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Rapport intérimaire - Rapport No. 92, 1966

Cas no 398 (Japon) - Date de la plainte: 30-AVR. -64 - Clos

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  1. 42. La plainte de la Fédération internationale des mineurs (Londres) a été présentée le 30 avril 1964. Le 10 mai 1964, une plainte a été soumise conjointement par le Conseil général des syndicats du Japon et par le Syndicat japonais des mineurs de charbon, qui ont fourni le 15 juillet 1964 des informations complémentaires à l'appui de leur plainte. Les observations du gouvernement du Japon au sujet de ces plaintes sont contenues dans une communication en date du 17 décembre 1964. A sa session de novembre 1965, le Comité a décidé de prier le gouvernement de fournir des informations complémentaires sur certains aspects du cas. Le gouvernement a donné suite à cette demande par une communication en date du 1er février 1966.
  2. 43. Le Japon a ratifié le 20 octobre 1953 convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, qui est entrée en vigueur le 20 octobre 1954 au Japon. Le 14 juin 1965, le Japon a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, qui entrera en vigueur au Japon le 14 juin 1966.
  3. 44. Les différentes allégations, qui concernent plus particulièrement, mais pas exclusivement, la non-application intégrale au Japon des dispositions de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, seront examinées séparément ci-dessous.

Allégations relatives à des mesures discriminatoires exercées à l'encontre de dirigeants et de membres du Syndicat Miike des mineurs de charbon

Allégations relatives à des mesures discriminatoires exercées à l'encontre de dirigeants et de membres du Syndicat Miike des mineurs de charbon
  1. a) Licenciement allégué de dix dirigeants syndicaux
  2. 45. Les plaignants allèguent que dix dirigeants du Syndicat Miike des mineurs de charbon auraient été licenciés le 23 août 1963 sous les prétextes indiqués ci-après. M. M. Miyakana, président du Syndicat, a été congédié en raison de divers actes qu'il aurait commis lors de la grève des mineurs des charbonnages Miike de 1960 et, notamment, pour être monté en juillet 1960 à bord d'un bateau du piquet de grève, entravant ainsi le transport du personnel et des matériaux par la Compagnie minière Mitsui (l'employeur), pour avoir encouragé l'activité illégale des piquets de grève et pour avoir gêné l'application d'une décision provisoire du tribunal de district. Un ou plusieurs de ces actes ou motifs ont été invoqués également en liaison avec l'organisation d'activités illégales de grève ou la participation à de telles activités et à des démonstrations ainsi que les entraves apportées à la poursuite du travail - tout cela au cours du conflit de 1960 - pour licencier aussi M. T. Kubota, vice-président du Syndicat, M. S. Haibara, secrétaire général, et d'autres dirigeants: MM. H. Nagata, S. Kamachi, T. Kitaoka, H. Koga, M. Kimura, A. Tsukamoto et M. Matsufuji.
  3. 46. Les plaignants signalent que les licenciements ont eu lieu deux ans après que furent commis les actes mentionnés, lesquels servent uniquement de prétexte, le but réel étant la destruction du Syndicat. Ils estiment que ces licenciements vont à l'encontre des propositions faites par le conciliateur en 1960, selon lesquelles il ne fallait pas en rechercher les responsabilités en ce qui concerne le conflit de 1960. Les plaignants soutiennent en outre que les actes commis par les individus en question n'étaient pas illégaux, mais qu'ils entraient dans le cadre de l'activité légitime des syndicats.
  4. 47. A l'appui de leur dire, selon lequel les licenciements se seraient inscrits dans un plan visant à détruire le Syndicat, les plaignants affirment ce qui suit: le programme de nationalisation de l'entreprise, dont l'existence fut connue en août 1959 et qui se trouve à l'origine du conflit, contenait certaines dispositions en vue du licenciement « par désignation » des travailleurs en surnombre, fondées sur certains critères, tels que l'âge, l'ancienneté, les responsabilités familiales, etc.; en outre deux autres critères étaient retenus, concernant, l'un, « tout homme dont l'attitude dans son service quotidien pouvait être jugée condamnable par la compagnie », et l'autre, « tout homme dont la personnalité ne s'adapte pas à la vie de la collectivité ». Il est allégué qu'au cours des négociations engagées à ce propos, la compagnie laissa entendre que le syndicalisme actif serait considéré comme un critère défavorable. Selon les plaignants, 1200 syndiqués ont été déclarés en surnombre, dont quatre cents syndicalistes actifs, auxquels il était reproché de « déranger la production ».
  5. 48. En ce qui concerne les cas ci-dessus de pratique déloyale en matière de relations professionnelles, le gouvernement déclarait, dans sa communication en date du 10 décembre 1964, n'être pas en mesure d'en décider dans un sens ou dans l'autre, car c'est aux tribunaux ou aux commissions des relations de travail qu'il incombe de se prononcer à ce sujet. En fait, la plupart des cas mentionnés ci-dessus et repris dans les plaintes étaient en instance devant les tribunaux ou les commissions des relations de travail. Le tribunal de district de Fukuoka a été saisi, le 1er octobre 1963, d'une requête lui demandant d'ordonner la réintégration des dix dirigeants syndicaux.
  6. 49. Le Comité a rappelé à sa session de novembre 1965 avoir toujours décidé, dans tous les cas où une affaire faisait l'objet d'une action devant une instance judiciaire nationale, d'ajourner l'examen du cas dans la mesure où cette action était susceptible de lui fournir des éléments d'information utiles et que, dans de nombreux cas, il avait demandé aux gouvernements de lui faire parvenir le texte des jugements rendus et de leurs attendus.
  7. 50. En conséquence, le Comité a demandé au gouvernement de bien vouloir le renseigner sur l'issue de l'action intentée auprès du tribunal de district de Fukuoka et de lui fournir une expédition du jugement rendu et de ses attendus.
  8. 51. Dans sa communication en date du 1er février 1966, le gouvernement déclare que l'affaire se trouve toujours en suspens devant le tribunal de district de Fukuoka. Etant donné le nombre d'aspects complexes impliqués dans l'affaire, dix-neuf auditions ont eu lieu entre le 1er octobre 1963 et le mois de décembre 1965 visant à compléter la liste des points de droit et de fait relatifs au cas. Le 25 décembre 1965, les parties se préparaient à apporter leurs témoignages.
  9. 52. Le Comité remercie le gouvernement de ces informations et le prie de bien vouloir l'informer en temps voulu du résultat des procédures engagées devant le tribunal de district de Fukuoka et de communiquer le texte du jugement rendu ainsi que celui de ses considérants.
  10. b) Licenciement allégué de vingt-huit syndicalistes actifs
  11. 53. Il est allégué que vingt-huit syndicalistes actifs ont été licenciés le 11 décembre 1961 sous prétexte de certains actes commis lors du conflit de 1960. Certaines de ces personnes ont été poursuivies pour ces actes, mais toutes ont été acquittées, sauf deux qui ont fait appel. Toutefois, selon les plaignants, ces personnes, bien qu'elles aient été acquittées, n'ont pas été réintégrées dans leurs emplois, ce qui, du point de vue des plaignants, prouve que ces licenciements visaient à désorganiser le syndicat.
  12. 54. Le gouvernement, dans sa communication du 17 décembre 1964, déclarait que le tribunal de district de Fukuoka avait été saisi, le 20 décembre 1961, d'une requête lui demandant d'ordonner la réintégration des intéressés.
  13. 55. Le Comité, à sa session de novembre 1965, a décidé de demander au gouvernement de bien vouloir le renseigner sur l'issue de l'action intentée et de lui faire parvenir des expéditions des jugements rendus et de leurs attendus.
  14. 56. Dans sa communication en date du 1er février 1966, le gouvernement déclare que l'affaire se trouve toujours en instance devant le tribunal de district de Fukuoka, la plus grande partie de l'examen des preuves s'étant terminée le 25 décembre 1965.
  15. 57. Le Comité prie donc le gouvernement de bien vouloir l'informer en temps utile du résultat des procédures engagées devant le tribunal de district de Fukuoka et lui fournir le texte du jugement rendu ainsi que celui de ses attendus.
