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Rapport définitif - Rapport No. 137, 1973

Cas no 629 (Nicaragua) - Date de la plainte: 14-MAI -70 - Clos

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  1. 50. Le comité a examiné ce cas pour la première fois à sa session de mai 1971 (voir 124e rapport du comité, paragraphes 88-99, approuvé par le Conseil d'administration à sa 183e session tenue en mai-juin 1971), puis plus récemment à sa session de novembre 1972 (voir 133e rapport, paragraphes 204-221, approuvé par le Conseil, d'administration à sa 188e session, tenue en novembre 1972).
  2. 51. Le Nicaragua a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, de même que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 52. Cette affaire a trait aux allégations selon lesquelles, dans le cadre d'une vague de répression et de persécution contre les organisations syndicales, deux dirigeants du mouvement syndical autonome du Nicaragua (MOSAN), organisation affiliée à la CMT, auraient été arrêtés et incarcérés, et à d'autres allégations selon lesquelles le ministère du Travail serait intervenu avec partialité dans un conflit opposant les travailleurs et l'entreprise "El Porvenir", où les ouvriers auraient été soumis à une dure répression militaire.
    • Allégations relatives aux mesures prises à l'encontre de deux dirigeants syndicaux
  2. 53. A sa session de mai 1971, le comité avait recommandé au Conseil d'administration de demander au gouvernement des informations complémentaires sur sa déclaration selon laquelle les mesures prises contre les deux dirigeants du MOSAN étaient motivées par le fait que ces derniers avaient été surpris à poser des affiches subversives.
  3. 54. Dans sa communication du 10 février 1972, le gouvernement n'apportait aucune information complémentaire et se bornait à reproduire des éléments de réponse déjà examinés par le comité lors de sa session de mai 1971. Dans une communication en date du 4 mai 1972, le gouvernement déclarait qu'à son avis, déterminer si le contenu des affiches était ou non subversif était une question relevant de la souveraineté interne de l'Etat du Nicaragua. Dans une communication du 20 mai 1972, le gouvernement réaffirmait ce point de vue. Aucune de ces communications ne donnait les précisions qu'avait demandées le comité sur le contenu des affiches incriminées.
  4. 55. Lors de sa session de novembre 1972, le comité a cru utile de rappeler que, selon les termes de l'article 8 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ratifiée par le Nicaragua, la législation nationale ne devrait porter atteinte ni être appliquée de manière à porter atteinte aux droits syndicaux. Le comité faisait remarquer que l'absence de réponse précise de la part du gouvernement risquait de laisser planer un doute à propos du respect de cette disposition par le gouvernement. Le comité rappelait aussi que, dans le cadre de la procédure établie pour la protection de la liberté syndicale, la question de savoir si le motif d'une condamnation prononcée relevait d'un délit ou de l'exercice des droits syndicaux n'est pas de celles qui peuvent être tranchées unilatéralement par le gouvernement intéressé, mais que c'est au comité qu'il appartient de se prononcer sur ce point, après examen de toutes les informations disponibles. Dans ces conditions, le comité avait recommandé au Conseil d'administration de prier une fois de plus le gouvernement de lui fournir, le plus rapidement possible, des informations à propos du contenu des affiches incriminées.
  5. 56. Par une communication en date du 22 décembre 1972, le gouvernement manifestait son regret que l'on revienne sur des événements survenus il y avait plus de deux ans, les personnes impliquées dans ces troubles ayant depuis retrouvé leur entière liberté. Le gouvernement déclarait aussi que l'arrestation de deux citoyens nicaraguayens qui commettaient des actes en violation de la loi n'avait aucun lien quel qu'il soit avec la prétendue qualité de syndicaliste des intéressés, et que, conformément aux lois en vigueur, il y avait là une simple action de caractère policier. Le gouvernement rejetait également l'allégation selon laquelle il y aurait eu une vague de répression et de persécution contre les organisations syndicales.
    • Allégations relatives à la situation dans l'entreprise "El Porvenir"
  6. 57. A sa session de mai 1971, le comité avait également recommandé au Conseil d'administration de prier le gouvernement de bien vouloir faire part de ses observations sur cet aspect du cas.
  7. 58. Dans sa communication du 4 mai 1972, le gouvernement affirmait qu'à aucun moment, contrairement à ce qui était allégué dans la plainte, le ministère du Travail n'était intervenu avec partialité et qu'il régnait dans l'entreprise El Porvenir un climat de tranquillité et d'harmonie entre employeurs et travailleurs. Dans sa communication du 20 mai 1972, le gouvernement réaffirmait ce qui était indiqué dans sa communication précédente. Il ajoutait toutefois que le ministère du Travail s'était borné à faire observer les dispositions du Code du travail du Nicaragua, en particulier les articles 302 et suivants contenant des dispositions relatives à la procédure à suivre en cas de différends collectifs de caractère économique et social qui opposent employeurs et travailleurs, et les articles 222 et suivants contenant les normes relatives aux grèves.
