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Rapport intérimaire - Rapport No. 129, 1972

Cas no 685 (Bolivie (Etat plurinational de)) - Date de la plainte: 29-OCT. -71 - Clos

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  1. 282. La plainte de la Confédération latino-américaine syndicale chrétienne est contenue dans une communication du 29 octobre 1971 adressée directement au BIT. Dans une nouvelle communication datée du 1er décembre 1971, les plaignants ont fourni des renseignements complémentaires à l'appui de leur plainte.
  2. 283. La plainte et les renseignements complémentaires ont été transmis au gouvernement qui a communiqué ses observations à leur sujet dans une lettre du 11 janvier 1972.
  3. 284. La Bolivie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, mais non la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 285. Dans sa communication du 29 octobre 1970, la Confédération latino-américaine syndicale chrétienne déclare que le gouvernement continue d'enfreindre les droits les plus élémentaires des travailleurs en Bolivie. Les plaignants signalent que, quelques jours auparavant, trois représentants de la Confédération des travailleurs des industries manufacturières de Bolivie, qui avaient été invités par les plaignants à participer à Buenos Aires à un séminaire sur le bassin du Rio de la Plata, avaient été arrêtés à l'aéroport de La Paz par des forces de la police et de l'armée.
  2. 286. Les plaignants ajoutent que la liste s'allonge sans cesse des dirigeants et des militants syndicaux retenus dans de véritables camps de concentration à l'intérieur du pays, et que beaucoup d'entre eux ont été torturés, assassinés, enlevés sans laisser de trace ou exilés.
  3. 287. Dans une nouvelle communication datée du 1er décembre 1971, les plaignants indiquent que, lors du 6e congrès latino-américain de la CLASC, tenu à Caracas du 21 au 27 novembre 1971, on avait établi des listes des dirigeants syndicaux ayant été privés de leur liberté en Bolivie. D'après les plaignants, ces listes se fondent sur des renseignements dignes de foi réunis dans le pays lui-même. Des exemplaires de ces listes sont fournis par les plaignants.
  4. 288. Les listes dont il s'agit contiennent les noms des seize dirigeants syndicaux suivants qui auraient été privés de leur liberté: Juvenal Garabito (Cochabamba), Carmelo Andrade (du journal Presencia), Jacinto Quispe (secrétaire général de l'ASIB), Roberto Moreira (employé des tribunaux), Erasmo Barrios Villa (« Travailleurs de l'université de Potosi »), Luis Peñaranda (bureau exécutif de la Fédération de la presse), Rodolfo Brum (Radio Nueva America), Victor Michel (délégué à l'Assemblée de Huanuni), Angel Astete (secrétaire de l'Association culturelle des mineurs, San Florencio), Julian Jiménez (Association des mineurs de Colquivi), Juan Flores (secrétaire, Fédération des industries manufacturières de La Paz), Patricio Cuentos (secrétaire, section des conflits, Fédération des industries manufacturières, La Paz), Pedro Cruz (secrétaire, section des conflits, Syndicat du personnel enseignant de l'Etat, Huanuni-Mina Oruro) et Lindo Fernández, David Quiñonez et René Higueras (Confédération des travailleurs de Bolivie (COB)). Les plaignants ont également fourni une liste de femmes qui, d'après eux, auraient été emprisonnées. Cette liste comprend les noms de Edmy Alvarez Daza, dirigeante de la Centrale ouvrière bolivienne, et de Emma de Bacarreza, dirigeante du Syndicat du personnel enseignant de La Paz. Les plaignants indiquent que la maison de cette dernière a été fouillée et que l'intéressée a été emmenée au ministère de l'Intérieur pour y faire des déclarations. Cette situation, poursuivent les plaignants, a duré plusieurs jours pendant lesquels la maison a été surveillée par la police.
  5. 289. Dans sa communication du 11 janvier 1972, le gouvernement déclare qu'à la suite du coup d'Etat d'octobre 1970 le gouvernement de Tórres González, qui manquait de soutien populaire, fut contraint par les partis d'extrême-gauche de suivre une politique qui a instauré un climat de crainte et d'insécurité dans l'ensemble du pays. Un certain nombre d'agitateurs extrémistes sont alors parvenus à s'infiltrer dans le mouvement ouvrier bolivien qui avait à son actif de nombreuses réalisations positives.
  6. 290. Le gouvernement affirme que l'ensemble des organisations de travailleurs bénéficient de toutes les garanties nécessaires à leur développement, mais que certains dirigeants s'étaient politiquement compromis avec le gouvernement qui fut renversé au mois d'août 1971, en substituant des activités politiques à la poursuite d'activités syndicales. Ce sont ces quelques dirigeants syndicaux qui, le 19 août à Santa Cruz, et le 21 août à La Paz, distribuèrent des armes aux travailleurs et aux étudiants qu'ils avaient dressés contre leurs propres frères.
