:
  • Une personne inculpée de sabotage peut, si elle est acquittée, être déférée à nouveau devant les tribunaux au cas où une autre accusation est portée contre elle du chef d'actes ayant motivé l'accusation antérieure.
    1. 203 En raison de la gravité de ces allégations, le Comité estime nécessaire, avant de formuler des conclusions définitives sur lesdites allégations, de posséder les informations les plus exactes sur l'application des dispositions de l'article 21 de la loi. A cet égard, il importe essentiellement: a) de préciser à quelles associations de travailleurs, et à quels membres et fonctionnaires de ces associations peuvent s'appliquer les dispositions de l'article 21; b) de s'assurer si, dans ces cas, lesdites dispositions sont applicables dans les conditions qu'allèguent les plaignants.
    2. 204 En ce qui concerne le premier point, il ressort des renseignements déjà en possession du Comité que les seules organisations de travailleurs auxquelles l'article 21 ne s'applique pas sont celles qui ont été enregistrées en vertu de la loi de 1956 sur la conciliation dans l'industrie, c'est-à-dire les organisations de travailleurs blancs ou les organisations mixtes qui ont été enregistrées, avant que la loi rende impossible l'enregistrement de ces organisations. La loi de 1956, telle qu'elle a été modifiée, n'autorise l'enregistrement d'aucune nouvelle organisation mixte de Blancs et de personnes de couleur, ainsi que le gouvernement en a donné la confirmation. Une organisation de travailleurs africains ne peut, en aucun cas, être enregistrée, parce que la loi prévoit l'enregistrement de syndicats de « salariés » et qu'aux termes de l'article 1 (1) xi) de la loi, on entend par « salarié » toute personne à l'exclusion des « indigènes »; « indigène » signifiant « Africain » (art. 1 (1) xx)). Le gouvernement déclare que les activités des syndicats de bonne foi ne sont pas affectées par l'article 21 de la loi de 1962 - à cet égard, le gouvernement prie le Comité de se référer aux articles 1 (2), 2 (3), 5 (3) et 5 ter (1) de la loi de 1950 sur la suppression du communisme, telle qu'elle a été modifiée; à l'égard de cette loi, la loi de 1962 portant amendement de la législation générale est, en fait, une loi modificatrice, dont certaines dispositions nouvelles, y compris l'article 21, renforcent également la loi antérieure. Les articles de la loi de 1950 auxquels le gouvernement prie le Comité de se référer montrent bien que les organisations, dont les activités légales ne sont pas affectées, sont des organisations enregistrées en vertu de la loi de 1956 sur la conciliation dans l'industrie, qui a remplacé la loi correspondante en vigueur depuis 1937. En outre, lorsque le gouvernement déclare que les activités des syndicats de bonne foi ne sont pas affectées par l'article 21 de la loi de 1962, il atténue la portée de sa déclaration en se référant particulièrement à celles de leurs activités qui sont « légales » en vertu de la loi de 1956 sur la conciliation dans l'industrie ou de la loi de 1960 sur les services ferroviaires et portuaires, en ce qui concerne les branches où ce dernier texte s'applique.
    3. 205 Il semblerait évident, par conséquent, que tout acte émanant d'un syndicat enregistré ou d'un membre ou de plusieurs membres de celui-ci, qui n'est pas légal aux termes de la loi de 1956, serait considéré comme un acte « préjudiciable » selon l'article 21 de la loi de 1962 s'il correspondait, par ailleurs, à la définition du terme sabotage que contient ce texte. Toute grève de travailleurs africains constitue un acte « préjudiciable », étant donné qu'elle est, dans tous les cas, essentiellement illégale aux termes de la loi de 1953 sur la main-d'oeuvre indigène (règlement des conflits).
    4. 206 C'est précisément à ce propos que le Comité doit, en ce qui concerne la deuxième question, décider si, dans le cas des personnes auxquelles l'article 21 est applicable, celui-ci peut être appliqué de la manière indiquée dans les allégations.
    5. 207 Il ne suffit pas qu'un acte soit « préjudiciable » ou, plus précisément « préjudiciable et volontaire » pour qu'il puisse donner lieu à des poursuites pour sabotage, conformément à l'article 21 de la loi de 1962. Il doit également avoir un ou plusieurs des effets exposés à l'article 21 (1).