  16. c) Mesures discriminatoires alléguées dont les syndiqués seraient victimes à l'embauchage, en matière de salaire, d'affectation et de réparation en cas d'accident
  17. 58. L'application du plan de nationalisation entraîna la fermeture des écoles établies par la Compagnie. En ce qui concerne les élèves dont la scolarité se terminait en mars 1960, les mesures discriminatoires suivantes leur auraient été appliquées. Un accord signé le 29 octobre 1960 stipulait que leur embauchage devait être retardé jusqu'en 1962. Il est allégué que le 27 juillet 1962, trente-huit de ces anciens élèves, qui avaient été recommandés par un nouveau syndicat concurrent, ont été engagés temporairement, mais que dix-neuf ouvriers recommandés par le Syndicat Miike des mineurs de charbon avaient été tous écartés, après des protestations réitérées, sept d'entre eux avaient été embauchés à titre provisoire le 28 décembre 1962. Tandis que les trente-huit ouvriers embauchés les premiers étaient engagés directement comme mineurs le 1er avril 1963, les sept autres, adhérant au Syndicat Miike des mineurs de charbon, ne bénéficiaient pas de cette nouvelle situation.
  18. 59. Il est allégué qu'il existe une grande différence dans les rémunérations versées aux membres du Syndicat Miike des mineurs de charbon et ceux des ouvriers qui ont quitté le Syndicat. Selon un tableau fourni par les plaignants, les gains mensuels moyens des syndiqués s'établissaient au 1er janvier 1961 à 61 dollars et ceux des ouvriers non syndiqués à 66,2 dollars; l'écart a continué de se creuser et, en mai 1963, ces chiffres s'établissaient respectivement à 69,6 et à 93,9 dollars.
  19. 60. La situation est encore aggravée par le système de qualification du travail appliqué. Le chef d'équipe est chargé de la classification de chaque ouvrier de son équipe dans l'échelle des salaires. Avant le conflit de 1960, cette classification était impartiale et régulière, mais, depuis lors, ainsi qu'il est allégué, les membres d'un syndicat concurrent ont été systématiquement mieux classés que ceux du Syndicat Miike des mineurs de charbon. Il est allégué aussi que les employeurs nomment chefs d'équipe des hommes ayant peu d'expérience, pour autant qu'ils fassent partie du syndicat concurrent, et ne tiennent aucun compte des demandes émanant de membres du Syndicat Miike des mineurs de charbon, qui sont bien plus expérimentés et qualifiés.
  20. 61. Il est allégué que, dans le cas des travailleurs affectés au roulage dans la mine Yotsuyama, des membres du Syndicat Miike des mineurs de charbon ayant quinze années d'expérience étaient rémunérés, à la date du 7 janvier 1964, sur la base de 2,09 « points de travail », et ceux du syndicat concurrent, n'ayant que trois années d'expérience, sur la base de 2,24 points de travail.
  21. 62. Il est allégué qu'avant le conflit de 1960, et conformément aux dispositions d'une convention collective, l'affectation des travailleurs aux postes et équipes était déterminée après consultation entre le Syndicat et la direction. Depuis lors, les affectations sont décidées unilatéralement par un préposé spécial de la Compagnie, cela d'une façon discriminatoire à l'égard des membres du Syndicat.
  22. 63. Les plaignants déclarent que M. Obuchi, « surveillant d'extraction », qui s'était absenté du 8 décembre 1958 au 8 décembre 1961 parce qu'il était malade, a été affecté à son retour, bien qu'il fût encore malade, à des travaux manuels pénibles, la Compagnie ayant refusé, sous prétexte que l'effectif de l'atelier était complet, de le réaffecter à son ancien travail. Il est allégué que le chef du service du personnel ainsi qu'un autre membre de ce dernier lui ont fait comprendre à diverses reprises qu'il serait transféré à ses anciennes fonctions de surveillance s'il quittait le Syndicat Miike des mineurs de charbon pour adhérer au nouveau syndicat concurrent. Il est allégué qu'il a quitté son Syndicat pour adhérer au syndicat rival et que le lendemain même il était transféré à son ancien poste de surveillant.
  23. 64. Les plaignants signalent également le cas de M. T. Kamimura, piqueur depuis vingt-deux ans. Il est allégué que M. Kamimura, membre du Syndicat Miike des mineurs de charbon, est affecté aux travaux les plus pénibles dans la partie la plus chaude de la mine, alors que des membres du syndicat concurrent, ayant moins d'expérience, travaillent dans de meilleures conditions et sont payés deux fois plus. Il est allégué que tous ceux qui adhèrent au nouveau syndicat sont immédiatement affectés à des travaux moins pénibles et mieux rémunérés.
  24. 65. En ce qui concerne l'affectation du personnel du roulage faisant partie du deuxième poste de la mine Miyaura pendant la période allant du 4 au 31 janvier 1964, il est allégué que quatre-vingt-quinze membres du Syndicat Miike des mineurs de charbon ont été affectés au roulage proprement dit et 395 à des travaux divers, alors que 1321 travailleurs, tous membres du syndicat concurrent, ont été affectés au roulage proprement dit et aucun d'eux à l'un ou l'autre de ces travaux divers.
  25. 66. Les plaignants ont fourni le tableau suivant, portant sur les mois de février, d'avril et de mai 1964, et concernant la mine Miyaura.
  26. Mois Effectif Travailleurs Roulage Travaux Travaux Travailleurs
  27. total syndiqués divers mieux embauchés
  28. classés
  29. Février 1867 Syndicat Miike 243 302 15 28
  30. Syndicat rival 1232 0 75 56
  31. Avril 1550 Syndicat Miike 209 229 1 26
  32. Syndicat rival 1023 0 88 56
  33. Mai 1697 Syndicat Miike 222 193 11 25
  34. Syndicat rival 1178 0 93 55
  35. 67. En janvier 1964, l'importance du dortoir de la mine Yotsuyama devait être réduite et certains des travailleurs devaient être affectés ailleurs. Il est allégué que, le 11 janvier, M. Saruwatari, chef du service du personnel, déclara à l'un des membres du Syndicat Miike des mineurs de charbon touché par cette mesure, M. Miyazaki, qu'il le ferait nommer secrétaire d'une équipe d'extraction s'il adhérait au nouveau syndicat, mais, comme il refusait de quitter l'ancien syndicat, il fut affecté à un poste inférieur à la sécherie.
  36. 68. Il est allégué qu'en mai 1964, à la mine Yotsuyama, M. H. Hirakawa, âgé de vingt-quatre ans et ayant deux années d'expérience, membre du syndicat concurrent, a été affecté vingt-cinq fois au roulage proprement dit, sans jamais l'être à des travaux divers, et qu'il a gagné 3,69 dollars par jour; M. N. Takara, âgé de vingt-huit ans, membre du syndicat concurrent et ayant trois années d'expérience, a été affecté douze fois au roulage proprement dit et deux fois à des travaux divers, tout en gagnant 2,31 dollars par jour. Mais M. Y. Beri, âgé de vingt-quatre ans, ayant trois années d'expérience et membre du Syndicat Miike, a été affecté treize fois au roulage proprement dit et trois fois à des travaux divers, gagnant 2,23 dollars par jour, alors que M. Y. Tokunaga, âgé de trente et un ans, membre du Syndicat Miike et ayant huit années d'expérience, a été affecté dix-huit fois au roulage proprement dit et trois fois à des travaux divers, en gagnant 2,26 dollars par jour.
  37. 69. Les plaignants soutiennent que la sécurité dans les mines n'a été aucunement améliorée depuis l'accident de novembre 1963 et que, depuis avril 1964, la fréquence des accidents a augmenté en même temps que la production. La très forte fréquence d'accidents est relevée aux endroits les plus chauds et c'est précisément là, selon les allégations, que sont affectés les membres du Syndicat Miike des mineurs de charbon qui sont ainsi victimes d'une discrimination qui vise leur syndicat.