  7. 291. Le gouvernement déclare que le libre fonctionnement des organisations ci-après atteste que la liberté d'association est respectée: la Confédération des travailleurs des industries manufacturières de Bolivie, qui groupe 137 syndicats affiliés; la Fédération syndicale des travailleurs des chemins de fer, qui compte 27 syndicats membres; la Confédération des employés de banque et travailleurs assimilés (32 syndicats affiliés); la Confédération syndicale des conducteurs de Bolivie (27 syndicats membres); la Confédération syndicale des ouvriers du bâtiment (25 syndicats affiliés); la Confédération des travailleurs municipaux (4 syndicats membres), et la Fédération nationale des mineurs, à laquelle sont affiliés 46 syndicats. Au total, déclare le gouvernement, 7 confédérations, 40 fédérations et 39 syndicats et autres organisations fonctionnent normalement.
  8. 292. Le gouvernement ajoute que les quelques anciens dirigeants syndicaux qui avaient été arrêtés lorsqu'il fut prouvé qu'ils avaient participé à des activités dirigées contre la sécurité de l'Etat ont été remis en liberté, et que d'autres passeront en jugement devant les tribunaux ordinaires.
  9. 293. L'objectif de la politique du travail suivie par le gouvernement est l'indépendance du mouvement ouvrier bolivien. Il n'y a aucune raison, déclare le gouvernement, pour que l'Etat intervienne dans les affaires intérieures des syndicats si ceux-ci ne sont pas détournés de leur voie par des anarchistes.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 294. Le comité note que la plainte concerne essentiellement l'arrestation à l'aérodrome de La Paz en octobre 1970 de trois représentants de la Confédération des travailleurs des industries manufacturières de Bolivie, et la détention d'un certain nombre de dirigeants syndicaux dont les noms sont indiqués par les plaignants. Dans sa réponse relative à cette plainte, le gouvernement ne fait aucune allusion aux allégations spécifiques formulées à cet égard par les plaignants, mais se borne à déclarer qu'un certain nombre de dirigeants syndicaux s'étaient compromis avec le gouvernement précédent, qu'un petit nombre de ces dirigeants avaient été arrêtés puis remis en liberté et que d'autres devaient être jugés par les tribunaux ordinaires.
  2. 295. Le comité a souvent souligné que, lorsque des accusations concrètes et détaillées sont formulées, les gouvernements devraient fournir des réponses concrètes et détaillées pour permettre au comité de procéder à une étude objective. Dans le cas présent, le comité, tout en notant les renseignements fournis par le gouvernement au sujet du nombre d'organisations syndicales qui semblent fonctionner normalement en Bolivie, estime qu'il est dans l'impossibilité de présenter une opinion raisonnée au Conseil d'administration au sujet de cette plainte, étant donné que le gouvernement n'a fourni aucun renseignement spécifique en réponse aux allégations relatives à l'arrestation et à la détention des personnes mentionnées ou nommées aux paragraphes 285 et 288 ci-dessus. Dans un certain nombre de cas où il était allégué que des dirigeants syndicaux ou des travailleurs avaient été arrêtés pour des activités syndicales, et où les réponses des gouvernements se limitaient à nier d'une façon générale ces allégations ou prétendaient simplement que les arrestations avaient été opérées en raison d'activités subversives, pour des raisons de sécurité intérieure ou pour des crimes de droit commun, le comité a appliqué la règle qui consiste à prier les gouvernements intéressés de lui fournir des renseignements complémentaires aussi précis que possible sur les arrestations, et plus particulièrement sur les poursuites légales ou judiciaires intentées et leurs résultats, de façon qu'il soit en mesure d'examiner les allégations de manière appropriée.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 296. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de noter les renseignements fournis par le gouvernement en ce qui concerne la situation syndicale en Bolivie;
    • b) d'appeler l'attention du gouvernement sur le principe exprimé au paragraphe 295 ci-dessus et d'inviter le gouvernement à fournir des renseignements détaillés concernant les poursuites judiciaires intentées contre les dirigeants syndicaux mentionnés aux paragraphes 285 et 288 ci-dessus, ainsi que le texte des sentences prononcées et des attendus correspondants;
    • c) de prendre note du présent rapport intérimaire, étant entendu que le comité soumettra un nouveau rapport lorsqu'il aura reçu les renseignements demandés à l'alinéa précédent.
      • Genève, 25 février 1972. Roberto AGO, président.
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