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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 84, 1965

Cas no 403 (Burkina Faso) - Date de la plainte: 21-MAI -64 - Clos

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  1. 32. La plainte de la Confédération internationale des syndicats libres (C.I.S.L.) est, contenue dans une communication en date du 21 mai 1964, adressée directement à l'O.I.T. Par une communication en date du 10 juillet 1964, également reçue directement, la Confédération internationale des syndicats chrétiens a déposé une plainte portant sur les mêmes faits que ceux allégués par la C.I.S.L. Ces plaintes ayant été transmises au gouvernement par deux lettres datées respectivement des 29 mai et 17 juillet 1964, ce dernier a présenté sur elles ses observations par une communication en date du 17 mars 1965.
  2. 33. La République de Haute-Volta a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, de même que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 34. Les plaignants allèguent que, le 24 avril 1964, l'Assemblée nationale de la Haute-Volta a promulgué une loi (dont la C.I.S.C joint le texte à sa plainte portant interdiction de l'affiliation des syndicats professionnels nationaux aux centrales syndicales internationales; en vertu de la loi, seule est autorisée l'affiliation aux centrales africaines groupant exclusivement des syndicats nationaux africains; la loi précise que les syndicats ont un délai de trois semaines, à partir de la date de promulgation dudit texte, pour notifier leur désaffiliation aux centrales syndicales internationales et qu'en cas de refus de respecter cette dernière disposition, les syndicats seront considérés comme illégaux et leur dissolution pourra être prononcée par décret.
  2. 35. Dans sa plainte, la C.I.S.L déclare que le 13 mai 1964, c'est-à-dire dans le délai imposé par la loi, l'Organisation voltaïque des syndicats libres, un des membres de la C.I.S.L, a fait savoir à cette dernière « avec regret qu'en application des prescriptions de la loi du 24 avril 1964 elle avait été forcée de décider de sa désaffiliation à la C.I.S.L. ».
  3. 36. Dans sa réponse, le gouvernement déclare s'être vu contraint de proposer à l'Assemblée nationale le vote de la loi du 24 avril 1964 portant interdiction de l'affiliation des syndicats nationaux aux centrales syndicales internationales « pour mettre fin aux interventions d'ordre purement politique de certaines d'entre elles dans nos affaires intérieures ». Le gouvernement affirme « que la stabilité politique et l'ordre intérieur constituent la garantie la plus sûre de l'application des normes nationales et internationales et que, dès lors que des présomptions graves indiquent que la stabilité politique et l'ordre intérieur peuvent être mis en danger, c'est un devoir impérieux pour tout gouvernement responsable d'adopter les mesures de sauvegarde qui s'imposent ». C'est pourquoi, conclut le gouvernement, il « rejette catégoriquement les accusations de la C.I.S.L et de la C.I.S.C, qui ne connaissent rien de nos impératifs nationaux et ne cherchent qu'à se disputer la clientèle ouvrière africaine ».

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 37. Le Comité relève tout d'abord que, dans sa réponse, le gouvernement invoque, pour justifier la promulgation de la loi incriminée, des actes d'intervention d'ordre purement politique dans les affaires intérieures du pays propres à porter atteinte à l'ordre établi et à la stabilité politique. En vertu de l'article 8 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, les organisations professionnelles sont tenues, à l'instar des autres personnes ou collectivités organisées, de respecter la légalité. Toutefois, en son second paragraphe, ce même article dispose que la législation nationale ne devra porter atteinte ni être appliquée de manière à porter atteinte aux garanties prévues par la convention.
  2. 38. Or, si l'on se reporte au texte même de la loi, on constate que celle-ci porte interdiction aux organisations syndicales nationales de s'affilier aux centrales professionnelles internationales. Le Comité, comme il l'a fait par le passé, tient à rappeler que le droit des organisations nationales de travailleurs de s'affilier à des organisations professionnelles internationales est formellement consacré par l'article 5 de la convention no 87, ratifiée par la Haute-Volta, qui prévoit que « ... toute organisation, fédération ou confédération a le droit de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs et d'employeurs ».
  3. 39. Au vu du texte de la loi, le Comité a noté en outre que les organisations nationales affiliées à une organisation internationale avant la promulgation de la loi, qui refuseraient, dans un délai donné, de se désaffilier, seraient susceptibles d'être dissoutes par décret. Ainsi que le Comité l'a rappelé à maintes reprises, en vertu de l'article 4 de la convention no 87, les organisations de travailleurs et d'employeurs ne doivent pas être sujettes à dissolution par voie administrative. Or une dissolution opérée par décret équivaudrait à ce que l'organisation qui en serait l'objet n'ait pas bénéficié de toutes les garanties dont est assortie une procédure judiciaire régulière et s'inscrirait par conséquent en violation de l'article 4 de la convention susmentionnée, instrument auquel la Haute-Volta est partie et par les dispositions duquel elle est donc formellement liée.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 40. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) d'attirer l'attention toute particulière du gouvernement voltaïque sur le fait que, la Haute-Volta ayant assumé les obligations de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, il est, comme pour les autres conventions ratifiées par la Haute-Volta, formellement tenu d'en appliquer les dispositions;
    • b) d'attirer l'attention du gouvernement sur l'importance qu'il convient d'attacher au principe selon lequel les organisations nationales de travailleurs et d'employeurs doivent avoir le droit de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs et d'employeurs, principe qui est consacré par l'article 5 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948;
    • c) d'exprimer l'avis que la dissolution par décret d'une organisation syndicale constituerait une mesure s'inscrivant en violation de l'article 4 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, en vertu duquel les organisations de travailleurs et d'employeurs ne doivent pas être sujettes à dissolution par voie administrative;
    • d) d'insister auprès du gouvernement voltaïque pour que celui-ci prenne toutes les mesures nécessaires en vue d'assurer que tant sa pratique que sa législation sont en harmonie avec les dispositions de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, instrument auquel la Haute-Volta est partie, et de prier le gouvernement de bien vouloir tenir le Conseil d'administration au courant de ce qui aura été fait à cet égard;
    • e) d'appeler sur les conclusions qui précèdent l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
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