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Rapport intérimaire - Rapport No. 78, 1965

Cas no 373 (Haïti) - Date de la plainte: 02-JANV.-64 - Clos

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  1. 204. Une première plainte portant sur les événements évoqués dans cette affaire a été déposée devant l'O.I.T le 2 janvier 1964 par le Comité permanent de coordination des travailleurs d'Amérique latine. Cette organisation étant une organisation internationale de travailleurs ne jouissant pas du statut consultatif auprès de l'O.I.T et ne comptant pas d'affiliés dans le pays qu'elle mettait en cause, sa plainte a été jugée irrecevable par le Comité lorsqu'il l'a examinée à sa 37ème session, tenue à Genève au mois de juin 1964 et, par suite, n'a pas été communiquée au gouvernement intéressé.
  2. 205. Spontanément, cependant, le gouvernement, par une communication en date du 8 janvier 1964, a adressé à l'O.I.T toute une documentation ayant trait à la situation sur laquelle portaient les allégations formulées par l'organisation mentionnée ci-dessus.
  3. 206. A son tour, par une communication en date du 28 avril 1964, la Fédération syndicale mondiale (F.S.M.) a déposé une plainte portant sur les mêmes questions. Emanant d'une organisation internationale de travailleurs jouissant du statut consultatif auprès de l'O.I.T et étant par suite recevable, cette plainte a été communiquée au gouvernement le 8 mai 1964 pour observation afin de respecter les exigences de la procédure, bien que ces observations aient déjà été fournies par lui en quelque sorte par anticipation.
  4. 207. Le gouvernement a présenté une nouvelle série d'observations par une communication en date du 3 juin 1964.
  5. 208. Il sera tenu compte dans les paragraphes qui suivent, d'une part, des allégations formulées dans la plainte de la F.S.M, la seule recevable et, d'autre part, des observations contenues tant dans la communication du 8 janvier 1964 du gouvernement que dans celle du 3 juin 1964.
  6. 209. Haïti n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; il a ratifié, par contre, la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations relatives à la dissolution de l'Union intersyndicale d'Haïti