  38. 70. Dans leur communication du 15 juillet 1964, le Conseil général des syndicats du Japon et le Syndicat japonais des mineurs de charbon évoquent la situation dans laquelle se trouvent les familles des victimes du sinistre du 9 novembre 1963. Selon les plaignants, la sécurité sociale est insuffisante au Japon et les employeurs, de leur côté, ne veulent pas remplir leurs obligations d'assistance aux familles endeuillées et aux invalides. Après le sinistre, le Syndicat pressa la Compagnie de fournir des emplois aux veuves et autres membres de la famille des mineurs, mais, d'après lui, les résultats obtenus sont maigres.
  39. 71. Il est allégué qu'en ce qui concerne le versement de la réparation aux familles des victimes, il existe une discrimination. Ainsi, cette réparation est en moyenne de 2350 dollars lorsque la victime était membre du Syndicat Miike des mineurs de charbon, et de 3328 ou de 3972 dollars, selon le cas, lorsqu'elle appartenait à l'un des deux syndicats rivaux. Des chiffres sont fournis à l'appui des assertions selon lesquelles les mineurs que le sinistre a rendus invalides sont l'objet d'une discrimination analogue.
  40. 72. En ce qui concerne les questions mentionnées aux paragraphes 58 à 64 ci-dessus, le gouvernement signalait dans sa communication du 17 décembre 1964 que la Commission départementale des relations de travail de Fukuoka avait été saisie, le 27 novembre 1961, d'une plainte concernant le recours à des pratiques déloyales en matière de relations professionnelles. La Commission a décidé le 31 août 1964 de donner droit en partie à cette requête, mais aucune des parties n'ayant été satisfaite, la Commission centrale des relations professionnelles a été saisie par elles, le 18 septembre 1964, d'une requête en révision
  41. 73. Le Comité a donc décidé, à sa session de novembre 1965, de demander au gouvernement de bien vouloir le tenir au courant de l'issue du procès en révision et de lui faire parvenir les textes des ordonnances rendues par les diverses commissions, ainsi que des attendus.
  42. 74. Par sa communication en date du 1er février 1966, le gouvernement a fourni le texte de l'ordonnance rendue par la Commission préfectorale des relations de travail de Fukuoka le 31 août 1964 en ce qui concerne les questions mentionnées aux paragraphes 58 à 64 ci-dessus. Il déclare cependant que la révision par la Commission centrale des relations professionnelles demandée le 18 septembre 1964 se trouve toujours en instance.
  43. 75. En conséquence, le Comité prie le gouvernement de bien vouloir l'informer en temps utile de l'issue des procédures de révision et lui fournir un exemplaire de l'ordonnance de la Commission centrale des relations de travail comme de ses attendus.
  44. 76. A sa session de novembre 1965, le Comité avait également décidé de prier le gouvernement de bien vouloir présenter ses observations sur les questions mentionnées aux paragraphes 65 à 71 ci-dessus, qui étaient formulées sous forme d'allégations détaillées dans les paragraphes 43 à 45 de la plainte du 10 mai 1964, dans ses annexes et dans les chapitres T et Il de la plainte du 15 juillet 1964.
  45. 77. Dans sa communication en date du 1er février 1966, le gouvernement déclare que les plaintes relatives aux questions mentionnées aux paragraphes 65 à 68 ci-dessus ont été portées devant la Commission préfectorale des relations professionnelles de Fukuoka en décembre 1964 et se trouvent maintenant en instance devant cet organisme. Le Comité prie donc le gouvernement de bien vouloir lui fournir en temps utile le texte de l'ordonnance qui sera rendue par la Commission ainsi que celui de ses considérants.
  46. Allégations relatives au refus de négociation collective avec le Syndicat Miike des mineurs de charbon de la part de la Compagnie et à des ingérences dans les activités du Syndicat
  47. 78. Il allégué que, depuis le conflit de 1960, la Compagnie a constamment refusé de négocier avec le Syndicat, ce refus étant un aspect de sa politique, qui vise à le désorganiser.
  48. 79. Aux termes d'un accord conclu le 6 novembre 1961 par le Syndicat et la Compagnie, le recrutement en sous-entreprise doit faire l'objet d'une « consultation préalable avec le Syndicat ». Il est allégué que la Compagnie a recruté en sous-entreprise, avant que la consultation eût abouti à une conclusion quelconque, des mineurs de la mine Mikawa le 1er février 1962 et de la mine Yotsuyama en octobre 1962.
  49. 80. Le 11 juillet 1963, la Compagnie a averti le Syndicat que, dans le cadre de son programme de nationalisation, les salaires seraient diminués de 6 pour cent. Il est allégué que la Compagnie n'a tenu aucun compte des demandes présentées pour engager des négociations.
  50. 81. Les plaignants mentionnent la question de l'application du principe du remploi des mineurs touchés par la fermeture de certains puits.
  51. 82. Il est allégué que, le 28 juin 1963, un accord a été signé par la Compagnie et la Fédération Mitsui des mineurs (le syndicat rival qui recrute des adhérents parmi les mineurs employés par la Compagnie Mitsui), aux termes duquel 2200 mineurs travaillant à trois puits en passe d'être fermés devaient être affectés à d'autres puits. Un accord analogue a été signé par la Compagnie avec la Fédération des syndicats du personnel du siège de la Compagnie minière Mitsui (le syndicat rival qui recrute ses adhérents parmi le personnel du siège). Toutefois, alors que le Syndicat Miike des mineurs de charbon demandait l'ouverture de négociations sur cette même question, la Compagnie lui opposa un refus le 6 août 1963.
  52. 83. La mine Yotsuyama a été le théâtre de graves accidents les 28 et 29 août 1963 et le 17 octobre 1963. Il est allégué que toutes les demandes faites en vue de consultations portant sur la sécurité dans les puits furent rejetées par la Compagnie.
  53. 84. Le 9 novembre 1963, se produisit la catastrophe qui coûta la vie à plusieurs centaines de mineurs. Le Syndicat négocia alors avec la Compagnie au sujet d'indemnités d'assistance, de la situation des familles des victimes, et demanda que les travailleurs soient consultés au sujet des mesures de sécurité à prendre à l'avenir. Toutefois, le 19 janvier 1964, lorsque la situation dans un autre puits devint dangereuse et que le Syndicat protesta, la Compagnie aurait refusé toute consultation.
  54. 85. Tous les éléments cités jusqu'à présent constituent, aux yeux des plaignants, autant de tentatives faites par la Compagnie pour désorganiser et anéantir le Syndicat Miike des mineurs de charbon.
  55. 86. Il est allégué en outre que, depuis le 14 septembre 1961, la Compagnie interdit la propagande et les réunions du Syndicat dans le périmètre de la Compagnie et en défend l'accès aux dirigeants syndicaux, malgré un mémorandum d'accord du 25 novembre 1960, et que les dirigeants syndicaux qui voulaient communiquer normalement avec leurs membres en ont été empêchés par la force.
  56. 87. Aux termes du texte communiqué par les plaignants, le mémorandum donnait effet à la pratique généralement admise jusqu'alors, selon laquelle les dirigeants syndicaux avaient le droit de pénétrer dans le périmètre de la Compagnie pour donner des renseignements à leurs membres en dehors des heures de travail de ces derniers.
  57. 88. Les plaignants allèguent que la Compagnie fit appel à des gangsters pour contrer le Syndicat lors du conflit de 1959-60. Il est allégué que ces gangsters circulaient dans les quartiers d'habitation des mineurs et qu'ils exercèrent des violences contre ces derniers et leur famille, qu'ils distribuèrent en hélicoptères des tracts incitant à l'assassinat de dirigeants syndicaux, qu'ils se lancèrent en voiture sur les piquets de grève du Syndicat et les attaquèrent les armes à la main. L'un des gangsters, nommé Kazuki, poignarda le 29 mars 1960, M. K. Kubo, qui fut blessé à mort.
  58. 89. Il est allégué que le let janvier 1960, au cours du grand conflit, la Compagnie fit distribuer aux familles de tous les mineurs des tracts imprimés leur demandant de s'opposer à la politique du Syndicat.
