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Rapport intérimaire - Rapport No. 83, 1965

Cas no 399 (Argentine) - Date de la plainte: 11-MAI -64 - Clos

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  1. 278. La Confédération générale du travail (C.G.T.) a présenté ses plaintes dans des communications adressées directement à l'O.I.T en date des 11 mai, 3, 4 et 16 juin et 28 septembre 1964, dans lesquelles elle formule des allégations au sujet d'une prétendue violation des droits syndicaux en Argentine. Ces communications lui ayant été transmises, le gouvernement a présenté ses observations par une communication en date du 30 novembre 1964.
  2. 279. L'Argentine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  • Allégations relatives à l'intervention des autorités publiques dans la gestion financière des syndicats
    1. 280 Dans leur communication du 11 mai 1964, les plaignants déclarent s'opposer aux décrets nos 3470 de 1963 et 2437 de 1964, qui violent la loi no 14455 sur les associations professionnelles de travailleurs et la convention no 87, en ce qu'ils autorisent une intervention dans le fonctionnement des organisations syndicales. Dans sa communication du 3 juin 1964, la C.G.T a communiqué le texte du décret no 2437 de 1964 et un rapport de l'organisation elle-même, qui attaque ledit décret, ainsi que le décret no 3470 de 1963.
    2. 281 D'après les plaignants, l'article 38 de la loi no 14455 dispose que l'autorité d'application ne peut intervenir dans la direction ou la gestion des associations professionnelles de travailleurs. La convention no 87 pose le même principe en son article. Or le décret no 2437 de 1964 porte création d'un Département de contrôle de la comptabilité au sein du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, qui semble devoir placer les organisations professionnelles de travailleurs dans un état d'assujettissement en instituant un système de contrôle que l'on n'a jamais songé à appliquer à d'autres organisations contrôlées par l'Etat, comme c'est le cas des sociétés anonymes, par exemple. Ledit département est habilité à examiner toute pièce comptable, à déterminer le mode d'établissement de la comptabilité, à fixer les dates et les modalités de clôture de chaque exercice, à procéder à toute expertise comptable, même dans l'éventualité où cette expertise est requise par les services de l'Etat, et à contrôler l'investissement des fonds. De l'avis des plaignants, il ne peut y avoir d'indépendance syndicale lorsqu'il est possible d'indiquer quotidiennement à une organisation syndicale si elle se conforme ou non à des procédures comptables et lorsque les autorités sont habilitées à s'immiscer à n'importe quel moment dans la vie du syndicat, sans être soumises à aucune condition de forme ou de procédure.
    3. 282 Les plaignants ajoutent que dans le cas particulier de l'Association des ouvriers du textile (A.O.T.), le système a été mis sur pied au moment où a été lancé ce que l'on a appelé le « plan de lutte » de la C.G.T. A cette occasion, les dirigeants de cette association ont été victimes d'accusations téméraires et d'une véritable campagne de presse. Les plaignants affirment que si les autorités administratives avaient constaté un délit, elles auraient dû en saisir l'autorité judiciaire et considérer par là leur mission achevée, au lieu de faire de la publicité autour d'un fait sur lequel la justice ne s'est pas encore prononcée. Il se pourrait, en effet, que les autorités du ministère du Travail saisissent l'occasion la plus opportune pour décider un contrôle comptable et en tirer des accusations à l'encontre de dirigeants syndicaux, qui, du fait qu'elles ne pourraient être tirées au clair immédiatement, risquent de nuire à toute action que ces derniers entreprendraient au même moment au nom du syndicat qu'ils représentent. Les plaignants joignent à leur plainte une série de publications où est reproduit également le décret no 3470 de 1963, qui contient toute une série de dispositions générales concernant le contrôle de la comptabilité des syndicats, les pièces comptables qui doivent être tenues par chaque syndicat et les sanctions infligées en cas de violation des mêmes dispositions.