    6. 208 C'est pour ces motifs que les plaignants allèguent que certains actes émanant de syndicats ou de membres de ceux-ci - exception faite pour les actes légaux émanant d'organisations enregistrées - seraient passibles, en tant que sabotage, de la peine de mort par pendaison ou d'une peine privative de liberté d'au moins cinq ans. L'allégation est formulée de la manière suivante: a) une action pourrait être engagée contre toute grève de travailleurs africains en tant qu'elle constitue «un acte préjudiciable et volontaire» si elle porte atteinte ou menace... « l'observation de la loi et le maintien de l'ordre » ou « endommage » la propriété d'autrui; b) il faut tenir compte particulièrement de la situation de travailleurs qui occupent certains emplois déterminés, étant donné que la définition du sabotage comprend tout acte préjudiciable et volontaire de nature à « endommager, mettre hors de service ou hors d'état de fonctionner », etc. « l'approvisionnement en eau... la fourniture ou la distribution, en quelque lieu que ce soit, de lumière, d'énergie, de combustible, de denrées alimentaires ou d'eau, ou encore des services sanitaires, médicaux ou d'extinction des incendies... tous services postaux, téléphoniques ou télégraphiques », etc.; c) toute personne qui peint sur le mur d'un local le slogan réclamant « un salaire plus élevé » encourt la peine de mort pour sabotage, parce que, de cette façon, il « détériore » ou « endommage » la propriété d'autrui; d) si un militant syndical pénètre à l'intérieur d'une usine pour recruter de nouveaux membres ou adresser la parole aux travailleurs sans l'autorisation du propriétaire, il peut être accusé de sabotage; e) si un travailleur qui prend part à une grève importante, à l'effet d'obtenir des salaires plus élevés, est dans l'incapacité, aux termes de l'article 21 (2), de prouver que la grève en question n'avait vraisemblablement pas pour objet de « causer une perte financière substantielle » à l'employeur, il peut être accusé de sabotage; f) si un dirigeant syndical incite des travailleurs à présenter des revendications aux employeurs et use à l'égard de ces derniers d'un langage hostile, et ensuite ne peut pas faire la preuve « en toute objectivité » que son attitude n'était pas de nature à « engendrer des sentiments d'hostilité », il peut être reconnu coupable de sabotage.
    7. 209 Selon des allégations, les cas évoqués pourraient découler de l'application des dispositions de l'article 21, lorsqu'il s'agit de travailleurs africains ou de dirigeants de syndicats africains ou encore dans le cas d'actes émanant de travailleurs appartenant à des syndicats enregistrés, mais qui, néanmoins, ne sont pas conformes à la loi de 1962 sur la conciliation dans l'industrie.
    8. 210 Habituellement, le Comité n'examine pas les allégations purement hypothétiques sur les effets possibles de textes législatifs de caractère général dans les cas où les conventions internationales du travail sur la liberté syndicale ne sont pas en vigueur - c'est-à-dire où il n'est pas question d'obligations formelles découlant de ces conventions - et où les dispositions des textes visés n'ont été encore appliquées aux activités syndicales dans aucun cas concret. Le Comité estime toutefois que lorsque, en raison de l'application des dispositions d'un tel texte aux activités syndicales, il existe, selon les allégations dont il est saisi, un danger imminent pour la vie humaine ou la liberté, il ne devrait pas attendre, pour examiner lesdites allégations, que ce danger ait eu des conséquences irréparables - qu'il s'agisse de perte de vies humaines ou de privation de liberté. Etant donné la gravité des conséquences que pourrait avoir, si la chose devait se produire, l'application aux activités syndicales des dispositions de la loi de 1962 portant modification de la législation générale, de l'article 21 de cette loi surtout, qui traite du sabotage, le Comité juge nécessaire de poursuivre à ce stade l'examen de la question.
    9. 211 Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de demander au gouvernement si l'on peut déduire de la réponse qu'il a bien voulu fournir qu'aucun syndicat ni aucun responsable ou membre d'un syndicat poursuivant des buts syndicaux (dont certains exemples ont été donnés au paragraphe 208 ci-dessus) - qu'il s'agisse d'un syndicat enregistré ou non et quelles que soient la ou les races auxquelles appartiennent les membres - ne saurait être poursuivi en vertu de l'article 21 de la loi de 1962 portant modification de la législation générale, ou si l'on doit interpréter cette réponse comme signifiant que les activités d'une race ne sont pas soumises à l'application dudit article tandis que celles d'une autre race le sont.