  59. 90. Des cadres de la Compagnie auraient tenté de provoquer une scission au sein du Syndicat, lors du conflit, en invitant les membres mécontents à les rencontrer dans les restaurants où ils leur auraient indiqué comment procéder pour provoquer cette scission. La Compagnie aurait publié un guide à l'usage de ceux qui se seraient chargés de provoquer la scission du Syndicat. La scission du Syndicat s'ensuivit le 17 mars 1960.
  60. 91. Certains de ces incidents ont fait l'objet de poursuites engagées devant le tribunal de district de Fukuoka. Le 1er juillet 1960, un témoin, M. S. Iwashita, aurait déclaré devant le tribunal qu'il avait été invité le 5 mars 1960 à prendre une consommation dans la maison d'un chef d'équipe, M. Mizoguchi, qui lui fit savoir qu'un nouveau syndicat serait créé le 13 mars, en le pressant d'adhérer à ce syndicat, auquel cas la Compagnie lui verserait 100000 yens, plus 5000 yens pour chaque mineur qu'il inciterait à agir de même. Le témoin a déclaré que M. Mizoguchi lui demanda de lui donner sa réponse au plus tôt, du fait qu'il devait faire « rapport chaque matin au directeur adjoint au sujet des résultats obtenus par lui ». Le témoin, M. T. Miyazuki, aurait déclaré que quarante mineurs avaient été invités à boire du saké dans un restaurant de Yanagawa, où se trouvaient quatre personnes qui critiquaient le Syndicat, y compris un membre de la municipalité, et M. Kozakai, directeur adjoint des puits Yotsuyama. M. Kozakai aurait prononcé, au nom de la Compagnie qui réglait les frais, un discours dans lequel il critiqua le Syndicat. Selon le témoin, il fut le seul des quarante personnes assistant à la réunion à ne pas adhérer au nouveau syndicat.
  61. 92. En ce qui concerne les événements décrits aux paragraphes 90 et 91 ci-dessus, qui, sont repris dans le paragraphe 38 et dans l'annexe 20 de la plainte du 10 mai 1964, le gouvernement signalait dans sa communication du 17 décembre 1964 que la Commission départementale des relations de travail de Fukuoka avait été saisie d'une plainte en date des 10 et 12 mars 1960. La Commission a pris le 31 août 1964 une ordonnance résolvant en partie les problèmes découlant de ces cas. Les deux parties se sont déclarées insatisfaites de cette décision et ont présenté le 18 septembre 1964 une demande de révision à la Commission centrale des relations de travail.
  62. 93. A sa session de novembre 1965, le Comité a décidé de demander au gouvernement de bien vouloir le tenir au courant de l'issue de la procédure de révision et de lui faire parvenir des exemplaires des ordonnances rendues par les diverses commissions ainsi que de leurs attendus. En ce qui concerne les questions évoquées aux paragraphes 78 à 89 ci-dessus, qui sont reprises sous forme d'allégations détaillées dans les paragraphes 22 à 37 et 39 à 42 de la plainte en date du 10 mai 1964 et de ses annexes, le Comité a décidé de demander au gouvernement de bien vouloir lui communiquer ses observations.
  63. 94. Dans sa communication en date du 1er février 1966, le gouvernement, tout en fournissant le texte de l'ordonnance rendue par la Commission préfectorale des relations de travail de Fukuoka, déclare que les procédures de révision se trouvent toujours en instance devant la Commission centrale des relations de travail. Le Comité prie donc le gouvernement de bien vouloir l'informer en temps utile du résultat des procédures de révision et lui fournir le texte de l'ordonnance de la Commission centrale des relations de travail ainsi que celui de ses considérants.
  64. 95. En ce qui concerne les questions mentionnées aux paragraphes 78 à 89 ci-dessus (qui figurent aux paragraphes 22 à 37 et 39 à 42 de la plainte du 10 mai 1964 ainsi que dans les annexes pertinentes), le gouvernement déclare que ces questions sont de la compétence de la Commission des relations de travail et qu'il n'est pas en mesure de déterminer si elles constituent une pratique de travail déloyale.
  65. 96. Le point de savoir si les questions mentionnées aux paragraphes 78 à 89 ci-dessus ont ou non fait l'objet d'un recours devant la Commission des relations de travail n'apparaît pas clairement. Si elles ont fait l'objet d'un tel recours, le Comité comprend que le gouvernement s'abstienne de présenter des commentaires sur une affaire qui se trouve en instance et, si tel est le cas, il prie le gouvernement de bien vouloir fournir des informations sur les recours portés devant la Commission ainsi que sur les ordonnances rendues ou devant l'être. Si les questions dont il s'agit relèvent normalement - comme le gouvernement a l'air de le dire - de la compétence de la Commission des relations de travail mais n'ont pas effectivement été portées devant elle, elles ne sauraient être considérées comme étant en instance mais bien comme des allégations de fait au sujet desquelles le Comité est contraint de renouveler la demande qu'il avait déjà faite au gouvernement de présenter sur elles ses observations.
  66. Allégations relatives à l'absence de mesures garantissant le droit d'organisation
  67. 97. Les plaignants allèguent que les organismes nationaux qui devraient protéger le droit d'organisation et assurer ainsi l'application des dispositions des articles 1, 2 ou 3 de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ne fonctionnent pas convenablement. A cet égard, les plaignants mentionnent les tribunaux, les commissions des relations de travail, l'inspection des normes du travail et le Bureau de contrôle de la sécurité dans la mine.
  68. a) Allégations relatives aux tribunaux
  69. i) Prétendue lenteur de la procédure judiciaire
  70. 98. Il est soutenu que les procès concernant les conflits du travail traînent trop en longueur et imposent de ce fait une charge économique trop lourde aux travailleurs; c'est ainsi que les demandes présentées par le Syndicat Miike des mineurs de charbon en vue d'obtenir des tribunaux des décisions provisoires lors du conflit de 1959-60 ont traîné pendant des années avant d'être tranchées. Les cas suivants sont cités:
  71. 99. M. C. Endo, l'un des dirigeants de la branche Mikawa du Syndicat, fut licencié à titre de mesure disciplinaire le 6 avril 1959, à la suite d'une « bagarre dans l'atelier ». Le 22 avril 1959, la Compagnie demanda au tribunal de Fukuoka d'interdire à Endo de pénétrer dans le périmètre de la mine, le 21 avril, le Syndicat allait demander à la même instance de rendre une ordonnance lui permettant de continuer à travailler; il est allégué que le tribunal a accordé le jour même la demande d'interdiction de la Compagnie, tandis que la demande de mesures provisoires présentée la veille par le Syndicat ne fut satisfaite que le 30 novembre 1963.
  72. 100. Le même genre de fait est reproché à ce tribunal en ce qui concerne les demandes présentées par les deux parties aussitôt après le licenciement, intervenu le 3 octobre 1959, de trois membres de la branche syndicale Mikawa: MM. M. Shimoda, K Iwashita et J. Hayashi.
  73. 101. Le 5 décembre 1959, le fait a été signalé plus haut, 1200 ouvriers furent déclarés en surnombre et licenciés. La plupart d'entre eux se soumirent à la décision de la Commission des relations de travail et partirent; 168 ouvriers n'acceptèrent pas la sentence et intentèrent devant le tribunal de Fukuoka des actions aux fins d'invalidation de la décision de licenciement. Le 30 novembre 1963, aucune décision n'avait été prise.
  74. 102. Deux membres du Syndicat, MM. T. Takayama et M. Kojo, ont été licenciés à titre de mesure disciplinaire le 13 décembre 1960. Le Syndicat demanda au tribunal de prendre une mesure provisoire afin de leur permettre de continuer de travailler, mais, le 30 novembre 1963, aucune audience n'avait encore été consacrée à cette affaire. La situation serait la même en ce qui concerne une requête présentée au tribunal le 20 décembre 1961 au sujet du licenciement, le 16 mai 1961, de M. A. Matsuwa, une requête introduite le 30 décembre 1961 au sujet du licenciement, le 28 décembre 1961, de M. T. Hayashimasa et une requête introduite en février 1962 au sujet du licenciement, le 18 janvier 1962, de M.I. Tanuguchi.