    4. 283 Dans sa réponse du 30 novembre 1964, le gouvernement indique que la loi no 14455 sur les associations professionnelles de travailleurs, impose aux syndicats, à son article 17, l'obligation de tenir leur comptabilité sous une forme qui permette à l'autorité d'exécution de contrôler les opérations financières de l'association et de se conformer aux dispositions réglementaires applicables en l'espèce. Les deux décrets cités par les plaignants portent réglementation de cette disposition générale, qui n'a jamais été contestée. Il y a en fait une différence entre le contrôle des opérations financières des organisations syndicales et la prétendue intervention que les plaignants voient dans les décrets mentionnés. En effet, contrôler et vérifier ne consistent qu'à exercer des fonctions de constatation; intervenir, c'est participer activement et imposer son autorité, et il n'en est nullement question dans le cas dont il s'agit. Les décrets cités ne violent pas les droits établis par la loi sur les organisations syndicales, pas plus que l'article 3 de la convention no 87.
    5. 284 Le gouvernement déclare que le décret no 2437 de 1964 a été rédigé en tenant compte des études du B.I.T sur le contrôle des fonds syndicaux et il précise que la simple création, au sein du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, d'un corps spécialisé de fonctionnaires qui pourra assurer l'application adéquate des dispositions relatives au contrôle des fonds syndicaux ne peut être interprétée comme une restriction de la liberté syndicale.
    6. 285 Le Comité fait observer que, dans la plupart des cas, les syndicats semblent admettre que les dispositions législatives prévoyant, par exemple, la présentation aux autorités compétentes de rapports financiers annuels rédigés dans la forme prescrite par la législation et la communication de renseignements supplémentaires sur les points que ces rapports n'éclairent pas, ne portent pas atteinte, en elles-mêmes, à leur autonomie. Cependant, le Comité estime qu'il convient de souligner de nouveau que de telles dispositions ne devraient en aucun cas violer celles qui figurent à l'article 3 de la convention no 87, dans lesquelles il est précisé que les organisations de travailleurs et d'employeurs ont le droit d'organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leur programme d'action, les autorités publiques devant s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal. A ce sujet, le Comité désire rappeler que, selon l'opinion exprimée par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, on ne peut concevoir l'utilité d'appliquer des mesures de contrôle à la gestion des organisations que si lesdites mesures ne sont utilisées qu'en vue de prévenir des abus et afin de protéger les membres du syndicat eux-mêmes contre une mauvaise gestion de leurs fonds. Toutefois, il apparaît que des dispositions de ce genre risquent dans certains cas de permettre, de la part des autorités publiques, une intervention dans la gestion des syndicats, et que cette intervention peut être de nature à limiter le droit des organisations ou d'en entraver l'exercice légal, contrairement aux dispositions de l'article 3, paragraphe 2, de la convention no 87. On peut considérer néanmoins qu'il existe certaines garanties contre de telles interventions, lorsque le fonctionnaire choisi pour effectuer ces contrôles jouit d'une certaine indépendance à l'égard des autorités administratives, et s'il est lui-même soumis au contrôle des autorités judiciaires.
    7. 286 Examinant les décrets nos 3470 de 1963 et 2437 de 1964, le Comité constate que l'alinéa c) de l'article 2 du décret no 3470 de 1963 autorise le ministère du Travail et de la Sécurité sociale à « entreprendre des enquêtes au cas où il constaterait ou aurait connaissance d'irrégularités dans la gestion des fonds sociaux ». L'alinéa c) de l'annexe au décret no 2437 de 1964, relatif aux fonctions du Département de contrôle de la comptabilité institué par ledit décret, dispose qu'il appartient audit département de fixer les modalités de clôture de chaque exercice en déterminant la méthode suivie. Le Comité suppose que, dans leur principe, ces normes visent à assurer l'ouverture d'enquêtes spéciales uniquement dans les cas où certains indices donnent à penser qu'il y a eu irrégularité dans la gestion des fonds. Néanmoins, l'article 8 du décret no 3470 de 1963 dispose également que les autorités peuvent, si elles l'estiment opportun en dehors de l'exercice normal, exiger des organisations la présentation de bilans périodiques. Cette disposition se trouve sanctionnée par l'alinéa c) cité plus haut. Aux termes de ces dispositions, l'obligation de présenter des bilans ne semble pas avoir un caractère général pour toutes les organisations, mais semble pouvoir être imposée, par les autorités, à leur discrétion, à telle ou telle d'entre elles. De même, l'alinéa d) de l'annexe mentionnée plus haut autorise également le Département de contrôle de la comptabilité à procéder à toute expertise comptable requise par les services de l'Etat, des autorités syndicales ou des centrales ouvrières.