    10. 212 Au sujet de ce même article 21, il est un autre point qui n'est pas tout à fait clair. Selon les plaignants, si un acte rentrant dans la définition des actes de sabotage donnée à l'article 21 (1) est commis, c'est à l'accusé qu'il appartient d'établir que l'un des moyens de défense énumérés à l'article 21 (2) est valable dans son cas. Le gouvernement nie que ce soit exact et déclare qu'aux termes de l'article 21 (1), l'Etat doit établir la présomption que l'acte a été commis et qu'il l'a été dans l'intention de nuire et de propos délibéré, et que l'article 21 (2) énumère simplement les moyens de défense possibles. Il semble toutefois qu'en vertu de l'article 21 (2), la charge de la preuve pèse très lourdement sur l'accusé. Si l'Etat a établi la présomption - ii ne s'agit pas d'un cas prouvé-, il apparaît que l'accusé ne sera pas reconnu coupable s'il apporte la preuve que, en toute objectivité, il n'a pas commis le délit de propos délibéré ni dans le dessein d'entraîner «l'un » des effets énumérés aux alinéas a) à j) de l'article 21 (2). Dans les alinéas en question, toutefois, ces effets ne sont pas énumérés comme s'ils correspondaient à autant de moyens de défense offerts indépendamment les uns des autres, mais comme une série d'effets susceptibles d'être provoqués par l'acte commis, dont un seul semble suffire, à en juger par le libellé de l'article, pour faire échec à la défense. Apparemment, le défenseur doit prouver notamment - quant aux effets qu'il n'a pas recherchés - qu'il ne s'agissait pas de provoquer de « changement social ou économique dans la République » ni de « gêner l'administration des affaires de l'Etat ». Ces dispositions sont libellées dans des termes si généraux que toute action susceptible d'être considérée comme suggérant un changement dans la situation sociale ou économique existante ou toute espèce de contretemps dans les affaires publiques y semblent visées.
    11. 213 Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration d'attirer l'attention du gouvernement sur le fait que, selon le Comité, les dispositions de l'article 21 (2) de la loi de 1962 portant modification de la législation générale sont en contradiction avec les principes généralement acceptés en matière de liberté syndicale.
      • b) Allégations relatives à la suppression de journaux
    12. 214 Dans sa communication en date du 21 mai 1962, le Congrès des syndicats d'Afrique du Sud allègue que, depuis 1950 le ministre de la Justice, exerçant les pouvoirs que lui confère la loi sur la suppression du communisme, a interdit trois journaux: The Guardian, Advance et Clarion, mais que l'un des journaux interdits a pu reparaître jusqu'en 1962 sous un nouveau titre. Or, aux termes de la loi de 1962 portant amendement de la loi générale, un journal interdit en vertu de la loi de 1950 se verra confisquer les 10.000 livres qu'il aura dû déposer auprès du ministre de l'Intérieur en vertu de la loi de 1962. De l'avis du plaignant, cela empêcherait effectivement un organe syndical de reparaître une fois qu'il aura été interdit. Les plaignants allèguent en outre que le projet de loi sur les publications et les divertissements confère aux autorités le pouvoir d'interdire l'impression, la publication et la distribution de tout texte « indésirable », la définition du terme « indésirable » étant si large qu'elle permet de supprimer les déclarations et les publications syndicales qui seraient hostiles à l'égard de l'employeur ou qui préconiseraient le recours à la grève. En ce qui concerne la loi portant amendement de la loi générale, la C.I.S.L présente les mêmes allégations dans sa communication du 11 septembre 1962.
    13. 215 Le gouvernement déclare que l'un des buts visés par la loi de 1950 n'a pas été atteint du fait qu'un journal qui avait été interdit parce qu'il se livrait à une propagande procommuniste a pu reparaître sous un nouveau titre. La loi de 1962 portant amendement de la loi générale a comblé cette lacune.
    14. 216 Dans un certain nombre de cas antérieurs, le Comité a émis l'avis que le droit d'exprimer les opinions par le canal de la presse est à l'évidence l'un des fondements essentiels des droits syndicaux.