  75. 103. Le 11 décembre 1961, vingt-huit syndiqués furent licenciés sous prétexte d'actes commis lors du conflit de 1959-60. Le 20 décembre 1961, le Syndicat sollicita à ce sujet une décision du tribunal de Fukuoka. Il est allégué que des audiences ont bien eu lieu depuis juin 1962, mais qu'à la date du 30 novembre 1963, seuls trois cas avaient été tranchés.
  76. 104. Les plaignants allèguent que, lors du conflit, les tribunaux prirent rapidement des décisions en ce qui concerne les demandes introduites par la Compagnie, sans donner au Syndicat l'occasion de présenter son point de vue; par contre, les demandes du Syndicat firent l'objet de décisions prises après un long délai et sans portée véritable.
  77. 105. En ce qui concerne les différents cas mentionnés aux paragraphes 99 à 103 ci-dessus, le gouvernement a fourni, dans sa communication du 17 décembre 1964, des statistiques d'où il ressort qu'un grand nombre de témoins ont été entendus, qu'un nombre considérable d'audiences ont eu lieu et que les dossiers de chaque affaire représentaient plusieurs milliers de pages. Les retards enregistrés en ce qui concerne les audiences dans les cas en question s'expliquent par diverses raisons: renvois d'audiences à la demande des parties, conclusions déposées avec du retard, etc. Ainsi, disait le gouvernement, les requêtes introduites par les travailleurs sont inévitablement longues à instruire. D'autre part, selon le gouvernement, les requêtes présentées par les employeurs sont en général plus faciles à instruire, du fait qu'elles se limitent à certaines questions précises, telles que l'interdiction de pénétrer dans le périmètre de la mine, sur lesquelles il n'y a en général pas matière à argutie. Il faut beaucoup plus de temps à un travailleur pour fournir ses preuves dans un cas de licenciement prétendument injustifié. La plupart des affaires soumises aux tribunaux par les employeurs font l'objet d'une « procédure non formelle », sans qu'il soit nécessaire d'avoir recours à des débats oraux. Certaines des affaires présentées par les travailleurs sont également réglées dans les quinze jours, mais la plupart d'entre elles font l'objet d'une « procédure formelle » avec des débats oraux, et il faut dans les 277 jours pour pouvoir régler près de la moitié de ces affaires. Le gouvernement donnait des précisions techniques sur les longueurs de la procédure, qui s'expliquent par les règles détaillées inscrites dans le Code de procédure civile.
  78. 106. A sa session de novembre 1965, le Comité a observé que la réponse du gouvernement ne permettait pas de se faire une idée précise de la situation en ce qui concerne le règlement des cas particuliers cités aux paragraphes 98 à 103 ci-dessus, mais qu'il paraissait que la plupart d'entre eux étaient toujours en instance. Dans ces conditions, le Comité, avant de donner son opinion sur ces cas particuliers, a décidé de demander au gouvernement de bien vouloir le prévenir lorsque ces cas particuliers seraient réglés et de le renseigner également sur l'issue des procédures engagées.
  79. 107. Dans sa communication en date du 1er février 1966, le gouvernement déclare que les requêtes introduites par MM. Endo, Shimoda et autres (voir paragr. 99 et 100 ci-dessus) ont été rejetées par le tribunal de district de Fukuoka le 2 octobre 1964, mais que des recours en appel devant la Haute Cour de Fukuoka se trouvent en instance. Les affaires dont il est question aux paragraphes 101 à 103 ci-dessus se trouvent toujours en instance devant le tribunal de district de Fukuoka. Dans ces conditions, le Comité prie le gouvernement de bien vouloir fournir le texte des jugements rendus ou devant être rendus soit par le tribunal de district de Fukuoka, soit par la Haute Cour, selon le cas.
  80. ii) Tendance antisyndicale alléguée des tribunaux
  81. 108. En ce qui concerne les poursuites engagées contre sept travailleurs en vertu de la loi interdisant la violence, il est allégué que le juge du tribunal de Kumamoto a limité à trente minutes le temps imparti aux accusés pour faire leur déclaration, ainsi que pour interroger les témoins. Les plaignants allèguent que l'un de leurs avocats, M. Yokoyama, protesta contre une décision provisoire du tribunal de Fukuoka et fut condamné à une amende de 300 000 yens par le juge de ce tribunal pour avoir troublé l'ordre dans la salle du tribunal. Les plaignants fournissent le texte de la déclaration faite par l'avocat en question.
  82. 109. Le gouvernement a fourni, dans sa communication du 17 décembre 1964, des observations très détaillées à propos de cet aspect du cas. Il appartient à la Cour de décider de fixer les limites d'interrogatoire des témoins et les avocats des deux parties doivent se plier à ses décisions. Il semblerait que, dans le cas cité, le tribunal a pris une série de décisions en vue d'éliminer les preuves non pertinentes et de limiter les témoignages et les questions posées aux témoins aux faits pertinents, et c'est contre ces décisions que l'avocat a protesté. Selon les observations communiquées, il semble qu'il ait fallu des heures d'affilée à l'avocat pour présenter ses diverses objections et demandes. L'avocat auquel se réfèrent les plaignants semble avoir été condamné à une amende pour avoir notamment accusé le tribunal de partialité politique et d'avoir perdu la tête.
  83. 110. Il semble au Comité que les plaignants n'ont pas fourni de preuves, ni dans un sens ni dans l'autre, en démontrant que les décisions du tribunal de Kumamoto ont violé les droits syndicaux ou, de façon plus générale, étayant leurs allégations en ce qui concerne la tendance antisyndicale des tribunaux.
  84. 111. Dans ces conditions, pour les raisons indiquées au paragraphe 110 ci-dessus, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que ces allégations n'appellent pas un examen plus approfondi.
  85. b) Allégations relatives aux commissions des relations de travail
  86. 112. Les plaignants allèguent que le système de règlement des conflits est à la fois lourd et rigide. Les cas de pratique déloyale sont généralement examinés par la Commission locale des relations de travail, contre les décisions de laquelle il peut être recouru, soit auprès de la Commission centrale des relations de travail, soit par une procédure administrative soumise à un tribunal. Les litiges administratifs sont soumis à un système à trois instances calqué sur le système judiciaire. De ce fait, l'employeur, au dire des plaignants, peut avoir recours à cinq tribunaux ou commissions pour prolonger la procédure et neutraliser les tentatives faites par le Syndicat pour qu'il soit remédié à la situation.
  87. 113. Même la procédure devant la Commission locale des relations de travail traînerait en longueur, selon les plaignants, au dire desquels le délai nécessaire, pour que la première audience ait lieu, aurait été de cent quatre jours en 1960, de cent vingt et un jours en 1961 et de cent quarante-quatre jours en 1962.
  88. 114. Les plaignants sont d'avis que les commissions ne comprennent pas comme il faudrait le droit d'organisation. Depuis novembre 1959, la Commission centrale des relations de travail a proposé quatre projets de règlement par la médiation du conflit de la mine Miike, projet dont aucun, selon les plaignants, ne portait remède à la violation du droit au travail, concrétisée par le licenciement de 1200 ouvriers qui est à l'origine du conflit. Ils s'opposent à la suggestion de la Commission selon laquelle le licenciement pourrait être transformé en mise à la retraite, solution qui, à leur avis, démontre une incompréhension totale des motifs qui sont à l'origine du conflit. Ils estiment que la Commission a outrepassé ses fonctions de médiation en essayant de faire appliquer ses décisions, comme si elle faisait office d'arbitre obligatoire, ce qu'elle n'est pas.