A. Allégations relatives à la dissolution de l'Union intersyndicale d'Haïti
  1. 210. Les plaignants allèguent que, le 17 décembre 1963, le gouvernement haïtien a, illégalement, procédé à la dissolution de la centrale syndicale autonome dénommée « Union intersyndicale d'Haïti ».
  2. 211. Dans ses observations, le gouvernement précise tout d'abord que l'Union intersyndicale d'Haïti n'a pas été dissoute, mais seulement suspendue. Il indique ensuite que cette mesure a été prise en application d'un jugement rendu en audience publique par le tribunal civil de Port-au-Prince agissant en sa qualité de tribunal du travail.
  3. 212. Il ressort tant des observations du gouvernement que du texte du jugement, fourni par ce dernier, que, conformément aux dispositions de l'article 279 du Code du travail, le secrétaire d'Etat du Travail et du Bien-être social, estimant que l'Union intersyndicale d'Haïti s'était, en la personne de ses dirigeants, rendue coupable d'infractions à la législation du travail et de menées politiques subversives, a cité cette organisation à comparaître devant le tribunal du travail afin que celui-ci, au cas où il la reconnaîtrait coupable, lui inflige les sanctions nécessaires.
  4. 213. Le tribunal de droit commun qui s'est prononcé en la matière a constaté que l'Union intersyndicale d'Haïti ne s'était pas conformée aux dispositions des articles 278 et 285 du Code du travail en refusant de fournir aux autorités compétentes la liste complète des associations syndicales affiliées à l'Union et tous les noms des membres des comités directeurs de ces associations malgré la réquisition faite à ce sujet par lettre datée du 25 septembre 1963, demeurée sans réponse.
  5. 214. Le tribunal a aussi constaté que l'organisation intéressée avait déclenché des grèves illégales en ce qu'elles ont eu lieu sans que les chefs d'entreprise aient reçu de préavis et alors que les questions en litige faisaient l'objet d'une action de conciliation devant les services compétents.
  6. 215. Le tribunal a établi encore, sur la base de rapports fournis par un inspecteur du travail, que l'Union avait commis à plusieurs reprises des actes délictueux contre les personnes et les biens.
  7. 216. Le tribunal a relevé enfin que la centrale mise en cause avait tenu des réunions clandestines en dehors de ses locaux, que les tracts de caractère politique incitant les travailleurs à la subversion, au sabotage et à des actes mettant en péril l'ordre public avaient été distribués en son nom, et que ses dirigeants, s'étant « mués en agitateurs », avaient, de syndicale qu'elle était, fait de l'Union une organisation poursuivant des buts politiques incompatibles avec son objet véritable.
  8. 217. Ayant fait les constatations qui précèdent, le tribunal, par un jugement en date du 17 décembre 1963, a ordonné la suspension des activités de l'Union intersyndicale d'Haïti.
  9. 218. Dans ses observations, le gouvernement déclare que la suspension des activités de l'Union n'a en rien affecté le libre fonctionnement des syndicats qui étaient affiliés à cette organisation. Le gouvernement joint à sa réponse le texte d'un communiqué diffusé le 17 décembre 1963 par le secrétaire d'Etat du Travail et du Bien-être, où celui-ci donnait l'assurance à ces syndicats qu'ils étaient autorisés à poursuivre normalement leurs activités sous la garantie et la protection de la loi et du gouvernement. « Et de fait - ajoute ce dernier dans ses observations -, ces associations, depuis la suspension des activités de l'U.I.H, ont fonctionné normalement. »
  10. 219. Il ressort assez clairement des explications fournies par le gouvernement, comme du jugement qui était joint à ses observations, que l'organisation, dont les activités ont été suspendues, s'était rendue coupable d'infractions au Code du travail en ne respectant pas les stipulations qui y sont contenues. D'autre part, il apparaît bien que cette organisation se soit livrée à des activités politiques dépassant le cadre d'activités syndicales normales. Aussi ne semble-t-il pas que la mesure dont elle a été frappée, et qui a été prise en application d'un jugement rendu en audience publique par des autorités judiciaires de droit commun, puisse être considérée comme constituant une atteinte à la liberté syndicale.
  11. 220. Pour cette raison, et tenant compte du fait que la mesure prise n'a pas affecté les syndicats qui étaient affiliés à l'organisation qui en a été l'objet, lesquels n'ont pas cessé de pouvoir fonctionner normalement, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
    • Allégations relatives à l'arrestation de dirigeants et de militants syndicaux
  12. 221. Les plaignants allèguent que, parallèlement à la mesure prise à l'encontre de l'Union intersyndicale d'Haïti, le gouvernement a procédé à l'arrestation arbitraire d'un certain nombre de dirigeants et de militants syndicaux. Parmi les personnes arrêtées, figureraient MM. Ulrick Joly, président de l'U.I.H, Claude François et Léon Gabriel, membres du Comité exécutif et respectivement présidents des syndicats du ciment et du sucre, Alcius Cadet et Arnold Maisoneuve, du Syndicat des débardeurs, enfin les dirigeants Prossoir et Guerrior.
  13. 222. Dans les diverses communications qu'il a adressées à l'O.I.T, le gouvernement s'abstient de présenter ses observations sur cet aspect du cas.
  14. 223. Etant donné qu'il s'agit d'allégations spécifiques revêtant une certaine gravité, le Comité recommande au Conseil d'administration de prier le gouvernement de bien vouloir présenter sur elles ses observations et, en attendant de les avoir reçues, d'ajourner l'examen de cet aspect du cas.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 224. En ce qui concerne le cas dans son ensemble, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de décider, pour les raisons indiquées aux paragraphes 219 et 220 ci-dessus, que les allégations relatives à la dissolution de l'Union intersyndicale d'Haïti n'appellent pas de sa part un examen plus approfondi;
    • b) de prier le gouvernement de bien vouloir présenter ses observations sur les allégations relatives à l'arrestation des dirigeants et des militants syndicaux nommément désignés dans la plainte de la Fédération syndicale mondiale en date du 28 avril 1964;
    • c) de prendre note du présent rapport intérimaire, étant entendu que le Comité fera à nouveau rapport lorsqu'il sera en possession des informations complémentaires dont la nature est précisée à l'alinéa b) ci-dessus.
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