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Rapport définitif - Rapport No. 143, 1974

Cas no 748 (Brésil) - Date de la plainte: 12-FÉVR.-73 - Clos

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  1. 89. La plainte de la Fédération syndicale mondiale figure dans une communication en date du 12 février 1973. Cette plainte a été transmise au gouvernement qui a fait, parvenir ses observations par une communication datée du 29 janvier 1974.
  2. 90. Le Brésil n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. En revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 91. La FSM alléguait que la Confédération nationale des travailleurs des entreprises de crédit (CONTEC), organisation groupant 450.000 membres (employés de banque et de compagnies d'assurance), s'était vu imposer une direction désignée directement par le ministère du Travail à la suite d'un veto prononcé par ce dernier à l'encontre de la direction de la CONTEC, élue démocratiquement par les membres du syndicat.
  2. 92. La FSM a joint à sa communication un extrait de la revue "Folha Bancaria" (novembre-décembre 1972) traitant de cette affaire. Cet article précisait qu'un décret en date du 18 octobre 1972 avait transformé le comité directeur de la CONTEC en un comité d'intervention (Junta interventora) en remplaçant un des dirigeants par un représentant du ministère du Travail. Deux employés de banque furent acceptés par le ministère pour faire partie d'un comité d'intervention composé de trois personnes, mais ils renoncèrent à ces postes, laissant ainsi la confédération sous la seule direction du troisième membre, un fonctionnaire du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale.
  3. 93. L'article ajoutait que les élections pour la désignation d'une nouvelle direction devaient être organisées pour le 8 octobre 1972, mais le ministère du Travail imposa son veto à la candidature de dix personnes présentées sur le projet de liste unique, empêchant ainsi le déroulement des élections. Ce veto concernait, en particulier, l'économiste Puy de Brito, dirigeant de la CONTEC depuis quelques années. Toutefois, la Division de la sécurité et de l'information du ministère du Travail faisait savoir à plusieurs dirigeants syndicaux que ce veto ne signifiait pas que Puy de Brito était considéré comme "un communiste ou une personne corrompue". Selon le journal "L'Etat de Sao Paulo", les opinions de Puy de Brito au sujet de la politique salariale du gouvernement, du Fonds de garantie pour l'ancienneté de service, du Plan d'intégration sociale et de la Centrale syndicale suffisaient pour s'opposer à sa candidature.
  4. 94. Citant un autre journal, la revue "Folha Bancaria" précisait que Puy de Brito était tombé en disgrâce au ministère du Travail. Selon diverses sources et en particulier selon Puy de Brito lui-même, cette disgrâce était due aux opinions qu'il avait exprimées sur divers problèmes sociaux. Il avait notamment réagi contre l'intervention du ministère du Travail dans les affaires du syndicat des employés de banque de Guanabara.
  5. 95. Dans sa communication, le gouvernement déclare que la plainte n'est pas justifiée en raison du droit interne brésilien. Le gouvernement précise que, en vertu de l'article 521 de la Codification des lois du travail, les syndicats ne sont pas autorisés à exercer des activités politiques. Or, ajoute le gouvernement, la direction de la CONTEC a exercé des activités politiques nettement contraires à la loi, en diffusant des doctrines opposées aux institutions nationales. De plus, des groupes activistes d'un parti non reconnu par la loi auraient tenu leur réunion au siège du syndicat. De ce fait, le ministère a dû notifier à la direction de la CONTEC qu'elle ne remplissait pas les conditions légales pour une éventuelle réélection.
  6. 96. Le gouvernement ajoute que, le syndicat n'ayant pu se mettre d'accord sur la présentation de nouveaux candidats aux élections, il a fallu organiser une administration provisoire. Pour composer cet organe intérimaire, le syndicat indiqua deux employés de banque et le ministère du Travail, un comptable. Le fonctionnaire, remarque le gouvernement, était donc minoritaire mais les employés ayant démissionné, le ministère du Travail à dû désigner des remplaçants, en attendant les prochaines élections.
  7. 97. Le gouvernement indique enfin que l'actuelle direction du syndicat a un caractère purement intérimaire, qu'elle n'occupe que des fonctions de routine jusqu'à la réalisation de nouvelles élections et qu'elle résulte d'une situation de crise créée par l'ancienne administration.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 98. Le comité note que, selon le gouvernement, les activités politiques du comité directeur de la CONTEC sont à l'origine des mesures prises à son encontre. Le comité croit devoir rappeler à cet égard qu'il a estimé qu'une interdiction de portée générale, déniant aux syndicats la possibilité de toute activité politique, peut soulever des difficultés du fait que l'interprétation qui serait donnée dans la pratique à de telles dispositions est susceptible de changer à tout moment et de restreindre considérablement les possibilités d'action des organisations. Il semble donc que, sans aller jusqu'à interdire de façon générale toute activité politique aux organisations professionnelles, les Etats devraient pouvoir laisser aux autorités judiciaires le soin de réprimer les abus auxquels pourraient se livrer les organisations qui auraient perdu de vue leur objectif fondamental, qui doit être le progrès économique et social de leurs membres.
  2. 99. Par ailleurs, le comité, dans un certain nombre de cas, a déclaré que les principes de la liberté syndicale n'interdisent pas le contrôle de l'activité interne d'un syndicat lorsque celle-ci constitue une infraction à la loi (qui, en elle-même, ne devrait pas être de nature à porter atteinte aux principes de la liberté syndicale), mais il a estimé qu'il est de la plus haute importance que ce contrôle soit exercé par l'autorité judiciaire compétente, de façon à garantir l'impartialité et l'objectivité de la procédure.
  3. 100. En ce qui concerne les mesures prises à l'encontre du comité directeur de la CONTEC, le comité constate que cette confédération est gérée par un comité désigné par le ministère du Travail depuis plus de quinze mois et que, semble-t-il, des élections n'ont pu être organisées en raison de l'invalidation de certains candidats par ce même ministère.
  4. 101. Le comité tient à rappeler à ce propos que, dans des cas antérieurs concernant le Brésil, il avait estimé que la mise sous contrôle des organisations syndicales comporte un grave danger d'entraîner une limitation des droits des organisations de travailleurs d'élire librement leurs dirigeants et d'organiser leur gestion et leur activité.
  5. 102. Le comité a aussi fait valoir que toute destitution de dirigeants syndicaux, au cas où la législation ou les statuts internes ont été violés, de même que la désignation d'administrateurs provisoires devraient se faire par voie judiciaire. Le comité a également considéré que la mise sous contrôle d'un syndicat doit, pour être admissible, être tout à fait temporaire et viser uniquement à permettre l'organisation d'élections libres.
  6. 103. Le comité a, d'autre part, toujours souligné l'importance qu'il attache au principe selon lequel les travailleurs et leurs organisations devraient avoir le droit d'élire librement leurs représentants et d'organiser leur gestion et leur activité.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 104. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) d'attirer l'attention du gouvernement sur les principes et considérations exposés aux paragraphes 98, 99, 101, 102 et 103 ci-dessus et notamment sur le principe selon lequel les travailleurs et leurs organisations devraient avoir le droit d'élire librement leurs représentants et d'organiser leur gestion et leur activité, les autorités publiques devant s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal;
    • b) d'inviter le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour que des élections libres aient lieu dans les délais les plus brefs, afin de désigner un nouveau comité directeur de la CONTEC;
    • c) d'inviter le gouvernement, conformément à la procédure définie au paragraphe 25 du 127e rapport du comité, à faire connaître, avant la session de novembre 1974 du comité, les mesures qui auront été prises pour permettre le déroulement d'élections libres.
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