  89. 115. Selon les plaignants, la Commission a proposé, dans deux de ses projets de règlement, que « les responsabilités en ce qui concerne le conflit ne soient pas recherchées » et que le conflit soit réglé notamment sur cette base. Toutefois, deux années après, la Compagnie a licencié dix responsables syndicaux et vingt-huit syndiqués, en prenant prétexte d'actes commis lors du conflit, violant ainsi, de l'avis des plaignants, les termes de la médiation. De ce fait, le Syndicat a demandé, le 25 mars 1963, que la Commission centrale des relations de travail intervienne comme médiatrice, mais, selon ses dires, la Commission s'est dérobée à ses obligations, la Compagnie ayant fait savoir sans ambages qu'elle maintiendrait sa position.
  90. 116. Le gouvernement explique qu'un syndicat ou un travailleur peut recourir devant la Commission des relations de travail dans les cas de pratique déloyale en matière de travail, à moins qu'il ne préfère intenter devant les tribunaux, conformément au Code de procédure civile, une action en dommages-intérêts ou en annulation du congédiement, etc. La partie qui n'est pas satisfaite de l'ordonnance rendue par une commission des relations de travail peut introduire, devant le tribunal, une action administrative en révision de cette décision. Comme le signalent les plaignants, ladite partie peut engager une procédure en cinq phases, soit deux au niveau de la Commission des relations professionnelles et trois sur le plan judiciaire.
  91. 117. Le gouvernement précise que, de 1959 à 1963, 82 à 87 pour cent des cas réglés l'ont été par voie de conciliation et de retrait et de 13 à 18 pour cent seulement par voie d'ordonnance de la Commission. Ainsi, on jugerait mal du rôle de la Commission en se référant uniquement aux délais écoulés pour régler une affaire si l'on ne tenait compte en même temps du fait que la grande majorité des cas sont réglés par voie de conciliation. En 1963, le nombre des jours nécessaires au règlement des cas par ordonnance de la Commission ou par sentence du tribunal a été de 323 par cas et, pour ce qui est des cas réglés par voie de compromis ou de retrait, de cent quarante-cinq jours; le nombre de jours nécessaires au règlement varie selon le degré de difficulté de l'étude des faits; c'est ainsi qu'en 1963 un cas a pu être réglé en l'espace de sept jours, alors qu'il a fallu six cent soixante jours pour un autre cas.
  92. 118. Dans le cas du conflit Miike, le gouvernement signale que, contrairement à ce qui a été affirmé, la médiation n'a été entachée d'aucun élément ayant force obligatoire. Tous les efforts de conciliation déployés pendant près d'une année pour régler le cas du licenciement de 1200 ouvriers ayant été vains, un nouveau syndicat fut constitué, auquel adhérèrent ceux qui voulaient reprendre le travail; dans l'ensemble, tout le monde voulait que le litige fût réglé, mais personne n'était contraint d'accepter les propositions de compromis qui avaient été faites.
  93. 119. Le gouvernement reconnaît que le Syndicat des travailleurs des mines du Japon a présenté le 25 mars 1963 une demande de conciliation. Après que les parties se furent consultées librement le 31 juillet 1963, la Compagnie fit savoir, le 7 août, qu'elle écartait la procédure de conciliation et, le 8 août, le Syndicat retira sa demande de conciliation. Ainsi donc, selon le gouvernement, il n'est pas exact que la Commission se soit soustraite à ses obligations.
  94. 120. Les principaux points soulevés par les plaignants sont que la procédure de conciliation traîne trop en longueur et que, dans le cas de pratique déloyale dans les relations de travail, cette situation est encore pire parce que, en faisant appel aux tribunaux, il faut épuiser des recours passant par cinq stades - trois au niveau des commissions et deux sur le plan judiciaire - pour aboutir à une décision. Cette procédure est très onéreuse pour les syndicats et les travailleurs. Les parties ne semblent pas d'accord en ce qui concerne les délais nécessaires pour qu'une affaire soit tranchée par une commission des relations de travail, mais le gouvernement admet toutefois qu'il fallait en moyenne cent quarante-cinq jours en 1963 pour arriver à un compromis et trois cent vingt-trois jours en moyenne avant qu'une décision fût prise.
  95. 121. Certains aspects de ces allégations semblent mériter d'être examinés à la lumière des principes énoncés dans la recommandation (no 92) sur la conciliation et l'arbitrage volontaires, 1951; il apparaît toutefois préférable d'ajourner la formulation de conclusions définitives à ce sujet jusqu'à ce que le Comité soit en mesure de soumettre sur l'ensemble du cas ses recommandations au Conseil d'administration.
  96. c) Allégations relatives à l'utilisation de la police lors du conflit Miike
  97. 122. Les plaignants critiquent, pour des motifs divers, l'attitude adoptée par la police lors du conflit Miike.
  98. 123. Le 17 juin 1959, une réunion de masse fut organisée pour protester contre le licenciement de M. Endo, président de la branche syndicale Mikawa. A cette réunion assistaient six surveillants adjoints, envoyés par la direction, dont l'un était subrepticement équipé d'un poste radio à ondes courtes et accompagné, ainsi qu'il est allégué, par un sergent de police.
  99. 124. Il est allégué que, lors de la constitution d'un syndicat rival qui devait briser la grève, la police se livra à des actes de violence sur les syndiqués et les piquets de grève, et procédèrent à leur arrestation sans aucun motif valable et, en guise de précaution, les policiers envisagèrent de camper à proximité d'un quartier d'habitations de mineurs.
  100. 125. Les plaignants signalent que, lors du conflit, des milliers de policiers furent cantonnés dans la région, ce qui gêna le déroulement normal du conflit, et qu'ils encouragèrent l'activité du nouveau syndicat rival, opposé à la grève, et que des policiers furent cantonnés dans les locaux du Syndicat pour empêcher celui-ci de se réunir et que, dans le même but, ils occupèrent les lieux de réunion normalement utilisés par le Syndicat. Il est également allégué que les policiers procédèrent à des exercices d'entraînement dans cette région pour intimider les travailleurs.
  101. 126. Le gouvernement déclare, en ce qui concerne les cas cités dans le paragraphe 123 ci-dessus que, le 20 avril 1959 déjà, environ soixante-dix membres du Syndicat avaient pénétré de force dans la mine où ils blessèrent deux membres du personnel de la Compagnie, et que, le 8 mai 1959, quelque trois cents membres du Syndicat importunèrent pendant six heures les membres du personnel de direction. Selon le gouvernement, la police avait appris que le Syndicat espérait engager, le 17 juin 1959, les négociations avec la Compagnie en s'appuyant sur un millier de membres syndiqués. Le sergent de police qui se trouvait à la réunion de protestations ce jour-là s'y était rendu pour s'assurer que la police serait en mesure de prendre les mesures qui s'imposeraient en cas d'urgence.
  102. 127. Selon le gouvernement, la police organise toujours des exercices de groupe et l'exercice en question n'était pas destiné à intimider les travailleurs (voir paragr. 125), même si la police appréhendait que des actes de violence ne fussent commis, comme cela s'était déjà produit. L'exercice en question avait été organisé au stand de tir de Wajiro et faisait partie du programme normal d'entraînement. La police était fondée, en septembre 1959, à prévoir certains actes de violence, étant donné la tension qui régnait entre les membres du Syndicat Miike des mineurs de charbon et ceux du syndicat rival, et à demander que des renforts fussent envoyés sur place.
  103. 128. Le gouvernement fournit des précisions sur divers actes de violence qui furent commis. Il déclare que, le 28 mars 1960, des piquets de grève organisés par l'ancien syndicat essayèrent d'empêcher les membres du nouveau syndicat de se rendre au travail, et que cinquante et un membres de l'ancien syndicat et cent cinquante membres du nouveau syndicat furent blessés. Le tribunal de Fukuoka rendit une ordonnance interdisant d'empêcher les ouvriers de se rendre au travail; 1700 agents de police furent postés à différents points stratégiques pour prévenir des actes de violence. Le gouvernement déclare que, le 18 avril 1960, environ 1200 membres de l'ancien syndicat attaquèrent les agents de police, qui s'efforçaient de leur barrer l'entrée principale de la mine Mikawa, et que 84 agents furent blessés, dont six gravement. Le 20 avril 1962, des piquets de grève constitués par l'ancien syndicat se placèrent devant la porte principale de la mine Miyaura et trois cents près de l'entrée secondaire, et qu'ils aménagèrent des barricades avec des fils de fer barbelés, la police intervint pour disperser certains des piquets de grève et enlever les obstacles qui empêchaient les travailleurs de pénétrer dans le périmètre de la mine. Le gouvernement accuse les membres du syndicat de divers actes de violence contre la police, et notamment d'avoir lancé des pierres contre les agents.