    8. 287 Le Comité estime que ces dispositions ne devraient être appliquées que dans des cas exceptionnels, lorsque des circonstances graves le justifient (par exemple, en cas d'irrégularités présumées découlant de la présentation des rapports financiers annuels ou de plaintes émanant de membres), et ce, afin d'éviter toute discrimination entre les organisations et de parer au danger d'une intervention des autorités qui risquerait d'entraver l'exercice du droit qu'ont les syndicats d'organiser librement leur gestion, de porter préjudice aux syndicats par une publicité qui pourrait se révéler injustifiée et de divulguer des informations qui pourraient avoir un caractère confidentiel.
    9. 288 Par ailleurs, le Comité constate qu'aux termes de l'article 13 du décret no 3470 de 1963 les associations de travailleurs qui dissimuleraient, falsifieraient, refuseraient de fournir des renseignements sur leurs fonds et leurs biens, ou feraient obstacle à la communication desdits renseignements, pourraient se voir infliger par le ministère du Travail et de la Sécurité sociale les sanctions prévues à l'article 34 2) de la loi no 14455 sur les associations professionnelles de travailleurs. Cette dernière disposition autorise le ministère du Travail à suspendre ou annuler le statut syndical d'une association professionnelle, mesure qui peut, dans la pratique, interdire au syndicat de prendre, en tant qu'association professionnelle, aucune initiative pour la défense des intérêts de ses membres. Cette mesure peut donc être assimilée à la suspension ou à la dissolution d'un syndicat par voie administrative, qui est interdite par l'article 4 de la convention no 87. Même si la décision du ministère du Travail peut être l'objet d'un appel devant l'autorité judiciaire, il semble néanmoins que, dans la pratique, ses effets à l'égard des syndicats soient immédiats (voir à ce propos le soixante-quatorzième rapport, cas no 308 (Argentine), paragr. 83-88). Dans le même cas, le Comité avait recommandé au Conseil d'administration d'inviter le gouvernement argentin à envisager la possibilité de modifier les dispositions pertinentes de la législation. De même, le Comité estime que dans les cas où le ministère du Travail viendrait à constater qu'il y a eu infraction aux dispositions, ou qu'il y a eu dissimulation, falsification, etc., du fait des dirigeants d'un syndicat, il devrait saisir l'autorité judiciaire de ces faits, afin d'assurer le respect de la procédure légale et, eu égard aux circonstances de la cause, l'application des sanctions par l'autorité judiciaire elle-même.
    10. 289 Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration, tout en prenant acte de la législation argentine relative au contrôle de l'administration des biens et des fonds syndicaux, d'attirer l'attention du gouvernement sur les considérations exposées à cet égard aux paragraphes 285 à 288 ci-dessus et de l'inviter à examiner de nouveau la législation au regard de ces mêmes considérations, notamment en ce qui concerne la sou- mission à l'autorité judiciaire des résultats des contrôles administratifs, afin d'assurer le respect de la procédure légale et, selon le cas, l'application des sanctions par l'autorité judiciaire.