    15. 217 Il semblerait que, compte tenu du principe qui vient d'être mentionné, le syndicat peu important, qui se verrait tenu de déposer une somme aussi importante que 10.000 livres avant de pouvoir faire paraître un journal, se heurterait à de grosses difficultés. Dans ces conditions, le Comité demande au gouvernement de bien vouloir indiquer si les syndicats sont tous tenus de déposer une telle caution avant de faire paraître des journaux spécifiquement syndicaux et le prie de faire connaître ses observations au sujet des allégations relatives au projet de loi sur les publications et les divertissements.
      • c) Allégations relatives à l'interdiction d'organisations
    16. 218 Le Congrès des syndicats d'Afrique du Sud et la C.I.S.L indiquent, dans leurs communications en date des 21 mai et 11 septembre 1962, respectivement, que la loi portant amendement de la loi générale étend encore les pouvoirs qu'ont les Présidents des Etats d'interdire les organisations puisqu'elle les autorise à interdire « toute organisation qui exerce ou a été créée pour exercer, directement ou indirectement, les activités, quelles qu'elles soient, d'une organisation illégale ». D'après l'allégation, si le ministre « est convaincu », par exemple, qu'un syndicat exerce certaines des activités qu'exerçait antérieurement le Congrès national africain, qui a été déclaré illégal (par exemple, s'il faisait campagne pour le salaire journalier minimum de 1 livre pour tous les travailleurs, ou s'il demandait l'abrogation de la loi sur les laissez-passer), il peut interdire ce syndicat. Il s'agit de pouvoirs discrétionnaires, et le tribunal ne peut casser la décision du Président d'un Etat, à moins que l'on ne puisse prouver que celui-ci a été de mauvaise foi. De l'avis de la C.I.S.L, ces dispositions portent atteinte à un principe généralement admis, à savoir qu'aucune organisation syndicale ne peut être dissoute ou suspendue par décision de l'autorité administrative.
    17. 219 Le gouvernement ne se réfère qu'indirectement à ces allégations en déclarant que la loi sur la suppression du communisme présentait une lacune à laquelle il lui a fallu remédier, et qui tenait au fait que malgré l'interdiction du Parti communiste, une organisation qui, en fait, était le Parti communiste, n'avait qu'à prendre un nouveau nom pour pouvoir poursuivre des activités communistes.
    18. 220 Des allégations spécifiques ont été formulées d'après lesquelles, par exemple, un syndicat peut être interdit par voie administrative s'il déploie des activités syndicales normales telles que le déclenchement d'une campagne en vue de meilleurs salaires ou, tout simplement, toute autre activité susceptible d'avoir été déployée par un quelconque syndicat interdit ou qui était dans son programme. Un des principes établis dans la procédure d'examen des allégations relatives à la violation des droits syndicaux est que, lorsque des allégations précises sont formulées, le Comité ne saurait considérer comme satisfaisantes des réponses qui se bornent à des généralités. Dans ces conditions, le Comité demande au gouvernement de bien vouloir fournir des observations plus détaillées au sujet de ces allégations.
      • d) Allégations relatives aux dispositions de la loi de 1962 portant amendement de la législation générale qui portent atteinte aux libertés personnelles
    19. 221 Un certain nombre d'allégations portent sur les dispositions de la nouvelle loi qui habilitent les autorités à obliger des personnes à démissionner d'organisations, à mettre des personnes en résidence surveillée, à interdire à des personnes d'assister à des réunions, à soumettre des personnes au contrôle de la police, à punir les personnes frappées d'interdiction qui font des déclarations en public ou qui se trouvent en possession de périodiques interdits.
    20. 222 Dans sa communication en date du 21 mai 1962, le S.A.C.T.U, après s'être référé au fait que, en vertu de la loi sur la suppression du communisme, le ministre avait déjà ordonné la démission de plus de cinquante membres de bureaux syndicaux, sous prétexte qu'ils étaient des «communistes aux fins de la loi », allègue que la loi de 1962 peut désormais être invoquée pour obliger à démissionner les membres de bureaux syndicaux, même s'ils n'ont pas été « convaincus d'être communistes aux fins de la loi »; si le ministre interdit à une personne l'assistance à des réunions ou assigne une personne à résidence parce qu'il a acquis la conviction que les activités de cette personne peuvent favoriser la réalisation des buts du « communisme aux fins de la loi », il peut également ordonner à cette personne de démissionner de son syndicat et de ne pas devenir membre du bureau ou membre de cet organisme ou de tout autre organisme. La même allégation (fondée sur l'article 4 de la loi de 1962) est présentée par la C.I.S.C dans sa communication en date du 11 septembre 1962.