  104. 129. Des logements furent loués pour les renforts de police, dont les locaux appartenaient à la compagnie. Le gouvernement nie que des locaux du Syndicat aient été occupés par la police.
  105. 130. Selon le gouvernement, 315 personnes ont été poursuivies en justice pour actes de violence et 285 d'entre elles ont été condamnées.
  106. 131. Il ressort de la masse de preuves contradictoires soumises au Comité, qu'une tension considérable a régné au dernier stade du conflit Miike, étant donné le nombre important de membres de l'ancien syndicat qui ont interdit l'accès de la mine à des centaines de membres du nouveau syndicat qui voulaient se rendre au travail. Comme les autorités appréhendaient le recours à la violence, d'importants renforts de police furent appelés sur les lieux. En ce qui concerne les raisons de l'entrée en action de la police et la façon dont elle intervint, les vues exprimées par les plaignants et le gouvernement sont diamétralement opposées. Le Comité ne peut, sur la base des documents dont il dispose, parvenir à des conclusions précises en toute connaissance de cause des événements tels qu'ils se sont déroulés.
  107. 132. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de noter qu'il ne lui est pas possible d'aboutir à des conclusions précises au sujet des allégations relatives à l'intervention de la police dans le conflit du travail Miike.
  108. d) Allégations relatives au Bureau d'inspection du travail
  109. 133. Il est allégué que le Bureau d'inspection du travail de Fukuoka et le Bureau d'inspection du travail d'Omuta n'ont pas pris de mesures au sujet des nombreuses infractions à la loi sur les conditions de travail commises par la Compagnie.
  110. 134. Les plaignants soutiennent qu'aucune mesure n'a été prise pour sanctionner le paiement partiel des salaires ou le retard dans le paiement des salaires en 1959 et 1963.
  111. 135. Les journées du conflit Miike ont été incluses dans le nombre total des jours de travail servant de base au calcul des congés payés. De l'avis des plaignants, cela constitue une infraction à l'article 39 de la loi sur les conditions de travail contraire à l'interprétation qu'en ont donnée les services du ministère du Travail (Kijunkyoku Hatsu, no 90, 13 fév. 1958).
  112. 136. Les plaignants soutiennent que les bureaux d'inspection n'ont pris aucune mesure pour sanctionner l'accord collectif enfreignant la loi sur les conditions de travail, qui fut conclu le 29 juin 1963 par la Compagnie et le nouveau syndicat rival. Cet accord aurait prévu une baisse de salaire de 6 pour cent ou un retard dans le versement des salaires, sans aucun intérêt dû à ce titre; ces dispositions violent l'article 18, 4) et 5), de la loi sur les conditions de travail.
  113. 137. Il est allégué que le règlement du travail a été révisé illégalement le 15 juillet 1963 par la Compagnie, en ce qui concerne les salaires, et le 1er août 1963, pour ce qui est des autres conditions de travail, la demande présentée par le Syndicat qui désirait négocier à ce sujet ayant été rejetée. Bien que ces règlements révisés aient été illégaux, ils auraient été acceptés par le Bureau d'inspection du travail.
  114. 138. Il a déjà été question de la prétendue discrimination en matière de salaires versés aux membres du Syndicat Miike des mineurs de charbon et aux membres du syndicat rival. Il est allégué que le Syndicat Miike aurait demandé, les 19 et 22 avril 1961, au Bureau d'inspection du travail d'Omuta d'enquêter sur cette affaire, étant donné qu'une telle discrimination est contraire à l'article 3 sur la loi des conditions de travail, mais que ledit Bureau n'a tenu aucun compte de ces demandes et des requêtes qui lui furent présentées par la suite.
  115. 139. Le gouvernement admet que, du fait que les salaires mensuels ont été versés en deux ou plusieurs fois et que, de ce fait, il s'est produit des retards dans le versement des salaires en 1959 et 1963, mais il déclare qu'il a chaque fois ordonné à la direction de remédier à la situation.
  116. 140. En ce qui concerne les allégations relatives aux congés payés (voir paragr. 135 ci-dessus), le gouvernement fait remarquer que l'article 39 de la loi sur les conditions de travail prévoit un congé annuel payé de six à vingt jours, selon l'ancienneté de service, pour les travailleurs qui ont travaillé continuellement pendant une année et ont été présents au travail pendant plus de 80 pour cent du total des jours de travail. La grève de 1960 a duré du 25 janvier au 29 octobre. La loi ne contient aucune disposition sur les modalités de calcul du congé annuel dans les cas où, au cours de l'année précédente, le travail a été interrompu pendant une certaine période du fait d'une grève.
  117. 141. Le gouvernement reconnaît que l'accord mentionné au paragraphe 136 a été effectivement conclu. Toutefois, selon lui, aucune disposition de cet accord ne prévoyait que l'employeur gérerait les dépôts des travailleurs et, de ce fait, l'article 18 de la loi sur les conditions de travail ne peut être considéré comme violé.
  118. 142. En ce qui concerne la révision du règlement de travail (voir paragr. 137 ci-dessus), le gouvernement signale qu'elle a été entreprise par l'employeur après consultation du « syndicat », qui se compose de la majorité des travailleurs sur le lieu de travail, comme l'exige l'article 90 de la loi sur les conditions de travail. Selon le gouvernement, le syndicat qui répond à cette définition est le nouveau syndicat des charbonnages Miike. Il en déduit qu'aucune infraction n'a été commise et que le Bureau d'inspection du travail n'avait pas lieu d'intervenir.
  119. 143. Le gouvernement déclare que le Syndicat Miike des mineurs de charbon s'est plaint les 19 et 22 avril 1961 du fait que ses membres étaient l'objet d'un traitement discriminatoire en matière de salaires par rapport aux membres du nouveau syndicat. L'article 3, sur les conditions de travail, - que le Bureau d'inspection du travail est chargé de faire appliquer - interdit toute discrimination, pour des considérations de « nationalité, croyance ou origine sociale », en ce qui concerne les salaires. La loi sur les conditions de travail n'interdit pas d'autres formes de discrimination qui seraient fondées sur d'autres motifs, mais une telle discrimination constituerait une pratique déloyale en matière de travail et tomberait sous le coup de l'article 7 de la loi sur les syndicats, qui prévoit des mesures permettant de remédier à la situation en cas de pratiques déloyales. Dans le cas en question, les bureaux d'inspection du travail d'Omuta et de Fukuoka ont effectué une enquête et n'ont constaté aucune violation sur la loi des conditions de travail.
  120. 144. Le Comité n'a pas à s'occuper, dans le présent contexte, de la question de savoir si le Syndicat Miike des mineurs de charbon, qui, apparemment, était minoritaire à l'époque considérée, aurait dû être consulté en vue de la révision du règlement de travail. Le Comité est saisi d'une plainte selon laquelle ledit règlement aurait été révisé dans des conditions qui violeraient la loi sur les conditions de travail, le Bureau d'inspection du travail n'ayant pas pris les mesures voulues pour s'y opposer. Cependant, il semble bien que ladite loi ait été respectée, le Bureau d'inspection n'ayant ainsi aucun motif d'intervenir. D'autre part, le Comité n'est pas appelé, dans le présent contexte, à se prononcer sur la question d'un traitement discriminatoire en matière de salaires dont les membres d'un syndicat auraient été l'objet par rapport à ceux d'un autre syndicat, ce qui semblerait bien, si le fait était dûment prouvé, constituer une violation de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, qui a été ratifiée par le Japon. Toute discrimination est interdite par l'article 7 de la loi sur les syndicats, mais les mesures à prendre dans ce cas ne relèvent pas du Bureau d'inspection du travail. Les allégations relatives à une discrimination de cette sorte sont comprises dans les allégations relatives à des mesures discriminatoires examinées aux paragraphes 58 à 77 ci-dessus, au sujet desquelles le Comité a déjà demandé au gouvernement, soit de lui communiquer ses observations, soit de le tenir au courant de l'issue des poursuites engagées en vertu de la loi sur les syndicats. Dans le contexte actuel, les allégations présentées au Comité concernent une violation de l'article 3 de la loi sur les conditions de travail et sur le fait que le Bureau d'inspection du travail n'a pas pris les mesures qui s'imposaient. Il semble qu'à cet égard les allégations ne soient pas fondées. Les plaignants n'ont pas davantage produit de preuves établissant que les autres questions soulevées dans les présentes allégations constituent des infractions à la loi sur les conditions de travail justifiant l'intervention dudit Bureau.