  • Allégations relatives à l'action judiciaire engagée contre des dirigeants syndicaux
    1. 290 Le 4 juin 1964, les plaignants firent savoir qu'un fonctionnaire relevant du pouvoir exécutif avait déposé plainte contre la Confédération générale des travailleurs pour le délit infamant d'association illicite, en demandant que tous les membres des organes de la Fédération soient emprisonnés et que les bureaux de la Confédération soient fermés. Le 16 juin de la même année, les plaignants ont envoyé au B.I.T une nouvelle communication complétant les renseignements fournis au sujet de cette plainte. Cette communication concernait également les membres et délégués à la 48ème session de la Conférence internationale du Travail. Ladite communication précisait que le Congrès ordinaire, qui avait eu lieu en janvier 1963, avait adopté un plan d'action appelé « Plan de lutte de la C.G.T. », qui devait leur permettre d'atteindre des objectifs d'ordre social, économique et politique. Les plaignants joignaient à leur plainte une série de publications dans lesquelles ces objectifs étaient décrits dans le détail.
    2. 291 Les plaignants poursuivent en déclarant qu'après qu'un nouveau gouvernement avait été porté au pouvoir, la C.G.T a eu une série d'entrevues avec les représentants des milieux officiels et des employeurs, et même avec le Président de la République, et a organisé une manifestation groupant de nombreux travailleurs au Congrès de la Nation. Mais en l'absence des solutions qu'aurait imposées la situation de fait, et étant donné aussi que le coût de la vie continuait de s'élever dangereusement en même temps que le chômage augmentait, il fut décidé de passer à l'occupation des entreprises pour appuyer les revendications. Dès lors, la C.G.T a été en butte aux persécutions du gouvernement. Jamais auparavant le gouvernement n'avait déclaré que le plan de lutte fût subversif, mais, face aux faits, il a décidé que le Procureur de la République poursuivrait en justice les membres de tous les organes directeurs de la C.G.T qui auraient approuvé les actes relevés ci-dessus. A la suite de cette décision, les présidents et secrétaires généraux de plus de trois cents organisations ouvrières ont été poursuivis pour atteinte à la sûreté de l'Etat et instigation à commettre des délits. Le Procureur a requis contre tous les membres du Conseil de direction de la C.G.T la détention préventive, à laquelle il devait être procédé d'un moment à l'autre. Le 28 septembre 1964, les plaignants ont fait savoir qu'un mandat de détention préventive avait été lancé contre cent dix-neuf dirigeants syndicaux, auquel il faut ajouter des centaines d'actions intentées contre les délégués de fabriques et d'ateliers, et ce, en raison de l'application du Plan de lutte.
    3. 292 Dans sa communication du 30 novembre 1964, le gouvernement a indiqué que l'application dudit Plan de lutte avait donné lieu à des délits contre les biens et les personnes. En effet, l'occupation d'usine qui, par voie de conséquence, privait les entreprises du libre exercice de leur droit de propriété, constitue le délit d'usurpation qui tombe sous le coup du Code pénal. Si, à la simple occupation s'ajoute la privation illégitime de la liberté du personnel des entreprises affectées, on se trouve devant un autre délit punissable, lui aussi, en vertu de la loi. Le gouvernement estime qu'il ne s'agit pas, en l'occurrence, de l'exercice du droit de grève, puisque les actes indiqués ne peuvent être considérés comme le résultat de l'exercice du droit de grève, mais qu'il relève d'un programme d'ordre politique. La Cour suprême a été saisie de cas analogues et elle a abouti à la conclusion que le droit de grève ne constitue pas un droit absolu et que son exercice ne peut justifier des délits de droit commun. Le gouvernement ajoute que l'on ne peut invoquer la liberté syndicale en vue d'agir en marge de la légalité, et il signale que l'article 8 de la convention no 87 dispose expressément « que les travailleurs et leurs organisations respectives sont tenus de respecter la légalité ». Enfin, le gouvernement précise qu'aucun des dirigeants syndicaux qui sont actuellement l'objet de poursuites judiciaires n'a été incarcéré et que le gouvernement ne s'est pas immiscé dans la gestion des syndicats.