    21. 223 Dans sa communication en date du 21 mai 1962, le S.A.C.T.U allègue que de même, outre les « communistes aux fins de la loi », toute personne dont les activités ont des chances de favoriser la réalisation des buts du communisme aux fins de la loi peut être mise dans une situation qui équivaut à l'assignation à résidence. Dans sa communication en date du 11 septembre 1962, la C.I.S.C se réfère aux dispositions de l'article 8 de la loi de 1962 qui habiliteraient le ministre à interdire à toute personne répondant à cette définition de séjourner dans une localité ou une zone donnée ou de s'absenter d'une telle localité ou d'une telle zone, ou d'entrer en communication avec qui que ce soit. Dans sa communication en date du 21 décembre 1962, la C.I.S.C donne les noms de douze membres de bureaux syndicaux qui, selon elle, ont fait l'objet de mesures de ce genre.
    22. 224 Dans sa communication datée du 21 mai 1962, le S.A.C.T.U déclare qu'une personne qui a été l'objet de mesures, quelles qu'elles soient, en vertu de la loi sur la suppression du communisme peut désormais, aux termes de la loi de 1962, se voir ordonner par le ministre de se présenter à la police à des périodes déterminées et d'informer la police de tout changement d'adresse ou d'emploi. Ces dispositions, déclare la C.I.S.C dans sa communication en date du 11 septembre 1962, sont contenues dans les articles 9 et 10 a) de la loi de 1962.
    23. 225 Les deux plaignants allèguent que toute infraction aux différentes restrictions indiquées ci-dessus rend son auteur passible d'une peine d'emprisonnement de trois ans au minimum et de dix ans au maximum.
    24. 226 Le S.A.C.T.U, dans sa communication en date du 21 mai 1962, et la C.I.S.C, dans sa communication en date du 11 septembre 1962, allèguent que toute personne qui se trouve en possession d'une publication ou périodique interdit est passible d'une peine d'emprisonnement pouvant atteindre trois ans.
    25. 227 Dans sa communication en date du 21 mai 1962, le S.A.C.T.U allègue que la loi de 1962 donne au ministre des pouvoirs accrus pour interdire les réunions et pour empêcher les individus d'y assister. En vertu de la loi de 1962, la reproduction, de quelque manière que ce soit, des discours ou des déclarations d'une personne qui s'est vu interdire l'assistance aux réunions constitue un délit punissable d'une peine d'emprisonnement pouvant atteindre trois ans. Telle est la situation, déclare la C.I.S.C dans sa communication en date du 11 septembre 1962, qui résulte de l'article 19 de la loi de 1962.
    26. 228 Dans sa communication en date du 17 août 1962, le S.A.C.T.U expose quelle est, d'après lui, la situation qui résulte de la mise en interdiction en tant que communistes devant la loi de quatre des dirigeants syndicaux du S.A.C.T.U, interdiction prise en vertu de la loi de 1962. Du fait des pouvoirs étendus conférés au ministre par la loi de 1962, aucun de ces dirigeants syndicaux ne peut publier de déclaration sur des questions concernant les membres du S.A.C.T.U ou les travailleurs en général; il ne peut adresser aucun tract aux membres du S.A.C.T.U. ; si le secrétaire d'un comité syndical local ou d'un syndicat affilié reçoit une lettre du président national ou du secrétaire général du S.A.C.T.U, il ne peut en donner lecture à son propre comité exécutif; les organes de presse du syndicat ne peuvent désormais plus reproduire même les déclarations faites avant la promulgation de la loi de 1962, par exemple des extraits du rapport du secrétaire général ou du discours du président à la Conférence nationale des syndicats.
    27. 229 Dans sa communication en date du 17 janvier 1963, le gouvernement se borne à déclarer, en réponse à ces allégations, que les dispositions de la loi de 1962 ont pour objet d'empêcher la diffusion de la propagande communiste et de faire en sorte que « les discours, propres à exciter les passions, prononcés par des personnes qui, à cause de l'appui qu'elles donnent à la cause communiste, se sont vu interdire l'assistance aux réunions », ne soient enregistrés ou lus lors de réunions ou ne soient publiés dans la presse de tendance communisante.