  121. 145. Dans ces conditions, le Comité considère que, compte tenu des réserves exposées au paragraphe 144 ci-dessus, les allégations relatives au Bureau d'inspection du travail n'appellent pas un examen plus approfondi.
  122. e) Allégations relatives au Bureau de la sécurité minière
  123. 146. Il est allégué que, depuis la promulgation de la loi sur les mesures provisoires de nationalisation des charbonnages en 1959, il existe une tendance à insister davantage sur la production que sur la sécurité et que cette tendance est encore plus marquée depuis la fin du conflit de 1960, ce qui a provoqué un fort accroissement du nombre des accidents. Selon les plaignants, le taux de fréquence des accidents a atteint 0,810 par 1000 personnes occupées en 1958, 0,917 en 1959, 1403 en 1961 et 1317 en 1962. Il est allégué, en outre, que la Compagnie a décidé unilatéralement, sans consulter le Syndicat, de réduire le nombre d'heures consacrées auparavant aux réunions destinées à promouvoir la sécurité et l'éducation en matière de sécurité. Le Syndicat a donc demandé, le 18 septembre 1962, au Bureau de la sécurité, de prendre des mesures, mais, selon les plaignants, ledit Bureau n'a rien fait pour tenir compte de cette demande et de celles qui lui furent présentées par la suite afin qu'il donnât des conseils pour améliorer la sécurité dans les mines Miike.
  124. 147. Les plaignants prétendent que, par sa négligence, le Bureau de la sécurité est en partie responsable de la catastrophe de novembre 1963, car il n'a rien fait pour empêcher l'accumulation des poussières de charbon. Il est allégué qu'il était habituel d'informer à l'avance la Compagnie de la date et du lieu des inspections de sécurité, en sorte que la Compagnie faisait enlever les poussières et mettre en ordre le matériel de sécurité.
  125. 148. Il est allégué que M. Tahara, directeur du Bureau de la sécurité minière, répondant à des questions qui avaient été posées au comité compétent de la Chambre des conseillers, avait tout d'abord déclaré que les inspections avaient généralement lieu sans avertissement préalable, mais il a admis ensuite qu'il n'avait pas de renseignements précis sur la situation à la mine Miike. En outre, M. Fukwda, ministre du Commerce et de l'Industrie (section internationale), qui se rendit sur le lieu de l'accident, le 14 novembre 1963, aurait déclaré qu'« à l'avenir les inspections se feraient sans avertissement préalable »; de plus, le journal Asahi Shini du 21 novembre aurait annoncé que les autorités avaient « envisagé de prescrire que les visites d'inspection soient toujours faites par surprise ».
  126. 149. Un groupe d'étude Sohyo-Tanro a enquêté du 13 au 16 novembre 1963 sur l'accident du 9 novembre 1963. Il a signalé, dans ses conclusions, qu'une accumulation considérable de poussières de charbon avait été constatée et qu'elle avait joué un rôle important dans l'accident. Il est allégué que la Compagnie, estimant qu'il n'y avait pas de risque au puits Mikawa, avait négligé de prendre des mesures de sécurité et que les poussières de charbon n'étaient que rarement ou même jamais enlevées, que les barrages de poussières et les zones de sécurité prévus par les règlements n'avaient pas été aménagés et que le mouillage n'était pas appliqué. Après avoir critiqué les mesures prises par la Compagnie à la suite de la catastrophe, le groupe d'étude signalait dans son rapport que les mineurs ne disposaient pas d'équipement d'autosauvetage et que, du fait qu'ils n'avaient été ni instruits ni formés à la sécurité, les mineurs et les agents de maîtrise ne connaissaient même pas les cheminements à suivre en cas d'urgence.
  127. 150. Le gouvernement admet que le taux de fréquence des accidents a augmenté à partir de 1960 dans les charbonnages Miike, mais qu'il a diminué à partir de 1964. Il signale qu'en avril 1962, la Division de la sécurité et de l'inspection des mines de Fukuoka a pris rang de Bureau, que ses effectifs ont été augmentés et la moitié des hommes affectés à la mine Miike, où ils sont venus renforcer les services d'inspection et apporter aide et conseils. Le gouvernement fournit des précisions techniques sur les mesures prises pour prévenir les accidents (mouillage, enlèvement des poussières de charbon, etc.) dès 1962 et jusqu'à la catastrophe de novembre 1963 ou depuis lors. En ce qui concerne les inspections, le gouvernement fait savoir qu'il est parfois nécessaire d'avertir au préalable des inspections envisagées, afin que le personnel de la mine puisse être rassemblé en un endroit donné et à une heure déterminée, ce qui permet de lui donner des instructions au sujet des mesures de sécurité devant être prises.
  128. 151. Le Comité fait observer que, dans de nombreux pays industrialisés, il est habituel d'organiser des consultations et d'engager des négociations avec les syndicats représentant les travailleurs au sujet de questions telles que l'éducation en matière de sécurité et les moyens pratiques permettant de l'assurer et de faire appliquer les règlements de sécurité dans les fabriques, les mines et autres lieux de travail exposés gravement ou en permanence aux risques d'accident, de par la nature même du travail effectué. Toutefois, il n'appartient pas au Comité de se prononcer sur les mesures techniques qui devraient être prises pour garantir la sécurité dans les charbonnages et de déterminer la mesure dans laquelle un accident engage la responsabilité de l'employeur, des autorités chargées de l'inspection, etc. Le Comité ne pourrait se prononcer à ce sujet que pour autant qu'il aurait la preuve que l'exercice des droits syndicaux serait mis en question, comme cela serait le cas, par exemple, s'il avait à sa disposition des preuves établissant sans équivoque qu'un accident a été causé par une infraction aux dispositions d'une convention collective. Dans le présent cas, le Comité n'a aucune preuve de ce genre et il lui est simplement demandé d'étudier des allégations relatives à l'exercice des fonctions dévolues au Bureau de la sécurité minière, question au sujet de laquelle il ne lui appartient pas d'exprimer une opinion.
  129. 152. Dans ces conditions, le Comité considère que, pour les raisons indiquées au paragraphe 151 ci-dessus, les allégations relatives au Bureau de la sécurité minière n'appellent pas un examen plus approfondi.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 153. En ce qui concerne le cas dans son ensemble, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de décider, pour les raisons indiquées aux paragraphes 110, 114 et 151 ci-dessus, que les allégations relatives aux tendances antisyndicales des tribunaux, au Bureau d'inspection du travail et au Bureau de la sécurité minière n'appellent pas de sa part un examen plus approfondi;
    • b) de noter que, pour les raisons indiquées au paragraphe 131 ci-dessus, il n'est pas possible au Comité d'aboutir à des conclusions précises en toute connaissance de cause au sujet des allégations relatives à l'intervention de la police dans le conflit du travail Miike;
    • c) de prendre note du présent rapport intérimaire en ce qui concerne les autres allégations, étant entendu que le Comité fera à nouveau rapport lorsqu'il sera en possession des informations complémentaires et des observations qu'il a prié le gouvernement de bien vouloir lui fournir.
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