    4. 293 Le Comité a toujours appliqué le principe qui veut que les allégations relatives au droit de grève n'échappent pas à sa compétence dans la mesure où elles affectent l'exercice des droits syndicaux. De même, le Comité a signalé que le droit de grève est généralement reconnu aux travailleurs et à leurs organisations en tant que moyen légitime de défense de leurs intérêts professionnels. Néanmoins, le Comité a été d'avis que les limitations qui seraient imposées à des grèves de caractère politique ou à des grèves visant à contraindre le gouvernement ou la collectivité à reconnaître certaines mesures ne violent pas les droits syndicaux.
    5. 294 Dans le présent cas, le Comité constate que les syndicats qui appliquaient les directives de la C.G.T n'ont pas déclenché une grève de type professionnel, mais une grève qui visait à faire pression sur le gouvernement pour l'amener à adopter des mesures d'ordre économique, social et politique. Par ailleurs, cette action est allée de pair avec l'occupation d'un certain nombre d'entreprises, dont les cadres supérieurs présents dans l'entreprise se sont vu parfois privés de leur liberté de mouvement. C'est à la suite de ces actes que des poursuites ont été intentées contre les dirigeants syndicaux qui avaient pris cette décision.
    6. 295 Lorsque, dans des cas antérieurs, les gouvernements, en réponse à des allégations d'après lesquelles les dirigeants syndicaux ou des travailleurs avaient été arrêtés en raison de leurs activités syndicales, déclaraient que les personnes en question avaient été arrêtées, en fait, pour des activités subversives et pour des considérations de sécurité intérieure ou pour des délits de droit commun, le Comité s'est toujours fait une règle de demander aux gouvernements en cause de fournir des informations complémentaires aussi précises que possible au sujet des arrestations en question et des motifs exacts pour lesquels elles avaient eu lieu. Si, dans certains cas, le Comité a décidé que les allégations relatives à l'arrestation ou à l'incarcération de militants syndicaux n'appelaient pas un examen plus approfondi, c'est parce qu'il avait reçu des gouvernements certaines informations prouvant, avec suffisamment d'évidence et de précision, que les arrestations et les incarcérations en question n'avaient aucun rapport avec les activités syndicales, mais qu'elles étaient le résultat d'activités étrangères à l'activité syndicale préjudiciables à l'ordre public ou de caractère politique.
    7. 296 Dans le présent cas, les plaignants semblent indiquer que leur action a été motivée en dernière analyse par le fait qu'en dépit de leurs revendications et négociations, le gouvernement n'adoptait aucune mesure d'urgence pour freiner la hausse du coût de la vie et pour remédier au chômage croissant. Néanmoins, les mesures mêmes qui ont été prises pour faire pression sur les autorités -- au sujet desquelles il ne semble pas y avoir de contradiction entre les parties - se sont traduites par des actes tels que l'occupation d'entreprises et la privation de liberté des cadres supérieurs des mêmes entreprises, faits qui sont constitutifs des délits de droit commun, comme l'indique le gouvernement.
    8. 297 Compte tenu de ces événements, savoir la grève qui est allée de pair avec une occupation des entreprises visant à faire pression sur le gouvernement pour l'amener à adopter certaines mesures d'ordre économique, social et politique, et à la lumière des principes qu'il a toujours appliqués en cette matière et qui ont été indiqués plus haut, le Comité ne pense pas que les actions intentées contre les syndicalistes impliqués permettent d'alléguer dans le présent cas qu'il y a eu violation des droits syndicaux. Par ailleurs, il y a lieu de rappeler qu'aucun des dirigeants syndicaux ne semble avoir été privé de sa liberté.
    9. 298 Néanmoins, étant donné que les plaignants indiquent également que des actions ont été intentées contre les dirigeants de plus de trois cents organisations syndicales pour atteinte à la sûreté de l'Etat et que l'autorité judiciaire est saisie des différents cas, le Comité prie le gouvernement de bien vouloir le renseigner au sujet de la nature exacte des délits pour lesquels ces actions ont été intentées contre lesdits dirigeants syndicaux, et de le tenir au courant de tous événements nouveaux qui pourraient se produire.