    28. 230 Dans ces circonstances, le Comité prie le gouvernement de bien vouloir lui fournir des observations plus détaillées sur ces allégations.
      • e) Allégations relatives aux dispositions de la loi de 1962 portant amendement de la législation générale qui concernent le délit consistant à quitter le territoire national
    29. 231 Aux termes de la loi de 1955, réglementant les départs de l'Union, toute personne qui quitte l'Afrique du Sud sans un passeport se rend coupable d'un délit punissable au minimum de trois mois d'emprisonnement. Le S.A.C.T.U déclare dans sa communication en date du 21 mai 1962 que la loi de 1962 portant amendement de la législation générale a, pour permettre à l'Etat de prouver le délit plus facilement, amendé le Code de procédure criminelle, en y insérant des dispositions qui prévoient que tout document indiquant qu'une personne a résidé hors du territoire de la République constitue de prime abord une preuve que cette personne s'est trouvée hors du pays, si ledit document est accompagné d'un certificat du secrétaire aux Affaires étrangères attestant que le document est d'origine étrangère.
    30. 232 Le gouvernement ne présente aucune observation sur ces allégations, mais il convient d'observer que les plaignants ne présentent aucune allégation concernant l'application de ces dispositions, que ce soit en général ou dans un cas particulier, d'une manière qui puisse porter atteinte à l'exercice des droits syndicaux.
    31. 233 Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que ces allégations n'appellent pas un examen plus approfondi.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 234. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de demander au gouvernement si l'on peut déduire de la réponse qu'il a bien voulu fournir en ce qui concerne les allégations relatives aux dispositions de l'article 21 de la loi de 1962 portant amendement de la législation générale et qui ont trait au délit de sabotage qu'aucun dirigeant ou militant syndical se livrant à des activités syndicales (dont certains exemples sont donnés au paragraphe 208 ci-dessus), qu'il s'agisse ou non d'un syndicat enregistré et indépendamment de la ou des races des personnes qui y sont affiliées, ne pourrait être poursuivi en vertu de l'article 21 de la loi susmentionnée, ou si, d'autre part, la réponse du gouvernement doit être interprétée comme signifiant que les activités d'une race sont exemptées de l'application de cet article alors que celui-ci serait applicable dans le cas des activités d'une autre race;
    • b) d'attirer l'attention du gouvernement sur l'opinion du Conseil d'administration selon laquelle les dispositions de l'article 21 (2) de la loi susmentionnée sont incompatibles avec les principes généralement acceptés en matière de liberté syndicale;
    • c) de décider, en ce qui concerne les allégations relatives à la ségrégation raciale à l'intérieur des syndicats, de réaffirmer les décisions prises par le Conseil d'administration en novembre 1956 et en mars 1960, décisions qui sont brièvement énumérées au paragraphe 173 ci-dessus;
    • d) de décider, en ce qui concerne les allégations relatives aux emplois réservés, de réaffirmer les décisions prises par le Conseil d'administration en mars 1955, novembre 1956 et mars 1960, décisions qui sont brièvement énumérées au paragraphe 176 ci-dessus;
    • e) de décider que, pour les raisons indiquées au paragraphe 183 ci-dessus, il n'appartient pas au Conseil d'administration d'examiner de manière plus approfondie les allégations relatives à la délégation sud-africaine à la 46ème session de la Conférence internationale du Travail;
    • f) de décider que les allégations portant sur le budget national et les allégations relatives aux dispositions de la loi de 1962 portant amendement de la législation générale qui concernent le délit de départ du territoire national n'appellent pas un examen plus approfondi;
    • g) de prendre note du présent rapport intérimaire du Comité en ce qui concerne les allégations portant sur l'interdiction des grèves, la propagande antisyndicale menée par les départements gouvernementaux, l'intimidation des travailleurs africains et les mesures prises contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes, et en ce qui concerne les allégations relatives aux dispositions de la loi de 1962 portant amendement de la législation générale qui concernent l'interdiction des journaux, l'interdiction des organisations et la restriction des libertés personnelles, étant entendu que le Comité adressera au Conseil d'administration un nouveau rapport sur ces points lorsqu'il aura reçu les observations qu'il a décidé d'inviter le gouvernement à bien vouloir lui fournir.
      • Genève, le 25 février 1963. (Signé) Roberto AGO, Président.
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