  8. 59. Ces articles définissent la grève licite comme étant la grève autorisée par le comité de conciliation compétent ou par le juge du travail, selon les circonstances. La grève n'est autorisée qu'après épuisement de toutes les procédures prévues par le Code en cas de conflit : 1) présentation des revendications à l'inspecteur du travail; 2) rapport de l'inspecteur du travail au ministère du Travail, qui désigne le juge de la grève chargé de constituer le comité de conciliation; 3) comparution des parties devant le comité de conciliation, la non-comparution de la partie ouvrière entraînant l'interdiction du recours à la grève; 4) soumission des propositions patronales au suffrage des travailleurs, la majorité requise étant de 60 pour cent pour accepter les propositions; 5) second scrutin, à la même majorité, pour décider de la poursuite des négociations ou du recours à la grève. Lorsque la majorité voulue se dégage, le comité pourra autoriser la grève, sa décision pouvant cependant être attaquée en appel devant le tribunal supérieur du travail (l'appel étant suspensif et le tribunal statuant dans les quarante-huit heures). Lorsque trente jours se sont écoulés depuis l'octroi de l'autorisation, le différend est soumis à l'arbitrage obligatoire dont la sentence liera les parties pendant au moins six mois. Toute grève déclenchée sans autorisation est déclarée illicite et légalement inexistante et elle entraîne automatiquement la résolution des contrats de travail des grévistes, sans préjudice d'autres sanctions.
  9. 60. Le gouvernement n'ayant pas indiqué dans quelles circonstances le ministère du Travail serait intervenu pour faire respecter les dispositions sur les conflits collectifs et sur la grève auxquels il fait référence, le comité, lors de sa session de novembre 1972, a tenu à rappeler que:
    • a) les allégations relatives à la grève n'échappent pas à sa compétence dans la mesure où elles concernent l'exercice des droits syndicaux;
    • b) il avait précisé antérieurement, en se référant à sa recommandation selon laquelle des restrictions au droit de grève seraient acceptables si elles étaient assorties de procédures de conciliation et d'arbitrage, que cette recommandation ne concernait pas l'interdiction absolue du droit de grève mais la restriction de ce droit dans les services essentiels ou dans la fonction publique, auquel cas il a été établi qu'il devrait être prévu des garanties appropriées pour protéger les intérêts des travailleurs;
    • c) tout en prenant note de l'information contenue dans les observations du gouvernement au sujet des dispositions régissant le règlement des conflits collectifs, le comité relevait que celles-ci limitent le recours à la grève pour l'ensemble des travailleurs et non seulement pour les services essentiels. Considérant donc que les observations formulées à l'alinéa précédent s'appliquaient au cas présent, le comité désirait attirer l'attention du gouvernement sur celles-ci et il recommandait au conseil d'administration d'appeler l'attention du gouvernement sur l'importance que le Conseil d'administration attachait à ces considérations.
  10. 61. Etant donné que le gouvernement ne lui avait pas communiqué d'informations plus précises au sujet des dispositions particulières du Code du travail que le ministre du Travail avait fait observer à l'entreprise "El Porvenir", le comité recommandait au Conseil d'administration de prier le gouvernement de fournir ces informations le plus rapidement possible.
  11. 62. Dans sa communication du 22 décembre 1972, le gouvernement rejette l'allégation relative à la répression militaire contre les travailleurs et nie que les autorités aient fait preuve de partialité dans le règlement du conflit survenu à l'entreprise "El Porvenir". Selon le gouvernement, les dispositions du Code du travail qui régissent le règlement des conflits collectifs de caractère économique et social ainsi que la grève ont été appliquées. Le gouvernement précise que, s'il y a un arrêt concerté du travail sans que les conditions requises par la loi aient été réunies, l'article 323 du Code du travail est appliqué.
  12. 63. L'article en question dispose que, si la grève a lieu sans l'autorisation prévue par le Code (voir plus haut paragraphe 59), l'inspection générale du travail ou le comité de conciliation la déclarera légalement inexistante ou illicite, avec les suites judiciaires que cela comporte.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 64. Le comité fait observer que, dans sa dernière communication, le gouvernement s'abstient à nouveau, malgré les demandes répétées qui lui ont été adressées, de communiquer des informations précises sur les allégations relatives aux mesures prises contre deux dirigeants syndicaux. Quant aux allégations concernant le conflit survenu à l'entreprise "El Porvenir", il semble ressortir de la communication du gouvernement que les travailleurs n'ont pas rempli les formalités requises pour pouvoir légalement recourir à la grève, de sorte que l'autorisation préalable prévue par la loi leur a été refusée. Le gouvernement n'expose toutefois pas les circonstances exactes qui ont donné lieu à ce refus ni les dispositions juridiques précises qui auraient été violées par les travailleurs.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 65. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) d'exprimer son regret de ce que, malgré le temps écoulé, le gouvernement n'ait pas communiqué les informations détaillées demandées par le Conseil sur les faits allégués, et de ce que le comité se trouve ainsi dans l'impossibilité de présenter ses conclusions en toute connaissance de cause;
    • b) de rappeler à nouveau à l'attention du gouvernement les considérations formulées plus haut aux paragraphes 55 et 60; et
    • c) de décider, en raison du fait que les dirigeants syndicaux arrêtés jouissent maintenant d'une entière liberté et qu'il règne à nouveau une situation normale dans l'entreprise "El Porvenir", qu'il n'y a pas lieu de poursuivre l'examen de ce cas.
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