  • Allégations relatives à la non participation des délégués travailleurs argentins à la 48ème session de la Conférence internationale du Travail
    1. 299 Dans la plainte du 16 juin 1964, analysée à la section précédente, la C.G.T indique que, pour la première fois, elle sera absente de la Conférence internationale du Travail parce que ses représentants sont empêchés de quitter le pays du fait du procès instruit contre eux par le ministère public.
    2. 300 Dans sa réponse du 30 novembre 1964, le gouvernement affirme qu'il a désigné les délégués des travailleurs à la 48ème session de la Conférence générale du Travail et qu'il a pris en charge les frais de voyage et de séjour desdits délégués et établi les passeports nécessaires. En raison du Plan de lutte de la C.G.T, un agent du ministère public, fonctionnaire du pouvoir judiciaire, a estimé que les auteurs de ce plan s'étaient rendus coupables du délit d'association illicite qui tombe sous le coup du Code pénal argentin et il a entamé l'action correspondante. L'agent du ministère public n'avait aucune instruction du pouvoir exécutif et il a agi en toute indépendance. Le juge saisi de la cause n'a pas ordonné l'incarcération des inculpés et l'existence des poursuites judiciaires ne pouvait empêcher les délégués ouvriers de quitter le pays, à condition qu'ils y fussent autorisés par le juge. En temps voulu, les représentants du gouvernement argentin se sont expliqués sur ce point devant la Commission de vérification des pouvoirs de la Conférence, laquelle a accepté leurs explications.
    3. 301 A une occasion antérieure, le Comité a déjà exprimé l'avis qu'il importe qu'aucun délégué à un organisme ou à une conférence de l'O.I.T ne soit inquiété de telle sorte qu'il soit empêché ou détourné de remplir son mandat.
    4. 302 Dans le présent cas, le gouvernement déclare que lesdits délégués n'étaient pas incarcérés et que « l'existence de poursuites judiciaires ne pouvait empêcher les délégués ouvriers désignés par le pouvoir exécutif de quitter le pays, à condition qu'ils y fussent autorisés par le juge ». Les plaignants n'indiquent aucunement avoir sollicité cette autorisation, pas plus qu'ils n'indiquent qu'elle leur aurait été refusée. En second lieu, le Comité constate que cette plainte a également été soumise aux délégués à la 48ème session de la Conférence et que, par conséquent, elle a été dûment portée à la connaissance de la Commission de vérification des pouvoirs.
    5. 303 Compte tenu de toutes ces circonstances et, en particulier, du fait qu'il ne semble pas que les délégués travailleurs argentins aient été empêchés de quitter le territoire national pour se rendre à la 48ème session de la Conférence internationale du Travail, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider qu'il n'y a pas lieu de poursuivre l'examen de cet aspect du cas.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 304. En ce qui concerne le cas dans son ensemble, le Comité, compte tenu de tous ces éléments, recommande au Conseil d'administration:
    • a) en ce qui concerne les allégations relatives à la non-participation des délégués travailleurs argentins à la 48ème session de la Conférence internationale du Travail, de décider qu'il n'y a pas lieu de poursuivre l'examen de cet aspect du cas;
    • b) en ce qui concerne les allégations relatives à l'intervention des autorités publiques dans la gestion financière des syndicats, tout en prenant note de la législation argentine relative au contrôle de l'administration des biens et des fonds syndicaux, d'attirer l'attention du gouvernement sur les considérations exposées à ce sujet aux paragraphes 285 à 288 ci-dessus et de l'inviter à examiner de nouveau la législation à la lumière de ces mêmes dispositions, notamment en ce qui concerne la soumission des résultats des contrôles administratifs à l'autorité judiciaire afin de garantir le respect des formes légales et, selon les cas, l'application de sanctions par l'autorité judiciaire;
    • c) de prendre acte du présent rapport intérimaire, étant entendu que le Comité présentera un nouveau rapport après qu'il aura obtenu les renseignements demandés au paragraphe 298.
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